L'encyclopédie des Sciences
  Introduction à la cartographie géologique
 
I. Introduction

La cartographie géologique a fait figure ces dernières décennies, en Belgique comme dans beaucoup de pays industrialisés, de parent pauvre de la géologie. Si l'on remonte à l'aube de notre discipline, cependant, que de jalons posés à la suite d'études cartographiques: l'essor de la stratigraphie dans le Bassin de Paris, après que Lavoisier eût, en 1788, publié des cartes accompagnées de coupes dans l'"Atlas minéralogique de France" ou encore la théorie des "systèmes de montagnes" d'Elie de Beaumont, en 1829, suite à ses levés pour la carte géologique de France à 1/500.000...

Il n'est pourtant plus nécessaire d'insister sur le fait qu'une bonne étude cartographique est le support idéal et nécessaire à la réflexion géologique. Avec le risque pour le non-cartographe de ne produire que des théories "désincarnées", privées de leur support matériel et des contraintes multiples qu'amène le terrain.

Une période de renouveau pour la cartographie géologique semble pourtant se dessiner. C'est que certains décideurs ont compris qu'une gestion efficace de l'environnement ne se ferait pas sans une bonne connaissance du sous-sol. Il suffit d'évoquer les problèmes de pollution, de gestion des déchets ou des ressources en eau pour saisir l'importance d'une mise à jour continuelle des cartes géologiques. Et dans le cas de notre pays, le problème est encore plus aigu, puisque la plupart de nos cartes datent du début de ce siècle. L'actuelle campagne de cartographie géologique de la Wallonie correspond d'ailleurs à ce besoin essentiel.

Au moment de commencer l'apprentissage de la cartographie géologique, il n'est pas inutile de jeter un regard rétrospectif et de s'interroger sur les travaux de nos prédécesseurs. La Belgique possède en effet une tradition plus que séculaire dans ce domaine et peut faire figure de précurseur.

On peut distinguer dans cette histoire, six étapes majeures:

  • la carte de la France et des Pays-Bas de d'Omalius d'Halloy (1822) (Fig. II.1);
  • la carte de la Belgique d'André Dumont (1853-1855);
  • des feuilles à 1/20.000e de la Commission de la Carte géologique (1878-1885) (Fig. II.2);
  • la carte à 1/40.000e de la Commission géologique (1890-1919) (Fig. II.3);
  • des feuilles à 1/25.000e du Conseil Géologique (1947-1977) (Fig. II.4);
  • les cartes géologiques de la Wallonie et de la Flandre (1989-).

Les grands traits de l'organisation des services de levé, de la publication sont exposés dans Boulvain (1993). Je ne veux en reprendre ici que les aspects méthodologiques, en insistant surtout sur la notion suivante: que cartographier et comment le représenter?

II. Un bref historique

1. JEAN-BAPTISTE JULIEN d'OMALIUS d'HALLOY (1783-1875)

Jean-Baptiste d'Omalius d'Halloy

Sa carte, dressée sur la demande du gouvernement de Napoléon, et imprimée à Paris repose sur des levés effectués durant la période 1803-1814. Son échelle est approximativement le 1/4.000.000.

L'échelle stratigraphique était la suivante:

  • "Terrains pyroïdes comprenant les produits des volcans actuels ainsi que les terrains basaltiques et trachytiques.
  • Terrains mastozootiques comprenant tous les terrains postérieurs à la craie dont l'origine acqueuse n'est pas contestée.
  • Terrains crétacés comprenant la craie, ainsi que les tuffeaux, les sables et les argiles qui la précèdent immédiatement.
  • Terrains ammonéens comprenant le Calcaire Jurassique, le Calcaire Alpin, le Lias, le Quadersandstein et le Muschelkalk.
  • Terrains pénéens comprenant le Bunter Sandstein, le Zechstein, le Macigno et le Todte Liegende.
  • Terrains primordiaux comprenant les terrains de transition et les terrains primitifs."

Pour la Belgique, la carte distinguait au sud d'une ligne Ath-Genappe-Liège les "terrains primordiaux" et au nord de cette ligne, les "terrains mastozootiques". Deux petits bassins crétacés étaient représentés: celui de Mons et celui de la Hesbaye. Enfin, en Lorraine belge étaient figurés les "terrains ammonéens" (Fig. II.1).

d'Omalius entendait par "terrains primordiaux" des terrains dont les "(...) couches présentent, presque toujours, des positions inclinées, bouleversées et souvent verticales." (1828, p. 7). Il jugeait inutile d'y distinguer plusieurs subdivisions, parce que "tous ces terrains présentent le même aspect, la même tendance à se couvrir de landes, de pâturages ou de forêts, la même difficulté à produire du froment; caractères qui se retrouvent également sur les ardoises de l'Ardenne, sur les granites du Limousin et sur les roches talqueuses des Alpes." (1828, pp. 11-12).

En effectuant des regroupements de formations, il évitait aussi dans une certaine mesure des problèmes de corrélation stratigraphique et de variations d'épaisseur: "(...) en admettant toutes les subdivisions établies dans les traités de géognosie, on multipliait infiniment les obstacles résultans du défaut d'observations suffisantes pour une vaste étendue et de la difficulté de rapporter à des termes communs les différens systèmes qui existent dans des pays éloignés. D'un autre côté, il arrive quelquefois que des terrains qui ont présenté de très-grands développemens, dans certaines contrées, se resserrent à tel point, dans d'autres, qu'il n'est plus possible d'indiquer leur existence sur une carte générale." (1828 pp. 4-5).

Les terrains ammonéens comprenaient le Muschelkalk, le Quadersandstein, le Lias et le Calcaire jurassique. La réunion de ces "systèmes de terrains" était dictée par leur communauté d'affleurement.

Le troisième ensemble était formé par la craie, avec les tuffeaux, les marnes et les argiles qui se trouvent dessous. Ici encore, c'est la géographie qui autorisait leur regroupement: ces terrains "(...) se distinguent des contrées voisines par des propriétés physiques particulières (...)." (1828 p. 18).

Enfin, la carte réunit dans le quatrième groupe tous les terrains sédimentaires postérieurs à la craie, dont certains contiennent des restes de mammifères ("mastozootiques").

En ce qui concerne le problème de la représentation cartographique des unités géologiques, d'Omalius, en traçant les limites probables des terrains, utilisait déjà une méthode moderne: il la justifiait par "(...) l'imperfection du système qui consiste à indiquer, par des signes particuliers et isolés, les substances minérales qui existent dans certains lieux, (...) la meilleure manière de présenter des résultats à l'oeil était d'indiquer les diverses formations au moyen de teintes plates." (1828, pp. 4-5).

Relevons encore, dans le Mémoire, ce plaidoyer pour la carte géologique: "Deux points de vue principaux semblent conduire également à la division d'un pays en régions physiques déterminées par la nature du sol; l'un le considère géologiquement, c'est-à-dire par époques de formation; l'autre ne l'envisage que sous le rapport de sa nature minéralogique, ou plutôt chimique. On croirait, au premier aperçu, que ce dernier moyen est celui qui atteint le mieux le but, puisqu'il semble le plus en rapport avec l'action que certaines terres exercent sur la végétation; mais d'un autre côté, les différens états d'agrégation des substances qui composent le terrain, la position physique du sol, et d'autres circonstances qui tiennent aux époques de formation, exercent souvent une influence aussi marquée. (...) On sentira aisément, au surplus, que la considération géologique est bien plus avantageuse pour les progrès de la science, qu'elle offre beaucoup plus d'intérêt à la curiosité générale, et que, laissant la faculté de réunir, selon les circonstances, plusieurs systèmes en un seul groupe, elle permet bien mieux de se passer des observations détaillées qu'exigeraient les changemens de nature si fréquens dans les substances dominantes d'un terrain formé à la même époque." (1828 pp. 2-3). On ne peut trouver meilleur argument pour préférer une carte géologique à une simple carte lithologique. Nous y reviendrons plus loin ("Interprétation stratigraphique: les unités cartographiées")

Fig. II.1: Reproduction de la carte de d'Omalius d'Halloy.

2. ANDRE HUBERT DUMONT (1809-1857)

André Dumont

Dumont utilisera d'abord comme fond topographique la carte à 1/86.400 de Ferraris, ensuite la nouvelle carte à 1/80.000 éditée par Van der Maelen et enfin, la carte à 1/20.000 en 250 feuilles, de ce même établissement. On peut résumer l'ampleur du travail accompli par Dumont pour le levé de sa carte par quelques chiffres. En 13 ans, il avait parcouru environ nonante mille kilomètres et effectué 20917 relevés géologiques.

En ce qui concerne la publication de la carte, l'échelle de 1/160.000 sera choisie.

"La carte géologique comprendra: 1° le figuré des villes et des bourgs, les clochers de toutes les communes, et les points les plus remarquables, tels que hameaux, châteaux, fermes, chapelles, signaux, moulins, etc.., les chemins de fer, les grandes routes, les chemins vicinaux, les canaux, les cours d'eau, les forêts, les tourbières et les prairies; 2° les mouvements du terrain; 3° les limites géologiques." (Renier, 1949, pp. 150-151).

La carte à 1/160.000 paraîtra en 1853, quatre ans après une "carte géologique de la Belgique et des provinces voisines" à l'échelle du 1/800.000, englobant la moitié de la partie orientale du Bassin de Paris et toute la région rhénane jusqu'à Strasbourg. D'une certaine façon, cette carte répondait aux critiques adressées à Dumont à propos des ébauches de sa carte à grande échelle.

Quelles étaient ces critiques? Elles concernaient en fait l'échelle stratigraphique mise au point par Dumont, essentiellement sur base géométrique, car il se méfiait du critère paléontologique. Il avait créé, pour les unités stratigraphiques dont l'équivalent étranger n'était pas évident, des noms locaux (extrait):

Terrain anthraxifère

  • système houiller
    • ampélite, psammite, schiste, houille
  • système condrusien calcareux
    • calcaire à crinoïdes, dolomies et calcaire à Productus, silex, anthracite
  • système condrusien quartzoschisteux
    • psammite grisâtre, macigno, anthracite
    • schiste grisâtre, calcschiste, calcaire, oligiste oolithique
  • système eifelien calcareux
    • calcaire et dolomie
  • système eifelien quartzoschisteux
    • schiste gris fossilifère, calcschiste et calcaire argileux; oligiste oolithique
    • poudingue, psammite et schiste rouge

Terrain rhénan

  • système ahrien
    • grès, psammites et schistes gris bleuâtre
  • système coblentzien
    • grès et phyllades gris bleuâtre
  • système gedinnien
    • poudingue, grès verts et phyllades rouges, verts ou aimantifères

Terrain ardennais

  • système salmien
    • quartzophyllades, phyllades ottrélifères et oligistifères
  • système revinien
    • quartzites et phyllades gris bleuâtre
  • système devillien
    • quartzites blancs ou verts et phyllades rouges, verts ou aimantifères.

Plusieurs de ses contemporains reprochaient à ce système l'impossibilité de raccorder la stratigraphie belge à celle des pays voisins Ces raccords seront donc fait par Dumont lui-même dans sa carte à petite échelle, après plusieurs excursions dans les pays voisins. Relevons, dans un rapport de d'Omalius à la Classe des Sciences, le 1er décembre 1848, la justification suivante de la position de Dumont (Renier, 1949, p. 726: "(...) les rapprochements hasardés ont fait plus de tort à la science que la multiplication des distinctions (...)."

Une autre particularité de la carte à 1/800.000 était de faire figurer les formations tertiaires et secondaires situées sous les limons hesbayens et les sables campiniens, au contraire de la carte à 1/160.000, appelée dès lors "carte du sol", puisque celle-ci ne figurait que les terrains affleurants. Dumont demandera par la suite à étendre le principe de tracé des formations sous recouvrement superficiel à sa carte à grande échelle et en 1855, un A.R. l'autorisait à publier une "carte du sous-sol" à 1/160.000.

Jetons maintenant un regard sur les tracés de la carte du sous-sol. Ces tracés sont déjà proches de notre connaissance actuelle de la Belgique. On peut donc dire que c'est André Dumont qui a fixé la disposition des principales unités géologiques de notre pays. C'est à lui que l'on doit la reconnaissance des relations géométriques des grands synclinoria et des massifs anciens. Seuls manquent le Calédonien du Massif du Brabant et la bande silurienne du Condroz. Bien sûr, les structures ne sont pas tracées dans le détail (le Massif de Philippeville, par exemple, est figuré d'une seule teinte, sans qu'apparaissent les nombreux plis qui le constituent) et aucune faille n'apparaît, mais il s'agit sans conteste d'un modèle pour l'époque.

Son oeuvre a d'ailleurs suscité l'enthousiasme chez nombre de ses contemporains et de ses successeurs. Je n'en voudrai pour preuve que le texte qui suit. Rares ont été les géologues à susciter une telle unanimité...

"Créez chacun votre système,
0 savants! l'éternel problème
Attend un Oedipe nouveau:
L'énigme qu'on nomme le monde
Veut sortir de la nuit profonde
Où s'enveloppe son berceau.
Trésors, force, travail, richesse,
Qu'il faut bien que l'homme connaisse,
Pour savoir son propre destin;
Pour lui prophétiques entrailles,
Où, sur d'authentiques médailles,
Il lit un oracle certain.
A l'oeuvre! de son premier âge
Racontez le fameux naufrage:
Les eaux s'élevant jusqu'au ciel,
Et, dans l'orgueil de leurs conquêtes,
Marquant au front les plus hauts faits
Sous ce déluge universel.
Mais dans ce noir pays des ombres,
Colomb de ces régions sombres,
Quel mortel voudra pénétrer?
Et, dans ce champ de découvertes,
Où trouver des routes ouvertes
Qui ne puissent pas l'égarer?
Ou bien la lave enfin durcie,
Et la terre, écorce épaissie,
Montée au rang des éléments;
Et des volcans l'affreux tumulte,
Dont la joie infernale exulte
Dans d'immenses soulèvements.
Il n'en est point! qu'à l'aventure
Il guide sa marche peu sûre,
Au sein du ténébreux séjour:
Dans l'épaisse et noire mêlée,
En vain, comme Ajax d'Oïlée,
Invoquant la clarté du jour!
Et, sur tous ces grands cataclysmes,
Les absurdes anachronismes
Quittés et repris tour à tour;
Dans ses changeantes destinées,
Le monde vieux, rempli d'années,
Ou jeune, à peine éclos au jour.
Que, sans regarder en arrière,
Il s'avance dans la carrière,
En l'arrosant de ses sueurs!
Qu'épris de la vérité seule,
Il sache broyer sous sa meule
Le prisme aux trompeuses lueurs!
Mais non! qu'au lieu de l'hypothèse,
La vérité seule vous plaise,
Et vous révèle son secret!
N'avez-vous donc pas, pour y lire,
La page où Dieu voulut l'écrire,
Comme Dieu, Dieu seul écrirait?
Qu'à cette tâche poursuivie
Il jette fièrement sa vie,
Souffrant la douleur et la faim;
Et, parmi tant d'âpres misères,
Ses pieds saignant dans leurs lanières,
Meurtris aux pierres du chemin!
Granits, basaltes et calcaires,
Terrains primitifs, tertiaires,
Dépôts l'un sur l'autre couches;
Et ces squelettes gigantesques,
Reconstruisant leurs corps grotesques,
Dès que vous les avez touchés;
O ciel! quel ange l'accompagne?
C'est sa douce et frêle compagne
Qui suit ce voyageur errant;
Sa noble et courageuse femme,
Dont le coeur généreux s'enflamme
Au contact d'un dessein si grand;
De tant d'espèces disparues
Ces ombres, vers vous accourues
Des antres profonds de la mort;
Et ces marbres, fange pétrie,
Où, pour nous attester la vie,
Tout un monde s'incruste et dort?
Dessein effrayant la pensée!
De l'orgueil folie insensée
Pour quiconque n'a pas la foi!
De l'âme mouvement sublime
Qui nous fait héros ou victime;
Et le héros, Dumont! c'est toi.
Ces métaux, brillantes merveilles,
Pendant les éternelles veilles,
Produit lent d'un travail obscur,
Que, dans son sein, la terre avare
Tantôt mêle et tantôt sépare:
Le plomb vil et l'or le plus pur,
Te nommer, c'est dire ta gloire;
Laissons maintenant la victoire
De ses lauriers parer ton front;
La palme offerte à ton génie
N'a point d'éclat que ne défie
L'éclat plus brillant de ton nom.
L'argent, le fer, le zinc, le cuivre,
Tous ceux enfin que va poursuivre
De l'homme la cupide ardeur;
Et, plus qu'à demi consumées
Ces vastes forêts abîmées
Dans l'insondable profondeur?
Heureuse et fière la Belgique!
Dans sa carte géologique
Que de titres éblouissants!
De sa richesse séculaire
C'est le magnifique inventaire
Dressé par l'un de ses enfants.
Baze, "La carte géologique de Belgique", Ann. Soc. libre d'Emulation de Liège, 1857, pp. 119-122

3. JULES GOSSELET

Jules Gosselet, professeur à Lille, publiera en 1888 une carte accompagnant son célèbre mémoire, qui tout en étant relativement proche de celle de Dumont, en corrigeait certaines lacunes.

Cette carte, à l'échelle du 1/320.000, intitulée "Carte géologique des terrains primaires de l'Ardenne" figure le Silurien du Brabant et du Condroz ainsi que plusieurs failles importantes (failles Eifelienne et du Midi, faille bordière nord du Massif de Philippeville, faille de Theux, etc...). La stratigraphie beaucoup plus détaillée, permettait une représentation plus fine des structures tectoniques: dans le Massif de Philippeville, par exemple, apparaissaient déjà plusieurs anticlinaux à coeur givetien, séparés par des synclinaux frasniens. Les unités cartographiques utilisées, les "assises" sont des unités à caractère mixte litho-biostratigraphiques, de lithologie plus ou moins homogène et comprenant les mêmes fossiles.

Voici l'échelle stratigraphique utilisée par Gosselet:

  • "Houiller
  • Carbonifère
  • Famennien
  • Frasnien supérieur
  • Frasnien inférieur
  • Givetien
  • Eifelien
  • Assise de Hierges
  • Assise de Burnot
  • Assise de Vireux
  • Assise de Montigny
  • Assise d'Anor
  • Assise de Saint-Hubert
    • Phyllades de la Forêt
    • Schistes de Paliseul
    • Schistes de Bertrix
    • Grès de Libramont
    • Schistes de Ste Marie
    • Schistes de Bastogne
    • Quartzophyllades d'Aiglemont
  • Assise d'Oignies
  • Assise de Mondrepuits
  • Assise d'Haybes
  • Assise de Fooz
  • Silurien du Brabant
  • Assise de Givonne
  • Assise de Serpont
  • Assise de Bogny
  • Assise de Deville
  • Assise de Revin
  • Assise de Fumay
  • Assise de Vieil Salm
  • Assise des Hautes Fanges"

On remarquera que cette échelle stratigraphique était développée de manière inégale suivant les étages, reflétant en cela les intérêts particuliers du célèbre géologue.

4. LA CARTE GEOLOGIQUE A 1/20.000 (1878-1885)

Une commission sera instituée par le Gouvernement de l'époque afin d'élaborer un cadre au travail des géologues. Le premier point délicat qui fera l'objet de controverses est l'échelle de publication de la carte. Si tous les membres de la commission estimaient que le levé devait se faire à 1/20.000 (la plus grande échelle disponible à l'époque), une alternative se dégageait soit pour une publication à 1/40.000, soit pour une publication à 1/20.000. Les arguments des tenants du 1/40.000 étaient le coût d'achat moindre de l'ensemble de la carte et le risque d'erreurs trop apparentes d'un tracé à 1/20.000; les arguments des partisans du 1/20.000 étaient la possibilité de représentation d'un plus grand nombre d'affleurements et de limites stratigraphiques. L'échelle du 1/20.000 l'emportera à la suite d'un vote.

La tactique de levé qui sera adoptée est la suivante: il s'agira d'études "monographiques": un étage levé dans toute l'étendue du pays par un seul et même géologue qui met au point sa propre légende stratigraphique. Un autre point important était la réunion sur une seule carte des données de la carte du sol et de la carte du sous-sol. Il semble d'ailleurs que cette nouveauté ait été dictée plus par un soucis d'économie que par des arguments scientifiques. La mise en oeuvre de la fusion des deux cartes a fait l'objet de nombreux essais et discussions:

  • "1° Carte du sol et carte du sous-sol (avril 1878). Les affleurements, les phtanites, les détritus en couleurs de fantaisies. Les assises en couleur de fantaisie, le sable en gros bleu, les affleurements en teinte neutre.
  • 2° Carte du sous-sol (mai 1878). Assises en couleurs de fantaisies. affleurements en teinte neutre, formations de surface en grisés de teinte neutre.
  • 3° Carte du sous-sol (juin 1878). Etages en teintes caractéristiques, assises en grisés rectilignes; formations de surface et affleurements en teinte neutre.
  • 4° Carte du sous-sol (juillet 1878). Assises en teintes plates résultant de la combinaison des grisés d'assise avec la teinte de l'étage, formations de surface et affleurements en teinte neutre.
  • 5° Carte du sous-sol (août 1878). Etages en teintes caractéristiques, assises limitées par des liserés, formations de surface et affleurements en teinte neutre.
  • 6° Carte du sous-sol (septembre 1878). Diffère de la précédente par les limites pointillées et non pas plates.
  • 7° Carte du sol (17 septembre 1878). Les assises du sous-sol limitées par des liserés pointillés. (...).
  • 8° Carte du sous-sol (21 septembre 1878). Etages en teintes caractéristiques. Formations de surface en teinte neutre grisée ou en grisés de teintes nuancées, affleurements et les limites d'assises en teintes d'assises.
  • 9° Carte du sol (fin septembre 1878). Les affleurements et les limites d'assises en teintes caractéristiques d'étages, les assises distinguées par des notations littérales convenablement placées pour empêcher toute confusion, formations de surface en teintes plates légères."

Quelques explications complémentaires sur ces données: à partir de l'essai 3, la commission jugea que les teintes d'étages avaient une importance plus grande que les teintes d'assises et qu'elles devaient être proche de celles que Dumont avait consacrées par un long usage. Les assises étaient dans ce cas chacune distinguée par une couleur superposée à la teinte fondamentale d'étage, sous forme de grisé pour l'essai 3, en teinte plate mélangée à la teinte d'étage pour l'essai 4.

Ces teintes d'assises, assez curieusement, répondaient à la logique suivante: dans chaque étage, la première assise était rouge, la deuxième bleue, la troisième orangée, etc... Les essais 5 et 6 reprenaient la même logique, mais avec les assises limitées par des liserés de couleur. L'essai 7 donnait lui la priorité à la carte du sol, avec des assises en sous-sol limitées par des pointillés. L'essai 8 est comparable à l'essai 6, mais avec les affleurements en teintes d'assise et les formations superficielles en grisés, de manière à alléger la carte. Enfin, l'essai 9 était destiné à faciliter la comparaison avec la carte de Dumont où n'étaient figurés que les étages.

Précisons ce que les géologues de l'époque entendaient par "formations superficielles":

  • "Les traînées (...): les phtanites (...), les détritus psammitiques (...).
  • Les affleurements des sables déposés par les eaux minérales (...)
  • Les affleurements des argiles grossières (...)
  • Les affleurements des minerais de fer (...)
  • Les argiles plastiques (...)
  • Le tuf (...)
  • Les cailloux (...) avec indication de leur espèce.
  • (... les alluvions torrentielles, (...) la terre à brique.
  • Les alluvions fluviales (...)."

Chacun de ces ensembles nécessitait évidemment une surcharge ou un figuré spécial. Devaient figurer également sur les cartes le dessin des affleurements, la profondeur du sous-sol sous les formations superficielles, la direction des couches, la direction du pendage et sa valeur.

La technique de levé, exposée par Dupont, comprenait un premier parcours du pays pour l'établissement d'échelles stratigraphiques au niveau des assises, puis un deuxième parcours, le levé proprement dit " (...) en suivant chaque route, chaque ravin, en coupant même parfois à travers champs (...) exécuté de la façon suivante:

  • "1° Levé de tous les affleurements.
  • 2° Détermination exacte, (...) du niveau que chacun de ces affleurements occupe dans l'échelle stratigraphique;
  • 3° Relevé des inclinaisons des couches, quand l'allure de celles-ci s'y est prêtée. (...).
  • 4° Relevé des directions des couches;
  • 5° Observation du sol détritique vierge, quand la surface est couverte de dépôts meubles.
  • 6° Observation des changements de relief en coïncidence avec les changements de nature des roches. (...).
  • 7° Sondages dans les terrains meubles du sol et du sous-sol. Ces sondages ont été multipliés de 100 mètres en 100 mètres le long de tous les chemins, (...).

Si l'on examine l'échelle stratigraphique de la planchette de Sautour, au sud du Massif de Philippeville, on peut lire pour le Givetien:

"ETAGE GIVETIEN. (G)

CALCAIRE CORALLIEN ET CALCAIRE AMORPHE"

Suivent deux plages de couleur, l'une pour les affleurements, en teinte plate, l'autre pour les limites théoriques, en hachures. Ensuite, des symboles typographiques pour les subdivisions:

"Gm. Calcaire stratifié à Stromatopores, Alvéolites, Favosites, etc. (Marbre florence).

Gn. Calcaires stratifiés, bleus et lilas, grenus et subcompactes, parfois schistoïdes.

Gq. Calcaire oolithique.

G. Calcaire du sous-sol atteint à la tarière.

Mc. Murchisonia coronata.

SB. Stringocephalus Burtini.

Cq. Cyathophyllum quadrigeminum."

On pourrait poursuivre avec le Frasnien, qui comprend 8 types de teintes et hachures et 11 subdivisions et le Famennien, avec 4 types de teintes et hachures et 4 subdivisions. Il s'agit donc effectivement, tant pour l'échelle stratigraphique que pour les tracés, d'un travail détaillé, bien typographié. La représentation de la taille réelle des affleurements est claire et il s'y ajoutent fréquemment des données de direction et de pendage (Fig. II.2).

Fig. II.2: Extrait de la carte 1/20.000 de Sautour, par E. Dupont & J.C. Purves (1885). On remarquera la représentation des affleurements (en teintes vives), l'extrapolation des tracés (en traits soulignés de couleurs) et les formations superficielles (en jaune).

Des problèmes politiques amèneront cependant l'arrêt des levés, l'éviction de Dupont et la réorganisation des services.

Edouard Dupont

Retenons de cette première tentative de réalisation d'une carte géologique détaillée de la Belgique (Fig. II.5) les caractéristiques suivantes: il s'agissait de cartes très détaillées, à dominante lithostratigraphique. Ces cartes figuraient les tracés des formations superficielles aussi bien que ceux du sous-sol. Un gros effort de rigueur avait été consenti pour séparer l'observation de l'interprétation (représentation des affleurements, des observations géométriques, création d'une rubrique spéciale pour le "substrat atteint à la tarière") et enfin, la distribution du travail était basée sur le principe monographique, permettant à un même géologue de cartographier une même unité stratigraphique dans l'ensemble du pays.

5. LA CARTE GEOLOGIQUE A 1/40.000 (1890-1919)

La nouvelle organisation fonctionnera régulièrement de 1890 à 1903 et aboutira à la réalisation de la presque totalité de la couverture à 1/40.000. Chaque collaborateur s'engage à remettre une carte à 1/20.000, comprenant les affleurements, les limites géologiques, etc... et également une carte à 1/40.000, destinée à la publication, d'après les indications du Conseil. On y demande également un texte explicatif, avec article spécial pour chaque assise et des coupes géologiques justificatives. Des échantillons de roches et fossiles seront déposés au Musée d'Histoire naturelle. Le délai habituel de réalisation est de l'ordre d'une année par planchette.

Michel Mourlon, cheville ouvrière de la carte à 1/40.000.

Pourquoi cette dissociation entre la carte à 1/20.000 et la carte pour publication à 1/40.000? C'est que la nouvelle organisation ne fonctionnant pas sur le principe du levé monographique, il devenait obligatoire, afin d'assurer l'homogénéité de la carte, que tous les collaborateurs utilisent la même échelle stratigraphique. Cette échelle devait donc être élaborée par le Conseil de Direction et "imposée" aux collaborateurs. Ceux-ci gardaient par contre toute leur liberté pour leur carte à 1/20.000. Voici un extrait de cette légende stratigraphique:

"-Etage Frasnien (Fr)-

Bord sud du bassin de Dinant

  • Fr2. Schistes de Matagne, très feuilletés, foncés; Cardiola retrostriata, petites goniatites ferrugineuses. Schistes de Barvaux, ordinairement violets; Spirifer Verneuilli à ailes allongées. Calcaires subordonnés.
  • Fr1p. Marbre rouge et gris; Rhynchonella cuboïdes, comme dans tout l'étage.
  • Fr1o. Calcaires stratifiés, massifs ou noduleux.
  • Fr1n. Dolomie.
  • Fr1m. Schistes divers, assez souvent noduleux. A la base, Goniatites intumescens, Receptaculites Neptuni, Camarophoria formosa, gros Spirifer; quelquefois oligiste oolithique.

Bord nord du bassin de Dinant et bassin de Namur

  • Frd. Assise de Franc-Waret; schistes divers.
  • Frc. Assise de Rhisnes; calcaires massifs, schistoïdes ou noduleux.
    • Frcn. Marbre de Golzinne.
    • Frcm. Marbre Florence.
  • Frb. Assise de Bovesse. Schistes, calcaires et dolomie; Aviculopecten Neptuni, Spirifer Bouchardi.
    • Frbp. Marbre Ste Anne.
    • Frbo. calcaires.
    • Frbn. Dolomies.
    • Frbm. Schistes
  • Fra. Assise de Mazy. Roches rouges et poudingues. Schistes gris verdâtre et bleuâtre et macigno avec oligiste oolithique; gros Spirifer."

On remarquera que seules les aires septentrionales font l'objet d'une véritable stratigraphie, avec distinction d'assises successives, tandis qu'au bord sud du bassin de Dinant, on se contentera encore de cartographier les lithologies.

Du point de vue de la publication, après quelques tentatives de représentation des affleurements en taille réelle, on adoptera la proposition suivante: teintes plates pour les formations du sous-sol qui affleurent, pour les alluvions modernes des vallées, les dépôts poldériens, les dunes et certaines tourbières; affleurements et sondages représentés uniquement par leurs lettres stratigraphiques.

Cette figuration, à laquelle s'habitueront des générations de géologues, est nettement en retrait, par soucis de simplicité et de moindre coût, par rapport à la figuration de la carte à 1/20.000 (Fig. II.3). On perd en effet l'information sur la géométrie et la taille des affleurements, la direction et le pendage des couches et l'extension de la plupart des formations superficielles. Van den Broeck dira même: "[mon] regret est de voir absolument méconnus et sacrifiés les tracés du sol, desquels une bonne carte géologique tire une partie importante de sa valeur scientifique et utilitaire."

En conclusion, par rapport à la carte précédente à 1/20.000, on peut dire que la carte à 1/40.000 est moins détaillée dans sa légende stratigraphique, que sa tendance est plus délibérément chronostratigraphique (on cartographie des assises, unités plus ou moins contemporaines, grâce à des fossiles-guides) et que l'on a sacrifié la représentation de la plupart des formations superficielles, la représentation des affleurements et celle des données géométriques. Enfin, la distribution du travail entre les géologues était effectuée par planchette et non plus par unité stratigraphique.

De nombreuses années s'écouleront avant qu'une nouvelle édition de la carte géologique de la Belgique soit envisagée. L'activité du Conseil géologique se concentrera principalement sur la révision de la "Légende générale de la carte géologique détaillée de la Belgique", publiée en 1929 et sur la publication d'une annexe (1930) où seront récapitulées les "Ressources du sol belge en matières utiles".

Fig. II.3: Extrait de la carte 1/40.000 de Sautour-Surice, par H. Forir (1899). Les affleurements ne sont représentés que par des sigles et les terrains superficiels ne sont plus figurés.

6. LES CARTES A 1/25.000

Dans l'immédiat après-guerre, il sera décidé de remettre en train les travaux de la carte géologique. On reviendra assez rapidement sur le problème de la figuration de la couverture, sacrifiée dans la carte à 1/40.000 où n'étaient cartographiées que les formations quaternaires dont les limites pouvaient se déduire de la morphologie actuelle. On conviendra donc d'améliorer particulièrement ce type de représentation.

P. de Béthune, également impliqué dans le problème de représentation du Quaternaire avec la réalisation de sa carte à 1/500.000 pour l'Atlas de Belgique, insistera sur la nécessité de trois approches différentes: "Dans le nord du pays et la Vallée flamande, le Quaternaire doit être cartographié et constitue même l'essentiel de la cartographie. La moyenne Belgique forme au contraire une région où on doit discuter la découverture éventuelle du Quaternaire. (...) Enfin, en Haute-Belgique, le Quaternaire ne constitue qu'un mince placage qu'on pourrait représenter par de simples surcharges." [Procès verbaux des séances du Conseil géologique]. La pierre d'achoppement, objet de multiples discussions, restera la représentation des limons et des sables de couverture: à partir de quelle épaisseur devaient-ils être figurés sur une carte géologique? Aucune règle générale n'émergera finalement de la discussion...

Plusieurs solutions seront cependant envisagées pour résoudre le problème des tracés de la couverture, notamment l'impression de deux cartes, sol/sous-sol, dont l'une serait imprimée sur calque ou bien encore sous forme d'un cartouche à échelle réduite. Il va de soi que dans les zones à fort développement de Quaternaire, c'est le "sous-sol", Tertiaire, Secondaire ou Primaire qui serait figuré à échelle réduite.

En ce qui concerne l'échelle générale des cartes, il semblait normal de travailler à une échelle plus grande que l'édition précédente. Les fonds topographiques étaient maintenant à l'échelle du 1/25.000 et du 1/50.000. C'est donc le 1/25.000 qui sera retenu, avec minute à 1/10.000. Par ailleurs, on décidera de représenter les affleurements par des dessins rappelant leur géométrie.

Il sera demandé aussi aux auteurs de tenir compte de la topographie dans leurs tracés ("V" des vallées), de fournir des listes paléontologiques par formation, et de rédiger un livret-guide calqué sur le schéma suivant: introduction; stratigraphie et paléontologie; tectonique; matières utiles; indications bibliographiques fondamentales.

Examinons maintenant les cartes publiées (Fig. II.5): il s'agit de:

  • R. Marlière: Beloeil-Baudour (139)
  • R. Marlière: Jurbise-Obourg (140)
  • R. Marlière: Quiévrain-Saint-Ghislain (150)
  • R. Marlière: Mons-Givry (151)
  • R. Marlière: Roisin-Erquennes (161)
  • P. Fourmarier: Louveigné-Spa (148)
  • E. Asselberghs & F. Geukens: Harzé-La Gleize (159)
  • F. Geukens: Stavelot-Malmédy (160)
  • R. Legrand: Saint-Vith-Schönberg (233)

Ces cartes ne forment pas un ensemble homogène: il s'agit bien sûr de contextes géologiques très différents, mais on peut attribuer aussi cette inhomogénéité à la quasi-absence de critères généraux définis par le Conseil.

Le groupe de cartes levées et tracées par Marlière se distingue notamment par la figuration en surcharge des limons et de leur épaisseur et par le tracé des isohypses du socle paléozoïque et de certaines failles. Il est à noter que les zones situées en dehors du territoire national sont également représentées. Les unités cartographiées sont nettement lithostratigraphiques, avec description précise des faciès lithologiques.

La carte de Fourmarier (Fig. II.4) représente également les limons par surcharge, de même que certains débris de roche. Les poches sableuses tertiaires sont figurées en teinte plate, avec distinction des parties exploitées et de leur extension probable. Un schéma tectonique est adjoint en cartouche. Les unités cartographiées possèdent un caractère mixte. Il s'agit d'unités lithostratigraphiques "Frasnien (F): Calcaire supérieur", mais aussi d'unités d'apparence chronostratigraphique: "Viséen supérieur (V3)".

Fig. II.4: Extrait de la carte à 1/25.000 de Louveigné-Spa, par P. Fourmarier (1958). On notera la représentation des affleurements en noir ainsi que des formations superficielles par une trame en tiretés. Une sélection de pendages et directions apparaît sur la carte.

Sur la carte Stavelot-Malmédy de Geukens, les limons, les dépôts de source, les colluvions, la tourbe sont représentés par un figuré spécial cachant les formations paléozoïques. Un schéma tectonique est adjoint et les unités cartographiées sont lithostratigraphiques;

Enfin, la carte de R. Legrand, géologue du Service géologique, mentionne la nature des minéralisations et présente également un schéma tectonique à petite échelle.

Toutes les cartes font figurer la forme des affleurements et les directions et pendages. Les failles de charriage sont distinguées des failles transversales. Les alluvions modernes ainsi que les terrasses sont représentés par des teintes plates.

Les nouvelles cartes à 1/25.000 représentaient certainement une tentative d'amélioration, sous l'impulsion de P. Fourmarier, de la couverture à 1/40.000. Les quelques cartes produites (Fig. II.5), quoique formant un ensemble peu homogène, tentaient de corriger les insuffisances des vieilles cartes, à savoir la figuration très incomplète de la couverture et l'absence des données géométriques des affleurements.

Paul Fourmarier

Une absence de consensus quant à la méthode de levé adoptée, quant au type de carte que l'on réaliserait, un manque de suivi de la part du Conseil géologique et la collaboration de jeunes géologues ne voyant dans la carte bien souvent qu'une occupation secondaire, empêcheront cette tentative d'être menée à bien dans des délais raisonnables.

Fig. II.5: tableau d'assemblage des cartes géologiques de la Belgique.

 

7. LA CARTE GEOLOGIQUE DE WALLONIE

Après élaboration d'un cahier des charges, document fixant les prescriptions auxquelles devra répondre la nouvelle carte géologique de Wallonie, plusieurs équipes seront créées, au sein des universités et du Service géologique de Belgique. Le respect des prescriptions du cahier des charges est contrôlé par un comité de pilotage. J'en extrais les points suivants:

- les documents d'archives comprendront essentiellement les points d'observation reportés sur une carte topographique 1/10.000. La numérotation des nouveaux points respectera la numérotation adoptée pour les archives du SGB. La présentation des données sera standardisée, avec une rubrique pour la localisation précise et la nature des points d'observation, une rubrique pour la description géologique (avec séparation des caractères lithologiques, paléontologiques, structuraux et éventuellement un schéma), une rubrique pour l'interprétation stratigraphique et structurale et enfin, une rubrique pour la bibliographie;

- les documents d'édition comprendront les cartes géologiques tracées à l'échelle du 1/10.000, avec report des données structurales (stratification, schistosité, plis, failles, unités structurales), des coupes géologiques explicatives, une notice explicative ("livret-guide") et éventuellement des cartes thématiques.

La poursuite du programme comprend aussi un volet de gestion informatique qui a pour avantages:

"- la possibilité pour le géologue de dialoguer avec l'encodeur et de corriger sa carte en cours de réalisation,

- la possibilité, suite à de nouvelles connaissances, de mettre à jour, rapidement et à peu de frais, les cartes déjà informatisées,

- la possibilité de lier à la carte une banque de données géologiques consultable de manière interactive par le Service et par des Services extérieurs."

Actuellement, beaucoup de cartes sont consultables en ligne, via internet, à l'adresse suivante: http://environnement.wallonie.be/cartosig/cartegeologique/consultation.htm#

Les points forts des nouvelles feuilles, outre les avantages liés à l'informatisation, sont leur caractère délibérément et définitivement lithostratigraphique (on cartographie des formations) afin de servir au plus grand nombre, la finesse de la stratigraphie utilisée, la prise en compte des données de la photographie aérienne et de la géomorphologie, l'accent mis sur l'interprétation structurale. C'est ce dernier point d'ailleurs qui, de l'avis de plusieurs des géologues cartographes, reste l'un des plus difficiles à maîtriser. L'existence d'une notice explicative détaillée devrait également favoriser la diffusion des nouvelles feuilles dans le public.

Que penser de ce bref historique? D'abord que la cartographie géologique est une discipline exigeante, nécessitant de celui qui la pratique une vaste culture générale lui permettant de faire la synthèse de domaines aussi divers que la stratigraphie, la sédimentologie, la paléontologie, la tectonique. Ensuite, que la difficulté peut parfois se nicher là où on l'attend le moins, dans la figuration des résultats. Que veut-on, que peut-on représenter? Quels seront les utilisateurs? Que feront les autres cartographes? Comment garantir l'homogénéité? Autant de questions auxquelles le cartographe se verra forcé d'apporter une réponse.

Il est important également de comprendre qu'une carte n'est qu'une figuration symbolique de ce qu'imagine un géologue, un groupe de géologues d'après un aperçu très fragmentaire de la réalité géologique qui elle, est immuable (à notre échelle d'observation...)

Fig. II.6: tableau d'assemblage de la nouvelle carte géologique de Wallonie.

Voir aussi: http://environnement.wallonie.be/cartosig/cartegeologique/index.htm

 


III. Les bases de la cartographie géologique

1. INTRODUCTION

Au moment de se lancer dans un premier travail de cartographie géologique, il est bon de se rappeler quelques règles générales -de bon sens- quant à la sécurité et le comportement. Celles-ci sont valables dans notre pays et dans notre environnement proche, mais il est évident que dans le cas d'expéditions plus lointaines, d'autres facteurs doivent être pris en compte comme le climat, le relief, l'accueil des populations locales, la faune etc...

On attend évidemment de tout géologue le respect de la nature qu'il parcourt: ne pas abandonner de déchets, ne pas défricher outre mesure, ne pas déranger la vie sauvage; mais aussi, ne pas piller les gisements fossilifères, ne pas excaver outre mesure. Parmi les mesures élémentaires de sécurité, rappelons celles-ci: ne pas s'aventurer en terrain difficile (parois escarpées, grottes, anciennes mines,...) sans avertir de l'endroit où l'on se trouve; toujours porter un casque en carrière; ne pas approcher de parois instables après le dégel; ne jamais utiliser un marteau comme burin; si possible porter des lunettes de sécurité. Rappelons également qu'il sera toujours plus facile de pénétrer dans une propriété privée après s'être présenté et en avoir fait la demande qu'après avoir été surpris par le propriétaire furieux...

Enfin, il ne faut pas se cacher que le découragement est toujours possible: "on n'y comprend plus rien du tout": il est parfois bon d'abandonner provisoirement une zone délicate et d'y revenir après réflexion, consultation de la bibliographie, levé de zones connexes, discussions.

2. LA PHASE PREPARATOIRE

Avant de se lancer dans le levé proprement dit, il est souvent utile de faire la bibliographie de la région à étudier. C'est particulièrement vrai dans nos pays de longue tradition géologique (cf. chapitre II!). Une visite des bibliothèques, une consultation des bases de données (pour la Belgique, consulter les PP du Service géologique de Belgique, numéros 265, 266, 273, 279 de G. Vandenven et éventuellement les archives du Service géologique où sont répertoriés anciens affleurements et sondages) donneront une première idée des formations à cartographier, des coupes connues, du style tectonique, des problèmes en discussion, etc... Cette première idée ne doit évidemment pas vous empêcher de faire preuve d'imagination: encore une fois, une carte géologique est personnelle et reflète la vision que son auteur a de la géologie de la zone qu'il a parcouru. C'est bien sûr aussi le moment de se procurer les documents indispensables au levé comme les cartes topographiques, les photographies aériennes, la carte pédologique. Nous reviendrons sur ces différents documents.

Dans le cas où l'on est amené à utiliser des unités lithostratigraphiques déjà définies, il est absolument indispensable d'étudier soi-même soigneusement (levé banc par banc) les coupes types. En Belgique, c'est le cas de la plupart des formations. Un effort a été fourni par les différentes commissions de stratigraphie afin d'éditer des ouvrages de référence où chaque formation est définie par un lithostratotype et une limite inférieure et supérieure. Les variations latérales et le domaine d'application des unités cartographiques sont également évoqués (Bultynck et al., 1991; Boulvain et al., 1999; Godefroid et al., 1994). Un ouvrage plus succinct reprenant l'ensemble des formations définies en Belgique est aussi disponible (Bultynck & Dejonghe, 2001). La connaissance détaillée des formations qu'il aura à cartographier permet au géologue de reconnaître celles-ci sans équivoque sur base d'affleurements parfois médiocres et de placer les limites lithostratigraphiques en accord avec l'usage courant. S'il n'existe pas de découpage lithostatigraphique, le cartographe aura à proposer ses propres unités. Il doit alors sélectionner sur sa carte ou à proximité un certain nombre de coupes de bonne qualité, les décrire minutieusement et y définir des limites inférieure et supérieure (voir ci-dessous).

3. LE MATERIEL

Celui-ci tient en relativement peu de chose (d'autant qu'il doit être transportable par monts et par vaux): des vêtements solides et étanches (surtout les chaussures), une gourde; un marteau; des porte-mines, crayons de couleur et gommes (il n'y a rien de plus frustrant que de se rendre compte devant un affleurement intéressant que l'on n'a plus de quoi écrire); une bouteille (étanche) d'HCl 10%; une loupe 10x; un rapporteur pour reporter sur la carte les mesures de direction et les relèvements; une règle; un mètre pliant ou roulant pour évaluer des épaisseurs lors de levés de coupes; une boussole et un clinomètre (nous y reviendrons); un carnet de terrain, des cartes topographiques et un porte-carte (idem), des sacs à échantillons, des marqueurs indélébiles, un GPS.

Suivant les cas, on peut être amené à emporter en sus un altimètre, qui peut être aussi un moyen de se localiser par rapport aux courbes de niveau de la carte (prévoir dans ce cas un itinéraire passant par des points d'altitude connue afin de régler l'appareil); une échelle de teintes conventionnelles (qu'est-ce qu'un calcaire lilas pâle pour un autre géologue que vous?...), une tarière, un appareil photo, un casque, etc... Insistons sur les points suivants:

- la carte: l'échelle doit bien sûr être en rapport avec le type de levé effectué. Dans notre cas, il s'agit de levé de détail et nous utilisons la carte à 1/10.000 de l'IGN. Les versions bistres ont l'énorme avantage de pouvoir être coloriées. Toujours utiliser la version la plus récente disponible, on n'a jamais trop de points de repères (nouvelles maisons, routes,...). Ces cartes portent en marge une graduation en coordonnées Lambert (X, Y) et en coordonnées géographiques (latitude, longitude). Afin de faciliter leur maniement, il est commode de les découper au format du porte-carte et de les numéroter. Ne pas oublier également des cartes à échelle plus petite pour se situer dans un contexte régional;

- le porte-carte: idéalement au format A4, il comporte un dos dur capable de maintenir les cartes lorsque l'on écrit dessus, une pochette pour protéger les cartes non utilisées, un dessus transparent pour pouvoir consulter la carte par temps de pluie. Cette combinaison insolite peut être obtenue en associant un porte-document format A4 (non métallique) et une chemise transparente;

- le carnet de terrain: ne faites pas d'économies sur votre carnet de terrain! Il doit être solide, inusable, à l'épreuve du climat (pluie). Ne jamais utiliser de feuilles volantes qui, bien sûr, ne demanderont qu'à s'envoler... Au contraire, utilisez un carnet solide, quadrillé (pour pouvoir représenter des coupes à l'échelle), de format moyen (environ 12x19 cm est idéal: suffisamment petit pour rentrer dans les poches, suffisamment grand pour dessiner une coupe) et numérotez-en les pages: c'est souvent pratique pour faire des rappels et des annotations complémentaires. Il peut d'ailleurs être utile de réserver les quelques premières pages à un index que vous rédigerez après complète utilisation de votre carnet. Si le "papier" n'est pas étanche, toujours écrire au crayon: c'est la seule manière d'être sûr de pouvoir se relire après une journée pluvieuse. Enfin, n'oubliez pas d'y écrire en grand votre nom et votre adresse (éventuellement avec promesse de récompense): il est arrivé qu'un promeneur le renvoie à son propriétaire;

- la boussole: instrument indispensable s'il en est, c'est le bien le plus onéreux du cartographe. De nombreux modèles existent sur le marché. Pour notre usage spécifique, la boussole doit disposer d'une nivelle à bulle pour en assurer l'horizontalité et d'un système de visée pour effectuer des relèvements (voir ci-dessous). Toujours s'assurer de l'unité utilisée (degrés, grades, millièmes) et du sens de la graduation (du Nord vers l'Est ou vers l'Ouest). La première opération à effectuer est de calculer la déclinaison magnétique de la boussole: la mesure donnée par l'instrument est en effet un angle par rapport au nord magnétique (azimut magnétique), qu'il faut transformer pour obtenir un angle par rapport au nord cartographique (azimut cartographique). Cette opération simple doit être effectuée à chaque changement de région de la façon suivante:

  • d'un point connu A, viser un autre point connu B de la carte (clocher, château d'eau, pylône) et faire une lecture m;
  • dessiner l'axe A-B sur la carte et mesurer au rapporteur l'azimut cartographique c de cet axe;
  • calculer la déclinaison d=c-m;
  • utiliser la correction c=d+m pour toutes les mesures postérieures.

Les erreurs de mesure à la boussole peuvent avoir des conséquences désagréables (erreur sur la position lors d'un relèvement, erreur sur la direction d'un plan géologique). Contrôlez toujours les éléments suivants:

  • absence d'objet métallique à proximité de la boussole: marteau, porte-cartes métallique (à proscrire), montures de lunettes, fils de clôture, bracelet, automobiles;
  • pas de champ électrique: ligne à haute tension;
  • utiliser la bonne déclinaison magnétique;
  • faire une bonne lecture (mauvaise interprétation des graduations, etc...).

- le clinomètre s'il n'est pas inclus dans la boussole. Il est toujours possible d'en fabriquer un au moyen d'un rapporteur et d'un fil à plomb...

Petit matériel -minimal- du cartographe: porte-document, boussole (avec nivelle et clinomètre), crayons, carte, rapporteur, carnet de terrain.

4. TECHNIQUES DE LEVE D'UNE CARTE GEOLOGIQUE

On trouvera ici à la fois la description des manipulations effectuées lors des mesures de direction et pendage et également un aperçu de la façon d'organiser le levé proprement dit. Il faut garder à l'esprit que l'information doit être récoltée avec un esprit libre d'idées préconçues. Le levé est essentiellement une phase d'observation.

Méthodes de levé

  • suivre les contacts entre les unités cartographiées: cette méthode semble la plus simple et la plus naturelle, puisqu'elle permet de relever directement les limites qui seront portées sur la carte. Elle n'est cependant applicable que pour des zones à très faible couverture. Dans ce cas, il est d'ailleurs probable qu'une étude attentive des photos aériennes livrerait d'aussi bons résultats;
  • les traversées: il s'agit de parcourir un itinéraire préparé d'avance en accumulant les observations au fur et à mesure de leur occurrence. Dans des zones pauvres en points de repères, les différents segments de l'itinéraire sont des droites d'azimut connu, parcourues en mesurant les distances au double pas, au podomètre, etc... Lors de la préparation de l'itinéraire, on retiendra particulièrement les zones les plus propices en affleurements, à savoir les cours d'eau, les escarpements, les routes. Un examen attentif de la carte topographique peut faire gagner beaucoup de temps. En sous-bois, en l'absence de points de repère, les affleurements situés le long d'un cours d'eau sont relativement faciles à localiser à l'aide de l'altimètre, puisque la simple connaissance de l'altitude suffit à contraindre la position;
  • une variante de cette méthode est la cartographie des affleurements: c'est la méthode la plus usitée pour la cartographie de détail. Il s'agit ici de recenser tous les affleurements et de porter sur la carte leur extension réelle. Cette méthode est très objective, puisqu'elle permet au lecteur de se rendre compte immédiatement des faits (les affleurements) sur lesquels repose l'interprétation (les tracés);
  • dans les zones où les affleurements sont rares (en Belgique, par exemple), il faut utiliser toutes les ressources et les ruses disponibles pour récolter de l'information: recensement des cailloutis dans les labours (attention au glissement sur pente, cf. Fig. III.10), utilisation de la carte pédologique, de plusieurs jeux de photos aériennes prises à des époques différentes, variations dans le couvert végétal, etc... Parfois, la tarière devient nécessaire et il est alors avantageux de travailler par "hypothèse et vérification". Par étude des photos aériennes, de la carte pédologique et extrapolation des données d'affleurement, un tracé est proposé. Il s'agit ensuite de le mettre à l'épreuve de la tarière en plusieurs endroits-clés.

Technique de mesure de directions et pendages (méthode conseillée, Fig.III.1)

  • direction d'un plan (plan de stratification, plan de schistosité, plan axial, diaclase, plan de faille): c'est la direction d'une horizontale de ce plan: (1) placer le talon de la boussole sur la surface ou sur le porte-cartes pour niveler de petites irrégularités; (2) en maintenant le contact, amener la boussole à l'horizontale à l'aide de la nivelle; (3) faire la lecture;
  • pendage d'un plan: (1) placer le clinomètre perpendiculairement à la direction que vous venez de mesurer; (2) faire la lecture. Remarque: pour des plans à très faible pendage, il peut être plus facile de déterminer d'abord la direction de plus grande pente en laissant s'écouler un peu d'eau sur la surface, mesurer le pendage et ensuite déterminer la direction de l'horizontale du plan, à 90° de la direction de plus grande pente.

ENREGISTREMENT DES MESURES: soit "direction/pendage": N065°E/25°SE, soit "pendage orienté": 25°->155°.

  • direction d'un linéament (charnière d'un pli, ride de courant,...): c'est la direction d'un plan vertical passant par ce linéament: (1) déposer votre porte-cartes sur le linéament en le maintenant vertical; (2) placer votre boussole contre le porte-cartes et amenez-la à l'horizontale; (3) faire la lecture;
  • plongement d'un linéament: (1) placer votre clinomètre sur le linéament; (2) faire la lecture. Enregistrement des mesures, voir ci-dessus.

Fig. III.1: éléments géométriques d'un plan géologique et d'une linéation.

5. SE LOCALISER ET LOCALISER LES AFFLEUREMENTS

Il s'agit d'une étape très importante du travail de levé: un affleurement mal localisé est pire que pas d'affleurement du tout. Il faut être sûr à tout moment de l'endroit où l'on se trouve, de manière à pouvoir localiser tout nouvel affleurement à maximum un millimètre près (quelle que soit l'échelle: sur nos cartes à 1/10.000, cela représente bien sûr 10 m). Afin de parvenir à ce degré de précision, différentes méthodes sont possibles:

- utilisation des points de repère de la carte: c'est la plupart du temps possible, grâce à la qualité de nos cartes. Ayons de l'imagination quant à nos points de repère: croisement de routes ou de chemins, bâtiments, mais aussi angle d'une prairie, d'une sapinière, confluence, haie, arbre remarquable, pylône, etc... Notons que sur la plupart des cartes (sauf les nouvelles cartes à 1/10.000 dans le cas des routes de plus de 14 m de largeur), les routes ne sont pas figurées en largeur réelle: il faut mesurer par rapport au centre des ouvrages. N'oublions pas aussi que certains traits caractéristiques évoluent dans le temps: une prairie, mentionnée comme telle sur la carte peut avoir été plantée en sapins depuis lors: d'où l'utilité de disposer des versions les plus récentes...;

- à partir d'un point connu, il est toujours possible d'effectuer un cheminement au double-pas et à la boussole: viser un point de repère situé approximativement dans la direction de progression (arbre, piquet,...), noter son azimut, ensuite s'y rendre en comptant le nombre de doubles pas (moins d'erreurs de comptage que le pas). Reporter distance et azimut sur la carte. Pour utiliser cette méthode, il est bien sûr nécessaire d'étalonner son pas de la façon suivante: sur une distance de 200 m d'un parcours "moyen" (par rapport au type de terrain rencontré), compter le nombre de doubles-pas dans un sens, puis dans l'autre et faire la moyenne si la différence est inférieure à deux doubles-pas. Construire ensuite un abaque de conversion à la dernière page de son carnet:

Doubles-pas

mètres

Doubles-pas

mètres

1

1,7

10

16,6

2

3,3

20

33,3

3

5,0

30

50,0

4

6,6

40

66,4

5

8,3

50

83,0

6

10,0

60

100,0

7

11,6

70

116,6

8

13,3

80

133,2

9

15,0

90

150,0

Bien pratiquée, cette méthode permet de ne pas dépasser 3 m d'erreur par 100 m. Ce qui signifie que sur nos cartes à 1/10.000, un cheminement de 300 m reste dans notre limite d'imprécision de 1 mm.

- le relèvement: c'est une technique de positionnement utilisée en navigation côtière, topographie, randonnée, etc... Il s'agit simplement de mesurer à la boussole l'azimut de trois points de repère connus (formant entre eux un angle compris -si possible- entre 60° et 90°) et de reporter leur anti-azimut sur la carte à l'aide du rapporteur. La position est à l'intersection des droites de relèvement. Si les droites forment un triangle et si celui-ci est plus petit ou égal à 1 mm, il suffit de pointer le centre du "triangle d'erreur". Si le triangle d'erreur est plus grand, il faut contrôler au moyen d'une visée sur un quatrième repère ou à défaut se remémorer la liste des "erreurs possibles" et refaire les visées sur les trois premiers...

- le GPS (Global Positioning System): il s'agit d'un système de positionnement par satellites développé par l'US Department of Defense. Le système européen Galileo devrait dans un avenir proche, assurer la même fonction.

Le système GPS comprend trois segments: le segment de contrôle (stations au sol qui contrôlent les satellites et tiennent à jour les informations qu'ils transmettent), le segment spatial (satellites) et le segment utilisateur (positionnement en temps réel, mais aussi positionnement de haute précision pour applications géodésiques). Dans le cadre de la cartographie géologique, c'est évidemment le positionnement en temps réel qui nous intéresse. Une caractéristique fondamentale du GPS est qu'en tant que système satellitaire, il est dynamiquement lié au centre de masse de la terre et qu'il s'appuie donc sur un référentiel géocentrique auquel l'ellipsoïde WGS 84 est associé. Les systèmes de référence locaux ne sont en général pas géocentriques et leurs orientations sont différentes de celle de WGS 84. Pour cette raison, les coordonnées GPS ne sont pas utilisables telles quelles dans un système de référence local (par exemple le Lambert belge).

- Le segment de contrôle: il s'agit de cinq stations réparties autour de la terre: Hawaii, Colorado Springs (station principale), Ascencion, Diego Garcia et Kwajalein.  La station principale utilise les données captées par toutes les stations pour calculer les éphémérides des satellites et les corrections de leurs horloges. La station principale effectue également les corrections orbitales nécessaires.

- Le segment spatial: il s'agit actuellement de 26 satellites placés dans 6 plans orbitaux inclinés de 55° sur l'équateur, avec une altitude moyenne de 20.200 km. Leur fenêtre d'observation est d'environ 5 h par satellite. Leur fonction principale est de maintenir une base temps très précise au moyen d'oscillateurs atomiques embarqués et de transmettre ces informations aux utilisateurs via différents signaux. A partir de la fréquence fondamentale, deux ondes porteuses sont modulées par trois ondes de modulation. Le signal émis comprend deux codes destinés à la mesure de la distance satellite-utilisateur (version Coarse Acquisition et version Precision, destinée aux militaires) et un code d'information destiné à transmettre vers les utilisateurs toute l'information utile aux calculs de positionnement (paramètres orbitaux du satellite, dérive des horloges,...) A tout moment, un observateur terrestre peut observer 4 à 8 satellites simultanément.

- Le segment utilisateur: le signal émis par les satellites est composé d'une part par les fréquences porteuses et d'autre part par les codes. Les mesures GPS peuvent donc se faire suivant deux méthodes différentes: la méthode des pseudodistances qui se pratique sur les codes et la mesure de phase exécutée sur les porteuses (cette dernière méthode est utilisée pour les mesures de précision; elle nécessite des mesures différentielles effectuées par deux récepteurs au moins et ne sera pas détaillée ici).

Méthode de la pseudodistance: la distance satellite-récepteur peut être définie par la formule suivante:

d=c.Dt

où d= distance réelle satellite-récepteur; c= vitesse de la lumière;

Dt est le délai entre l'émission du signal par le satellite et la réception de ce signal par le récepteur. Ce délai est mesuré par un détecteur de corrélation qui maintient l'alignement entre la réplique du code généré par le récepteur et le signal provenant du satellite (répété toutes les millisecondes). Comme les horloges des satellites et du récepteur ne sont pas parfaitement synchronisées, on parle de "pseudodistances" et l'équation devient:

p=d+c.(Dts-Dtr)

où p= pseudodistance; Dts= erreur horloge du satellite; Dtr= erreur horloge du récepteur;

dans cette équation, les inconnues sont d et Dtr; en effet, Dts est fourni par le code information des satellites.

La distance satellite-récepteur peut également être exprimée de la façon suivante:

d=Ö(Xs-Xr)+(Ys-Yr)+(Zs-Zr)

où Xr, Yr, Zr représentent la position du récepteur et Xs, Ys et Zs, la position du satellite;

Comme la position du satellite est également transmise par le code information, il suffit d'observer simultanément 4 satellites pour établir 4 équations qui permettent de lever les 4 inconnues Xr, Yr, Zr, Dtr.

La précision sur les pseudodistances est de 3m dans des conditions d'absence de brouillage. C'est le cas actuellement.

6. FACE A L'AFFLEUREMENT... LES DONNEES A COLLECTER

Il s'agit ici de la liste des choses à voir et à faire en face de tout affleurement. Au début, cette litanie doit être suivie point par point afin de ne pas négliger d'information importante.

Caractères généraux

- Il faut d'abord éviter les pièges: s'agit-il bien d'un rocher en place et pas d'un bloc exotique (voire un mur...!); y-a-t-il du fauchage, le bloc a-t-il été basculé?

Fauchage affectant des phyllades du Dévonien inférieur (région de Bastogne).

- Il faut alors s'assurer d'étudier, dans la mesure du possible, tout l'affleurement. C'est souvent derrière un coin, au ras du sol que l'on pourra faire une mesure valable, que l'on trouvera le fossile intéressant,...

Eléments structuraux

- Trouvons maintenant la polarité des couches: "où se trouvent le haut et le bas?" C'est une étape parfois difficile qui demande un peu de patience. Ci-dessous, quelques critères de polarité, choisis en fonction de leur valeur et de leur fréquence (Fig. III.2).

Fig. III.2: quelques exemples de géopètes.

- La recherche de la polarité des couches va de pair avec la recherche de la stratification S0. La stratification est probablement la surface la plus importante à repérer, puisque les limites lithologiques lui sont généralement parallèles et que son organisation spatiale détermine les plis et failles de la carte. Ici aussi, en dehors de cas simples où l'on observe des bancs bien définis (grès, calcaires stratifiés,...), il faut un peu de patience. Dans certaines lithologies comme les schistes, la stratification S0 est souvent beaucoup moins bien marquée que la schistosité S1 et seule la découverte de minces lamines plus grossières, de niveaux plus fossilifères peut fournir une réponse non ambiguë. Dans la recherche de la stratification, il faut faire usage des critères suivants:

  • contact de deux lithologies différentes;
  • alignement de fossiles, de lithoclastes, de fenestrae, etc...
  • lamination;
  • alignement de nodules, avec prudence (dans certains cas, les nodules se sont formés -ont été réorientés- en fonction des contraintes ultérieures);

Une fois la stratification repérée de manière non équivoque, il faut effectuer les mesures de pendage et direction comme indiqué en (4) ci-dessus. Il peut être utile de multiplier les mesures et d'adopter dans son carnet un code (*, **, ***) pour la qualité et/ou la représentativité de ces données.

Relations entre la stratification (S0), soulignée par des bancs calcaires et la schistosité (S1) dans les schistes du Membre de Boussu-en-Fagne (Frasnien), près de Barvaux.

Difficulté d'identifier la stratification S0 dans un affleurement où la schistosité est bien marquée (Formation d'Ottré dans la coupe du chemin de fer de Vielsalm à Salm-Château). En bleu, les surfaces les plus visibles qui, à première vue, semblent correspondre à la stratification (S0?); en jaune, une lamination due à des variations de granulométrie permet de mettre en évidence la véritable statification (S0!) lors d'une examen plus attentif...

- Les plis et failles secondaires, à l'échelle de l'affleurement, doivent bien sûr être relevés et figurés sur la carte (voir ci-dessous). Il est important de faire la différence entre structures plicatives d'origine sédimentaire (slumps), c'est-à-dire pré-lithification et structures plicatives d'origine tectonique, c'est-à-dire post-lithification. Voici quelques critères de distinction:

  • les plis syn-sédimentaires
    • peuvent être tronqués puis enfouis sous les sédiments postérieurs;
    • peuvent être bioturbés par des organismes fouisseurs, perforants,...
    • peuvent être découpés par des structures d'échappement de fluide;
    • contiennent des éléments figurés non déformés;
    • ne présentent jamais de clivage de type plan axial; ils peuvent être recoupés par contre par un clivage postérieur d'orientation quelconque par rapport à la structure;
    • possèdent des axes fortement dispersés, situés à peu près dans le plan de glissement;
    • ne sont pas associés à des fractures ou veines;
  • les plis tectoniques
    • ont une géométrie corrélée avec les structures régionales;
    • présentent une vergence et un plan axial symétriques par rapport aux plis principaux;
    • ont un plan axial qui se prolonge sur de nombreux bancs;
    • sont associés à des fractures, souvent symétriques par rapport au plan axial
    • peuvent présenter un clivage de type plan axial, parfois en éventail;
    • peuvent être associés à des failles de raccourcissement.

Essayez, autant que possible, de dessiner ces structures dans votre carnet de terrain (voir ci-dessous) et caractérisez-les: plis droits, déjetés, déversés; parallèles, similaires; en Z, en M, en S, etc... Ces dernières informations vous indiqueront votre position par rapport aux plis principaux. Mesurez également les éléments suivants: direction et pendage des plans axiaux des plis, plongement des charnières.

Fig. III.3: caractères généraux et éléments géométriques des plis.

De même, il faut distinguer failles syn-sédimentaires et failles tectoniques:

  • les failles syn-sédimentaires
    • n'affectent qu'une partie des dépôts et sont cachetées par les sédiments postérieurs;
    • sont typiquement listriques;
    • ne sont pas associées à des fractures et veines à remplissage tardif;
    • possèdent un plan de faille irrégulier à petite échelle ("déchirement"), le long duquel peuvent être observés des sédiments contemporains;
    • sont fréquemment associés à des structures sédimentaires du type slump, litage convoluté, échappement de fluide.

Dessinez ces structures dans votre carnet de terrain (voir ci-dessous) et caractérisez-les: failles normales, inverses (Fig. III.4), de chevauchement (Fig. III.5), décrochement (Fig. III.4), etc... Mesurez également les éléments suivants: direction et pendage des plans de faille.

Une rampe est la portion de faille reliant deux glissements majeurs banc sur banc. Ces glissements horizontaux s'effectuent le long d'un niveau ductile ou incompétent. Le passage d'une rampe s'effectue dans un niveau rigide ou compétent et peut engendrer un anticlinal de rampe. Un duplex est un ensemble d'écailles tectoniques comprises entre deux contacts majeurs de décollement (Fig. III.4).

Fig. III.4: failles normale, inverse, décrochements, rampe et duplex. D'après Dejonghe (1998).

Selon l'amplitude du déplacement lié à une faille ou à un système de faille, on parlera de chevauchement (faible rejet) ou de charriage (rejet important; dans ce cas, le compartiment déplacé constitue une nappe). Sur la carte, la pointe des petits triangles qui jalonnent le trait de faille indique l'unité chevauchante (attention, cette pointe n'est pas nécessairement orientée dans le sens du pendage de la faille). Si une nappe est érodée au point de montrer des terrains autochtones dans une boutonnière, ceux-ci constituent une fenêtre tectonique. Des lambeaux charriés et isolés sur des terrains autochtones sont appelés klippes (Fig. III.5). Un lambeau de poussée est une portion de terrain arraché au substratum par une unité chevauchante et entraîné sous elle.

Fig. III.5: nappe de charriage. D'après Dejonghe (1998).

- D'autres plans remarquables doivent être repérés et mesurés, citons successivement la ou les schistosités (S1, S2,...), les diaclases (D1, D2,...). De même pour les linéations: intersection de la stratification et d'un clivage, de deux schistosités,...

- Il faut attacher une grande importance aux relations entre stratification et schistosité qui permettent de se situer par rapport à l'axe des plis (Fig. III.6).

Fig. III.6: pli et schistosité. (1) banc de grès; (2) schiste; (3) plis secondaires; (4) failles; (5) laminations dans le banc de grès; (6) réfraction de la schistosité au passage du banc de grès. Dans cet exemple, la schistosité est de type "plan axial" (parallèle au plan axial du pli), légèrement en éventail. Noter les relations entre S01 de part et d'autre du plan axial du pli: dans le cas du flanc normal, le pendage de S0 est plus faible que le pendage de S1; dans le cas du flanc inverse, le pendage de S1 est plus faible que celui de S0. Cette relation entre les allures de S01 permet de situer l'axe des plis et peut servir à identifier la polarité des couches. et S et S

Lithologie et contenu fossilifère

Il faut caractériser le plus objectivement possible la roche qui se trouve devant vous: un autre géologue devrait pouvoir se représenter sans ambiguïté la lithologie de votre affleurement à la lecture de votre description. Il faut donc être soigneux dans sa description et utiliser des termes précis, à signification bien établie et connue du plus grand nombre -qu'importe si ces termes sont anglais- Consulter à cette fin vos notes de géologie sédimentaire, magmatique, métamorphique...

L'identification des fossiles fait partie de la description de l'affleurement puisqu'aussi bien un calcaire gris foncé grenu à stringocéphales n'a pas la même interprétation lithostratigraphique que le même calcaire gris foncé grenu à Productus cora. Une identification, même sommaire de vos trouvailles paléontologiques, ne peut qu'aider à l'interprétation. De plus, il vous est toujours loisible de vous faire aider par un spécialiste: conservez et étiquetez vos fossiles (n° d'affleurement)!

Enfin, dans le cas d'affleurements composites, il est utile de faire un croquis (variations lithologiques dans les trois dimensions, relations entre les différents faciès) ou de dessiner une colonne lithologique (évolution de la lithologie au cours du temps).

Interprétation stratigraphique: les unités cartographiées

Une carte géologique moderne ou carte lithostratigraphique est un document qui montre la nature, la distribution et la structure des unités cartographiées. Il ne s'agit donc pas simplement d'une carte lithologique qui ne montre que la nature et la distribution des types de roche sans tenir compte de leur succession temporelle.

En guise d'exemple, la carte géologique du Massif de Philippeville dans sa version à 1/40.000 de 1900 est une carte lithologique et non lithostratigraphique, puisque la légende regroupe tous les schistes, tous les calcaires quelque soit leur âge. Il est bien entendu qu'une telle carte ne montre pas la structure tectonique de la zone en question.

La définition de l'unité cartographiée doit donc impliquer une lithologie ou un ensemble de lithologies mais aussi un niveau stratigraphique. "Pour illustrer l'importance du niveau stratigraphique, imaginons une région à lever constituée d'une séquence de schistes, grès et conglomérats interstratifiés. Une carte de lithologie peut donc se contenter de trois types de symboles, soit un par lithologie. La carte se présentera, dès lors, comme une alternance de bandes représentant les trois types de roches. Puisqu'aucune distinction stratigraphique n'est faite sur cette carte entre les différentes bandes de même lithologie, il n'est pas possible de dire si deux ou plusieurs de ces bandes représentent des unités stratigraphiques différentes ou la même unité répétée par plissement ou par faille." (Lees, 1989, p. 4.2).

Fig. III.7: carte lithologique et carte lithostratigraphique.

Si l'on compare les deux cartes de la Fig. III.7, une seule des unités schisteuses de la carte lithologique est représentée sur la carte lithostratigraphique, où elle apparaît comme un membre de la Formation du Caradras. Puisque la subdivision en formations ne repose pas spécifiquement sur la présence de schistes, la cartographie des niveaux schisteux est optionnelle. Sur la carte lithostratigraphique de l'exemple, on peut imaginer que le Membre des Schistes du Pont a été cartographié parce qu'il forme un niveau repère important dans une séquence conglomératique homogène, tandis que dans la Formation des Grès et Schistes de Fréminois, il y a beaucoup de schistes et les niveaux individuels sont difficiles à suivre.

Cette unité cartographiée à connotation lithologique et stratigraphique s'appelle donc la formation. C'est l'unité de base du découpage lithostratigraphique.

"The formation is the fundamental unit of lithostratigraphic classification: it is the formal unit, and the only formal unit, which is used for completely dividing the whole stratigraphic column all over the world into named units on the base of lithology.

A formation is a body of rock strata, of intermediate rank in the hierarchy of lithostratigraphic units, which is unified with respect to adjacent strata by consisting dominantly of a certain lithologic type or combination of lithologic types or by possessing other impressive and unifying lithologic features. The thickness of units of formation rank follows no standard and may range from less than a meter to several thousand meters, depending on the size of units locally required to best express the lithologic development of a region.

A formation should be based on a specifically designated and delimited type section (stratotype) and, where necessary, reference sections. The proposal for a new formation should be accompanied by a comprehensive description of its character and the features by which it may be identified. The lateral extent of a formation should be controlled by the extent of the definitive lithologic features on which the formation was based in its type and reference sections. The degree of change in lithology required to justify the establishment of distinct formations (...) is not amenable to strict and uniform rules but may vary with the complexity of the geology of a region and the detail needed to portray satisfactorily its rock framework and work out its geologic history.

Although a formation is a lithologic unit, the complexity of lithologic alternations and intergradations in nature is such that a variety of choices may be offered in the selection of formation boundaries. The choice may be influenced legitimately by factors such as lateral traceability, physiographic expression, etc., which may help to give the formation maximum utility in expressing the lithologic development of a region. Practicability of mapping and delineating on cross sections is an important consideration in the establishment of formations." (Hedberg, 1970, p. 9)

"The definition of a lithostratigraphic unit should be based on as full a knowledge as possible of its lateral and vertical variations, but for purposes of nomenclatural stability a type section (stratotype) should be designated. The stratotype should be identified geographically by a location map, by air photographs, or by coordinates of latitude and longitude. It should be identified geologically by a complete description of the unit and its limits. Artificial boundary markers may be desirable for delimitation on the ground.

Name and Rank of Units in Conventional Lithostratigraphic Hierarchy

Group---two or more formations

Formation---fundamental unit of lithostratigraphy

Member---named or unnamed lithologic entity within a formation

Bed--- named or unnamed distinctive layer in a member or formation." (Hedberg, 1970, p. 6).

"Other than in general dating, concepts based primarily on paleontologic character are little involved in the definition or differentiation of a lithostratigraphic unit, except as fossils may in themselves be important lithologic constituents; as, for example, in oyster-rich sandstones, coquinas, algal reefs, etc." (Hedberg, 1970, p.8).

Comme sur l'exemple de la Fig. III.7, la légende d'une carte lithostratigraphique permet d'attribuer un âge aux différentes formations. Ceci compense l'éventuelle perte d'information que pourrait ressentir un utilisateur, habitué aux anciennes cartes géologiques à 1/40.000 qui représentaient des "Assises", unités de même âge, quelle que soit la lithologie.

L'échelle de la carte, si elle n'a pas d'influence directe sur le choix des formations utilisées, contingente évidemment leur représentation cartographique. Il est évident que sur une carte à 1/10.000, on ne représentera que difficilement des formations à pendage élevé de moins de 30 m de puissance. Il s'agit alors d'opérer des regroupements de formations suivant la parenté lithologique et/ou la praticabilité des limites. La densité en affleurement peut amener de même à regrouper certaines formations afin de ne pas donner une fausse impression de précision. Il peut être utile dans certains cas de cartographier un horizon repère d'épaisseur faible (niveau de conglomérat, hématite oolithique, etc...): il sera alors représenté sur la carte de manière conventionnelle par un trait.

A plus petite échelle encore (cartes géologiques d'un pays entier, d'un continent, du monde), les cartes lithostratigraphiques ne sont plus réalisables et les unités représentées sont des étages, des séries,... c'est-à-dire des unités de même âge. Il s'agit dans ce cas de cartes chronostratigraphiques.

Ces notions sont clairement explicitées sur base d'exemples tirés des cartes géologiques de Wallonie à l'adresse suivante: http://environnement.wallonie.be/cartosig/cartegeologique/Principes_Carto.htm

7. REPORT DES DONNEES

En résumé, doivent obligatoirement figurer dans le carnet de terrain:

- données personnelles (nom, adresse), table de conversion double-pas/mètre;

- en début de campagne:

  • la région du levé, son but;
  • la déclinaison magnétique de la boussole;
  • un résumé de vos recherches bibliographiques (stratigraphie, tectonique, géomorphologie,...);

- chaque matin:

  • la date, les conditions météo et votre état de santé et humeur du jour (c'est important, car cela influence la qualité de vos observations);
  • la ou les personnes éventuelles avec qui vous travaillez;

- à chaque affleurement:

  • le numéro d'affleurement suivi du numéro du fragment de carte;
  • la localisation de l'affleurement (croquis, visées, description: "le long de la route de Habay à Arlon, à 50 m au SE d'une chapelle, près du bois du Mauvais Passage");
  • la nature de l'affleurement et ses dimensions ("front de carrière d'orientation SE-NW, environ 25x150 m", "talus de route, environ 1x25 m", "rocher isolé, environ 1x3 m", "châblis", "trou à la tarière, 1,5 m de profondeur", "débris épars",...);
  • l'état, la fraîcheur de l'affleurement ("nouvelle excavation", "affleurement envahi de végétation",...);
  • éventuellement un dessin. Ce mode de représentation d'une information est très riche: il favorise une observation minutieuse, il permet de représenter des éléments que l'on ne comprend pas (encore), il permet une bonne mise en relation des divers éléments géométriques de l'affleurement (stratification, schistosité, failles, plis,...), il permet de localiser précisément des mesures et des échantillons et enfin, il permet de se remémorer plus facilement l'affleurement après la campagne de terrain! En exemple, un extrait de carnet de terrain (Fig. III.8);
  • les éléments géométriques (pendage, direction des S, D, plis, failles, polarité), localisés sur un croquis si ces éléments varient à l'échelle de l'affleurement;
  • la lithologie, comprenant le nom de la roche, sa couleur (utiliser éventuellement une échelle de teintes conventionnelles), sa cohésion, sa granulométrie, sa texture, les éventuelles structures sédimentaires. Exemples: "grès jaune friable, fin, à matrice argileuse, à laminations planes parallèles"; "siltite verdâtre bioturbée"; "calcaire massif gris clair de type rudstone",...
  • le contenu fossilifère comprenant: la nature des fossiles (nom), leur taille, leur morphologie, leur abondance, leur état de préservation (frais, érodé, brisé), leur répartition (concentrés, dispersés, en position de vie,...) exemples: "abondants stromatopores globulaires décimétriques, concentrés à la base du banc; certains sont brisés"; "quelques tabulés branchus (Thamnopora?) en position de vie",...
  • les structures diagénétiques: concrétions, nodules, veines, stylolithes,...
  • dans le cas d'affleurements composites, les relations entre les différentes lithologies (croquis ou colonne lithologique) avec les épaisseurs des différentes unités, leurs relations (nature des contacts: joint de stratification, érosion, discordance,...) et les éventuels passages latéraux;
  • enfin, l'interprétation stratigraphique, nettement séparée des observations ("Interprétation: Formation de Trois-Fontaines, probablement base de la formation").

Ne pas oublier que les "formations de couverture" sont également des formations et doivent donc être décrites si elles sont visibles!

Fig. III.8: extrait d'un carnet de terrain, montrant les différents éléments à prendre en considération et la séparation entre localisation, description et interprétation.

Sur la carte de terrain figurent au crayon:

- pour chaque affleurement:

  • l'extension et le type d'affleurement (en place, débris, carrière);
  • le numéro de l'affleurement;
  • les données géométriques: direction et pendage de la stratification, du clivage, des diaclases, d'éventuels plans de faille, des plans axiaux des plis; (direction et pendage des linéations);

- autres indications: tout ce qui est jugé utile au tracé des limites géologiques: rupture de pente, phénomènes karstiques, zones humides, changement de végétation, etc...

- les tracés des limites des unités cartographiées, les failles, les plis majeurs. Il faut essayer coûte que coûte d'effectuer ces tracés sur le terrain: remettre ce travail à plus tard expose à des remords tardifs... C'est sur le terrain que l'on peut chercher par où passe la limite supposée et trouver des éléments pour confirmer ou infirmer cette hypothèse.

8. LE TRACE

S'il est relativement facile de tracer les limites géologiques quand les contacts sont visibles à l'affleurement, il en va tout autrement quand les contacts sont cachés par des formations superficielles. Divers aides à l'interprétation sont heureusement disponibles. Ces techniques sont passées en revue ci-dessous. Sur la carte, il est recommandé d'utiliser des symboles différents (traits pleins, tirets, pointillés) suivant le degré d'exactitude de la limite géologique (voir Fig. III.16).

Géomorphologie

L'étude géomorphologique donne des résultats particulièrement fructueux dans le cas de roches stratifiées et constituées de niveaux à lithologie très dissemblable. L'altération différentielle induit dans ce cas des différences de relief plus ou moins marquées entre les lithologies différentes. L'exemple le plus connu est la cuestacuesta sinémurienne en Lorraine belge). (exemple:

Il est important de relever les changements latéraux (par rapport à la structure générale) des formes du relief, car ils peuvent correspondre à des variations latérales de faciès (calcaire à schiste par exemple) ou à des modifications structurales (failles, variation de pendage). Ne pas oublier qu'un substrat calcaire se marque souvent par des phénomènes karstiques tels que dolines, pertes, résurgences,...

Photographie aérienne

Outre la photographie aérienne classique, il faut ranger dans ce type de document l'imagerie infrarouge, radar et multi-spectrale. Le point commun de ces techniques est de fournir un aperçu général de la région à cartographier, des traits majeurs de sa géomorphologie et cela dès avant la campagne de terrain.

L'échelle de ces documents permet souvent de découvrir des éléments qui seraient passés inaperçus sur le terrain. La photographie aérienne permet aussi de déterminer par avance les zones favorables en affleurements. Enfin, de manière plus spécifique, elle est un aide efficace au tracé lui-même.

- En vision stéréoscopique, ressortent les traits du relief, les vallons, les rides. Ces éléments du paysage sont fréquemment contrôlés par le substrat.

- Il importe d'accorder une attention particulière aux structures linéaires, appelées "linéaments". Ces linéaments peuvent représenter des niveaux particuliers s'ils sont parallèles à la stratification générale et aider ainsi au tracé des limites de formations. Ils peuvent au contraire être sécants par rapport à la stratification et marquer le passage d'accidents transversaux (Fig. III.9a). Des accidents longitudinaux peuvent également se marquer par des linéaments grossièrement parallèles à la structure générale. Sur les photos aériennes, les linéaments peuvent correspondre à des traits de ton différent, à une séparation entre des zones de tons différents, à des vallons, à des escarpements, des alignements de végétation, des changements abrupts dans le système de drainage, etc...;

Fig. III.9a: région d'Habay-la-Neuve. Photographie aérienne avec tracé des linéaments (en bleu) et des zones de différence de texture (en rouge).

Fig. III.9b: carte géologique des environs de Habay-la-Neuve, tracée à l'aide des photographies aériennes et de sondages à la tarière.

- Il faut aussi accorder une attention minutieuse aux différences de texture, de ton qui peuvent se marquer sur les photos (Fig. III.9a): ces différences peuvent traduire des différences de substrat. Pour ce type d'observation, il est préférable de travailler photo par photo, en vision non stéréoscopique. Voici quelques observations très générales:

  • les sols situés sur substrat imperméable tendent à être plus foncés suite à leur plus grande humidité;
  • le réseau de drainage est plus dense sur les substrats imperméables;
  • les substrats perméables sont souvent plus utilisés par l'agriculture;
  • les calcaires sont caractérisés par une panoplie d'éléments géomorphologiques caractéristiques: dolines, pertes,... Ils donnent généralement naissance à des plages de couleur claire

Il va de soi que toute hypothèse émise sur base aérophotogéologique doit être vérifiée sur le terrain. Ceci acquis, il est possible de généraliser les observations de terrain grâce à la photo aérienne.

Dans notre région, il est généralement assez facile de transposer les éléments repérés sur photo directement sur carte topographique: les points de repère sont nombreux. Le report par une méthode purement géométrique est plus complexe à mettre en oeuvre et sort du cadre de cet abrégé. Consulter par exemple Compton (1985).

Pour conclure ce paragraphe, il faut insister sur le fait que la quantité d'informations contenue dans une photo aérienne dépend énormément des conditions lors de la prise de vue. Pour un même lieu, une photo prise en été durant une sécheresse peut apporter bien plus de données qu'une prise de vue réalisée en hiver. Il est donc hautement recommandé de consulter tous les vols disponibles pour une même région avant d'effectuer son choix.

Charge rocheuse des sols, carte pédologique

Il existe pour certaines régions (dont la Belgique) des cartes pédologiques ou cartes des sols (Fig. III.10). Dans notre cas, il s'agit de documents récents, à 1/20.000, réalisés sur base d'un maillage de forages à la tarière.

Fig. III.10: cartes pédologiques disponibles.

Le caractère systématique de telles observations est évidemment très bienvenu pour nous, qui n'avons généralement pas le temps de nous livrer à de telles opérations. Pour exploiter au maximum les informations contenues dans ces documents, il est fortement conseillé de consulter la notice explicative accompagnant les cartes. La lecture d'une carte pédologique n'est pas facile, car elles comportent de nombreuses teintes et diverses surcharges en raison du nombre important de paramètres qui y sont représentés (caractère argileux, limoneux ou sableux du sol, nature de la charge rocheuse, type de profil, classes de drainage). Dans l'utilisation de ces informations, il faut ici encore procéder par hypothèse et vérification, en allant vérifier sur le terrain, au besoin à la tarière, la validité de nos déductions.

L'inventaire de la charge rocheuse des sols est un excellent moyen de préciser les limites géologiques pour autant que la couverture ne soit pas trop épaisse. Prospecter les labours, les châblis, les excavations au pied des poteaux, les rigoles. Attention aux pièges (apports de terres, de calcaire pour l'amendement, etc...). Sur les versants, il faut tenir compte du déplacement des débris vers le bas. Il est donc recommandé de cartographier la limite supérieure de la formation qui affleure en aval de la pente plutôt que la limite inférieure de la formation supérieure (Fig. III.11).

Fig. III.11: comportement de la charge rocheuse d'un sol sur un versant.

Déplacement du sol sur un versant ("creeping"), mis en évidence par le redressement progressif du tronc du mélèze.

La végétation

La végétation naturelle (et dans une mesure appréciable, les cultures) sont adaptées au type de sol sur lequel elles se développent. Les facteurs les plus importants sont le degré d'humidité (et donc la nature plus ou moins imperméable du substrat) et sa composition chimique, spécialement sa nature calcaire ou non calcaire. De nombreuses plantes sont en effet calcicoles ou calcifuges et leur répartition différentielle doit éveiller l'attention du cartographe (lierre, buis, muguet, jacinthe, etc...).

Position théorique des limites

Dans les séquences où les roches sont stratifiées parallèlement aux limites de formations, il est possible de déduire la géométrie de ces limites des directions de stratification relevées sur les affleurements les plus proches (la limite est toujours parallèle aux directions de So notées sur la carte). Pour une bonne application de ce principe, il faut évidemment apporter grand soin à ces mesures et en particulier veiller à ne pas relever des éléments trop locaux comme des stratifications entrecroisées, des flancs de récifs,...

Méthodes géométriques

Dans le cas de formations non plissées, il peut être intéressant de déterminer graphiquement l'intersection d'un plan (limite de formation, niveau repère) avec la surface topographique. Ceci est également valable pour les plans de faille, s'ils sont réguliers.

Envisageons le cas où le plan en question affleure en un point, où il est possible de déterminer sa direction et son pendage (sud dans l'exemple). On désire donc établir un tracé théorique en connaissant les éléments géométriques du plan et les courbes de niveau de la surface topographique (Figs. III.12a & b):

  • au point d'affleurement (d'altitude connue Z, dans l'exemple: 85 m), tracer sur la carte une droite représentant la direction du plan (azimut cartographique); il s'agit donc d'une première horizontale (h85) du plan;
  • en marge de votre carte, tracer une perpendiculaire à l'horizontale h85; à l'intersection de h85 et de cette perpendiculaire, tracer à l'aide du rapporteur, une droite représentant le pendage de votre plan géologique (ne pas se tromper de sens!); NB: en fait, on travaille maintenant en projection verticale et ce que vous venez de tracer est la projection verticale du plan géologique...
  • toujours sur votre petit morceau de projection verticale, tracer des plans d'altitude correspondant à vos courbes de niveau (ici, 80, 70 m); puisqu'on travaille à l'échelle, ces plans seront séparés par la valeur de l'équidistance;
  • toujours en projection verticale, l'intersection du plan géologique et des horizontales d'altitude 70, 80 m,... vous donne l'écartement de ces horizontales... que vous prolongez sur votre carte (on repasse en projection horizontale) de manière à recouper les courbes de niveau;
  • une autre méthode pour obtenir l'écartement des horizontales = équidistance/tg pendage;

Fig. III.12a: tracé de limites géologiques par la méthode des horizontales (premières étapes); p=pendage.

  • pointer les intersections entre les horizontales et les courbes de niveau de même altitude;
  • joindre les points ainsi définis: cette ligne représente le tracé théorique du plan géologique.

Fig. III.12b: tracé de limites géologiques par la méthode des horizontales (dernières étapes).

Notons que puisqu'un affleurement se localise à l'intersection d'une ligne de direction et d'une courbe de niveau de même altitude, la limite géologique correspondante ne peut recouper ni une courbe de niveau, ni une ligne de direction en dehors des affleurements.

Dans le même ordre d'idées, une construction géométrique très simple permet de trouver le pendage et la direction d'un plan géologique à partir de trois affleurements d'altitude différente, soit a, b et c (Fig. III.12c):

  • joindre par une droite les points d'altitude extrême, a et c; graduer cette droite;
  • pointer sur cette droite la graduation correspondant à l'altitude du point intermédiaire b;
  • joindre cette graduation et b; la droite ainsi tracée représente une horizontale du plan d'altitude b (90 m dans l'exemple);
  • mesurer au rapporteur l'azimut cartographique de cette horizontale: c'est la direction du plan;
  • le pendage p s'obtient en abaissant une perpendiculaire de a sur l'horizontale d'altitude b, par exemple, et en mesurant sa longueur e; appliquer alors tg p=altitude (a)-altitude (b)/e.

Fig. III.12c: tracé de limites géologiques par la méthode des 3 points d'altitude connue.

Le même résultat peut être obtenu avec trois affleurements sur deux courbes de niveau d'altitude différente (la direction est donnée en traçant une horizontale entre les deux affleurements de même altitude; on est ramené ensuite à la dernière étape de la méthode des trois points d'altitude différente). De même, le problème posé par deux affleurements d'altitude différente et la direction de la couche se ramène à tracer une horizontale du plan par un des deux points et à calculer le pendage en suivant également la dernière étape de la méthode des trois points.

Epaisseur d'une couche

L'"épaisseur réelle" (E) ou la "puissance" d'une couche géologique est mesurée perpendiculairement entre les deux plans de stratification de la couche considérée. L'"épaisseur verticale" (Ev) d'une couche est l'épaisseur mesurée suivant la verticale entre les plans de stratification supérieur et inférieur de la couche; elle correspond à la différence d'altitude entre les deux (horizontales des) plans de stratification. Sur une carte, Ev est obtenu facilement en calculant la différence d'altitude mesurée sur une même ligne de direction recoupant les deux limites (inférieure et supérieure) d'une couche géologique.

La "largeur théorique horizontale d'affleurement" (LTHA) est la largeur d'affleurement de la couche qui serait projetée sur la carte si les altitudes des limites inférieure et supérieure de la couche étaient identiques. Sur une carte géologique, LTHA se mesure perpendiculairement à deux lignes de direction de même altitude, l'une appartenant à la limite inférieure de la couche, l'autre à la limite supérieure de la même couche. La "largeur cartographique d'affleurement" (LCA) correspond à la largeur d'une couche géologique telle qu'elle apparaît sur la carte, indépendamment de l'altitude. Suivant la topographie, elle peut être plus ou moins importante. Ces notions sont illustrées à la Fig. III.13.

Fig. III.13: épaisseur réelle (E), épaisseur verticale (Ev), largeur théorique horizontale d'affleurement (LTHA), largeur cartographique d'affleurement (LCA).

Calcul de l'épaisseur réelle (E) d'une couche:

  • cas évidents: pour une couche horizontale, l'épaisseur réelle (E) est donnée par la différence d'altitude entre son sommet et sa base. Pour une couche verticale, E est donnée directement par la distance, mesurée perpendiculairement, entre les deux limites de la couche, c'est-à-dire par la largeur cartographique d'affleurement;
  • couche inclinée, calcul par la largeur théorique horizontale d'affleurement (LTHA).
    • E=LTHA.sin P

      avec P: pendage de la couche

  • couche inclinée, calcul par l'épaisseur verticale (Ev).
    • E=Ev.cos P

      avec P: pendage de la couche

Ces différentes méthodes d'obtention de l'épaisseur d'une couche sont illustrées à la Fig. III.14.

Fig. III.14: calcul de l'épaisseur réelle (E) d'une couche à partir de la largeur théorique horizontale d'affleurement (LTHA) ou de l'épaisseur verticale (Ev).

 

Fig. III.15: autres méthodes de calcul de la puissance d'une couche.

Les failles

Hormis les cas où la présence d'une faille est visible à l'affleurement, l'existence de ces accidents doit être déduite d'autres observations. Citons:

  • le déplacement, la répétition ou l'absence d'unités géologiques suivies en affleurement ou sur photographie aérienne;
  • la présence de brèches de faille, parfois associées à des minéralisations;
  • l'augmentation du nombre de fractures, de veines;
  • le rebroussement de la direction des couches;
  • les stries de glissement. Il est certainement utile d'en mesurer la direction et le plongement, mais il faut se souvenir que les stries ne témoignent que du dernier mouvement relatif entre les deux compartiments de la faille, mouvement qui n'est pas forcément dans le même sens que le rejet principal;
  • les éléments topographiques rectilignes; il peut s'agir de vallons (cas où l'érosion est accentuée par une zone de faiblesse, une brèche de faille) ou d'une zone surélevée (cristallisation dans la zone de faille d'un minéral plus résistant à l'érosion que l'encaissant). Garder à l'esprit que les éléments topographiques rectilignes peuvent être aussi la conséquence de simples fractures sans déplacement.

Il est utile de mesurer les directions et pendages des fractures et diaclases, même si elles ne présentent pas de rejet apparent: ces structures mineures possèdent souvent les mêmes éléments géométriques que des failles beaucoup plus importantes.

9. LES DOCUMENTS DEFINITIFS

En cours de travail

Il est indispensable de compléter, après chaque journée de terrain, une liste des affleurements, sous quelque forme que ce soit, si possible sur un système de base de données informatique. On en profitera pour ajouter la localisation cartographique des points (latitude, longitude, altitude ou X, Y, Z), calculée à partir d'une carte ou, solution plus rapide, issue d'un système d'information géographique ("GIS" exemple: arcinfo).

Il faut également reporter toutes les indications de la carte de terrain sur une carte "de bureau", non découpée, ou encore sur un GIS. Utilisez une couleur différente par type d'information sur votre carte définitive (traditionnellement: verte pour les limites d'affleurement, bleue pour la géomorphologie, noire pour les informations géologiques et rouge pour les numéros d'affleurement). La grosseur de trait conseillée est de 0,5 à 0,7 mm pour les failles et de 0,3 à 0,4 mm pour toutes les autres informations. Tout comme sur la carte de terrain, les éléments géométriques sont reportés soigneusement à l'aide du rapporteur. Enfin, il faut colorier la carte en respectant si possibles les teintes conventionnelles (voir par exemple les teintes utilisées sur la carte géologique de Belgique) et en accentuant la couleur sur les affleurements.

Fig. III.16: principaux symboles utilisés en cartographie géologique.

Ce travail de mise au net permet de:

  • limiter la gravité d'une perte du carnet de terrain ou de la carte;
  • améliorer la lisibilité des données;
  • contrôler la cohérence des informations;
  • mettre en évidence les zones où l'information est insuffisante et préparer l'itinéraire du lendemain;
  • ajouter dans le carnet des réflexions basées sur le travail recopié.

Après le travail de levé

Au carnet de terrain et à la carte définitive, s'ajoute une "notice explicative" destinée à faciliter la compréhension de la carte, à expliciter le choix de telle ou telle interprétation, à mettre clairement en évidence les problèmes non résolus, à situer la carte dans un contexte plus général. Cette notice explicative doit comprendre les chapitres suivants:

- une introduction:

  • replacer la zone levée dans un cadre géographique et géologique général;
  • commenter brièvement les documents antérieurs existants;
  • expliciter la répartition et la densité des affleurements et la/les techniques de levé utilisées;
  • détailler l'hydrographie et la géomorphologie;

- pour chaque unité cartographiée:

  • description détaillée de la lithologie de la formation dans la zone cartographiée, de ses variations latérales;
  • sélection des affleurements les plus représentatifs;

- chapitres de synthèse:

  • structure de la zone cartographiée;
  • éventuellement matériaux exploitables, curiosités, etc...

On pourra éventuellement s'inspirer de la présentation des notices explicatives fournies avec les nouvelles cartes géologiques à 1/25.000 de la région wallonne.

Le travail sera accompagné d'une colonne stratigraphique présentée sous la forme d'une colonne lithologique des formations affleurant sur la carte, d'une légende et d'une coupe, tracée à la même échelle que la carte géologique et orientée perpendiculairement aux structures majeures de la région. Eviter les exagérations verticales qui nécessitent une correction des pendages. La technique à suivre est illustrée par la Fig. III.17.

Construction de la coupe topographique:

  • matérialiser la coupe par une ligne sur la carte topographique;
  • construire à l'échelle une succession d'horizontales d'altitude croissante (le pas correspondant à l'équidistance de la carte utilisée);
  • pour chaque intersection de la coupe avec une courbe de niveau, abaisser une verticale sur l'horizontale d'altitude correspondante;
  • rejoindre les points ainsi définis. Cela représente le profil du terrain.

Construction de la coupe géologique:

  • pour chaque intersection de la coupe avec une limite géologique, abaisser une verticale sur le profil;
  • reporter également les pendages sur le profil. Si la direction relevée sur un affleurement n'est pas perpendiculaire à la coupe, il faut calculer la valeur de l'inclinaison (i) de la structure géologique dans le plan de la coupe de la manière suivante: i=arctg (tg p.sin d) avec p= pendage de la structure géologique et d=l'angle aigu entre la direction de la structure et celle de la coupe;
  • en s'aidant des pendages et de la disposition des limites géologiques, tracer la coupe.

Fig. III.17a: construction de la coupe topographique.

 

Fig. III.17b: construction de la coupe géologique.

 

IV. Le levé banc par banc

1. INTRODUCTION

Il s'agit d'une technique de levé utilisée plus fréquemment par le sédimentologue ou le stratigraphe que par le cartographe. Ce dernier est cependant amené à pratiquer le banc par banc pour se familiariser avec la lithologie de détail d'une formation (c'est la seule manière d'être à même d'identifier une formation sur base d'affleurements très réduits).

Quoique très simple à mettre en oeuvre, puisqu'il s'agit de mesurer et décrire successivement tous les bancs d'une coupe, cette technique demande de l'attention et de la rigueur: il ne faut pas oublier qu'un levé banc par banc est à la base de toute étude sédimentologique.

Cette technique permet entre autre de:

  • établir la succession des lithofaciès et des microfaciès;
  • positionner de manière univoque les échantillons pétrographiques, les fossiles, les échantillons prélevés pour analyse géochimique, etc...
  • établir un découpage séquentiel;
  • établir des corrélations stratigaphiques, séquentielles,...
  • etc,...

2. PRELIMINAIRES

Une étude bibliographique préliminaire permet souvent de gagner beaucoup de temps en glanant des informations quant au positionnement biostratigaphique de la coupe ou quant à d'autres types d'investigation déjà réalisées. S'il s'agit d'une nouvelle coupe, il est fructueux de susciter des collaborations avec des spécialistes afin de dater les unités étudiées.

Le choix d'une coupe est influencé par divers facteurs dont:

  • sa continuité, sa qualité (pas d'hiatus, de problèmes tectoniques);
  • sa représentativité au sein du bassin de sédimentation;
  • son accessibilité.

Sur le terrain, il faut parcourir les abords de la coupe pour comprendre la structure de la zone considérée, pour déceler les éventuelles complications tectoniques et également pour déterminer le cheminement du levé.

3. FACE A LA COUPE

Généralités

Pour effectuer le découpage en bancs, il est bon de se reculer pour embrasser du regard tout l'affleurement: il faut juger de la continuité latérale des joints. Le levé banc par banc nécessite un continuel changement d'échelle d'observation. Par ailleurs, il est utile de numéroter les bancs (peinture en bombe) si le levé doit être interrompu; par respect pour la nature et pour les autres, ne "taggez" pas;

Le carnet de terrain se prépare avec le même soin que pour une campagne cartographique: localisation précise de la base de la coupe (schéma, XYZ), météo, échelle des dessins et sur la page de garde, tableau des symboles utilisés.

La Fig. IV.1 montre la présentation suggérée: de la gauche vers la droite: épaisseur des bancs (cm), couleur (choisir des symboles), colonne lithologique proprement dite, numéro de banc, numéro d'échantillon, commentaires. Ceci appelle les observations suivantes:

  • il faut toujours dessiner votre colonne lithologique à l'échelle (d'où l'intérêt d'un carnet de terrain ligné ou quadrillé): si dans la fougue du levé, vous oubliez de noter une épaisseur, il vous sera toujours possible de la déduire du dessin; de même, le dessin permettra de lever une incertitude sur un chiffre mal écrit;
  • il faut autant que possible que le banc que vous dessinez dans votre carnet ressemble à ce que vous voyez: s'il est plus altéré, plus tendre, dessinez le en retrait; s'il est d'épaisseur variable ou biseauté, montrez-le sur votre dessin; s'il est plus massif, faites-le ressortir; ce respect scrupuleux de la réalité a non seulement pour but de refléter les caractères sédimentologiques, mais permet aussi de s'y retrouver lorsque l'on revient à l'affleurement après une interruption du travail;
  • même remarque pour les bases, sommets de bancs, joints, discontinuités,... dessiner ce que l'on voit!

 

Fig. IV.1: extrait d'un carnet de terrain. Log ou colonne lithologique.

D'une manière générale, la colonne lithologique doit être un document objectif qui ne comporte que des éléments observables sur le terrain. Tout géologue muni de cette colonne devrait idéalement pouvoir repérer les différentes unités. Il n'est donc pas recommandable de brouiller les pistes en y indiquant des caractères non visibles à l'affleurement ou pire, de représenter des caractéristiques résultant d'autres types d'approche par des variations de paramètres d'affleurement (par exemple représenter la structure microscopique de la roche par des variations dans la forme des bancs). Les coupes interprétatives par contre autorisent ce genre de manipulation, pour autant que le lecteur en soit prévenu.

Les éléments à observer (et à consigner sur la colonne lithologique)

  • épaisseur, couleur, morphologie du banc;
  • première idée de la lithologie et de la texture (calcaires: mudstone, rudstone,...) (Fig. IV.3);
  • variabilité verticale et latérale (exemple: rudstone passant verticalement à un floatstone,... );
  • identification et report sur la colonne lithologique des structures sédimentaires;
  • identification des macrofossiles (Fig. IV.2) et, ce qui est au moins aussi important, de la densité, des relations entre les organismes: encroûtements, succession de communautés différentes,... Apporter une attention particulière à la morphologie (lamellaire, bulbeux, branchu,...) et à l'état des organismes: brisés, érodés, en position de vie, couchés dans la même direction, etc... Toutes données essentielles à l'interprétation des paléoenvironnements;
    • Classification morphologique de Abott (1973)
      • formes lamellaires formes planes avec longueur/hauteur >10/1
      • formes tabulaires l/h < 10/1
      • formes subsphériques
      • formes nodulaires subsphériques de diamètre < 8 cm
      • formes hémisphériques
      • formes bulbeuses formes irrégulières de grande taille avec l=h
  • la localisation précise des échantillons.

Fig. IV.2: quelques symboles lithologiques (roches sédimentaires) et organismes fossiles.

Quelques mots sur l'échantillonnage pétrographique

D'une manière générale, on peut dire que la densité d'échantillonnage est fonction de la variabilité des lithofaciès. Pour préciser quelque peu, Flügel (1982, p. 7-8) montre, après une revue de la littérature, que pour l'étude de carbonates de plate-forme, les auteurs utilisent en moyenne un pas d'échantillonnage compris entre 10 et 30 cm et pour l'étude de carbonates d'eau profonde, un pas de 100 à 250 cm. Il est de toute façon souvent possible de revenir à la coupe pour compléter l'échantillonnage (d'où l'avantage de numéroter les bancs).

En pratique, il ne faut pas oublier d'orienter les échantillons (flèche pointant vers le bas stratigraphique) et utiliser un moyen de numérotation indélébile (sachets marqués, marqueur permanent sur l'échantillon même,...).

4. QUELQUES MOTS SUR LA CLASSIFICATION DES ROCHES

Une bonne classification de terrain doit être descriptive et comprise du plus grand nombre. En ce qui concerne les roches siliciclastiques, il semble difficile sur le terrain d'aller plus loin que la trilogie grès-siltite-shale. Ces dénominations qui concernent essentiellement la granulométrie doivent être complétées par des qualifications quant à la nature du ciment pour les grès et quant aux structures sédimentaires. Exemples: grès jaunâtre à ciment dolomitique et laminations entrecroisées; siltite verte laminaire; shale grisâtre bioturbé, siltite grise à niveaux gréseux centimétriques, laminaires ou à stratifications entrecroisées, etc...

Pour les roches carbonatées, il faut s'efforcer d'appliquer la classification de Dunham (1962), complétée par Embry & Klovan (1971) (Fig. IV.3).

On consultera si nécessaire le lexique de géologie sédimentaire.

Fig. IV.3: classification des roches calcaires selon Dunham (1962) et Embry & Klovan (1972).

 


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