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  Médecine Légale
 

La mort et les formes médico-légales de la mort

Dr. François Paysant

CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
 

mis à jour le 14 septembre 1998

1 Thanatologie 
1.1 La mort 
1.2 Absence de définition légale de mort 
1.3 Différents mécanismes peuvent entraîner le décès 
1.4 Physiopathologie 
2 Constatation de la mort 
2.1 Les signes négatifs de la vie 
2.2 Les signes positifs de la mort 
3 Formes médico-légales de la mort 
3.1 Mort naturelle 
3.2 Mort violente 
3.3 Mort suspecte

1 Thanatologie

La thanatologie est la science de la description clinique de la mort et de la recherche des mécanismes et des causes aboutissant à la mort.
L'intérêt de la thanatologie réside dans la distinction :
- mort naturelle
- mort suspecte
- mort criminelle

1.1 La mort

Un des objectifs de la constatation du décès est d'établir la cause de la mort et d'analyser les facteurs ayant abouti au décès.
La définition médicale est approximative et variable suivant le contexte. Il existe différentes définitions de la mort dans différents pays de l'OCDE, ce qui entraîne des variations importantes pour les prélèvements d'organes.

1.2 Absence de définition légale de mort

On s'accorde pour considérer la mort comme l'arrêt des fonctions vitales.
Des critères sont établis pour permettre de simplifier la tâche des médecins certificateurs, en cas de transplantation (cf cours : prélèvements d'organes).
Certains distinguent :
- la mort cellulaire
- la mort de l'organe
- la mort de l'organisme
Les organes vivent ensemble et meurent séparément" (BICHAT)

1.3 Différents mécanismes peuvent entraîner le décès. parmi les plus fréquents :

- Cause cardiaque => défaillance circulatoire => chute du débit => anoxie
- Cause respiratoire => mécanique ou autre => asphyxie => anoxie
- Cause neurologique => troubles de régulation d'origine centrale => anoxie, etc....

1.4 Physiopathologie

L'arrêt cardio-circulatoire entraîne l'ischémie (défaut d'apport sanguin) qui provoque une anoxie cellulaire (défaut d'apport d'oxygène…).
 
Conséquences cellulaires :
- Lyse du noyau
- Vacuolisation cytoplasmique
 
Conséquences biochimiques :
- libération enzymatique
- consommation rapide de l'02 restant
- stimulation du métabolisme anaérobie et épuisement énergétique
- accumulation d'ions acides
 
A terme, on aboutit à une dette irréversible en 02, à une acidose et une diminution du stock ATP entraînant une décharge catécholaminergique aboutissant à une majoration du collapsus.
 
En fonction du type de cellule, le temps maxima d'anoxie autorisant une récupération est le suivant :
- Fonctions intellectuelles : 4 à 7'
- Centres cérébraux et médullaires : 8 à 10'
- Centres vasomoteurs et cardiaques : 20 à 30'
- Centres respiratoires : 30 à 50'
La capacité de tolérance est plus importante chez l'enfant.

2 Constatation de la mort

La vie est caractérisée par l'ensemble des fonctions qui résistent à la mort. On peut classer les signes de la mort dans deux grands groupes :
- les signes négatifs de la vie
- les signes positifs de la mort

2.1 Les signes négatifs de la vie

Arrêt des grandes fonctions :
- arrêt cardio-circulatoire
- arrêt respiratoire
- abolition de toute conscience, toute sensibilité, aréflexie
- perte du tonus musculaire et mydriase
- pâleur dite cadavérique
- refroidissement
 
En principe, le diagnostic précoce de la mort peut être réalisé par une auscultation cardio-respiratoire, la palpation des trajets artériels. Il est également possible de constater l'absence de flux respiratoire en plaçant un miroir devant la bouche (présence ou absence de buée).
 
Des méthodes paracliniques très invasives ont été utilisées par le passé, elles sont actuellement à proscrire ;
- aiguille dans le cœur (ne bouge pas => pas de mouvement cardiaque)
- artériotomie au niveau de l'artère radiale (plus de flux sanguin)
- le test à la fluorescéine (non coloration des conjonctives 1/2 h après l'injection de fluorescéine en intraveineux) (test d'Icard)
- la phlyctène explosive : après exposition d'une zone cutanée à une flamme, il se forme un décollement cutané rempli d'air qui se rompt brutalement en provoquant une petite explosion, alors que chez le vivant, la phlyctène n'est pas explosive ; elle contient un exsudat.
- le test à l'éther (injection sous cutanée d'éther qui ressort par le trou de l'aiguille si le sujet est mort).

2.2 Les signes positifs de la mort

2.2.1 Refroidissement cadavérique

La température du cadavre chute d'environ 1 degré par heure et on admet que l'équilibre avec le milieu ambiant est atteint en 24 heures.
Il existe cependant des variations en fonction de différents critères pouvant intervenir sur les échanges thermiques :
- l' habillement. Des facteurs correctifs liés à l'habillement sont introduits. Certains auteurs préconisent la prise de température au niveau hépatique ou au niveau des tympans (remarque : la mesure de la température cutanée n'est pas très fiable. La température rectale est assez utilisée).
- la température ambiante. Des normogrammes existent pour déterminer le délais post-mortem, ils intègrent : la température rectale, la température externe, le poids.
- état fébrile, hypothermie au moment du décès.

2.2.2 La rigidité cadavérique

La rigidité cadavérique est le résultat de l'absence de réversibilité de la liaison des fibres d'actine et myosine.
Elle affecte l'ensemble des muscles de l'organisme :
- Muscles squelettiques
- Cœur
- Iris
- Diaphragme
- Sphincters
La rigidité touche également les muscles lisses d'où la possibilité d'éjaculation, émission de matières, urine en post-mortem.
La rigidité débute environ 3 heures après la mort, son maximum se situe vers 12 heures.
Elle commence aux muscles du cou, de la nuque, et des masséters, pour s'étendre au tronc, membres supérieurs et membres inférieurs.
La rigidité s'installe progressivement et prédomine :
- aux fléchisseurs aux membres supérieurs
- aux extenseurs aux membres inférieurs
Sa disparition se fait dans le même ordre :
La rigidité tibio-tarsiennes disparaît entre la 24ème et la 36ème heure.
Si elle est rompue avant la 12ème heure, elle peut se reconstituer.
 
Attention :
Lorsque l'organisme est sidéré, par exemple, en cas de décapitation, fulguration, la rigidité intervient quasi immédiatement. La fixation du corps se fait dans la position qu'il occupait.

2.2.3 Les lividités

Les lividités correspondent à des transsudations de sang à travers les vaisseaux. Les sérosités imbibent les tissus, elles ont une coloration rosée. Les lividités sont dues à des phénomènes passifs entraînés par la pesanteur. Elles apparaissent progressivement et se situent au niveau des régions déclives. Les points de contact entre le corps et le support entraînent des contre-pressions repoussant ces lividités.
 
Exemple : Pour les cadavres retrouvés sur le dos, les lividités siègent au niveau des lombes et de la partie latérale du tronc. Il n'y a pas de lividités au niveau des épaules et des fesses (zones de pression, points de contact).
 
Les colorations particulière peuvent évoquer certaines origines :
- rouge groseille :
=> intoxication au CO
=> intoxication à l'acide cyanhydrique
- brunâtre : intoxication par un poison méthémoglobinisant
- sombre : asphyxie
- pâle : hémorragie
 
Les lividités apparaissent entre la 3ème et la 5ème heure post-mortem.
Elles se fixent vers la 15ème heure et peuvent se reformer jusqu'à la 30ème heure Si le cadavre est déplacé.
 
Le diagnostic différentiel doit être fait entre lividité et hématome et ecchymose (pour cela il faut inciser ; si la coloration disparaît après lavage, il s'agit d'une lividité).

2.2.4 La déshydratation cadavérique

Elle est difficile à évaluer, variable en fonction de l'état d'hydratation anté-mortem.

2.2.5 La putréfaction

Elle correspond à :
- la dégradation des tissus par les enzymes, par la flore microbienne.
Le premier signe de putréfaction visible vers la 48ème heure est la "tache verte abdominale" qui apparaît en fosse iliaque droite. Le début de la putréfaction est dû aux pullulations microbiennes, au niveau du cæcum. La putréfaction diffuse à l'ensemble de l'abdomen, puis au thorax.
- la Circulation posthume qui réalise un réseau verdâtre très visible sous la peau à un stade plus avancé. Sous l'influence des gaz putrides, la circulation bactérienne diffuse la putréfaction à contre courant, centrifuge à point de départ abdominal.

2.2.6 Datation de la mort

A partir des phénomènes cadavériques :
- corps chaud, souple, sans lividité : < 6 à 8 heures
- corps tiède, rigide, lividités s'effaçant à la pression : < 12 heures
- froid, rigide, lividités immuables : < 24 heures
- plus de rigidité, tache verte : > 36 heures.
 
A partir des mesures de températures :
- rectale
- hépatique
- tympanique
 
Dosage de potassium dans l'humeur vitrée.
L'humeur vitrée étant un liquide acellulaire ne contient pas de potassium quand le sujet est vivant. Après la mort, les cellules tapissant l'oeil, se lysent progressivement et libèrent leur potassium.
Cette concentration en potassium est proportionnelle au délai post-mortem.
 
Entomologie.
L'étude des larves, pupes, insectes volants permet de dater les décès.
Les entomologistes décrivent 8 escouades d'insectes qui colonisent le cadavre en fonction de son état de décomposition.
 
Aucune certitude ne peut être tirée de ces méthodes. Une simple évaluation peut être avancée avec beaucoup de prudence.

3 Formes médico-légales de la mort

La constatation d'un décès impose au médecin la réalisation d'un raisonnement pour distinguer les morts violentes, les morts suspectes des morts naturelles. Ce raisonnement permettra de remplir la case "obstacle médico-légal" à l'inhumation (cf cours : certificat de décès).

3.1 Mort naturelle

Souvent issue fatale d'une maladie, la personne décédée était suivie et son décès "n'étonne" pas outre mesure.

3.2 Mort violente

Accidentelle : mort en relation directe avec un traumatisme accidentel. Le lien de causalité est évident. Si les circonstances de l'accident ne sont pas suspectes, il n'y a pas lieu de cocher "obstacle médico-légal".
 
Suicidaire : le caractère suicidaire ne peut être établi qu'après enquête et examen soigneux du corps du défunt. L'enquête devra s'intéresser aux antécédents psychiatriques et aux traitements.
Le diagnostic différentiel avec un acte criminel devra toujours être analysé. Au moindre doute, il faut cocher la case "obstacle".
 
Criminelle : si l'action criminelle est évidente. Exemple : Plaie par arme à feu sans arme à proximité.

3.3 Mort suspecte

Liée à la personnalité du défunt (membre de la mafia, homme politique, etc...)
Présence de lésions ne permettant pas d'expliquer l'étiologie du décès.
Enquête ne prouvant pas le caractère dépressif du défunt.
Mort d'une personne jeune, sans cause évidente telle que la mort subite d'un sportif par exemple. Rien ne laissait supposer une telle issue…

Le certificat de décès

Dr. François Paysant

CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
 

mis à jour le 14 septembre 1998

1 Rédaction du certificat de décès 
1.1 Description 
1.2 Règles de rédaction 
2 Comment le certificat de décès est utilisé ? 

La mort est certes un événement personnel et familial ou religieux, mais c'est aussi un fait juridique
 
Différents aspects de la mort :
- La société est comptable de ses membres. Cette mission est confiée à l'Etat Civil. L'acte de décès est dressé par l'officier d'état-civil de la commune du lieu de décès au vue du certificat de décès délivré par le médecin.
- La santé publique est chargée de tenir à jour la démographie française ainsi que de surveiller l'état sanitaire.
- L'ordre social : il est important que tout indice de mort violente ou mort suspecte soit recherchée et signalée aux autorités judiciaires.
 
Classiquement, le certificat de décès est délivré par le médecin ayant apporté ses soins les jours précédents le décès. Au vu du certificat de décès, l'officier d'état civil délivre le permis d'inhumer qui sera nécessaire à l'inhumation.
En cas de signes laissant penser à une mort violente, l'inhumation n'aura lieu qu'après procès-verbal d'un Officier de Police Judiciaire et le constat d'un médecin.
L'établissement du décès permet le commencement des démarches successorales et permet le versement des capitaux (assurances vie, remboursement des prêts...).
produisant des effets de droits.

1 Rédaction du certificat de décès

Le formulaire qui nous est proposé depuis un arrêté du 24/12/1996, est disponible à la DDASS.

1.1 Description

Il comporte deux parties qui sont détachables :

1.1.1 1ère partie (partie supérieure) Nominative :

- Commune de décès
- Etat civil du défunt ( nom, prénom, âge, domicile)
- Date et heure de la mort
- Caractère réel et constant de la mort
- Signature du médecin et son cachet
- Différentes rubriques permettant à l'officier d'état civil d'autoriser ou de refuser certaines opérations funéraires :
  • obstacle médico-légal
  • obligation de mise en bière immédiate
  • dans un cercueil hermétique
  • dans un cercueil simple
  • obstacle au don du corps
  • prélèvement en vue de rechercher la cause du décès
  • présence de prothèse fonctionnant au moyen d'une pile
  • date, lieu, signature et cachet du médecin.
Cette partie est en triple exemplaire autoduplicant, elle est destinée à  :
- La mairie de la chambre funéraire
- La chambre funéraire
- La mairie du lieu de décès.

1.1.2 2ème partie (partie inférieure) :

Partie anonyme séparable de la partie supérieure. (cette partie est en un seul exemplaire)
Le médecin devra la replier et coller les bordures porteuses de gomme afin de rendre les renseignements médicaux confidentiels.
Cette partie sera détachée de la partie supérieure par l'officier d'état-civil qui l'adressera au médecin de la DDASS, afin d'effectuer des statistiques.
 
Rubriques :
- Commune du décès, du domicile,
- date de décès,
- date de naissance
- sexe
- cause du décès :
  • différents états morbides ayant abouti au décès avec un classement par ordre de causalité, avec une appréciation de délai entre le début de l'affection et la mort.
  • Les autres états morbides ou les états physiologiques ayant contribué au décès.
- les informations complémentaires :
  • au décès pendant une grossesse ou un an après ;
  • précision sur le lieu de l'accident.
Des exemples en bas de la page, peuvent faciliter sa rédaction.

1.2 Règles de rédaction

1.2.1 Partie supérieure

1.2.1.1 Obstacle à l'inhumation
 
Rappel : il y a différentes formes de mort :
- mort naturelle
- mort violente (accidentelle, délictuelle, suicidaire, criminelle)
- mort suspecte.

Mort violente
- mort délictuelle
ex. accident de voiture mortel, avec tiers responsable.
- mort suicidaire
nécessite une levée de corps minutieuse recherchant d'un homicide maquillé en suicide (si doute, cocher obstacle médico-légal à l'inhumation). L'hypothèse suicidaire ne peut être retenu qu'après avoir écarté une mort criminelle.
- mort criminelle évidente
 l'action volontaire d'un tiers a occasionné le décès. Une enquête et une autopsie judiciaire seront réalisées, pour éclairer sur les circonstances de la mort.
 
Mort suspecte
- cause inconnue, le recours du médecin légiste s'impose.
 
1.2.1.2 Obligation de mise en bière immédiate
 
- pour les pathologies justifiant une mise en cercueil hermétique ou en cercueil simple.
 
1.2.1.3 Obligation de mise immédiate en cercueil hermétique
 
- variole ou autres orthopoxviroses
- choléra
- charbon
- fièvres hémorragiques virales
 
1.2.1.4 Obligation de mise immédiate en cercueil simple
 
- peste
- hépatites virales, sauf hépatite A confirmée
- SIDA
- rage
- mauvais état du corps.
 
1.2.1.5 Présence de Prothèse
 
Il y a une obligation générale à retirer les prothèses contenant des radio-éléments avant l'inhumation
Toute prothèse doit être enlevée avant la crémation.
 
1.2.1.6 Prélèvement en vue de rechercher la cause du décès
 
Dans un intérêt purement médical ou scientifique pour faire un dernier examen complémentaire. Ces opérations sont impossibles en cas de pathologie contagieuse ou d'obstacle médico-légal.
 
1.2.1.7 Soins du corps, crémation, transport du corps
 
Sont suspendus en cas de décès avec obstacle médico-légal, accident du travail ou maladie professionnelle.

 1.2.2 Partie inférieure

C'est la partie à visée épidémiologique.
Il n'y a pas de nom. Si on veut de bonnes statistiques, il faut de bonnes données. Pas d'hésitation, le secret médical doit être respecté.
Soins du corps, crémation, transport du corps sont suspendus en cas de décès avec obstacle médico-légal, accident du travail, maladie professionnelle.
Seules les dates de naissance et de décès ainsi que les communes de décès et de domicile doivent être notées.
 
1.2.2.1 Cause de décès
 
Maladie ayant directement provoqué le décès, les autres maladies ayant joué un rôle dans la survenue du décès et le temps entre le début de l'affection.
Il faut déterminer la cause principale de la mort.
La précision est très importante en raison du codage OMS qui est précis, le cancer du col, ou le cancer du col de l'utérus, correspondent à deux codes différents.
Il ne faut jamais inscrire des abréviations car TC par exemple, peut signifier :
- Tumeur cérébrale
- Traumatisme crânien.
Les états morbides et les état physiologiques ayant contribués au décès.
 
1.2.2.2 Les informations complémentaires
 
Le décès est-il survenu pendant la grossesse ou dans l'année suivante ? Le lieu du décès ? S'agit-il d'un accident de travail ? Une autopsie a t-elle été pratiquée ?

2 Comment le certificat de décès est utilisé ?

Le certificat est remis à la famille qui le transmet à l'officier d'état civil, à la Mairie. La partie supérieure est détachée et gardée en Mairie (Acte d'Etat Civil). La partie inférieure, au dos de laquelle, l'officier d'état civil note :
 - le département
 - la commune
 - le numéro d'ordre du décès,
est transmis au Médecin de Santé Publique de la DDASS avec le bulletin de décès , formulaire administratif comportant des renseignements d'état-civil et socio-professionnel. Ce dernier l'ouvre et transmet les données au service INSERM, en charge des statistiques médicales.
Si le décès est survenu en prison, la déclaration est faite par le greffier.
S'il s'agit de déclarer le décès d'un enfant mort avant que sa naissance ait été déclarée à l'Etat Civil (enfant de moins de trois jours), l'officier d'état-civil établit un acte de naissance et un acte de décès sur production d'un certificat médical indiquant que l'enfant est né vivant et viable et précisant les jours et heures de sa naissance et de son décès. A défaut du certificat médical prévu ci-dessus, l'officier d'état-civil établit un acte d'enfant sans vie. Cet acte est inscrit sur le registre des décès en énonçant la date de l'accouchement sans préjuger de savoir si l'enfant a vécu ou non (art. 79-1 du Code Civil).
 
N.B. : Un certificat de décès spécifique pour les décès néonataux survenus  entre la naissance et les 27 premiers jours de vie, si l'enfant avait plus de 22 semaines d'aménorrhée ou pesait moins de 500 g. (Cf Annexe) - Arrêté du 24/12/1996.
 Des renseignement sont demandés concernant :
 - l'état de l'enfant à la naissance,
 - le mode d'accouchement,
 - les caractéristiques des parents,
 - les causes du décès, les causes obstétricales, les causes matérielles.

Les blessures

Pr. M. Le Gueut-Develay

CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
 

mis à jour le 23 septembre 1998

1 Le vocabulaire 
1.1 Les contusions 
1.2 Les plaies 
1.3 Blessures par armes à feu 
2 La constatation des blessures et la finalité du certificat 
2.1 Les exigences juridiques 
  
2.2 Les règles de rédaction 

Le médecin amené à donner ses soins à un blessé, ne se soucie :
 - ni des causes exactes du traumatisme
 - ni des circonstances de sa survenue.
Il en mesure l'ampleur et y apporte le remède nécessaire.
Que la blessure soit le fait d'un tiers, elle intéresse alors le juge parce qu'elle constitue :
 - le fait matériel constitutif de l'infraction,
 - la preuve d'un dommage indemnisable.
Le médecin est celui qui constate, décrit le traumatisme et en prévoit l'évolution.
Si la mort est survenue, il est celui qui peut établir le lien entre la blessure et le décès.
Les certificats qu'il rédige, appelés a être produits en Justice ou utilisés par les victimes, ne sont interprétables qu'au prix du respect d'un certain formalisme de rédaction et de l'emploi d'un vocabulaire adapté.

1 Le vocabulaire

1.1 Les contusions

Elles sont produites par des instruments contondants (poing, manche d'outil, marteau, pare-chocs, sur trottoir etc...) qui agissent par leur masse et leur vitesse.
Les lésions sont d'autant plus importantes que l'objet est lourd et manié avec force.
Elles comprennent :

1.1.1 L'érosion

Arrachage épidermique superficiel par friction.
Ces lésions se parcheminent sur le cadavre.

1.1.2 L'ecchymose

Contusion du 1er degré : extravasation sanguine au sein des tissus, secondaire à une rupture capillaire traumatique.
C'est une lésion vitale. Son étendue est fonction de :
- la violence du traumatisme,
- la vascularisation de la région,
- la laxité du tissu,
- la dureté du plan sous-jacent.
 Elle peut reproduire la forme de l'objet contondant.
 C'est une lésion évolutive, selon une chronologie fixe, celle de la biligénie locale.
 Ainsi, l'ecchymose est :
                - noirâtre le 1er jour 
                - violacée les 2 à 3ème jours 
                - bleuâtre les 3 à 4ème jours 
                - verdâtre les 5 et 6ème jours 
                - jaunâtre après 10 à 15 jours
                 
Ceci permet de dater le traumatisme ou de différencier selon qu'un traumatisme unique ou plusieurs ont été subis par la victime.
                Une ecchymose = un traumatisme 
                 
Réserves faites :
 - d'une fragilité capillaire,
 - d'un état antérieur pathologique
 - d'une anomalie de la coagulation (congénitale ou acquise).
 Sur le cadavre, le diagnostic différentiel est à faire avec :
 - les lividités,
 - la putréfaction.

1.1.3 L'hématome

Contusion du 2ème degré.
L'hématome est constitué par une collection sanguine dans une cavité néo-formée. Ceci implique que l'épanchement sanguin soit important, écarte les tissus et réalise une véritable néo-cavité.
Les conditions d'importance du traumatisme sont identiques à celles qui déterminent les ecchymoses. En revanche, s'y ajoute des risques de compressions profondes ou de mise en jeu d'emblée du pronostic vital (hématomes intra-crâniens).

1.1.4 Les écrasements et broiements/fractures

Contusions des 3ème et 4ème degrés.
 
 1.1.4.1 Ecrasements et broiements
 
 Ce sont des contusions (sans effraction cutanée) mais elles diffèrent des autres contusions sus-décrites par :
 - l'importance du retentissement général (mort ou état de choc avec rhabdomyolyse et insuffisance rénale aigüe : "Crush syndrom").
 - l'importance de l'agent traumatisant chute d'un édifice, enfouissement sous des décombres, incarcération dans un véhicule, écrasement par un train, etc....

 1.1.4.2 Fractures
 
Leur diagnostic repose sur l'examen clinique et la radiographie. Elles sont témoins d'un choc violent direct ou indirect, et s'accompagnent ou non de lésions associées telles qu'ecchymoses, hématomes ou plaies (fractures ouvertes).

1.1.5  Les plaies contuses

Elles regroupent les caractères de la plaie et de la contusion.
Leur forme est irrégulière, les bords déchiquetés, le fond sanieux.
Ces plaies comprennent les morsures, les griffures, mais aussi les plaies par armes à feu (cf plus loin), en fait toutes plaies résultant d'une action de contusion et d'effraction cutanée.

1.2 Les pIaies

Elles peuvent être produites par des instruments piquants, tranchants, coupants.
Elles se caractérisent par des berges nettes, reproduisant la forme et la largeur de la lame (arme blanche).
Elles se superposent, identiques sur les plans profonds, si l'arme a été enfoncée, créant un trajet.
La sortie de l'arme étant exceptionnelle (sauf baïonnette !), il est rare de devoir établir un diagnostic différentiel entre orifices d'entrée et de sortie.

1.3 Blessures par armes à feu

 Les blessures par armes à feu ont un aspect très particulier qui tient au caractère "pénétrant".
 On peut grossièrement séparer les armes à feu en :
 - armes à cartouches à balle
  • armes de poing à barillet ou à chargeur carabines, fusils de guerre "classiques" dont le calibre est exprimé en mm (7.65 ; 9 ; 11.43) ou en 100ème d'inch.
 - armes à cartouche à balle de haute vélocité
  • Fusils d'assaut (fusils de guerre de nouvelle génération) dont le FAMAS (FRANCE) l'UZI (ISRAEL) le COLT M16 (USA) la KALASHNIKOV AK 74 (URSS) armes utilisant une cartouche de 5,54 (EST) ou 5,56 mm (OTAN).
 - armes à cartouches à plombs
  • Fusils de chasse avec chevrotine numérotée de 24 (les plus petits plombs) à 12, armes de poing à grenaille ou à poudre noire et les arquebuses !
Si les armes à feu provoquent un orifice d'entrée et un trajet, l'orifice de sortie est inconstant.
 
C'est la vitesse (souvent plus de 800 m/s au sortir de l'arme) du projectile qui est le caractère principal du pouvoir de pénétration (et de lésion interne) ; sa puissance de pénétration dépend aussi de la masse du projectile.
Pour les armes à projectiles supersoniques (haute vélocité) les cavitations de l'abdomen ou du thorax tiennent à l'action du projectile qui perce, vrille et ondule.
Dans  la  pratique  médico-légale  française,  les  lésions habituellement rencontrées (suicide ou crime) sont dues à l'action :
 - de cartouches à balle (armes de poing)
 - de cartouches à plomb (fusil de chasse).

1.3.1 Lésions par cartouches à balle

(type arme de poing)
 - dépendent de la distance et de la direction du tir.
 - déterminent des caractères constants et d'autres inconstants.
 
1.3.1.1 Orifice d'entrée
 
Comprend :
 - un orifice central, légèrement plus petit, ou de même taille que le  projectile,
 - une collerette érosive qui se parchemine sur le cadavre,
 - une ecchymose péri-orificielle
 
 
Le projectile sortant du canon :
- est souillé de dépôts de poussières ou de graisse et
- accompagné de poudre et de fumée.
 
Ces éléments déterminent les caractères inconstants :
- Si le projectile traverse une peau nue, il s'essuie sur les berges de l'orifice réalisant une collerette d'essuyage interne. Si des vêtements s'interposent, l'essuyage s'y fera et on ne retrouvera pas la collerette à la partie interne de l'orifice.
- Par ailleurs, si le tir est court, s'imprimeront sur la peau (ou les vêtements) fumée et grains de poudre. On décrira alors : une zone d'estompage (fumée) et une zone de tatouage (poudre).
- Si le tir est long, aucune de ces deux zones ne sera observée.
La distance de tir ne peut être évaluée que lors d'un tir expérimental.
 
 
Variantes de l'orifice d'entrée
L'orifice d'entrée peut varier quant à sa forme en fonction de la distance et de la direction du tir.
 - de la distance : Si le tir est effectué à bout touchant (canon touchant la peau) la pression des gaz provoque, au sein des tissus sous jacents dilacérés, une néo-cavité nommée chambre de mine.
 - de la direction : plus le tir est oblique, plus l'orifice est tangentiel à la peau et s'ovalise jusqu'à provoquer une plaie en "séton" véritable tunnellisation de la peau.
 
 
 
1.3.1.2  Trajet
 
Il est suivi :
- chez le blessé, lors de l'intervention chirurgicale par l'exploration,
- chez le cadavre, plan par plan lors de l'autopsie.
Il s'accompagne d'une ecchymose d'accompagnement et d'autant d'orifices d'entrée et de sortie que d'organes traversés.
Il n'est pas toujours rectiligne et dépend des obstacles que le projectile rencontre ainsi que de la mobilité des organes.
Ainsi est-il rectiligne dans un organe plein (foie, rate, rein), et sinueux dans un organe mobile (poumon, coeur).
 
1.3.1.3 Sortie
 
Elle est inconstante.
Ne comporte :
- ni collerette d'essuyage
- ni tatouage
- ni estompage.
Elle est plus volontiers contuse, mais peut être à bords relativement nets,
Elle correspond, en règle, à une plaie plus grande que celle de l'orifice d'entrée,
Elle peut être aberrante en cas de rebondissement (dans la boîte crânienne) ou de migration (dans un gros vaisseau) du projectile.

1.3.2 Lésions par cartouches à plombs

Type fusil de chasse :
- dépendent de la distance et de la direction du tir.
- déterminent des caractères constants et inconstants.
 
1.3.2.1 Orifice d'entrée
 
 Unique ou multiples selon la distance du tir.
 
 A courte distance :
 - La charge de plombs "fait balle" et se comporte comme un projectile unique.
 - l'orifice d'entrée est arrondi, contus, délabré et de taille importante.
 
 A plus longue distance :
 - les plombs se dispersent selon une gerbe conique, d'autant plus élargie que le tir est lointain.
 - l'entrée se décompose en un orifice central entouré d'une couronne d'orifices secondaires (chaque plomb se comporte comme un projectile unique). Au maximum, l'orifice principal est absent et l'on observe que de multiples orifices de plombs.
L'étude de la dispersion des plombs renseigne le balisticien sur la distance du tir.
 
1.3.2.2 Trajet
 
En cas de charge unique, les lésions sont très importantes, et mettent souvent en jeu le pronostic vital.
Le trajet "in corpore" est court et la masse de plombs est accompagnée de la "bourre" qui se comporte comme un second projectile.
En cas de plombs dispersés, il sera suivi autant de trajets que de plombs.
 
1.3.2.3 Sortie
 
La sortie d'une charge de plombs unique n'existe pas. La sortie d'un plomb aberrant est possible.

2 La constatation des blessures et la finalité du certificat

2.1 Les exigences juridiques

2.1.1 Sanction

Art. 222.11 du Nouveau Code Pénal
"Les violences volontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de 8 jours sont punies de 3 ans d'emprisonnement et de 300.000 Frs d'amende".
 
Art. 222.19 du Nouveau Code Pénal
"Le fait de causer à autrui par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements, une ITT de plus de 3 mois est punie de 2 ans d'emprisonnement et de 200.000 Frs d'amende".
 
Qu'il s'agisse de violences volontaires ou involontaires :
- l'infraction est constituée lorsque les violences existent,
- l'infraction est qualifiée (délictuelle, contraventionnelle) selon que les blessures ont entraîné une incapacité totale de travail de plus ou moins 8 jours en matière de violences volontaires et de plus ou moins de 3 mois en matière de violences involontaires.
C'est le rôle du médecin d'établir par un certificat de constatation :
- la matérialité des blessures,
- la durée de l'incapacité totale de travail entraînée par ces blessures.
Des conclusions médicales dépendra la qualification de l'infraction et par là, la juridiction devant laquelle l'agresseur sera jugé.
 
En matière de violences volontaires :
- Si l'ITT est supérieure à 8 jours => Tribunal de Grande Instance (Correctionnelle) + peine de prison et amende.
- Si l'ITT est inférieure ou égale à 8 jours => Tribunal de Police + contravention.
 
En matière de violences involontaires :
- Si l'ITT est supérieure à 3 mois => Tribunal de Grande Instance (Correctionnelle) + peine de prison et amende.
- Si l'ITT est inférieure ou égale à 3 mois  => Tribunal de Police + contravention.

2.1.2 Indemnisation

Après avoir été condamné pour faits contraires à l'Ordre Public (violences) l'agresseur sera contraint à indemniser sa victime (dommages et intérêts).
 Pour obtenir indemnisation, la victime doit :
- prouver son dommage corporel,
- établir le lien qui existe entre ce dommage et le fait dommageable.
 La matérialité du dommage est prouvée par le constat médical initial. Le lien est généralement établi, à partir du certificat de base, à l'aide d'autres documents (preuves diverses, PV de police ou gendarmerie, expertise médicale etc....).

2.2 Les règles de rédaction

Le certificat, qu'il s'agisse de violences volontaires ou involontaires, est un certificat de constatation.
Le médecin qui l'établit constate, il n'atteste pas (il n'a pas été témoin des faits), il n'interprète pas les dires de la victime.

2.2.1 Rédaction du constat

Se fait après examen de la victime par le rédacteur.
S'établit sur papier libre permettant l'identification (ex: feuille d'ordonnance).
Le certificat est daté et signé, établi en double exemplaire dont un est remis à la victime, l'autre conservé par le médecin.
Les blessures sont décrites, une par une, mesurées, repérées par rapport à des points fixes (saillies osseuses, extrémités etc…). Le vocabulaire est choisi parmi les termes définis antérieurement.
Il n'est pas obligatoire de rapporter les dires de la victime. Si cela se fait, ce ne peut être qu'en employant le conditionnel.
Enfin, le certificat doit faire apparaître la durée de l'ITT (cf plus loin) et doit être remis à la personne pour laquelle il a été établi. Il peut être remis aux parents d'un mineur.
La formule "Certificat remis en main propre, pour valoir ce que de droit" n'est pas obligatoire, d'autant qu'elle ne préjuge pas de l'identité de la victime.
Il est préférable de faire signer la personne examinée après relecture, par elle même, du certificat.

2.2.2 Fixation de l'ITT

La définition de l'ITT (incapacité totale de travail) a longtemps correspondu à la période pendant laquelle la victime était dans l'incapacité de travailler (le travail étant entendu comme source de revenu).
Jusqu'au début du XXème, le travail rémunérateur était, pour 80 % de la population, de nature physique. Toute atteinte "physique", dès l'instant qu'elle était suffisante, risquait donc d'entraîner un arrêt du travail rémunérateur.
Actuellement, la diversification des activités professionnelles ne correspond plus à cette équation simplifiée.
Un chef d'entreprise, peut diriger son entreprise, alors qu'il est momentanément en fauteuil roulant.
 Il y a donc lieu de distinguer :
- la période pendant laquelle, le blessé est dans l'incapacité de subvenir à ses propres occupations (travail personnel aussi simple que se laver, préparer ses repas, faire ses courses simples), et doit parfois même se faire aider ' c'est la période d'ITT, telle que comprise par le Code Pénal et qui détermine la juridiction de jugement,
- la période qui peut être plus longue pendant laquelle, les activités personnelles sont progressivement reprises, sans que le travail rémunérateur puisse être envisagé. Cette période relève d'un arrêt de travail et non de l'ITT.
Un enfant, une femme au foyer, un retraité ne travaillent pas, au sens rémunérateur du terme. Cependant, à la suite de violences, leur capacité de travail personnel (cf plus haut) peut être amputée et justifier la fixation d'une période d'ITT.
Aussi le médecin doit il apprécier au plus juste la période d'ITT totalement imputable aux violences, période qu'il pourra éventuellement rallonger d'une durée d'arrêt de travail correspondant à une sorte de convalescence mais qui n'influera pas sur les poursuites.
Il n'existe pas de barême d'ITT. La fixation de sa durée appartient au médecin.
En l'absence de règles précises on ne peut que redire l'aspect sanction de cette fixation et sensibiliser les médecins à l'honnêteté intellectuelle.

Les sévices à enfants

Pr. M. Le Gueut-Develay

CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
 

mis à jour le 26 septembre 1998

1 La clinique 
1.1 Les lésions traumatiques 
1.2 Les troubles du développement et du comportement de l'enfant 
1.3 Les sévices sexuels ou abus sexuels 
1.4 La cruauté mentale 
2 La protection sociale et judiciaire

Au terme  "Sévices à enfants",  on préfère  aujourd'hui "maltraitance à enfants" en raison de l'évolution des connaissances et des mentalités.
Si le corps social a toujours su, et ce depuis l'Antiquité, que l'enfant pouvait être victime de violences ou de négligences, l'évolution des consciences et même des consciences médicales n'a que très récemment admis ce phénomène comme un événement contre nature. L'enfant n'a acquis de véritable existence, "existence en tant que personne" qu'au travers de textes législatifs et réglementaires rédigés depuis le fin du 19ème siècle.
On admet aujourd'hui qu'un enfant maltraité correspond actuellement à :
- un enfant victime de la part de ses parents ou d'adultes qui en ont la garde, de brutalités volontaires ou d'une absence intentionnelle de soins.
- un enfant victime d'abus sexuels dans et hors le milieu familial.
                - Violences physiques 
                - Carences de soins 
                - Négligences 
                - Cruauté mentale 
                - Abus sexuels
                 
Les derniers chiffres parus concernant les enfants maltraités (ODAS 1997) concernant l'année 1996 évaluent à 21 000 le nombre d'enfants maltraités dont :
 - 7 500 violences physiques,
 - 6 500 abus sexuels,
 - 7 0000 négligences graves ou violences psychologiques.
Le médecin peut être le premier à découvrir qu'un enfant est victime de mauvais traitements physiques ou psychologiques de la part de ses parents ou de ceux qui en ont la garde.
Sa tâche est souvent rendue difficile par une réelle et bien compréhensible répugnance à envisager l'hypothèse de sévices à enfants.
Si le milieu familial a tous les critères de la marginalité sociale, le médecin y pensera plus facilement souhaitera intervenir ; si par contre, il a toutes les apparences de la "normalité", il lui sera plus difficile d'envisager cette hypothèse.
Pour l'aider dans la gestion de la situation très particulière que peut être la découverte de maltraitance, le médecin dispose :
 - de ses connaissances cliniques,
 - et de ses connaissances médico-sociales et judiciaires.
Il doit savoir que la prise en charge d'un enfant maltraité varie selon qu'il s'agit, d'une situation de danger différé ou imminent, et qu'elle ne peut être que pluridisciplinaire.

1 La clinique

1.1 Les lésions traumatiques

1.1.1 Les ecchymoses, les hématomes

Sont particuliers par leur localisation  et leur multiplicité.
Leur localisation (cuir chevelu, lombe, tronc, zones génitales) peut lui sembler ne correspondre que difficilement à des zones de chute accidentelle.
Leur multiplicité et parfois leur âge différent peut l'inciter à s'interroger sur leur mécanisme étiologique.

1.1.2 Les plaies

Sont multiformes : leurs aspects ou leur localisation doivent alerter, ainsi en est-il des plaies génitales et endobuccales.

1.1.3 Les brûlures

Peuvent être provoquées par objet signant son oeuvre (cigarette, fer à repasser) ou par  ébouillantement.

1.1.4 Les fractures

Sont souvent méconnues (surtout chez le très jeune enfant) ou découvertes à l'occasion de clichés effectués pour une autre pathologie (ex : fractures de côtes sur radiographies pulmonaires).
Les fractures peuvent aussi étonner par leur aspect particulier : décollements épiphysaires, lésions des cartilages de conjugaison, arrachements épiphyso-métaphysaires. Ces aspects particuliers s'expliquent en général par des mécanismes tels que les élongations forcées, les torsions, les strictions... C'est l'association de fractures multiples d'âge différent, certaines consolidées, d'autres en voie de consolidation, d'autres encore récentes qui en l'absence d'une autre cause médicale de fracture possible est anormale.

1.1.5 Les traumatismes crâniens

Surtout chez le jeune enfant doivent faire de principe évoquer les sévices. La conduite diagnostique ne doit jamais éliminer cette possibilité.
Ainsi en est-il des hémorragies intra-crâniennes bien connues des pédiatres sous forme de foyers hémorragiques multiples dans la masse cérébrale correspondant à un mécanisme de secousses. C'est le syndrome des enfants secoués que l'on connaît de la naissance à l'âge de la marche et qui est d'autant plus péjoratif, qu'il survient tôt dans l'existence. Le mobile crânien n'étant que peu soutenu dans les premiers mois de la vie, les secousses brutales de l'étage crânien encéphalique peuvent entraîner des ondes de choc à l'origine d'hémorragies intra-crâniennes dramatiques. Les séquelles neurologiques sont souvent très importantes : cécité, séquelles définitive des fonctions supérieures...
Quelque soit la lésion traumatique constatée, la démarche diagnostique habituelle consiste à éliminer les diagnostics différentiels (se reporter au cours de pédiatrie en ce qui concerne les troubles de la coagulation, les pathologies osseuses ou métaboliques responsables de fractures, les pathologies neurologiques...).

1.2 Les troubles du développement et du comportement de l'enfant

Ils peuvent exister seuls ou être associés à des lésions consécutives aux traumatismes directs. Il peut s'agir d'anomalies physiques telles que les hypotrophies ou de troubles  du comportement ou des acquisitions intellectuelles.

1.2.1 Les hypotrophies

Sont secondaires à une insuffisance des apports alimentaires. Cette pathologie liée aux manques de soins ou à la négligence est expliquée tout à la fois par la privation nutritionnelle et la carence affective. Le médecin dispose pour juger d'un développement somatique harmonieux de tables auquel il peut se reporter pour comparer : taille, poids, périmètre crânien, périmètre thoracique... Ces états d'hypotrophies peuvent également s'accompagner de signes de négligences de soins telles que des atteintes dentaires, des maladies des phanères, des dermatoses inexpliquées, des alopécies....

1.2.2 Les troubles du comportement

Auprès de l'aspect classique apathique et figé signant la peur, on peut également rencontrer des manifestations psychiques liées à la maltraitance différentes selon l'âge au moment du début des sévices, variables selon la fréquence des violences et selon la durée, ces manifestations varient également selon les liens que peut avoir l'enfant avec l'abuseur ou celui qui le frappe.
Ainsi distingue t-on :
 - les troubles comportementaux : dépression, anxiété, hyperactivité, agressivité, conduite délinquante, hypersexualité, tentative de suicide,
 - des troubles cognitifs : inattention, trouble de la mémoire, difficulté intellectuelle ou diminutions des performances scolaires.
L'enfant peut développer ces troubles du comportement lorsqu'il est l'objet de menaces verbales ou de marginalisation ou d'exigences excessives vis à vis de son âge ou encore de consignes contradictoires.
L'interprétation de ces troubles doit être faite avec discernement ; l'hospitalisation et la période d'observation qui s'ensuit sont, plus qu'ailleurs, nécessaires pour aboutir au diagnostic.

1.3 Les sévices sexuels ou abus sexuels

Ils sont beaucoup plus fréquents qu'on ne l'estimait autrefois. Il semble que 10 à 20% des enfants battus en seraient victimes. Ces sévices sont définis de manière générale comme "toute activité sexuelle imposée à un enfant de moins de 15 ans et pouvant être vécue comme une agression" (avec ou sans violence, avec exploitation...).
Le premier examen a une importance capitale. Il doit être mené avec égard (cf. cours sur les agressions sexuelles).

1.4 La cruauté mentale

C'est l'exposition répétée d'un enfant à des situations dont l'impact émotionnel dépasse les capacités d'intégration psychologiques de son âge.
 
EN PRATIQUE :
 
Il s'agit de faire la part entre traumatisme volontaire ou accidentel.
En faveur des sévices :
 - l'aspect, la localisation, l'association des lésions
 - la discordance entre constatations et explications de l'enfant ou des  parents
 - le comportement des parents, le retard aux soins et/ou à  l'hospitalisation d'un enfant gravement traumatisé
 - la notion d'hospitalisations antérieures motivées par des  traumatismes mal expliqués.
En faveur de troubles du développement et du comportement :
 - la correction de l'hypotrophie après séparation d'avec l'environnement
 - la modification du comportement et de l'épanouissement à la suite du changement de milieu d'accueil.

2 La protection sociale et judiciaire

Art. 226-14 du Nouveau Code Pénal
"L'article 226-13 (secret professionnel) n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret.
En outre, il n'est pas applicable :
 - à celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de sévices ou privations dont il a eu connaissance et qui ont été infligés à un mineur de 15 ans".
 
Il s'agit ici de l'absence de poursuites contre le médecin qui dénonce, il ne s'agit pas d'une obligation de dénoncer.
 
L'Art. 44 du Code de Déontologie Médicale va plus loin puisqu'il est rédigé comme suit :
"Lorsque le médecin discerne qu'une personne auprès duquel il est appelé, est victime de sévices... s'il s'agit d'un mineur de 15 ans ou d'une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique, il doit sauf circonstance particulière, qu'il apprécie en conscience, alerter les autorités judiciaires, médicales ou administratives".
 
En fait, le médecin n'est jamais véritablement tenu de dénoncer des sévices dont il a eu connaissance sur des mineurs de 15 ans, mais, s'il le fait il ne sera pas poursuivi pour violation du Secret Professionnel.
En revanche, tout médecin est tenu  de porter secours à personne en péril et entre autres, aux mineurs de 15 ans.
S'il ne prend pas en charge directement ce secours, il doit l'organiser. C'est ainsi qu'il peut respecter tout à la fois ses devoirs de citoyen et de médecin.
Son action peut s'exercer, selon son choix près des autorités administratives ou judiciaires.
 
Qui sont ces autorités ?
- Administratives :
  • Le médecin de PMI (Protection maternelle et infantile)
  • L'Inspecteur Départemental de l'enfance
  • Le directeur du service de Protection Sociale.
- Judiciaires :
  • Le Procureur de la République ou son substitut
  • Le juge des enfants.
Depuis la loi du 10/07/1989, l'Articulation entre Protection Sociale et Protection Judiciaire est clarifiée puisque :
 
"Lorsqu'un mineur est victime de mauvais traitement ou qu'il est présumé l'être et qu'il est impossible d'évaluer la situation ou que la famille refuse manifestement d'accepter l'intervention l'intervention du service de l'Aide Sociale à l'enfance, le Président du Conseil Général avise sans délai l'autorité judiciaire" le rôle du médecin est donc simplifié et s'adapte à la nature du danger.
 
Danger imminent
La meilleure solution pour le médecin reste évidemment l'hospitalisation. L'hôpital, lieu neutre permet de protéger l'enfant et de "voir venir". Encore faut-il que l'autorisation soit obtenue de la famille.
Si le danger est réel et que la famille oppose un refus incontournable, le signalement doit être fait à l'autorité judiciaire :
 - le Procureur de la République ou son substitut (permanence 24 heures sur 24 près du Tribunal de Grande Instance),
 - le juge des enfants (en cas d'extrême urgence),
 - la Police ou la Gendarmerie (dans les villes sans T.G.I.).
Enfin, si le médecin ne choisit pas cette solution, il peut avertir les autorités administratives en signalant l'imminence du danger et les difficultés rencontrées. En vertu de la loi de 1989, le signalement sera fait, par elles à l'autorité judiciaire.
 
Qu'adviendra t-il ?
Le Procureur est seul juge de l'opportunité des poursuites.
En effet, si la procédure pénale satisfait la conscience collective et est susceptible d'exemplarité, elle n'est utilisée que dans le cas les plus graves - le "rôle judiciaire" est plus un rôle de "protection" du mineur que de sanction obligatoire à l'encontre des parents.
Le Procureur peut prendre des mesures de sauvegarde immédiates (retrait de l'enfant par exemple).
Le juge des enfants peut mettre en oeuvre la mesure d'assistance éducative, laquelle peut s'exercer en milieu ouvert ou en placement. (milieu ouvert : dans la famille ; placement en établissement).
Les poursuites pénales lorsqu'elles sont engagées par le Procureur font encourir aux auteurs des sévices des peines d'amende et d'emprisonnement, variables selon la qualité des auteurs et la nature des sévices.
 
Art. 222-13 du Nouveau Code Pénal (mineur de 15 ans)
"Lorsque les violences sont responsables d'une ITT < 8 jours => 3 ans d'emprisonnement et 300.000 Frs d'amende".
 
Art. 222-12 du Nouveau Code Pénal (mineur de 15 ans)
"Lorsque l'ITT est > 8 jours => 5 ans d'emprisonnement et 500.000 Frs d'amende".
 
Art. 222-7 du Nouveau Code Pénal (mineur de 15 ans)
"Lorsque la mort, sans intention de la donner a été la conséquence de violences => 20 ans de réclusion criminelle".
 
Art. 222-14 du Nouveau Code Pénal
"Lorsqu'il s'agit de violences habituelles :
 - ITT < 8 jours => 5 ans d'emprisonnement et 500.000 Frs d'amende
 - ITT > 8 jours => 10 ans d'emprisonnement et 1.000.000 Frs d'amende
 - Mutilation => 20 ans de Réclusion Criminelle
 - Décès => 30 ans de Réclusion Criminelle."
 
Art. 227.15 du Nouveau Code Pénal
"Lorsque les parents ou toute autre personne privent un mineur de 15 ans d'aliments ou de soins au point de compromettre sa santé, les peines sont de 7 ans d'emprisonnement et de 700.000 Frs d'amende".
 
30 ans de Réclusion Criminelle quand la mort en est résultée.
En ce qui concerne les violences sexuelles, se reporter au cours sur les agressions sexuelles.
- A noter, pour mémoire que la qualification "Infanticide" qui correspondait au meurtre ou à l'assassinat d'un enfant nouveau né, a disparu du Nouveau Code Pénal.
 
L'infanticide est un homicide.

Les violences sexuelles

Pr. M. Le Gueut-Develay

CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
 

mis à jour le 26 septembre 1998

1 Les agressions 
1.1 Définitions 
1.2 Matérialisation 
2 La législation 
2.1 Dispositions communes à toutes les agressions sexuelles 
2.2 Dispositions répressives particulières 

Les pratiques sexuelles, normales ou anormales, peuvent, selon les circonstances de leur exécution, constituer un trouble à l'ordre public et être génératrices d'infractions prévues par la loi pénale.
S'agissant d'agressions, la matérialité des faits doit être établie et c'est dans ce contexte que le médecin peut être appelé à constater des lésions et à participer à la préservation des preuves.
Le code pénal regroupe sous le terme "agressions sexuelles", des infractions de gravités différentes :
  - Viol,
  - Agressions sexuelles autres que le viol,
  - Exhibition sexuelle,
  - Harcèlement sexuel.

1 Les agressions

1.1 Définitions

1.1.1 Le harcèlement sexuel

 "Fait de harceler autrui en usant d'ordres, de menaces ou de contraintes, dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle, par une personne abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions".

1.1.2 L'exhibition sexuelle

 Peut être définie comme :
 
 "L'exécution en public ou dans un lieu accessible à la vue de tous, d'actes sexuels normaux ou anormaux, sur soi-même ou la personne d'autrui, et susceptibles par leur publicité d'outrager la pudeur d'autrui".
 
 L'exécution d'actes sexuels, normaux ou anormaux comprend :
 - l'exécution active : masturbation, coït sous toutes ses formes,
 - l'exécution passive : tels qu'exhibition d'une partie du corps à caractère sexuel.
La nudité en elle-même, exposée sans volonté de mettre seulement en exergue une partie à caractère sexuel n'est pas constitutive du fait délictuel.
De plus, l'élément public doit être recherché :
 - rapports sexuels consentis entre 2 personnes dans une chambre d'hôtel dont la porte est entrouverte => exhibition sexuelle.
 - idem dans une voiture (lieu privé) dont les vitres laissent deviner ce qui se passe à l'intérieur.
En revanche, l'exhibition dans un cercle fermé dans lequel, par définition, aucune personne étrangère n'est admise ne constitue pas une exhibition sexuelle.
L'exhibition sexuelle ainsi définie prend une toute autre dimension lorsqu'elle est effectuée à l'intention d'un mineur de 15 ans ou lorsque ce mineur est employé par un majeur comme objet d'exhibition ou comme spectateur de relations sexuelles entre adultes. (cf plus loin).

1.1.3 Les agressions sexuelles autres que le viol

 Peuvent être définis comme :
 
"Acte, attouchements illicites ou impudiques exercés avec ou sans violence sur une personne non consentante ou ne pouvant y consentir en public ou non et susceptibles d'offenser la pudeur de cette personne".
 
Elles impliquent  un acte matériel sur la personne de la victime, qu'il y ait ou non violence : l'absence de consentement :
 - refus (souvent avec violence),
 - contrainte (sous la menace d'une arme, chantage par personne ayant autorité, etc…),
 - vulnérabilité psychique,
 - minorité.

1.1.4 Le viol

 Est défini comme :
 
"Tout acte de pénétration sexuelle de quelque nature que ce soit, commis sur la personne d'autrui, par violence, contrainte ou surprise".
 
Pénétration sexuelle de quelque nature que ce soit ; aucune sorte de pénétration sexuelle n'est exclue de la définition.
Il peut s'agir d'une pénétration d'un objet quelconque dans un orifice sexuel, ou d'une pénétration d'un objet sexuel dans un orifice quelconque.
Commis sur la personne d'autrui : "Autrui" présuppose qu'il peut s'agir d'un homme ou d'une femme, d'une fillette ou d'un garçonnet.
"violence, contrainte ou surprise" présuppose l'absence de consentement.

1.2 Matérialisation

La participation médicale est sollicitée en cas de suspicion d'actes matériels sur la personne de la victime. Elle est toujours sollicitée lorsqu'il s'agit d'un mineur de 15 ans.
Aussi, la victime d'une exhibition sexuelle ou d'un harcèlement ne fait elle pas l'objet d'un examen, puisque seule sa pudeur a été offensée et que celle-ci n'est pas matérialisable !! Tout au plus pourrait-on envisager un examen psychique d'une victime particulièrement choquée ! Ou celui du responsable, de l'auteur, chez lequel pourrait être recherchée une pathologie venant en atténuation de sa responsabilité.
C'est lors des agressions autres que celles précitées, qu'un examen peut être réalisé :
 - soit à la demande de la victime elle-même, ou de ses parents s'il s'agit d'un mineur,
 - soit à la demande d'un policier ou d'un magistrat, dans le cadre d'une réquisition.
 
Quel que soit le contexte, il est de loin préférable que cet examen soit pratiqué par un spécialiste et dans le temps le plus rapproché de l'agression afin de permettre, s'il en est besoin, une meilleure conservation des preuves.
 
Cet examen doit être méthodique, rigoureux et complet, mené dans une logique de constatation et non d'interprétation et ce, sans tenir uniquement compte des faits tels que rapportés par la victime ou la police ou les parents d'un mineur.

1.2.1 Examen physique

1.2.1.1 Chez  la victime féminine
 
Il est adapté à l'âge et aux circonstances, mené en présence d'un majeur témoin lorsqu'il s'agit d'un mineur, il comporte :
 - L'évaluation du développement staturo-pondéral et éventuellement psychologique (mais discrètement, car ceci appartient aux psychiatres), taille, poids, développement pubertaire.
 - L'examen somatique général à la recherche de lésions traumatiques, particulièrement dans les régions dites médico-légales (crâne, cou, seins, zones de défenses, orifices naturels).
 - L'examen para-génital et génital. Abdomen, pubis, faces internes des cuisses, fesses, anus, périnée, fourchette. En dernier lieu vulvo-vaginal : petites et grandes lèvres, hymen et si cela est possible vagin, col (examen au spéculum).
 
La barrière médico-légale du viol étant l'hymen, c'est à cet élément que le légiste devra particulièrement s'intéresser.
Il existe de nombreuses formes d'hymen : Les incisures sont à rechercher dans les régions habituelles de rupture 17 et 19 heures en position gynécologique... mais aussi ailleurs. Caractérisation de l'éventuelle lésion : ancienne, récente, cicatrisée, saignotante.
Utilisation éventuelle de la sonde à ballonnet ou du toucher rectal. Lorsque la pose d'un spéculum est possible  => examen du vagin et du col.
 
1.2.1.2 Chez la victime masculine
 
L'examen général et staturo-pondéral est identique.
L'examen des organes génitaux externes et de l'anus (plis radiaires, raphé-médian) est adapté.
L'examen génital du mineur fille ou garçon s'attache particulièrement à diagnostiquer les signes cliniques ou biologiques des MST (Syphilis, gonococcie, chlamydiae, herpès, condylomes...) dont l'existence peut orienter vers la suspicion de sévices ; ce d'autant que l'enfant est plus jeune.

1.2.2 Prélèvements

1.2.2.1 Chez la victime féminine
 
Prélevements vaginaux :
 - Prélèvement sur lames fixées (recherche de spermatozoïdes)
 - Prélèvement gonocoques
 - Prélèvement chlamydiae
 - Ecouvillonnages pour empreintes génétiques éventuelles à conserver à  +  4° pendant 24 heures, => au delà congeler.
 
Sérologies :
- Syphilis
- Hépatite B
- Hépatite C
- HIV
+ Diagnostic de grossesse chez la femme pubère. (date des dernières règles)
 
Si les empreintes sont exploitables => prélèvements sanguins (victime et auteur sur EDTA).
 
1.2.2.2 Chez la victime masculine
 
Sérologie => idem
Prélèvements anaux idem (infectieux et à la recherche de spermatozoïdes).
 A l'issue de l'examen, le médecin établit un certificat ou un rapport dans lesquels il consigne ses constatations sans interprétation.
 Il ne lui appartient pas de qualifier l'infraction.
 Les divers prélèvements effectués ont une double utilité :
- prouver une infection ou une grossesse préexistante,
- infirmer, au moment de l'agression cette infection ou cette grossesse => c'est pour cette raison qu'ils doivent être refaits deux  mois plus tard.

2 La législation

2.1 Dispositions communes à toutes les agressions sexuelles

2.1.1 Dérogation légale au Secret Professionnel

Art. 226-14. 2è alinéa du Code Pénal
"N'encourt pas les peines prévues le médecin qui, avec l'accord de la victime porte à la connaissance du Procureur de la République, les sévices qu'il a constatés dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences sexuelles de toute nature ont été commises".

2.1.2 Intervention de la victime dans le prononcé du huis-clos en Cour d'Assises

Art. 306 du Code de Procédure Pénal
 - si elle le demande : il est de droit,
 - s'il est proposé par la Cour, il ne peut être ordonné qu'avec l'accord de la    victime.

2.1.3 Possibilité pour toute association de lutte contre les violences sexuelles

Régulièrement déclarées depuis au moins 5 ans, de se porter partie civile au procès.

2.1.4 Poursuites prévues par l'article 39.5

De la loi du 29/07/1881 contre toute personne qui publie, diffuse des informations sur un viol ou un attentat à la pudeur par quelque moyen d'expression que ce soit en mentionnant le nom de la victime ou en faisant état de renseignements pouvant permettre son identification, à moins que la victime n'ait donné son accord écrit (20.000 Frs d'amende et 2 ans de prison).

2.2 Dispositions répressives particulières

2.2.1 Le harcèlement sexuel

Est puni de 1 an d'emprisonnement et de 100.000 Fr d'amende (Art. 222-33 du CP)

2.2.2 L'exhibition sexuelle

Est punie de 1 an d'emprisonnement et de 100.000 Fr d'amende (Art. 222-32 du CP).
L'Art. 227-22 du CP condamne à 7 ans de prison et 700 000 Fr d'amende le majeur qui organise des réunions comportant des exhibitions ou des relations sexuelles auxquelles un mineur assiste ou participe.

2.2.3 Le viol

15 ans de réclusion criminelle.
20 ans de réclusion criminelle lorsque :
- si commis sur une personne vulnérable,
- si commis par un ascendant,
- si commis par une personne ayant autorité,
- si commis par une personne qui abuse de l'autorité qui lui confie ses fonctions de l'autorité que lui confère ses fonctions,
- si commis par plusieurs personnes,
- si commis avec usage d'une arme,
- ou sur un mineur de 15 ans.
30 ans de réclusion criminelle si la mort en est suivie.
Réclusion criminelle à perpétuité s'il a été précédé ou accompagné d'actes de torture ou de barbarie.

2.2.4 Les autres agressions sexuelles

Les peines varient en fonction de la qualité de la victime et de son âge.
Ainsi :
Si la victime est un mineur de 15 ans ou une personne vulnérable :
- 7 ans de prison et 700 000 F d'amende (Art 222-29 CP),
- 10 ans de prison et 100 000 F d'amende.
 
Si  les agression sont commises par :
- par un ascendant,
- par une personne ayant autorité,
- par une personne qui abuse de l'autorité que lui confère ses fonctions,
- par plusieurs personnes,
- sous la menace d'une arme ou si elles s'accompagnent de blessures ou de lésions (Art 222-30 du CP).
  • 2 ans de prison et 200 000 F d'amende si l'atteinte sexuelle est le fait d'un majeur qui n'emploie ni violence, ni contrainte, ni surprise ( Art 227-25 du CP),
  • et 5 ans plus 500 000 F d'amende si les mêmes atteintes (sans violence, sans contrainte, sans surprise...) sont le fait d'un ascendant (inceste) ou d'une personne ayant l'autorité ou d'une personne qui abuse qui abuse de ses fonctions ou si le fait est commis par plusieurs auteurs.
Si la victime est un mineur de 15 à 18 ans :
- Les agressions sexuelles sont punies de 5 ans de prison et 500 000 F d'amende ( Art 222-27 du CP).
- Les mêmes sont punies de 7 ans et 700 000 F d'amende lorsqu'elles sont aggravées :
  • sous la menace d'une arme ou si elles s'accompagnent de blessures oude lésions (Art 222-30 du CP).
  • par plusieurs personnes,
  • par une personne qui abuse de l'autorité que lui confère ses fonctions,
  • par un ascendant légitime avec lésions ou blessures (Art 222-28 du CP).
- Les agressions sans violence, ni contrainte, ni menace, ni surprise, imposées au mineur entre 15 et 18 as par un ascendant ou une personne abusant de son autorité  sont punies de 2 ans de prison et 200 000 F d'amende (inceste débuté avant 15 ans et qui se poursuit) (Art 227-27 du CP).

Si la victime n'est ni mineur de 15 ans, ni une personne vulnérable :
- Les peines sont de 5 ans de prison et 500 000 F d'amende (Art 222-27 du CP).
- Elles sont de 7 ans de prison et 700 000 F d'amende lorsqu'elles sont aggravées (Art 222-28 du CP).

Les asphyxies mécaniques

Pr. M. Le Gueut-Develay

CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
 

mis à jour le 23 septembre 1998

1 La suffocation  
1.1 Mécanisme 
1.2 Etiologies 
1.3 Examen de cadavre 
2 La pendaison 
2.1 Mécanisme simple ou combiné 
2.2 Etiologies 
2.3 Examen
3 La strangulation 
3.1 Mécanisme combiné 
3.2 Etiologies 
3.3 Examen 
4 La noyade ou submersion 
4.1 Mécanisme 
4.2 Etiologies 
4.3 Examen 


 
"L'asphyxie" ou anoxie n'est pas l'apanage de la médecine légale. En revanche, nombre de décès médico-légaux l'ont pour mécanisme par l'action extérieure volontaire ou involontaire, directe ou indirecte, d'un facteur qui vient entraver la dynamique respiratoire d'un bout à l'autre de la chaîne.
 
Pour une respiration cellulaire normale, il faut :
    Air respirable
    +
    Liberté des voies aériennes
    +
    Intégrité de l'appareil respiratoire    => contenant
              => contenu
    +
    Intégrité du couple sang vaisseau
    +
    Intégrité de l'appareil respiratoire cellulaire
Tout obstacle à l'une ou l'autre de ces étapes est générateur d'asphyxie :
- diminution de l'O2 dans l'air inspiré
- substitution d'un gaz toxique à l'air inspiré
- obstacle à l'entrée de l'air dans les voies aériennes
  • Obstacle externe :

  • - obstruction de la bouche, du nez (suffocation)
    - obstruction laryngée (pendaison, strangulation)
    - gène de la dynamique thoracique (écrasement, mouvements de foule)
  •  Obstacle interne :

  • - obstruction du pharynx (tampon de coton, aliment)
    - substitution par un liquide ou par un matériau pulvérulent de l'air inspiré (noyade)
- Traumatisme pulmonaire ou costal
- Anoxie par perte du capital hémoglobinique => traumatisme vasculaire hémorragique
- Anoxie par inutilisation du capital hémoglobinique :
  • directe => entrave au transport par arrêt circulatoire => pendaison
  • indirecte => entrave à la fixation de l'O2 => intoxication (CO, Cyanure…)
Nous éliminerons volontairement les intoxications, pour ne retenir que les asphyxies mécaniques qui ont en commun leur soudaineté de survenue chez des sujets, en général en bonne santé dont l'organisme est très brutalement agressé par des altérations en chaîne qui aboutissent rapidement au décès…
 
Classiquement, on décrit trois phases :
 1) - Troubles subjectifs à type d'acouphènes, de vertiges etc…
     - congestion puis,
     - polypnée, tachycardie et sueurs profuses
 2) - Cette première phase dure environ une minute et se poursuit par une  augmentation progressive de la cyanose avec apparition  de pétéchies,  bradycardie, perte de conscience et convulsions. (2')
 3) - Puis surviennent les gasps, l'arrêt respiratoire et 5 à 15' plus tard  l'arrêt cardiaque.
Peuvent s'y associer des vomissements, émission d'urine, de fécès, de sperme.

1 La suffocation

1.1 Mécanisme

Obstacle des voies aériennes externes ou hautes.

1.2 Etiologies

Accidentelle - homicide - suicidaire

1.2.1 Accidentelle

Le plus souvent :
- chute face contre terre de l'épileptique ou du vieillard
- nouveau-né n'ayant pas acquis le retournement (face dans l'oreiller)
- fausse route du glouton ou du vieillard, ou du malade neurologique avec paralysie du carrefour
- fausse route alimentaire par régurgitation dans le cadre d'une intoxication éthylique
- inhalation de substance toxique dans un but de toxicomanie etc...

1.2.2 Homicide

Difficile chez l'adulte, car il faut imaginer une pression soutenue sur les voies aériennes supérieures, sans lutte de la victime.
En revanche chez le nouveau-né ou le vieillard, ce peut être un moyen utilisé en raison, à l'inverse, d'une faible possibilité de défense.

1.2.3 Suicidaire

Rarissime.

1.3 Examen de cadavre

Le plus souvent, ne sont retrouvés que les signes habituels d'asphyxie :
- cyanose, congestion, écoulement sanglant par la bouche ou le nez.
On peut ne rien voir => mort réflexe, ou noter quelques signes orienteurs :
- excoriations en coups d'ongles autour de la bouche, du nez, sur le cou
- autre lésions traumatiques signant la lutte.
La mise en évidence d'un corps étranger intra-buccal, intra-pharyngé ou la position du cadavre au moment de la découverte peuvent orienter le diagnostic.

2 La pendaison

2.1 Mécanisme simple ou combiné

Obstacle circulatoire
+
Obstacle respiratoire
ou
Obstacle circulatoire
ou
Inhibition
ou
Obstacle + lésions médullaires
 
C'est la suspension passive du corps par un lien placé autour du cou et fixé à un point fixe.
Elle peut être complète pieds sans appui au sol, ou incomplète une partie du corps reposant sur un support.

2.2 Etiologies

2.2.1 Accidentelle

Rare et souvent le fait d'enfant lors de jeux.
Mais elle peut également se rencontrer en accident du travail, ou lors de manœuvres auto-érotiques.

2.2.2 Homicide

Rarissime - En revanche, la pendaison d'un cadavre peut être utilisée pour maquiller un crime. On peut alors s'aider des phénomènes cadavériques pour établir le diagnostic différentiel.

2.2.3 Suicidaire

Moyen de suicide fréquent, plus volontiers masculin. Les liens employés peuvent être très divers : corde, ficelle, ceinture, bas, drap etc…

2.3 Examen

Dominé par la description de la lésion principale : le sillon de pendaison.
Le plus souvent, il est situé, au dessus du larynx, relativement horizontal à la face antérieure du cou, puis oblique sur les faces latérales, se dirigeant vers le nœud (à droite, à gauche ou derrière) où il disparaît.
Il est plus ou moins complet, selon que le lien est lâche ou non.
Il reproduit la largeur du lien sur la peau et se parchemine en post-mortem.
 
Le diagnostic différentiel est à faire :
- chez l'adulte => avec des plis du cou (chez l'obèse par exemple) ou l'empreinte d'un vêtement,
- chez le nouveau-né => avec une circulaire du cordon ombilical.
 
Le visage du pendu peut présenter des aspects différents :
 - cyanosé ou non
 - langue protuse ou non
 - conjonctives injectées + pétéchies => ou non.
 
Par ailleurs, sont à noter :
- Sur le plan des phénomènes cadavériques
  • la position des lividités. En effet, le pendu développe comme tout cadavre des lividités déclives. Chez lui, elles se placent aux membres supérieurs des coudes à la pulpe des doigts, aux membres inférieurs des genoux aux pieds, dans les limites de temps habituelles. Si le cadavre est "dépendu" très tôt, les lividités apparaîtront en situation compatibles avec la nouvelle position qui lui sera donnée.
- Sur le plan traumatique
  • une éventuelle mobilité rachidienne et
  • des ecchymoses aux coudes, talons toujours possibles si le défunt est proche d'un  mur, ou de tout autre objet contondant (convulsions de la phase 2).

  • Dans ce cas, les ecchymoses sont à "discuter" => épisode convulsif ou coups anté-mortem.

3 La strangulation

3.1 Mécanisme combiné

Obstruction des voies aériennes
 +
Compression des vaisseaux du cou
ou
Inhibition réflexes

3.2 Etiologies

3.2.1 Accidentelle

Rare : accident de travail (cravate coincée dans un roulement de machine), accident de sport, jeux d'enfants.

3.2.2 Homicide

Presque exclusivement. C'est la strangulation à la main ou au lien, particulièrement traumatisante en raison des efforts de défense de la victime.

3.2.3 Suicidaire

Exceptionnelle. Encore qu'elle puisse se voir au moyen d'un garrot utilisé selon les méthodes des "strangulations supplices" espagnoles.

3.3 Examen

Dominé par les lésions cervicales qui peuvent être différentes selon le moyen utilisé.

 3.3.1 Strangulation à la main :

- excoriations en coups d'ongles,
- ecchymoses "en forme " arrondies reproduisant parfois la pulpe d'un doigt ou l'opposition des doigts (cf cours sur les blessures).
 
Ces strangulations s'accompagnent de la fracture des cartilages laryngés, de l'os hyoïde et de lésions traumatiques générales de défense.
La strangulation marquant la volonté criminelle, il est inutile de poursuivre l'examen général détaillé à la recherche de lésions associées (crâne, zones sexuelles…).
On observe souvent des tentatives de strangulation manuelle lors des examens de victimes d'agressions sexuelles ; l'apport de clichés radiologiques pour une recherche de fracture d'os hyoïde est non négligeable : il faut le demander systématiquement dans ce cas.

3.3.2 Strangulation au lien

Le sillon est classiquement complet (contrairement à la pendaison), horizontal et basi-cervical le plus souvent, et reproduit la largeur du lien. Il se parchemine en post-mortem.
Les lésions associées sont identiques aux précédentes.

4 La noyade ou submersion

4.1 Mécanisme

Obstacle à l'entrée de l'air par substitution d'eau
+
Troubles hémodynamiques

4.2 Etiologies

4.2.1 Accidentelles

Personne ne sachant pas nager.
Chute en mer.
Chute de l'éthylique ou de l'épileptique, face contre terre dans une flaque d'eau.
Enfant dans une baignoire.

4.2.2 Homicide

Rarissime chez l'adulte, possible chez le vieillard, fréquente chez le nouveau-né.
Comme lors de la pendaison, ce moyen peut être utilisé pour maquiller un crime en suicide.

4.2.3 Suicidaire

Fréquente, plutôt chez la femme. Parfois moyen unique, parfois comme tous les autres moyens mécaniques de suicide, associée à une prise d'alcool ou de médicaments.

4.3 Examen

L'examen est celui du corps d'un homme ou d'une femme retrouvé dans l'eau.

4.3.1 La mort peut résulter d'une véritable submersion

Dans ce cas, le sujet était vivant au moment de la chute dans l'eau. Il se débat, se fatigue perd conscience, puis lors de la phase d'hyperventilation (secondaire à l'hypercapnie), la reprise respiratoire s'effectue sous l'eau, laquelle vient envahir les voies aériennes supérieures - le brassage air-eau est à l'origine de la constitution d'une spume ; œdème mousseux qui s'extériorise sous forme de "champignon de mousse" au niveau des orifices respiratoires de la face (bon signe de submersion).
Quant à l'eau inhalée, son action répond à un banal phénomène osmotique :
- l'eau douce, passe vers le sang veineux pulmonaire. C'est l'hémodilution, l'hémolyse, la fibrillation ventriculaire et le décès.
- l'eau salée est à l'inverse, génératrice d'hémoconcentration.
 
L'examen du noyé submergé est le suivant :
- Hormis le champignon de mousse,
- Le cadavre a l'aspect lavé.
- La peau peut être ± macérée selon qu'il a été immergé ± longtemps, la putréfaction débute à la tête paradoxalement et le retrait de la peau des mains en doigts de gant est observé après un mois en eau douce et eau courante.
- Les globes oculaires ont retrouvé leur volume par passage de l'eau hypotonique.
- Le revêtement cutané peut porter des lésions traumatiques diverses à interpréter selon le contexte :
  • lésions de charriage
  • chocs divers sur le fond, les rochers, un bateau (lésions d'hélice)
  • incrustations calcaires qui devraient faciliter la détermination de la durée de l'immersion
  • lésions provoquées par des animaux (oiseaux de mer, poissons…)
En fait, le diagnostic positif de noyade est basé sur l'autopsie macroscopique et microscopique et sur la recherche de marqueurs :
- Biochimiques qui permettent d'objectiver l'hémodilution en eau douce
- Biologiques, diatomées (dans le foie, la moelle osseuse, les reins et les poumons) et protozoaires ciliés (sang).

4.3.2 L'examen du cadavre immergé est celui d'un corps dont le décès a été brutal

Il n'est pas cyanosé. Il ne présente pas de champignon de mousse et en microscopie, les alvéoles pulmonaires ne sont pas lésées.
- le cadavre peut correspondre à un décès par inhibition ou hydrocution (mort par phénomènes réflexes ou allergiques dans les instants qui précèdent la chute dans l'eau).
- le cadavre peut correspondre à un décès de toute autre origine (criminelle par exemple), secondairement jeté à l'eau dans un but de maquillage.
Il faut alors rechercher toutes lésions traumatiques.
Si ces corps sont demeurés longtemps dans l'eau, le diagnostic de submersion ou d'immersion est d'autant plus incertain que l'immersion a été longue.


La réquisition

Dr. François Paysant

CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
 

mis à jour le 26 septembre 1998

1 Généralités 
2 Formes de la réquisition 
2.1 Verbale 
2.2 Ecrite 
3 Circonstances 
3.1 réquisitions judiciaires 
3.2 Réquisition administrative 
4 Conduite à tenir devant une réquisition 

1 Généralités

La réquisition au sens large est une injonction faite à un individu par une autorité judiciaire ou administrative d'effectuer un acte quelconque.
En particulier, la réquisition médicale est l'injonction faite à un médecin par une autorité judiciaire ou administrative d'effectuer un acte médico-légal urgent.
Tout médecin peut être concerné quelque soit son mode d'exercice ou sa spécialité.
Le médecin devient un auxiliaire de justice le temps de l'exécution de cette réquisition.
Un décret du 20 juin 1961 autorise la réquisition des internes des hôpitaux publics, le plus souvent pour :
- examen clinique pour coups et blessures
- alcoolisme routier : prise de sang + examen clinique
 
Obligation de déférer = Obligation d'accepter (Art. L 367 CSP) :
"Tout médecin est tenu de déférer aux réquisitions de l'autorité publique" sanctions prévues à l'Article L 379 du CSP (1.500 à 15.000 F d'amende).
 
Il peut y avoir dérogation à l'obligation de principe de déférer pour les raisons suivantes :
- Cas de force majeure : En raison de maladie, d'inaptitude, d'obligation d'aller donner des soins urgents ailleurs …
- Incompétence technique : La mission confiée est totalement en dehors de la pratique habituelle.
 
Secret médical et réquisition
Le médecin traitant et le médecin requis ne doivent pas brandir le secret médical inconsidérément. Le médecin doit rester dans le cadre de la mission et faire abstraction de tout ce qu'il peut savoir sur le patient. Il n'y a donc pas d'incompatibilité entre être médecin traitant et être médecin requis. Souvent, en pratique rurale, le nombre limité de médecins impose que le médecin traitant soit requis.
Il faut distinguer la réquisition d'un acte d'expertise pour lequel le médecin traitant ne peut être le médecin expert. Le caractère non urgent de l'acte exige que le magistrat ait recours à des experts inscrits sur les listes de la Cour d'Appel ou Cour de Cassation, sauf exception.
Le médecin, commis "expert" ne doit pas être le médecin traitant.

2 Formes de la réquisition

2.1 Verbale

L'autorité requérante décline son autorité et formule les termes de sa mission. La forme verbale est devenue rarissime.
Il est classique que l'autorité requérante vous annonce la réquisition par téléphone, vous demande de vous rendre sur place et vous remette seulement sur les lieux la réquisition écrite.

2.2 Ecrite

Elle contient les éléments suivants :
- l'identité et la fonction du requérant
- l'article du Code de Procédure Pénale, permettant la réquisition
- la mission
- la nécessité de prêter serment ou non
- la date
- la signature du requérant.
Il existe des formes de réquisition différentes selon l'autorité requérante : (Police, gendarmerie, parquet). (cf annexe)
La réquisition est nominative, le médecin ne peut demander à un collègue de sous-traiter, il devra mentionner dans son rapport qu'il a rempli personnellement la mission qui lui a été confiée.
 
Autorités requérantes
La réquisition peut émaner :
- dans le cadre judiciaire :
  • d'un Officier de Police Judiciaire (O.P.J.) policier ou gendarme
  • d'un Magistrat : Procureur ou de son Substitut
  • d'un Président de Cour d'Assises, en vertu de son pouvoir discrétionnaire.
- dans le cadre administratif :
  • d'un Maire
  • d'un Préfet
  • d'un Officier de Police Judiciaire en police administrative
  • d'un Directeur d'hôpital.

3 Circonstances

3.1 réquisitions judiciaires

3.1.1 Examen de victime

Coups et blessures volontaires (cf. cours sur les blessures)
Agressions sexuelles (cf. cours sur les violences sexuelles)
Enfants victimes de sévices (cf cours sur les sévices à enfants)

3.1.2 Examen de personnes suspectes d'état alcoolique

Réquisitions les plus fréquentes
En application du Code de la Route ou du Code de débits de boisson en cas d'accident, d'infraction ou de contrôle systématique.
Auteur ou victime d'une infraction (crime ou délit).

3.1.3 Examen d'un gardé à vue

La garde à vue est une mesure qui permet des auditions pendant l'enquête. La personne est gardée dans des cellules de la police ou de la gendarmerie. Elle est coupée du monde extérieur.
  • La garde à vue du mineur est systématique
  • Législation des stupéfiants  (examen toutes les 24 heures)
  • A la demande de l'enquêteur

  • S'il craint que l'état de santé de la personne gardée à vue soit incompatible avec les mesures de garde à vue.
  • A la demande du gardé à vue (l'examen médical est de droit)

3.1.4 Examen médico-psychologique

Souvent réalisé par un psychologue pour avoir un avis rapide sur l'état  psychologique rapidement après les faits.

3.1.5 Autre type de réquisition

Détermination de l'âge.
Nécessité d'un placement en milieu psychiatrique.
Examen de trafiquants de stupéfiants "in corpore" etc...
Possibilité d'un transfert en avion en cas :
- de transfert
- d'expulsion
- de reconduite à la frontière.

3.1.6 Examen de cadavre

Articles 60 ou 74 du Code de Procédure Pénale.
Article 60 : flagrant délit.
Article 74 : pour une mort suspecte, un médecin peut être requis par un Maire ou un Préfet pour établir le rapport de levée de corps.
 
Exemples de situations de levées de corps :
- Affaire simple :
  • Mort naturelle.
  • Suicide.
  • Accident sans tiers responsable.

  • => levée de corps => certificat de décès => classé sans suite
- Mort criminelle :
  • Procédure de flagrant délit (art. 60 du Code de Procédure Pénale) permet à l'OPJ de pratiquer réquisition, saisie, garde à vue.
  • Le médecin coche la case obstacle médico-légal du certificat de décès (cf cours sur le certificat de décès).

  • Le médecin fait un rapport de réquisition concluant à la possibilité de mort criminelle et indique le bien fondé de l'autopsie ' autopsie quasi automatique.
- Mort suspecte :
  • Article 74  => mort suspecte
  • Examen "levée de corps"

  • +/- autopsie

3.2 Réquisition administrative

Le maire, le préfet peuvent requérir le médecin dans le cadre de la santé publique, en cas d'épidémie, de mouvements de population.
Le directeur d'hôpital pour assurer le bon fonctionnement de son établissement.

4 Conduite à tenir devant une réquisition

Le praticien doit répondre "à la mission, rien qu'à la mission".
Il doit remplir personnellement sa mission :
- faire les examens cliniques, les examens gynécologiques,
- décrire les lésions,
- fixer l'ITT : Incapacité Totale de Travail.
- préciser les causes de la mort.

4.1 Au début de l'examen :

- se présenter, dire à la personne examinée l'objet de la mission et par qui il a été requis,
- faire sortir l'OPJ, les autres personnes, respecter la confidentialité de l'examen
- faire attendre l'OPJ en salle d'attente, ne pas le renvoyer, il faudra qu'il réalise les scellés, si des prélèvements ont été réalisés.

4.2 La rédaction du rapport :

4.2.1 préambule

Je soussigné................................, fonction.................................., requis par l'OPJ ............................ agissant en vertu de l'article 60 ou 74 du CPP. ou autres
Afin de :  (mission) reprendre les termes exacts
-
-
-
certifie avoir rempli personnellement la mission qui m'a été confiée en mon honneur et conscience.
L'examen a eu lieu à telle date, telle heure.

4.2.2 Commémoratifs (les dires de la personne)

Déclaration de la personne (pas interprétation) ; on ne prend pas parti. Le rappel des commémoratifs est facultatif.

4.2.3 Doléances

4.2.4 Constatations médicales :

(voir cours sur le certificat médical)

4.2.5 Conclusion :

Synthèse de l'examen, qui répond aux questions posées.
Le certificat ne doit être remis qu'à l'autorité requérante avec un mémoire d'honoraires, tarification prévue dans le Code de Procédure Pénale en fonction de la nomenclature médicale.
 
Pour les experts non inscrits, il faut également remettre une prestation de serment.

Le secret médical

Pr. M. Le Gueut-Develay

CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
 

mis à jour le 26 septembre 1998

1 Les fondements du secret 
1.1 Règle juridique 
1.2 Règle déontologique 
2 Les personnes tenues au secret 
2.1 Le personnel médical 
2.2 Le personnel non médical 
3 Le domaine du secret médical 
4  Les dérogations 
4.1 Dérogations liées au patient 
4.2 Les dérogations liées à la loi 

Au médecin, Hippocrate conseillait de garder le silence et d'observer la prudence dans ses propos :
"Admis à l'intérieur des maisons, mes yeux ne verront pas ce qui s'y passe, ma langue taira les secrets qui me seront confiés…"
Recommandation et non contrainte, ce conseil Hippocratique était destiné à préserver le principe de base de la relation médecin-malade : la confiance.
Sans confiance, le malade ne peut s'exprimer totalement sur les maux dont il souffre.
Sans confiance, le médecin ne peut être suffisamment informé pour offrir les soins les plus diligents.
La notion de secret médical a évolué ; elle s'est adaptée aux époques, aux cultures, et aux nécessités de la Santé Publique.
L'obligation au secret apparaît au premier abord d'une extrême simplicité. Il semble s'agir de la traduction professionnelle de l'obligation générale de discrétion et de respect de la personne d'autrui.
La réalité est moins simple et les frontières du secret sont souvent difficiles à définir dans la mesure où l'exigence de discrétion se heurte à des impératifs tels que l'intérêt du malade ou l'intérêt social.

1 Les fondements du secret

1.1 Règle juridique

Article 226-13 du Nouveau Code Pénal : "La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire est punie d'un an d'emprisonnement et de 100 000 Frs d'amende".

1.2 Règle déontologique

Article 4 du Code de Déontologie : "Le secret professionnel, institué dans l'intérêt des patients, s'impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi. Le secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance du médecin dans l'exercice de sa profession, c'est à dire non seulement ce qui lui a été confié mais aussi ce qu'il a vu, entendu ou compris".
 
L'obligation au secret s'impose à toute personne amenée à connaître de l'état de santé du malade : le médecin, mais aussi les autres membres des professions de santé.

2 Les personnes tenues au secret

2.1 Le personnel médical

2.1.1 Soignant :

- Les médecins traitants, mais aussi les étudiants en médecine en stage, les externes, les internes (en milieu hospitalier),
- les dentistes,
- les pharmaciens,
- les sages-femmes, et toutes les professions qui contribuent aux soins : auxiliaires médicaux (infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthoptistes, orthophonistes, audio-prothésistes…), mais aussi les psychologues, les diététiciens et les assistantes sociales.
 
De même, les laboratoires d'analyses et leurs laborantins, les préparateurs en pharmacie sont-ils tenus au secret dans la mesure où un résultat d'examen ou une ordonnance peuvent renseigner sur un diagnostic.
Par extension, en milieu hospitalier, le "Service" est tenu au secret, comme le serait une personne unique.

2.1.2 Non soignant

Certains médecins peuvent connaître l'état de santé d'un patient, en dehors de tout contexte de soins :
 
2.1.2.1 Les médecins-conseils des Caisses de Sécurité Sociale, ou de Mutualité Sociale Agricole
 
Ils exercent une double mission :
- mission d'expertise médico-sociale qui consiste à vérifier l'application de la législation de Sécurité Sociale,
- mission d'expertise en Santé Publique qui consiste à surveiller la consommation de soins et l'application des méthodes de rationalisation.
Par le biais de documents divers (certificats, formulaires de soins…) et par leurs propres examens lors des visites de contrôle, ils sont amenés à connaître l'état de santé des malades.
Leurs décisions médicales à portée administrative ne doivent pas trahir le secret à l'égard de leur caisse.
En revanche, s'il a longtemps été possible de garder secret les diagnostics grâce à l'emploi de codes divers volontairement imprécis, les codages actuels des feuilles de soins (dans un souci de rationalisation des dépenses de santé) rendent ces diagnostics de plus en plus transparents. On pourrait alors imaginer que le malade refuse les divulgations sur sa santé. Cela serait juridiquement possible, mais entraînerait immédiatement la levée de sa couverture sociale ! Peut-on parler de choix ?
 
2.1.2.2 Les médecins du travail
 
Leur rôle est préventif. Ils renseignent, après examen médical, les employeurs, sur l'aptitude ou l'inaptitude d'un salarié au poste de travail. Ils ne motivent pas médicalement leurs avis.
Ils peuvent communiquer avec le médecin traitant auquel ils renvoient le salarié pour des soins. Le médecin traitant peut, en ce qui le concerne, leur apporter des informations, mais seulement avec l'accord du patient.
Par ailleurs, les médecins du Travail, sont tenus, au secret des fabrications et procédés industriels utilisés dans les entreprises où ils travaillent.
 
2.1.2.3 Les médecins des Compagnies d'Assurances
 
Leur rôle est de constater, d'interpréter un état de santé relativement à des situations médico-juridiques particulières établies entre un assureur et un assuré. Ils sont les conseils des assureurs. Ils interviennent :
 - pour évaluer les dommages corporels d'une victime relativement à  l'application de la loi d'indemnisation des victimes d'accidents de circulation (loi du 05/07/1985). De l'évaluation de ces dommages dépendra l'indemnisation ;
 - pour évaluer un état de santé au jour de la signature d'un contrat d'assurance  de personne ou à celui de la réalisation du risque assuré.
Dans le premier cas, il n'y a pas lieu de parler de secret puisque la victime qui demande réparation de son dommage (ici, corporel) doit le prouver. Elle n'a aucun intérêt à cacher un préjudice dont elle demande réparation.
Dans le second cas, l'assureur s'oblige contractuellement à garantir un risque (maladie ou accident) encore faut-il qu'il connaisse l'étendue de ce risque. Ainsi, la personne qui contracte doit elle donner sur son état de santé les renseignements les plus honnêtes. Le médecin conseil peut l'examiner afin d'évaluer cet état, l'absence de maladie ou au contraire la présence d'un état antérieur. C'est en fonction des risques présents au moment de la signature que seront calculées (par l'assureur, après avis médical) le montant des primes.
Il n'y a pas ici de relation de soins mais il n'y a pas non plus de secret à invoquer puisque c'est le patient lui-même qui s'engage à faire connaître son état de santé.
En revanche, le secret doit être total entre le médecin-conseil et celui pour lequel il agit (l'assureur). Il doit couvrir tout ce qui n'est pas directement lié à l'évaluation de l'état de santé. Le médecin conseil traduit pour son mandant, un état de santé en évaluation relative à des barèmes. Il n'a pas à faire état de diagnostics élaborés.
 
2.1.2.4 Les médecins experts
 
Inscrits sur la liste d'une Cour d'Appel ou agréés par la Cour de Cassation, les médecins experts sont désignés par les juges pour les renseigner sur des points de technique médicale.
 
En matière pénale, c'est la recherche de la vérité qui permet au juge d'instruction d'employer les moyens les plus larges pour y parvenir. Le médecin désigné dans ce type d'affaire doit pouvoir disposer des renseignements les plus précis sur l'état de santé de l'expertisé puisqu'il intervient dans le déroulement de la procédure.
Si l'expert ne dispose pas des éléments nécessaires, le magistrat peut perquisitionner au cabinet d'un médecin ou faire saisir un dossier hospitalier qui sera ensuite remis à l'expert pour examen. Les saisies s'effectuent en présence d'un membre du Conseil de l'Ordre qui se porte garant du respect du secret médical concernant les dossiers des autres patients.
 
En matière civile, le procès appartient aux parties. Celui qui s'estime victime d'un tiers doit prouver le dommage dont il demande réparation. S'agissant d'un dommage corporel, il doit apporter à l'expert le maximum d'éléments médicaux. Si ces éléments sont contenus dans un dossier médical, il peut en disposer de deux manières :
- soit en se faisant remettre son dossier par son médecin traitant (exercice libéral),
- soit en désignant à l'établissement hospitalier, le médecin expert, comme étant le médecin auquel le dossier doit être communiqué.
Opposer le secret à l'expert serait de la part de la victime, aller contre ses intérêts. La démarche est identique lorsque la demande d'un dossier est le fait d'un médecin de compagnie d'assurances.
 
Dans tous les cas, le secret doit être gardé sur tout ce qui ne concerne pas directement l'objet de la mission.

2.2 Le personnel non médical

La secrétaire du médecin libéral, les personnels hospitaliers n'étaient pas directement visés par l'ancien article 378 du Code Pénal. Il semble bien que la rédaction de l'article 226-13 les concernent :
- La secrétaire a connaissance des dossiers des patients.
- L'agent hospitalier est souvent présent au moment des soins.
Toutes ces personnes sont donc tenues au respect du secret.

3 Le domaine du secret médical

L'article 226-13 envisage la révélation d'une "information à caractère secret". La jurisprudence s'est depuis longtemps prononcée, et de manière constante :
Le secret concerne toutes les informations confiées, mais aussi tout ce qui a pu être vu, entendu, compris, voire interprété lors de l'exercice médical.
Ainsi, sont couverts par le secret :
 - les déclarations d'un malade,
 - les diagnostics,
 - les thérapeutiques,
 - les dossiers,
 - mais aussi les conversations surprises au domicile lors d'une visite, les confidences des familles, etc....
 
Toutes divulgations, en dehors des circonstances autorisées ou permises par la loi, sont sanctionnables. En effet, le délit de violation du secret professionnel est constitué dès lors que la révélation est effective, intentionnelle, même si son objet est de notoriété publique, même si elle n'entraîne aucun préjudice pour celui qu'elle concerne.
Les sanctions sont :
-  pénales : peines d'amende ou de prison (un an d'emprisonnement, et 100.000 Frs d'amende),
- civiles : s'il est résulté de l'infraction un préjudice,
- disciplinaires : en raison de la violation des articles du Code de Déontologie.
Mais, le délit n'est pas constitué dans les cas où la loi autorise ou impose la révélation du secret.

4 Les dérogations

Les dérogations sont liées soit à la spécificité de la relation médecin-patient, soit aux obligations ou permissions de la loi.

4.1 Dérogations liées au patient

La relation médecin-malade s'établit dans deux circonstances :
 - exercice libéral
 - exercice hospitalier.
La relation libérale est de nature contractuelle et dominée, pour le médecin, par le devoir d'information "Le médecin doit à son patient une information claire, loyale et intelligible" tant sur son état que sur les diagnostics, les thérapeutiques et les éventuels risques qu'il encourt.
Le secret n'est pas opposable au patient qui doit être totalement informé de son état afin de se soigner.
Néanmoins, le Code de Déontologie en son article 35 dispose :
 
"Toutefois, dans l'intérêt du malade et pour des raisons que le praticien apprécie en conscience, un malade peut être tenu dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un pronostic grave , sauf dans les cas où l'affection dont il est atteint expose les tiers à un risque de contamination, (VIH par exemple). Un pronostic fatal ne doit être révélé qu'avec circonspection, mais les proches doivent en être prévenus, sauf exception ou si le malade a préalablement interdit cette révélation ou désigné les tiers auxquels elle doit être faite".
 
Il s'agit d'une règle déontologique, d'une règle d'humanisme qui permet d'éviter au malade la perte de tout espoir d'amélioration de son état, tout en respectant le devoir principal du médecin : assurer la continuité des soins.
Les proches sont alors dépositaires de la partie des informations nécessaires à la poursuite des soins.
Mais l'on notera qu'en dernière analyse, la disposition de la révélation appartient toujours au malade
Propriété du malade et non du médecin, le secret dépend de lui seul. Maître de son intimité, il est libre d'en déterminer les limites, de vouloir le cacher ou le dévoiler. Il est seul juge de ses intérêts.
Ainsi, peut-il demander au médecin la rédaction de certificats qui ne sont qu'une matérialisation de l'information à laquelle le médecin ne peut opposer un refus. Ceci ne l'empêche pas d'être prudent dans ses écrits, mais il se doit d'être médicalement honnête.
Ces règles s'appliquent au malade majeur et capable. En ce qui concerne les mineurs, l'information doit être donnée au représentant légal, réserve faite du mineur suffisamment mûr pour comprendre. Chaque fois que le mineur (et notamment le grand mineur) est en mesure de comprendre, l'information doit également lui être donnée. Il en est de même du majeur incapable.
 
La relation hospitalière n'est pas de même nature. Si elle s'instaure avec un médecin, personne physique, elle demeure en grande partie comprise dans le dossier médical.
Celui-ci, document administratif, a longtemps été hors de portée du malade à ce point que tout un service pouvait connaître l'état de santé d'un malade qui lui même l'ignorait !
Les lois ont progressivement remédié à cette difficulté. Ainsi, la loi du 6 janvier 1978, relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, dispose t-elle que :
 
"Lorsque l'exercice du droit d'accès (à un dossier administratif) s'applique à des informations à caractère médical celle-ci peuvent être communiquées à l'intéressé par l'intermédiaire d'un médecin qu'il désigne à cet effet".
 
Le dossier hospitalier dont le contenu est défini dans l'article R 710.2.1. du Code de la Santé Publique demeure la propriété de l'établissement mais peut être consulté ou communiqué à un médecin choisi par le malade. Cette faculté est également offerte au représentant légal où à des ayants-droit en cas de décès et dans les mêmes conditions (Art. R. 710.2.2. du CSP). Le législateur a ainsi permis au malade de connaître mieux ce qui le concerne, tout en préservant le filtre que constitue le médecin désigné lequel, en application des règles déontologiques, peut décider de l'étendue des informations à donner.
La seule difficulté résiduelle consiste en l'absence d'indication sur la "qualité" du médecin choisi. Il peut s'agir du médecin traitant, mais aussi de n'importe quel autre médecin ce qui peut entraîner des dérives si les intérêts de ce médecin et ceux du malade sont différents.
dont le refus exprimé retient le médecin dans les liens du secret.

4.2 Les dérogations liées à la loi

4.2.1 L'ordre de la loi

 L'article 226-14 du Nouveau Code Pénal dispose :
 
 "L'art. 226-13 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. En outre, il n'est pas applicable :
1°) A celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de sévices ou de privations dont il a eu connaissance et qui ont été infligés à un mineur de quinze ans ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique ;
2°)  Au médecin qui, avec l'accord de la victime, porte à la connaissance du Procureur de la République les sévices qu'il a constatés dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences sexuelles de toute nature ont été commises."
 
Ceci signifie que la personne qui dénonce les sévices ou privations sur mineur ou sur personne vulnérable, ne sera pas poursuivie pour divulgation du secret. Il en va de même du médecin qui dénonce les sévices qui lui permettent de présumer que des violences sexuelles ont été commises (mais seulement avec l'accord de la victime). Il s'agit bien d'une autorisation à divulguer sans encourir de poursuite. Il ne s'agit pas d'une obligation.
Cette rédaction confirme le désir du législateur de ne pas entamer le caractère absolu du secret. En revanche, si la personne tenue au secret se tait sur ce qu'elle a pu connaître, cela ne la dispense pas de mettre en oeuvre tous les moyens susceptibles de porter secours à personne en péril.
En effet, l'article 223-6 dispose :
 
"Sera puni de cinq ans de prison et de 500.000 francs d'amende quiconque s'abstient volontairement de porter à une personne en péril l'assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle soit en provoquant un secours."
 
En matière de sévices, l'assistance peut consister en une simple hospitalisation (qui éloigne l'enfant ou le vieillard du milieu dangereux) ou en un coup de téléphone aux services sociaux.
Il en est de même lorsqu'un médecin, lors de l'exercice de sa profession a connaissance d'un crime ou d'un délit contre l'intégrité corporelle d'une personne.
Il n'a pas à le dénoncer, mais s'il peut par son action immédiate, sans risque pour lui ou pour les tiers porter secours, il doit le faire, sous peine des sanctions prévues au même article 223-6 du Nouveau Code Pénal, alinéa 1.

4.2.2 Les dérogations de source légale

Dans de nombreuses circonstances, le législateur a prévu la divulgation de certaines informations relatives à l'état de santé des personnes, afin de permettre l'application d'une loi.
Ainsi en est-il :
 
4.2.2.1 en  matière de santé publique :
 
- Déclaration des maladies professionnelles (loi du 30 octobre 1946), des accidents du travail.
- Déclaration des maladies contagieuses (Art. L 11 et suivants du Code de la santé publique).
Il s'agit de déclaration anonyme à l'autorité sanitaire (exceptée la déclaration de suspicion de Creutzfeld Jacob qui depuis le décret et l'arrêté du 19 septembre 1996 est obligatoire et nominative).
- Déclaration des maladies vénériennes (Art. L225 du CSP). La déclaration est anonyme si le malade accepte les soins, nominative dans le cas contraire. Concernant le SIDA, la déclaration est toujours anonyme.
- Déclaration des alcooliques dangereux (à l'autorité sanitaire). Art. L. 355.2 du CSP.
- Etablissement de certificats médicaux permettant la protection des majeurs incapables. Loi du 3 janvier 1968
- Etablissement de certificats médicaux permettant l'hospitalisation des malades mentaux. Loi du 27 juin 1990.
 - Déclaration des interruptions volontaires de grossesses (à l'autorité sanitaire) Loi du 17 janvier 1975. Il s'agit de déclaration  anonyme.
- Etablissement de certificats médicaux lors de la grossesse et des deux  premières années de la vie de l'enfant.
Lois (nombreuses) sur la protection de la mère et de l'enfant.
 
Ce paragraphe ne serait pas complet, s'il n'était pas fait état de l'établissement des certificats de naissance et de décès qui ne sont pas en fait, constitutifs d'une divulgation du secret.
En effet, le certificat de décès, s'il constate nominativement la mort d'un citoyen, ne renseigne pas sur la cause de la mort (indiquée dans la partie inférieure du certificat, anonyme).
Quant au certificat de naissance, il peut être, tout à fait anonyme. il établit qu'un enfant est né, mais il ne comporte pas obligatoirement sa filiation (accouchement sous "X").
La naissance, comme le décès, ne sont pas des faits secrets.
 
4.2.2.2 en matière d'instance judiciaire :
 
 - En ce qui concerne un patient, celui-ci  doit pouvoir disposer librement d'éléments relatifs à sa santé si ceux-ci ont utilité à faire valoir ses droits. Elle peut produire en justice les certificats médicaux établis à son endroit et sur sa demande devant les juridictions pénale ou civile.
 - En ce qui concerne le médecin, il peut comme tout citoyen être cité à comparaître en qualité de témoin. Il est tenu de comparaître, de prêter serment et de déposer. En revanche, si la teneur de son témoignage concerne de faits qu'il a connu lors de son exercice professionnel et hors le cas où la loi l'autorise ou lui impose de parler, il peut garder le secret.
 En revanche, il lui est permis de parler devant ses juges, si ses déclarations servent à assurer sa propre défense.
Il en va différemment, lorsque le refus de témoigner fait obstacle à la mise en œuvre d'un texte imposant un type de preuve spécifique.
Ainsi, en matière civile (art. 901) la validité d'un testament ou d'une donation entre vifs est elle subordonnée à l'état mental du donateur. Le médecin ne peut refuser aux héritiers l'attestation qui pourrait apporter la preuve d'une démence ou de toute autre atteinte du jugement, d'origine pathologique, au moment de la signature du testament.
 Il en est de même (art. 1975 du Code Civil) en matière de rente viagère. Le contrat ne produit aucun effet si la personne sur la tête de laquelle a été créé le contrat décède de la maladie dont elle était atteinte antérieurement, dans les vingt jours suivant la date du contrat.
 Le médecin ne peut refuser le certificat établissant le lien entre l'affection et le décès.

Les certificats médicaux

Pr. M. Le Gueut-Develay

CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
 

mis à jour le 26 septembre 1998

1 Les règles 
1.1 Professionnelles 
1.2 Légales et réglementaires
2 Sanctions 
2.1 Disciplinaires 
2.2 Pénales 

L'exercice de la médecine comporte normalement l'établissement par le médecin, conformément aux constatations médicales qu'il est en mesure de faire, des certificats, attestations, documents, dont la production est prescrite par les textes législatifs et réglementaires (Art 76 du Code de Déontologie - C.D.).
Le médecin doit s'efforcer de faciliter l'obtention par son malade des avantages sociaux auxquels son état lui donne droit, sans céder à aucune demande abusive (Art 50 du C.D.).
Le médecin peut aussi être amené à rédiger, à la demande de son patient, des certificats, attestations dont l'utilisation ne répondra à aucune exigence législative, mais procédera simplement d'un usage privé.
Dans tous les cas, le médecin doit savoir que la rédaction de ces documents engage ses responsabilités disciplinaire, pénale et civile.

1 Les règles

1.1 Professionnelles

Art. 76 du Code de Déontologie :
"L'exercice de la médecine comporte normalement l'établissement par le médecin, conformément aux constatations médicales qu'il est en mesure de faire, des certificats, attestations, documents dont la production est prescrite par les textes législatifs et réglementaires. Tout certificat, ordonnance, attestation ou document délivré par un médecin doit être rédigé en langue française et daté, permettre l'identification du signataire et comporter la signature manuscrite du médecin. Une traduction dans la langue du malade peut être remise à celui-ci".
 
Art. 50 du Code de Déontologie :
"Le médecin doit s'efforcer de faciliter l'obtention par son malade des avantages sociaux auxquels son état lui donne droit sans céder à aucune demande abusive".
A cette fin, il est autorisé, sauf opposition du patient, à communiquer au médecin-conseil nommément désigné de l'organisme de sécurité sociale dont il dépend, ou à un autre médecin relevant d'un organisme public décidant de l'attribution d'avantages sociaux, les renseignements médicaux strictement indispensables.

1.2 Légales et réglementaires

1.2.1 Certificats prévus par la loi Civile

1.2.1.1 Certificat prénuptial
 
Art. 63 du Code Civil, 2ème alinéa. "L'officier d'Etat-Civil ne pourra procéder à la publication des bans qu'après la remise par chacun des futurs époux d'un certificat médical datant de moins de 2 mois attestant que l'intéressé(e) a été examiné en vue du mariage, à l'exclusion de toute autre indication".
 
Art. L 153 du Code de la Santé Publique (puisqu'il s'agit d'une mesure de santé publique) dispose "que le médecin ne pourra délivrer le certificat médical prénuptial qu'au vu des résultats d'analyses ou d'examens dont la liste est fixée par décret".
 
Ainsi, devra-t-il disposer, pour une femme âgée de moins de 50 ans :
- d'une sérologie rubéole et toxoplasmose
- groupe A, B, O et Rhésus standard complété par la recherche d'anticorps irréguliers si le groupe ouvre à la possibilité d'isommunisation et dans le cas où il existe un risque d'allo-immunisation par suite d'une transfusion antérieure.
  • Le médecin communique ses constatations et les résultats à la personne  et non au futur conjoint.
  • Dans les cas graves, il doit faire une communication par écrit. Il peut  aussi indiquer des examens complémentaires à réaliser ou des consultations spécialisées à subir (notamment des consultations  génétiques si une pathologie transmissible est identifiée).
Depuis 1993 => à l'occasion de cet examen après information sur les risques de contamination, un test de dépistage de l'infection par le virus du S.I.D.A. est proposé aux futurs conjoints.
 
1.2.1.2 Certificat de décès
 
Art. 78 du Code Civil. "L'acte de décès sera dressé par l'officier d'Etat-Civil de la commune de décès, sur la déclaration d'une personne possédant sur l'état civil du défunt les renseignements les plus exacts et les plus complets qu'il sera possible".
 
Mais... l'Art. R. 363-18 du Code des Communes dispose "La fermeture du cercueil et donc l'inhumation sera autorisée par le même officier d'Etat-Civil après production du certificat établi par le médecin qu'il aura chargé de s'assurer du décès et de constater l'absence de problème médico-légal".
 
1.2.1.3 Mesures de sauvegarde des majeurs incapables
 
Art. 490 du Code Civil : lorsqu'il existe des altérations des facultés mentales ou des facultés corporelles ne permettant pas l'expression de la volonté, des mesures de protection de la personne et de ses biens peuvent être prises. L'altération des facultés mentales doit être immédiatement établie.
Cette constatation est faite par le médecin traitant, qui établi un certificat.
 
1.2.1.4 Testaments
 
Art. 901 du C.C.  => "Pour faire une donation entre vifs ou un testament, il faut être sain d'esprit".
 
Il appartient au Juge du Fond d'apprécier si le testateur est sain d'esprit. La jurisprudence a retenu la possibilité pour le juge de s'aider des témoignages des médecins ou des infirmières pour tenter d'évaluer la démence au moment de la rédaction du testament. Ces témoignages peuvent prendre la forme de certificats.

1.2.2 Certificats prévus par le C.S.P. (Code de la Santé Publique)

1.2.2.1 Certificat prénuptial
 
Le CSP détermine les examens médicaux obligatoires à pratiquer avant la rédaction du certificat, dans un but de santé publique.
 
1.2.2.2 Certificat de santé (Protection Infantile)
 
Art. L 163 du CSP "Un carnet de santé est donné par l'officier d'Etat Civil lors de la déclaration de la naissance d'un enfant".
 
Les résultats des examens médicaux obligatoires doivent y être inscrits :
- 9 examens au cours de la 1ère année
- 3 examens du 13 ème au 25 ème mois
- 2 examens par an pour les 4 années suivantes
- A 8 jours, aux 9ème et 24ème mois certificat d'état de santé et attestation d'examen.
 
1.2.2.3 Certificats de vaccination
 
Art. L 215 du CSP => BCG obligatoire.
 
Le BCG est effectué par un centre organisé par le Ministère de la Santé.
Si la vaccination a lieu en dehors d'un tel centre, les personnes doivent fournir un certificat établi par un médecin selon un modèle fixé par le Ministère de la Santé.
 
1.2.2.4 Certificats établis dans le cadre de la procédure d'I.V.G. (Interruption Volontaire de Grossesse)
 
Art. L 162-6 du CSP
"Si le médecin refuse de pratiquer l'I.V.G. demandée par la femme qui s'estime en état de détresse, il doit lui fournir un certificat indiquant qu'il s'est acquitté de l'information et que le délai a été respecté."
 
Art.  L 162-12 du CSP
"S'il s'agit d'une I.V.G. pour motif thérapeutique, deux médecins dont un médecin expert, inscrit sur une liste de Cour d'Appel, ou agréé par la Cour de Cassation, établissent un certificat attestant que la poursuite de la grossesse met en péril la santé de la mère ou que l'enfant à naître est atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic".
 
Dans cette seconde éventualité (incurabilité au moment du diagnostic), un diagnostic prénatal a été effectué.
Le certificat est alors établi par deux médecins :
- l'un expert (inscrit sur une liste de Cour d'Appel, ou agréé par la Cour de Cassation).
- l'autre appartient à un Centre de diagnostic prénatal pluridisciplinaire (Loi du 29 juillet 1994).
 
1.2.2.5 Hospitalisations en milieu spécialisé
 
Lors de l'hospitalisation à la demande d'un tiers, deux certificats médicaux doivent être rédigés par deux médecins différents.
Ces certificats sont remis au tiers qui demande l'hospitalisation. C'est à lui qu'il appartiendra de les fournir à l'administration de l'Etablissement Spécialisé. Ces certificats n'ont pas a être circonstanciés sur le plan du diagnostic de la maladie. Ils doivent seulement attester de ce que les conditions d'hospitalisation sont remplies.
D'autres certificats sont établis secondairement par les médecins psychiatres institutionnels.
Lors d'une hospitalisation d'office, un certificat médical doit obligatoirement être rédigé (par un médecin extérieur à l'établissement).
 
1.2.2.6 Toxicomanie
 
La loi de 1970 qui réprime l'usage et le trafic de stupéfiants, dispose de mesures préventives à l'égard des toxicomanes.
Ainsi, lorsqu'un toxicomane est interpellé (pour usage) et déféré devant le Procureur de la République, celui-ci peut lui enjoindre de se soigner (au lieu d'engager directement les poursuites).
Le toxicomane doit alors faire parvenir aux autorités administratives, un certificat médical indiquant le lieu de son traitement et la durée prévue.
Par ailleurs, un toxicomane, peut s'il le désire, suivre, de sa propre initiative, une cure de désintoxication, et ce de manière anonyme.
A l'issue de cette cure, il se fait délivrer par le médecin, un certificat nominatif indiquant les dates, lieu et raison de ce traitement. Ce certificat pourra être présenté au magistrat, en cas d'interpellation pour usage de stupéfiants.

1.2.3 Certificats destinés à l'obtention d'avantages sociaux

Ils sont très nombreux et très divers, leur rédaction est rendue nécessaire pour l'application des lois sociales.
Simples attestations (certificats de santé, certificats de grossesse etc...).
Certificats descriptifs : Accident de Travail, Maladie Professionnelle etc... (L 441-6 et L 461 5 du CSP). Arrêt de Travail Maladie.

1.2.4 Utilité des certificats médicaux en matière pénale

(Cf cours sur les sévices à enfants et sur les violences sexuelles)
La loi pénale sanctionne l'atteinte à l'intégrité physique de l'homme, que celle-ci soit volontaire ou involontaire.
Pour que l'infraction soit constituée, la matérialité des faits doit être établie.
C'est le médecin qui est le plus qualifié pour constater et décrire les lésions.
Il établit de ses constatations un certificat, lequel sera produit en justice par la victime. Le certificat est alors l'expression écrite de la constatation clinique.
Dans le même temps le médecin fixe la durée de l'Incapacité Totale de Travail (I.T.T.).
Cette durée est utile à la qualification de l'infraction.
  • Tous ces certificats doivent être rédigés conformément aux lois et règlements, remis aux destinataires désignés et limités strictement à leur objet.
 
Tous ces certificats doivent être : 
    - signés 
    - datés 
    - remis en main propre à celui qui en est l'objet 
    (au représentant légal, s'il s'agit d'un mineur ou d'un incapable majeur)
    - les certificats peuvent prendre la forme de formulaires pré-établis 
    (formulaires des organismes sociaux, vaccinations...)
    - les certificats peuvent être établis sur papier libreils peuvent être manuscrits ou dactylographiés mais doivent permettre l'identification du rédacteur

2 Sanctions

2.1 Disciplinaires

Art. 28 du C.D. : "La délivrance d'un rapport tendancieux ou d'un certificat de complaisance est interdite".
Art. 50 du C.D.  rappelle la nécessité de faciliter aux assurés sociaux l'obtention de leurs avantages, sans céder à aucune demande abusive.
 
Le médecin peut de plus être sanctionné par l'Ordre des médecins pour divulgation du secret professionnel etc...

2.2 Pénales

Art. 441-8 du Nouveau Code Pénal (N.C.P.)
"Une personne agissant dans l'exercice de sa profession qui sollicite ou agrée, directement ou indirectement , des offres, promesses, dons, présents ou avantages quelconques pour établir une attestation ou un certificat faisant état de faits matériellement inexacts, est punie de deux ans de prison et de 200.000 Francs d'amende".
 
Peine identique pour celui qui sollicite la personne qui agit dans le cadre de sa profession (le demandeur).
Lorsque la personne visée aux alinéas précédents est un médecin ou un membre d'une profession de santé et que l'attestation (ou le certificat) faisant état de faits inexacts dissimule ou certifie faussement une maladie ou une infirmité ou un état de grossesse, ou fournit des indications mensongères sur l'origine d'une maladie ou d'une infirmité ou sur la cause d'un décès, la peine est portée à 5 ans de prison et à 500.000 Francs d'amende.
 
Art. 441-9  la tentative est punie comme un délit.
Il existe, par ailleurs, des sanctions pénales particulières, applicables aux médecins psychiatres qui ne rédigent pas les certificats d'hospitalisation prévus par la législation dans les délais fixés.

LES REGLES DE PRESCRIPTION
Dr. François Paysant
cours mis à jour le 23 février 1998

I - Les règles  II - Les sanctions 

    Les prescriptions sont des actes médicaux permettant la poursuite de la thérapeutique.
    Elles concernent les substances médicamenteuses, les actes paracliniques (radiologie, biologie...), les actes paramédicaux (kinésithérapie, soins infirmiers...), des règles hygiéno-diététiques, la fourniture de matériels (cannes anglaises, fauteuils roulants, appareils aérosols...).
    Les prescriptions doivent obéir à certaines règles. Ces prescriptions doivent informer le patient, les praticiens susceptibles d'intervenir, et les organismes sociaux chargés des remboursements. En ce qui concerne les médicaments, elles sont la condition de délivrance des produits listés par le pharmacien.
    Le Code de Déontologie, le Code de la Santé Publique imposent aux médecins, les grands principes de prescription et des limitations très strictes de prescription pour certaines substances.
    Les médecins conventionnés ont des règles supplémentaires pour faciliter les remboursements des assurés par les Caisses et pour veiller au contrôle médicalisé des dépenses de santé.
I - LES REGLES
    A) Déontologie
      Art. 8 du Code de Déontologie :
        Le médecin est libre de ses prescriptions dans les limites autorisées par la  loi.
        Les prescriptions devront être appropriées aux circonstances.
        Le médecin devra limiter ses prescriptions et ses actes à ce qui est  nécessaire à la qualité, sécurité et efficacité des soins.
      Art. 21 :
        Il est interdit aux médecins de délivrer des médicaments à des fins lucratives sauf exception (exemple : les médecins dans les îles bretonnes, ont un droit de délivrance des médicaments, car le pharmacien n'est pas  accessible).
        Les médecins ne doivent pas délivrer des médicaments non autorisés.
      Art.34 :
        Le prescripteur doit établir ses prescriptions avec clarté, et il doit veiller à ce qu'elles soient comprises.
      Art. 39 :
        Les médecins ne doivent proposer que des thérapeutiques éprouvées.
      Art. 40 :
        Les médecins ne doivent pas par leur thérapeutique faire courir au patient un risque injustifié.
      Art. 45 :
        Les médecins doivent tenir pour chaque patient une fiche personnelle contenant les éléments diagnostics et thérapeutiques.
        L'article 45 prévoit l'existence du dossier de suivi médical.
    B) Règles du Code de la Santé Publique
      Le Code de la Santé Publique prévoit que le pharmacien ne pourra délivrer de médicaments que sur prescription médicale.
      Les médicaments sont classés en 3 catégories :
        Liste I - "Substances ou préparations et médicaments présentant des risques élevés pour la santé". Les boîtes portent un cadre rouge.
        Liste II - "Médicaments ou produits vénéneux présentant pour la santé, des risques directs ou indirects" .
        Les boites portent un cadre vert.
        Les stupéfiants - "Substances à risque toxicomanogène et quelques psychotropes".
      Rédaction des ordonnances - Liste I et Liste II :
        - Sur ordonnance comportant nom, adresse, qualité du prescripteur.
        - Nom, prénom, sexe et âge du malade, s'il s'agit d'un enfant, il est conseillé d'y inscrire le poids.
        - La date.
        - La signature.
        - Le nom des médicaments, leur posologie en chiffres, leur mode et leur condition d'administration. Remarque : s'il souhaite dépasser la posologie indiquée dans le "Codex", il faut mentionner "Je dis bien...".
        - La quantité prescrite ou la durée du traitement.
        La délivrance des médicaments ne peut se faire que dans les 3 mois après la rédaction de l'ordonnance.
        Seule la quantité pour un mois, peut être délivrée.
        Il existe une exception pour les médicaments contraceptifs, qui peuvent être délivrés pour trois mois.
        Liste I - Le nombre de renouvellements doit être indiqué par le prescripteur, dans les limites de1an.
        Liste II - Renouvellement de principe pendant 1 an, sauf indication contraire du prescripteur.
      Pour les stupéfiants
        a) La prescription se fait sur ordonnance (pour le remboursement), mais également sur carnets à souches, mis à disposition par le Conseil de l'Ordre des Médecins (le pharmacien garde le feuillet du carnet à souches).
        Inscription en toutes lettres du nom, prénom, sexe, âge du malade, nom du médicament, nombre d'unités thérapeutiques d'une spécialité, doses ou concentrations de substance.
        La durée maximale est fixée à 7 jours. Si une prescription complémentaire doit intervenir pendant ces 7 jours, en raison de l'état du malade, le médecin fera une nouvelle prescription en mentionnant "complément à la prescription du…).
        Le pharmacien conserve pendant 3 ans la prescription sur le carnet à souches.
        b) Un arrêté du 10 septembre 1992, a ramené à 28 jours, la durée de prescription de stupéfiants (10) qui pouvaient auparavant être prescrits pour 60 jours.
         Les conditions de prescription sont identiques aux autres stupéfiants.
        c) Une durée de 14 jours est prévue pour la morphine orale.
        d) Règle de la liste I avec carnet à souches pour :
          Le TEMGESIC® (usage fréquent par les toxicomanes).
          Le MODIOPAC® (médicament traitant la narcolepsie).
        Ils appartiennent à la liste I en ce qui concerne la réglementation de la fabrication et du stockage, mais sa prescription ne peut se faire que sur carnet à souches. La durée du traitement ne peut excéder un mois sauf indications contraires. Cette mesure dérogatoire pour le TEMGESIC® vise à limiter les fausses ordonnances. Il existe un inconvénient ; le patient peut consulter autant de médecins qu'il souhaite d'ordonnances.
        Le médecin peut avoir des stupéfiants pour son usage professionnel . Il peut se fournir chez le pharmacien de sa commune dont il communique le nom au Conseil de l'Ordre. Il est limité à 10 unités de médicaments stupéfiants. Tous les 3 mois, le pharmacien adresse à l'Inspection Régionale de la Pharmacie le nom des praticiens qu'il fournit, ainsi que la quantité de produits délivrés.
        e) Prescription de METHADONE :
        La prescription initiale doit être faite dans un centre spécialisé sur le carnet à souche pour une durée maximum de 7 jours. Cette prescription est renouvelée lorsque le traitement est initié, un relais par un médecin traitant de ville est effectué.
        Le médecin du centre établit une ordonnance sur laquelle le nom du médecin de ville est noté. Les prescriptions futures seront assurées par le médecin de ville sur le carnet à souche 7 jours.
        Le pharmacien délivrera le produit au vu de ces 2 documents. Le pharmacien est nommé sur l'ordonnance du médecin traitant.
        f) Prescription de SUBUTEX :
        L'ordonnance est faite sur le carnet à souche pour 28 jours.
        Il n'est pas prévu de prescripteur référent ni de pharmacien référent.
    C) Règles d'ordre conventionnel
      Ces règles sont en constante évolution. En 1997 a été signée, entre la Caisse Nationale d'Assurance Maladie et les représentants médicaux, une convention visant à limiter les dépenses de la médecine libérale.
      Pour l'heure, seuls les médecins conventionnés sont soumis à ces règles, c'est-à-dire la quasi-totalité des médecins libéraux. Ces règles ne s'appliquent pas aux médecins hospitaliers.
      Les références médicales opposables servent de guide aux prescriptions médicales.
      Les règles concernent :
         - l'ordonnance
         - la feuille de soins.
      1) l'ordonnance
        - Pas d'ordonnances pré-imprimées, sauf pour les règles hygiéno-diététiques (régime, toilette...)
        - Ordonnance type dite "bizone" pour les affections de longue durée.
        - Les ordonnances doivent comporter en plus des indications déjà citées, le n° d'identification du praticien à la Sécurité Sociale.
        Sur l'ordonnance peut figurer :
        - La conformité de la thérapeutique dans le cadre des recommandations des références médicales opposables,
          Si la prescription est conforme aux références :
            RT : s'il s'agit d'une prescription thérapeutique
            RB : s'il s'agit d'une prescription biologique
            RX : s'il s'agit d'une prescription radiologique
            RE : s'il s'agit d'une prescription endoscopique
          Remarque, une simplification est acceptée : la cotation R, si le cas entre dans les références.
        - La non-conformité de la prescription aux références, (cela est tout à fait possible), mais le praticien doit être en mesure de justifier médicalement sa prescription, il devra alors indiquer HR.
        - Le fait que la situation n'est pas prévue par les références, cocher HR.
        - L'association d'une pathologie prévue par les références, et l'autre non prévue, si l'on  respecte pour la prescription référencée, il devra alors inscrire R (T,B,X,E).
        Des ordonnances distinctes devront être délivrées en cas de prescription associant :
           - médicaments
           - radiologie
           - biologie
           - matériels etc...
      2) Les feuilles de soins devront comporter l'identification nominale du médecin. Celui-ci devra noter son acte et coter sa prescription en R (T, X, B, E) ou en HR.
II - LES SANCTIONS
    A) disciplinaires
      Non respect des règles du Code de Déontologie.
         - sanctions prononcées par le Conseil Régional de l'Ordre des Médecins.
         - sanctions de la Section des Assurances Sociales du Conseil de l'Ordre, en cas de non respect de la nomenclature.
    B) pénales
      Concernent le trafic des stupéfiants.
      Art. 222-37 : faciliter par quelque moyen que ce soit, l'usage illicite des stupéfiants, de délivrer des ordonnances de complaisance.
      Sanction => 10 ans de prison et 50.000.000 Francs d'amende.
      Art. 222-39 : la cession ou l'offre illicite de stupéfiants à une personne, en vue de sa consommation personnelle est punie de 5 ans de prison et de 500.000 Francs d'amende.
      Art. 222-40 : la tentative de délit est punie des mêmes peines.
    C)  Sanction conventionnelle
      1)  Non respect des références médicales opposables
        - non respect simple => retenue financière
        - si récidive ou anomalie particulièrement importante => retenue financière, plus suspension du conventionnement 1, 3, 6 mois ou 1 an.
      2) Non respect des tarifs, des règles de remplissage des feuilles de soins et des imprimés en vigueur
        => Sanctions diverses

Hospitalisation psychiatrique

loi du 27 juin 1990

Dr. François Paysant

CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
 

mis à jour le 26 septembre 1998

1 Hospitalisation Libre (HL)
1.1 Les formalités
1.2 Les droits des malades
1.3 Les modes de sortie
1.4 Les établissements
2 Hospitalisation à la Demande d'un Tiers (H.D.T.)
2.1 Les formalités
2.2 Les droits des malades
2.3 Les modes de sortie
2.4 Les établissements
3 Hospitalisation d'Office (H.O.)
3.1 Les formalités
3.2 Les droits des malades
3.3 Les modes de sortie
3.4 Les établissements

L'hospitalisation en milieu psychiatrique est particulière à deux égards :
 - la pathologie altère souvent le jugement et rend impossible le consentement aux actes de soins et au maintien en hospitalisation.
- la pathologie nécessite parfois des mesures contraignantes restreignant la liberté des individus.
Le législateur a réglementé ces hospitalisations, de façon à éviter les internements abusifs.

1 Hospitalisation Libre (HL)

L'HL nécessite le consentement du malade, ou le cas échéant celui de son représentant légal ; ceci implique une capacité de consentement en dépit de la pathologie.

1.1 Les formalités

Le malade étant consentant, il est inutile de chercher un tiers pour effectuer la demande. Le médecin ne rédige pas de certificat, mais une lettre d'accompagnement est toujours appréciée par les praticiens en charge du malade. Le patient étant hospitalisé de plein gré, les certificats de poursuite d'hospitalisation sont inutiles.

1.2 Les droits des malades

Le malade possède les mêmes droits que s'il était hospitalisé en service de médecine ou de chirurgie, il choisit un praticien et un établissement d'accueil.

1.3 Les modes de sortie

La sortie s'effectue, soit à la fin du traitement sur proposition du médecin thérapeute, soit après négociations entre le médecin et le malade, soit contre l'avis médical.

1.4 Les établissements

Il n'est pas prévu de conditions particulières pour les établissements où sont réalisés ce genre d'hospitalisation.

2 Hospitalisation à la Demande d'un Tiers (H.D.T.)

L'HDT exige que les deux conditions suivantes soient remplies : les troubles du sujet "rendent impossible son consentement" et "imposent des soins immédiats, assortis d'une surveillance constante en milieu hospitalier".

2.1 Les formalités

L'admission est très stricte et comporte plusieurs documents :

2.1.1 La demande d'admission

Doit émaner d'un membre de la famille ou de toute personne susceptible d'agir dans l'intérêt du malade (ami, curateur, tuteur...) à l'exception de "tout membre du personnel soignant exerçant dans l'établissement d'accueil" ; cette demande d'admission doit être manuscrite et signée par le tiers. Dans le cas où ce tiers ne sait pas écrire la demande est reçue par le Maire, le Commissaire de Police ou le Directeur de l'établissement. Ce document doit comporter tous renseignements concernant les noms, prénoms, profession, âge et domicile de la personne à hospitaliser et du demandeur ; doivent être précisés les liens de parenté s'il en existe ou la nature des relations.

2.1.2 Deux certificats médicaux

Délivrés et datés de moins de quinze jours. Ils doivent reprendre les conditions fondamentales et décrire de façon claire et précise sans que le diagnostic soit formellement établi. Le premier certificat est établi par un médecin extérieur à l'établissement, non obligatoirement psychiatre. Le deuxième peut être signé par un médecin de l'établissement.
Ces deux médecins ne doivent être ni parents, ni alliés jusqu'au 4ème degré inclusivement entre eux, au directeur de l'établissement, au demandeur et au malade.
Ces certificats nécessitent un bon examen du malade, ne doivent pas être rédigés sous la pression des proches et engagent les responsabilités civile, pénale et disciplinaire de leurs auteurs.
A titre exceptionnel en cas de "péril imminent pour la santé du malade", l'admission pourra être faite sur présentation d'un seul certificat pouvant même être produit par un psychiatre de l'établissement.

2.1.3 Un certificat établi dans les 24 premières heures

Par un psychiatre de l'établissement, ce nouveau certificat confirmant ou infirmant les précédents.
Lorsque les pièces sont réunies, le directeur de l'établissement les adresse au Préfet et à la Commission des Hospitalisations Psychiatriques. Dans les trois jours, le Préfet informe le Procureur de la République, le Président du T.G.I. du lieu d'hospitalisation ainsi que celui du lieu de domicile du patient.

2.1.4 Des certificats de suivi médical

Précisent la nature et l'évolution des troubles et indiquent clairement si les conditions d'hospitalisation sont toujours réunies. Ce type de certificat, rédigé dans les trois derniers jours de la première quinzaine de chaque mois d'hospitalisation autorise le maintien en hospitalisation pour une durée maximale d'un mois.

2.2 Les droits des malades

Durant cette période, la loi prévoit la possibilité de sorties d'essai dans le but d'une réinsertion sociale de bonne qualité ; la décision en revient au psychiatre, le directeur avertit le préfet et le tiers demandeur de l'hospitalisation.
Il est souhaitable que pendant le séjour, le malade soit protégé dans les actes de la vie civile (cf cours sur les incapables majeurs). Le médecin en fait la demande au Procureur du lieu du traitement, ce qui implique au minimum des mesures de sauvegarde de justice ou plus, tutelle ou curatelle.
La dignité du patient doit être respectée et les limitations des libertés individuelles réduites à celles strictement nécessitées par son état ou son traitement. Le patient conserve le droit de communiquer avec les autorités chargées du contrôle, de saisir la Commission des Hospitalisations Psychiatriques, de prendre conseil d'un médecin, d'un avocat, d'émettre ou de recevoir du courrier, de consulter le règlement intérieur, d'exercer son droit de vote et de pratiquer les activités philosophiques et religieuses de son choix, ces possibilités n'engendrent pas un droit de sortie.

2.3 Les modes de sortie

Les sorties peuvent se faire :
- Sur avis médical : le psychiatre au vu de l'amélioration clinique, "certifie que les conditions de l'HDT ne sont plus réunies".
- A la demande d'un tiers : conjoint, ascendants, descendants majeurs, curateur, tuteur, toute personne autorisée par le Conseil de famille.
- A la demande de la Commission des Hospitalisations Psychiatriques.
- Sur ordre du Préfet en cas d'absence des certificats prévus.

2.4 Les établissements

Ces établissements peuvent être publics ou privés, doivent passer convention avec l'Etat, être habilités par le Préfet et être organisés en secteur. Si un malade est admis dans un établissement non habilité, le transfert doit intervenir dans les 48 heures.
Des contrôles réguliers "sans publicité" par le Préfet, le Président du TGI, le Juge d'Instance, le Procureur, le Maire, la Commission des Hospitalisations Psychiatriques vérifient le registre des hospitalisations, les dispositions garantissant le droit des malades et reçoivent les réclamations de ceux-ci ou de leur conseil.

3 Hospitalisation d'Office (H.O.)

L'HO s'applique aux malades dont les troubles mentaux compromettent l'ordre public ou la sûreté des personnes.

3.1 Les formalités

L'initiative de la procédure revient habituellement à un médecin, qui ne doit pas appartenir à l'établissement d'accueil.
Il rédige un certificat circonstancié, permettant la prise d'un arrêté par le Préfet en province ou par le Préfet de Police à Paris avec possibilité de délégation aux sous-préfets et au Directeur de l'Hygiène et de la Santé Publique. Le Préfet avise le Procureur du lieu d'hospitalisation, le Maire et la famille de la personne hospitalisée.
Dans les cas d'urgence, lorsqu'il existe un danger immédiat pour la sûreté des personnes, le Maire, ou à Paris les commissaires de police prennent les mesures provisoires nécessaires même sans certificat médical. Ils en réfèrent dans les 24 heures au préfet qui prononcera l'arrêté.
La transformation d'une HDT en HO est possible par décision préfectorale.
 
L'article 122-1 du Code Pénal stipule "n'est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes".
 
Les personnes bénéficiant ainsi d'un non-lieu ou d'un acquittement peuvent être signalées par les autorités judiciaires au Préfet. Celui-ci, après examen médical, peut ordonner une HO.
Le maintien de l'HO est soumis à la rédaction par le psychiatre de l'établissement de certificats :
 - à 24 heures,
 - les trois derniers jours de la première quinzaine d'hospitalisation,
 - après un mois et ensuite au moins tous les mois.
Le maintien de cette hospitalisation se fait sur décision préfectorale renouvelable pour trois mois à la fin du premier mois, pour six mois à la fin des trois mois, puis renouvellement par six mois.

3.2 Les droits des malades

Ils sont comparables à ceux des hospitalisés en HDT, sauf pour les sorties d'essai qui sont également décidées par le préfet sur proposition du psychiatre pour une durée maximum de trois mois, le suivi étant assuré par les psychiatres du secteur.

3.3 Les modes de sortie

La décision de sortie définitive est également préfectorale à la demande du psychiatre, de la Commission des Hospitalisations Psychiatriques, du Président du TGI qui se saisit d'office ou à la suite d'une requête présentée par toute personne susceptible d'agir dans l'intérêt du malade.
En ce qui concerne les personnes en hospitalisation sur demande de la justice, la sortie ne peut être envisagée qu'après avis de deux psychiatres n'exerçant pas dans l'établissement et choisis par le préfet sur une liste d'experts.

3.4 Les établissements

Ils sont régis selon des conditions similaires à ceux accueillant des malades en HDT.

Les incapables majeurs

Dr. François Paysant

CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
 

mis à jour le 18 septembre 1998

1 La sauvegarde de justice 
1.1 Indications 
1.2 Mise en place de la Sauvegarde de Justice 
1.3 Les effets 
1.4 Fin de la sauvegarde de Justice 
2 La curatelle 
2.1 Les indications 
2.2 Les procédures 
2.3 Les effets de la Curatelle 
2.4 La Mainlevée de la Curatelle 
3 La tutelle 
3.1 Les indications 
3.2 Effets 
3.3 Les différents types de tutelles

La protection des incapables majeurs est prévue par la loi n°68-5 du 3 janvier 1968 (Art. 488 à 514 du Code Civil).
Tout sujet âgé de plus de 18 ans est présumé capable, il bénéficie d'une capacité civile, c'est-à-dire qu'il a une aptitude légale à la jouissance et à l'exercice de ses droits civils, en particulier à la gestion de ses biens.
 
Art. 488 du Code Civil, précise "est protégé par la loi, soit à l'occasion d'un acte particulier, soit d'une manière continue, le majeur qu'une altération de ses facultés met dans l'impossibilité de pourvoir seul à ses intérêts. Peut pareillement être protégé, le majeur qui par sa prodigalité, son intempérance ou son oisiveté s'expose à tomber dans le besoin ou compromet l'exécution de ses obligations familiales".
 
Un acte ne peut être valable que si la personne est saine d'esprit. Si la personne n'est pas protégée, une action en nullité oblige à prouver l'existence du trouble, au moment de l'acte, ce qui peut être très difficile. La loi prévoit des protections pour des atteintes physiques ou psychiques, maladie, infirmité, affaiblissement dû à l'âge.
La responsabilité civile ne disparaît pas pour autant. Les dommages causés à autrui devront être réparés.
La responsabilité pénale peut être diminuée ou annulée (Art. 122-1 et 122-2 du Code Pénal), "irresponsabilité pénale" en cas de trouble psychique sévère.
Trois mesures de protection sont prévues par la loi.

1 La sauvegarde de justice

Mesure de protection légère, les capacités civiles et civiques du patient persistent.

1.1 Indications

Patients porteurs d'une pathologie compatible avec la vie sociale mais risquant d'agir à l'encontre de leurs propres intérêts.
Patients aux facultés mentales altérées de façon transitoire (comateux…).
Patients nécessitant une mesure de protection rapidement avant l'instauration d'une tutelle ou d'une curatelle.

1.2 Mise en place de la Sauvegarde de Justice

Déclaration du Juge des Tutelles (dans ce cas, c'est une mesure provisoire avant une autre mesure de protection).
Déclaration médicale (Art. L 327 du Code de la Santé Publique).
 
S'il s'agit d'un médecin non spécialiste, l'avis conforme d'un psychiatre est nécessaire. Les deux avis sont adressés au Procureur de la République du lieu de traitement. La Sauvegarde de Justice prend effet immédiatement.
S'il s'agit d'un médecin spécialiste, son certificat suffit pour la mise en place de la mesure.

1.3 Les effets

Le malade conserve ses droits civils, civiques et politiques, mais les actes juridiques peuvent être modifiés ou annulés.

1.4 Fin de la sauvegarde de Justice

Par déclaration médicale signalant au Procureur de la République que la cause justifiant la Sauvegarde de Justice a disparu.
Par péremption la mesure se périme au bout de 2 mois, elle est reconduite par simple déclaration médicale par périodes de 6 mois. Le nombre de renouvellements est illimité.
Par décision du Procureur : si la mesure est devenue inutile, non fondée ou abusive.
Par remplacement par une tutelle ou une curatelle.

2 La curatelle

La Curatelle est destinée aux malades qui, sans être hors d'état d'agir par eux-mêmes, ont besoin d'être conseillés ou contrôlés dans les actes de la vie civile.
C'est la mesure intermédiaire entre la sauvegarde de Justice et la Tutelle.

2.1 Les indications

Les personnes dont les facultés mentales sont altérées, ou les personnes dont  les facultés corporelles sont altérées empêchant l'expression de la volonté.
Les prodigues, les oisifs, les intempérants qui risquent de tomber dans le besoin ou compromettre l'exécution de leurs obligations familiales.

2.2 Les procédures

La mise sous curatelle est prononcée par le juge des tutelles.
La curatelle peut être demandée par :
- le patient lui-même
- son conjoint
- ses ascendants, descendants
- frères, sœurs
- le Procureur de la République
(remarque : les autres parents, les proches, les amis, le médecin ne peuvent que transmettre un avis au Juge des tutelles).
La demande de curatelle doit être accompagnée d'un certificat médical certifiant que l'état du malade nécessite une mesure de curatelle au titre de la loi du 3 janvier 1968.
Le demandeur doit également fournir un certificat délivré par un médecin spécialiste inscrit sur une liste. Il s'agit d'une consultation donnant lieu à un rapport comportant une description détaillée des troubles, leur incidence sur les capacités de jugement et une conclusion "doit être conseillé et contrôlé dans les actes de la vie civile".
Le Juge des Tutelles a la possibilité d'entendre le malade et de porter à la connaissance de celui-ci, la mesure de protection prise.
Le Juge des Tutelles peut entendre le malade ou toute personne susceptible de l'éclairer.
A l'audience, le Juge entend les parties ou leur représentant.
La mise sous curatelle est mentionnée au niveau du registre de l'Etat Civil.
Un curateur est désigné, il s'agit en général du conjoint du sujet protégé. S'il y a impossibilité un autre curateur est désigné par le juge.

2.3 Les effets de la Curatelle

La Curatelle produit une incapacité partielle, le malade reste autonome pour les actes d'administration de son patrimoine, mais ils peuvent être revus ou annulés si le trouble mental au moment de l'acte peut être prouvé.
Il est dépendant de son curateur pour les actes de disposition et pour l'emploi des capitaux importants.
Il garde son droit de vote, mais il est inéligible. L'annulation devra être approuvée par le tribunal.
Le curateur gère les biens et fait un rapport de sa gestion annuelle au Juge des Tutelles.

2.4 La Mainlevée de la Curatelle

Les personnes qui pouvaient demander la curatelle, peuvent demander la levée de la curatelle. Le Juge des Tutelles peut se saisir lui-même.
Cette mainlevée nécessite un certificat détaillé, par un médecin spécialiste inscrit sur une liste.
Le Juge des Tutelles doit entendre de nouveau le malade et ses proches.

3 La tutelle

Il s'agit d'une mesure de protection complète du majeur, entraînant une incapacité civile presque totale.

3.1 Les indications

S'adresse aux malades dont les facultés psychiques sont altérées au point de leur enlever leur lucidité et leur aptitude à gérer leur biens, ou dont l'altération des facultés corporelles empêchent l'expression de la volonté.
L'ouverture et la mainlevée de la tutelle obéissent aux mêmes règles que l'ouverture de la curatelle précédemment décrites.

3.2 Effets

Le malade sous tutelle perd la totalité de ses droits civiques, politiques et, en fonction du type de tutelle, plus ou moins ses droits civils.
Exemple :
- le testament rédigé sous tutelle est nul
- le mariage est soumis à une décision du conseil de famille.
- le divorce est possible, c'est le tuteur qui agit avec l'accord du conseil de famille.

3.3 Les différents types de tutelles

3.3.1 La tutelle complète
 
Le tuteur désigné gère les biens à la place du malade. L'incapacité est totale.
Les actes conservatoires, les actes d'administration sont réalisés par le tuteur, les actes de disposition ne sont effectués qu'après avis du conseil de famille.
En règle générale, le tuteur est le conjoint. Si le conjoint ne peut être le tuteur, ou si le malade n'est pas marié, le conseil de famille propose au Juge un tuteur et un tuteur subrogé.
Le tuteur peut être un parent, un ami, un professionnel de la gestion des patrimoines, une association, un bureau d'aide sociale.
Le conseil de famille est présidé par le juge des tutelles, il est composé de 6 membres.
C'est le conseil de famille qui décide des conditions matérielles de la vie du malade.
Le tuteur représente le malade dans les actes de la vie civile, le tuteur subrogé vérifie la gestion du tuteur et le remplace au besoin.
 
3.3.2 L'Administration légale
 
C'est une forme simplifiée et allégée de tutelle, un conjoint, un ascendant, un descendant, un frère ou une sœur peuvent jouer le rôle d'administrateur légal. Il n'y a pas de conseil de famille, son rôle est joué par le Juge des tutelles.
Cette formule n'est réservée qu'aux malades à fortune limitée, ou lorsqu'un enfant arrivant à 18 ans a besoin d'être protégé.
L'administrateur ne peut faire seul que des actes conservatoires, les autres actes nécessiteront l'accord du juge des tutelles.
 
3.3.3 La gérance de tutelle
 
Indiquée pour gérer le patrimoine peu important. Le gérant perçoit les revenus du malade et les utilise pour l'entretien et l'alimentation. Il verse d'éventuels excédents budgétaires sur un compte. Il doit rendre compte de sa gestion au Juge.
Le gérant peut représenter le majeur incapable dans d'autres actes après l'accord du juge.
 
3.3.4 La tutelle d'état
 
Dans le cas où le majeur à protéger possède une fortune assez importante et, que la tutelle ne peut être confiée à la famille pour des raisons conflictuelles, d'incompétence, d'intérêt divergent ou en cas d'absence de la famille.
Dans ce cas, le juge des tutelles désigne l'Etat comme gérant (le Préfet ou le Directeur de la D.A.S.S.).
 
3.3.5 La tutelle aux prestations sociales
 
La tutelle aux prestations sociales concerne les incapables vivants dans des conditions précaires, et dont l'entourage détourne les prestations sociales.
Cette tutelle est mise en place pour trois ans au maximum.
Le tuteur perçoit à la place du malade les prestations sociales, les gère, les affectant aux dépenses courantes (logement, alimentation...). L'excédent peut être donné au malade pour son usage propre.


    Prélèvements et transplantations d'organes

    Dr. François Paysant

    CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
     

    mis à jour le 18 septembre 1998

    1 Les principes généraux 
    2 Prélèvement d'organe sur une personne vivante 
    3 Prélèvement sur une personne décédée 
    3.1 Le constat de décès 
    3.2 Le consentement 
    4 Conditions de réalisation

    Les premières transplantations rénales datent de 1951, les transplantations cardiaques de 1968. Depuis, ces activités n'ont cessé de croître et la mise en place d'une législation concernant les prélèvements et transplantations d'organes s'est avérée nécessaire.
    La première législation date de la loi du 22 décembre 1976 (Loi Caillavet). Depuis, la Loi du 29 juillet 1994 (Loi n° 94-654) a donné un cadre législatif très précis à ces activités. Cette loi intéresse les organes et la moelle hématopoétique.
    Une rapide définition des organes est intéressante :
    - l'organe est une partie du corps destinée à remplir une fonction nécessaire à la vie (exemple : poumons, cœur, reins, foie, pancréas...).
    - la peau, les os, les valves cardiaques ne sont pas des organes mais plus exactement des tissus.
    Après avoir rappelé les grands principes attachés aux transplantations d'organes. Il conviendra de distinguer les prélèvements d'organes effectués sur des personnes vivantes, des prélèvements d'organes effectués sur des personnes décédées.

    1 Les principes généraux

    La gratuité des dons est de principe, un simple dédommagement des frais inhérents aux prélèvements peut être accordé au donneur vivant.
    L'anonymat du donneur ou du receveur doit être conservé, toute information permettant une identification ne doit être relevée. Seul, l'intérêt  thérapeutique peut permettre d'accéder aux informations utiles (c'est-à-dire, antécédents de la personne donneuse d'organe).
    Des règles sanitaires doivent être observées. Il faut dépister certaines maladies transmissibles en recherchant la présence des marqueurs biologiques d'infection : VIH1, VIH2, HTLV1 et HTLV2, hépatites B et C, infections à cytomégalovirus, infections à virus Epstein Barr, Syphilis, Toxoplasmose.

    2 Prélèvement d'organe sur une personne vivante

    Ce prélèvement sur personne vivante nécessite un "intérêt thérapeutique direct" pour le receveur.
    Il doit exister entre le donneur et le receveur des liens de parenté (père, mère, fils, fille, frère ou sœur). En cas d'extrême urgence, le conjoint peut être le donneur à titre exceptionnel. Une exception existe en ce qui concerne le don de moelle osseuse, le lien de parenté n'est pas utile.
    Une information compréhensible doit être fournie au donneur concernant les risques qu'il encourt et les conséquences du prélèvement.
    Le consentement du donneur est reçu par le Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance. A tout moment, le donneur peut retirer son consentement à cet acte sans qu'il soit pour lui nécessaire de se justifier.
    Aucun prélèvement d'organe à l'exception du prélèvement de moelle osseuse ne peut être fait sur un mineur ou un incapable majeur vivant.
    Le prélèvement de moëlle osseuse est possible chez le mineur au profit de sa soeur ou de son frère. Dans ce cas, le consentement des personnes exerçant l'autorité parentale ou du représentant légal est indispensable ; ce consentement est recueilli par le Président du Tribunal de Grande Instance. Le simple refus du mineur, même en cas de demande des deux parents empêche tout prélèvement. Pour vérifier ces conditions, un comité de trois personnes comprenant deux médecins dont un pédiatre et une autre personne non médecin vérifie que l'information a été délivrée au mineur, qu'il accepte ce prélèvement s'il est en âge de le faire. Ce comité vérifie également les indications de l'intervention chirurgicale et évalue les risques physiques et psychiques pour le donneur.

    3 Prélèvement sur une personne décédée

    Ce type de prélèvement nécessite un intérêt thérapeutique ou scientifique.
     
    Intérêt thérapeutique :
    le prélèvement d'organe sur le corps d'une personne décédée se fait dans l'intérêt de la santé d'un tiers.
     
    - Intérêt scientifique :
    le prélèvement d'organe sur la personne décédée se fera dans l'intérêt de la science ou pour établir un diagnostic des causes de la mort (autopsie clinique).

    3.1 Le constat de décès

    Le ou les prélèvements d'organes ne peuvent être effectués qu'après la constatation du décès.
    Toutefois, un constat de décès précoce est souhaitable. Le taux de réussite de la transplantation de l'organe est en relation avec le délai entre la mort et le prélèvement.
    Le constat de décès préalable au prélèvement d'organe à des fin thérapeutiques ou scientifiques est prévu par le Décret du 2 décembre 1996 :
      • si la personne présente un arrêt cardio-respiratoire prolongé. il faut :
      - une absence totale de conscience et d'activité motrice spontanée ;
      - une abolition de tous les reflux du tronc cérébral ;
      - une absence totale de ventilation spontanée.
      • si la personne cliniquement décédée assistée par ventilation artificielle, conserve une hémodynamique :
      - l'absence de respiration spontanée est vérifiée par une épreuve d'hypercapnie ;
      - les 3 critères précédents doivent être constatés ;
      - il faut 2 EEG nul et aréactifs effectué à 4 heures d'intervalle avec une durée d'enregistrement de 30 minutes ou une angiographie objectivant  l'arrêt de la circulation encéphalique.
    D'autre part, il est recommandé aux médecins certificateurs de vérifier que le corps ne présente pas de problème médico-légal (obstacle médico-légal à l'inhumation).
    Le constat de décès est établi par deux médecins, ces deux médecins ne doivent appartenir ni à l'équipe qui procédera au prélèvement ni à celle qui réalisera la greffe. L'un des deux médecins doit être chef de service.
    Le procès verbal de constatation du décès est établi en 3 exemplaires :
    - un pour chaque médecin,
    - un qui sera conservé par l'établissement dans lequel le prélèvement a lieu.

    3.2 Le consentement

    Dans le cas d'un prélèvement d'organe à visée thérapeutique, le prélèvement peut être effectué dès lors que la personne concernée n'a pas fait connaître de son vivant son refus de prélèvement (art. L 671-7 du Code de Santé Publique). La loi du 29 juillet 1994 prévoit la mise en place d'un registre national informatisé des personnes refusant le prélèvement. Ce fichier sera géré par l'établissement français des greffes. La consultation de ce registre revient au coordinateur régional de l'établissement français des greffes.
    En tout état de cause, le médecin devra s'efforcer de recueillir le témoignage de la famille (art. L 671-7 du CSP). Si la personne décédée est un mineur ou un incapable majeur, le consentement de chacun des titulaires de l'autorité parentale ou du représentant légal est nécessaire.
    La présomption de consentement ne s'applique pas pour les prélèvements à visée de recherche scientifique. Il est nécessaire que le défunt ait exprimé sa volonté de son vivant ou que les médecins aient recueilli un témoignage favorable de la part de la famille.

    4 Conditions de réalisation

    La loi prévoit qu'une restauration correcte du corps du défunt doit être assurée par l'équipe qui réalise le prélèvement.
    Les établissements où sont effectués les prélèvements mais également les transplantations sont soumis à une autorisation préalable accordée par l'autorité administrative.
    Un établissement français des greffes est créé par la loi du 18 janvier 1994. Cet établissement a pour mission l'enregistrement des patients en attente de greffe sur une liste nationale. Il assure la gestion de cette liste, la répartition des greffons et l'élaboration des règles de bonnes pratiques de prélèvement et de transplantation. Cet établissement donnera également un avis favorable ou défavorable à l'autorisation des établissements pour réaliser les prélèvements ou les transplantations.


    Les recherches biomédicales sur l'homme - RBM

    Pr. M. Le Gueut-Develay

    CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
     

    mis à jour le 18 septembre 1998

    1 L'organisation 
    1.1 Les acteurs 
    1.2 La mise en œuvre
    2 Mise en oeuvre des responsabilités  
    2.1 Responsabilité source de sanctions 
    2.2 Responsabilité source d'indemnisation

    La recherche biomédicale est définie comme regroupant "les essais et expérimentations organisées et pratiquées sur l'être humain en vu du développement des connaissances biologiques et médicales qu'ils soient ou non menés dans un but thérapeutique".
    Les essais de médicaments, l'expérimentation d'une nouvelle technique chirurgicale ont toujours été nécessaires et c'est de cette manière que la médecine a pu progresser.
    Mais, jusqu'en 1988, le droit français n'acceptait l'atteinte à l'intégrité physique ou psychique d'une personne que si elle était justifiée par la poursuite d'un but thérapeutique ou par la permission de la loi. En dehors de ces cas, il s'agissait de violences volontaires, de mutilations, voire d'administration de substances nuisibles.
    Ainsi, jusqu'en 1988, les essais médicamenteux sur l'homme étaient-ils pratiqués hors du territoire national alors que dans le même temps, les règles de mise sur le marché d'un nouveau médicament exigeaient cette expérimentation !
    Il devenait urgent de légiférer pour :
    - mettre en harmonie les exigences législatives,
    - permettre à la recherche de se développer sur le territoire,
    - se conformer aux règles supranationales et en particulier aux directives de la CEE qui exigent la réalisation d'expérimentations sans but thérapeutique pour fournir les éléments de pharmacologie indispensables à tout dossier de commercialisation.
    La loi du 20 décembre 1988 a défini le cadre actuel de réalisation de ces recherches, en faisant valoir tout à la fois les règles techniques et le principe de droit fondamental que constitue le respect de la personne humaine. Ainsi est-elle intitulée "Loi sur la Protection des personnes qui se prêtent à des recherches biomédicales" (Loi Huriet). De nombreux textes d'application ont suivi parmi lesquels la loi du 25 juillet 1994.
    Quelles recherches ?
    - dès qu'un médicament fait l'objet d'un essai sur l'homme,
    - dès qu'un matériel prothétique ou de soins est utilisé sur l'homme,
    - dès lors qu'une démarche cognitive existe, la loi s'applique.
    A contrario, les études rétrospectives qui ne concernent que la collecte d'informations et n'attentent pas à l'intégrité des participants, ne sont pas intéressées par la loi.
    La loi distingue entre deux types de recherche :
    - les recherches sans bénéfice individuel, et
    - les recherches avec bénéfice individuel.
    Des premières, il n'est pas attendu un bénéfice immédiat ou à court terme pour les participants (essais de phase I et II des médicaments, par exemple).
    Des secondes, il est attendu un bénéfice diagnostique ou thérapeutique.
    En revanche, dans les deux cas, la condition indispensable est que la recherche permette une extension des connaissances biologiques et médicales, une amélioration de la condition humaine.
    En clair, la recherche ne peut être entreprise sur l'homme par pure spéculation intellectuelle.
    Le législateur a, pour éviter toute dérive, strictement encadré les conditions de réalisation, veillé à une protection des participants, à peine de sanctions tant pénales que civiles et disciplinaires.

    1 L'organisation

    Elle définit la qualité des acteurs et les conditions de mise en oeuvre de la recherche.

    1.1 Les acteurs

    1.1.1 Les chercheurs

    Le Promoteur, est celui à l'instigation duquel la recherche a lieu. Il peut s'agir d'un établissement public, d'un laboratoire, d'un fabricant de matériel à usage humain.
    L'Investigateur, est un médecin, inscrit au Conseil de l'Ordre. Il dirige et surveille la réalisation de la recherche sur l'homme.
    Promoteur et investigateur peuvent n'être qu'une seule et même personne.

    1.1.2 Les participants

    Tout être humain et vivant ce qui exclue :
    - les embryons in vivo... mais des recherches peuvent être entreprises sur la mère ou l'enfant si elles ne présentent aucun risque prévisible pour leur  santé,
    - les embryons in-vitro.... mais le couple auquel ils appartiennent peut accepter par écrit que des études
    - les patients en état de mort cérébrale mais.... depuis la loi de juillet 1994, les recherches peuvent être entreprises Si le défunt les avait acceptées de son vivant ou Si la famille en témoigne.
    Par ailleurs, les recherches ne peuvent avoir lieu sur les femmes enceintes, allaitantes, ou parturientes, sur les personnes privées de liberté (prisonniers ou malades mentaux), sur les toxicomanes, sur les mineurs ou majeurs incapables... sauf s'il en est attendu un bénéfice direct, et qu'elles y ont consenti expressément.
    En fait, les seules personnes qui ne peuvent certainement pas participer et lorsque la recherche est sans bénéfice direct sont les non-assurés sociaux. Dans tous les autres cas de figure, malgré des interdictions énoncées, existent toujours des dérogations.
    soient effectuées sur ces embryons à condition que ces études aient une finalité thérapeutique, ne portent pas atteinte à l'embryon et aient reçu un avis conforme de la Commission Nationale de Médecine et de Biologie de la reproduction ! (Quelle est la différence entre expérimentation et étude ?),

    1.1.3 Entre chercheurs et participants

    La loi a créé un Comité Consultatif pour la Protection des Personnes qui se prêtent aux Recherches Biomédicales (CCPPRBM).
     
    Interviennent également :
    - le Ministère de la Santé,
    - les Directions de la Pharmacie des Hôpitaux, de la Santé,
    - le Conseil de l'Ordre des Médecins,
    - le Préfet,
    - l'Assureur de Responsabilité Civile.

    1.2 La mise en oeuvre

    1.2.1 Les chercheurs

    Le promoteur doit fournir à l'investigateur un dossier complet (joint en annexe).
     
    L'investigateur doit soumettre, par lettre recommandée avec accusé de réception, au CCPPRBM, un dossier faisant état de l'objet de la recherche, du protocole prévu, des modalités d'information des participants etc...
    S'il exerce dans un établissement public de santé, il doit avertir le chef d'établissement.
     
    Le CCPPRBM a pour rôle de vérifier :
    - la rigueur scientifique du projet,
    - le respect de la protection des participants et particulièrement la nature et la forme de l'information ainsi que les modalités du recueil du consentement.
    Il rend, dans les 5 semaines, un avis qui n'est que consultatif mais transmis à l'autorité sanitaire (Ministère). Bien que cet avis ne soit que consultatif, l'absence de sa recherche est pénalement sanctionnée. Lorsque cet avis est rendu, le promoteur l'adresse, joint à une lettre d'intention (en annexe) au Ministère lequel  :
    - peut donner un avis favorable ou
    - suspendre l'expérimentation s'il estime qu'il existe un risque pour la santé publique.
    Dans le même temps, un dossier est adressé :
    - à la direction de la pharmacie s'il s'agit d'une expérimentation médicamenteuse,
    - à la direction des Hôpitaux s'il s'agit d'une expérimentation relative à du matériel à usage humain,
    - à la direction de la Santé pour toutes autres expérimentations.
     
    Le promoteur doit également :
    - informer le pharmacien de l'établissement qui gère les stocks et lui confier des échantillons des produits objets de la recherche,
    - contrôler l'agrément des lieux où se pratiquent les recherches sans bénéfice direct,
    - souscrire une assurance de Responsabilité Civile (indemnisation des participants).
     
    L'investigateur doit informer le Conseil de l'Ordre puisqu'il s'agit d'un "contrat" passé entre le chercheur et le participant.

    1.2.2 Les participants (PRBM)

    Leur rôle est de participer à la recherche, mais pour ce faire ils doivent être informés de manière à consentir librement. Quelle que soit la nature de la recherche, la règle qui s'applique est celle de la Raison Proportionnée. "Le risque L'information est fonction de la nature de ce risque.
    L'investigateur doit informer toujours :
    - sur l'objectif de la recherche,
    - les contraintes, l'avis du CCPPRBM,
    - la possibilité de cesser à tout moment,ne doit pas être hors de proportion avec le bénéfice escompte".
    - le fait pour le participant d'être fiché (fichier informatique) lors d'une recherche sans bénéfice,
    - les risques encourus.
    parfois :
    - de façon plus exhaustive et ce d'autant que le risque est disproportionné par rapport à l'action de recherche.
    Cette information est ORALE mais un résumé écrit doit être donné au participant.
    Celui-ci consent par ECRIT, ou en présence d'un témoin, indépendant du promoteur et de l'investigateur.
    Le consentement est obtenu :
    - du participant,
    - du tuteur lorsqu'il s'agit d'un majeur protégé (acte bénin),
    - du Conseil de Famille lorsqu'il s'agit d'un majeur protégé (acte grave)
    - d'un parent lorsqu'il s'agit d'un mineur (acte bénin)
    - des deux parents lorsqu'il s'agit d'un mineur (acte grave).
    Si un incapable mineur ou majeur refuse, l'expérimentation ne peut être réalisée.
    Le consentement peut être retiré à tout moment ce qui n'est pas sans effet sur la nature particulière de la Responsabilité Civile.
    Enfin, les personnes qui participent sont indemnisées des contraintes subies (temps passé, obligations, inconfort) mais jamais au delà de 20.000 Francs/an. La somme est versée par le promoteur (ceci afin d'éviter la professionnalisation des essais).
    La loi a encadré de manière précise le déroulement des recherches. Elle a aussi défini les circonstances de mise en œuvre des responsabilités.

    2 Mise en oeuvre des responsabilités

    2.1 Responsabilité source de sanctions

    2.1.1 Pénale

    Les recherches interdites, réalisées sans le consentement du participant ou continuées malgré son refus sont sanctionnées de 3 ans d'emprisonnement et de 300.000 Francs d'amende (Art. 223-8 du Nouveau Code Pénal).
    Les mêmes peines sont encourues Si les règles concernant les personnes privées de liberté, les femmes enceintes, les mineurs ou majeurs incapables ne sont pas observées.
    Les personnes morales (Etablissement public de Santé) peuvent être, de même sanctionnées et pour les mêmes raisons que précédemment (Art. 223-9 du Nouveau Code Pénal).
    La violation du Secret médical, le défaut d'assurance du promoteur peuvent également faire l'objet de sanctions.

    2.1.2 Disciplinaire

    L'Article 15 du Code de Déontologie dispose :
    "Le médecin ne peut participer à des recherches biomédicales sur les personnes que dans les conditions prévues par la loi ; il doit s'assurer de la régularité et de la pertinence de ces recherches ainsi que de l'objectivité de leurs conclusions. Le médecin traitant qui participe à une recherche biomédicale en tant qu'investigateur doit veiller à ce que la réalisation de l'étude n'altère ni la relation de confiance qui le lie au patient ni la continuité des soins".
     
    Le médecin peut donc faire l'objet de poursuites disciplinaires tant en ce qui concerne l'absence de respect des conditions législatives qu'en ce qui pourrait mettre à mal l'essence même de la relation qui le lie à son malade : la confiance.

    2.1.3 Administrative

    Le Ministère peut suspendre à tout moment l'expérimentation, ou retirer l'agrément des lieux.

    2.2 Responsabilité source d'indemnisation

    Il se noue entre le chercheur (ou le groupe chercheur) et le participant, un contrat d'un type un peu particulier puisque s'associent :
    - une obligation de résultat : réaliser la recherche suivant le protocole établi,
    - une obligation de moyens : assurer la sécurité et donner tous soins attentifs et conformes aux données de la science.
    De plus, fait très particulier, le consentement qui préside à tout contrat médical, peut être retiré par le patient à tout moment sans que cela soit constitutif d'une faute quelconque.
    Lorsqu'un dommage survient, le régime de la responsabilité du groupe chercheur peut être différent selon qu'il s'agit d'une recherche sans bénéfice ou avec bénéfice.
     
    S'il s'agit d'une recherche sans bénéfice
    Le promoteur assume la totalité de l'indemnisation du dommage. Le participant n'a pas à rechercher la faute du promoteur et celui-ci ne peut invoquer le retrait du participant ou le fait d'un tiers.
     
    S'il s'agit d'une recherche avec bénéfice
    Le régime de responsabilité est différent puisque le promoteur assume l'indemnisation des dommages causés sauf preuve à sa charge que le dommage ntest pas imputable à sa faute ou à celle de tout intervenant.
     
    Cette preuve est très difficile à apporter d'autant que le promoteur ne peut invoquer ni le fait d'un tiers ni le retrait volontaire du participant.
    Le seul élément qui demeure est de prouver la part de responsabilité du participant consistant en l'absence de respect des conditions contractuelles de recherches (ne pas prendre le médicament testé ou faire des associations médicamenteuses non prévues par le protocole, par exemple) ou un état antérieur.
    A ce sujet, la loi de 1994 a précisé la nécessité d'un examen médical préalable dans les recherches sans bénéfice.
    Elle a même disposé que cet examen ou plutôt ses résultats puissent être communiqués à un praticien choisi par le participant avant que celui-ci consente.
    Les commentaires juridiques autour de cette loi conseillent le même examen pour les recherches avec bénéfice direct.
    L'indemnisation est versée par l'assurance du promoteur. Elle prend en charge les dix années qui suivent la fin de la recherche voire plus, car la prescription est de dix ans, mais le point de départ est fixé à la manifestation du dommage ou à son aggravation.
    Les sommes versées ne sont pas inférieures à :
    - 5 000 Frs par victime
    - 30 000 Frs par protocole
    - 50 000 Frs par année.
     
    Exclusions : l'assureur ne garantie pas dans les cas suivants :
    - Recherches non dirigées ou non surveillées par un médecin
    - Absence d'avis du CCPPRBM
    - Absence de déclaration au Ministère
    - Non habilitation des lieux de recherche
    - Consentement non conforme.
     
    Depuis juillet 1994, les ayants-droits sont admis à l'indemnisation d'un préjudice par ricochet : (mort d'un parent qui s'était prêté à une recherche).

    Assistance médicale à la procréation

    Pr. M. Le Gueut-Develay

    CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
     

    mis à jour le 18 septembre 1998

    Introduction
    1 Techniques
    1.1 Pratiques cliniques
    1.2 Pratiques biologiques
    2 Principe de l'A.M.P.
    3 A.M.P. au sein du couple
    4 A.M.P. en dehors du couple
    4.1 Le don de gamètes
    4.2 Accueil d'un embryon
    5 A.M.P. et sécurité sociale
    6 A.M.P. et centre agréé
    Remarques

    Introduction

    L'assistance Médicale à la Procréation (A.M.P.) fait l'objet d'une législation depuis le 29 juillet 1994. L'A.M.P. fait partie des lois dites de "bioéthique". L'adoption de ces textes législatifs a été l'objet de travaux préliminaires, rapport LENOIR, rapport MATTEI, de nombreuses consultations entre l'Assemblée Nationale et le Sénat et de recours en Conseil Constitutionnel. Cette loi concernant l'A.M.P. est adoptée pour une durée de 5 ans. (Elle sera don revue en 1999).
     
    L'A.M.P. est définie par l'article L.152-1 du Code de la Santé Publique (issu de la loi du 29/07/1994) comme "l'ensemble des pratiques cliniques et biologiques permettant la conception in vitro.
     
    Le transfert d'embryons et l'insémination artificielle ainsi que toute technique, d'effet équivalent permettant la procréation en dehors du processus naturel".

    1 Techniques

    L'insémination artificielle date de 1791. La première naissance par fécondation in vitro (F.I.V.) remonte à juillet 1978. Le nombre de F.I.V. en France par an est estimé à 4.500. Les différentes techniques sont décrites sommairement.
    Pour plus de détails se reporter à "Procréation médicalement assistée" Professeur ZORN - Revue du Praticien 1994, 44, 11, 1535.

    1.1 Pratiques cliniques :

    1.1.1 Recueil des gamètes

    Recueil du sperme.
    Recueil des ovocytes (le plus souvent après stimulation).

    1.1.2 Transfert

    Insémination artificielle :
    - avec sperme du conjoint ou du concubin
    - avec sperme du donneur
     
    Fécondation in vitro :
    - différents lieux de réimplantation
    - réimplantation multiple
    - réduction embryonnaire destiné à éviter les grossesses multiples.

    1.2 Pratique biologique :

    Conservation :
    - le plus souvent par congélation

    2 Principe de l'A.M.P.

    (L'A.M.P. est destinée à répondre à la demande parentale d'un couple)
     
    Art. L.152.2: "L'homme et la femme formant un couple doivent être vivants, en âge de procréer, mariés ou en mesure d'apporter la preuve d'une vie commune d'au moins 2 ans et consentant préalablement au transfert d'embryons ou à l'insémination".
     
    L'A.M.P. a deux objectifs :
    - traiter l'infertilité du couple (infertilité médicalement constatée qu'elle soit masculine ou féminine)
    - éviter le risque de transmission d'une maladie particulièrement grave.
    - elle exclue toute possibilité de recours à l'A.M.P. pour convenance personnelle.
     
    Analyse de l'article 152.2
     
    un couple
    Il s'agit d'un couple hétérosexuel donc composé d'un homme et d'une femme, ce qui exclu les couples homosexuels, les célibataires.
     
    un couple marié ou en union libre
    Pour le couple marié, il n'est requis aucune condition de vie commune,
    Pour l'union libre, il est demandé 2 ans de vie commune attestés par un témoin.
    remarque: pour établir un diagnostic de stérilité il faut environ 2 ans.
     
    vivant
    Le décès d'un des membres du couple rend impossible l'A.M.P., (le législateur a estimé que cette pratique ne respectait pas l'enfant).
     
    en âge de procréer
    Il s'agit d'une condition qui n'est pas nettement définie mais qui devrait éviter les grossesses chez des femmes de plus de 60 ans (comme en Italie ou en Angleterre). Ces grossesses présentent des risques élevés.
     
    consentement préalable
    La loi prévoit des entretiens préalables obligatoires et dont le nombre est laissé à discrétion de l'équipe médicale d'A.M.P.
    Ces entretiens se déroulent entre le couple demandeur et différents membres de l'équipe médicale d'A.M.P. Ils permettent de faire prendre conscience au couple des aspects scientifiques et éthiques de leur demande.
    L'équipe d'A.M.P. vérifie les motivations du couple, délivre une information et remet un dossier-guide explicatif.
    Après le dernier entretien un délai de réflexion d'un mois est nécessaire pour que le couple donne son consentement.
    La confirmation de la demande se fait par écrit. Un délai supplémentaire de durée non précisée peut être demandé par le médecin de l'équipe médicale, s'il le juge nécessaire.

    3 A.M.P. au sein du couple

    Après l'A.M.P., il est possible que des embryons non utilisés soient en surnombre. La conservation de ces embryons en surnombre est soumise à la décision des deux parents par écrit.
    La conservation a une durée maximum de 5 ans. Tous les ans, les deux membres du couple sont interrogés sur le maintien ou non de leur demande parentale ou sur leur consentement à l'accueil d'un ou des embryons par un autre couple demandeur.
    Si le délai de 5 ans est dépassé sans qu'il y ait eu demande parentale ou Si l'accueil par un autre couple est impossible, il est mis fin à la conservation. Un décret en Conseil d'Etat devrait établir le sort de ces embryons.
     
    Filiation :
    L'A.M.P. au sein du couple aboutit à des enfants dont l'identité génétique est celle de ses deux parents.
    Il n'existe pas de difficulté pour établir la filiation de ce nouveau-né.

    4 A.M.P. en dehors du couple

    Il s'agit d'une A.M.P. avec tiers donneur. Le don peut consister en des gamètes ou en des embryons. Le couple doit satisfaire aux exigences de l'A.M.P. et doit apporter la preuve que le recours à un tiers donneur soit indispensable.

    4.1 Le don de gamètes

    Peut concerner soit :
    - les spermatozoïdes,
    - les ovocytes.

    4.1.1 Conditions concernant le donneur :

    - le donneur doit faire partie d'un couple ayant déjà procréé,
    - le recueil des consentements écrits du donneur et de son conjoint sont nécessaires,
    - un même donneur ne peut être à l'origine de plus de 5 naissances.

    4.1.2 Condition d'anonymat :

    L'anonymat du don de gamètes est inscrit dans la loi.
    Question fortement débattue car la France est signataire de la convention des Droits de l'enfant (New York 26/01/1990) qui précise que l'enfant à le droit de connaître ses parents.

    4.1.3 Gratuité des dons :

    - la gratuité est fondée sur le principe de la non patrimonialité du corps humain et de ses éléments,
    - possibilité de remboursement des frais engagés par le donneur (déplacement).
    Le don ne peut concerner qu'un type de gamète.
    Exemple :
    - Ovocyte de la femme du couple et don du sperme.
    - Sperme de l'homme du couple et don d'ovocytes (FIV).

    4.1.4 Sécurité Sanitaire

    Dépistage des maladies sexuellement transmissibles par analyses biologiques du donneur :
    - dépistage V.I.H.1 et V.I.H. 2
    - dépistage H.T.L.V.1 et H.T.L.V.2
    - dosages des marqueurs biologiques des hépatites B et C
    - dépistage de la syphilis
    - recherche des marqueurs biologiques du C.M.V.
    - analyse microbiologique du sperme
    Interdiction d'insémination de sperme frais ou d'un mélange de sperme.

    4.2 Accueil d'un embryon

    Ne concerne que les couples dont l'A.M.P. ne peut être réalisée sans le recours au tiers donneur. Nécessite l'accord du couple donneur.

    4.2 1 L'autorité judiciaire :

    - reçoit le consentement du couple donneur, par écrit,
    - vérifie que le couple receveur rempli les conditions de l'A.M.P.
    - évalue les conditions d'accueil de l'enfant à naître sur les plans familial, éducatif et psychologique.
    (Compétence du Tribunal de Grande Instance).
    - Anonymat :
  • Anonymat dans le double sens du donneur à l'égard du receveur et inversement.
  • Toutefois, dans l'intérêt de l'enfant et en cas de nécessité thérapeutique, le médecin pourra avoir accès à des informations non identifiantes concernant les couples à l'origine du don d'embryons.
  • - L'embryon transféré devra être testé pour assurer des conditions de sécurité optimum.
    - La gratuité du don.

    4.2.2 La filiation

    La loi prévoit que la filiation maternelle soit établie par l'accouchement et que la filiation paternelle soit établie par le fait d'être marié ou de vivre en concubinage avec la mère de l'enfant.
    L'anonymat ne permet pas la filiation génétique.
    Le consentement à l'A.M.P., au don de gamètes ou à l'accueil d'embryons apporte une présomption de paternité.

    5 A.M.P. et la sécurité sociale

    Les actes d'A.M.P. sont pris en charge par l'Assurance Maladie après entente préalable. Ils sont inclus dans la nomenclature des actes de biologie.
    Le coût d'une F.I.V. en 1988 était estimé à 300.000 F.

    6 A.M.P. et centre agréé

    Les activités d'A.M.P. sont soumises à la planification sanitaire. Il doit s'agir d'établissements publics ou privés sans but lucratif.
    Les centres doivent disposer de personnels qualifiés en nombre suffisant, d'installation et de moyens financiers suffisants.
    Ces établissements doivent assurer les principes généraux de l'A.M.P. L'autorisation de pratiquer l'A.M.P. est donnée pour 5 ans après avis de la Commission Nationale de Médecine et de Biologie de la Reproduction et du Diagnostic Prénatal.

    Remarques

    Le recours à l'utilisation de mère porteuse est interdit par la loi.
    Des sanctions sont prévues pour les infractions à cette loi.
    A côté de l'A.M.P. persistent des possibilités d'adoption d'enfant.
    Chaque étape de l'A.M.P. est donc réglementée. La loi prévoit pour chacune d'elle des sanctions pénales (dont certaines très lourdes) et administratives (retrait d'agrément...).

    L'interruption volontaire de grossesse

    Pr. M. Le Gueut-Develay

    CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
     

    mis à jour le 18 septembre 1998

    1 Interruption volontaire de grossesse  
    1.1 Dispositions communes 
    1.2 Dispositions particulières 
    2 L'encadrement législatif 
    2.1 La répression  
    2.2 Les lacunes 

    "Avortement" jusqu'à la mise en application du nouveau Code Pénal, l'Interruption Volontaire de Grossesse (I.V.G.) correspond à l'évacuation volontaire du produit de conception.
     
    Ce moyen a été de tous temps utilisé pour limiter le nombre des naissances. On en trouve les modalités d'exécution dans le "Traité de Gynécologie" de Soranos d'Ephèse, 143 ans après J-C.
    Au fil des siècles, il a été licite, illicite, toléré, criminel, et à chaque époque sont intervenues des considérations morales, philosophiques, religieuses ou politiques pour s'interroger sur le point de savoir à partir de quel moment le produit de conception peut être considéré comme une personne (au sens juridique du terme) ... nous n'avons toujours pas la réponse.
    Les législations successives sont le reflet de ces atermoiements, puisque l'avortement a été selon les époques, un crime, un délit (loi du 27 mars 1923) et que depuis 1975 il est en France, légal, dans un cadre réglementaire strict.
    Il prend alors le nom d'interruption volontaire de grossesse.
    Le nouveau Code Pénal a franchi un pas supplémentaire en supprimant le mot avortement pour créer le délit "d'interruption illégale de la grossesse".

    1 Interruption volontaire de grossesse

    La loi du 17 Janvier 1975, dite "Loi Veil" autorise l'interruption d'une grossesse à la demande de la mère, dans deux circonstances :
    - soit, lorsque la mère s'estime en état de détresse - L'IVG doit alors être pratiquée avant la fin de la 10ème semaine de grossesse (ART. L 162-1 du CSP).
    - soit parce que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme ou qu'il existe une probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une maladie d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic (Art. L 162-12 du CSP).
    L'IVG peut alors être pratiquée à n'importe quel moment de la grossesse.
    Cette loi définie des règles communes et des dispositions particulières à chaque type d'IVG.

    1.1 Dispositions communes

    1.1.1 Concernant les personnels médicaux et paramédicaux
     
    Les IVG ne peuvent être pratiquées que par un médecin (L 162-2 du CSP).
    Elles doivent faire l'objet d'une déclaration anonyme à l'établissement où elles se pratiquent.
    Toutefois, le médecin consulté peut refuser de pratiquer des IVG. De même les personnels affectés dans les services où l'on pratique des IVG peuvent ne pas souhaiter y demeurer. La loi permet cette clause de conscience.
    La seule exigence réside pour le médecin, dans l'obligation d'en avertir la femme lors de la première consultation de sorte qu'elle puisse consulter ailleurs et ne pas être en situation de dépassement de délai au-delà duquel elle ne pourrait plus subir d'IVG.
     
    1.1.2 Concernant les établissements
     
    Les IVG ne peuvent avoir lieu que dans les établissements agréés (L 176 du CSP).
    Dans ces établissements, le Conseil d'Administration désigne le Chef du Service où seront pratiquées les IVG. Si celui-ci refuse (Clause de conscience), le Conseil d'Administration crée une unité dotée des moyens permettant la réalisation des IVG.
    S'il s'agit d'un établissement totalement privé (clinique privée à but lucratif), il peut refuser de pratiquer les IVG.
    S'il s'agit d'un établissement privé ayant demandé à participer au service public, il ne peut opposer un refus que si un autre établissement peut assumer la pratique des IVG.
    S'il s'agit d'un établissement privé, le nombre des IVG ne peut dépasser le quart des actes chirurgicaux et obstétricaux.
    L'établissement doit assurer le transfert de la déclaration anonyme des IVG au Médecin Inspecteur Régional de la Santé.
    L'établissement doit assurer après l'intervention une information en matière de contraception.
    (Depuis l'arrêté du 22 Février 1983, l'IVG est remboursée par la Sécurité Sociale).

    1.2 Dispositions particulières

    1.2.1 L'IVG pratiquée avant la fin de la 10ème semaine de grossesse
     
    L'IVG est demandée au médecin par la femme que son état de grossesse met dans une situation de détresse ("La situation de détresse" n'est pas définie, son appréciation appartient à la femme. Le médecin n'a pas à en exiger les preuves).
    Le médecin doit l'informer des risques médicaux qu'elle encourt pour elle-même et ses maternités futures et de la gravité biologique de l'intervention qu'elle sollicite.
    Il doit lui remettre un dossier guide qui comprend :
    - le rappel des dispositions de l'Art. 1 de la loi de 1975 (respect de la vie), ainsi que les dispositions de l'Art. L 162-1 du CSP qui limite l'IVG au cas ou la femme enceinte se trouve placée par son état, en situation de détresse.
    - l'énumération des droits, aides et avantages garantis par la loi aux familles, aux mères (célibataires ou non et à leurs enfants, ainsi que des possibilités offertes par l'adoption d'un enfant à naître).
    - la liste et les adresses des organismes visés à l'Art. L 162-4, ainsi que des associations et organismes susceptibles d'apporter une aide morale ou matérielle.
    - la liste et les adresses des établissements où sont pratiquées les IVG. (Art. L 162-3 du CSP).
    Après cette première visite, la femme doit consulter un établissement d'information, de consultation ou d'accueil, un centre de planification, un service social ou autre organisme agréé qui devra lui accorder une attestation de consultation.
    Puis, à la suite d'une semaine de réflexion, (moins si le médecin l'estime souhaitable ou nécessaire), elle consulte à nouveau et confirme sa décision par écrit (L 162-5 du CSP).
    Si la femme est mineure, l'accord des représentants légaux doit être obtenu... mais le consentement à subir l'IVG doit également être donné par la mineure, en dehors de la présence des parents ou du représentant légal.
    Si la femme est étrangère, elle doit justifier des conditions de résidence sur le territoire, fixées par voie réglementaire (3 mois - décret du 13 Mai 1975).
     
    1.2.2 L' IVG pratiquée pour motif thérapeutique (L 162-12 du CSP)
     
    Elle peut être pratiquée à toute époque, si la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la mère ou s'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une maladie d'une particulière gravité, reconnue comme incurable au moment du diagnostic.
    Elle ne peut être pratiquée qu'après que deux médecins ayant examiné la femme et discuté de l'indication attestent du péril ou de l'incurabilité de la maladie de l'enfant.
    L'un des deux médecins doit exercer sont activité dans un établissement d'hospitalisation public ou dans un établissement d'hospitalisation privé agréé, l'autre doit être expert judiciaire (inscrit sur une liste de la Cour d'Appel ou agréé par la Cour de Cassation).
    De plus, et depuis la loi du 29 Juillet 1994, si l'interruption de grossesse est envisagée au motif qu'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic, l'un de ces deux médecins doit exercer son activité dans un Centre de Diagnostic Prénatal Pluridisciplinaire.
    A l'issue de la consultation, une attestation est rédigée : chacun des médecins en garde un exemplaire, un autre est remis à l'intéressée.
    Qu'il s'agisse d'une IVG pour état mettant la femme en état de détresse ou pour un motif thérapeutique, la loi souhaite que chaque fois que cela est possible, le couple participe à la consultation préalable et à la décision à prendre (dernier alinéa de l'article L 162-4 du CSP) mais, en dernière intention, la décision finale appartient à la femme.

    2 L'encadrement législatif

    2.1 La répression

    2.1.1 L'interruption de grossesse est illégale lorsqu'elle est pratiquée en dehors des conditions prévues par la loi.

    Au-delà de 10 semaines, sauf quand elle est pratiquée pour motif thérapeutique.
    Par une personne n'ayant pas la qualité de médecin,
    Dans un lieu autre qu'un établissement public ou agréé.
    Dans ces trois circonstances, la sanction est de 5 ans d'emprisonnement et de 500 000 F d'amende.

    2.1.2 Les peines sont identiques lorsque l'IVG est pratiquée sans le consentement de l'intéressée.

    Exemple : IVG pour motif thérapeutique, pratiquée par un médecin sous un motif fallacieux sans avoir correctement informé la femme, et sans lui avoir permis de donner un consentement éclairé.

    2.1.3 Le fait de fournir à la femme ...

    les moyens matériels de pratiquer une interruption de grossesse sur elle-même, est puni de 3 ans d'emprisonnement et de 300 000 F d'amende. Ces peines sont portées à 5 ans et 500 000 F si l'infraction est commise de manière habituelle.
     
    Cet article est destiné à sanctionner les personnes que l'on appelait autrefois les avorteurs ou avorteuses, les illégaux.
    La loi rappelle aussi, la nécessité de la pratique des IVG en milieu médical (mesure de Santé publique).
    On notera que le nouveau Code Pénal a abrogé les sanctions prévues pour la femme qui se procurait elle-même l'avortement.
    Ceci ne fait que confirmer l'absence de condamnations antérieures à la loi actuelle et par ailleurs, jamais un médecin n'avait dénoncé une femme alors même que cette dénonciation constituait une dérogation au secret médical (laquelle a également disparu du nouvel article 226-14).
    Mais la loi, ne réprime pas uniquement les interruptions illégales de grossesse.
    En effet, ayant par des dispositions très spécifiques et très respectueuses des libertés individuelles, permis à une femme de mettre un terme à sa grossesse, elle entend que le respect le plus total de ces libertés soit respecté.
    Pour ce faire : elle condamne tout empêchement ou tentative d'empêchement d'une IVG par perturbation de l'accès aux établissements ou par menaces ou actes d'intimidation à l'encontre des personnels médicaux, travaillant dans les établissements où sont pratiquées les IVG (2 ans de prison et/ou 30 000 F d'amende Art. L 162-15 du CSP) - elle permet à toute association régulièrement déclarée depuis au moins 5 ans, à la date des faits et dont l'objet statutaire comporte la défense du droit des femmes, à accéder à la contraception et à l'avortement, d'exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions d'entrave à l'IVG.

    2.2 Les lacunes

    Si le fait de pratiquer une IVG après diagnostic prénatal sans avoir respecté les modalités prévues par la loi (conditions de l'IVG pour motifs thérapeutiques) est puni de 2 ans d'emprisonnement et de 200 000 F d'amende, la loi ne prévoit aucun contrôle du contenu de ce diagnostic, lequel est laissé à l'appréciation des médecins.
    Le projet de loi préconisait d'imposer aux centres de diagnostic prénatal l'établissement et la conservation des registres mentionnant les causes des IVG pour motifs thérapeutiques.
    La loi du 29 Juillet 1994 n'a pas repris cette disposition.
    De la même manière, l'absence de concertation entre médecins ou l'absence de rédaction de certificat lorsque l'IVG est pratiquée, en raison de l'existence d'un péril grave pour la santé de la femme, ne sont pas incriminées. Elles constituent des fautes disciplinaires.

    La stérilisation humaine volontaire

    Pr. M. Le Gueut-Develay

    CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
     

    mis à jour le 18 septembre 1998

    1 Les principes  
    2 Les stérilisations 
    2.1 La stérilisation peut être indiquée pour un motif thérapeutique 
    2.2 La stérilisation est demandée par un homme ou une femme

    En ce qu'elle intéresse le médecin, la stérilisation humaine volontaire correspond à une intervention, habituellement chirurgicale, pratiquée sur un homme ou une femme, à sa demande et avec son consentement, afin de l'empêcher de participer à la procréation.
    Actuellement, cette intervention recouvre deux chirurgies : la ligature des trompes utérines (chez la femme) ou celle des canaux déférents (chez l'homme).
    Les deux ligatures ont pour but de mettre obstacle à la libre circulation et à la rencontre de l'ovule et du spermatozoïde et par tant à la fécondation.
    La stérilisation volontaire ainsi définie se différencie :
    - de la castration qui correspond à l'ablation des gonades et ajoute à l'impossibilité de procréer la disparition d'un équilibre hormonal spontanément normal et la disparition d'un appétit sexuel satisfaisant.
    - de la contraception en tant que méthode physique ou chimique dont les effets disparaissent avec elle et qui ne fait pas appel à l'intervention d'un tiers.
    En effet, la stérilisation humaine par ligature des trompes ou des canaux déférents est un acte chirurgical effectué par un homme de l'art et qui entraîne les conséquences juridiques de tout acte médical.

    1 Les principes

    Si l'automutilation voire le suicide ne sont pas prohibés en Droit Français, le corps d'autrui est inviolable.
    Le principe a été récemment rappelé par la loi du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain en l'article 16-1 du Code Civil.
    L'article 16-3 du même code développe le principe en rappelant :
    - d'une part "qu'il ne peut être porté atteinte à l'intégrité du corps humain qu'en cas de nécessité thérapeutique pour la personne",
    - et d'autre part "que le consentement de l'intéressé doit être recueilli préalablement hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n'est pas à même de consentir".
    Il en est de même en Droit Pénal pour lequel l'acte chirurgical demeure une atteinte à l'intégrité physique qui ne trouve sa justification que dans l'intérêt thérapeutique.
    En son absence, l'atteinte à l'intégrité physique constitue une violence pénalement sanctionnable. De plus, la répression ayant pour but d'assurer la satisfaction de l'intérêt général et non celle des particuliers, le consentement de la victime ne saurait constituer un fait justificatif.
    Ainsi, en l'absence de raison thérapeutique à la pratique de la stérilisation, le chirurgien n'est pas exonéré de sa responsabilité pénale par le consentement exprimé de son patient.

    2 Les stérilisations

    2.1 La stérilisation peut être indiquée pour un motif thérapeutique

    Une pathologie générale, gynécologique, obstétricale peut être aggravée par la poursuite d'une grossesse. L'indication se rapproche de celle qui autorise l'interruption de grossesse pour motif thérapeutique mais dans ce second cas, il s'agit d'un danger ponctuel lié à l'évolution d'une grossesse, sans préjuger des autres.
    La stérilisation est indiquée, si le danger est permanent et se produit à chaque grossesse. L'indication est médicalement justifiée. L'acte chirurgical répond à une motivation thérapeutique. Il est réalisé après information de la patiente qui y consent librement.
    Un couple peut demander une stérilisation s'il existe pour lui un risque de transmission d'une anomalie génétique dominante. Cette indication est aujourd'hui modulable. En effet, ce couple peut avoir recours aux techniques de l'aide médicale à la procréation. Ce n'est qu'en cas d'échec de ces techniques, ou s'il refuse de procréer dans ce contexte et en l'absence d'efficacité de méthodes contraceptives que la stérilisation pourra être effectuée (stérilisation de l'homme ou de la femme). Elle demeure thérapeutique et s'effectue conformément aux règles de la pratique médicale.
    La stérilisation peut être demandée pour un individu par un tiers. Ceci soulève le cas des malades mentaux pour lesquels les proches peuvent vouloir prévenir les conséquences psychologiques qu'aurait la maternité ou la paternité sur leur santé.
    Le recours à la stérilisation dans ce contexte doit s'entourer de beaucoup de réserves et n'intervenir qu'en dernier acte après que la preuve ait été apportée de l'échec de toute méthode contraceptive. La limite est ténue entre le curatif et le contraceptif.
    Enfin, concernant les mineurs ou les majeurs incapables, les titulaires de l'autorité parentale ou les représentants légaux (curateur, tuteur, Conseil de famille) ne peuvent consentir qu'à une stérilisation pour motif thérapeutique.

    2.2 La stérilisation est demandée par un homme ou une femme

    Il s'agit d'un individu, qui pour des raisons qui lui appartiennent ne souhaite pas, ou ne souhaite plus procréer, et ne désire aucune contraception.
    Le droit n'interdit pas l'auto-castration pas plus qu'elle n'interdit le suicide, ceci en application du principe de la liberté individuelle.
    La volonté de mettre fin à sa propre fonction de procréation n'est pas juridiquement répréhensible tant qu'elle ne fait pas intervenir le tiers (en l'occurrence, le chirurgien) pour y parvenir.
    La stérilisation humaine volontaire sans motivation thérapeutique demeure illicite. Le chirurgien pourrait voir sa responsabilité pénale mise en cause au titre d'une des infractions prévues aux articles qui ont été cités précédemment.
    En fait, on ne connaît pas de jugement ayant condamné des médecins dans ce contexte, les procureurs ne mettant pas en oeuvre l'action publique en cette matière.
    En revanche, des opérés, regrettant secondairement le geste chirurgical peuvent être amenés à poursuivre leur chirurgien :
    - soit en raison de leur stérilité,
    - soit en raison d'un échec de la stérilisation.... et de la naissance d'un enfant !
    On pourrait alors penser que leur consentement initial exonère le chirurgien de sa responsabilité et constitue, pour l'opéré, une cause rendant irrecevable l'action civile. Il n'en est rien :
    - Nous avons envisagé plus avant l'absence d'exonération de la responsabilité pénale du chirurgien, puisque le consentement de l'opéré ne saurait constituer un fait justificatif ;
    - de plus, une jurisprudence constante admet que la participation volontaire de la victime à l'infraction ne supprime pas la faculté qu'elle a de se porter partie-civile devant la juridiction répressive pour obtenir réparation du préjudice.
    La responsabilité du chirurgien peut donc être, dans ces circonstances, recherchée sur les trois plans :
    - en matière pénale
    pour violences involontaires, ou volontaires, mutilation, etc...
    - en matière civile
    pour indemnisation du préjudice, lequel peut être l'infécondité ou... la naissance d'un enfant. Sur ce point, la jurisprudence est constante : elle ne considère pas la naissance d'un enfant comme constitutive d'un préjudice, en soi.
    En revanche, elle a évolué, et considère parfois, que si l'enfant n'est pas un préjudice, son éducation et les frais qu'elle entraîne en sont.
    Des tribunaux ont ainsi jugé et condamné au versement d'indemnités destinées à couvrir les frais d'éducation jusqu'à la majorité. La jurisprudence est par ailleurs constante sur l'obligation de moyens qui pèse sur le corps médical et non sur l'obligation de résultats.
    - en matière disciplinaire
    Le chirurgien peut également être sanctionné au motif du non respect des articles 35, 41 du Code de Déontologie.
    On peut toutefois envisager que le décalage actuel entre la pratique de la stérilisation et la solution de pratique en droit, conduise peut-être à une intervention législative.

    L'euthanasie

    Pr. M. Le Gueut-Develay

    CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
     

    mis à jour le 16 septembre 1998

    1 Euthanasie et meurtre
    1.1 L'élément matériel
    1.2 L'élément intentionnel
    2 Euthanasie et omission de porter secours

    Le mot euthanasie signifie bonne mort, mort douce et sans souffrance et non comme le traduit l'acception moderne :
    "geste ou omission du geste qui provoque délibérément la mort du malade qui souffre de façon insupportable ou vit une dégradation insoutenable".

    Cette définition, aujourd'hui communément admise, appelle la distinction entre euthanasie active et euthanasie passive.
    L'euthanasie active, suppose le geste d'un tiers qui administre à un mourant une substance létale ou la lui fournit ou encore le tue par tous moyens.
    L'euthanasie passive est plutôt définie comme l'arrêt des traitements de réanimation, ou celui du traitement de la maladie fatale, à partir du moment où l'on est convaincu que le cas est désespéré.
    Au regard du droit actuel et en l'absence de loi spécifique, l'euthanasie peut être qualifiée meurtre ou omission de porter secours à personne en péril.

    1 Euthanasie et meurtre

    Le Nouveau Code Pénal, comme l'ancien, n'a pas retenu de qualification particulière concernant l'euthanasie. Elle reste assimilée à un meurtre voire un assassinat (meurtre avec préméditation). Le meurtre est un homicide commis volontairement. Il est constitué lorsque sont réunis un élément matériel et un élément intentionnel.

    1.1 L'élément matériel

    C'est le fait de tuer un homme vivant.
    L'acte commis par le meurtrier doit être de nature à causer la mort et il doit exister un lien de causalité entre l'acte et le décès.
    L'acte peut être unique ou résulter de moyens successifs et multiples employés dans un temps plus ou moins long.
    Il peut être le fait de plusieurs personnes qui seront chacune poursuivies comme si leur intervention personnelle, même partielle avait suffit à tuer. La tentative est punie comme le crime.

    1.2 L'élément intentionnel

    En matière pénale, l'infraction de meurtre n'est réalisée que si l'auteur a eu l'intention de donner la mort.
    Le mobile n'importe pas, bien qu'en matière d'euthanasie il soit souvent "d'abréger les souffrances". De même, le consentement de la victime est-il sans effet - Ici comme ailleurs, le droit pénal ne justifie pas la commission de l'infraction par le consentement de la victime.
    Le médecin qui, à la demande d'un mourant, lui procure le moyen de sa mort, commet un meurtre.

    2 Euthanasie et omission de porter secours

    Tout citoyen est tenu de porter secours à personne en péril. Le médecin plus que tout autre en raison de ses devoirs moraux et professionnels.
    Encore faut-il que le délit de non assistance soit constitué. Pour qu'il le soit, trois conditions sont nécessaires :
    - Le péril
    Il s'agit d'un danger grave, imminent, constant. La mort peut être considérée comme un péril, même au terme d'une maladie et bien qu'elle constitue un processus inéluctable.
    - Le secours
    Si le médecin ne peut le porter lui même, il doit, ayant eu connaissance du péril, l'organiser.
    - L'abstention volontaire
    L'abstention est dite volontaire lorsqu'elle a été voulue en pleine connaissance de cause.
    Ainsi, lorsqu'un médecin averti d'un danger tel que la mort imminente d'un malade, s'abstient volontairement de lui administrer ou faire administrer les soins nécessaires, il commet l'infraction de non assistance à personne en péril.
     
    Qu'en est-il lorsque le même praticien placé devant un malade dont le pronostic vital est à ce point réduit que la mort peut survenir à tout moment, décide de cesser traitement ou réanimation ?
    Les cas de figure sont divers :
    - il peut s'agir d'un malade en état de mort cérébrale. En l'état actuel de la législation, c'est un cadavre. L'infraction n'est pas constituée.
    - il peut s'agir d'un malade qui, informé de son état et de l'issue qui en résulte, a souhaité qu'en telle circonstance, les médecins cessent de lui apporter des thérapeutiques éprouvantes et à court terme, sans objet.
    La loi pénale, encore une fois, n'exonère pas le médecin de sa responsabilité au motif du consentement du malade mais... En fait les décisions des Tribunaux sont à ce sujet divergentes.
    Si les Cours d'Assises ne condamnent pas les médecins, les tribunaux correctionnels continuent à se montrer plus vigilants. Le débat subsiste et de nombreuses autorités se prononcent régulièrement sur ce sujet, sans toutefois dépasser les recommandations.
    Des projets de loi ont été à plusieurs reprises élaborés mais le législateur n'a jusqu'à ce jour jamais pris la décision de dépénaliser l'euthanasie.
    Le Comité Consultatif National d'Ethique dans un avis du 24 juin 1991 a rappelé qu'une législation en la matière, même pour des cas exceptionnels serait source d'interprétations abusives et incontrôlables.
    Les médecins restent donc sanctionnables tant sur les plans pénal que civil et disciplinaire.
    A ce sujet et en forme de conclusion, le Nouveau Code de Déontologie (6 septembre 1995) semble apporter un éclairage, qui pour n'être que de portée professionnelle tend à concilier morale et droit.
     
    Art. 37 "En toutes circonstances, le médecin doit s'efforcer de soulager les souffrances de son malade, l'assister moralement et éviter toute obstination déraisonnable dans les investigations ou la thérapeutique".
     
    Art. 38 "Le médecin doit accompagner le mourant jusqu'à ses derniers instants, assurer des soins et mesures appropriées à la qualité d'une vie qui prend fin, sauvegarder la dignité du malade et réconforter son entourage. Il n'a pas le droit de provoquer délibérément la mort".
     
    Les deux articles, rédigés avec circonspection balayent pratiquement tous les cas de figure en :
    - prohibant l'euthanasie active,
    - n'invitant pas à l'acharnement thérapeutique et,
    - insistant sur les soins palliatifs qui consistent en soins actifs dans une approche globale de la personne en phase évoluée ou terminale d'une maladie potentiellement mortelle.
    Cette définition de la Société Française d'Accompagnement et de Soins Palliatifs (1992) ajoute : les soins palliatifs s'attachent à prendre en compte et à soulager les douleurs physiques ainsi que la souffrance psychologique, morale et spirituelle.


    Le transsexualisme

    Pr. M. Le Gueut-Develay

    CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
     

    mis à jour le 16 septembre 1998

    1 Sur le plan médical  
    1.1 Les actes médicaux 
    1.2 L'encadrement 
    2 Sur le plan juridique  
    2.1 La modification de la mention du sexe 
    2.2 Le changement de prénoms

    L'article 57 du Code Civil dispose :
    "l'acte de naissance énoncera le jour, l'heure et le lieu de la naissance, le sexe de l'enfant et les prénoms qui lui seront donnés…".
    C'est l'examen des organes génitaux externes du nouveau-né qui détermine :
    - l'appartenance à l'un ou l'autre sexe,
    - la reconnaissance de cet état par la société (Etat Civil),
    - l'attribution de prénoms, le plus souvent sans ambiguïté quant au sexe de celui qui le porte.
    99 999 fois sur 100 000, l'évolution vers une différenciation masculine ou féminine s'effectue harmonieusement. Les sexes génotypique, phénotypique, endocrinien, psychologique, culturel et social s'accordent.
    L'identité sexuelle, en ce qu'elle se rapporte au fait de se sentir soi-même, un homme ou une femme, s'acquiert. Le rôle sexuel se joue, dans les relations interpersonnelles, relativement à cette identité, tant en fonction du corps physique que des acquis psychologiques culturels ou sociaux.
     
    Chez un Transsexuel, il y a dysharmonie.
    Le Transsexuel a la conviction d'appartenir au sexe opposé au sien.
    On parle de :
    - Transsexuel à vocation féminine (possède un corps d'homme),
    - Transsexuel à vocation masculine (possède un corps de femme).
    Tous les spécialistes médicaux sont actuellement d'accord sur le fait que le Transsexuel :
    - n'est porteur d'aucune anomalie concernant les sexes génotypique, hénotypique ou endocrinien qui sont concordants,
    - n'est ni homosexuel, ni perverti, ni travesti, ni malade mental.
    Il possède "la conviction inébranlable depuis l'enfance, véritable idée prévalante au sens psychiatrique du terme, d'être psychiquement de l'autre sexe, et demande impérativement un traitement médico-chirurgical susceptible de rendre son aspect physique conforme à son aspect psychique. Il demande également la rectification de son état civil".
    Pour ce faire il s'adresse :
    - au médecin pour corriger son aspect physique,
    - au juriste pour corriger la mention "sexe" portée au jour de sa naissance sur les registres de l'état civil et modifier son prénom. Jusqu'à un passé récent, cette double demande s'est heurtée aux principes fondamentaux de la médecine et du droit.
     
    Médicalement
    L'atteinte à l'intégrité physique (par un traitement médicamenteux ou par une chirurgie) ne se justifie que par l'intérêt thérapeutique. Or, le transsexuel est un homme ou une femme totalement normal, des chromosomes aux organes génitaux tant externes qu'internes. De plus, il n'est porteur d'aucune maladie mentale susceptible d'être à l'origine de cette conviction.
    Il n'y avait aucune indication médicale thérapeutique en l'absence de diagnostic positif de maladie.
     
    Juridiquement
    La mention du sexe est obligatoire dans l'acte de naissance. Elle est insérée dans les indications fournies par le déclarant et elle jouit d'une présomption de vérité qui la rend opposable à tous jusqu'à preuve du contraire. Or le Transsexuel ne peut apporter la preuve du contraire.
    Par ailleurs, le titulaire d'un état (d'un sexe) ne peut à son seul gré le modifier. C'est le principe de l'indisponibilité de l'état des personnes.
    Enfin, en raison de l'imprescriptibilité de ce même état, l'apparence ne suffit pas à conférer la possession. (Ce n'est pas parce que l'on a l'air d'être un homme ou une femme que l'on est cet homme ou cette femme).
    Médecine et Droit ont évolué parfois de manière chaotique, toujours lentement, précisant le diagnostic et modifiant la jurisprudence pour permettre au transsexuel d'acquérir, aujourd'hui, l'aspect physique dont il est convaincu qu'il est le sien et y accorder son état civil.
    Néanmoins, procédure médico-chirurgicale de rapprochement sexuel et reconnaissance juridique de mutation sexuelle restent strictement encadrées.

    1 Sur le plan médical

    On parle aujourd'hui de syndrome de transsexualisme.
    Tout syndrome est constitué de signes lesquels peuvent être de nature physique ou psychique.
    En ce qui concerne le transsexualisme, les signes, les symptômes sont les suivants :
    - conviction inébranlable d'appartenir à l'autre sexe,
    - demande impérieuse et permanente de modification physique du sexe,
    - demande tout aussi impérieuse de changer d'état civil,
    - en l'absence de toute anomalie physique ou psychique.
    Il résulte de cette interprétation syndromique deux conséquences :
    - celle de permettre des traitements endocriniens et une chirurgie, rendus licites par leur objet thérapeutique,
    - celle de permettre le remboursement des frais et soins médicaux par les Caisses de Sécurité Sociale.

    1.1 Les actes médicaux

    Dans une première phase, le patient subit un traitement hormonal (œstrogènes pour un homme, testostérone pour une femme).
    Dans une seconde phase, il est opéré. Il s'agit d'une intervention de "rapprochement sexuel" (Assemblée Plénière de la Cour de Cassation - 11 décembre 1992). En effet, la transformation la plus techniquement réussie ne permettra jamais à l'opéré(e) d'acquérir la totalité des attributs de l'autre sexe. La chirurgie est génitale et éventuellement esthétique.
     
    Génitale :
    - chez le transsexuel à vocation féminine, elle consiste en une orchitectomie, plastie vaginale et plastie de lèvres et du clitoris. Elle peut s'accompagner d'une mammoplastie si le traitement hormonal n'a pas été suffisant.
    - chez le transsexuel à vocation masculine, elle implique la mastectomie, l'hystérectomie avec ovariectomie, la phalloplastie et la plastie scrotale.
     
    Non génitale ou esthétique :
    - Chez l'un et l'autre, la chirurgie esthétique remodèle le corps dans le sens de l'orientation sexuelle donnée par la chirurgie génitale (chirurgie faciale, liposuccion, remodelage....)

    1.2 L'encadrement

    En l'absence de législation spéciale, les conditions de réalisation de ces interventions ont été fixées par le Conseil de l'Ordre des médecins, les spécialistes du Transsexualisme, la Sécurité Sociale et la jurisprudence.
    - Le diagnostic doit être établi avec une certitude absolue et s'appuie sur la réalisation de bilans endocrinien, psychiatrique et d'une consultation chirurgicale,
    - un délai d'un an ou plus est exigé entre la première demande et la prescription des premiers traitements,
    - la demande de prise en charge est faite, préalablement aux prescriptions, à la Sécurité Sociale qui exige pour donner son accord :
    • la confirmation du diagnostic par trois experts (endocrinologue, psychiatre et chirurgien) et,
    • la certitude de la réalisation des interventions en milieu hospitalier public.
    - un protocole anonyme doit être signé des experts et adressé au Conseil Départemental de l'Ordre des Médecins dans le ressort duquel se trouve l'établissement d'hospitalisation.
     
    L'inobservation de ces conditions peut mettre en cause les responsabilités des médecins.
     
    Sur le plan disciplinaire
    L'art. 40 du Code de Déontologie dispose : "Le médecin doit s'interdire dans les investigations et interventions qu'il pratique comme dans les thérapeutiques qu'il prescrit, de faire courir au patient un risque injustifié".
    L'art. 41 "Aucune intervention ne peut être pratiquée sans motif médical très sérieux et sauf, urgence ou impossibilité, sans information de l'intéressé et sans son consentement".
    Toute prescription endocrinienne, toute chirurgie radicale sans diagnostic certain, peuvent mettre en cause la responsabilité disciplinaire et être sanctionnées.
     
    Sur le plan Pénal
    La finalité thérapeutique de la chirurgie de rapprochement sexuel confère au chirurgien l'impunité légale. En l'absence de cette certitude thérapeutique, l'intervention n'est plus justifiée et peut être qualifiée de "violence".
    En effet, si l'article 316 de l'ancien Code Pénal relatif à la castration a été abrogé, le nouveau Code Pénal distingue au chapitre des violences selon qu'elles ont causé la mort (art. 222-7 et 222-8) une mutilation ou une infirmité permanente (art. 222-9 et 222-10), une incapacité totale de travail supérieure ou égale à 8 jours (art. 222-11 et 222-12) ou une incapacité totale de travail inférieure à 8 jours lorsqu'il existe des circonstances aggravantes (art. 222-13).
     
    Sur le plan Civil
    Les interventions chirurgicales sont pratiquées dans les hôpitaux publics. C'est donc la responsabilité administrative des établissements qui peut être mise en cause du fait des actes pratiqués par les médecins hospitaliers et c'est à l'établissement hospitalier que le patient, s'estimant victime d'un dommage, demandera réparation de son préjudice.

    2 - Sur le plan juridique

    Depuis 1992 la Cour de Cassation en Assemblée plénière a décidé que :
    "lorsqu'à la suite d'un traitement médico-chirurgical subi dans un but thérapeutique, une personne présentant le syndrome de transsexualisme ne possède plus tous les caractères de son sexe d'origine et a pris une apparence physique la rapprochant de l'autre sexe, auquel correspond son comportement social, le principe du respect dû à la vie privée justifie que son état civil indique désormais le sexe dont elle a l'apparence".
    Au terme d'une évolution jurisprudentielle difficile, la Cour Suprême s'est efforcée d'apporter à un problème humain et social complexe, une solution pragmatique tenant compte tout à la fois des souffrances du transsexuel, des exigences de l'ordre public et de l'évolution jurisprudentielle Européenne. Mais on remarquera qu'elle ne s'est pas prononcée sur la réalité du sexe ! Il n'est pas fait état de conversion ni de changement de sexe, mais de "rapprochement sexuel" et de respect de la vie privée.
     
    La reconnaissance de la mutation sexuelle comporte deux aspects :
    - la modification de la mention du sexe et,
    - le changement de prénoms.

    2.1 La modification de la mention du sexe

    Les conditions requises sont au nombre de quatre :
    - La réalisation préalable d'une expertise judiciaire, par une équipe médicale pluridisciplinaire (psychiatre, endocrinologue, chirurgien). Les questions posées visent à affirmer le transsexualisme véritable.
    - La réalisation de l'intervention chirurgicale. En effet, l'anatomie doit avoir été modifiée et correspondre au sexe, objet de la demande.
    - L'apparence et le comportement social. Ces conditions sont toujours réunies et ne font pas l'objet de difficulté particulières puisqu'elles sont évidentes pour le transsexuel et son entourage depuis l'enfance, le plus souvent.
     
    La modification de la mention du sexe sur l'acte de naissance entraîne nécessairement la même modification sur toutes les pièces d'identité et les documents administratifs.

    2.2 Le changement de prénoms

    Il accompagne la modification de la mention concernant le sexe. Il peut également être autorisé sans cette modification.
    Il peut s'agir du choix d'un des prénoms parmi ceux qui ont été attribués à la naissance, s'il s'avère que l'un d'eux peut correspondre au nouvel état (Art. 57 du Code Civil : "tout prénom inscrit dans l'acte de naissance peut être choisi comme prénom usuel").
    Il peut s'agir d'un changement complet. Il est alors nécessaire d'entamer une procédure judiciaire. Celle-ci est de la compétence du juge aux affaires familiales et s'appuie sur l'existence d'un intérêt légitime, ce qui dans le cas du transsexualisme est évident.
    Au terme de ce parcours médico-juridique le transsexuel ayant obtenu le changement de son état civil peut exercer tous les droits attachés à son nouveau sexe.
    Cette affirmation ne fait pas de difficultés pour l'exercice des droits civiques, civils, sociaux ou professionnels.
    Concernant les droits relatifs à la famille (mariage, adoption...) l'incertitude ne pourra être levée que par l'évolution de la jurisprudence.


    Les empreintes génétiques

    Pr. M. Le Gueut-Develay

    CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
     

    mis à jour le 16 septembre 1998

    1 Conditions de mise en oeuvre  
    1.1 Les indications   
    1.2 Le consentement 
    1.3 Le lieu d'exécution
    2 Les sanctions 
    2.1 Les conditions illicites d'exécution 
    2.2 L'absence de consentement

    Les progrès de la biologie moléculaire ont permis d'approcher la personne humaine jusqu'au plus intime en établissant ce qu'il est convenu d'appeler aujourd'hui sa "carte d'identité génétique".
    Le procédé dit "des empreintes génétiques" intéresse la médecine et le droit, en ce qu'il constitue une méthode d'identification quasi-absolue.
    Identification de l'homme, mais aussi connaissance de ses caractéristiques génétiques de manière si précise que l'on pourra, dans un avenir proche, prédire sa vie médicale.
    Cette intrusion extrême dans la personne, médicalement intéressante mais juridiquement inquiétante a incité le législateur à intervenir en juillet 1994.
    Il a, par les lois dites bioéthiques et plus particulièrement par celle du 29 juillet 1994 strictement encadré les conditions de mise en oeuvre de ces techniques et a prévu des sanctions, à la mesure de son inquiétude.

    1 Conditions de mise en oeuvre

    1.1 Les indications

    Art 16-10 du Code Civil
    "L'identification d'une personne par ses empreintes génétiques ne peut être recherchée que dans le cadre des mesures d'enquête ou d'instruction diligentées lors d'une procédure judiciaire ou à des fins médicales ou de recherche scientifique".

    1.1.1 En matière médicale

    Les caractéristiques ou l'identification génétiques peuvent être les éléments d'une démarche diagnostique ou thérapeutique :
    - étude de la transmission d'une maladie génétique au sein d'une famille,
    - diagnostic génétique lors d'une consultation de conseil avant d'entreprendre une grossesse, etc...
    De même, lors d'une recherche médicale concernant une éventuelle thérapie génique (par exemple).

    1.1.2 En matière judiciaire

    1.1.2.1 En matière pénale
     
    Il est un grand principe de la procédure pénale, aux côtés de la présomption d'innocence et du respect des droits de la défense, c'est celui de la liberté de la preuve.
    Il peut donc être utile à un magistrat de prouver :
    - l'identité d'un cadavre inconnu, ou,
    - l'identité de l'auteur d'un crime ou d'un délit.
    Techniquement, les empreintes génétiques requièrent de très faibles quantités de matière biologique (organes, sang, sperme...) et possèdent l'atout incomparable d'être transmissibles.
    Ainsi peut-on connaître les empreintes d'un corps à partir de quelques fragments de matière organique et les comparer à celles d'une famille présumée.
    Ainsi peut-on connaître, à partir des empreintes sur prélèvement quelconque (sperme dans une affaire de viol par exemple) l'identité d'un auteur. Cette preuve, à nulle autre comparable, possède le double avantage de confondre le présumé auteur ou... de l'innocenter.
    La recherche de ces preuves appartient :
    - à l'Officier de Police Judiciaire en flagrance (art. 60 du Code de Procédure Pénale),
    - au même, lors de l'enquête préliminaire (art. 77-1 du CPP),
    - au Juge d'Instruction qui ordonne une expertise en vertu de l'art 156 du CPP.
    Il s'agit d'une mesure technique destinée à renseigner le magistrat.
     
    1.1.2.2 En matière civile
     
    L'article 16-11 du Code Civil dispose :
    "En matière civile, cette identification ne peut être recherchée qu'en exécution d'une mesure d'instruction ordonnée par le juge saisi d'une action tendant soit à l'établissement ou la contestation d'un lieu de filiation soit à l'obtention ou la suppression de subsides".
     
    1.1.2.2.1 Etablissement ou contestation d'un lien de filiation
     
    Jusqu'en 1972, le droit français.... dans un souci de paix des ménages présumait la paternité.
     
    Art. 312 du Code Civil :
    "L'enfant conçu pendant le mariage a pour père le mari".
    Depuis 1972, ce même article possède un second alinéa :
    "Néanmoins, celui-ci pourra désavouer l'enfant en justice, s'il justifie de faits propres à démontrer qu'il ne peut en être le père".
     
    Nul doute que la pratique des empreintes génétiques soit un moyen de preuve indiscutable.
    Ainsi :
    - un homme peut-il agir en désaveu de paternité
    - une femme peut-elle prouver que l'enfant dont elle est la mère n'a pas pour père son mari.
    Aujourd'hui, le juge peut ordonner une expertise pour recherche des empreintes génétiques dans ces circonstances.
    Les difficultés sont plus grandes, lorsque la demande en recherche ou en désaveu de filiation n'émane pas de l'un ou l'autre des constituants du couple, mais de l'enfant.
    L'enfant peut en effet, en l'absence de filiation établie, rechercher son père, ou sa mère,
    - en ce qui concerne le père, la démarche du juge peut-être de chercher à comparer les empreintes de l'enfant et du père présumé,
    - en ce qui concerne la mère, l'écueil principal réside dans l'opportunité qui est offerte à une femme de garder le secret de sa grossesse et de son accouchement.
     
    L'art. 341-1 du Code Civil dispose :
    "Lors de l'accouchement, la mère peut demander que le secret de son admission et de son identité soit préservé".
    C'est l'accouchement sous "X".
     
    Dans ce cas, la recherche de la maternité est impossible (pour l'instant). Elle l'est dans tous les autres cas si l'enfant prouve qu'il est celui dont la mère prétendue est accouchée (art. 341 du Code Civil).
    Enfin, doit-on envisager le cas particulier de l'enfant né d'une technique de procréation médicalement assistée. Son sort a été protégé par l'article 311-20 Alinéa 2 du Code Civil (Loi du 29/07/1994).
    "Le consentement donné à une procréation médicalement assistée interdit toute action en contestation de filiation ou en réclamation d'état à moins qu'il ne soit soutenu que l'enfant n'est pas issu de la procréation médicalement assistée ou que le consentement a été privé d'effet".
    "Le fait propre à démontrer l'absence de filiation" n'est plus admis au seul motif que les empreintes seraient différentes.
     
    1.1.2.2.2 Obtention ou suppression de subsides
     
    Un enfant naturel dont la filiation paternelle n'est pas établie peut agir afin de subsides.
    Cette action lui permet d'obtenir d'un homme qui a eu des relations avec sa mère pendant la période de la conception, une pension destinée à couvrir ses frais d'entretien et d'éducation (Art. 342 du Code Civil).
    Depuis la loi du 8 janvier 1993, "le défendeur (l'éventuel père) peut écarter la demande en faisant la preuve par tous moyens qu'il ne peut être le père de l'enfant" (Art. 342-4 du Code Civil).
    Un homme peut donc, ce qui lui était très difficile autrefois, apporter aujourd'hui la preuve qu'il n'est pas le père et donc qu'il n'est pas tenu à verser ces subsides.

    1.2 Le consentement

    La loi a rappelé très fortement, la nécessité de ne voir pratiquer ces techniques qu'avec le consentement de l'individu.

    1.2.1 Ainsi en matière médicale :

    Qu'il s'agisse de l'étude génétique des caractéristiques (Art. 16-10 du Code Civil) ou de l'identification à des fins médicales (Art. 16-11 du Code Civil) le consentement doit être recueilli. Ceci est un rappel appuyé, de la nécessité contractuelle qui oblige le médecin à obtenir le consentement de son patient avant tout acte diagnostique ou thérapeutique.
    Le consentement est obtenu après qu'une information loyale et intelligible ait été donnée.
    Le consentement est recueilli par écrit (Art. L145 du Code de la Santé Publique alinéa 2).
    A titre exceptionnel, lorsque l'étude des caractéristiques ou l'identification sont entreprises à des fins médicales (et non de recherche médicale) le consentement peut ne pas être recueilli, dans l'intérêt du malade et dans le respect de sa confiance (Art. L145-15 du CSP).
    Cette disposition fait pendant à l'art. 35 du nouveau Code de Déontologie médicale qui permet au médecin de retenir des informations à caractère particulièrement graves qui pourraient attenter à la résistance morale du malade.
    Ici, il s'agit plutôt de garder secrète une information qui, en matière de filiation, pourrait être déstabilisante pour la personne ou le couple...
    Si les examens ou identifications sont effectués à des fins de recherche médicale, les modalités d'exécution sont celles définies par la Loi Huriet, loi sur la protection des personnes qui se prêtent à des recherches biomédicales.

    1.2.2 En matière judiciaire

    L'article 16-11 du Code Civil dispose :
    "L'identification d'une personne par ses empreintes génétiques ne peut être recherchée que dans le cadre de mesures d'enquêtes ou d'instruction diligentées lors d'une procédure judiciaire".

    1.2.3 En matière civile

    L'art. 16-11 précise, qu'en matière civile
    "Le consentement de l'intéressé doit être préalablement et expressément recueilli."
     
    Le législateur, semble distinguer selon qu'il s'agit d'une instance civile ou d'une instance pénale... Ce qui est étonnant.
    En effet, le simple prélèvement sanguin constitue une atteinte à l'intégrité physique, et s'il est effectué en vue de rechercher des empreintes génétiques, il constitue de plus une atteinte à l'intimité.
     
    Or, l'article 16-1 du Code Civil est clair :
    "chacun a droit au respect de son corps. Le corps humain est inviolable. Le corps humain, ses éléments et ses produits ne peuvent faire l'objet d'un droit patrimonial".
     
    Seule la loi peut déroger au principe de l'inviolabilité de la personne et jusqu'alors quand elle l'a fait comme en matière de vérification de l'imprégnation alcoolique, ce n'est pas en imposant le test mais en sanctionnant le refus de s'y soumettre.
    Il n'y a donc pas lieu de faire cette distinction et l'on peut imaginer qu'une personne privée de liberté refuse que soient recherchées ses empreintes génétiques.

    1.3 Le lieu d'exécution

    Art. 16-12 du Code Civil :
    "Sont seules habilitées à procéder à des identifications par empreintes  génétiques les personnes ayant fait l'objet d'un agrément dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat".
     
    Dans le cadre d'une procédure judiciaire, ces personnes doivent, en outre, être inscrites sur une liste d'experts judiciaires.
    L'art. L145-16 du CSP reprend ces dispositions. Les techniques d'examens et, d'identification en matière génétique ne peuvent donc être exécutées que dans des laboratoires et par des personnes agréées.

    2 Les sanctions

    Les lois dites bioéthiques de juillet 1994 ont créé une quarantaine d'incriminations. Plusieurs d'entre elles concernent l'utilisation illicite de la technique des empreintes génétiques.
    Elles sont prévues à la section VI du chapitre VI du titre II du livre II du Code Pénal.
    Elles concernent les conditions illicites d'exécution des empreintes et l'absence du consentement. Elles sont reprises dans le Code de la Santé Publique (ART. L145-17 à L145-21).

    2.1 Les conditions illicites d'exécution

    2.1.1 Concernant la finalité

    Le fait de rechercher l'identification d'une personne par ses empreintes génétiques à des fins qui ne seraient ni médicales ni scientifiques, ou en dehors d'une mesure d'enquête ou d'instruction diligentée lors d'une procédure judiciaire est puni d'un an d'emprisonnement et de 100.000 Francs d'amende (Art. 226-27 du CP).
    Le fait de détourner de leurs qualités médicales ou de recherche scientifique les informations recueillies sur une personne au moyen de l'étude de ses caractéristiques génétiques est puni d'un an d'emprisonnement et de 100.000 Francs d'amende (Art. 226-26 du CP).
    Peines identiques pour le fait de divulguer des informations relatives à l'identification d'une personne par ses empreintes génétiques (Art. 226-28 du CP).

    2.1.2 Concernant le lieu d'exécution

    Le fait de procéder à l'identification d'une personne par ses empreintes génétiques sans être titulaire de l'agrément prévu à l'art. L 145-16 du CSP est puni d'un an d'emprisonnement et de 100.000 Francs d'amende (Art. 226-28 du CP).

    2.2 L'absence de consentement

    Est puni d'un an d'emprisonnement et de 100.000 Francs d'amende, le fait de procéder à l'étude des caractéristiques génétiques d'une personne à des fins médicales sans avoir préalablement recueilli son consentement dans les conditions prévues à l'art. L145-15 du CSP (Art. L 226-18 du CP).
    Est puni des mêmes peines, le fait de rechercher l'identification d'une personne par ses empreintes génétiques à des fins médicales sans avoir préalablement recueilli son consentement dans les conditions prévues par l'article L145-15 du CSP (Art. 226-27 du CP).
    Enfin, ne doit on pas omettre l'infraction retenue à l'art. 226-30 du CP, concernant les personnes morales, dont on sait que la responsabilité pénale peut désormais être recherchée (celle d'un établissement public de santé par exemple).

    Loi et toxicomanie

    Dr. François Paysant

    CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
     

    mis à jour le 16 septembre 1998

    1 Rappel de la loi
    1.1 L'usage
    1.2 Le trafic
    1.3 Une situation complexe
    2 La détention
    3 Relation entre les toxicomanes et le médecin
    3.1 Consultation au cours d'une garde à vue
    3.2 Consultation en vue de la délivrance d'ordonnance de stupéfiant
    3.3 Consultation standard
    4 Plan gouvernemental de lutte contre la toxicomanie (21/09/1993)
    4.1 Action internationale
    4.2 Lutte contre le trafic et vente sur la voie publique
    4.3 Développement de l'injonction thérapeutique
    4.4 Amélioration du système sanitaire
    4.5 Prévention
    5 Règlement de la délivrance des seringues
    5.1 Lieu de vente au public
    5.2 Conditions de délivrance

    Quelques chiffres :
    - 150.000 à 300.000 toxicomanes
    - 3/4 sont des hommes
    - 86 % sont de nationalité française
    - 80 % utilisent la voie intraveineuse
    - 25 % seraient séropositifs
    - 58 % consomment plus d'un produit
    - Il y a 500 morts par surdose, par an en France
    - 30.000 affaires judiciaires sont traitées par an en France.
     
    Les produits consommés sont :
    - l'Héroïne et Opiacés 50 %
    - le Cannabis 22 %
    - les Psychotropes 9 %
    - le Temgesic 2,5 %
    - la Cocaïne 2 %
    etc....

    1 Rappel de la loi

    Les législateurs ont pris en considération deux notions, l'usage et le trafic, ce qui a aboutit à une séparation juridique très nette entre le consommateur et le trafiquant. En réalité, la distinction n'est pas toujours aussi nette. Il existe des revendeurs consommateurs et des toxicomanes petit revendeurs.
    La finalité de cette législation est de soigner le toxicomane et de porter atteinte au trafic.

    1.1 L'usage

    La loi du 31 décembre 1970 et les textes s'y rapportant prévoient l'accès aux soins. Des dispositions différentes existent selon que la demande de soins provient :
    - du toxicomane, celui-ci éprouve la nécessité d'une cure de désintoxication ou d'un suivi médical. A sa demande, il pourra bénéficier de l'anonymat. Un certificat nominatif émanant du médecin responsable du traitement pourra lui être délivré (ce document indiquant les dates, la durée et l'objet des soins). Le Procureur pourra en tenir compte dans la décision de poursuivre ou non.
    - de l'autorité sanitaire, celle-ci étant avertie par le certificat d'un médecin ou le rapport d'une assistante sociale. Une enquête familiale, professionnelle, sociale et médicale, est menée. Si l'intoxication est prouvée, l'autorité sanitaire enjoint à ce toxicomane de suivre une cure de désintoxication dans un établissement agréé de son choix ou à défaut dans un désigné d'office. Si après les constatations médicales la cure ne s'impose pas, il lui est demandé de se placer sous contrôle médical (médecin de son choix ou centre d'hygiène sociale).
    - du Procureur de la République.
    L'article 628 du Code de la Santé Publique "Seront punis d'un emprisonnement de 2 mois à 1 an et d'une amende de 500 à 15 000 francs ou l'une de ces deux peines seulement, ceux qui auront de manière illicite fait usage de l'une des substances ou plantes classées comme stupéfiant".
    Toutefois, conformément à l'article 628.1, l'action publique ne sera pas engagée si après injonction du Procureur de la République, le toxicomane subit selon la nécessité une cure de désintoxication ou une surveillance médicale.
    C'est le principe du non engagement de l'action publique si le toxicomane répond favorablement à l'injonction thérapeutique. Cette mesure s'applique pour la première infraction en cas de récidive le Procureur de la République décide l'engagement ou non de l'action publique. Si la personne se soumet à l'injonction, le Procureur averti l'autorité sanitaire qui procède de la même façon que précédemment.
    En début de traitement, l'intéressé fait parvenir à l'autorité sanitaire un certificat médical indiquant la date, la durée probable et l'établissement où se dérouleront les soins.
    Le contrôle de ses traitements incombent à l'autorité sanitaire qui en informe régulièrement le parquet. En cas d'interruption des soins, le directeur ou le médecin de l'établissement informe l'autorité sanitaire qui prévient le parquet.
    A noter que la gratuité des soins est totale pour le toxicomane ; c'est l'état qui assure les dépenses inhérentes à ce traitement.
    Remarque : d'un point de vue médical, l'intérêt majeur de l'injonction thérapeutique est pour la prise en charge des héroïnomanes.

    1.2 Le trafic

    Des peines allant jusqu'à 20 ans d'emprisonnement et 50 000 000 Francs d'amende pour tout contrevenant à l'interdiction de trafic de stupéfiants (les peines les plus sévères sont prévues pour la production, la fabrication, l'importation ou l'exportation).
    Les tentatives sont punies comme les délits.
    Il y a extension des sanctions au maniement de l'argent issu de ce trafic, à toute complicité (facilitation de l'usage d'un local ou de tout autre moyen), ou délivrance d'ordonnance fictive ou de complaisance, apologie des stupéfiants et incitation à leur usage.
    Ces peines seront complétées par des interdictions de séjour pour les étrangers, retrait de passeport ou de permis de conduire.

    1.3 Une situation complexe

    Comme cette analyse le laisse paraître, nous sommes en présence de deux textes de nature différente :
    - l'un curatif, préventif et ménageant l'avenir,
    - l'autre strict et répressif.
    Si l'esprit de la loi est facile à comprendre, son application n'en est pas simple.

    2 La détention

    Dans les établissements pénitentiaires, la population toxicomane est évaluée à 15 % avec des grandes variations géographiques.
    Un nombre non négligeable de ces toxicomanes sont séropositifs ou malades du SIDA.
    La prise en charge des conduites addictives de ces personnes est assurée par le service médico-psychologique régional, s'il existe en collaboration avec le service de soins somatiques. Une activité de soins, de sevrage et de prévention doit être assurée.
    Dans certains établissements, une "antenne toxicomanie" a été créée.
    La prescription de Méthadone® ou de Subutex® est possible en milieu carcéral.

    3 Relation entre les toxicomanes et le médecin

    3.1 Consultation au cours d'une garde à vue

    Au total, la garde à vue du toxicomane peut durer 4 jours. Pendant la garde à vue le toxicomane sera soumis à un examen par 24 heures par un médecin requis qui estimera la compatibilité entre l'état de santé et la poursuite de la garde à vue dans les locaux de la police.
    De plus, la personne toxicomane gardée à vue pourra à tout moment demander un nouvel examen médical. Ces examens sont de droit.
    L'objet de ces examens médicaux à répétition est de dépister l'apparition d'un syndrome de sevrage. Dès l'apparition des premiers symptômes, la garde à vue devra se poursuivre en milieu hospitalier.

    3.2 Consultation en vue de la délivrance d'ordonnance de stupéfiant

    Le médecin devra être extrêmement prudent, ne pas se "laisser avoir" par un discours séducteur. Le médecin est souvent l'objet d'un chantage.
    Son discours doit être ferme et franc, il ne devra pas négocier toute en accordant une écoute de qualité, ses prescriptions devront éviter de comporter des substances à action stupéfiante.
    Il devra veiller à la sûreté de ses ordonnanciers et de ses carnets à souche.
    - Prescription de SUBUTEX : le "Subutex" est de la Buprénorphine. Cette substance peut être utilisée en traitement ambulatoire.
    Elle est prescrite sur carnet à souches, par des médecins appartenant à un réseau de prise en charge des toxicomanes.
    Une prise par 24 heures est suffisante. Il s'agit de comprimés sublinguaux.
    La dépendance physique serait modérée. Les possibilités de détournement de la prescription sont assez importantes (mise en solution pour injection).
    - Prescription de METHADONE : La "Méthadone", opiacé oral à effet prolongé, sature les récepteurs opiacés. Elle est administrée sous surveillance médicale stricte ; parallèlement, il faut mener un travail psychologique et une réinsertion sociale, dans des centres prévus à cet effet.

    3.3 Consultation standard

    Le médecin ayant connaissance de la toxicomanie d'un de ses patients, il devra lui proposer l'ensemble des possibilités thérapeutiques et lui exposer les possibilités que lui offre la loi. Il devra susciter simplement ces possibilités sans être trop directif et lui expliquer que l'objectif final est la fin de sa dépendance vis à vis de telle ou telle substance.
    - Au cours d'un accident de sevrage ou d'un accident de surdosage.
    L'hospitalisation s'impose en urgence, le transport par le SAMU s'impose. La prise en charge est assurée par l'équipe médico-sociale de l'établissement hospitalier.
    - A l'occasion d'un constat de décès d'un sujet jeune à son domicile ou sur la voie publique.
    - A l'occasion d'une levée de corps par un médecin requis. Il examinera le cadavre et préconisera ou non la pratique d'une autopsie. Il devra veiller à ce que les enquêteurs saisissent les restants de "doses" et le matériel d'injection.

    4 Plan gouvernemental de lutte contre la toxicomanie (21/09/1993)

    4.1 Action internationale

    - Convention internationale de lutte contre le trafic et le blanchissement d'argent de la drogue.
    - Action de coopération avec les pays producteurs.

    4.2 Lutte contre le trafic et vente sur la voie publique

    Les moyens sont mis en place par la Gendarmerie et la Police.

    4.3 Développement de l'injonction thérapeutique

    4.4 Amélioration du système sanitaire

    Dans chaque établissement, 3 à 5 lits sont réservés aux cures de sevrage
    Multiplication par 2 de l'hébergement en post-cure, création de réseau Ville-Hôpital-Toxicomanie avec la participation des médecins généralistes,
    Augmentation du nombre d'antennes "Toxicomanie" en milieu carcéral,
    Limitation des risques liés au VIH,
    Amélioration de la formation sur la toxicomanie dans le cursus médical,
    Projet "Méthadone".

    4.5 Prévention

    Journée d'information sur la drogue,
    Action locale scolaire ou universitaire.

    5 Règlement de la délivrance des seringues

    Réglementation par un décret du 13 mars 1972 modifié par un décret du 1er août 1989, mise en place pour la lutte contre l'extension de la toxicomanie et des maladies transmises par l'usage de seringues souillées.
    Jusqu'en 1989, la vente libre du matériel d'injection était interdite pour la lutte contre l'extension de la toxicomanie. Devant l'échec de cette mesure et devant l'extension de certaines maladies infectieuses (SIDA, hépatite…) la fourniture de seringues et d'aiguilles aux toxicomanes est possible sous certaines conditions.

    5.1 Lieu de vente au public

    Les seringues et les aiguilles pour injection parentérale ne peuvent être mise en vente que dans les officines de pharmacie et établissements spécialisés dans la vente de matériel médico-chirurgical ou dentaire.

    5.2 Conditions de délivrance

    Depuis le 11 août 1989 il n'est plus nécessaire de présenter une ordonnance ; toute personne âgée de plus de 18 ans pourra se faire délivrer du matériel d'injection.

    Alcoolisme : Aspects médico-légaux

    Dr. François Paysant

    CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
     

    mis à jour le 15 septembre 1998

    1 Obligation de traitement pour les alcooliques dangereux pour autrui 
    1.1 Le signalement 
    1.2 La Procédure
    1.3 Les propositions
    2 Législation anti-alcoolique routière 
    3 Boissons alcoolisées

    La lutte contre l'alcoolisme est traitée dans le livre III du Code de la Santé Publique (lutte contre les fléaux sociaux).
    Il convient de rappeler le rôle majeur ou le rôle associé à l'alcool, dans la survenue des accidents routiers et des actes criminels et délictuels.
    D'un point de vue législatif, nous traiterons la loi de 1954 concernant les alcooliques dangereux, la loi de l'alcoolisme routier.

    1 Obligation de traitement pour les alcooliques dangereux pour autrui

    L'Etat coordonne la prévention et le traitement de l'alcoolisme, les dépenses occasionnées sont à la charge de l'Etat.

    1.1 Le signalement

    Par les autorités administratives, judiciaire ou sanitaire :
    - à l'occasion de poursuites judiciaires,
    - sur certificat d'un médecin du service public décrivant les symptômes, et le danger.

    1.2  La Procédure

    L'autorité sanitaire saisi du cas, fait procéder à :
    - une enquête sociale, portant sur la vie familiale, professionnelle et sociale de l'intéressé.
    - un examen médical par un expert désigné sur une liste de la DDASS.

    1.3 Les propositions

     Médicales :
    - maintien en liberté sous surveillance d'un dispensaire d'hygiène sociale en collaboration avec une association anti-alcoolique.
    - soit hospitalisation dans un service de désintoxication d'un hôpital général.
    - soit hospitalisation en milieu psychiatrique HDT ou HO.
     
    Judiciaires :
    - Alcoolique dangereux reconnu par le Juge doit être placé dans un centre de rééducation spécialisée pour 6 mois (fonction de désintoxication, rééducation, isolement).
    Un seul centre existe en FRANCE (disposition tombée en désuétude).
     
    Mesures temporaires, pouvant être décidées par le luge :
    - éviction des emplois du service public à des postes de sécurité,
    - retrait du permis de chasse,
    - retrait du permis de conduire,
    - placement des enfants,
    - séparation de la famille.

    2 Législation anti-alcoolique routière

    - taux 0,5 g/l à 0,8 g/l, décret du 29 août 1995 (passible d'une contravention avec amende 900 Francs et retrait de 3 points du permis de conduire).
    - au-delà de 0,8 g/l, loi du 12 juillet 1978.
    "Toute personne qui aura conduit un véhicule alors qu'elle se trouvait, même en l'absence de tous signes d'ivresse manifeste, sous l'emprise d'un état alcoolique caractérisé par la présence dans le sang d'un taux d'alcool 0,8 g/100 ou par la présence dans l'air expiré d'un taux d'alcool pur égal ou supérieur à 0,4 milligramme par litre sera punie d'un emprisonnement d'un mois à un an et d'une amende de 5000 à 10 000 francs ou de l'une de ces deux peines seulement".
    Ces vérifications sont obligatoires dans tous les cas de crime, délit ou accidents suivis de mort.
    Lors d'infraction au code de la route, lors de contrôles systématiques ordonnés par le Procureur, le lieu et la date sont précisés par le parquet.
     
    Dépistage
    - Alcootest : marque Draeger (changement de couleur)
    - Ethylotest : électrode spécifique à l'alcool = Méthode de dépistage et non d'analyse.
     
    Si l'une ou l'autre des deux techniques est positive, une confirmation s'impose. Pour cela, deux possibilités existent :
    - La prise de sang : réalisation d'un examen clinique et du prélèvement sanguin par un médecin sur réquisition. Le matériel est fourni par les autorités de police ou de gendarmerie.
    L'autorité requérante peut assister aux prélèvements.
    15 cc sont prélevés et répartis en 2 flacons.
    La procédure comporte 3 fiches :
    - fiche A : examen fait par les policiers ou les gendarmes,
    - fiche B : examen clinique fait par le médecin réalisant le prélèvement,
    - fiche C : résultat de l'alcoolémie réalisée par l'expert.
    Ces flacons sont confiés à un biologiste expert ou au laboratoire de l'hôpital faisant partie du service public.
    Il existe seulement 2 méthodes officielles :
    - Méthode de CORDEBARD
    - Méthode Chromatographie Gazeuse
    La méthode enzymatique n'est pas valable car il y a possibilité de faux positif.
    - L'éthylomètre : Le suspect d'alcoolisme soufflera dans un appareil sophistiqué (Spectrométrie infra-rouge) spécifique et précis contrôlé par le service des mesures. Mais un examen réalisé par des non-médecins sans examen clinique préalable, avec aucune possibilité de contre expertise possible.

    3 Boissons alcoolisées

    Densité d'alcool 0,8
     
    bière
     4 à 5°
    250 ml
    330 ml
    9,8 g
    13 g
    vin
    12°
    100 ml
    9,5 g
    apéritif
    18 à 24°
    50 ml
    8 g
    whisky
    Cognac
    anis
    40°
    50 ml
    15 g
     
    Dans le commerce, dans un verre contenant 8 à 15 g de liquide on peut estimer approximativement qu'il contiendra 10 g d'alcool. Chez soi, il faut majorer la quantité d'alcool contenu dans le verre.
     
    Formule de WIDMARK
          A (g/l) = M alcool ingéré (g
              M corporelle (kg) x r
      A (g/l) = Alcoolémie estimée en gramme par litre 
      r = coefficient distribution : 
        0,7 pour les hommes 
        0,6 pour les femmes
     
    Pic = 1/2 h
    Ces considérations valables en cas d'une prise unique et massive.
    Le pic est plus bas et plus tardif s'il est pris au cours du repas, ou si les prises sont fractionnées.
     
    Elimination
    L'élimination peut en première approximation être représentée par une droite de pente 0,08 g/l/h à 0,25 g/l/h (valeur moyenne 0,15 g/l/h)
    Cette approximation permet une évaluation prudente a posteriori d'une imprégnation alcoolique au moment des faits.
    De même, elle permet une prévision de la durée nécessaire pour revenir à une alcoolémie nulle ou raisonnable.

    La responsabilité médicale

    Pr. M. Le Gueut-Develay

    CHU de Rennes, Service de Médecine Légale, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
     

    mis à jour le 15 septembre 1998

    1 Responsabilité, source de sanction 
    1.1 La Responsabilité Pénale 
    1.2 Responsabilité disciplinaire
    2 Responsabilité, source d'indemnisation 
    2.1 Responsabilité contractuelle 
    2.2 Responsabilité Administrative

    Le médecin est un citoyen qui exerce une activité à risques au sein d'une profession organisée. En tant que citoyen, il répond de ses actes devant la société.
    En tant que praticien, il en répond :
    - devant ses pairs,
    - devant ses malades.
    Qu'il commette une faute dans l'exercice de son art et il peut :
    - être sanctionné par les Juridictions professionnelles ou celles du Droit Commun (Civile et Pénale),
    - être contraint à verser à sa victime, des dommages et intérêts.
    La mise en cause de la Responsabilité Médicale peut donc prendre deux aspects :
    - un aspect de sanction,
    - un aspect d'indemnisation.

    1 Responsabilité, source de sanction

    1.1 La Responsabilité Pénale

    La Responsabilité Pénale peut être mise en cause, quels que soient la qualité et le mode d'exercice (libéral ou hospitalier public).
    Il suffit, pour cela, que la faute soit constitutive d'une infraction dont la répression est prévue par le Code Pénal. Elles sont nombreuses :
    - violences volontaires,
    - faux certificats,
    - infraction à la législation sur les stupéfiants,
    - euthanasie,
    - stérilisation humaine volontaire sans finalité thérapeutique,
    - interruption illégale de grossesse,
    - expérimentation sans le consentement de l'individu,
    - assistance médicale à la procréation en dehors des dispositions légales,
    mais aussi,
    - violation du secret professionnel,
    - non assistance à personne en péril et encore,
    - manquement délibéré à une obligation de sécurité ou de prudence. (création du Nouveau Code Pénal)
     
    Le Code Pénal prévoit aussi une incrimination qui peut être retenue contre un médecin malgré ses termes :
    "Homicide par imprudence, maladresse, inattention ou inobservation des règlements", il en est de même des violences qui n'ont pas entraîné la mort.... c'est dans cette circonstance que le corps médical s'émeut.
     
    En effet, si la conscience médicale reconnaît la nature délictuelle voire criminelle de l'établissement de faux certificats ou de violences volontaires infligées à un malade, elle ne voit aucun rapport entre le délinquant qui vole à l'étalage et le chirurgien dont le patient décède à la suite d'une intervention. Or, le vol et l'homicide par imprudence sont des infractions réprimées par le Code Pénal.
    C'est le malade qui, s'estimant victime du médecin, choisit la voie judiciaire, il peut :
    - saisir la justice civile pour demander réparation de son dommage,
       ou
    - déposer plainte avec constitution de partie civile entre les mains d'un juge d'instruction. Il espère alors que le médecin sera condamné à une peine de prison ou d'amende et secondairement à indemniser le préjudice.
    Ce choix passionnel se heurte souvent aux exigences du Droit Pénal en matière d'administration de la preuve. La faute médicale est difficile à prouver, et en l'absence d'absolue certitude, le magistrat est conduit à prononcer un "non-lieu" en faveur du médecin.
    L'absence de condamnation pénale entraîne l'absence d'indemnisation au motif de l'identité des fautes.
    Ce n'est donc pas une démarche souhaitable, ni pour le médecin, ni pour le malade :
    - pour le médecin, la mise en cause, voire en examen, est infamante même si elle débouche sur un non-lieu,
    - pour le malade, l'issue de l'action est incertaine et l'indemnisation rare même si le dommage est patent.

    1.2 Responsabilité disciplinaire

    L'une des conditions de l'exercice de la médecine, en France, est l'inscription au Tableau de l'Ordre.
    Le médecin s'engage à respecter les règles déontologiques lesquelles sont teintées de morale, de droit et d'aspects purement professionnels. La faute médicale peut être uniquement professionnelle et ne pas regarder la Justice de Droit Commun (non respect des règles de confraternité, utilisation abusive de titres ou de qualifications, infraction à la législation de protection sociale etc...).
    Elle peut être tout à la fois professionnelle et de Droit Commun.
    Les Juridictions Professionnelles sanctionnent le médecin d'un avertissement, d'un blâme, d'une interdiction temporaire d'exercer ou d'une radiation.
    En matière civile, l'Ordre n'est pas tenu de suivre les décisions du Juge s'il estime que la faute de Droit Commun ne constitue pas une faute professionnelle.
    En matière Pénale, il doit suivre la décision de la Juridiction. C'est l'Ordre Régional qui est compétent en première instance. Le recours s'effectue devant la Section Disciplinaire de l'Ordre National. Le recours ultime est porté devant le Conseil d'Etat.

    2 Responsabilité, source d'indemnisation

    "Je l'ai pansé, Dieu l'a guéri" (A. PARE) ou "Docteur, sauvez la mère" (lors d'un accouchement difficile), s'accommodaient du Sacré et du Fatum qui ont longtemps présidé à la pratique médicale.
     
    Pourquoi mettre en cause la Responsabilité d'un médecin quand le risque de mourir est plus important que celui de guérir ?
    La médecine a évolué. Elle est devenue technique et pluridisciplinaire. L'individualisation de la faute à l'origine d'un dommage, et celle de son auteur est devenue très difficile.
    Or, le principe de la Responsabilité Civile, posé dès 1810 par l'article 1382 du Code Civil est le suivant :
    "Tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer".
    Les magistrats du XIXème siècle ont très vite compris, que la nature délictuelle de la Responsabilité s'appliquait mal à la matière médicale et l'arrêt Mercier (1936) a posé le principe de sa nature contractuelle, admettant "qu'il se forme entre le médecin et son patient un contrat qui entraîne pour le médecin, l'obligation, non pas de guérir son malade, mais de lui donner des soins non quelconques, mais réserves faites de circonstances exceptionnelles, conformes aux données acquises de la Science".
    Ce principe s'est appliqué à l'exercice le plus fréquent à cette époque, l'exercice libéral. il perdure en ce qui le concerne.
    En revanche, le médecin peut aujourd'hui exercer en Etablissement Hospitalier. Dans ce cas, il est agent du Service Public, et c'est à l'Administration que le patient devra s'adresser s'il s'estime victime d'un dommage.
    L'Administration engage sa responsabilité du fait de son préposé.

    2.1 Responsabilité contractuelle

    C'est celle du médecin libéral ou de l'hospitalier public qui pratique un acte libéral (activité privée à l'hôpital).
    Il se crée entre le médecin et le malade un contrat (le contrat de soins). Ce contrat est oral (sauf cas particuliers), tacite, sui generis et synallagmatique (engage les deux volontés).
    Le contrat n'existe pas lorsque :
    - l'un des deux protagoniste n'a pas capacité à contracter (mineur, incapable majeur, comateux...)
    - l'objet du contrat n'est pas licite (euthanasie, stérilisation humaine volontaire...).
    Le médecin s'oblige :
    - à respecter ses devoirs d'humanisme,
    - à donner des soins.
    Le malade s'oblige :
    - à suivre les prescriptions,
    - à honorer son praticien.
    La responsabilité contractuelle demeure fondée sur la faute, que le demandeur (le malade) doit prouver. La faute résulte de l'inexécution des obligations du contrat. La prescription est trentenaire.

    2.1.1 Fautes contre l'humanisme

    Le médecin doit respecter la personne du malade et sa dignité. Ce respect implique :
    - l'obligation de n'intervenir qu'avec le consentement du patient
    - le devoir d'assistance
    - le respect du secret
     
    2.1.1.1 Le respect du secret (cf. cours sur le secret professionnel)
     
    2.1.1.2 Le devoir d'assistance
     
    Mise à part la circonstance particulière que constitue l'assistance à personne en péril, le médecin qui accepte de donner ses soins ne peut abandonner son malade en cours d'intervention (diagnostique ou thérapeutique).
    Il est admis à refuser ses soins mais seulement en dehors de l'urgence et s'il cesse de le faire, il doit s'assurer de leur continuité.
     
    2.1.1.3 L'obtention du consentement
     
    Elle est subordonnée à l'information du malade qui ne peut consentir à un acte médical s'il a été informé de son contenu.
    La jurisprudence estime que cette information doit être claire, loyale, approximative et intelligible.
    Seuls les risques habituels doivent être explicités. Les risques exceptionnels peuvent être retenus, sauf s'ils sont disproportionnés ou si l'objet de l'acte médical s'éloigne par trop de la finalité thérapeutique (chirurgie esthétique).
    L'information est donnée au malade lui-même ou au titulaire de l'autorité parentale pour le mineur, ou au représentant légal pour le majeur incapable.
    Elle est orale sauf circonstances prévues par la loi. Le consentement est recueilli de la même manière sauf s'il s'agit d'une IVG, d'une AMP, d'une recherche médicale, d'une plasmaphérèse.
    L'information doit porter sur :
    - l'état du malade,
    - la nature et la mise en oeuvre du traitement ainsi que les risques,
    - les précautions à prendre après l'acte médical.
    La preuve du défaut d'information est à la charge du malade.
    Des décisions récentes de la Cour de Cassation (1997) semblent laisser à penser que ce principe puisse souffrir des tempéraments.
    La première décision (février 1997) semblait s'orienter vers un retournement de la charge de la preuve de l'information qui incomberait désormais au médecin et non au malade.
    La seconde décision (octobre 1997) est plus tempérée et semble se rapprocher de la situation antérieure. L'infirmation médicale pourrait être apportée "par tous moyens" et non par un document écrit obligaoire (rédigé par le médecin - signé par le malade) comme semblait l'inciter la décision de février 1997.

    2.1.2 Fautes de technique médicale

    Ce sont les fautes qui relèvent de l'inexécution de l'obligation de soins. Les soins doivent être conformes aux données acquises de la science et correspondre à la mise en œuvre de tous les moyens humains ou techniques nécessaires à l'obtention du meilleur traitement.
    Il s'agit bien d'une obligation de moyens et non de résultat. Sauf si le médecin s'est engagé à un résultat donné (exemple le plus fréquent : chirurgie esthétique). Il existe en effet, dans tout acte médical une part "d'aléa" qui ne permet pas d'affirmer le résultat.
    C'est en ce domaine que la faute médicale est la plus difficile à établir.
    A quoi correspondent les données acquises de la science ?
    Sont-elles des usages, des manières habituelles de pratiquer pour le plus grand nombre à un moment donné ?
    Le juge est amené à s'entourer d'avis techniques pour l'aider à répondre à ces questions. C'est le champ d'intervention des experts.

    2.2 Responsabilité Administrative

    Lorsque le dommage résulte du fait d'un médecin hospitalier, c'est l'Administration qui est mise en cause. Sa responsabilité est engagée du fait de son préposé.
    Le malade doit s'adresser au Directeur de l'Etablissement Public de Santé pour demander indemnisation. Celui-ci accède à sa demande ou refuse.
    C'est lorsque l'Etablissement Public de Sanbté refuse que le Tribunal Administratif peut être saisi.
    Jusqu'à une période récente, la Responsabilité de l'Administration pouvait être engagée de différentes manières :
    - pour faute simple,
    - pour faute lourde (faute médicale),
    - pour faute dans l'organisation du service.
    A la suite d'un revirement de la jurisprudence, (1992) ce régime un peu complexe est caduc.
    Désormais, "une faute" (n'importe laquelle) dès lors qu'elle est prouvée suffit à engager la Responsabilité de l'Etablissement.
    Ceci a eu pour effet, heureux, de faire disparaître l'inégalité qui subsistait entre les régimes d'indemnisation, selon que les dommages étaient survenus à la suite d'un acte libéral ou d'un acte hospitalier.
    La Responsabilité de l'Administration est donc systématiquement engagée mais demeure pour l'Etablissement Public de Santé, la possibilité de se retourner contre son préposé, s'il peut prouver que la faute constitue "une faute détachable du service".
    C'est pour cette raison que tout médecin hospitalier (même étudiant) doit s'assurer !



     

     
     
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