L'encyclopédie des Sciences
  Théorie des Nombres
 

Traditionnellement, la théorie des nombres est une branche des mathématiques qui s'occupe des propriétés des nombres entiers, qu'ils soient entiers naturels ou entiers relatifs, et contient beaucoup de problèmes ouverts qu'il est facile relativement de comprendre, même par les non-mathématiciens.

Plus généralement, le champ d'étude de cette théorie concerne une large classe de problèmes qui proviennent naturellement de l'étude des entiers. La théorie des nombres peut être divisée en plusieurs champs d'étude (théorie algébrique des nombres, théorie calculatoire des nombres, etc.) en fonction des méthodes utilisées et des questions traitées.

Remarque: Le terme "arithmétique" est aussi utilisé pour faire référence à la théorie des nombres. C'est un terme assez ancien, qui n'est plus aussi populaire que par le passé.

Nous avons choisi de ne présenter dans cet exposé, que les sujets qui sont indispensables à l'étude de la mathématique et de la physique théorique ainsi que ceux devant faire absolument partie de la culture générale de l'ingénieur.

PRINCIPE DU BON ORDRE

Nous tiendrons acquis ce principe qui s'énonce ainsi :

Tout ensemble non vide  contient un plus petit élément.

Nous pouvons utiliser ce théorème pour démontrer une propriété importante des nombres appelée "propriété archimédienne" ou "axiome d'archimède" qui s'énonce ainsi :

Pour a est non nul, il existe au moins un entier positif n tel que:

  (1)

En d'autres termes, pour deux grandeurs inégales, il existe toujours un multiple entier de la plus petite, supérieur à la plus grande. Nous appelons "archimédien" des structures dont les éléments vérifient une propriété comparable (cf. chapitre de Théorie Des Ensembles).

Même si cela est trivial à comprendre faisons la démonstration car elle permet de voir le type de démarches utilisés par les mathématiciens quand ils doivent démontrer des éléments triviaux de ce type...

Démonstration:

Supposons le contraire. Il se formule en disant que pour  nous avons :

    (2)

Si nous démontrons que cela est absurde pour tout n alors nous aurons démontré la propriété archimédienne.

Considérons alors l'ensemble:

  (3)

En utilisant le principe du bon ordre, nous déduisons qu'il existe  tel que  pour tout . Posons donc : 

  (4)

Comme  impose également , nous devons avoir :

  (5)

ce qui voudrait dire que , d'où une contradiction évidente. Cette contradiction amène que l'hypothèse initiale comme quoi pour tout n alors est fausse et donc que la propriété archimédienne est démontrée par l'absurde.

C.Q.F.D.

PRINCIPE D'INDUCTION

Soit S un ensemble de nombres naturels qui possède les deux propriétés suivantes :

P1.

P2. Si , alors

Alors :

   (6)

Nous construisons ainsi l'ensemble des nombres naturels.Soit , le symbole " " signifiant "excluant". Nous voulons donc démontrer que .

A nouveau, même si cela est trivial à comprendre faisons la démonstration car elle permet de voir le type de démarches utilisés par les mathématiciens quand ils doivent démontrer des éléments triviaux de ce type...

Démonstration:

Supposons le contraire :

Par le principe du bon ordre, puisque alors , B doit posséder un plus petit élément . Mais puisque , nous avons que , c'est-à-dire aussi . En faisant appel à (P2), nous avons finalement que , c'est-à-dire que , donc une contradiction.

C.Q.F.D.

Exemples : 

E1. Nous souhaitons montrer à l'aide du principe d'induction, que la somme des n premiers carrés est égale à , c'est-à-dire que pour  nous aurions (cf. chapitre de Suites Et Séries):

  (7)

D'abord la relation ci-dessus est facilement vérifiée pour  nous allons montrer que  vérifie aussi cette relation. En vertu de l'hypothèse d'induction:

  (8)

nous retrouvons bien l'hypothèse de la validité de la première relation mais avec , d'où le résultat.

C.Q.F.D.

E2. La suite de Fibonacci (cf. chapitre sur les Suites Et Séries) possède la propriété suivante : la somme des premiers termes consécutifs de la suite, augmentée de 1, est égale au terme qui suit de deux rangs le terme auquel nous nous sommes arrêtés.

Ainsi, nous avons:

  (9)

Pour démontrer cette propriété, nous constatons que cette dernière est aisément vérifiée pour les premières valeurs , de n. Supposons que la propriété ait été démontrée pour n et pour . Nous avons :

  (10)

  (11)

par conséquent, en ajoutant ces deux égalités et tenant compte de la loi de formation nous obtenons :

  (12)

par conséquent la deuxième relation ne diffère que de la première par le changement de n en  est nul. Donc le théorème est démontré. puisque

Ce procédé de démonstration est d'une très grande importance dans l'étude de l'arithmétique; souvent l'observation et l'induction ont permis de soupçonner des lois qu'il eût été plus difficile de trouver par a priori. Nous nous rendons compte de l'exactitude des formules par la méthode précédente qui a donné naissance à l'algèbre moderne par les études de Fermat et de Pascal sur le triangle de Pascal (voir la section d'algèbre)

DIVISIBILITÉ

Définition: Soit  avec . Nous disons que "A divise B (sans restes)" s'il existe un entier q (le quotient) tel que : 

  (13)

auquel cas nous écrivons :

A|B   (14)

Dans le cas contraire, nous écrivons  et nous lisons "A ne divise pas B".

Remarque: Se rappeler que le symbole | est une relation alors que le symbole / est une opération!

Par ailleurs, Si A|B, nous dirons aussi que "B est divisible par A" ou que "B est un multiple de A". Dans le cas où A|B et que , nous dirons que A est un "diviseur propre" de B. De plus, il est clair que A|0 quel que soit  sinon quoi nous avons une singularité.

Voici maintenant quelques théorèmes élémentaires se rattachant à la divisibilité:

T1. Si A|B, alors A|BC quel que soit

Démonstration:

Si A|B, alors il existe un entier q tel que . Alors, et ainsi A|BC.

C.Q.F.D.

T2. Si A|B et B|C, alors A|C.

Démonstration: 

Si A|B et B|C, alors il existe des entiers q et r tels que et . Donc, et ainsi A|C.

C.Q.F.D.

T3. Si A|B et A|C, alors :

,   (15)

Démonstration:

Si A|B et A|C, alors il existe des entiers q et r tels que et . Il s'ensuit que:

  (16)

et ainsi que .

C.Q.F.D.

T4. Si A|B et B|A, alors

Démonstration:

Si A|B et  B|A, alors il existe des entiers q et r tels que  et . Nous avons donc  et ainsi ; c'est pourquoi nous pouvons avoir  si  et qu'ainsi

C.Q.F.D.

T5. Si A|B et  alors

Démonstration:

Si A|B et , alors il existe un entier  tel que . Mais alors, , puisque .

C.Q.F.D.

DIVISION EUCLIDIENNE

La division euclidienne est une opération qui, à deux entiers naturels appelés dividende et diviseur, associe deux entiers appelés quotient et reste. Initialement définie aux entiers naturels non nuls, elle se généralise aux entiers relatifs et aux polynômes, par exemple.

Définition: Nous appelons "division euclidienne" ou "division entière" de deux nombres A et BB par A en s'arrêtant quand le reste devient strictement inférieur à A. l'opération consistant à diviser

Rappelons que tout nombre qui n'a pas de diviseur euclidien est dit "nombre premier" et que tout couple de nombres qui n'ont que 1 comme diviseur euclidien commun sont dits "premiers entre eux".

Soit  avec ; alors, il existe des entiers uniques  q et r tels que , où . De plus, si , alors .

Démonstration:

Considérons l'ensemble:

  (17)

Il est facile de voir que  et que , d'où, d'après le principe du bon ordre, nous concluons que S contient un plus petit élément . Soit q l'entier satisfaisant à . Il reste à montrer que r < A. Supposons le contraire à nouveau (démonstration par l'absurde), c'est-à-dire que . Alors, dans ce cas, nous avons , ce qui est équivalent à ; mais  et , ce qui contredit le fait que  est le plus petit élément de S. Donc, . Enfin, il est clair que si , nous avons A|B, d'où la seconde affirmation du théorème.

C.Q.F.D.

Remarque: Dans l'énoncé de la division euclidienne, nous avons supposé que . Qu'obtenons-nous lorsque ? Dans cette situation, -A est positif, et alors nous pouvons appliquer la division euclidienne à B et -A. Par conséquent, il existe des entiers  q et r  tels que:

  (18)

Or, cette relation peut s'écrire , où bien sûr, -q est un entier. La conclusion est que la division euclidienne peut s'énoncer sous la forme plus générale : 

Soit , alors il existe des entiers  q et r tels que , où . De plus, si , alors .

Les entiers  q et r sont dans la division euclidienne uniques. En effet, s'il existe deux autres entiers  et  tels que  avec toujours , alors  et ainsi . En vertu de (T5) nous avons, si , . Or, cette dernière inégalité est impossible puisque . Donc,  et, puisque , alors ; d'où l'unicité.

PLUS GRAND COMMUN DIVISEUR

Soit  tels que . Le "plus grand commun diviseur" (noté "p.g.c.d." par la suite) de a et b, noté :

    (19)

est l'entier positif  d qui satisfait aux deux propriétés suivantes :

P1. d|a et d|b

P2. si c|a et c|b et alors c|d (par définition)

Notons que 1 est un diviseur commun de deux entiers arbitraires. Cependant, il n'est pas évident que le p.g.c.d. de deux entiers a et b existe toujours; ce fait est démontré dans le théorème suivant (cependant, si le p.g.c.d. existe, il est de par sa définition unique!) dit "théorème de Bézout".

Démonstration:

Soit  tels que . Alors, il existe des entiers x et y tels que:

  (20)

Cette relation est appelée "identité de Bézout" et il s'agit aussi d'une équation diophantienne linéaire (cf. chapitre de Calcul Algébrique).

Considérons l'ensemble . Comme  et , nous pouvons utiliser le principe du bon ordre et conclure que S possède un plus petit élément d. Nous pouvons alors écrire  pour un certain choix .

Il suffit donc de montrer que :

Supposons que . Alors, d'après la division euclidienne, il existe  tels que , où . Mais alors:

  (21)

et donc  et , ce qui contredit le fait que d est le plus petit élément possible de S. Donc, d|a et, de la même façon, nous démontrons que d|b.

Comme corollaire important montrons maintenant que si tels que , alors :

  (22)

constitue l'ensemble de tous les multiples de :

Comme d|a et d|b, alors  pour tout . Soit . Nous voulons montrer que .

Soit d'abord  ce qui signifie que d|s et qui implique . Soit un , cela voudrait donc dire que  pour un certain .

Comme  pour un choix d'entiers quelconques , alors:

  (23)

C.Q.F.D.

Les hypothèses peuvent sembler compliquées mais portez plutôt votre attention un certain temps sur la dernière relation. Vous allez tout de suite comprendre!

Remarque: Si au lieu de définir le p.g.c.d de deux entiers non nuls, nous permettons à l'un d'entre eux d'être égal à 0, disons , ? Dans ce cas, nous avons a|b et , selon notre définition du p.g.c.d., il est clair que .

Soit  et soit , alors nous avons les propriétés suivantes du p.g.c.d. :

P1.

P2.  où

P3.

P4. Si  tel que g|a et g|b alors

Dans certains ouvrages, ces quatre propriétés sont démontrées en utilisant intrinsèquement la propriété elle-même. Personnellement nous nous en abstiendrons car faire cela est plus ridicule qu'autre chose à notre goût car la propriété est une démonstration en elle-même.

Elaborons maintenant un méthode qui s'avérera très importante pour calculer le plus grand commun diviseur de deux entiers (utile en informatique parfois).

ALGORITHME D'EUCLIDE

L'algorithme d'Euclide est un algorithme permettant donc de déterminer le plus grand commun diviseur de deux entiers dont on ne connaît pas la factorisation.

Dans la tradition grecque, en comprenant un nombre entier comme une longueur, un couple d'entiers comme un rectangle, leur PGCD est la taille du plus grand carré permettant de carreler ce rectangle. L'algorithme décompose ce rectangle en carrés, de plus en plus petits, par divisions euclidiennes successives, de la longueur par la largeur, puis de la largeur par le reste, jusqu'à un reste nul.

Soit , où . En appliquant successivement la division euclidienne, nous obtenons la suite d'équations:

    (24)

Si , alors .

Démonstration:

Nous voulons d'abord montrer que . Or, d'après la propriété :

  (25)

nous avons :

  (26)

Pour démontrer la deuxième propriété de l'algorithme d'Euclide, nous écrivons l'avant dernière équation du système sous la forme:

  (27)

Or, en utilisant l'équation précédant l'avant dernière équation du système, nous avons :

    (28)

En continuant ce processus, nous arrivons à exprimer  comme un combinaison linéaire de a et b.

C.Q.F.D.

Exemple:

Calculons le plus grand commun diviseur de (966,429) et exprimons ce nombre comme une combinaison linéaire de 966 et de 429.

Nous appliquons bien évidemment l'algorithme d'Euclide: 

  (29)

Nous en déduisons donc que :

    (30)

et, de plus, que:

  (31)

Définition: Nous disons que les entiers sont "relativement premiers" si :

  (32)

PLUS PETIT COMMUN MULTIPLE

Définitions:

D1. Soit , nous disons que m est un "commun multiple" de  si  pour .

D2. Soit , nous appelons "plus petit commun multiple" (p.p.c.m) de , noté : 

  (33)

le plus petit entier positif par tous les communs multiples de .

Remarque: Soit ; alors, le plus petit commun multiple existe. En effet, considérons l'ensemble:

  (34)

Puisque , alors l'ensemble est non vide et, d'après l'axiome du bon ordre, l'ensemble E contient un plus petit élément positif.

Voyons maintenant quelques théorèmes relatifs au p.p.c.m. :

T1. Si m est un commun multiple de  alors

Démonstration:

Soit . Alors, d'après la division euclidienne, il existe des entiers  q et r tels que:

  (35)

Il suffit de montrer que . Supposons  (démonstration par l'absurde). Puisque  et , alors on a  et cela pour . Donc, r est un commun multiple de  plus petit que le p.p.c.m. On vient d'obtenir une contradiction, ce qui prouve le théorème.

C.Q.F.D.

T2. Si , alors

La démonstration sera suposée évidente (dans le cas contraire contactez-nous et cela sera détaillé!)

T3.

Démonstration:

Pour la démonstration, nous allons utiliser le "lemme d'Euclide" qui dit que si a|bc et  alors a|c.

Effecitvement cela se vérifie aisément car nous avons vu qu'il existe  tels que  et alors . Mais a|ac et a|bc impliquent que , c'est-à-dire également que .

Revenons à notre théorème:

Puisque  et , il suffit de prouver le résultat pour des entiers positifs a et b. En tout premier lieu, considérons le cas où . L'entier [a,b] étant un multiple de a, nous pouvons écrire . Ainsi, nous avons  et, puisque , il s'ensuit, d'après le lemme d'Euclide, que b | m. Donc,  et alors . Mais ab est un commun multiple de a et b qui ne peut être plus petit que le p.p.c.m; c'est pourquoi .

Pour le cas général, c'est-à-dire , nous avons, d'après la propriété :

    (36)

et avec les résultat obtenu précédemment que:

  (37)

Lorsque nous multiplions des deux côtés de l'équation par , le résultat suit et la démonstration est effectuée.

C.Q.F.D.

tHÉORÈME FONDAMENTAL DE L'ARITHMÉTIQUE

Le théorème fondamental de l'arithmétique dit que tout nombre naturel  peut s'écrire comme un produit de nombres premiers, et cette représentation est unique, à part l'ordre dans lequel les facteurs premiers sont disposés.

Le théorème établit l'importance des nombres premiers. Essentiellement, ils sont les briques élémentaires de construction des entiers positifs, chaque entier positif contenant des nombres premiers d'une manière unique.

Remarque: Ce théorème est parfois appelé "théorème de factorisation" (un peu à tort... car d'autres théorèmes portent le même nom...).

Démonstration:

Si n est premier, alors la preuve est terminée. Supposons que n n'est pas premier et considérons l'ensemble:

  (38)

Alors,  et , puisque n est composé, nous avons que . D'après le principe du bon ordre, D possède un plus petit élément  qui est premier, sans quoi le choix minimal de  serait contredit. Nous pouvons donc écrire . Si  est premier, alors la preuve est terminée. Si  est composé, alors nous répètons le même argument que précédemment et nous en déduisons l'existence d'un nombre premier  et d'un entier  tels que . En poursuivant ainsi nous arrivons forcément à la conclusion que  sera premier.

Donc finalement nous avons bien démontré qu'un nombre quelconque est décomposable en facteurs de nombres premiers à l'aide du principe du bon ordre.

C.Q.F.D.

Nous ne connaissons pas à ce jour de loi simple qui permette de calculer le n-ième facteur premier . Ainsi, pour savoir si un entier m est premier, il est pratiquement plus facile à ce jour de vérifier sa présence dans une table de nombres premiers.

En fait, nous utilisons aujourd'hui la méthode suivante :

Soit un nombre m, si nous voulons déterminer s'il est premier ou non, nous calculons s'il est divisible par les nombres premiers qui appartiennent à l'ensemble : 

  (39)

Exemple:

L'entier 223 n'est divisible par 2, ni par 3, ni par 5, ni par 7, ni par 11, ni par 13. Il est inutile de continuer avec le prochain nombre premier, car . Nous en déduisons dès lors que le nombre 223 est premier.

CONRUENCES

Définition: Soit . Si a et b ont même reste dans la division euclidienne par m nous disons que que "a est congru à b modulo m", et nous écrivons :

  (40)

ou de manière équivalente il existe un nombre entier relatif k tel que :

  (41)

Le lecteur pourra vérifier que cela impose que

  (42)

soit en français.... quem divise la différence entre a et b. Dans le cas contraire, nous disons que "a est non congru à b modulo m".

Une autre manière de dire tout cela si ce n'est pas clair... :

L'étude de ces propriétés qui relient trois nombres entre eux est appelée communément "l'arithmétique modulaire".

Remarques:

R1. Que nous soyons bien d'accord, la congruence implique un reste nul pour la division !

R2. Nous excluons en plus de 0 aussi 1 et -1 pour les valeurs que peut prendre m dans la définition de la congruence dans certains ouvrages.

R3. Derrière le terme de congruence se cachent des notions semblables mais de niveaux d'abstraction différents :

- En arithmétique modulaire, nous disons donc que "deux entiers relatifs a et b sont congrus modulo m s'ils ont même reste dans la division euclidienne par m". Nous pouvons aussi dire qu'ils sont congrus modulo m si leur différence est un multiple de m.

- Dans la mesure des angles orientés, nous disons que "deux mesures sont congrues modulo si et seulement si leur différence est un multiple de ". Cela caractérise deux mesures d'un même angle (cf. chapitre de Trigonométrie).

- En algèbre, nous parlons de congruence modulo I dans un anneau commutatif (cf. chapitre de Théorie Des Ensembles) dont I est un idéal : "x est congru à y modulo I si et seulement si leur différence appartient I". Cette congruence est une relation d'équivalence, compatible avec les opérations d'addition et multiplication et permet de définir un anneau quotient de l'ensemble parent avec son idéal I.

- Nous trouvons parfois, dans l'étude de la géométrie (cf. chapitre de Géométrie Euclidienne) le terme de congru mis à la place de semblable. Il s'agit alors d'une simple relation d'équivalence sur l'ensemble des figures planes.

La relation de congruence est une relation d'équivalence (cf. chapitre sur les Opérateurs), en d'autres termes , soient alors la relation de congruence est :

P1. Réfléxive :

  (43)

P2. Symétrique :

  (44)

P3. Transitive :

  (45)

Démonstration:

Les propriétés P1 et P2 sont évidentes (si ce n'est pas le cas faites le nous savoir nous développerons!). Nous démontrerons P3. Les hypothèse impliquent que . Mais alors :

  (46)

ce qui montre que a et c sont congrus modulo m.

C.Q.F.D.

La relation de congruence est compatible avec la somme et le produit (se rappeler que la puissance n'est finalement qu'une extension du produit!).

Effectivement, soient tel que et alors :

P1.

P2.

Démonstrations:

Nous avons par hypothèse. Mais alors :

  (47)

ce qui démontre P1. Nous avons également :

  (48)

ce qui démontre P2.

C.Q.F.D.

Remarque: La relation de congruence se comporte sur de nombreux points comme la relation d'égalité. Néanmoins une propriété de la relation d'égalité n'est plus vraie pour celle de congruence, à savoir la simplification : si , nous n'avons pas nécessairement .

Exemple :

mais

Jusqu'ici, nous avons vu des propriétés des congruences faisant intervenir un seul modulus. Nous allons maintenant étudier le comportement de la relation de congruence lors d'un changement de modulus.

P1. Si et d|m, alors

P2. Si et alors a et b sont congrus modulo [r,s]

Ces deux propriétés sont évidentes. Inutile d'aller dans les détails pour P1. Pour P2, puique b-a est un multiple de r et de s puisque par hypothèse :

  (49)

b-a est donc un multiple du p.p.c.m de r et s, ce qui démontre P2.

De ces propriétés il vient que si nous désignons par f(x) un polynôme à coefficiente entiers (positifs ou négatifs):

  (50)

La congruence  donnera aussi .

Si nous remplacons x successivement  par tous les nombres entiers dans un polynôme f(x) à coefficients entiers, et si nous prenons les résidus pour le module m, ces résidus se reproduisent  de m en m (dans le sens où la congruence se vérifie), puisque nous avons, quel que soit l'entier m et x:

  (51)

Nous en déduisons alors l'impossibilité de résoudre la congruence suivante :

  (52)

en nombres entiers, si r désigne l'un quelconque des non-résidus (un résidu qui ne satisfait pas la congruence).

CLASSES DE CONGRUENCE

Définition: Nous appelons "classe de congruence modulo m", le sous-ensemble de l'ensemble a et b de sont dans la même classe si et seulement si ou qu'un ensemble d'éléments entre eux sont congrus par ce même modulo. défini par la propriété que deux éléments

Remarque: Nous avons vu dans le chapitre traitant des opérateurs qu'il s'agit en fait d'une classe d'équivalence car la congruence modulo m est, comme nous l'avons démontré plus haut, une relation d'équivalence.

Exemple:

Soit . Nous divisons l'ensemble des entiers en classes de congruence modulo 3. Exemple de trois ensembles dont tous les éléments sont congrus entre eux sans reste (observez bien ce que donne l'ensemble des classes!) :

  (53)

Ainsi, nous voyons que pour chaque couple d'élément d'une classe de congruence, la congruence modulo 3 existe. Cependant, nous voyons que nous ne pouvons pas prendre où -9 se trouve dans le première classe et -8 dans le seconde.

Le plus petit nombre non négatif de la première classe est 0, celui de la deuxième est 1 et celui de la dernière est 2. Ainsi, nous noterons ces trois classes respectivement , le chiffre 3 en indice indiquant le modulus.

Il est intéressant de noter que si nous prenons un nombre quelconque de la première classe et un nombre quelconque de la deuxième, alors leur somme est toujours dans la deuxième classe. Ceci se généralise et permet de définir une somme sur les classes modulo 3 en posant :

  (54)

Ainsi que :

  (55)

Ainsi, pour tout , la classe de congruence de :

  (56)

est l'ensemble des entiers congrus à a modulo m (et congrus entre eux modulo m). Cette classe est notée :

  (57)

Remarque: Le fait d'avoir mis entre parenthèse l'expression "et congrus entre eux modulo m" est du au fait que la congruence, étant une relation d'équivalence nous avons comme nous l'avons démontré plus haut que si , alors .

Définition: L'ensemble des classes de congruences (qui forment par le fait que la congruence est une relation d'équivalence des : "classes d'équivalences"), pour un m fixe donne ce que nous appelons un "ensemble quotient" (cf. chapitre Opérateurs). Plus rigoureusement, nous parlons de "l'ensemble quotient de par la relation de congruence" dont les éléments sont les classes de congruences (ou : classes d'équivalences) et qui forment alors l'anneau .

Nous déduisons de la définition les deux propriétés triviales suivantes :

P1. Le nombre b est dans la classe si et seulement si

P2. Les classes et sont égales si et seulement si

Montrons maintenant qu'il y a exactement m différentes classes de congruence modulo m, à savoir .

Démonstration:

Soit , alors tout nombre entier a est congru modulo m à un et un seul entier r de l'ensemble (remarquez bien, c'est important, que nous nous restreignons aux entiers positifs ou nuls sans prendre en compte les négatifs!). De plus, cet entier r est exactement le reste de la division de a par m. En d'autres termes, si , alors :

  (58)

si et seulement si q est le quotient de a par m et r le reste. La démonstration est donc une conséquence immédiate de la définition de la congruence et de la division euclidienne.

C.Q.F.D.

Définition: Un entier b est dans une classe de congruence modulo m est appelé "représentant de cette classe" (il est claire que par la relation d'équivalence que deux représentants d'une même classe sont donc congrus entre eux modulo m).

Nous allons pouvoir maintenant définir une addition et une multiplication sur les classes de congruences. Pour définir la somme de deux classes , il suffit de prendre un représentant de chaque classe, de faire leur somme et de prendre la classe de congruence du résultat. Ainsi (voir les exemples plus haut) :

  (59)

et de même pour la multiplication :

  (60)

Par définition de la somme et du produit, nous constatons que la classe de 0 est l'élément neur pour l'addition :

  (61)

et la classe de l'entier 1 est l'élément neutre pour la multiplication :

  (62)

Définition: Un élément de est "une unité" s'il existe un élément tel que

Le théorème suivant permet de caractériser les classes modulo m qui sont des unités dans :

Théorème : Soit [a] un élément . Alors [a] est une unité si et seulement si .

Démonstration:

Supposons d'abord que . Alors par Bézout, nous avons son identité :

  (63)

Autrement dit, as est congru à 1 modulo m. Mais ceci est équivalent à écrire par définition que ce qui montre que [a] est une unité. Réciproquement, si [a] est une unité, ceci implique qu'il existe une classe telle que telle que .

Ainsi, nous venons de démontrer que constitue bien un anneau puisqu'il possède une addition, une multiplication, un élément neutre et un inverse.

 
 
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