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  Informations quantique
 

L'informatique quantique (nous devrions plutôt parler de "calculation quantique" car nous somme actuellement très loin d'un système d'entrée/sortie) est un exemple royal de l'utilisation des spécificités des modèles théoriques de la physique quantique pour le traitement et la transmission de l'information.

Toutefois il faut aussi se rappeler que le comportement des transistors gravés sur la puce de votre ordinateur n'a pu être imaginé en 1947 par Bardeen, Brattain et Shockley qu'à partir de leurs connaissances en physique quantique. Donc la totalité de nos appareils électroniques fonctionnant déjà sur la base de semi-conducteurs fonctionnent à l'aide de développements obtenus grâce à la physique quantique.

La grande nouveauté, depuis le début des années 1980, est la possibilité pour les physiciens de manipuler et d'observer des objets quantiques élémentaires individuels : photons, atomes, ions, etc. C'est cette possibilité de manipuler et d'observer des objets quantiques élémentaires qui est à l'origine de l'information quantique, où ces objets quantiques élémentaires permettront de construire physiquement les qubits. Cela dit, aucun concept fondamentalement nouveau n'a été introduit depuis les années 1930, et les pères fondateurs de la physique quantique (Heisenberg, Schrödinger, Dirac, Planck, Einstein,…), s'ils ressuscitaient aujourd'hui, ne seraient pas surpris par l'informatique quantique, même s'ils seraient sûrement éblouis par les prouesses des expérimentateurs qui réalisent aujourd'hui des expériences qualifiées à l'époque de "gedanken experiment" (expérience imaginaire).

Il vaut aussi la peine de signaler que la miniaturisation croissante de l'électronique va trouver ses limites en raison des effets quantiques, qui vont devenir incontournables en dessous du nanomètre. Ainsi, nous estimons que la loi de Moore (hypothèse selon quoi la puissance de calcul des machine double à peu près tous les 18 mois) pourrait ne plus être valable d'ici 2015-2020.

Il est fort à parier que la mode de l'étude de la physique quantique et son application à l'informatique quantique (et l'électronique quantique et la télecommunication quantique) va exploser dans les décennies à venir (surtout vers la fin du 21ème siècle). Ainsi, les écoles d'ingénieurs intégreront presque dans tous les domaines la physique quantique dans les programmes scolaires. Ce que les physiciens étudient depuis bientôt déjà presque 100 ans dans leur cursus.

Avant de passer au côté formel, nous avons jugé cependant intéressant un côté vulgarisé car nous avons remarqué que cela aide à comrprendre les calculs qui seront fait par la suite.

Dans les années 70 et 80, les premiers ordinateurs quantiques naissent par retournement dans l'esprit de physiciens tels que Richard Feynman, Paul Benioff, David Deutsch ou Charles Bennett. L'idée de Feynman était Au lieu de nous plaindre que la simulation des phénomènes quantiques demande des puissances énormes à nos ordinateurs actuels, utilisons la puissance de calcul des phénomènes quantiques pour faire plus puissant que nos ordinateurs actuels.

Longtemps les physiciens ont douté que les calculateurs quantiques utilisables puissent exister, et même que nous puissions en faire quelque chose de viable s'ils existaient. Mais :

- En 1994, Peter Shor, un scientifique d'AT&T montre qu'il est possible de factoriser des grands nombres dans un temps raisonnable à l'aide d'un calculateur quantique. Cette découverte débloque brusquement des crédits.

- En 1996, Lov Grover, invente un algorithme basé sur les calculateurs quantiques permettant de trouver une entrée dans une base de données non-triée.

- En 1998, IBM est le premier à présenter un calculateur quantique de 2 qubits (pour "Quantum Bit").

- En 1999, l'équipe d'IBM utilise l'algorithme de Grover pour la recherche quantique rapide sur une base de données (quantum database search ) sur un calculateur de 3 qubits et battent leur record l'année suivante avec ordinateur de 5 qubits.

- En 2001, IBM crée un calculateur quantique de 7 qubits et factorise le nombre 15 (!) grâce à l'algorithme de Shor (cf. chapitre de Méthodes Numériques). Les ordinateurs à 7 qubits sont bâtis autour de molécules de chloroforme et leur durée de vie utile ne dépasse pas quelques minutes.

- En 2007, la compagnie Canadienne D-Wave lors d'une démonstraiton a présenté un ordinateur quantique à 16 qubits.

La mémoire d'un ordinateur classique est faite donc de bits (cf. chapitre de Systèmes Logiques). Chaque bit porte soit un 1 soit un 0 (mode bipolaire). La machine calcule en manipulant ces bits. Un calculateur quantique travaille sur un jeu de qubits. Un qubit peut porter soit un un, soit un zero, soit une superposition d'un un et d'un zéro (ou, plus exactement, il porte une distribution de phase). Le calculateur quantique calcule en manipulant ces distributions comme nous le verrons dans les détails plus loin.

Interroger un qubit dont la phase n'est pas de 0° ou de 90° ne sert pas à grand-chose : nous obtiendrons la réponse 0 avec une probabilité donnée, et la réponse 1 avec une autre probabilité... et il est possible de construire des générateurs aléatoires bien moins onéreux! En revanche, si nous arrivons à créer un algorithme qui le conduit systématiquement à une phase 0° ou 90°, nous obtiendrons un résultat déterministe. Encore faut-il que celui-ci corresponde à une réponse cherchée.

Un calculateur quantique pourrait être implémenté à partir de toute particule pouvant avoir deux états. Ils peuvent être construits à partir de photons, ou à partir de n'importe qu'elle particule comportant ou atome comportant un spin.

Comme nous le savons, un ordinateur classique ayant trois bits de mémoire peut stocker uniquement trois uns ou zéros digitaux (cf. chapitre de Systèmes Logiques) pour un total de 8 états qu'il doit traiter à part. À un moment donné, il pourrait contenir les bits 101.

Un ordinateur quantique ayant trois qubits peut en fait stocker 16 valeurs, assemblées deux par deux pour former 8 nombres complexes. Il pourrait contenir ceci (nous démontrerons bien sûr d'où vient cela un peu plus loin!) à un instant donné :

État

Amplitude

Probabilité

 

a+ib

(a2 + b2)

000

0.37+i0.04

0.14

001

0.11+i0.18

0.04

010

0.09+i0.31

0.10

011

0.03+i0.30

0.18

100

0.35+i0.43

0.31

101

0.40+i0.01

0.16

110

0.09+i0.12

0.02

111

0.15+i0.16

0.05

  (1)

La première colonne montre tous les états possibles pour trois bits. Un ordinateur classique peut donc seulement porter un de ces états à la fois. un ordinateur quantique, lui, peut être dans une superposition de ces 8 états à la fois. La deuxième colonne montre l'amplitude pour chacun des 8 états. Ces 8 nombres complexes sont un instantané du contenu d'un ordinateur quantique à un moment donné. Durant le calcul, ces trois nombres changeront et interagiront les uns avec les autres. En ce sens, un ordinateur quantique à trois qubits a bien plus de mémoire qu'un ordinateur classique à trois bits.

Cependant, il n'est pas possible de voir directement ces trois nombres. Quand l'algorithme est fini, une seule mesure est accomplie. La mesure retourne une simple chaîne (string) de 3 bits et efface les 8 nombres quantiques. De plus le repport de calculs intermédiaire doit utiliser l'intriciation quantique ce qui est loin d'être simple.

La troisième colonne donne la probabilité pour chacune des chaînes possibles. Dans cet exemple, il y a 14% de chance que la chaîne retournée soit 000, 4% que ce soit 001, ainsi de suite. Chaque nombre complexe est nommé "ampere" et chaque probabilité une "amplitude carrée". La somme des huit probabilités est égale à un.

Typiquement, un algorithme d'un ordinateur quantique initialisera tous les nombres complexes à des valeurs égales, donc tous les états auront les même probabilités. La liste des nombres complexes peut être imaginée comme un vecteur à 8 éléments. À chaque étape de l'algorithme, le vecteur est modifié par son produit avec une matrice. La matrice provient de la physique de la machine et sera toujours inversible, et s'assurera que les probabilités continuent à être égales à un

Il faut d'abord réaliser un calcul conduisant à un état non-superposé. En effet, si on interroge un qubit qui se trouve dans une superposition d'états, la réponse sera aléatoire et ne nous apprendra pas grand-chose. Il faut donc trouver un algorithme donnant une réponse unique pour tous les chemins de calcul possibles. C'est un problème semblable à celui des énigmes où l'on doit obtenir une réponse toujours vraie en la posant à une série d'intermédiaires dont on sait que certains mentent toujours et d'autres jamais. La question est donc de trouver un calcul parvenant à cet invariant, par exemple dans le cas du cassage d'un code la clé de chiffrage que l'on cherche à déterminer.

Un autre problème ensuite est de le mesurer : la lecture d'un seul bit d'un état quantique détruit la totalité de cet état. Il faudra donc refaire le calcul autant de fois que la réponse souhaitée comporte de bits, mais le temps correspondant sera juste proportionnel à ce nombre de bits et non exponentiellement plus grand, ce qui est justement le but recherché.

Commençons par comprendre les concepts sous-jacents à la théorique quantique de l'informatique quantique avec une étude la polarisation du photon.

POLARISATION DU PHOTON

Depuis Einstein, nous savons que la lumière est composée de photons, ou particules de lumière et celle-ci a un aspect duaire onde-particule (cf. chapitre d'Optique Ondulatoire). Si nous réduisons l'intensité lumineuse d'un faisceau de photons, nous devrions pouvoir étudier la polarisation des photons individuels, que nous savons parfaitement détecter à l'aide de photomultiplicateurs. Supposons que l'expérience détecte N photons. Lorsque , nous devons retrouver les résultats de l'optique ondulatoire (voir chapitre du même non).

Effectuons par exemple l'expérience suivante :


  
(2)

Une lame biréfringente sépare un faisceau lumineux dont la polarisation fait un angle avec Ox en un faisceau polarisé suivant Ox et un faisceau polarisé suivant Oy, les intensités étant respectivement et (selon la démonstration de la loi de Malus fait en optique ondulatoire).

Réduisons l'intensité de telle sorte que les photons arrivent un à un, et plaçon deux photodétecteurs derrière la lame. L'expérience montre que ne cliquent jamais simultanément (sauf cas de "dark count" où un compteur se déclenche spontanément) : un photon arrive entier soit sur , soit sur , un photon ne se divise donc pas. D'autre part, l'expérience montre que la probabilité de détection d'un photon par est de . Ainsi, si l'expérience détecte N photons, nous aurons donc photons détectés par :

  (3)

où le tient compte des fluctuations statistique. Comme l'intensité lumineuse est proportionnelle au nombre de photons, nous retrouvons bien la loi de Malus à la limite .

Cependant, nous notons deux problèmes :

1. Pouvons-nous prévoir, pour un photon donné, s'il va déclencher ou ? La réponse de la théorie quantique est NON, énoncé qui a profondément choqué Einstein (Dieu ne joue pas aux dés!). Certains physiciens (dont Einstein) ont été tentés de supposer que la théorie quantique était incomplète, et qu'il y avait des "variables cachées" dont la connaissance permettrait de prévoir le sort individuel de chaque photon. Moyennant des hypothèses très raisonnables sur lesquelles nous reviendrons, nous savons aujourd'hui que de telles variables cachées sont exclues. Les probabilités de la théorie quantique sont nous le savons (cf. chapitre de Physique Quantique Ondulatoire), intrinsèques! Elles ne sont pas liées à une connaissance imparfait de la situation physique, comme c'est le cas par exemple dans le jeu de pile ou face.

2. Si nous recombinons les deux faisceaux de la première lame biréfringente, en utilisant une seconde lame symétrique à la première :


  
(4)

Si nous cherchons la probabilité qu'un photon traverse l'analyseur, un photon peut choisir le trajet x, il a ensuite une probabilité de traverser l'analyseur soit une probabilité totale . S'il choisit le trajet y, il aura une probabilité de traverser l'analyseur. La probabilité totale s'obtient donc en additionnant les probabilités des deux trajets possibles : avec une probabilité

  (5)

Ce résultat est FAUX ! En effet l'optique classique nous apprend que l'intensité est (cf. chapitre d'Optique Ondulatoire) et le résultat correct, confirmé par l'expérience est :

  (6)

Ce qui n'est pas du tout la même chose !

En fait, pour retrouver les résultats de l'optique ondulatoire, il faut se rappeler que la probabilité en physique quantique s'obtient par la norme au carré de l'amplitude de probabilité (cf. chapitre de Physique Quantique Ondulatoire). Ainsi :

  (7)

et nous devons additionner les amplitudes pour des trajets indiscernables et en utilisant les relation trigonométriques de base, nous obtenons :

  (8)

ce qui redonne bien :

  (9)

Supposons que nous ayons un moyen de savoir si le photon emprunte le trajet x ou le trajet yx et ceux qui ont choisi le trajet y. (impossible dans notre cas, mais des expériences analogiques répondant à la question "Quel trajet?" ont été réalisées avec des atomes). Nous pourrions alors diviser les photons en deux classes, ceux qui ont choisi le trajet

Pour les photons ayant choisi le trajet x, nous pourrions bloquer le trajet y par un cache sans rien changer, et inversement pour les photons ayant choisi le trajet y nous pourrions bloquer le trajet x. Bien évidemment, le résultat ne peut être alors que . Si nous arrivons à discriminer entre les trajets, le résultat n'est plus le même, les trajets sont plus indiscernables. Dans les conditions expérimentales où il est impossible en principe de distinguer entre les trajets, nous pouvons dire au choix :

1. Soit que le photon emprunte les deux trajets à la fois (…)

2. Soit que cela n'a pas de sens de poser la question "Quel trajet?", puisque les conditions expérimentales ne permettent pas d'y répondre.

Il faut noter que si l'expérience permet de décider entre les deux trajets, le résultat est , même si nous décidons de ne pas les observer. Il suffit que les conditions expérimentales permettent, en principe, de distinguer entre les deux trajets.

qubit

Nous pouvons utiliser la polarisation des photons pour transmettre de l'information, par exemple par un fibre optique. Nous décidons tout à fait arbitrairement, d'attribuer la valeur 1 du bit à un photon polarisé suivant Ox et la valeur 0 à un photon polarisé suivant Oy.

Pour étudier la théorie, il est devenu traditionnel de se représenter deux personnes qui échangent de l'information sont appelées conventionnellement Alice (A) et Bob (B). Alice envoie par exemple à Bob une suite de photons polarisés suivant :

yyxyxyyyx…   (10)

Bob analyse la polarisation de ces photons à l'aide d'une lame biréfringente et en déduit le message d'Alice :

001010001…   (11)

Ce n'est évidemment pas une façon très efficace d'échanger des messages, mais c'est à la base de la cryptographie quantique (cf. chapitre de Cryptographie). Cependant la question intéressante est maintenant : quelle est la valeur du bit que nous pouvons attribuer par exemple à un photon polarisé à 45° ? Suivant les résultats précédents, un photon polarisé à 45° est une superposition linéaire d'un photon polarisé suivant Ox et d'un photon polarisé suivant Oy. Un qubit est donc une entité beaucoup plus riche qu'un bit ordinaire, qui ne peut prendre en logique stricte que les valeurs 0 et 1.

En un certain sens, un qubit peut prendre toutes la valeurs intermédiaires entre 0 et 1 et contiendrait donc une quantité infinie d'information ! Cependant cet énoncé optimiste est immédiatement démenti lorsque nous nous rendons compte que la mesure du qu-bit ne peut donner que le résultat 0 ou 1, quelle que soit la base choisie. Malgré tout, nous pouvons nous poser la question de cette "information cachée" dans la superposition linéaire et nous verrons que nous pouvons l'exploiter sous certaines conditions.

Afin de rendre compte de la possibilité des superpositions linéaires, il est naturel d'introduire pour la description mathématique de la polarisation un espace vectoriel complexe (cause : phaseurs) à deux dimensions correspondant au plan de polarisation comme nous l'avons vu en optique ondulatoire. Nous noterons cet espace vectoriel (nous reprenons la notation des espaces de Hilbert) et l'appellerons "l'espace de Hilbert des états de polarisation".

Nous pouvons très bien décomposer le vecteur correspondant aux polarisations linéaires Ox et Oy en deux vecteurs kets et tel que tout état de polarisation (qu'il soit linéaire, circulaire ou autre) pourra se décomposer suivant cette base :

  (12)

Ainsi, une polarisation linéaire sera décrite par des coefficients réels, mais la description d'une polarisation circulaire ou elliptique exigera bien évidemment de faire appel à des coefficients complexes!

Les amplitudes de probabilité vont correspondre à un produit scalaire sur cet espace. Soit deux vecteurs correspondant donc à deux polarisations différentes:

  (13)

Le produit scalaire hermitique (cf. chapitre de Calcul Vectoriel) sera donc :

  (14)

Maintenant, un état de polarisation linéaire (cf. chapitre d'optique Ondulatoire) suivant sera donné logiquement par (si nous nous restreignons au cas linéaire donc!):

  (15)

sont des vecteurs de norme unité. Ce qui est conforme à la représentation mentale:


  
(16)

où l'amplitude du champ est normalisée à l'unité.

L'amplitude de probabilité pour qu'un photon polarisé suivant traverse un analyseur orienté suivant pourra maintenant s'écrire :

  (17)

et la probabilité de traverser l'analyseur sera donnée toujours donnée par la norme au carré de cette amplitude comme nous l'avons démontré plus haut :

  (18)

De façon générale, nous définirons des amplitudes de probabilité, où sont des états de polarisation :

  (19)

et la probabilité correspondante sera :

  (20)

Nous sommes maintenant prêts à aborder la question cruciale de la mesure dans le cadre de cette expérience quantique. Reprenons l'ensemble polariseur/analyseur, en supposant que l'analyseur est orienté suivant Ox. Si le polariseur est aussi orienté suivant Ox, un photon sortant du polariseur traverse l'analyseur avec un probabilité de 100%; si le polariseur est orienté suivant Oy, la probabilité est nulle. L'analyseur effectue un test (de la polarisation), et le résultat du test est 1 ou 0. Le test permet donc de connaître l'état de polarisation du photon.

Mais ceci n'est pas le cas général!

Supposons que le polariseur soit orienté suivant la direction générale ou la direction orthogonale (il y a une rotation de ) . Nous avons alors en utilisant les propriétés du cercle trigonométrique:

  (21)

et donc si le polariseur prépare par exemple le photon dans l'état et que l'analyseur est orienté suivant Ox, la probabilité de réussite du test sera toujours quelque soit le type de polarisation!! Rappelons que dans cet exemple, après le passage dans l'analyseur, l'état de polarisation du photon n'est plus , mais . La mesure modifie donc l'état de polarisation.

Remarque: Bien sûr, une autre manière de voir que les deux vecteurs plus hauts sont orthogonaux est d'effectuer un produit scalaire et de constater que celui-ci est nul.

Nous constatons une différence de principe entre la mesure en physique classique et la mesure en physique quantique. En physique classique, la quantité physique à mesurer préexiste à la mesure : si un radar mesure la vitesse de votre voiture à 180 Km/h sur l'autoroute, cette vitesse préexistait à sa mesure par le gendarme. Au contraire, dans la mesure de polarisation d'un photon par un analyseur orienté suivant Ox, le fait que le test donne une polarisation suivant Ox ne permet pas de conclure que le photon testé avait au préalable sa polarisation suivant Ox.

Donc nous avons un dispositif préparant le système quantique dans l'état et d'un second capable de le "préparer" dans l'état que nous utiliserons comme analyseur. Après le test, le système quantique sera donc dans l'état , ce qui veut dire du point de vue mathématique que nous réalisons une projection orthogonale sur .

Soit ce projecteur, alors la projection orthogonale vectorielle (cf. chapitre de Calcul Vectoriel) est donnée par :

  (22)

ce qui consiste (pour rappel) en un simple produit scalaire (projection orthogonale scalaire) multiplié par le vecteur . Ce que nous pouvons écrire de manière très commode (convention d'écriture) :

  (23)

et donc :

  (24)

La projection du vecteur d'état est appelée, comme nous l'avons déjà vu (cf. chapitre de Physique Quantique Ondulatoire), dans l'interprétation de Copenhague de la physique quantique "réduction du vecteur d'état", ou, pour des raisons historiques, "réduction du paquet d'ondes". Cette réduction du vecteur d'état est une fiction commode de l'interprétation de Copenhague, qui évite d'avoir à se poser des question sur le processus de mesure...

Le lecteur habitué à l'algèbre linéaire (voir chapitre du même nom) remarquera trivialement que nous pouvons manipuler la convention de notation du projecteur comme une matrice (application linéaire) telle que dans deux car particuliers simples (ceux qui nous intéressent!):

  (25)

Effectivement:

  (26)

et idem pour l'autre composante.

Comme:

  (27)

Nous avons alors:

  (28)

Nous remarquerons que l'opérateur identité peut être écrit comme la somme des deux projecteurs :

  (29)

relation dite "relation de fermeture", qui se généralise à une base orthonormée d'un espace de Hilbert de dimension N :

  (30)

Par ailleurs, les projecteurs commutent (vérification triviale) :

  (31)

Ainsi, les tests sont compatibles (quelque soit le sens de la mesure le résultat en est indépendant). En revanche, les projecteurs :

  (32)

qui satisfont (vérification triviale) à:

  (33)

ainsi qu'à (vérification triviale) :

  (34)

ne commutent pas avec :

  (35)

et donc les tests sont incompatibles.

Pour des développements ultérieurs, il sera utile de remarquer que la connaissance des probabilités de réussite d'un test T permet de définir une valeur moyenne (espérance) :

  (36)

En analogie avec le contexte, nous pouvons lire cela ainsi : l'espérance du test est égale à la valeur représentative du photon orienté selon Ox (correspondant à la valeur 1 arbitrairement) multipliée par la probabilité de passer l'analyseur orienté aussi selon Ox (donc test concluant à 100%) sommée à la valeur représentative du photon orienté selon Oy (correspondant à la valeur 0 arbitrairement) multiplié par la probabilité de passage l'analyseur toujours orienté selon Ox (donc 0% des photons OyOx). passeront le test

Par exemple, si le test T est représenté par la procédure et que nous l'appliquons à un état (contenant comme nous l'avons vu plus haut les valeurs représentatives du photon polarisé en linéaire ou autre...) alors le test correspond à un produit scalaire:

  (37)

et comme nous l'avons vu dans le chapitre de Physique Quantique Ondulatoire, nous savons qu'au fait :

  (38)

est la valeur moyenne d'un opérateur M dans l'état . Ainsi, au test T auquel est associé une procédure , nous pouvons associer le projecteur dont la valeur moyenne dans l'état donne la probabilité de réussite du test.

La généralisation de cette observation permet de construire des propriétés physiques d'un système quantique. Donnons un exemple en revenant au cas de la polarisation. Supposons que nous construisions (de manière tout à fait arbitraire) une propriété d'un photon de la façon suivante :

vaut +1 si le photon est polarisé suivant Ox

vaut -1 si le photon est polarisé selon Oy.

Nous pouvons associer à la propriété physique l'opérateur hermitique :

  (39)

qui vérifie bien (trivial) la relation entre opérateur, valeur propre et vecteur:

  (40)

La valeur moyenne (espérance) de M étant alors (par définition) :

  (41)

Supposons le photon dans l'état de polarisation linéaire , alors la valeur moyenne dans l'état est (trivial) :

  (42)

Avant de voir comment nous pouvons construire un tel opérateur M avec une autre object que le photon et ce avec les mêmes propriétés introduisons un outil mathématique généralisant les conditions et la configuration d'une onde polarisée quelconque:

SPHÈRE DE BLOCH

La sphère de Bloch est comme nous allons le voir une représentation géométrique des états des qubits comme points de la surface d'une sphère.

Un certain nombre d'opérations élémentaire faites en informatique quantique peuvent être sous le choix d'un projecteur adéquat être réalisées avec cette sphère.

Nous allons montrer qu'un état d'un qubit arbitraire peut être écrit:

  (43)

 et ,  définissent un point sur la sphère tridimensionnelle de Bloch".

Les qubits représentés par des valeurs arbitraires de  (invariance de jauge globale selon U(1)) sont tous représentés par le même point sur la sphère de Bloch parce que nous allons montrer que le facteur n'a pas d'effet observable et que nous pourrons alors écrire sans perdre en généralité:

  (44)

ce qui est représenté comme nous le justifieront plus loin par la figure ci-dessous:


  
(45)

La sphère de Bloch est une généralisation de la représentation d'un nombre complexe z avec  comme un point du cercle dans le plan (de Gauss) comme nous l'avons vu lors de notre étude des nombres complexes dans le chapitre traitant des Nombres.

Nous avions vu également dans ce même chapitre qu'un nombre complexe pouvait être représenté par une exponentielle complexe telle que:

  (46)

et si le cercle était unitaire:

  (47)

Notons que la contrainte  élimine un degré de liberté.

Nous allons maintenant noter la décomposition d'un état de polarisation sous la forme:

  (48)

et celle-ci sous une forme plus traditionnelle en informatique quantique (logique vue les bases…):

  (49)

 (eh oui! on est plus dans le cas simple d'une onde polarisée linéairement maintenant…!) sans oublier la condition de normalisation:

  (50)

Nous pouvons donc écrire le qubit sous la forme:

  (51)

Remarque: Attention il est très important d'avoir lu la partie traitant de la polarisation de la lumière dans le chapitre d'Optique Ondulatoire pour comprendre que cela ne tombe pas du ciel! A la différence, que nous ne travaillons pas ici avec des phaseurs car la solution de l'équation d'évolution de Schrödinger comporte des exponentielles complexes comme nous l'avons vu dans le cadre de la résolution de celle-ci pour un mode propre d'une particule libre.

Ajouter un facteur de phase globale ne devrait avoir aucune influence sur les coefficients  car:

  (52)

et similairement pour . Ainsi, nous sommes libres de multiplier notre qubit polarisé et normalisé:

  (53)

par la phase globale  ce qui donne:

  (54)

En plus, nous avons toujours la condition de normalisation  à respecter (imposer).

En revenant aux coordonnées cartésiennes nous avons:

  (55)

et la contrainte de normalisation donne alors:

  (56)

Ce qui est l'équation d'une sphère unitaire dans l'espace  avec les coordonnées cartésiennes . D'où l'origine quantique de la sphère de Bloch!

Nous savons (cf. chapitre de Calcul Vectoriel) que les coordonnées cartésiennes sont reliées aux coordonnées sphériques par les relations:

  (57)

donc en renommant  et en se rappelant que , nous pouvons écrire:

  (58)

Nous avons maintenant plus que deux paramètres utiles à connaître pour définir notre point sur la sphère unité (et ce toujours à l'arbitraire de phase près).

Le lecteur remarquera que contrairement au qubit polarisé linéairement, le cas général ci-dessus rajoute un terme complexe et qu'inversement en enlevant ce terme supplémentaire, nous retombons sur la relation de l'onde polarisée linéairement vue en début de chapitre.

Mais nous n'en avons pas encore terminé!

Revenons donc à (nous enlevons l'apostrophe pour l'état de polarisation):

  (59)

et remarquons que :

  (60)

et:

  (61)

en oubliant pas que  et que dans ce cas le facteur exponentiel devant  est un changement de phase global sans influence.

Tout cela suggère que  est suffisant pour décrire n'importe quel état de polarisation et donc tous les points de la sphère de Bloch.

Par ailleurs, nous pouvons voir que dans le système le point de coordonnées  est le point opposé à celui de coordonnées :

  (62)

Nous avons par ailleurs (c'est immédiat):

  (63)

et donc des points opposés sur la sphère de Bloch correspondent à des qubits (états de polarisation) orthogonaux!

Ainsi, nous pouvons considérer que l'hémisphère supérieure de la sphère de Bloch puisque les points opposés différent que d'un facteur de phase -1 et sont donc équivalents dans la représentation de la sphère de Bloch.

Ainsi, la relation:

  (64)

est suffisant pour décrire toute la sphère de Bloch dans un espace complexe de dimension 2.

Par construction, chaque point donné par la relation précédente de dimension 2 contient une double représentation d'une rotation dans l'espace réel de dimension 3.

Nous avons vu par ailleurs dans le chapitre de calcul spinoriel qu'une rotation pouvait s'écrire sous la forme:

  (65)

avec pour rappel les matrices de Pauli:

  (66)

Soit avec l'écriture habituelle en informatique quantique:

  (67)

Soit après simplification de la dernière matrice:

  (68)

Maintenant considérons la rotation de notre vecteur d'état de polarisation (dû à un projecteur):

  (69)

Pour obtenir un coefficient de  réel (afin d'avoir un observable dans la projection d'un axe), nous multiplions par un facteur de phase  donnant:

  (70)

donc pour obtenir une rotation atour de l'axe z il suffit de changer .

Donc si nous revenons sur:

  (71)

il peut être montré de la même manière que dans un cadre général un opérateur qubit unitaire peut être écrit sous la forme observable:

  (72)

Il faut choisir ensuite les angles et l'axe de rotation pour définir complètement l'opérateur.

QUBIT DE polarisation

Nous allons voir ici revenir sur le cas de la polarisation du photon mais ce coup-ci, nous allons pouvoir généraliser grâce à la formulation de la sphère de Bloch à n'import qu'elle type de polarisation.

Imaginons pour cela un polariseur qui ne laisse passer que des photons polarisés verticalement suivi d'un photo-détecteur, qui fait 'clic' si un photon est détecté et rien sinon. Ce dispositif nous permet de détecter les photons polarisés verticalement.

Traduisons ceci dans le langage de la mécanique quantique:

Les états du système sont donc les états de polarisation d'un photon. Les mesures de l'observable auront aussi pour valeur ses états de polarisation.

Les mesures possibles sont:

  (73)

Nous noterons les états correspondants . Dans notre configuration, il est alors évident que le couple  sont les valeurs propres et les vecteurs propres d'un opérateur (que nous ne connaissons pas) et que nous noterons donc .

Comme nous le savons,  est une base orthonormée de l'espace des états (de polarisation). C'est la base appelée "base H/V" pour Horizontale/Verticale et qui est notée normalement:

  (74)

Prenons maintenant plus cas:

1. Soit un photon dans l'état:

  (75)

Alors:

  (76)

1. Soit un photon dans l'éta mi vertical/horizontal soit oblique (ce qui peut être assimilé à la superposition quantique de ces deux polarisations):

  (77)

où la racine est juste là pour assurer la condition de normalisation

Alors puisqu'il y a superposition (soit la moitié de chaque dans l'onde totale):

  (78)

- Prenons maintenant n'importe quelle polarisation (et c'est cela que nous n'avions pas avant!):

  (79)

qui est bien normé comme nous le savons.

Alors:

  (80)

La somme des deux probabilités donnant bien 1!

Maintenant, imaginons que nous tournions le polariseur de . Nous noterons la nouvelle base de ce polariseur  déterminée par une rotation d'angle  avec par construction:

  (81)

où la première base correspond donc à la polarisation diagonale et la seconde est appelée polarisation anti-diagonale. Il s'agit donc de la "base D/A" (Diagonale/Anti-Diagonale).

Si nous imaginons que nous avons deux polarisateurs qui se suivent. Le premier ayant la base D/A et le deuxième la base H/V, le premier va préparer le photon polarisé de manière générale dans un état (polarisation) particulier qui sera par construction l'état oblique pour la base H/V. Ainsi notre deuxième polariseur n'aura que des situations du type:

  (82)

Ainsi, cela montre que toute mesure perturbe bien évidemment l'état de polarisation du photon et perturbe donc l'état du système.

Ce résultat est utilisé en cryptographie quantique!

QUBIT DE SPIN 1/2

Nous allons voir ici comment construire un qubit basé sur une particule possédant un spin de ½.

Lors de l'étude de la sphère de Bloch, nous avons examiné un qubit à un instant déterminé et nous avons vu que dans un espace de Hilbert H, ce qubit est décrit (par choix) par un vecteur unitaire:

  (83)

décomposé dans une base orthonormée .

Considérons l'état initial le plus général et minimal correspondant à une orientation arbitraire d'un spin:

  (84)

qui correspond comme nous le savons a deux états opposés (et superposés) sur la sphère de Bloch.

Remarquons que nous avons bien une probabilité normalisée de la forme:

  (85)

Nous avons également vus que la projection selon z par l'opérateur  de l'état  est donné à l'arbitraire de phase par:

  (86)

Maintenant rappelons notre exemple:

  (87)

M était donc un opérateur hermitique. Or. les matrices de Pauli sont des opérateurs hermitiques simples. De plus, comme nous l'avons démontré dans le chapitre de calcul spinoriel, l'opérateur hermitique  (assimilé à M) a comme par hasard les mêmes valeurs propres et vecteurs propres correspondant aux deux relations. Mais s'écrit alors de manière traditionnelle comme nous l'avons vu dans le chapitre de Calcul Spinoriel:

  (88)

ou de manière encore plus condensée encore:

  (89)

De plus cet opérateur satisfait aussi la relation:

  (90)

Et quel est la propriété physique associée à ? Eh bien il s'agit du spin et nous y reviendrons donc un peu plus bas car cela signifie que nous pouvons utiliser le spin 1/2 comme qubit.

Maintenant introduisons l'évolution du système sur cette projection car ce premier n'est pas statique (mais ceci dit cela ne changerait rien à ce cas particulier de le considérer comme statique).

Nous avons vu dans le chapitre de physique quantique ondulatoire ce cette opération consistait dans un cas simple (comme ici) à introduire un terme de phase dépendant du temps du type:

  (91)

Ainsi:

  (92)

Ce qui est noté plus sobrement:

  (93)

Rappelons que l'état d'une particule de spin 1/2 est bi-dimensionnel et décrit par la matrice d'état (cf. chapitre de Physique Quantique Relativiste):

  (94)

Soit :

  (95)

Si nous voulons calculer la moyenne (l'espérance) de l'observable (propriété physique) selon chaque axe nous avons alors en utilisant le cinquième postulat dans le cas de l'axe x :

  (96)

Selon y :

  (97)

Et selon z :

  (98)

Nous retrouvons donc bien pour la composante z (car c'est la seule qui nous intéresse ici) le résultat qui était imposé plus haut sous la forme:

  (99)

à une différence d'angle qui n'est qu'histoire de substitution et d'une amplitude qui permettant de mette en adéquation la particularité de la configuration du système. Nous avons dès lors des relations mathématiques similaire en tout point en ce qui concerne la manipulation des qubits de spin orientés ou des qubits de photons polarisés.

La question que nous pouvons nous poser sur le spin est comment le préparer dans l'état ? Au fait nous pouvons le faire avec un champ magnétique en copiant à l'identique l'expérience de Stern-Gerlach qui permet de séparer un faisceau de particules de spin ½ en deux faisceaux distincts.

Puisque nous connaissons maintenant toutes les valeurs propres et vecteurs propres de l'opérateur de spin S, nous pouvons alors déterminer la forme générale de l'opérateur de spin sous une orientation quelconque:

  (100)

Nous avons par ailleurs:

  (101)

Nous avons  qui est donc un vecteur propre de  avec la valeur propre .

Maintenant, nous savons en utilisant le 5ème postulat que la probabilité de trouver la valeur propre  (de l'opérateur ), lors d'une mesure de la propriété S selon l'axe z effectuée au temps t sur le système quantique préparé dans l'état , est donnée par le carré du module de la projection de la fonction ou vecteur d'état  sur la vecteur ou vecteur propre associé à la valeur propre  (et de son opérateur selon cet axe).

Or l'opérateur selon z est:

  (102)

Pour le même opérateur nous avons vu dans le chapitre de Calcul Spinoriel qu'il avait comme vecteurs propres:

  (103)

Prenons le premier vecteur propre orienté donc selon z sur la sphère de Bloch. Nous avons alors:

  (104)

Et la probabilité selon l'autre vecteur propre donnerait une expression la même expression mais avec un sinus. La somme des deux probabilités nous donnerait alors bien 1!

Nous remarquons donc que les relations sont très similaires entre le photon et le spin dans notre cas d'étude. Ce qui est normal puisque les deux sont des systèmes à deux niveaux, d'où les résultats similaires.

 
 
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