L'encyclopédie des Sciences
  Pédiatrie
 

Le nouveau-né

Marie-Claude La Rocca - Isabelle Schwartz

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
 
 

mis à jour le 1er janvier 1999

1. Définir un nouveau-né à terme, prématuré, post-mature et hypothrophique.
2. Donner les critères de détermination de l'âge gestationnel d'un nouveau-né.
3. Définir le score d'Apgar.
4. Décrire les principaux critères cliniques de l'examen neurologique normal du nouveau-né.  

Objectifs pratiques

1. Avoir examiné un nouveau-né normal
2. Déterminer son âge gestationnel
3. Prendre les principales mensurations du nouveau-né.
4. Noter les particularités de l'examen cardiovasculaire et pulmonaire, cutané, génito-urinaire et digestif du nouveau-né.
5. Effectuer cliniquement le dépistage de la luxation congénitale de hanche.
6. Effectuer l'examen neurologique du nouveau-né
7. Remplir le premier certificat de santé du 8ème jour de vie.

 

 

1 Préambule

Période périnatale : 28è semaine de gestation au 7ème jour de vie.
Période néonatale : 1er au 28ème jour de vie

  • période néonatale précoce : 1er au 7ème jour de vie.
  • période néonatale tardive : 8ème au 28ème jour de vie.

1.1 Adaptation à la vie extra-utérine

Au moment de la naissance, le nouveau-né passe de la vie aquatique materno-dépendante intra-utérine à l'autonomie aérienne.
Pour que cette transition soit harmonieuse, il faut :
- l'instauration d'une respiration efficace,
- une adaptation du système circulatoire,
- la prise en charge par le rein de la régulation du milieu intérieur,
- l'autonomisation de la thermorégulation,
- la mise en place d'une glycorégulation.

1.1.1 Adaptation circulatoire

Particularités de la circulation foetale (figure 1) :
- le sang oxygéné venant du placenta, passe par la veine ombilicale puis le canal veineux d'Arantius avant de rejoindre la veine cave inférieure, puis l'oreillette droite.
- Il existe une large communication entre l'oreillette droite et l'oreillette gauche : le foramen ovale.
- Le canal artériel entre l'artère pulmonaire et l'aorte, permet au sang venant de l'oreillette droite de passer en grande partie dans l'aorte (car les résistances vasculaires pulmonaires sont très élevées).

Les deux ventricules cardiaques fonctionnent donc "en parallèle" chez le foetus.

A la naissance, le déplissement pulmonaire et le clampage du cordon entraînent une chute rapide des résistances capillaires pulmonaires, une augmentation du débit sanguin pulmonaire et une diminution des pressions dans les cavités cardiaques droites, une augmentation des pressions dans les cavités cardiaques gauches.

La création de ces systèmes à basse et haute pression entraîne une disparition progressive des deux shunts (foramen ovale et canal artériel).
Les deux ventricules cardiaques fonctionnent alors "en série".

La fermeture des shunts va se faire progressivement et de façon réversible durant environ une semaine ; pendant cette période, si les résistances pulmonaires restent élevées, on peut assister à une persistance ou un retour en circulation foetale.

1.1.2 Adaptation respiratoire

La sécrétion du liquide intra-pulmonaire s'arrête quelques heures avant l'accouchement. La compression thoracique, lors du passage par la filière génitale, permet l'évacuation d'une partie de ce liquide. Une grande quantité du liquide intra-pulmonaire sera résorbée par voie veineuse et lymphatique trans-alvéolaire.

La mise en route de la respiration dans les vingt secondes suivant l'expulsion (premier cri) est déclenchée par des mécanismes non entièrement élucidés (stimuli sensoriels : froid, passage du milieu liquide au milieu aérien ; stimuli chimiques : acidose secondaire au clampage du cordon,...)

Ces premiers mouvements respiratoires vont entraîner une expansion alvéolaire.

Pour qu'il y ait création d'une capacité résiduelle fonctionnelle nécessaire aux échanges gazeux, la présence du surfactant pulmonaire est indispensable.

Cette substance lipido-protidique a des propriétés tensio-actives permettant de maintenir les alvéoles ouvertes en fin d'expiration.

La production du surfactant par les pneumocytes n'est efficace qu'en fin de grossesse (35 semaines).

1.1.3 Adaptation rénale

Pendant la vie foetale, l'équilibre du milieu intérieur est assurée par le placenta.
Les fonctions glomérulaires et tubulaires du rein sont en général satisfaisantes chez le nouveau-né à terme mais elles ne s'adaptent pas toujours bien aux diverses situations pathologiques.

1.1.4 Thermorégulation

Elle ne sera efficace que chez le nouveau-né à terme.
Après l'accouchement, la température de l'enfant va s'abaisser très rapidement.
Les risques d'hypothermie sont élevés, en particulier chez le prématuré qui n'a pas de système de thermorégulation efficace.

1.1.5 Glycorégulation

La nutrition transplacentaire va brusquement s'interrompre à la naissance.
Le maintien d'une glycémie efficace va être assurée d'abord par la glycogénolyse hépatique relayée rapidement par l'alimentation lactée.
Les fonctions digestives (motricité et absorption) ont une maturation progressive durant la grossesse et les premières semaines de vie.

1.2 Enquête anamnestique

Elle est indispensable pour une bonne prise en charge adaptée à chaque nouveau-né car les résultats de cette enquête permettront d'orienter l'examen du nouveau-né en fonction des éléments susceptibles de retentir sur l'état de l'enfant.
Les renseignements seront pris auprès des parents, de l'équipe obstétricale, du médecin de famille.

1.2.1 Antécédents familiaux :

- maladie héréditaire familiale,
- décès inexpliqué en période néonatale, risque de maladie métabolique,
- notion de consanguinité.

1.2.2 Antécédents maternels :

Maladie antérieure à la grossesse pouvant, directement ou par l'intermédiaire du traitement, avoir un effet sur le foetus.

1.2.3 Déroulement précis de la grossesse :

- modalités de surveillance,
- examens paracliniques (échographies, sérologies : rubéole, toxoplasmose, Hbs, HIV),
- âge maternel :

  • si supérieur à 35-40 ans : risque d'anomalies chromosomiques,
  • si inférieur à 18 ans : risque de prématurité, d'hypotrophie,

- groupe sanguin O ou Rh- : risque d'incompatibilité foeto-maternelle,
- conditions socio-économiques :

  • si mauvaises : augmentation du risque de prématurité, d'hypotrophie,

- gémellité : risque de prématurité, d'hypotrophie, de difficultés obstétricales,
- métrorragies : risque d'anémie,
- diabète maternel mal équilibré :

  • risque de gros bébés, de prématurité, d'hypoglycémie, de malformations,

- HTA - toxémie gravidique :

  • risque d'hypotrophie, de souffrance neurologique.

- Infections :

  • virales en début de grossesse : risque d'embryo-foetopathies
  • bactériennes en fin de grossesse : risque d'infection materno-foetale et prématurité.

- prise de médicaments :

  • en début de grossesse : risque d'embryopathie
  • en fin de grossesse : risque d'intoxication

- Intoxication : tabac, alcool, autres drogues :

  • risque de malformations, de souffrance neurologique, de syndrome de sevrage.

 En pratique, toute pathologie maternelle pendant la grossesse devra être connue.

1.2.4 Déroulement précis de l'accouchement

- Terme théorique

  • prématurité : risque d'hypothermie, d'hypoglycémie, d'hypocalcémie, de détresse respiratoire, d'hémorragie intra-crânienne.
  • post maturité : risque de souffrance neurologique, d'inhalation de liquide amniotique.

- rupture des membranes amniotiques de plus de 10 heures : risque d'infection.
- hydramnios - oligoamnios : risque de malformations.
- durée et progression du travail
- éventuelles manoeuvres instrumentales
- voie basse ou césarienne (indication).
- le liquide amniotique teinté, les anomalies du rythme cardiaque foetal, du doppler foetal sont des signes de souffrance neurologique.
- pathologie funiculaire : risque de souffrance
- drogues maternelles, anesthésie
- état du placenta.  

2 L'examen du nouveau-né  

2.1 L'âge gestationnel

2.1.1 Définitions

La durée de la grossesse est calculée en semaines d'aménorrhée (donc à partir du 1er jour des dernières règles).
- Nouveau-né à terme  : né entre 37 et 42 semaines de gestation (259 à 293 jours)
- Nouveau-né prématuré : né avant 37 semaines de gestation (< ou = 258 jours).
- Nouveau-né postmature : né après 42 semaines de gestation (> ou = 294 jours).

2.1.2 Détermination de l'âge gestationnel

 2.1.2.1 Les critères obstétricaux :

- La date de début des dernières règles permet de dater de façon assez certaine le début de la grossesse mais :

  • n'est pas toujours connue,
  • pas toujours fiable quand les cycles sont irréguliers ou qu'il y a eu des saignements en début de grossesse.

La courbe de température donne la date d'ovulation, mais elle est rarement faite.

- L 'échographie foetale précoce : faite avant 12 semaines de gestation, les mesures du foetus par échographie permettent de dater la grossesse à 5 jours près.

- Autres critères obstétricaux :

  • la mesure de la haute utérine,
  • l'examen de certains composants du liquide amniotique.
2.1.2.2 Les critères pédiatriques :

L'évaluation pédiatrique de la maturité va être comparée à l'âge gestationnel annoncé par les obstétriciens :

2.1.2.2.1 Les critères morphologiques :

Iils permettent une appréciation de l'âge gestationnel à l'inspection de l'enfant.
Le score de Farr (Tableau I), permet de coter différents éléments morphologiques (aspect de la peau, oedèmes, lanugo, aspect des oreilles, organes génitaux externes, tissu mammaire, plis plantaires). Ces éléments sont cotés de 0 à 4 puis le total comparé à des abaques donne une âge gestationnel.

2.1.2.2.2 Les critères neurologiques (Tableau II) et en particulier l'examen du tonus permettent d'évaluer l'âge neurologique. Risques d'erreur :
- pathologie neurologique,
- nouveau-né sous sédatifs,
- autres pathologies.

2.1.2.2.3 les autres critères pédiatriques, sont rarement effectués en pratique (âge électroencéphalographique, âge visuel,...).

2.2 Trophicité

2.2.1 Définition

Le nouveau-né est :
- eutrophique, si son poids se situe entre le 3è et le 97è percentile pour son âge gestationnel.
- hypotrophique, si son poids est inférieur au 3è percentile pour son âge gestationnel.

En pratique, on parle en général d'hypotrophie quand le retard de croissance n'affecte que le poids, et de retard de croissance intra-utérin quand le retard affecte également les autres critères (taille, périmètre crânien).

- hypertrophique, si son poids est supérieur au 97è percentile pour son âge gestationnel.

2.2.2 Les mensurations du nouveau-né

Le poids, la taille et le périmètre crânien seront mesurés systématiquement pour chaque nouveau-né, puis comparés à des courbes de référence (fig. 2).

Chaque nouveau-né est "classé" en fonction des deux critères :
- maturité (à terme, prématuré, postmature),
- trophicité (eutrophique, hypotrophique, hypertrophique).

En effet, les risques encourus et la prise en charge sont différents pour chaque catégorie.

Le nouveau-né à terme a :
- un poids moyen de 3300 g,
- une taille moyenne de 50 cm,
- un périmètre crânien moyen de 35 cm.

2.3 L'examen du nouveau-né en salle de travail

Dès la naissance, il convient d'évaluer l'état de l'enfant afin de mettre éventuellement rapidement en route les manoeuvres de réanimation.

 Les gestes suivant sont systématiquement réalisés :
- Placer l'enfant sur une table chauffante.
- Aspirer bouche, pharynx, narines si on a la notion d'inhalation de liquide amniotique, il faut aspirer directement en trachéal sous laryngoscope ou après intubation avant de débuter la ventilation.
- Préciser rapidement, les rythmes cardiaque et respiratoire, la qualité du cri, la couleur du bébé et les réponses à la stimulation cutanée.
- Ces cinq critères cotés de 0 à 2 permettent de déterminer le score d'Apgar : il est pratiqué à 1 et 10 minutes de vie (Tableau III). Cette évaluation permet de guider la conduite à tenir vis-à-vis du nouveau-né :

  • Si > à 8 à 1' : rien à signaler
  • Si < à 3 à 1' : état de mort apparente impliquant une réanimation en urgence. (idem si < 5 à 5')
  • Un chiffre intermédiaire, témoin d'une souffrance néonatale, justifie une prise en charge adaptée.

- Passage systématique d'une sonde souple pour vérifier la perméabilité des choanes, de l'oesophage et de l'anus.
- Température
- Glycémie éventuelle (dextrostix) - risque majoré chez le prématuré : l'hypotrophie, l'enfant de mère diabétique
- Examen appareil par appareil (voir suite du cours)
- Systématiquement :

  • collyre oculaire (prévention conjonctivite à gonocoque),
  • injection de vitamine K (5 mg) en intra musculaire (prévention de la maladie hémorragique du nouveau-né).

Tous ce gestes doivent être effectués avec le maximum d'asepsie.
Après l'examen initial réalisé en salle de travail, l'enfant, s'il va bien, va être gardé 5 jours en moyenne à la maternité auprès de sa maman.
Pendant cette période, l'enfant en observation, sera revu par un pédiatre au moins à deux reprises à J1 et J5 afin de déceler toute anomalie.

2.4 Examen appareil par appareil

2.4.1 Appareil Cardio-Vasculaire et Respiratoire du Nouveau-Né

2.4.1.1 La coloration

C'est le meilleur critère de fonctionnement de ces deux appareils : rose rouge homogène sur tout le corps à l'exception possible des pieds, mains (acrocyanose).
Chez les bébés de couleur, inspecter les muqueuses.

2.4.1.2 La fonction respiratoire

- La respiratoire est régulière :

  • 40 à 60 mouvements par minute,
  • de type abdominal,
  • temps inspiratoire égal au temps expiratoire,
  • un rythme périodique est fréquent.

- Le thorax est :

  • symétrique,
  • sans signe de lutte (tirage intercostal, entonnoir,...)

- Le murmure vésiculaire est audible, symétrique.

- L'enfant respire bouche fermée, sauf pendant les cris.

- Sont pathologiques :

  • une fréquence respiratoire > à 60 par minute,
  • l'existence de pause respiratoire, d'apnée,
  • une cyanose,
  • des signes de lutte cotés par le score de Silvermann.

- Toute anomale respiratoire doit conduire à pratiquer une radiographie pulmonaire et des gaz du sang. Elle impose le transfert du bébé en unité de néonatologie.

2.4.1.3 Le coeur

L'examen se fera dans le calme, avec un stéthoscope de petit diamètre réchauffé, sur un enfant ne pleurant pas.

- La palpation permet de préciser la position du coeur.

- La fréquence cardiaque au repos est rapide, entre 120 et 160/minute variant en fonction de l'activité du bébé :

  • B1 d'intensité variable,
  • B2 quelquefois dédoublé après quelques jours quand s'accentue la baisse des résistances pulmonaires.

- La découverte d'un souffle à cet âge doit entraîner une surveillance répétée mais n'a pas une signification univoque :

  • 80 à 90% des souffles perçus au cours des 24-48 premières heures de vie ne le sont plus au 3ème mois,
  • chez 20% des enfants décédés au cours du 1er mois par cardiopathie congénitale, aucun souffle n'avait été entendu.

- La cyanose précoce, permanente, non améliorée par l'oxygène doit faire soupçonner une transposition des gros vaisseaux.

- La palpation des pouls est systématique aux membres supérieurs et inférieurs :

  • absence ou baisse des pouls fémoraux = coarctation de l'aorte,
  • hyperpulsatibilité des artères périphériques = suspicion de canal artériel.

- Appréciation de l'hémodynamique

  • la tension artérielle (prise au flush ou mieux ou doppler)est essentielle en cas d'anomalie de palpation des pouls. La TA systolique est de 50 + ou - 12 mm de Hg.
  • quand on suspecte un obstacle aortique (coarctation), il faut la prendre aux quatre membres ;
  • la circulation périphérique capillaire est appréciée par le temps de recoloration d'une zone cutanée comprimée un court instant, il est normalement inférieur à 3 se-condes.

L'examen est complété par l'auscultation du crâne, des vaisseaux du cou et de l'abdomen à la recherche d'un souffle vasculaire.

Toute anomalie suspectée sur la position du coeur, son volume, etc... doit conduire à demander des examens complémentaires (radio pulmonaire, ECG, échographie cardiaque, gaz du sang).

2.4.2 Examen cutané

- A la naissance la peau est recouverte d'un enduit blanchâtre adhérent : le vernix caséosa.

- La peau est de couleur rose vif et chaude avec parfois une légère cyanose palmoplantaire :

  • un léger oedème est fréquent,
  • vers J2, la peau est moins rouge, plus sèche et peut être le siège d'une desquamation légère.

- Il faut connaître certaines particularités sans signification pathologique :

  • le lanugo : fin duvet prédominant sur les joues, le front, les racines des membres
  • le milium : amas sébacés faits d'éléments punctiformes blancs siégeant sur le nez et le menton
  • l'érythème toxicoallergique : maculopapules d'aspect urticarien prédominant sur le tronc apparaissant vers J2, disparaissant en une semaine, ne nécessitant aucun traitement.
  • angiomes capillaires plans de la ligne médiane (paupières, racine du nez, nuque) disparaissent en moins de 2 ans.
  • taches mongoloïdes : bleues ardoisées, parfois très étendues, siégeant dans la région lombosacrée :
    • 1/3 des naissances au Moyen Orient,
    • 2 à 5 cas sur 1000 naissances en Europe,
    • quasi constant en Extrême Orient.

- Les anomalies localisées à la région sacrée :

  • il faut se méfier d'un défaut de fermeture du tube neural quand existent dans cette région : naevi, masse lipomateuse, touffe de poils, fossette coccygienne profonde,
  • faire l'examen neurologique attentif et demander une radiographie (échographie) du rachis lombosacré.

- Ictère dit physiologique : apparaît vers le 3ème jour, ne se prolonge en règle pas au delà de 3 semaines.

2.4.3 Appareil digestif

- L'abdomen est volontiers légèrement météorisé, facilement dépressible,
- Un diastasis des droits est banal,
- Le foie peut déborder le rebord costal de 1à 2 cm,
- La rate n'est pas palpable,
- Le méconium, d'aspect brun verdâtre est émis dans les 24 premières heures. L'absence d'émission à la 36è heure doit faire rechercher notamment : une mucoviscidose, une hypothyroïdie, une maladie de Hirsprung.

Doivent attirer l'attention :
- une anomalie de volume de l'abdomen surtout si elle est associée à des vomissements ; un ventre "plat" fait suspecter une malformation digestive haute (atrésie de l'oesophage, hernie diaphragmatique,...),
- une masse anormale abdominale :

  • distension pyélique
  • sympathoblastome
  • tumeur rénale.

- une hernie inguinale :

  • chez le garçon, cela traduit une persistance de la perméabilité du canal péritonéo-vaginal,
  • chez la fille, se méfier d'une hernie de l'ovaire.

- le cordon ombilical : blanc jaunâtre (gelée de Wharton), sa tranche de section laisse voir deux artères et une veine ombilicale. Il sèche et tombe en 8 à 15 jours. Une artère ombilicale unique fait rechercher une malformation digestive ou génito-urinaire associée.

2.4.4 Appareil urinaire

- Les reins peuvent être normalement palpables surtout à gauche.
- Vérifier l'absence de globe vésical.
- Il faut noter la première miction et la qualité du jet urinaire. Une miction difficile en goutte à goutte chez le garçon, traduit l'existence de valves de l'urètre postérieur, urgence thérapeutique (risque de lésions rénales).
- La première miction peut être retardée jusqu'au 3ème jour.

2.4.5 Appareil génital

A la naissance, les organes génitaux externes sont souvent oedématiés.

2.4.5.1 Chez le garçon :

- le scrotum est plus ou moins plissé avec un raphé médian,
- les testicules sont en position variable : dans les bourses, ou à l'anneau,
- on précise : la taille de la verge, la position de l'orifice urétral (épi, hypospadias),
- il existe presque toujours un phimosis serré,
- l'hydrocèle vaginale est fréquente et régresse spontanément.

2.4.5.2 Chez la fille :

- petites lèvres et clitoris sont transitoirement hypertrophiées ;
- il faut apprécier les orifices urétral et vaginal ;
- on recherche une éventuelle imperforation de l'hymen.

2.4.5.3 La crise génitale se manifeste par :

- des sécrétions muqueuses épaisses,
- des métrorragies (pseudomenstruation),
- dans les deux sexes, une hypertrophie mammaire avec même sécrétion lactée possible ;
- l'évolution se fait spontanément vers la régression en quelques jours.

2.4.5.4 Toute ambiguïté sexuelle doit être reconnue et prise en charge dès les premiers jours. Elle pose deux problèmes :
- celui de ne pas déclarer abusivement un sexe déterminé,
- celui de ne pas méconnaître une hyperplasie congénitale des surrénales mettant la vie en danger.

2.4.6 Appareil Osteoarticulaire

2.4.6.1 Les membres

- les anomalies les plus courantes sont les anomalies des doigts (surnuméraire, syndactylie), les pieds bots et les luxations de hanche,
- Comparer la longueur et le volume des membres.
- Vérifier la souplesse des articulations.
- Rechercher une asymétrie des mouvements.

  • Membres supérieurs : lésion traumatique  (fracture de la clavicule, paralysie du plexus brachial),
  • les doigts : surnuméraires, pli palmaire unique (pli médian fréquent dans les aberrations chromosomiques : pli palmaire).
  • membres inférieurs : anomalies des orteils, plis cutanés, malposition (varus, pied bot varus équin,...)
2.4.6.2 Les Hanches

Toute hanche luxée ou luxable doit être découverte dès les premiers jours de vie. En effet, bien que l'examen des hanches demande une certaine expérience, le traitement de la hanche luxable est souvent simple (langeage en abduction) si elle est découverte rapidement ; par contre l'évolution d'une hanche luxable non diagnostiquée en période néonatale peut être catastrophique.

Dépistage de la luxation congénitale de hanche

 

Figure 1 : Recherche de l'instabilité des hanches (ressaut - signe d'Ortolani)
Les cuisses de l'enfant sont fléchies à 90°, les mains empaument les genoux fléchis, la paume pousse dans l'axe du fémur, les pouces essayent de s'écarter l'un de l'autre mais les genoux restent proches l'un de l'autre.
Si l'on ressent un ressaut, il traduit une hanche luxable (figure 3).

Figure 1

Figure 2 : Dans un deuxième temps, les mains écartent les cuisses l'une de l'autre et les index refoulent les cuisses d'arrière en avant. Si l'on sent un ressaut, il traduit une hanche luxée réductible (figure 4).

Figure 2

Figure 3 : Le ressaut de sortie.
C'est en poussant dans l'axe des cuisses fléchies qu'on perçoit le ressaut. La hanche n'est que luxable.

Figure 3

Figure 4 : Le ressaut de rentrée.
C'est en écartant les cuisses de l'enfant qu'on perçoit un ressaut. C'est une luxation réductible.

Figure 4

Figure 5 : Méthode de Barlow
La main gauche stabilise le bassin,
la main droite examine la hanche gauche.

Figure 5

Le dépistage d'une anomalie de la hanche doit être particulièrement rigoureux quand il existe la notion de cas familial, d'un accouchement par le siège, d'anomalie des pieds (talus,...). Il faut alors réaliser une échographie du bassin à 4 mois.
On conseille vivement chez tous les enfants une radiographie du bassin à 4 mois.

2.4.6.3 Le Dos - Le Rachis

L'inspection recherche une tuméfaction médiane traduisant l'existence d'un spina bifida nécessitant une prise en charge rapide en milieu neurochirurgical. On en précisera le degré (myéloméningocèle plus ou moins ouvert) et les troubles neurologiques qu'il entraîner (béance anale, troubles mictionnels, paraplégie,...)

Une fossette coccygienne profonde, une touffe de poils en région sacrée doivent alerter également.

Rechercher un torticolis (mieux visible quand l'enfant est vu de dos).

 2.4.6.4 Les Clavicules

Les clavicules sont systématiquement palpées à la recherche de fracture.

2.4.7 Tête - Cou et Bouche

2.4.7.1 La Tête

- périmètre crânien normal entre 33 et 37 cm,
- le crâne doit être examiné :

  • dépister les estafilades,
  • contusions secondaires à l'application de forceps ou d'électrodes pour monitoring du rythme cardiaque foetal. On retrouve un modelage différent selon la présentation (en pain de sucre dans les accouchements par voie basse),
  • il faut palper les sutures, les deux fontanelles (schéma 1)
  • il faut apprécier les sutures qui ne doivent être ni trop largement ouvertes (hydrocéphalie) ni fermées (craniosténose).

- La bosse sérosanguine est un épanchement cutané. La résorption a lieu en quelques jours. Elle peut chevaucher une suture. (schéma 2).

- Le céphalhématome est un épanchement sous-périosté plus préoccupant devant faire rechercher une fracture du crâne (parfois associée à une hémorragie intracrânienne (schéma 2)).

 2.4.7.2 Le Cou

- On doit apprécier sa mobilité.
- On recherche la présence éventuelle d'un ptérigium coli, d'un goître, d'une fistule.
- La palpation des muscles sternocléido-mastoïdiens recherche un hématome associé souvent à une attitude en torticolis.

 2.4.7.3 La Bouche

- S'assurer de l'absence de fente palatine, vélopalatine, de bec de lièvre, de dents.
- On recherche un frein de la lange qui peut gêner la succion.
- Une grosse langue doit faire penser à une hypothyroïdie.

2.4.7.4 La Face

- Dès la naissance, doivent être diagnostiqués : l'imperforation des choannes, le syndrome de Pierre Robin (QS).
- On recherche une éventuelle dysmorphie, une obliquité des palpébrales, un hypertélorisme.
- Les oreilles : niveau d'implantation, forme du pavillon, présence d'un conduit.
- Les yeux : conjonctives, iris, pupille, taille des globes oculaires, larmoiements :

  • un oedème palpébral existe souvent les premiers jours,
  • les hémorragies sous conjonctiales sont banales, transitoires.

2.4.8 Examen Neurologique

L'examen neurologique du nouveau-né peut être variable, dépendant de son état de veille, de sa faim, de son instabilité. C'est pourquoi il devra être répété s'il persiste un léger doute au premier examen.
Il comprend l'étude du tonus actif et passif, de sa mobilité ; mais aussi l'évaluation des déficiences sensorielles, du comportement, de la vie de relation.

2.4.8.1 Le Tonus
2.4.8.1.1 le tonus passif :

- La posture est le reflet du tonus passif. Elle doit être appréciée sur l'enfant en état d'éveil calme. Le bébé est en quadriflexion reflétant la prépondérance des muscles fléchisseurs chez le nouveau-né à terme.

- L'étude des angles :

  • angle talon - oreille (figure 2) : le bébé en décubitus dorsal, membres inférieurs mis en extension dans l'axe du tronc, on fléchit les cuisses sur le bassin pour élever les talons à la verticale puis vers l'oreille de l'enfant. Cet angle est de 90° chez le nou-veau-né à terme.
  • angle poplité (figure 3) : le bébé est en décubitus dorsal. Il faut fixer les deux genoux de part et d'autre de l'abdomen puis ouvrir les jambes sur les cuisses. Angle de 90° chez le nouveau-né.
  • dorsi-flexion pied (figure 4) : la jambe est maintenue en extension, pied fléchis sur la jambe, angle 0 à 20° chez le nouveau-né à terme.

- Le signe du foulard (figure 5)

- Retour en flexion de l'avant-bras : étendre l'avant-bras du nouveau-né qui est spontanément en flexion et évaluer le retour en flexion de celui-ci (côté présente, absent, retardé,...)

2.4.8.1.2 le tonus actif

Il est apprécié par l'évaluation de la gesticulation spontanée du bébé qui, éveillé, bouge bras et jambes en permanence.

- Redressement des membres inférieurs et du tronc (fig. 6)

Il faut maintenir l'enfant en position debout en soutenant le thorax sous les bras. Quand les plantes des pieds prennent appui sur la table d'examen, on observe une contraction puis-sante des membres inférieurs en extension, puis du tronc. On assiste à une contraction active des fléchisseurs du cou dans le redressement d'arrière en avant et à une contraction active des extenseurs du cou dans le redressement d'avant en arrière.

2.4.8.2 Les Réflexes Primaires

- Succion - déglutition (fig. 7)
On apprécie la force, le rythme et le synchronisme.

- le grasping des doigts (fig. 8)
La stimulation palmaire par le doigt de l'examinateur entraîne une forte flexion des doigts qui se referment sur l'objet stimulant.
Quand la contraction est puissante, il est possible de soulever l'enfant ainsi aggripé du plan du lit. (réponse à la traction). (fig. 9)

- Réflexe de Moro (fig. 10)
Soulever légèrement les épaules du plan d'examen en tirant le bébé par les mains. Lorsque les mains sont lâchées, le réflexe est déclenché par un changement d'angulation de la tête et du tronc :

  • extension - abduction des bras,
  • ouverture des mains,
  • cri,
  • puis flexion adduction des bras

- Allongement croisé (fig. 11)
Stimuler un pied en frottant la plante, le membre inférieur maintenu en extension. La réponse obtenue à l'autre membre inférieur :

  • extension après un rapide mouvement de retrait en flexion,
  • éventail des orteils,
  • adduction portant le pied "libre" sur pied stimulé.

- Marche automatique (fig. 12)
L'enfant maintenu debout, légèrement penché ébauche alors des pas de marche en po-sant le talon d'abord, s'il est à terme.

- Réflexe des points cardinaux
Quand on chatouille le pourtour des lèvres du bébé avec les doigts, celui-ci va tourner la tête du côté stimulé.

- Enfin, on notera avec soin l'intensité du cri, de même que son caractère aigu ou non :

  • on recherche une paralysie du VII (après forceps prenant la région mastoï-dienne) qui peut ne se révéler qu'au cri en mettant en évidence une asymétrie des lèvres avec non affaissement de la commissure labiale du côté atteint.
  • on recherche aussi l'existence de trémulations voire de convulsions qui peuvent traduire un problème métabolique (hypoglycémie, hypocalcémie,...).
2.4.8.3 Efficience De La Sensorialité

- Vision
Le bébé est attiré par la lumière douce, tournant la tête vers celle-ci.
On note un début de poursuite oculaire quand on parvient à capter son attention par la vision d'un objet de couleur contrastée (ex. cible noir blanc, visage,....)

- Audition : le nouveau-né réagit au bruit, à la voix.

- Réaction gustative :

  • amer : grimace,
  • sucré : s'apaise, se calme.

- Perception, contact : réceptivité de la peau aux stimulations tactiques (caresses, pi-qûres,...)

2.4.8.4 Comportement Relationnel

On apprécie :
- les états de veille et de sommeil,
- les degré de vigilance,
- les capacités d'adaptation (reconnaissance, accoutumance à l'environnement),
- les capacités d'échange,
- les manifestations de colère.

2.4.9 Le dépistage de certaines maladies métaboliques

2.4.9.1 de façon systématique en France, on dépiste :

- la phénylcétonurie (dosage de la phénylalaninémie),
- l'hypothyroïdie congénitale (dosage de la TSH).
- l'hyperplasie congénitale des surrénales (dosage de la 17 OH progestérone).

2.4.9.2 dans certains départements :

- la mucoviscidose (dosage de la trypsine immuno-réactive).
- la drépanocytone.

 Le prélèvement de sang se fait sur un papier buvard.

3 Conclusion

L'examen du nouveau-né est donc un temps primordial. Il doit faire participer les parents.

Il permet de rechercher une anomalie somatique, neurologique mais il permet aussi d'évaluer les performances du tout petit.

Cet examen doit tenir compte des phases d'éveil, de la disponibilité du bébé ; il doit être complet mais court et donc doit être répété si besoin.

L'examen du nouveau-né fait durant la première semaine est reporté dans le carnet de santé et permet de remplir le certificat obligatoire des 8 premiers jours de vie.

Développement psychomoteur et examen neurologique de l'Enfant

Sylviane Peudenier

1. Décrire les principales étapes des acquisitions psycho-motrices de l'enfant de 0 à 3 ans.  
2. Décrire l'évolution des réflexes archaiques.
3. Décrire le développement de la motricité globale chez l'enfant de 0 à 3 ans.
4. Décrire l'évolution de la préhension chez l'enfant.
5. Décrire les grandes étapes de l'acquisition du langage au cours des trois premières années de vie.
6. Quelles sont les trois questions essentielles à analyser devant la constatation d'un retard psychomoteur ?

Objectifs pratiques  

1. Définir les principales étapes du développement psychomoteur de l'enfant :

  • de 0 à 3 ans
  • de 3 à 6 ans
  • de 6 à 10 ans.

2. Effectuer un test de Denver chez un nourrisson.  

Introduction

Pouvoir affirmer, lors des visites systématiques de la première enfance, qu'un enfant se développe normalement est d'une grande importance. Le retard des acquisitions psychomotrices est le handicap le moins bien reconnu par les médecins. Il ne pourra être mis en évidence que si le médecin a acquis, pour chaque âge, des repères précis de développement normal. Le but de ces examens systématiques est double: le plus souvent, il permet de rassurer les parents sur le développement neurologique de leur enfant. Parfois, il met en évidence un décalage des acquisitions psychomotrices, associé ou non à des signes neurologiques. Le dépistage d'anomalies du développement cérébral tôt dans la vie de l'enfant, permet une prise en charge précoce de l'enfant et sa famille.

1 Modalités de l'examen clinique

L'évaluation du développement demande une coopération parfaite de l'enfant. Il faut donc le laisser en sécurité, dans les bras de sa mère, et commencer l'examen par des jeux en réservant l'examen neurologique plus formel et l'examen général à une phase ultérieure de la consultation.

1.1 L'examen du nourrisson (0 à 3 ans)

1.1.1 Technique d'examen :

Il faut d'abord dialoguer avec les parents, les interroger sur les antécédents familiaux, sur le déroulement de la grossesse, sur les conditions de l'accouchement, les questionner sur les réalisations de l'enfant. En s'aidant du carnet de santé, les principales étapes du développement sont repérées dans le temps (par exemple, sourire-réponse à 2 mois, tenue assise sans appui à 7 mois, marche à 12 mois...). Pendant tout le temps de l'entretien, l'enfant est observé, puis le premier contact commence sous forme de jeu, alors que l'enfant est toujours habillé et "en sécurité" sur les genoux de sa mère. La pièce d'examen doit être calme, sans intervention extérieure pendant le temps de la consultation. L'examinateur utilise un petit matériel (cubes en bois, une pièce de monnaie, une bouteille contenant une pastille colorée, un imagier). Ce matériel, préparé à l'avance, est toujours le même pour que l'examinateur en ait l'habitude et puisse comparer les réactions des enfants. A partir de l'âge de 6 mois, l'examen commence par une phase de mise en confiance, par exemple en proposant à l'enfant un cube coloré posé devant lui, sur la main de l'examinateur. Lorsque le nourrisson a accepté de le prendre, de le manipuler, puis à partir de 8-10 mois d'établir un échange avec l'examinateur, l'évaluation peut commencer.

L'observation porte également sur :
(1) comment l'enfant fixe-t-il ? suit-il du regard dans les deux directions ? Essaie-t-il d'attraper l'objet qu'on lui propose ? Le mouvement est-il libre, précis ? Utilise-t-il indifféremment la main droite et la main gauche ? (une latéralisation à cet âge est anormale et doit faire rechercher une anomalie). La saisie des petits objets se fait-elle par une pince doigt-paume, doigt-pouce ou pouce-index ?

(2) Le contact avec le nourrisson est-il bon ? sourit-il, s'intéresse-t-il à ce qui l'entoure ou, au contraire, reste-t-il indifférent, passif ? Peut-on capter son attention de façon durable ou existe-t-il une hyperactivité ?

(3) Evaluation de l'audition : la réaction aux stimuli auditifs (voix, clochette) est repérée, chez le nouveau-né, par une modification de la succion, l'ouverture des yeux ou de la bouche, une brève immobilisation. Chez le nourrisson, la réaction au bruit est plus facile à repérer, une rotation de la tête vers la source sonore est observée à partir de l'âge de trois mois.

1.1.2 Les dates à retenir

Elles sont indiquées sur le test de Denver. Les principales acquisitions de l'enfant y sont classées en quatre rubriques : motricité globale, motricité fine, langage et contact social. Le test de Denver est facile à utiliser chez le nourrisson puis chez l'enfant, jusqu'à 5-6 ans. Il permet une évaluation rapide (possible au cours d'une simple consultation) et sert ainsi au dépistage.

Dans la réalisation de chaque épreuve, il existe une variation individuelle normale, indiquée dans le tableau par la taille du rectangle. Le rectangle débute à l'âge auquel 25% de la population passe l'épreuve, le tiret correspond à l'âge ou 50% de la population passe l'épreuve, le début du grisé correspond à 75% de la population et la fin du rectangle à 90% de la population. Avant d'examiner l'enfant, il faut tirer un trait au niveau de son âge chronologique. Les épreuves proposées sont celles situées directement à gauche de ce trait, c'est- à -dire celles que réussissent 90% des enfants de son âge, puis des épreuves plus "difficiles", correspondant à son âge chronologique, sont proposées. Le test de Denver considère acquises les performances désignées par ®, rapportées par les parents au cours de l'interrogatoire. A la fin de l'évaluation, on peut déterminer si l'enfant a des acquisitions en rapport avec son âge chronologique ou si elles sont décalées et dans ce cas, chiffrer le retard.
Certains repères chronologiques sont importants à retenir :
- 0 à 3 mois : sourire-réponse, suivi de l'objet dans les deux directions de l'espace, tenue de la tête, ouverture des mains.
- 3 à 6 mois : intérêt pour les objets, rire, gazouillis, l'évolution du tonus axial et périphérique se poursuit selon un gradient céphalo-caudal

Tête ----> Cou ------> Ceinture scapulaire ----> Tronc ------> Ceinture pelvienne

  Membres supérieurs    Membres inférieurs

- 6 à 9 mois : le nourrisson porte les objets ou un gâteau à la bouche, manipule les cubes d'une main dans l'autre, dit des bisyllabismes (ba-ba, ta-ta, pa-pa +), tient assis sans appui. Sur le plan comportemental, l'enfant quitte la période symbiotique où il ne se distingue pas de ce qui l'entoure, pour entrer dans la période dyatique où il se perçoit comme distinct de l'environnement et notamment de sa mère.
L'enfant est timide avec les inconnus, par exemple l'examinateur (notion d'angoisse de l'étranger), supporte mal la séparation avec sa mère. Il s'attache souvent à un objet (bout de tissu, peluche...) dont l'odeur, la douceur la chaleur rappelle certaines qualités maternelles et permettent de mieux tolérer la séparation, c'est "l'objet transitionnel". Cependant, les expériences de séparation prolongée ou répétée sans substitut maternel stable peuvent conduire à un état dépressif grave ou "dépression anaclitique du nourrisson". 
- 9 à 12 mois : évolution de la pince pour saisir les petits objets ou la pièce de monnaie (8-10 mois : pince pouce-doigt, 10-13 mois : pouce pouce-index), notion de permanence de l'objet (acquise vers 10 mois) : l'enfant va chercher l'objet caché sous un tissu ou dans la main de l'examinateur, l'enfant tient debout contre appui, s'assoit et se met debout seul. La compréhension verbale, plus encore que le langage, évoluent. L'enfant comprend certaines séquences reliées à une situation vécue ( au revoir, bravo, donne), dit "papa" "maman" de façon dirigée.
- 12 à 18 mois : le langage apparaît: d'abord sous la forme de mots séparés, "mot phrase" qui peut prendre plusieurs sens, par exemple "maman" peut désigner la personne mais aussi le sac, les chaussures... de maman. Les mots sont ensuite groupés deux à deux. Développement de l'autonomie dans certains gestes (boire au verre, utilisation de la cuillère...), sur l'acquisition de la marche. L'enfant découvre son corps : il aime regarder son image dans le miroir (stade du miroir de J. Lacan), peut montrer son nez, bouche... à la demande.
-18 mois à 2 ans : poursuite de l'acquisition de l'autonomie, suit des ordres simples, habilité accrue dans la réalisation de tour de cubes, comprend comment sortir la pastille de la bouteille en la retournant. Pour atteindre son but, il passe progressivement de la solution empirique à la solution réfléchie. C'est la fonction "sémiotique" qui associe quelque chose de concret à un symbole.
- 2 à 3 ans : l'enfant est maintenant très autonome dans ses déplacements, se déshabille seul et commence à enfiler les vêtements. Acquisition de la propreté de jour. Commence à utiliser un crayon. Le langage s'enrichit, fait de courtes phrases, le "je" apparaît vers 3 ans. La fonction sémiotique avec l'accès aux symboles se renforce. Cela se traduit par l'imitation différée dans le jeu avec les poupées, les voitures..., les jeux symboliques comme l'avion représenté par deux bouts de bois croisés.

L'affectivité définie par le domaine des sentiments dans la relation à soi et aux autres a été particulièrement étudiée par les psychanalystes. Plusieurs stades ont été définis en fonction de la zone "érogène" prédominante et la fonction physiologique associée.
- Entre 0 et 18 mois, c'est le stade oral. Le plaisir est lié à l'alimentation et à ce qui l'accompagne, les conflits s'expriment autour de la nourriture engloutie, refusée...
- Entre 18 mois et 3 ans, c'est le stade anal qui symbolise la période d'éducation sphinctérienne avec ses plaisirs (celui de retenir ou d'expulser, d'être propre ou sale) et ses conflits avec l'entourage. Cette période est aussi celle de l'opposition de l'enfant face aux interdictions parentales qu'il découvre. Elle se traduit par le "NON", les colères parfois impressionnantes (se roule à terre, spasme du sanglot...).

1.1.3 Examen neurologique formel

Quelque soit l'âge de l'enfant, il faut tester :
- Le maintien postural : tient-il sa tête, son tronc ? Résiste-t-il à une poussée latérale, à la pesanteur lors des manoeuvres de suspension verticales ou latérales ( prise de l'enfant dans la main de l'examinateur en position ventrale, sur le coté droit puis gauche, sur le dos) ?
- Se retourne-t-il dans son lit, tient-il assis, debout ?
- Les membres sont-ils souples ou raides (il faut palper les tendons, les muscles au repos et lors de la mobilisation passive lente et rapide) ?
- Quelle est l'évolution du périmètre crânien, y-a-t-il un souffle intracrânien, l'enfant réagit-il au bruit, à la lumière ? Les réflexes ostéo-tendineux sont-ils présents ?
- Enfin, il ne faut pas oublier l'examen général, et en particulier la recherche d'une hépatomégalie, d'une splénomégalie (évoquant une maladie de surcharge), la recherche de taches cutanées (évoquant une phacomatose).

Particularités de l'examen neurologique du nouveau-né (cf. chapitre consacré au nouveau-né normal).

1.1.4 Cas particulier du grand prématuré

L'examen des réflexes archaïques est plus informatif chez le prématuré que chez l'enfant né à terme. Ils participent à l'évaluation du niveau de maturation de l'enfant.
Dans les premières semaines de vie, l'évaluation du grand prématuré doit tenir compte de l'immaturité cérébrale, et fait intervenir la notion d'âge corrigé, c'est à dire d'âge de l'enfant à partir du début de la grossesse.
Le "rattrapage" de développement avec les enfants nés à terme se fait le plus souvent entre le 3ème et le 6ème mois de vie. A la fin du deuxième semestre de vie, l'ancien prématuré doit accomplir les mêmes performances, aux mêmes dates, que l'enfant né à terme.

1.2 Examen du jeune enfant (3 à 6 ans)

C'est l'âge du dépistage des retards mentaux modérés et des troubles de la personnalité  Il est important de les repérer tôt dans la vie de l'enfant afin de conseiller les parents pour le début de la scolarité de l'enfant. Une intégration en maternelle est souvent possible. Par contre, il faut évaluer les capacités de l'enfant à entrer en primaire, parfois avec une aide adaptée, afin d'éviter les situations d'échecs, préjudiciables au développement de l'enfant.

1.2.1 Technique d'examen

L'examen de dépistage se fait, après mise en confiance de l'enfant. Il est très utile de demander à voir les réalisations faites à l'école maternelle. L'essentiel de l'évaluation repose sur le langage, le graphisme, l'autonomie dans les gestes de la vie courante.

Le comportement de l'enfant est observé pendant tout le temps de la consultation. Peut-il maintenir son attention ou, au contraire, passe-t-il sans arrêt d'une activité à l'autre. S'intéresse-t-il aux objets qu'on lui propose ou les jette-t-il immédiatement à terre ? Il est également important de se faire préciser sa capacité à construire un jeu seul ou avec les autres. A-t-il des jeux répétitifs (éteindre et allumer la lumière, tourner les robinets d'eau...) évocateurs de troubles de la personnalité.

1.2.2 Les dates à retenir

- Graphisme : de façon schématique, on peut retenir qu'un rond est réalisé vers 3 ans, une croix vers 3 ans 1/2, un carré sur démonstration vers 4 ans, un triangle vers 5 ans, un losange vers 6 ans (entrée en C.P.). Le dessin du bonhomme est également très utile : bonhomme têtard vers 3 ans 1/2-4 ans. Le bonhomme à 5 parties distinctes vers 4 ans-4 ans 1/2, puis il s'enrichit de détails. Le profil apparaît vers  6 ans. La latéralisation s'acquiert entre 3 ans 1/2 et 4 ans 1/2 pour la main et le pied.

- Langage : le langage devient riche et informatif à partir de 3 ans 1/2, les couleurs sont connues vers 4 ans, la sériation chronologique et en taille commence à être maîtrisée entre 4 et 5 ans.

- Autonomie : l'enfant de déshabille vers 3 ans, s'habille seul vers 4 ans 1/2-5 ans, y compris les boutons. Le noeud de lacets est acquis vers 6-7 ans.

- Affectivité-Intelligence : c'est l'âge de la pensée pré-opératoire, caractérisée par :

  • La curiosité, l'âge du Pourquoi ? qui traduit plus une recherche de règles et d'affirmations que d'explications. Tout à une raison d'être, même artificielle, le hasard n'existe pas (finalisme).
  • La pensée magique et l'animisme : chaque chose est vivante et douée d'intention bonne ou mauvaise. Parallèlement, se développe le sens moral par intériorisation des interdits parentaux , apparition du "surmoi".
  • L'intuition : "c'est comme ça",
  • L'égocentrisme : l'enfant n'est pas ouvert à la pensée des autres, les règles générales ne sont que les siennes propres.

Sur le plan affectif, c'est la période du complexe d'OEdipe. La découverte de la différence des sexes permet à l'enfant de se définir comme être sexué. Le plaisir est associé à la stimulation de la zone sexuelle (masturbation), le conflit existe avec le parent du même sexe qu'il perçoit comme un rival dans l'amour pour le parent de sexe opposé. Le conflit oedipien engendre "l'angoisse de castration" : l'enfant imagine que la fille a été privée de pénis par punition venant du père, d'où le nom de stade Phallique donné à cette période.

1.3 Examen de l'enfant de 6 -10 ans

L'évaluation de l'enfant plus âgé est plus difficile et requiert souvent la réalisation de tests standardisés qui ne peuvent être pratiqués que par des examinateurs entraînés (test de WPPSI, WISC, Benton...)

Une première approche, très comparable à celle de l'enfant de 3 à 6 ans, peut être effectuée. Le recueil des informations apportées par les réalisations scolaires est ici très important. Le comportement de l'enfant est évalué lors de la consultation mais aussi à la maison (d'après les parents), à l'école (d'après ses professeurs). L'enfant est maintenant capable de raisonnements logiques, il s'ouvre à l'extérieur : c'est l'âge de raison. Sur le plan affectif, les conflits antérieurs s'apaisent : c'est la phase de latence.
L'examen clinique neurologique somatique est proche de celui de l'adulte.

1.4 L'adolescence

Ce processus de passage de l'enfance à l'âge adulte prend souvent l'aspect d'une crise aiguë, difficile mais maturante.

Les transformations corporelles dotent l'adolescent d'un corps adulte, sexuellement compétent, d'où le nom de stade génital donné à cette période. La dissociation entre la maturité physiologique d'adulte et le statut social intermédiaire (il n'est plus un enfant mais pas encore un adulte) entraîne une réactivation de tous les conflits antérieurs et une fragilité à la dépression.

Le jeune doit définir une nouvelle relation à soi-même (narcissisme) pour apprivoiser ce corps transformé, une nouvelle relation aux autres :
- quitter le milieu familial réactive les angoisses d'abandon et les attitudes d'opposition aux parents. L'identification à un personnage extra-familial comme un chanteur à la mode prend le relais de l'identification parentale.
- s'intégrer à la société ce qui passe souvent par l'intégration à un groupe de pairs (phénomène de bandes) pour s'autonomiser et se différencier du modèle social adulte, assumer son état d'homme ou de femme sexuellement mature en découvrant les émois amoureux.

Le mode de raisonnement évolue, il devient hypothético-déductif, capable de considérer le réel comme une facette du possible. L'adolescent recherche les règles universelles, est attiré par les théories (parfois éloignées de la réalité), est capable de réintroduire les sentiments dans la pensée (d'où les passions irraisonnées aussi intenses que fugace). La logique ne s'applique pas seulement aux faits concrets mais aussi aux idées, aux notions abstraites (philosophie, éthique...). C'est la période des opérations formelles. Ce changement s'opère habituellement en classe de 4ème, au moment de la notion mathématique de variable et d'équations avec inconnues.

L'examen neurologique somatique est comparable à celui de l'adulte

2 Conduite à tenir lors de la constatation d'un retard du développement psychomoteur

Trois questions essentielles doivent être analysées devant la constatation d'un retard psychomoteur.

2.1 Le retard est-il certain ?

Soit le retard est majeur, et il est aisé de l'affirmer.
Soit le retard est modéré ou l'enfant très jeune. Il est alors nécessaire de revoir l'enfant un à deux mois plus tard avant de conclure qu'il existe un retard psychomoteur. Après ce deuxième examen, le retard de l'enfant sera abordé et analysé avec ses parents.

2.2 Le retard est-il homogène ?

Le plus souvent, l'enfant présente un retard homogène dans toutes les rubriques du test (motricité globale, motricité fine, langage, contact social).
Parfois, il existe un retard hétérogène. L'enfant échoue exclusivement certaines épreuves du test, par exemple :
- Un retard moteur isolé évoque une pathologie musculaire, du nerf périphérique, ou plus rarement de la corne antérieure.
- Un retard isolé de langage doit faire rechercher une surdité. Un audiogramme et, éventuellement un test des potentiels évoqués auditifs, doivent être effectués si l'enfant n'a pas acquis le langage à l'âge de trois ans.
- Une grande dispersion dans les acquis de l'enfant, souvent associée à des difficultés comportementales évoque un trouble de la personnalité.
- Une mauvaise manipulation des objets, parfois associée à des mouvements anormaux des yeux doit faire rechercher un trouble grave de la vision.

2.3 Le retard est-il nouveau ?

Il s'agit de la question la plus difficile mais aussi de la plus importante. Elle nécessite un interrogatoire très précis des parents, en s'aidant des repères de développement notés sur le carnet de santé (les examens systématiques doivent être remplis avec objectivité et sans complaisance).
Le plus souvent, le retard est ancien. L'enfant fait des acquisitions lentes mais régulières évoquant une pathologie fixée.
L'existence d'une période de parfaite normalité (notion d'intervalle libre) précédant l'apparition des troubles évoque une pathologie évolutive.
Cependant, les pièges sont nombreux. Par exemple, une encéphalopathie fixée modérée peut se compliquer secondairement d'une épilepsie et peut ainsi être prise pour une pathologie évolutive. De même, certaines pathologies évolutives ont un intervalle libre extrêmement bref, difficile à repérer.

Conclusion

L'appréciation du niveau de développement psychomoteur de l'enfant est relativement aisé si le médecin en prend l'habitude, c'est-à-dire s'il le fait de façon très systématique. Le résultat de cette approche clinique est important puisqu'il permet des actions d'aide à l'enfant handicapé.

Examen de l'oeil et de la vision

Michel Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2


mis à jour le 2 janvier 1999

Questions d'examen
Objectifs pratiques

1 Examen de la vision au cours de la première année de vie
1.1 Chez le nouveau-né
1.2 Au cours du premier trimestre
1.3 Pendant le deuxième trimestre
1.4 Pendant les troisième et quatrième trimestre
1.5 Une indifférence complète...
2 Mesure de l'acuité visuelle
2.1 Chez un enfant d'âge scolaire

2.2 Chez un enfant plus jeune
2.3 L'acuité visuelle subjective de près
2.4 L'acuité visuelle objective
3 Examen de la vision des couleurs
4 Dépistage du strabisme

4.1 Le test de la lampe de poche (Hirshberg)
4.2 Le test de Sarniguet-Badoche
4.3 Le test de l'écran
4.4 Le test de transillumination de Bruckner

Conclusion


Questions d'examen

1. Décrire les méthodes permettant d'apprécier la vision chez l'enfant de 0 à 1 an.
2. Décrire les manoeuvres permettant de dépister un strabisme et une amblyopie strabique.

Objectifs pratiques

1. Etudier le comportement visuel de l'enfant de 0 à 1 an
2. Effectuer les manoeuvres permettant de dépister un strabisme latent et une amblyopie strabique

Les déficiences sensorielles, privant l'enfant de relations normales avec son environnement, entravent son développement mental et doivent être corrigées donc dépistées le plus tôt possible.
C'est un des objectifs essentiels des 20 examens systématiques prévus pour la protection de l'enfant de 0 à 6 ans et en particulier des certificats médicaux obligatoires aux 9ème et 24ème mois et des examens pratiqués à l'entrée à l'école maternelle (3-4 ans) et avant l'entrée à l'école élémentaire (5 ans) (cf chapitre examens systématiques).

1 Examen de la vision au cours de la première année de vie

1.1 Chez le nouveau-né

Nous ne reprendrons pas l'examen de la vision à la naissance (cf. examen du nouveau-né) mais nous rappellerons cependant que l'examen est souvent difficile. Il faut éviter d'essayer d'ouvrir les paupières trop brutalement, ce qui entraîne un réflexe de fermeture. On peut obtenir l'ouverture spontanée soit en faisant téter l'enfant, soit en le mettant en position verticale. Ce n'est qu'exceptionnellement qu'il faudra avoir recours à l'utilisation de deux petits bâtonnets recouverts de coton, pour maintenir les paupières écartées et plus exceptionnellement encore, qu'il faudra utiliser un blépharostat. Nous rappellerons également qu'à la naissance existent :
- un réflexe photo-moteur qui doit être vif et rapide,
- un réflexe d'attraction du regard vers la source lumineuse douce.
- un réflexe de fermeture des yeux à l'éblouissement avec rejet de la tête en arrière, qui n'est à rechercher qu'en cas d'absence de réflexe photo-moteur.
- une instabilité oculaire.

L'examen sera complété par :
- l'appréciation de la position des globes mais un strabisme à cet âge n'a pas de valeur,
- la manoeuvre des yeux de poupée japonaise, (cf nouveau-né),
- l'examen du segment antérieur de l'oeil, c'est-à-dire de la cornée, de l'iris, avec un ophtalmoscope, appareil que devrait avoir tout médecin ayant des enfants dans sa clientèle. Cet appareil permet, de plus,  d'obtenir la lueur papillaire lors de l'éclairage de face (cf. nouveau-né).
- un oeil larmoyant au cours des premiers mois, sans anomalie de taille des globes oculaires, doit faire suspecter une obstruction du canal lacrymal, nécessitant le passage d'une sonde.
Toute anomalie de taille ou d'aspect doit être précisée par un spécialiste, certaines [cataracte (opacité du cristallin), glaucome (hypertension intraoculaire)] nécessitant un traitement d'urgence.

1.2 Au cours du premier trimestre

Le développement de la vision et des nerfs moteurs de l'oeil font disparaître le phénomène des yeux de poupée tandis qu'apparaissent :
- le réflexe de fixation : les yeux fixent un objet de préférence rouge, bien éclairé, situé à 80 cm de l'enfant ;
- le réflexe de convergence : les yeux convergent lorsqu'on rapproche l'objet de l'enfant, puis
- le réflexe de poursuite : les yeux de l'enfant suivent l'objet qu'on déplace latéralement et l'angle de poursuite devient de plus en plus important. Il se complète alors par :
- le réflexe conjugué de la tête et des yeux, lors du déplacement latéral de l'objet les yeux et la tête tournent pour suivre l'objet.

Rappelons qu'en maintenant la tête de l'enfant, il est capable d'ébaucher des gestes de préhension (motricité libérée de Grenier).
A cet âge, il n'est pas possible d'évaluer cliniquement l'acuité visuelle de l'enfant.
Toute déviation bloquée des yeux doit être examinée par un spécialiste.
Toute indifférence à la lumière et à l'entourage est suspecte.

1.3 Pendant le deuxième trimestre

La synergie oculo-céphalique se précise, les mouvements binoculaires sont stabilisés. Toute déviation des yeux est déjà pathologique à 4 mois. L'enfant réagit mieux à la couleur rouge vif qu'aux autres couleurs mais son acuité visuelle, difficilement mesurable, est encore médiocre : 1/30ème à 1/10ème.

1.4 Pendant les troisième et quatrième trimestre

La coordination  praxique oeil-main se développe. La préhension manuelle s'accompagne d'une convergence. La vision binoculaire se développe. L'acuité visuelle est estimée à 2/10ème. Entre 9 et 11 mois, on juge le comportement de l'enfant en particulier par le test de préhension de la pastille qui nécessite une participation visuelle.

1.5 Une indifférence complète à la lumière et à l'entourage est le signe d'une cécité centrale, mais la non-survenue de l'évolution précédemment décrite doit faire rechercher un trouble oculaire qui peut s'extérioriser, de plus :
- par une position anormale et des mouvements anormaux, incoordonnés des globes oculaires, voire un nystagmus,
- par le signe digito-oculaire de Franceschetti : l'enfant ayant une acuité visuelle très faible, cherche à provoquer des phosphènes, seules sensations lumineuses qu'il puisse avoir, en comprimant son oeil avec son poing ou en enfonçant son pouce entre l'oeil et le rebord orbitaire,
- par le signe de l'éventail ou de l'essuie-glace : l'enfant promène sa main régulièrement devant les yeux, d'un mouvement latéral pour voir ombre et lumière se succéder.

2 Mesure de l'acuité visuelle

La mesure de l'acuité visuelle constitue l'examen de base de l'étude de la vision : c'est le mètre étalon de l'efficience visuelle. L'acuité visuelle subjective est cependant une fonction complexe comportant la perception des détails, la reconnaissance des formes, l'interprétation des images. Elle comporte plusieurs étapes : la formation de l'image sur la rétine, sa transmission au cortex, son intégration et sa reconnaissance au niveau de l'encéphale et enfin son expression par le sujet.
On utilise en clinique l'acuité résolutive basée sur le "minimum separabile", c'est-à-dire l'ouverture angulaire minimale capable de donner des images susceptibles d'être séparées par la rétine.

L'acuité visuelle se mesure par l'analyse des détails d'une image appelée optotype et consiste à mesurer l'image rétinienne de cet optotype placé à une certaine distance. On sait en effet que la dimension de l'image rétinienne dépend de la dimension de l'objet et de la distance entre l'objet et l'oeil . En maintenant une distance fixe (5 mètres), il suffit de faire varier la dimension de l'image pour mesurer l'acuité visuelle.

L'optotype de référence est l'anneau brisé de Landolt dont la hauteur sous-tend un angle de 5 minutes, le détail caractéristique un angle de 1 minute, l'épaisseur de l'anneau étant également de 1 minute. Si le détail caractéristique (angle de 1 minute) est reconnu à une distance de 5 mètres, l'acuité visuelle est égale à 1 ou 10/10ème.
Si le détail est vu :
- sous un angle de  2 minutes, l'A.C = 0,5 (5/10ème),
- sous un angle de 10 minutes, l'A.C = 0,1 (1/10ème).

Le E de SNELLEN présente les mêmes caractéristiques :

Pour faire passer le test, on habitue d'abord l'enfant en utilisant la vision binoculaire, puis ensuite, on teste séparément l'oeil droit et l'oeil gauche en masquant l'oeil du côté opposé par une lunette en verre opaque ou un objet opaque (cuillère). Il convient également de présenter l'objet à reconnaître avec un bon contraste sur le fond et dans ce sens, un rétro-éclairage est bénéfique.
Il faut également tenir compte de l'éclairage de la pièce (luminance) qui joue sur le diamètre pupillaire. Un éclairage moyen est le plus favorable.

2.1 Chez un enfant d'âge scolaire

On utilise l'échelle de Monoyer constituée par des lettres d'imprimerie dont la dimension globale est 5 fois la dimension du détail caractéristique qui sous-tend lui-même, un angle de 1 minute pour l'acuité unité. L'épaisseur des traits est le cinquième de la hauteur de la lettre.
Les lettres sont habituellement présentées en tableau groupant, outre la ligne correspondant à l'acuité visuelle unité, différentes lignes de caractères plus grands ou plus petits, correspondant aux acuités visuelles plus basses ou plus grandes, dans une progression arithmétique ou mieux, logarithmique.

2.2 Chez un enfant plus jeune

Pour tester l'acuité visuelle d'un enfant plus jeune qui ne connaît pas encore les lettres d'imprimerie, différents optotypes ont été proposés. Pour faciliter leur reconnaissance, une présentation isolée des différents tests est recommandable, ainsi que l'utilisation de la méthode d'appariement : l'enfant désigne l'objet qui lui est présenté en mettant le doigt sur l'image identique qu'il a devant lui. Cette méthode améliore beaucoup la reconnaissance car elle supprime toute expression verbale, facteur fréquent d'inhibition à cet âge. Ces test sont généralement présentés à 5 mètres. On peut les présenter à 2,50 mètres mais il faut alors diminuer de moitié l'acuité visuelle déterminée. On peut également, si on ne dispose pas de locaux suffisants, utiliser la réflexion dans une glace, mais l'image est alors inversée.

2.2.1 Les tests directionnels

Ils présentent un détail mesurable en minute d'arc qui permet l'orientation de l'optotype tout entier. Il y en a trois principaux : l'anneau brisé de Landolt, le E de Snellen dont le détail caractéristique est l'écart entre deux branches, la main de Sjögren que l'on présente dans différentes positions et l'enfant doit indiquer par la position de sa main l'orientation qu'il voit. La latéralisation imparfaite de l'enfant jeune est une cause d'erreur dans l'interprétation de ces tests directionnels.

2.2.2 Les tests géométriques

Ils ont des critères qui se rapprochent de ceux exigés pour les optotypes lettres et ne sont pas dénués d'intérêt. Les principaux sont :
- l'échelle de Dor avec seulement deux images (carré et cercles pleins, de couleur noire),
- les optotypes géométriques de Casanova avec quatre symboles de surface équivalente (cercle, carré, étoile, croix),
- les images fermées de Feooks avec trois symboles (carré, cercle, triangle) qui  sont les premières figures géométriques reconnues par les enfants. On a reproché à ces tests de ne pas susciter suffisamment l'intérêt de l'enfant.

2.2.3 Les tests lettres simplifiées

Shéridan et Pugmire ont montré que certaines lettres symétriques pouvaient être utilisées assez facilement pour la détermination de l'acuité visuelle (O X V T H et A U). Les lettres sont présentées dans un ordre déterminé correspondant à des acuités visuelles de plus en plus fortes sur des cartons reliés par une spirale. Cinq lettres pour les enfants de 4 ans ; 7 pour les enfants plus âgés. L'enfant a devant lui un carton et doit indiquer du doigt la lettre qui lui est présentée à 5 mètres (appariement). Les acuités visuelles vont de 0,1 à 2 , ce qui permet une présentation à mi-distance pour les enfants très jeunes ; ce test a été adapté aux normes internationales (centimètres et mètres) par Delthil et Sourdille avec la collaboration de l'INSERM. Le E de Snellen , l'anneau brisé de Landolt et le test de Shéridan INSERM  ont pu être comparés et il a été ainsi démontré que le test de Shéridan INSERM était le meilleur. C'est donc celui qui doit être employé. Il est très facilement appliqué aux enfants de 5 ans et même de 4 ans, mais n'est accepté que par un pourcentage d'enfants doués de 3 ans.

2.2.4 Les tests images

En raison des difficultés pour les jeunes enfants de reconnaître les tests précédents, différents auteurs ont proposé de recourir à des tests images d'objets usuels. Ce sont les images de Rossano Weiss, les images de Casanova (inspirées du folklore espagnol), les images de Madame Pigassou réalisées à partir de dessins d'enfants d'écoles maternelles représentant un enfant courant, une maison, une voiture, le soleil, une fleur, un arbre, un oiseau. Ce test est offert en présentation très variée : tableau rétro-éclairé, tableau sur plaque d'opaline transportable, petites plaques d'opaline pour l'appariement. C'est un des tests les plus fiables. On peut lui reprocher la densité optique différente des images (maison = carré blanc cerné de noir ; soleil = tache noire).
Les images du "test animaux" visent à remédier à ce défaut en présentant des images dont le détail caractéristique est périphérique.

2.2.5 D'autres tests peuvent être utilisés chez les enfants plus jeunes, tels que les jouets calibrés et les balles calibrées de Shéridan. Mais ces tests sont de réalisation plus difficile, peu réalisés en pratique courante car n'ayant pas de relation établie avec les ototypes lettres et étudiant essentiellement la vision périphérique et non la vision centrale.

2.3 L'acuité visuelle subjective de près

Elle se mesure avec des optotypes de même type  placés à 60 centimètres ; cette mesure présente en général moins d'intérêt que la mesure de l'acuité visuelle de loin : les sujets myopes non corrigés ne sont pas gênés par la vision de près et les jeunes sujets, très souvent hypermétropes, ont habituellement une telle faculté d'accommodation qu'ils compensent aisément leur défaut. Cette mesure est cependant très importante pour les déficients visuels bilatéraux puisqu'elle donne une idée plus précise de ce que le sujet voit réellement et juge l'aptitude de l'organe visuel pour un travail déterminé. Elle conditionne le choix de la méthode d'éducation. Il est facile de comprendre qu'elle peut alors être réservée à des centres spécialisés.

2.4 L'acuité visuelle objective

La difficulté d'obtenir une réponse subjective verbale ou gestuelle, au-dessous de 3 ans, a conduit à tenter d'utiliser des méthodes objectives de mesure basées sur des réflexes visuels parmi lesquels, les réflexes de poursuite d'objets mobiles sont les plus commodes à observer. Néanmoins, ils ne peuvent être appliqués en dépistage chez le médecin généraliste ou le pédiatre,il est nécessaire pour cela d'adresser l'enfant à l'ophtalmologiste.
Certaines méthodes d'électrophysiologie : électrorétinogramme et potentiels évoqués visuels permettent une exploration plus stricte de la fonction visuelle mais ils sont réservés aux centres hautement spécialisés pour préciser le degré d'atteinte d'une vision reconnue déficiente.

3 Examen de la vision des couleurs

Les troubles de la vision des couleurs sont fréquents mais heureusement relativement mineurs. Il s'agit le plus souvent de maladies à transmission récessive liée à l'X touchant 8 % des sujets masculins et environ 0,5 % des sujets féminins. La plus courante est le daltonisme. Le dépistage des troubles de la vision des couleurs se fait par des atlas dans lesquels les planches sont faites de pastilles de différentes couleurs avec, au milieu, une ligne sinueuse ou différentes images, que le sujet doit reconnaître (tests d'Ishihara, de Hardy-Hand-Ritler, de Gardiner).

Le Farnsworth est un test différent nécessitant le classement dans un ordre déterminé, de 15 pastilles de couleurs très légèrement différentes qu'il convient de classer à partir d'une pastille de référence, de couleur bleue, les suivantes étant de plus en plus violacées et rosées.  

4 Dépistage du strabisme

Le strabisme mérite une mention spéciale par sa fréquence, (3 à 4 % des enfants au cours des 5 premières années de vie sont atteints d'un strabisme) et la nécessité d'un dépistage et d'un traitement précoces pour prévenir les complications.

Certains strabismes sont évidents, d'autres sont intermittents ou latents et peuvent être mis en évidence par des tests de complexité croissante.

Il faut d'abord éliminer les faux strabismes par épicanthus (3ème paupière interne ou hypertélorisme (écartement des orbites).

4.1 Le test de la lampe de poche (Hisrshberg)

L'enfant étant assis sur les genoux de sa mère, on éclaire les yeux de l'enfant avec une lampe de poche placée à 80 cm. Normalement, le reflet de la lumière se situe très lègèrement en dedans du centre de la cornée (angle Kappa) et est symétrique lorsque l'enfant fixe la lumière. En cas de strabisme, le reflet sur l'oeil dévié sera déplacé. C'est le test le plus simple mais il dépiste trop de suspects.

4.2 Le test de Sarniguet-Badoche

Ce test utilise des lunettes dont les verres sont opaques (ou obturés) dans le champ nasal. L'enfant regarde droit devant lui et la limite de l'opacité déborde sur la pupille de chaque côté chez l'enfant normal. Chez l'enfant atteint de strabisme, l'opacité déborde sur la pupille (strabisme convergent) ou ne l'atteint pas (strabisme divergent). La dimension des lunettes doit varier avec l'âge de l'enfant et chez certains enfants, il est difficile de placer les lunettes et de faire fixer un objet.

4.3 Le test de l'écran

L'enfant est invité à fixer un objet lumineux situé à un mètre. L'opérateur obture un oeil au moyen d'un écran (carte, cuillère en bois, etc...) ou plus simplement chez les jeunes enfants, avec le pouce de la main fixée sur le crâne. L'écran est successivement placé d'un côté et de l'autre et on note à ce moment là :
- premièrement l'oeil découvert : ou bien cet oeil garde sa position et continue à fixer l'objet, il s'agit d'un enfant normal ; ou bien cet oeil se déplace pour prendre la fixation et il s'agit alors d'un strabisme.
- deuxièmement, l'oeil masqué est découvert : s'il ne bouge pas lorsqu'il est découvert, ceci veut dire qu'il fixait normalement l'objet, il y a orthophorie (équilibre oculomoteur parfait). S'il se déplace pour reprendre la fixation il y a hétérophorie. C'est le strabisme.

4.4 Le test de transillumination de Bruckner

Ce test nécessite un ophtalmoscope ; le test consiste à observer à un mètre de distance l'aspect de la lueur pupillaire dont la teinte varie suivant la position du fond d'oeil qui reçoit le faisceau lumineux. Normalement le faisceau lumineux doit tomber sur la macula et donner une lueur gris-rose soutenue. S'il s'agit de la pupille, la teinte est rose clair et si le faisceau tombe sur la rétine, la pupille s'éclaire d'orange ou de rose. Cette technique nécessite une bonne expérience et en pratique relève de l'ophtalmologiste ; elle permet en outre de mettre en évidence certaines lésions organiques (opacité du cristallin, hémorragie, décollement rétinien, tumeur, atrophie optique ou choroïdienne).

Tout strabisme dépisté doit être traité précocement pour éviter les complications. Ces complications sont :
- d'une part, le développement d'une correspondance rétinienne anormale et d'une fixation excentrique, tentative imparfaite pour établir un certain degré de vision binoculaire. Cette complication, d'autant plus ancrée que le strabisme évolue depuis plus longtemps, constitue une difficulté parfois insurmontable pour la guérison complète du strabisme ;
- d'autre part, l'amblyopie fonctionnelle de l'oeil dévié par un non développement ou une régression de l'acuité visuelle centrale du côté dévié et la neutralisation cérébrale d'une image pour éviter la diplopie.

Deux tests simples permettent de dépister l'amblyopie fonctionnelle strabique :
- le test de l'occlusion alternée ou test d'échappement. L'occlusion d'un oeil puis de l'autre est bien acceptée lorsqu'il existe une bonne acuité visuelle des deux côtés. S'il existe une amblyopie, l'enfant réagira vivement à l'occlusion du bon oeil alors qu'il n'aura aucune réaction lors de l'occlusion de l'oeil amblyope.
- manoeuvre droite-gauche avec les lunettes à écran binasal. La manoeuvre consiste à déplacer alternativement de la droite vers la gauche, puis de la gauche vers la droite, un jouet de fixation devant les yeux d'un enfant porteur de lunettes à écran nasal ;

  • si l'enfant a une bonne vision des deux yeux, il changera automatiquement d'oeil fixateur, sans déplacer la tête lorsque l'objet se déplacera d'un côté et de l'autre ;
  • s'il existe une amblyopie relative d'un oeil, l'enfant gardera plus ou moins  longtemps la fixation avec son bon oeil, en effectuant  une rotation de la tête et l'importance de cette rotation est en relation directe avec l'importance de l'amblyopie,
  • si l'amblyopie est profonde, l'enfant maintiendra constamment la fixation avec le bon oeil, effectuant une rotation non seulement de la tête, mais aussi du corps pour suivre l'objet, réalisant ainsi le "signe de la toupie".

Ces deux procédés permettent l'appréciation de la présence et du degré de l'amblyopie avant l'âge où il est possible de déterminer l'acuité visuelle qui, comme ceci vient d'être exposé, ne se situe guère avant deux ans.

C'est donc entre 6 et 9 mois qu'un strabisme reconnu doit être traité. Il faut se garder de dire que le trouble oculaire s'arrangera avec l'âge.

Le rétablissement de la vision binoculaire est entrepris par la pose de prismes de correction pour lesquels beaucoup de progrès ont été réalisés. Enfin, le traitement chirurgical apparaît actuellement comme un traitement complémentaire et terminal. Il faut en effet continuer à surveiller l'enfant pour éviter les rechutes ou les récidives, pour éviter une correction imparfaite qui maintiendrait une déviation légère ou au contraire pour éviter une surcorrection. Entrepris tôt, le traitement permet une guérison complète. C'est souligner l'importance de bien expliquer la maladie aux parents afin d'obtenir leur complète collaboration.

Quelques détails pratiques sont intéressants à connaître : ainsi l'enfant peut porter des lunettes très tôt, dès l'âge de 7 mois, à condition que les verres soient en matière organique incassable, que les montures prennent bien appui sur la base du nez et soient suffisamment importantes pour que l'enfant ne puisse tricher et regarder au-dessus des lunettes. Le port des lunettes doit être constant toute la journée. L'indication des verres de contact est discutée en particulier après opération de cataracte congénitale. De plus, chez l'enfant très jeune et chez le nourrisson, on ne peut utiliser que des lentilles molles (hydrophiles à 38%) qui doivent être retirées et stérilisées tous les soirs.  

Conclusion

Les anomalies visuelles par leur nombre, par leur retentissement sur le développement psychomoteur et mental, donc sur l'avenir de l'enfant doivent être recherchées par tout médecin prenant en charge la santé d'un enfant.

Le médecin doit s'habituer à utiliser un ophtalmoscope et inclure dans son examen général un certain nombre de tests simples :
- A la naissance, outre le dépistage des troubles sérieux dont certains réclament une thérapeutique rapide (glaucome, cataracte), il pourra, par l'examen oculaire, perfectionner l'examen neurologique du nouveau-né.
- Dans les jours et les semaines qui suivent la naissance, l'acquisition de nouveaux réflexes oculaires (fixation, convergence, poursuite oculaire puis oculo-céphalique) renseigne sur le bon développement du cerveau. Dès le 4ème mois, un strabisme éventuel sera dépisté.
- Au 9ème et 24ème mois, âge des certificats de santé, la convergence et la poursuite oculaire sont encore recherchées et complétées par le test de préhension et le test d'échappement de la main.
- A deux ans, les jouets calibrés, à 3 ans les tests images et après 4 ans les tests lettres simplifiées permettront d'apprécier l'acuité visuelle.

Pour le dépistage du strabisme : le test de la lampe de poche suivi du test de couverture, aisément pratiqué à la main sur un oeil puis l'autre, et le test des lunettes à obturation nasale qui permet également de dépister une amblyopie.

La difficulté de mesurer l'acuité visuelle avant 2 ou 3 ans explique que nous connaissons mal le développement de cette fonction qui de 1/10ème au cours des premiers jours de vie atteint vraisemblablement 14 à 20 dixièmes entre 4 et 6 ans.

La mesure de l'acuité visuelle permet de dépister des enfants présentant une amétropie (myopie, astigmatisme, hypermétropie) dont la correction peut rétablir une acuité visuelle normale.

Certains signes cliniques doivent attirer l'attention : céphalées frontales, blépharite en relation avec un astigmatisme ou une hypermétropie, comportement particulier de l'enfant lors de la marche, du travail ou du jeu.

Il faut tenir compte également du facteur familial et surveiller de près la vision lorsque les parents présentent eux-mêmes des troubles.

La loi désigne sous le terme de cécité, les acuités visuelles inférieures à 1/ 20ème pour les deux yeux.

On appelle malvoyants (autrefois amblyopes) les sujets dont la vue du meilleur oeil, après correction se situe entre 1/20è et 4/10è.

Certains enfants peuvent avoir une déficience visuelle relative entre 4 et 7/10è. Ils devront alors faire l'objet d'un examen par un ophtalmologiste. Les déficiences plus légères unies ou bilatérales doivent être surveillées pour dépister une aggravation, fréquente en cas de myopie.

Chez l'enfant de 2 à 4 ans, toute acuité n'atteignant pas 10/10è doit faire l'objet d'un nouvel examen et être surveillée.

Les déficiences visuelles relèvent d'un trouble :
- de la rétine  54 %
- du cristallin  28 %
- de l'iris  10 %
- des voies optiques  6 %
- de la cornée   2 %

Examen de l'audition

Michel Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2


mis à jour le 3 janvier 1999

1. Enumérer les méthodes cliniques permettant de tester l'audition chez l'enfant, en fonction de l'âge.

Objectifs pratiques 

1. Vérifier la bonne audition d'un enfant de 0 à 6 ans.  

Introduction

De l'audition dépend directement l'acquisition du langage qui débute dès les premiers mois de la vie. Il faut donc dépister les surdités le plus tôt possible pour y remédier si possible et rétablir ainsi cette relation de l'enfant et de son environnement.

1 Rappel anatomopathologique

L'oreille comprend trois parties :
- l'oreille externe : pavillon et conduit auditif externe,
- l'oreille moyenne : caisse du tympan, séparée du conduit auditif externe par le tympan et de l'oreille interne par une paroi où saille le promontoire, zone d'insertion du limaçon. Sur cette paroi se trouve la fenêtre ronde et la fenêtre ovale. La caisse est traversée par la chaîne des osselets et communique avec l'arrière-fond des fosses nasales par la Trompe d'Eustache.
- l'oreille interne, cochléaire, répond aux deux  tours et demi de spire du  limaçon. C'est une sorte de harpe car à  l'intérieur du limaçon se trouve le canal cochléaire, support des cellules sensorielles auditives en contact avec les dendrites de la VIIIe paire.

Les voies auditives centrales conduisent le message auditif au fond de la scissure de Sylvius par des trajets qui assurent la représentation bilatérale du message cochléaire.

Un son est caractérisé par sa fréquence (grave-aigu) qui s'exprime en Hertz et par son intensité que l'on mesure en décibels. L'oreille humaine peut percevoir de 50 à 16 000 Hertz. Les sons graves (100 à 500 Hertz) excitent la partie initiale. Un bruit blanc est un bruit mélangeant différentes fréquences pour une intensité donnée. Un son trop intense peut être douloureux et déterminer des lésions de l'organe de Corti (surdités professionnelles).

Les surdités peuvent être classées en :
- surdités de transmission, dites encore d'oreille moyenne,
- surdités de perception, dites d'oreille interne.

Le Bureau International d'audiophonie (BIAP) a établi la classification suivante des surdités, en pondérant les réponses aux fréquences 500, 1000 et 2000 :
- surdités légères : 40 décibels,
- surdités moyennes de 40 à 70 décibels,
- surdités sévères de 71 à 90 décibels,
- surdités profondes 90 décibels et degré : I, II ou III suivant que l'atteinte porte sur les aigus seulement, les aigus et les moyens ou touche également les graves (250 H).

2 Etiologie

A la naissance, il peut s'agir :

- de surdités congénitales génétiques, à transmission dominante ou récessive d'où la valeur d'un interrogatoire soigneux, à la recherche d'antécédents familiaux de surdité. Elles peuvent être isolées, otologiques pures ou associées, constituant un élément d'un syndrome dysmorphique.
- de surdités congénitales liées à une atteinte pendant la vie intra-utérine, soit virale (rubéole), soit toxique (streptomycine), mais d'autres agents sont également invoqués avec moins de preuves.
- de surdités périnatales, liées à l'anoxie cérébrale, et, peut-être à l'hyperbilirubinémie.

Chez l'enfant plus grand, outre les causes précédentes, qui ont pu passer inaperçues, on trouve :
- des surdités de transmission : bouchon de cérumen, catarrhe tubaire, otites diverses,
- des surdités de perception : infectieuses, toxiques, tumorales, traumatiques.
Les surdités de transmission donnent une atteinte de moyenne importance et sont souvent plus difficiles à dépister ; cependant leur importance est grande car l'enfant malentendant peut facilement être considéré comme étourdi, voire débile.
- Dans 50% des cas, l'étiologie est encore inconnue.

3 Examen de l'audition à la naissance

L'exploration de l'audition chez le nouveau-né bénéficie, à cette période de la vie, des réactions réflexes qui vont disparaître avec la maturation nerveuse et l'accoutumance au bruit.

L'examen doit se faire dans de bonnes conditions (cf. examen du nouveau-né), l'enfant étant découvert, les membres libres, bien à plat sur le dos, les deux oreilles dégagées. Plusieurs appareils (Veit-Bizaguet, Zénith) permettent d'émettre à 5 cm de l'oreille de l'enfant un bruit blanc calibré en fréquence et en intensité. Le bruit déclenche chez l'enfant des réactions motrices globales : sursaut, Moro, réflexe tonique des membres, réactions motrices localisées : clignement de paupière (réflexe cochléo-palpébral), réflexe oculo-céphalogyre, arrêt de mouvement, déclenchement de la succion. Parfois, il faut se contenter d'une modification du rythme respiratoire plus difficile à apprécier ou une modification du rythme cardiaque. La réaction peut être retardée (10-20 secondes) et l'excitation ne peut être répétée immédiatement (accoutumance). C'est donc un examen difficile.

En général, le nouveau-né répond à une stimulation de 60 décibels. S'il ne répond pas, on augmente l'intensité et tout enfant ne répondant pas à 90 dB doit être considéré comme suspect. Si la suspicion se confirme à un nouvel examen, il sera adressé à un spécialiste.

Des méthodes électrophysiologiques objectives telles que les potentiels évoqués auditifs du tronc cérébral peuvent être alors réalisées.

La technique des oto-émissions provoquées est plus récente ; elle peut être appliquée dès la période néonatale. Les oto-émissions provoquées sont des oto-émissions apparaissant après la stimulation de l'oreille par un son bref. Par un mécanisme complexe, les cellules ciliées externes vont générer une énergie importante, émise vers l'extérieur sous forme d'un son complexe : l'oto-émission provoquée. Celle-ci sera enregistrée dans le conduit auditif externe 7 à 8 millisecondes après la stimulation, temps nécessaire à l'onde sonore pour aller jusqu'aux cellules de l'organe de Corti et au signal émis pour revenir au conduit auditif externe.
Cette technique possède de nombreux avantages : elle est simple, rapide et atraumatique, objective. La présence d'oto-émission doit rassurer ; leur absence doit alerter et conduire à poursuivre les investigations. Dans ce sens, c'est un excellent test de dépistage large de la surdité permettant de faire un tri entre les enfants malentendants et les enfants suspects de surdité.
Des enquêtes faites, il ressort qu'un enfant sur 2.000 nouveau-nés est suspect mais ce chiffre s'élève à 7 % lorsqu'on examine des enfants prématurés ou réanimés à la naissance. Il faut dans ce cas tenir compte de la diminution de la réactivité de l'enfant après 15 jours ou trois semaines et du séjour dans les incubateurs bruyants. Il est cependant logique de recommander un dépistage systématique chez ces enfants ainsi que chez les enfants ayant des antécédents familiaux de surdité.

La connaissance précoce d'une surdité profonde permet de préparer la famille à une éducation qui sera longue et permet d'envisager un appareillage précoce dès le deuxième semestre de vie.

4 Après la naissance

Nous ne pouvons plus compter sur les réactions primaires qui existent durant les premier jours. Dès 15 jours, l'enfant peut contrôler ses réflexes auditifs. Un enfant de famille nombreuse vivant dans un logement bruyant reste indifférent aux agressions sonores. Il faut de fortes intensités à l'audiométrie de dépistage pour obtenir une réaction et très tôt, l'enfant devient indifférent à ce stimulus non signifiant.

Plus l'enfant avance en âge, plus le stimulus doit être singulier, intéresser l'enfant, lui rappeler un bruit agréable, familier ou au contraire susciter son intérêt par sa nouveauté.

Il faut attendre 30 et même 36 mois pour commencer à obtenir une collaboration de l'enfant et employer des méthodes audiométriques utilisant des sons variables. Ce n'est qu'à partir de 4 ans et même 5 ans que l'on peut avoir recours à une audiométrie rappelant celle utilisée chez le grand enfant et l'adulte. Entre la naissance et 3 ans, le dépistage sera donc particulièrement difficile. Au cours de la première année, on cherchera à dépister les surdités profondes qui n'ont pu être diagnostiquées jusque là, ou se sont révélées ou créées pendant les premiers mois de la vie. Au cours des années suivantes, il s'agira surtout de dépister des surdités moyennes (40 à 70 décibels) et légères (20 à 40 décibels). On estime que 5% des enfants de moins de 6 ans ont des troubles de l'audition mais ces troubles sont souvent curables. Ceci souligne l'intérêt de les dépister le plus tôt possible pour les corriger si possible pour ménager l'avenir de l'enfant. Cette infirmité n'est pas toujours évidente : l'enfant malentendant s'isole, paraît étourdi et facilement peut être classé à tort parmi les déficients mentaux. Simultanément, une déficience de l'audition peut entraîner des troubles de langage.

On comprend donc l'intérêt d'étudier le comportement et le langage de l'enfant au cours des trois premières années de vie pour dépister chez lui des troubles de l'audition.

4.1 Gesell et Amatruda ont très minutieusement décrit, dès 1947, un certain nombre de symptômes conduisant à suspecter une atteinte de l'audition chez l'enfant en les classant sous cinq rubriques :

1. Audition et compréhension du langage

  . indifférence générale aux sons
  . absence de réponse aux mots
  . réponse au bruit mais pas à la voix

2. Vocalisation et production des sons

  . caractère monotone de la voix
  . vocalisation peu distincte
  . rareté du rire
  . pauvreté des essais vocaux
  . vocalisation à la recherche d'une sensation vibratoire
  . mouvements répétés de heurts de tête et de piétinements à la recherche de cette même sensation
  . hurlements et cris perçants pour exprimer aussi bien le plaisir que la contrariété ou un besoin

3. Attention visuelle et compréhension réciproque

  . attention et vigilance visuelle accrues
  . tendance marquée à l'imitation lors du jeu
  . attention particulière pour les gestes et les déplacements de l'entourage
  . vivacité inhabituelle des gestes

 4. Relation sociale et adaptation

  . relation subnormale lors des jeux vocaux avec d'autres nourrissons dans la même chambre
  . intérêt plus marqué pour les choses que pour les personnes
  . expression du visage investigatrice, parfois de surprise ou de dépit
  . alternance de méfiance et de coopération
  . réaction marquée aux louanges et marques d'affection

 5. Comportement affectif

  . crises de colère pour manifester un besoin ou attirer l'attention sur soi
  . tension, résistance et colère provoquées par l'absence de compréhension
  . tendance à l'obstination et à la taquinerie
  . irritabilité  provoquée par la difficulté de se faire comprendre
  . explosions de mauvaise humeur provoquées par les contrariétés
  . initiatives impulsives et intempestives.

 Ce sont les symptômes que les parents ont pu relever et que le médecin peut noter au cours de son examen.

4.2 Des renseignements importants peuvent également être tirés de l'étude de l'acquisition du langage.

Au cours du premier mois existent seulement des cris et des grognements. A deux ou trois mois apparaissent des vocalisations : roucoulements, rire, gloussement, avec différenciation progressive selon l'état biologique ou affectif exprimé. Entre quatre et six mois apparaît le babil ou le gazouillis, à la fois jeu, cri, appel et stock de formes sonores ultérieures. Ce sont les voyelles qui apparaissent en premier et d'abord les voyelles antérieures "a", "e", puis les consonnes labiales (m, p) et dentales (d, t). A six ou sept mois, ce sont les premières dissyllabes répétitives (ma, da), dont une évolution complexe fera ultérieurement des mots, la non apparition du phonème et de sa répétition est un signe d'alarme.

Entre 12 et 18 mois, ce sont les premiers mots, exclamations ou onomatopées avec attribution d'une valeur significative. On arrive au mot-phrase : un mot à forte signification, expression globale de désirs et de sentiments divers. Par exemple, "maman" signifie aussi bien "j'appelle maman" que "voilà maman qui arrive" ou "voilà le sac de maman". A 18 mois, apparaissent les premières associations de mots : "papa pati". Entre 24 et vingt 27, le vocabulaire s'enrichit :
- 100 mots à vingt mois,
- 300 mots à vingt quatre mois,
- 1000 mots à trois ans.

C'est le langage enfantin avec l'apparition de "je" qui implique que l'enfant s'individualise en tant que personne.

De 30 à 36 mois, outre l'accroissement du vocabulaire, des phrases de trois ou quatre mots sont courantes. A 36, 40 mois, les phrases sont bien formées et les fautes grammaticales deviennent rares. On comprend l'enfant à 90%.

Après 3 ans, l'enfant commence à utiliser des mots abstraits. Il prend plaisir à répéter.

A 5 ans, le langage devient un instrument de la pensée, on peut pour illustrer voir l'évolution d'une demande dans le temps : bonbon, bonbon pour Pierre, Pierre veut un bonbon. Je veux un bonbon. J'ai été sage, je veux un bonbon, s'il vous plaît.

Il s'agit là d'un développement moyen et l'âge d'apparition des différents stades varie suivant les collectivités, les niveaux sociaux et économiques, les familles et même au sein d'une famille, d'un enfant à l'autre.

Toutefois, l'évolution du phonème, c'est-à-dire de l'unité de parole du début, à la syllabe, au mot et à la phrase se fait dans un ordre de succession strict et universellement valable.

Le langage, beaucoup plus que le développement moteur, est fonction de la qualité affective et culturelle du milieu mais le langage ne peut se constituer si la perception auditive est déficiente : c'est dire que tout trouble du développement du langage doit faire suspecter une atteinte de l'audition.

4.3 En dehors de l'étude du comportement et de l'acquisition du langage chez l'enfant, différents tests de dépistage ont été proposés :

4.3.1 Au cours des 6 premiers mois, on recherchera essentiellement la rotation conjuguée de la tête et des yeux vers le stimulus sonore. Cette rotation apparaît entre 16 et 38 semaines selon les auteurs.

4.3.2 Après 6 mois, les auteurs anglais à la suite des travaux de Sheridan, utilisent différentes techniques d'examen dont le principal mérite est la facilité de réalisation, ce qui n'exclut pas, néanmoins, une grande rigueur.

Ils utilisent des stimuli vocaux en tenant compte de la réceptivité de l'enfant, c'est-à-dire en utilisant des sons que l'enfant connaît et auxquels il est habitué : voyelles "ou-ou-ou" ou sons à base de linguodentale "th" ou de combinaisons linguodentales sifflantes "psh" plus communes dans la langue anglaise que dans la langue française. D'autres stimuli familiers à l'enfant sont également utilisés : hochet, bruit de la cuillère heurtant doucement la timbale, clochette, froissement de papier.

Tous les stimuli sont calibrés et ne dépassent pas 40 décibels grâce au respect d'une technique bien au point. Ainsi le bruit par froissement de papier est obtenu en refermant la main sur une boule de papier de cellophane. Pour la voix chuchotée, une main masque les lèvres de l'examinateur pour éviter l'excitation directe du pavillon de l'oreille. Tous les stimuli sont émis à 50 cm, l'enfant étant sur les genoux de sa mère et son attention fixée par un jouet mis à sa disposition sur la table. Dans ces conditions, l'enfant normal tourne la tête vers le bruit, à l'horizontale à 6 mois, en bas à 9 mois, en haut à 12 mois.
Les jeunes enfants répondent plus volontiers à ces stimuli concrets, mais les plus âgés préfèrent des stimuli nouveaux. Le prénom de l'enfant est alors un bon stimulus.

4.3.3 Les jouets de Moatti

Dans cette voie, Moatti a mis au point un matériel simple : il s'agit de quatre petits jouets imitant les cris d'animaux (vache, mouton, chat, oiseau), sons complexes dont les fréquences sont, pour la vache de 100 à 4500 Hertz, le mouton de 500 à 5000 Hertz le chat de 1000 à 8000 Hertz et l'oiseau de 2000 à 9000 Hertz. Le son, lié à la chute d'un poids dans un cylindre, est produit en retournant lentement l'objet et non en le secouant. L'intensité est ainsi calculée pour atteindre 60 décibels à un mètre, 55 à deux mètres, 50 à trois mètres, 45 à quatre mètres, pour chacun des jouets. L'enfant étant sur les genoux de sa mère, on commence par le jouet donnant le son le plus aigu (oiseau) en se plaçant à quatre mètres de l'enfant, hors de sa vue, et en se rapprochant progressivement en cas de non réponse. La réaction d'orientation investigation peut être remplacée par des modifications au niveau de la face, des modifications de la respiration, des phénomènes moteurs. Les réponses négatives ne permettent pas d'affirmer l'absence de perception et l'examen doit être pratiqué à nouveau, soit le jour même soit quelques jours plus tard. Si le doute persiste, l'enfant doit être dirigé vers un centre spécialisé. Bien qu'il ne s'agisse pas d'une véritable mesure audiométrique, les réactions obtenues suivant le jouet utilisé permettent d'apprécier grossièrement le champ auditif de l'enfant. Il faut se méfier des fausses réponses positives, parfois induites par une réaction de la mère, des fausses réponses négatives qui, elles, conduisent à répéter l'examen. Enfin, la méthode risque de méconnaître les hypo-acousies inférieures à 50 décibels.  

Les grelots du "Boel-test" répondent au même principe des tests d'orientation.

4.3.4 A 2 ans, et surtout à 2 ans et demi, on peut avoir recours au test du nom  : placé derrière l'enfant occupé à jouer, on émet son nom à voix nue ou par haut-parleur : l'enfant se retourne s'il entend, vers la source sonore.

4.3.5 On peut également avoir recours au test de phrases : dans les mêmes conditions que pour le test du nom, on demande à l'enfant de répéter des phrases ou d'exécuter des ordres.

4.3.6 Un peu plus tard, on utilise le test des mots avec indication d'images, l'enfant montre du doigt l'image correspondant à la forme phonétique entendue. En fonction de mots bien choisis, il est possible de préciser les troubles de prononciation.

Dans le test d'Olivaux, on dispose de 25 images que l'enfant a appris à reconnaître. Les images étant placées devant lui, l'observateur placé à 1 mètre en face de l'enfant nomme les images à voix chuchotée et note sur la liste les bonnes réponses. Si le pourcentage de bonnes réponses est inférieur à 25, il faut recommencer en invitant l'enfant à regarder l'observateur chaque fois qu'il nomme une image. Si le pourcentage de bonnes réponses est meilleur, on peut avoir des doutes sur la valeur de l'audition. Il faut tenir compte de la fatigabilité de l'enfant et ne pas hésiter à recommencer l'épreuve un autre jour.

4.3.7 C'est à partir de 4 ans, mais mieux, à 5 ans, que, grâce à un appareil audiométrique simple, dont peuvent disposer maintenant tous les médecins scolaires, on peut réaliser rapidement le "test de balayage de fréquences". L'enfant coiffé d'un casque à deux écouteurs reçoit un son, soit d'un côté, soit de l'autre. On peut, grâce à l'appareil, faire varier l'intensité émise de 20 à 40 décibels et la fréquence de 250 (sons graves) à 4000 Hertz (sons aigus).

En notant les réponses de l'enfant, on peut classer l'audition en normale, suspecte ou mauvaise. L'examen par une personne entraînée demande 3 minutes.

4.3.8 Tout enfant suspect doit être adressé à un centre disposant d'une installation spéciale permettant de réaliser : le réflexe d'orientation conditionnée  (ROC) de Suzuki et Ogiba ou le "Peep Show" de Dix et Hallpike. Ces deux techniques nécessitent une participation active de l'enfant. Celui-ci est d'abord conditionné à répondre aux stimuli sonores par un geste qui fait apparaître sur un écran une image de préférence mobile et attrayante : train, automobile, bateau. Cet apprentissage l'incite ensuite à découvrir le son qui l'autorise à faire le geste. En faisant varier le son produit par haut-parleur puis au casque, on peut tester séparément chaque oreille. La méthode peut être également utilisée pour juger de la récupération chez l'enfant appareillé.

Un examen est important et devrait être systématique pour confirmer et évaluer le déficit auditif : l'impédancemétrie qui permet d'établir la courbe tympanométrique et d'étudier le réflexe stapédien (contraction du muscle à une excitation donnée). Cet examen renseigne sur l'état de la caisse du tympan (épanchement éventuel) et la mobilité de la chaîne des osselets. Il détecte les surdités de transmission, notamment en cas d'otite séreuse. Celle-ci est très fréquente chez l'enfant et entraîne un déficit auditif prédominant sur les fréquences graves de 5 à 40 décibels.

4.3.9 A côté de ces tests, on peut pratiquer une audiométrie objective par deux techniques neurophysiologique :

- les potentiels évoqués auditifs : des sons d'intensité et de fréquence connues entraînent des modifications de l'E.E.G. Ces modifications, non visibles sur le tracé ordinaire sont décelées et cumulées par un moyenneur (ordinateur) qui en trace la courbe.
- l'électrocochléogramme consiste à placer une électrode transtympanique sur le promontoire et à exciter directement l'oreille interne.

Les deux méthodes sont complémentaires mais réservées à des centres spécialisés.
La nouvelle technique des oto-émissions provoquées, citées au début du chapitre semble très prometteuse.

Conclusion

Beaucoup de ces tests sont difficiles et notre préférence va aux tests les plus simples. Nous ne saurions assez insister sur la difficulté d'apprécier une hypoacousie au cours des deux premières années de vie. C'est la raison pour laquelle nous attachons une grande importance à l'examen de 3 ans, âge d'entrée à l'école maternelle. Effectué après deux mois ou trois mois de séjour à l'école, il permet de connaître les observations faites par la maîtresse qui vit avec l'enfant plusieurs heures par jour. Il devrait même être possible de demander à ces institutrices d'effectuer un certain nombre de ces tests en les intégrant dans les pratiques de jeux, de danses, d'expression corporelle qui sont la base de la formation à cette période de la vie. Toute suspicion de troubles de l'audition doit conduire à pratiquer un nouvel examen et, si le doute persiste, à adresser l'enfant au spécialiste ORL.

La surveillance de l'audition doit être renforcée chez les enfants "à risque", c'est-à-dire :
- ayant des antécédents familiaux de surdité,
- atteint pendant la vie embryonnaire ou foetale,
- ayant présenté des affections néonatales (anoxie, méningite, hyperbilurinémie),
- présentant des malformations de la tête et du cou.


La croissance

Marc De Kerdanet

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2


mis à jour le 4 janvier 1999

Questions d'examen

1 Définition
2 Buts de l'étude de croissance
3 Moyens de l'étude de croissance
3.1 Quantitatifs
3.2 Qualitatifs
4 Résultats de l'étude de croissance
4.1 Facteurs impliqués dans la croissance
4.2 Evolution de la croissance

Conclusion

Objectifs pratiques

1 Notions préliminaires
1.1 Anatomie
1.2 Différenciation sexuelle
1.3 Mécanisme général d'action des hormones
2 Aspects cliniques de la puberté
2.1 Développement des CSS
2.2 Poussée de croissance pubertaire
2.3 Evaluation du développement pubertaire

Conclusion


Questions d'examen

1. Définir croissance et maturation ; vitesse de croissance. Leurs intérêts.
2. Décrire les trois critères de maturation les plus utilisés.
3. Expliquer la notion d'âge osseux, âge statural et âge chronologique.
4. Décrire l'évolution normale des caractères morphologiques de la puberté :

  • chez le garçon,
  • chez la fille.

5. Donner les âges limites de la période pubertaire ; la date moyenne d'apparition des règles et les particularités du cycle menstruel pendant la première année.

Objectifs pratiques

1. Peser et prendre les principales mensurations (taille - périmètre crânien - périmètre brachial - périmètre thoracique - segments supérieur et inférieur) chez le nourrisson et l'enfant.
2. Construire sur un graphique les courbes de poids, de taille, de périmètre crânien et les analyser.
3. Déterminer un âge osseux.

 

Physiologie de la croissance

 

1 Définition

La croissance est l'augmentation des dimensions du corps. Ce phénomène, caractéristique de l'enfance, est lié à l'interaction entre des facteurs génétiques et du milieu. Elle est un des domaines médicaux les plus spécifiquement pédiatriques.

2 Buts de l'étude de la croissance

La biométrie, mesure de la croissance, permet la mesure de l'état de santé d'un individu mais également d'une population.
Pour l'individu elle permet, soit chez l'enfant bien portant de repérer une anomalie puis d'en rechercher la cause, soit de surveiller une amélioration de l'état de santé lorsqu'une pathologie aura touché la croissance.
Pour la population elle constitue une mesure directe de l'état de santé d'une population et complète les mesures indirectes que sont l'étude de la mortalité et de la morbidité.

3 Les moyens de l'étude de la croissance

3.1 quantitatifs

= Croissance proprement dite : Poids, Taille, Périmètre crânien (PC)

Ce sont des mesures chiffrées en grammes ou en centimètres qui nécessitent l'utilisation de courbes de référence :

3.1.1 Courbes standard : elles sont établies sur une population de référence (idéalement celle dont fait partie le sujet étudié) :

- études longitudinales ou la croissance des mêmes sujets référence est étudiée de la naissance à l'âge adulte,
- études transversales : les mesures sont faites sur des échantillons de différents sujets de chaque tranche d'âge.

3.1.1.1 Répartition des différentes valeurs de courbes :

- Percentiles : (utilisé surtout par les anglo-saxons). En France, ils sont utilisés pour les courbes de croissance intra-utérine. On admet que la population "normale" se situe entre le 3è et le 97è percentile (englobe 95% de la population). Au 50è percentile (médiane) la moitié de la population a une valeur plus faible et la moitié une valeur plus grande.

- Déviation standard (DS) (ou écart-types : le plus fréquent en France)
Ce sont les courbes de SEMPE et PEDRON. L'utilisation de cet outil procède du fait que le poids, la taille, etc..., des sujets de même sexe et de même âge se répartissent (comme la plupart des valeurs biologiques, à l'origine d'ailleurs de la science statistique) selon une courbe en "cloche" de GAUSS. Suivant une loi dite "normale" ou gaussienne, on admet que 95% de la population se répartit de part et d'autre de la moyenne entre + 2DS et -2DS (exactement 1,96). Il faut garder à l'esprit en utilisant ces données qu'elles ne sont qu'une indication statistique s'adressant à une population. Les conclusions pour l'individu n'en sont que déduites et doivent tenir compte de la variabilité qui est la règle en biologie.

Ainsi, 5% des individus normaux se situent en dehors de ces limites (risque alpha ou de 1ère espèce : de considérer un sujet normal comme pathologique). De même à l'intérieur de ces limites peuvent se situer des individus pathologiques (risque beta ou de 2è espèce, de considérer comme normal un sujet pathologique).

3.1.1.2 Report des mensurations sur les courbes :

Il est indispensable pour utiliser les mesures collectées et les chiffrer en terme de déviation standard ; il permet en outre, en le répétant, de connaître le caractère dynamique d'une croissance (cassure ou rattrapage).

3.1.2 La biométrie

Ces mesures indispensables sont rapportées sur des courbes de référence :

- taille : distance vertex - plante mesurée avec une toise sur le sujet couché avant 2 ans, debout ensuite. Elle s'exprime en centimètres (précision de 0,5 cm) et permet de définir "l'âge statural" (AS), c'est-à-dire l'âge auquel la taille moyenne est celle retrouvée pour le sujet mesuré. L'âge chronologique (AC) est l'âge réel du sujet. On peut aussi calculer la vitesse de croissance : nombre de cm par année.

- poids : avec un pèse bébé chez le nourrisson (précision de 10 g) avec une bascule ensuite (précision à 100 g).

- périmètre crânien : mesure à répéter 2 à 3 fois . La mesure englobe les bosses frontales et occipitales avec un mètre-ruban (précision 0,5 cm).

- les segments inférieurs et supérieurs. Le segment inférieur représente les membres inférieurs (distance pubis-sol). Le segment supérieur constitue le reste : tête, cou et tronc.

3.2 Qualitatifs

= Modification des tissus.

Cette étude utilise principalement trois paramètres qui sont :

- les maturations : dentaire, osseuse et sexuelle.

- l'état nutritionnel sur :

  • l'état de la peau et des phanères,
  • l'épaisseur du panicule adipeux sur plusieurs zones cutanées,
  • le développement des masses musculaires (périmètre brachial),
  • l'état des os (déformations) et la statique vertébrale.

- La maturation dentaire est étudiée à partir des âges d'éruption des premières et deuxièmes dentitions (voir tables)

 

 
Maxillaire supérieur
  Maxillaire inférieur

première dentition

- incisives médianes
- incisives latérales
- canines
- premières prémolaires
- deuxièmes prémolaires

 
 
6 - 9 mois
7 - 10 mois
16 - 24 mois
10 - 18 mois
20 - 30 mois
 
 
5 - 8 mois
8 - 11 mois
16 - 24 mois
10 -18 mois
20 - 30 mois

deuxième dentition

- incisives médianes
- incisives latérales
- canines
- premières prémolaires
- deuxièmes prémolaires
- premières molaires (dents de 6 ans)
- deuxièmes molaires (dents de 12 ans)
- troisièmes molaires (dents de sagesse)

 
 
7 - 9 ans
8 - 9 ans
10 - 12 ans
8 - -9 ans
10 - 12 ans
6 - 7 ans
12 - 13 ans
17 - 25 ans
 
 
6 - 7 ans
7 - 8 ans
9 - 11 ans
8 - 9 ans
11 - 13 ans
6 - 7 ans
12 - 13 ans
17 - 25 ans

- La maturation osseuse est basée sur l'étude de l'apparition progressive du centre d'ossification des cartilages épiphysaires ou des os courts. Il existe une variation normale autour de l'âge moyen d'apparition (ou de l'aspect moyen à un âge donné). Par convention (MONACO 1906) on étudie le squelette gauche.

  • Jusqu'à 6 mois environ, on utilise une méthode de cotation d'une radiographie du membre inférieur (gauche) de profil qui consiste à repérer et coter différents points d'ossification des cartilages; on se reporte ensuite à des tables de "notes" totales donnant l'âge osseux (méthode d'ACHESON).
  • De 6 mois à la fin de la puberté on utilise la radiographie du poignet et de la main gauches en comparant, globalement et os par os, l'aspect du cliché à des radiographies caractéristiques des différents âges (dans chacun des deux sexes) qui sont répertoriées dans un atlas de Greulich et Pyle.

On détermine ainsi "l'âge osseux" (AO), c'est-à-dire l'âge noté pour la radiographie se rapprochant le plus de celle du sujet étudié.

- La maturation sexuelle est étudiée à partir des caractères sexuels secondaires par comparaison avec des aspects répertoriés selon les stades de Tanner. (cf. document).

 

TABLEAU I
Stades du développement pubertaire
Filles (Classification de Tanner)

 

Stade
Âge osseux
(moyen-ans)
Développement mammaire
Pilosité pubienne
1
< 10,75
Pas de tissu glandulaire Pas de pilosité
2
10,75
Tissu glandulaire palpable Quelques poils fins le long des grandes lèvres.
3
11,75
Augmentation de la taille des seins ; profil arrondi de l'aréole et du mamelon. Poils publiens plus pigmentés.
4
12,8
Augmentation de la taille des seins ; le mamelon est surélevé par rapport au sein. Poils plus durs, recouvrant le mont de vénus.
5
14,8
Augmentation de la taille des seins ; profil arrondi de l'aréole et du mamelon. Poils de type adulte, s'étendant vers les cuisses.
 

 

TABLEAU II
Stades du Développement Pubertaire
Garçons (classification de Tanner)
 
Stade
Âge osseux
(moyen-ans)
Testicules
(longueur moyenne)
Pilosité pubienne
1
< 10,00
< 2,5 cm Pas de pilosité
2
11,75
Augmentation (> 2,5 cm) des testicules ; 

amincissement du scrotum.

Quelques poils sur le scrotum
3
12,8
3,0 à 3,5 cm ; épaississement du pénis Poils plus pigmentés, contournés sur le pubis.
4
14,5
3,5 à 4 cm. Poils plus durs sur le pubis.
5
16,2
> 4 cm ; taille adulte du pénis. Pilosité de type adulte, s'étendant vers les cuisses et la paroi abdominale.
 

On fait également intervenir des mensurations :
- volume testiculaire (orchidomètre), ou longueur et largeur,
- longueur de la verge,
- diamètre et projection antérieure du sein.
- mensurations utérines et ovariennes par échographie pelvienne.

4 Résultats de l'étude de la croissance

Elle permet de repérer les différents facteurs impliqués dans la croissance et d'étudier l'évolution de la croissance à l'échelon de l'individu et à celui des populations.

4.1 Facteurs impliqués dans la croissance

4.1.1 Facteurs extrinsèques

- Alimentation : des apports caloriques et vitaminiques suffisants, de même qu'une ration protidique correcte, sont nécessaires à une croissance normale. Ceci est démontré dans les cas de restriction alimentaire à l'échelon individuel (anorexie mentale) ou à l'échelon de populations (malnutrition endémique des pays du "tiers-monde"). De même, on a pu repérer des différences significatives entre des enfants de même ethnie alimentés dans des conditions différentes (adoptions).

- Facteurs socio-économiques : le développement staturo-pondéral est statistiquement lié aux conditions socio-économiques : les enfants uniques, habitant une grande ville, issus des milieux aisés, sont en moyenne, plus grands et plus lourds que les enfants de familles nombreuses, habitant la campagne, issus de milieux défavorisés. Dans les pays défavorisés ces facteurs s'additionnent aux facteurs alimentaires et à la plus grande morbidité.

- Facteurs psycho-affectifs : Ils interviennent dans les cas de carences graves où l'effet délétère de ces mauvaises conditions semble être médié par une insuffisance de sécrétion de l'hormone de croissance. (nanisme psycho-social).

4.1.2 Facteurs intrinsèques

- Hormone de croissance (HGH ou STH)
Sécrétée par l'anté-hypophyse sous l'action de deux facteurs hypothalamiques : le GRF ou GHRH (growth hormone releasing factor) - stimulant- et la somatostatine ou SRIF - inhibitrice-. Elle agit principalement au niveau du cartilage de conjugaison. Cette action se fait directement et par l'intermédiaire de la somatomédine C (ou IGF1) qui peut être sécrétée par le foie puis déversée dans la circulation générale ou sécrétée in situ. C'est une hormone anabolisante.
Sa sécrétion est augmentée physiologiquement par le stress, le sommeil et l'exercice musculaire et lors d'explorations pharmacologiques par l'hypoglycémie insulinique, l'arginine, la L. dopa. Elle est diminuée par les corticoïdes ou les oestrogènes à forte concentration et lors de l'hypothyroïdie.

- Hormone thyroïdienne
Elle est nécessaire pendant toute la croissance dès la naissance. La thyroxine active les métabolismes et accélère la maturation osseuse et cérébrale. Elle a une action coordonnée avec les autres hormones, en particulier l'HGH.
L'hypothyroïdie congénitale est décelable dès les premiers jours par le dosage de TSH devenu systématique depuis 1979 en France (sang recueilli sur papier buvard au 3è jour pour les dosages de TSH et de phénylalanine). L'insuffisance thyroïdienne peut bloquer la croissance à n'importe quel moment de son évolution.

- Androgènes
Chez le garçon ils entraînent, à la puberté, une accélération notable de la vitesse de croissance, mais leur action en accélérant la soudure des épiphyses est surtout de mobiliser rapidement le potentiel de croissance (en leur absence -hypogonadismes- la taille définitive, atteinte tardivement, est sensiblement identique).

- Autres hormones
Les oestrogènes et les glucocorticoïdes ont, semble-t-il, une action biphasique stimulant la croissance à faible concentration, la ralentissant à des taux élevés. Cette action se fait directement et par interaction avec les autres hormones, HGH en particulier.
L'insuline augmente l'action de l'HGH sur l'anabolisme protéique et a peut-être une action propre sur la croissance staturo-pondérale.
Toutes ces hormones interagissent les unes avec les autres et ont des actions synergiques ou antagonistes. Comme pour toute hormone, leur action dépend en outre de protéines de transport, de récepteurs cellulaires et de l'action de facteurs cellulaires intermédiaires.

4.1.3 Facteurs génétiques

- Ethniques : les différences de tailles moyennes entre les ethnies ne dépendent pas seulement du milieu mais également des prédispositions génétiques .

- Familiaux : la taille des parents a une influence évidente sur celle de l'enfant, cette notion est abordée en pratique par le calcul de la "taille-cible"

 

(taille du père + taille de la mère + 13)
2
(+ = G / - = F)

Une taille-cible faible ne doit pas empêcher l'analyse des autres facteurs.

- Individuels : un individu sain peut être plus petit que ne le laisserait supposer les tailles familiales : petite taille "constitutionnelle".

4.2 Evolution de la croissance

4.2.1 Echelon de l'individu

La croissance d'un enfant subit des variations normales qui peuvent être schématisées comme suit :

- Variations dans le temps
Les différents facteurs qui interviennent dans la croissance n'ont pas la même prépondérance à chaque période. L'aspect dynamique de cette croissance varie également avec l'âge. Certains auteurs ont rapproché ces deux informations en un concept schématisé par les courbes "I.C.P." (Infancy-Childhood-Puberty) qui permet d'envisager prioritairement les différents facteurs à mettre en cause en cas de ralentissement.

  • de 0 à 2 ans (Infancy) la croissance est très rapide (25 cm dans la première année, 12 cm dans la 2è année), elle dépend surtout de l'alimentation et de l'hormone de croissance,
  • de 2 ans à la puberté (Childhood), la vitesse de croissance devient régulière d'environ 5 cm et 2 kg en moyenne par an, elle dépend alors de façon plus prépondérante de l'HGH que de l'alimentation.
  • à la puberté (Puberty) la croissance s'accélère à nouveau avant de s'achever vers 16 ans chez la fille, 18 ans chez le garçon. Pendant cette période les facteurs déterminants sont, dans l'ordre : les stéroïdes sexuels (surtout les androgènes), l'hormone de croissance et l'alimentation.

- Variations selon le sexe
La croissance est moins importante dans le sexe féminin (12 à 15 cm de moins) mais la maturité est atteinte plus rapidement que dans le sexe masculin (en moyenne 2 ans de décalage). L'accélération pubertaire de la croissance y est plus brève et de moindre amplitude que chez le garçon.

- Variations entre les appareils
Les différents appareils n'évoluent pas de façon parallèle :

  • le cerveau atteint, à 3 ans, 80% de ses dimensions adultes,
  • le système lymphoïde atteint son maximum de développement vers 6-8 ans (âge de l'hypertrophie amygdalienne, de l'appendicite,...)
  • l'appareil génital ne complète son développement pour acquérir la capacité à la reproduction, qu'à la puberté.

- Variations des proportions du corps
Les rapports entre les différents segments du corps varient avec l'âge. La tête du foetus est grosse par rapport au reste du corps ; chez le nourrisson on constate le développement du tronc puis chez l'enfant plus grand (6 à 12 ans) ce sont les membres qui s'accroissent. Ce rapport établi sera à nouveau modifié par la puberté avec tout d'abord un accroissement des membres (donnant l'aspect macroskèle caractéristique de l'adolescence) puis, en fin de puberté, du tronc pour aboutir aux proportions définitives de l'adulte (mesuré en pratique par le rapport segment supérieur sur segment inférieur).
De la même façon, la proportion entre masse grasse et masse maigre évolue au cours de la croissance (approchée par l'indice de corpulence ou "Body Mass Index" -BMI), premier pic vers 9-12 mois puis minimum vers 6-7 ans, deuxième pic à la puberté.

4.2.2 Echelon de la population

La croissance des individus s'est modifiée à partir de la fin du siècle dernier. Cette modification est attribuée à l'utilisation plus complète du potentiel génétique permise par l'amélioration substancielle des conditions de vie dans les pays développés.
Depuis 1900, le français grandit en moyenne d'un centimètre tous les 10 ans.
Entre 1850 et 1950, la fin de la croissance est passée de 25 à 18 ans, l'âge des premières règles de 16 à 13 ans, l'apparition de la première dent de 6 mois à 5 mois 20 jours.

 

Conclusion

L'analyse simple de la croissance, comportant des mesures précises et leur report sur des courbes adaptées doit être le premier temps indispensable de tout examen pédiatrique et peut permettre d'apporter des renseignements diagnostiques et pronostiques déterminants pour les conclusions de cet examen.

 

Puberté

 

1 Notions préliminaires

1.1 Anatomie

1.1.1 Au niveau cérébral

3 régions du cerveau sont impliquées dans les processus aboutissant à la puberté.

1.1.1.1 L'hypophyse

- située dans la selle turcique
- appendue au dessous de l'encéphale auquel elle est reliée par la tige pituitaire
- constituée de 2 parties :

  • antéhypophyse
  • posthypophyse

- les hormones sécrétées par l'antéhypophyse commandent la secrétion des glandes endocrines : surrénales, thyroïde, gonades…

1.1.1.2 L'hypothalamus

- situé dans l'encéphale, juste au dessus de l'hypophyse,
- reliée à elle par un réseau veineux = système porte hypothalamo-hypophysaire.

1.1.1.3 Le cortex

- influence le système hypothalamo-hypophysaire par l'intermédiaire de "neuro-transmetteurs" (melatonine, endorphines…) en médiant les stimulations du milieu extérieur.

1.1.2 Les organes génitaux

Ils sont bien entendu impliqués dans le processus pubertaire, les organes reproducteurs mâle et femelle sont peu développés jusqu'à la puberté, par contre les glandes endocrines qu'ils comportent (ovaire et testicule) sont fonctionnelles très tôt.

1.1.3 Les glandes surrénales

Elles interviennent également dans ces processus par leur portion corticale.

1.2 Différenciation sexuelle

Avant la 8° semaine, 2 ébauches sexuelles corporelles sont présentes : les canaux de MÜLLER (féminins) et canaux de WOLFF (masculins) avec une gonade primitive indifférenciée.
C'est la présence ou l'absence du chromosome Y qui va ensuite déterminer l'orientation vers l'un ou l'autre phénotype.

1.3 Mécanisme général 'action des hormones

1.3.1 Notion d'axe hormonal

Un axe hormonal est une superposition de structures, secrétant des facteurs hormonaux interagissant en cascade, les uns avec les autres.

Les facteurs produits peuvent exercer, à l'étage supérieur, une action facilitante ou inhibitrice -feed back ou retrocontrole, positif ou négatif- permettant de moduler l'action et la secrétion de chaque hormone.

Le cortex intervient en supplément dans ce système qu'il peut influencer par l'intermédiaire des monoamines cérébrales.

1.3.2 Action au niveau cellulaire

- Transport dans la circulation par une protéine porteuse.
- Libération près de la cellule cible.
- Passage transmembranaire soit directement soit après fixation sur un récepteur membranaire.
- Translocation vers la chromatine.
- Action au niveau de l'ADN : synthèse d'une molécule d'ARN.
- Synthèse(ou traduction) d'une protéine qui pourra agir en tant qu'"effecteur".
- Cette action est donc permise par la présence d'un "récepteur" et d'une "réceptivité" cellulaire.

1.3.3 Métabolisme hormonal

Il existe pour certaines hormones, en particulier pour les stéroïdes sexuels, des voies de transformation métabolique faisant intervenir divers systèmes enzymatiques, exemples :

  • testostérone et DHT avec la 5 alpha réductase
  • œstrogènes et testostérone avec l'aromatase
Les 2 types de gonades secrètent les mêmes hormones à des taux différents de même que la surrénale :Androgènes, Œstrogènes, progestérone.

2 Aspects cliniques de la puberté

la puberté peut se définir comme :
- la période du passage de l'état d'enfant à celui d'adulte
- l'adaptation du corps à la fonction de reproduction
- l'acquisition de capacités permettant de rejoindre le monde des adultes

Cette période comporte plusieurs types de modifications :
- génitales : acquisition de la maturation sexuelle
- corporelles : poussée de croissance, modification de la silhouette et des proportions du corps
- psychiques : modifications de la personnalité et du comportement

le début se situe en moyenne vers l'âge de 9-10 ans pour les filles et de 12 ans pour les garçons. Le processus dure environ 6 ans et est achevé, en moyenne vers 16 ans chez la fille , vers 18 ans chez le garçon.

2.1 Développement des caractères sexuels secondaires 

2.1.1 Filles

Début : vers 9-10 ans les premières manifestations concernent :

- Les glandes mammaires : 5 stades "S" de TANNER du stade 1 - infantile au stade 5 -adulte. La mesure du diamètre de la glande est également utilisé pour cette évaluation.
développement du mamelon puis de la glande elle-même sous le mamelon qui s'étends progressivement en surface et en volume.

- La pilosité pubienne débute en même temps ou à peu près, sur 2 ans environ, pour recouvrir la région pubienne d'une pilosité fournie de forme triangulaire à base supérieure horizontale. De la même façon on définit 5 stades, "P", selon TANNER.

- La pilosité axillaire se développe 12 à 18 mois plus tard, les 5 stades ("A") sont moins utiles.

- La vulve subit deux types de changements :

  • structure
  • orientation

- Les premières règles surviennent vers 13 ans ; en moyenne 2 ans après les premiers signes pubertaires, ce sont des hémorragies de privation.

Autres modifications :

- Evolution de la morphologie corporelle
- Développement des organes génitaux internes.
- Cet ordre est parfois modifié :

  • prémature pubarche
  • prémature ménarche
  • prémature thélarche.

2.1.2 Garçons :

Il existe par rapport aux filles un décalage d'environ 18 mois, les tout premiers signes étant perceptibles vers 12 ans.

Organes génitaux externes stades de TANNER "G" :

- Le volume testiculaire (mesuré avec l'orchidomètre de PRADER) va augmenter progressivement, passant de 1 ml à 20-25 ml chez l'adulte ( maximum atteint vers 20 ans ). Au tout début de la puberté il mesure 2,5 cm de longueur ou 4 ml.

- La verge et le scrotum : subissent les premières modifications vers 13 ans, c'est à dire après que l'augmentation de volume du testicule ait permis la secrétion plus importante de testostérone. Le scrotum s'agrandit et la peau devient plus fine, plus pigmentée et plus vascularisée. La verge s'allonge et s'élargit passant de 4 à 5 cm en période prépubère à une longueur moyenne de 12-13 cm au stade 5

- Le développement de la pilosité pubienne débute vers 13 ans 1/2 et est plus lent que chez la fille à s'achever (2 à3 ans). De l'état glabre "P 1" on aboutit à une pilosité fournie "P 5" de disposition losangique à pointe supérieure débordant vers les cuisses et la région anale. Le développement ultérieur est variable selon les individus.

- Le développement de la pilosité axillaire a le même décalage que chez la fille, les stades "A" de TANNER sont également moins utiles.

- Pilosité corporelle et faciale.

Autres modifications :

- Changement de la silhouette et développement de la musculature
- Mue de la voie
- Acquisition d'un tempérament "agressif".

La première éjaculation se situe vers 14 ans.

2.2 Poussée de croissance pubertaire

Entre 5 et 10 ans croissance de 5 cm/an.

Vers 11 ans chez la fille, 13 ans chez le garçon, la croissance subit une accélération pubertaire avec une vitesse moyenne passant à 7,5 cm chez la fille (maximum 9) et à 8,5 cm chez le garçon (maximum 11).

Le gain total est de 20 cm entre 10 et 14 ans chez la fille et de 25 cm entre 12 et 16 ans chez le garçon (en moyenne).

La différence de taille finale entre les deux sexes est de 12 à 15 cm 1,5 cm proviennent de la période périnatale, 6 cm sont attribués à l'intensité de la poussée staturale et 6,5 cm au décalage du début de la puberté.

L'évolution des diamètres biacromiaux et bitrochantériens se fait en même temps que l'allongement corporel.

Il existe un allongement différentiel des membres et du tronc, les membres grandissant avant le tronc, ce qui donne l'aspect macroskèle caractéristique de l'adolescence. Certains segments comme les pieds atteignent très rapidement leur taille définitive.

2.3 Evaluation du développement pubertaire en pratique courante

Elle est obtenue par des moyens simples : observation et mesure :

- Orchidomètre, double décimètre, toise.
- stades de TANNER (cf document joint).

A cette évaluation clinique est associée une évaluation paraclinique :

- Evaluation de la maturation squelettique
- Echographie pelvienne.
- Enfin, mais surtout pour l'étude d'anomalies, les examens biologiques sont d'une grande utilité.

Conclusion

Les conditions nécessaires pour réaliser une puberté normale comprennent :

- un axe neuro-endocrinien fonctionnel
- un appareil génital différencié
- des gonades structurées fonctionnelles.

Pour qu'une maturation suffisante puisse être atteinte, il faut en outre des conditions génétiques favorables, une nutrition correcte et un milieu psycho-affectif favorable.

Tout ce qui peut retentir sur l'un de ces éléments retentira éventuellement sur la puberté. Ainsi les meilleures conditions socio-économiques ont permis en 50 ans d'avancer l'âge moyen des premières règles de 15 à 13 ans.

Sémiologie cardiovasculaire pédiatrique

Charles Jézéquel

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2


mis à jour le 4 janvier 1999

1. Décrire la sémiologie clinique d'une insuffisance cardiaque du nourrisson.

Objectifs pratiques 

1. Rechercher les particularités cliniques, radiographiques et ECG de l'examen cardiovasculaire de l'enfant.
2. Prendre la tension artérielle du nourrisson et interpréter son résultat.  

 

Elle n'est pas très différente de la sémiologie de l'adulte. Elle fait appel aux mêmes moyens d'investigations cliniques et para-cliniques. L'ensemble de la sémiologie ne sera pas revue. Seules les particularités pédiatriques seront soulignées.

1 Sémiologie cardiologique anténatale

 

L'auscultation du coeur foetal est pratiquée depuis longtemps. Les techniques nouvelles, l'enregistrement de l'activité cardiaque et l'échographie du coeur foetal ont permis l'éclosion d'une cardiologie foetale. Deux points sont particulièrement intéressants :

1.1 La reconnaissance et le traitement des arythmies foetales

Le rythme de base du foetus est voisin d'une fréquence de 120 à 160 battements par minute, variable avec les mouvements foetaux. De brèves accélérations, des ralentissements transitoires, des extra-systoles avec pause compensatrice sont des anomalies bénignes, fréquentes et physiologiques. Les arythmies cardiaques foetales peuvent être :

- des bradycardies foetales régulières évocatrices d'un bloc auriculo-ventriculaire (BAV) congénital. Il peut être isolé ou associé à une malformation cardiaque.

- des tachycardies foetales. La fréquence est en permanence au-dessus de 180 battements/minute. Ce peut être la cause d'un anasarque foeto-placentaire. On peut utiliser des drogues anti-arythmiques qui franchissent la barrière placentaire (Digoxine, bêta-bloquants). Ce traitement peut permettre de mener la grossesse à son terme.

1.2 Diagnostic in utero des malformations cardiaques

Des malformations graves peuvent être bien supportées in utero en raison des particularités de la circulation foetale. L'échocardiographie cardiaque foetale est seule capable de les découvrir. Le dépistage est en général possible vers 18 à 20 semaines de gestation. La méthode essentielle est l'échographie bidimensionnelle permettant le repérage des 4 cavités cardiaques et des deux gros vaisseaux. On peut compléter sur le mode unidimensionnel et utiliser le doppler pulsé.

Certaines anomalies sont difficiles à repérer, par exemple : hypoplasie ventriculaire, ventricule unique, canal atrio-ventriculaire, myocardiopathies. L'importance de la détection d'une anomalie morphologique cardiaque in utero permet une information des parents et aide à la décision médicale.

  • malformation au-dessus de toute ressource chirurgicale ou associée à un tableau polymalformatif. La décision d'une interruption thérapeutique de grossesse est à discuter.
  • malformation isolée et opérable : la connaissance précoce permet une prise en charge dès la naissance.

2 Sémiologie cardiovasculaire du nourrisson et de l'enfant

Les moyens d'étude ne sont pas différents de ceux employés chez l'adulte. Ils ne seront pas détaillés. Seules les particularités pédiatriques seront soulignées.

2.1 Examen clinique

Examen cardiaque : inspection, palpation, auscultation

Palpation des pouls artériels périphériques (fémoraux et huméraux principalement). Une diminution des pouls indique une atteinte de l'hémodynamique. Des pouls périphériques exagérés accompagnent souvent un shunt gauche - droit. Une différence entre le pouls humoral et le pouls fémoral diminué ou aboli indique une coarctation aortique probable et justifie d'autres investigations.

Etude de la pression artérielle. Elle exige un brassard dont les dimensions sont adaptées à l'âge de l'enfant. On peut utiliser la méthode auscultatoire ou des appareils utilisant l'effet Doppler. La pression artérielle varie en fonction de l'âge et de la taille de l'enfant. Il faut se référer à des courbes indiquant en percentiles les pressions artérielles systoliques et diastoliques chez l'enfant.

2.2 Examens complémentaires

2.2.1 Radiographie thoracique

Comme chez l'adulte, elle apporte deux données importantes : le volume des différentes cavités cardiaques et l'état de la vascularisation pulmonaire. Les repères morphologiques concernant les cavités et les gros vaisseaux sont identiques.

Chez le nourrisson en particulier, les gros vaisseaux de la base sont souvent mal individualisés, notamment sur la radiographie de face à cause de l'image thymique souvent volumineuses. Le volume apparent du coeur et la morphologie varient en fonction du temps respiratoire. Le cliché doit être exigé (rapport C/T, voir schéma)

 

FIGURE 1

Examen radiologique du coeur

Image à venir

 

FIGURE 2
Mesure du rapport cardiothoracique (RCT)
Silhouette radiologique
Indice
RCT
Coeur de volume normal
- enfant
- nouveau-né
Cardiomégalie +
Cardiomégalie ++
Cardiomégalie +++
"Petit coeur"
- enfant
- nouveau-né

V0
V1
V2
V3
V4

< 0,50
< 0,55
0,56 à 0,60
0,61 à 0,65
> 0,65

< 0,45
< 0,50

 

2.2.2 Electrocardiogramme

Il doit utiliser un matériel en rapport avec la taille de l'enfant (notamment pour les dérivations précordiales). Comme chez l'adulte, il donne des renseignements sur le volume des cavités cardiaques, l'existence de souffrance myocardique, l'existence d'anomalies du rythme de la conduction.

Dans l'interprétation, on doit tenir compte des particularités suivantes :
- la fréquence est rapide, même au repos. Dans un premier trimestre, elle est en moyenne de 160/minute et reste supérieure à 100 au moins jusqu'à un an.
- le rythme est sinusal mais il existe fréquemment une arythmie respiratoire, le coeur se ralentissant en expiration.
- l'axe principal de dépolarisation du coeur (axe de QRS) est dévié à droite (+ 120° chez le nouveau-né, + 100° à 1 an).

2.2.3 Echocardiographie

L'utilisation des ultra-sons a révolutionné les conditions du diagnostic en cardiologie. On peut ainsi :
- visualiser les cavités. On détermine le volume, la forme et la cinétique.
- visualiser le jeu valvulaire. Mouvement des valves mitro-aortiques et étude de leur morphologie,
- mesurer la vitesse du sang en combinant avec les techniques Doppler, ce qui permet de mesurer les débits et la direction du flux sanguin (fuites ou rétrécissements valvulaires, importance des shunts).
- visualiser le péricarde. Diagnostic facile d'épanchement péricardique.

Les progrès de l'échocardiographie ont diminué l'utilisation de méthodes plus invasives et moins bien tolérées telles l'angiographie et le cathétérisme artériel.

Les images obtenues en résonance magnétique nucléaire (IRM) sont très prometteuses pour le diagnostic de cardiopathies congénitales et pour visualiser les anomalies de gros vaisseaux artériel et veineux.

3 Etude sémiologique d'un souffle cardiaque

 

La découverte d'un souffle cardiaque, parfois fortuite, et chez un enfant sans symptôme, est relativement fréquente. La question posée est souvent celle de son organicité. Un complément d'information est nécessaire.

3.1 Examen clinique, étude des antécédents

- recherche de symptômes cliniques physiques et fonctionnels tels : dyspnée, cyanose, déformation thoracique, retentissement sur la croissance.
- examen de l'appareil cardiovasculaire sans omettre la palpation des pouls périphériques et la prise de la tension artérielle.

3.2 Examens paracliniques

- On réalise un ECG et une radio cardiopulmonaire. Une échographie est demandée si un doute persiste..

A l'issue de ces investigations, on peut schématiquement se trouver devant deux situations :

- 1ère situation : souffle anorganique "innocent"
Situation souvent retrouvée chez l'enfant entre 3 et 14 ans. C'est habituellement un souffle systolique bref, d'intensité faible (1 à 3/6), sans frémissement. Le timbre est doux, parfois musical. Le souffle est d'intensité variable selon les positions et irradie peu ou pas.
On trouve souvent un souffle mésocardiaque (en endapexien musical) ou un souffle d'éjection au foyer pulmonaire.
Important : si un doute persiste, il faut demander l'avis d'un cardiologue.

- 2ème situation : souffle organique.
C'est un souffle systolique ou diastolique d'intensité plus grande, parfois accompagné d'un frémissement. Cette situation demande des examens complémentaires. L'étiologie est à rechercher dans deux groupes de cardiopathie : cardiopathies congénitales et cardiopathies acquises.

4 Etude sémiologique de l'insuffisance cardiaque

 

C'est un état au cours duquel le coeur est incapable d'assurer un débit cardiaque couvrant les besoins tissulaires en oxygène à l'effort et/ou au repos.
Chez le nourrisson et l'enfant, la symptomatologie comprend 4 signes principaux :
- la tachycardie ou polypnée qui peut s'accompagner de toux, de cyanose ou de signes de lutte respiratoire.
- la tachycardie, l'hépatomégalie, la cardiomégalie (rapport C/T > 0,55°).

L'examen clinique cardiovasculaire (sans oublier la tension artérielle et la palpation du pouls). Les examens complémentaires ou l'échocardiographie sont un apport essentiel permettant en général de retrouver une étiologie dans les trois rubriques suivantes :
- Troubles du rythme et particulièrement la tachycardie supraventriculaire
- Les cardiopathies malformatives. Les shunts gauche - droit à fort débit ou les obstacles sur la voie gauche (coarctation de l'aorte ou rétrécissement aortique congénital).
- Les myocardites d'origine infectieuse ou métabolique.

5 Etude sémiologique de l'hypertension artérielle chez l'enfant

 

L'étude de la tension artérielle chez l'enfant suppose résolus deux préalables :
- disposer d'un matériel adéquat en fonction de la taille de l'enfant,
- disposer des courbes établies pour la tension artérielle en fonction de l'enfant (voir figure).

 

FIGURE 3

Diagnostic de l'hypertension artérielle en fonction de la taille

Image à venir

(d'après ANDRE JL, DESCHAMPS JP, GUEGUEN R : Centre de Médecine préventive, Av. du Doyen Parisot, 54500 Vandoeuvre-lès-Nancy. Dépôt légal 3è trimestre 1980, n°14 609 W)

 

Une HTA confirmée a des valeurs comprises entre + 10 et + 30 mm de Hg au-dessus du 97è percentile.

Une détermination isolée n'a pas de valeur. Il faut répéter la prise au cours du nycthémère voire même des enregistrements (Holter).

La recherche d'une cause est une préoccupation majeure : palper les pouls périphériques (coarctation aortique), rechercher une cause tumorale abdominale ou lombaire, rechercher une néphropathie (bilan rénal) ou une endocrinopathie. L'H.T.A. essentielle justifie une étude des antécédents familiaux de maladie cardiovasculaire et une surveillance régulière.

Sémiologie de l'appareil pulmonaire en pédiatrie

Charles Jézéquel

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2


mis à jour le 4 janvier 1999

1. Décrire les signes d'une détresse respiratoire néonatale et définir le score de Silverman.

Objectifs pratiques 

1. Interpréter un cliché thoracique du nouveau-né, du nourrisson et de l'enfant.  

 

L'appareil pulmonaire se développe avant la naissance. La multiplication des générations bronchiques commence très tôt dans la gestation et elle est anténatale. La multiplication des zones d'échanges gazeux apparaît tard dans la gestation (les alvéoles apparaissent vers 30 à 32 semaines). Le développement des zones d'échange se poursuit après la naissance jusqu'au cours de la 2ème année de vie.

1 Sémiologie respiratoire anténatale

 

Seule l'échographie a permis de faire une analyse sémiologique de l'appareil respiratoire avant la naissance. Ainsi, peuvent être mis en évidence :
- des états malformatifs : hernie diaphragmatique (présence de viscères abdominaux dans l'espace thoracique),
- malformation adénomatoïde du poumon. Epanchement liquidien.

2 Sémiologie respiratoire néonatale

 

Le déclenchement des mouvements respiratoires dans les 20 premières secondes de la vie aérienne est un phénomène multifactoriel (hypoxie, acidose, froid). La régularité de la respiration est sous la dépendance du centre bulbaire, de la mise en route de la circulation pulmonaire fonctionnelle, et de l'abaissement des résistances pulmonaires.

Les voies aériennes doivent être libres (évacuation du liquide intra-pulmonaire). La stabilisation de l'aération pulmonaire est sous la dépendance du "surfactant", substance phospholipidique sécrétée par les pneumocytes de type II à partir de la 35è semaine de gestation.

Sémiologie du syndrome de détresse respiratoire néonatale

Trois signes essentiels à l'inspection :
- augmentation de la fréquence respiratoire au-dessus de 60 cycles/seconde,
- cyanose habituellement régressive sous O2,
- signes de lutte respiratoire que l'on peut quantifier par le Score de Silverman. L'étude des gaz du sang artériel montre une hypoxémie d'intensité variable avec souvent acidose métabolique ou respiratoire.

 

Tableau I
Score de Silverman

Image à venir

 

La radiographie pulmonaire est indispensable pour la recherche d'un mécanisme étiologique.

L'étiologie peut être :
- une hernie diaphragmatique congénitale,
- un épanchement gazeux intra-thoracique (pneumothorax et/ou pneumomédiastin),
- une maladie pulmonaire : transitoire par manque de résorption du liquide alvéolaire, ou prolongée : maladie des membranes hyalines par défaut de sécrétion du surfactant.
- une atrésie des voies aériennes supérieures : atrésie des choanes, syndrome de Pierre-Robin (hypoplasie du maxillaire inférieur avec fente palatine et glossoptose).

3 Sémiologie pulmonaire du nourrisson et de l'enfant (moyens d'étude)

 

Ils ne sont pas très différents des moyens employés chez l'adulte. Nous insisterons sur les différences dues à l'âge de l'enfant.

3.1 Sémiologie clinique

Certains signes cliniques peuvent orienter vers une affection de l'appareil respiratoire mais ils ne sont pas spécifiques.

3.1.1 Inspection

Elle apprécie le cycle respiratoire, l'existence éventuelle d'un tirage sus-sternal, inter-costal ou sous-costal. La cyanose au repos ou à l'effort (cri) peut être d'origine respiratoire ou circulatoire. L'hippocratisme digital est fréquent dans les pneumopathies chroniques (D.D.B., mucoviscidose) mais aussi dans les cardiopathies congénitales (shunt gauche-droit en particulier).

3.1.2 Signes fonctionnels

- La toux est importante à caractériser car elle peut être sèche, grasse avec une expectoration souvent peu extériorisée chez l'enfant qui crache peu, rauque dans les maladies du larynx.

- La dyspnée. C'est une polypnée si la fréquence respiratoire est augmentée, une bradypnée lorsque le rythme est ralenti. La bradypnée inspiratoire avec tirage témoigne en générale d'une affection laryngée. La dyspnée expiratoire témoigne d'une augmentation des résistances bronchiques (asthme - bronchiolite). La dyspnée n'est pas spécifique d'une atteinte respiratoire. Elle peut être d'origine cardiaque (insuffisance cardiaque), métabolique (acidose) ou neurologique (atteinte bulbaire de certaines intoxications).

3.1.3 Signes physiques

La percussion peut montrer une matité (épanchement liquidien) ou une sonorité anormale (épanchement gazeux).
L'auscultation peut être difficile chez l'enfant qui ne coopère pas ou qui pleure. Néanmoins, il faut examiner le murmure vésiculaire et des bruits qui, comme chez l'adulte, peuvent être des râles (crépitants, ronflements, sibilants) ou des frottements (maladie pleurale).

3.2 Sémiologie radiologique

La sémiologie radiologique pulmonaire n'est pas sensiblement différente de celle de l'adulte. Toutefois, les difficultés de contention et l'absence de coopération (avant 5 à 6 ans) peuvent être à l'origine de difficultés. Il faut exiger un cliché respiratoire de face, l'expiration entraînant des opacités des bases et un élargissement du médiastin. Le thymus augmente la largeur du médiastin supérieur. Le coeur est plus volumineux que chez l'adulte (mesure du rapport cardio-thoracique). Il est important de savoir si le cliché a été pris en position debout (poche à air gastrique visible) ou couché. Le cliché de profil peut être indiqué selon les circonstances.
Les maladies pulmonaires peuvent se traduire par des opacités pleurales ou parenchymateuses ou des hyperclartés (épanchement gazeux, distensions parenchymateuses).

La tomodensitométrie est également devenue un examen important chez l'enfant dans des pathologiques chroniques (D.D.B., mucoviscidose) ou dans les bilans d'extension tumorale (lymphome notamment).

3.3 Epreuves fonctionnelles respiratoires (E.F.R)

Elles sont devenues un complément indispensable de l'examen clinique et radiologique pulmonaire. Leur utilisation est non seulement diagnostiques (ex : diagnostic d'un asthme) mais également un élément intéressant de suivi thérapeutique.

- Avant 4 ans : l'exploration est difficile nécessitant des techniques particulières (ballonnet oesophagien).

- Entre 4 et 7 ans : il faut placer l'enfant dans un pléthysmographe

- Dès 6 à 7 ans, la méthode spirométrique peut être employée, l'enfant étant capable de coopérer et d'effectuer des manoeuvres forcées.

Dans la pratique, les E.F.R sont surtout utilisées pour le diagnostic et le suivi évolutif des enfants atteints de syndrome obstructif expiratoire (S.O.E.) que l'on trouve dans l'asthme et aussi dans des maladies respiratoires chroniques, en association avec des syndromes restrictifs. C'est le cas de la mucoviscidose par exemple.

On mesurera la capacité vitale (C.V.), la capacité totale (C.T.), la capacité résiduelle fonctionnelle (C.F.R.), le volume expiratoire maximum seconde (V.E.M.S.), le débit expiratoire médian et le débit expiratoire maximum à 50 et 25 % de la capacité vitale forcée. Outre la diminution du V.E.M.S., l'obstruction des grosses bronches peut être appréciée facilement et pluriquotidiennement par l'enfant à l'aide de la mesure du débit expiratoire de pointe (D.E.P.) par un petit appareil appelé "peack-flowmeter".

Le résultat des E.F.R varie en fonction de la taille des enfants. Il faut donc disposer d'abaques comportant les résultats moyens et les écarts-types en fonction de cette taille.
On peut toujours mesurer les gaz du sang et apprécier la saturation en O2 (SA O2).

3.4 Endoscopie bronchique

Elle peut se faire au tube rigide mais aussi au tube souple (fibroscopie) grâce à l'amélioration du matériel et des conditions techniques. La tolérance est en général excellente et l'examen est possible dès la phase néonatale. On peut ainsi connaître l'état de la muqueuse, trouver un corps étranger, faire des prélèvements de sécrétions avec ou sans lavage broncho-alvéolaire.

Les principales indications peuvent être :
- le corps étranger des voies aériennes dont l'extraction est faite par endoscopie à tube rigide,
- la pathologie bronchique : prélèvement bactériologique, anomalie bronchique, compression intrinsèque ou extrinsèque.
- la pathologie pulmonaire (atélectasie, emphysème, pneumopathie traînante ou récidivante).

3.5 Scintigraphie pulmonaire

Chez l'enfant, l'exploration isotopique du poumon est possible : soit scintigraphie de perfusion (albumine marquée au Tc 99), soit scintigraphie de ventilation (gaz radioactif ou microaérosol).

Les indications principales de l'utilisation des radio-isotopes sont l'étude des séquelles de viroses respiratoires, la dilatation des bronches, la mucoviscidose et les pneumopathies interstitielles. Ces méthodes d'étude isotopique et la tomodensitométrie pulmonaire ont raréfié les indications de la bronchographie lipidolée.


Alimentation de l'enfant
Alain Dabadie

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 12 avril 1999

Questions d'examen
1 Besoins alimentaires
1.1 Besoins caloriques
1.2 Besoins en eau
1.3 Besoins azotés
1.4 Besoins en glucides
1.5 Besoins en lipides
1.6 Minéraux, macro-éléments
1.7 Besoins en vitamines
1.8 Oligo-éléments
2 Le lait maternel
2.1 Rappel physiologique
2.2 Les protéines
2.3 Les glucides
2.4 Les lipides
2.5 Les sels minéraux
2.6 Les oligo-éléments
2.7 Les vitamines
   

2.8 Les hormones et substances apparentées
2.9 Les facteurs de défense contre les infections
2.10 Conduite et hygiène de l'allaitement
3 L'allaitement artificiel
3.1 Législation
3.2 Composition des préparations pour nourrissons
3.3 Composition des préparations de suite (ex 2è âge)
3.4 Laits "de croissance"
3.5 "Laits de soja"
3.6 Aliments diététiques adaptés à certaines situations pathologiques
4 La diversification
4.1 Les différentes catégories d'aliments
4.2 Conduite pratique de la diversification
5 Pratique de l'alimentation - Les régimes
5.1 L'allaitement maternel
5.2 L'allaitement mixte
5.3 L'allaitement artificiel
5.4 Les régimes diversifiés
Questions d'examen

    1. Décrire les étapes successives de l'alimentation au cours de la première année de vie.
    2. Donner les avantages de l'allaitement au sein et les principales différences entre lait de femme et lait de vache.

 
1 Besoins alimentaires

Un besoin nutritionnel ou alimentaire se définit comme la quantité minimale d'un nutriment qui doit être régulièrement absorbée pour assurer une nutrition normale chez un individu en bonne santé.

Le terme sous-entend chez l'enfant plusieurs grands principes de nutrition :
- La nécessité d'apporter une alimentation équilibrée et adaptée à la maturité des fonctions digestives et rénales de l'enfant (en particulier du nouveau-né et du nourrisson).
- Le respect de l'aspect quantitatif et qualitatif.
- Le but d'un développement optimal et non maximal.
- Les besoins alimentaires couvrent :

    *
      l'apport énergétique minimal (métabolisme de base),
    *
      le remplacement des matériaux usagés,
    *
      l'apport énergétique destiné à l'activité physique,
    *
      l'apport calorico-protidique destiné au développement (croissance et maturation) spécifique à l'enfant.

De nombreux experts ont établi des "apports recommandés" en tenant compte autant des variations individuelles de chaque enfant que de l'insuffisance de nos connaissances sur certains points. La plupart des recommandations actuelles incluent donc une marge de sécurité pouvant atteindre 50 %. La consommation d'une quantité de nutriment respectant " à la lettre " les besoins nutritionnels élimine tout risque de carence ; le risque est très élevé en deça de 70% des apports quotidiens recommandés. Il faut enfin noter que ces apports recommandés tiennent souvent compte de traditions alimentaires et qu'ils ne constituent pas un dogme absolu, applicable à l'échelon individuel.
1.1 Les besoins caloriques

Les besoins sont exprimés en " grandes " calories (Kcal ou Cal) ou en Joules, en fonction du poids et de l'âge : 1 cal = 4,18 joules.
1.1.1 Aspects quantitatifs
1.1.1.1 Les besoins énergétiques (AET Apports énergétiques totaux)

Ils sont d'autant plus grands que l'enfant est jeune et/ou en croissance rapide (3 premières années, puberté) :
- Prématuré : 130 Cal/kg/j
- 3 à 9 mois : 110 Cal/kg/j
- Puberté : 50 à 55 Cal/kg/j     - 0 à 3 mois : 120 Cal/kg/j
- 2è enfance : 70 à 80 Cal/kg/j
- Adulte : 40 Cal/kg/j

On peut utiliser une formule en fonction du poids de l'enfant :
- pour les 10 premiers kilogrammes : 100 Cal/kg
- pour les 10 suivants : 50 Cal/kg
- pour le reste du poids : 25 Cal/kg.

Exemple : 10 ans - 32 kilos : (100 x 10) + (50 x 10) + (25 x 12) = 1.800 Cal.

Il y a un risque de surévaluation pour l'obèse et de sous évaluation chez l'hypotrophique dans le calcul de la ration en fonction du poids.

A 1 an (10 kg), les besoins sont à peu près à la moitié des besoins de la mère (1000 Cal).
A 15 ans, lors de la puberté (55 kg), les besoins sont de 1,5 fois ceux de l'adulte (3000 Cal).
1.1.1.2 Destinée de l'apport calorique

L'énergie est utilisée à (en ordre décroissant) :
1. le métabolisme de base
2. le renouvellement et la synthèse de tissus nouveaux (croissance)
3. les pertes énergétiques diverses (thermorégulation)
4. l'activité musculaire (surtout après 6 mois)

L'apport calorique destiné à couvrir le métabolisme de base et les pertes énergétiques est peu " compressible " ; en cas de carence calorique, c'est bien évidemment la part destinée à l'activité physique qui est réduite puis très rapidement la part destinée à assurer la croissance. Plus la croissance est rapide et plus elle sera altérée par un déficit énergétique.

Besoins liés à la croissance :
- Pendant sa première année un nourrisson grandit de 25 cm (sa taille s'accroit donc de 50%) et il prend 6 Kg (son poids triple pratiquement).
- Pendant les phases de croissance rapide (3 premières années, puberté), les besoins énergétiques destinés à la croissance sont élevés. On estime qu'il faut environ 5 Cal pour un gain de poids d'1 g.

    *
      de 0 à 3 mois l'enfant prend 30 g/j (soit un besoin de 150 Cal)
    *
      de 3 à 6 mois l'enfant prend 20 g/j (soit un besoin de 100 Cal)
    *
      de 6 à 12 mois l'enfant prend 12,5 g/j (soit un besoin de 60 Cal)
    *
      de 1 à 3 ans, le gain de poids journalier n'est que de 6 g (soit un besoin de 30 Cal).

Pendant la croissance la composition corporelle change avec diminution de l'eau totale, augmentation de la masse maigre et de la masse grasse qui atteint son maximum à 6 mois de vie (21% du poids corporel). Au cours des premiers mois le gain de poids est constitué de 3,3 g/Kg/J de lipides (41% du gain) et de 1 g/Kg/j de protéines (14% du gain).
Il faut par ailleurs souligner l'importance prépondérante de la croissance cérébrale qui représente à elle seule 50% des dépenses énergétiques de croissance au cours des 6 premiers mois de vie.
1.1.2 Aspects qualitatifs

Les calories sont apportées dans l'alimentation par les glucides (4 Cal/g), les protides (4 Cal/g), les lipides (9 Cal/g).
- Après diversification, l'équilibre recommandé est le suivant :

    *
      12 à 15% des calories protidiques,
    *
      30 à 35% des calories lipidiques,
    *
      50 à 65% des calories glucidiques.

Ces trois groupes ne sont pas interchangeables.

- Avant la diversification, le lait maternel assure une croissance optimale alors que sa composition est toute différente ; il apporte :

    *
      10% des calories protidiques,
    *
      30 à 50% des calories lipidiques.

Dans l'équilibre entre les 3 grandes catégories de nutriments, il faut tenir compte :
- de l'action dynamique spécifique représentant la fraction de l'apport énergétique alimentaire obligatoirement dispersée en chaleur. Elevée pour les protides, elle est faible pour les glucides. Ainsi pour disposer de 100 Cal, il faut :

    * 106 Cal glucidiques,
    * 114 Cal lipidiques,
    * 140 Cal protidiques.

- des différences métaboliques pour une mise en " réserve " ; ainsi pour stocker 100 Cal sous forme de graisses de réserve, il faut :

    * 101 Cal lipidiques
    * 120 Cal glucidiques (15% de perte)
    * 145 Cal protidiques (31% de perte)

Les régimes déséquilibrés majorent les risques de malnutrition.
1.2 Les besoins en eau
1.2.1 L'importance des besoins en eau s'explique par trois arguments :

1.2.1.1 L'eau est le principal constituant du corps avec une répartition différente chez l'enfant de l'adulte. Dans l'organisme, l'eau est répartie en deux secteurs :
- liquide intracellulaire (LIC)
- liquide extracellulaire (LEC), subdivisé en liquide intravasculaire et liquide intersticiel.
La répartition de ces secteurs est très différente chez l'adulte et chez l'enfant :

     
Adultes
   
Nourrissons
   
Nouveau-nés
   
Prématurés
LIC    
50%
   
35%
   
25%
   
20%
LEC    
20%
   
40%
   
50%
   
60%
TOTAL    
70%
   
75%
   
75%
   
80%

1.2.1.2 L'excrétion urinaire de l'eau est la voie d'élimination de déchets métaboliques solubles, d'autant que le pouvoir de concentration osmolaire est faible pendant les premiers mois de vie (< 400 mosmol/l).

1.2.1.3 L'évaporation hydrique sur la peau et les muqueuses est un facteur important de perte d'eau. Le rapport surface corporelle / poids est plus élevé chez l'enfant, expliquant l'importance de la déperdition hydrique.

Les besoins hydriques du nourrisson sont proportionnellement beaucoup plus élevés que ceux de l'adulte :
Age
   
Poids
   
Eau (ml/Kg)
- 3 jours
- 10 jours
- 3 mois
- 6 mois
- 9 mois
- 1 an    
3,0 Kg
3,2 Kg
5,5 Kg
7,5 Kg
8,7 Kg
9,5 Kg
   
80-100
125-150
130-160
120-150
110-140
100-120
1.2.2 L'équilibre de la balance hydrique

Normalement, il existe un équilibre entre :
1.2.2.1 les apports :

- eau ingérée, eau de constitution des aliments, eau provenant du métabolisme (1 g de protides et 1 g de glucides = 0,5 ml d'eau ; 1 g de lipide = 1 ml)
1.2.2.2 les éliminations qui se font par :

- les urines : 65% des éliminations (1000 ml/m²/j).
La filtration glomérulaire et la ré-absorption tubulaire peuvent être perturbées (tubulopathie, troubles endocriniens).
- les matières fécales : 5 à 10%.
On doit cependant rappeler dans les éliminations les fausses éliminations constituées par la sécrétion des sucs digestifs normalement ré-absorbés, sauf en cas de diarrhée et de vomissements. Proportionnellement, la quantité de sucs digestifs est beaucoup plus élevée chez l'enfant que chez l'adulte.
- la perspiration cutanée insensible, la transpiration et la respiration : 25 à 30%.
Ces chiffres varient en fonction de la chaleur ambiante (augmentation des besoins de 30 ml/kg/j par degré au dessus de 30°), du degré hygrométrique (problème des incubateurs), de la vitesse de circulation de l'air et enfin de la température du corps.

La balance hydrique, rapport entre les entrées et les sorties d'une part et le stock d'eau de l'organisme d'autre part, est considérablement plus élevée chez le nourrisson que chez l'adulte :

    *
      2 litres pour 14 litres chez un adulte de 70 kg (1/7)
    *
      0,7 litre pour 1,4 litre chez un nourrisson de 7 kg (1/2).

1.3 Les besoins en azote

Les protéines sont la seule source d'azote de l'organisme. Il n'existe pas de protéines de réserve et en cas de carence d'apport, la synthèse protéique se fera au dépens de protéines de structure et en premier lieu de la masse musculaire.
Les protéines ont des rôles biologiques aussi divers qu'indispensables :
- Croissance et développement de l'organisme (os, muscles, peau, phanères)
- Protéines de défense (immunoglobulines)
- Protéines de transport (albumine, hémoglobine, etc.)
- Protéines enzymatiques et hormonales.

Toutes les protéines alimentaires n'ont pas la même valeur nutritionnelle, aussi est-il artificiel de distinguer les besoins quantitatifs et qualitatifs, ce que nous ferons cependant pour faciliter l'exposé.
1.3.1 Aspect quantitatif

La mesure quantitative du besoin azoté se fait par la technique des bilans : quantité ingérée moins quantité rejetée (rejetée dans les urines : azote métabolisé ; dans les selles : protéines non métabolisées + petite quantité secrétée par le tube digestif).
Tout bilan chez le nourrisson nécessite l'immobilisation sur un lit métabolique, manoeuvre qui, en elle-même, peut modifier le métabolisme. Le bilan dépend par ailleurs de multiples facteurs : taux de protides du régime, qualité des protéines (teneur en acides aminés), ration calorique, équilibre protides / autres nutriments, facteurs psychologiques (immobilisation, visite de la famille,etc). Ceci explique la grande variabilité des recommandations.

Apports protéiques : marges de variation acceptables
Groupes d'Age
   
g/kg/24 h
   
g/24 h
1 - 3 mois
   
2-2,2
   
-
3 - 6 mois
   
1,8-2
   
-
6 - 9 mois
   
1,5 - 1,8
   
-
9 - 12 mois
   
1,4 - 1,7
   
-
1 - 3 ans
   
1,2
   
15 à 45
4 - 6 ans
   
1,1
   
20 à 60
7 - 9 ans
   
1
   
30 à 70
Garçons :
10 - 12 ans
13 - 15 ans
16 - 19 ans
   

-
-
-
   

45 à 85
60 à 95
60 à 110
Filles :
10 - 12 ans
13 - 15 ans
16 - 19 ans
   

-
-
-
   

45 à 75
50 à 85
50 à 85
1.3.2 L'aspect qualitatif

La valeur des protéines apportées par un aliment varie beaucoup en fonction des acides aminés qui la composent (AA essentiels) et de sa digestibilité.
1.3.2.1 Les Acides Aminés Essentiels :

Parmi les 23 acides aminés 8 sont dits essentiels (isoleucine, leucine, lysine, méthionine, phénylalanine, thréonine, tryptophane et valine) car l'organisme ne peut en faire la synthèse. On y ajoute chez l'enfant l'histidine, essentielle pour la croissance, mais également les acides aminés dits semi-essentiels (tyrosine, cystéine, taurine) dont les voies de synthèse sont "immatures".

La valeur biologique d'une protéine est fonction de la présence de ces acides aminés indispensables et de l'équilibre de leurs taux respectifs.
La valeur d'une protéine est donnée en comparant sa composition en acides aminés à celle d'une protéine de référence : l'oeuf. En pratique, lorsque l'on compare différents régimes, on utilise plus volontiers le lait que l'oeuf et il serait plus logique pour l'homme et le nourrisson, d'avoir la protéine du lait de femme comme protéine de référence. Il existe en France une protéine " idéale "de référence officielle en termes de composition pour chacun des AA (J.O du 14/09/1976).

Les protéines d'origine animale (oeuf, viandes, poissons, lait) ont une composition satisfaisante en acides aminés. Ce sont des protéines nobles, mais elles se conservent mal et sont chères. Les protéines d'origine végétale, sont déficientes en plusieurs acides aminés essentiels : les céréales principalement en lysine, les légumineuses en méthionine. Deux légumineuses font exception : le soja et le tournesol.
On connaît la composition en acides aminés des différentes protéines et on en détermine ainsi l'indice protéique. L'acide aminé dont le taux est le plus bas par rapport au taux de la protéine de référence est dit facteur limitant.
On peut ainsi établir différents coefficients :
- taux d'AA essentiels par rapport à 1 g d'azote d'une protéine,
- taux d' AA essentiels par rapport au poids des acides aminés totaux,
Il faut en effet également tenir compte des AA non essentiels. Dans les phases de croissance rapide, la capacité de synthèse des AA non essentiels telle la glutamine peut devenir un facteur limitant de la proteosynthèse.
Un rapport précis AA essentiels / AA totaux doit donc être respecté : 0,4 de 0 à 6 mois, 0,33 à 2 ans.

Estimation des besoins en acides aminés
 
ACIDES AMINES (mg/j)
   
DE 4 A 6 MOIS
   
DE 10 A 12 ANS
Histidine
   
33
   
?
Isoleucine
   
83
   
28
Leucine
   
135
   
42
Lysine
   
99
   
44
AA Soufrés totaux (Methionine, Cystine)
   
49
   
22
AA Aromatiques totaux (Phénylalanine, tyrosine)
   
141
   
22
Thréonine
   
68
   
28
Tryptophane
   
21
   
4
Valine
   
92
   
25

Remarques :
1. Il est souhaitable que la moitié des protéines de l'alimentation soient des protéines animales : ceci est largement réalisé dans les pays industrialisés, mais malheureusement pas dans les pays du tiers-monde.

2. On peut, par des mélanges de protéines de valeur biologique modeste, mais contenant des acides aminés en proportion différente, obtenir un produit bien meilleur : c'est la "supplémentation". Par exemple, en mélangeant une protéine de valeur biologique 50 à une protéine de baleur biologique 60, on peut obtenir un mélange de valeur biologique 80, en diminuant les facteurs limitants de chaque protéine.

3. On doit insister sur les besoins en lysine, particulièrement importants dans les périodes de croissance et sur le déficit en cet acide aminé dans les céréales qui sont cependant la base de la plupart des farines utilisées dans l'alimentation de l'enfant.

4. Les notions de besoins en acides aminés prennent une importance très grande dans les troubles du métabolisme de certains acides aminés (exemple : la phénylcétonurie) qui nécessitent des régimes restrictifs en certains acides aminés.
1.3.2.2 Digestibilité des protéines

Une protéine se juge également par sa digestibilité, la vitesse de libération des acides aminés au cours de la digestion, la vitesse d'absorption des acides aminés. La digestibilité dépend de la composition globale de l'aliment telle que la teneur en fibres ou en phénols des végétaux. Le mode de préparation culinaire (cuisson) modifie également la digestibilité des protéines.
Ces différents facteurs permettent d'établir la valeur d'utilisation nette ou le coefficient d'utilisation digestive : CUD (N retenu/N ingéré).

Le tableau suivant résume ces qualités nutritionnelles des protéines alimentaires :

Valeur nutritionnelle des protéines (en %)
Protéine
   
Digestibilité
   
Valeur
Biologique
   
Acide Aminé
Limitant
- Oeuf    
99,1
   
98,7
   
-
- "Petit lait"    
99,8
   
91,4
   
-
- Muscle de boeuf    
92
   
87,5
   
-
- Caséine    
93,1
   
83,9
   
Méthionine
- Farine de Soja    
79,4
   
74,1
   
Méthionine
- Farine d'Arachide    
90,9
   
50,8
   
Lysine - Méthionine
- Gluten de Blé    
98,5
   
48,5
   
Lysine - Thréonine
- Zéïne (maïs)    
48,3
   
26,7
   
Lysine - tryptophane
1.4 Besoins en glucide

Les glucides ont essentiellement un rôle d'apport calorique: ils représentent 50 à 60% de l'apport énergétique total (AET).

Classification des glucides alimentaires :

SUCRES LIBRES
Monosaccharides
Glucose
Fructose
Oligosaccharides
Saccharose
Lactose
Maltose
POLYSACCHARIDES
De réserve
Dextrine
Amidon
---------------------------------
Gommes
Mucilages
Algues
De structure
Pectines
Hémicelluloses

Celluloses
Lignines
   





Glucides
assimilables




--------------------------------


Glucides non assimilables
ou
Fibres alimentaires
   








Glucides
digestibles








---------------------------------

Fibres brutes
1.4.1 Les oses simples

Le glucose pur ou venant de l'hydrolyse intestinale du saccharose, du lactose ou de glucides plus complexes est le sucre type mais il ne peut être utilisé à une dose supérieur à 5%.
Le fructose est présent dans les fruits et le miel ou issu de l'hydrolyse du saccharose.
Le xylose est un pentose constituant majeur des polysaccharides de parois cellulaires des plantes (voir " fibres "). Il n'est pas présent à l'état de monosaccharide dans l'alimentation.
1.4.2 Les disaccharides

Le lactose (glucose + galactose) est le sucre du lait maternel. Le galactose entre dans la constitution des cérébrosides, donc de la substance cérébrale. En raison d'un faible pouvoir édulcorant, il ne risque pas de développer l'appétance pour le goût sucré de l'enfant.
Le saccharose (glucose + fructose) extrait du suc de betterave ou de canne à sucre, également présent dans certains fruits est bien toléré mais il est à l'inverse très sucrant et très cariogène, son apport doit rester inférieur à 10% des apports énergétiques totaux.
Le maltose (glucose + glucose) est issu de l'hydrolyse des polymers de glucose après action des amylases.
1.4.3 Les polymères de glucose ou polysaccharides
Ce sont des polymères de haut poids moléculaire, de structure complexe, sans saveur sucrée, et de digestibilité variable.
- La dextrine-maltose est bien absorbée. Elle est moins sucrante que le saccharose et accoutume moins l'enfant à une alimentation sucrée. Elle est très souvent ajoutée au lait dans de nombreuses préparations pour nourrissons et de suite à sucrage mixte.
- L'amidon est le principal glucide de réserve du monde végétal : tubercules (pomme de terre), racines (manioc), graines (riz, maïs). Il est formé de deux types de polysaccharides (l'amylose et l'amylopectine). La capacité de digestion de l'enfant pour ces glucides plus complexes est faible au début de la vie (rôle de l'amylase pancréatique), mais se développe rapidement.
1.4.4 Les fibres alimentaires

Elles proviennent des plantes où elles forment un complexe de polymères.
La cellulose, est retrouvée dans la peau des fruits, l'enveloppe des graines, les feuilles et tiges des plantes comestibles. Les pectines et l'hémicellulose forment une matrice entourant la cellulose dans la paroi cellulaire.
Les fibres alimentaires non digestibles et non assimilables jouent un rôle biologique important, en particulier du fait de leur pouvoir de rétention d'eau. On note par exemple une rétention d'eau de 4 x son poids pour le son de blé, 8 x pour le chou, 13 x pour la pomme. Ces propriétés sont utilisées pour le traitement diététique de la constipation.
Les fibres non assimilables favorisent la croissance bactérienne (fibres fermentescibles). Sous l'influence de la flore intestinale, elles peuvent être en partie digestibles (de 20 à 80% pour la cellulose, à 50% pour le son de blé, à 90% pour les pectines, les lignines sont totalement non digestibles).
1.5 Besoins en lipides
1.5.1 Composition des lipides
1.5.1.1 Les lipides simples :

- Il s'agit en premier lieu des triglycérides représentant plus de 95% des graisses alimentaires. Ils sont constitués d'une molécule de glycérol et de 3 acides gras.

    *
      Les acides gras (AG) sont constitués d'une chaîne d'atomes de carbone saturée ou non.
      Ils sont représentés par :
      - Le nombre d'atomes de carbone : C18
      - Le nombre de doubles liaisons: : 3
      - La position de la première double liaison par rapport à l'extrémité méthyle : n-3
    *
      Les acides gras polyinsaturés à longue chaînes (AGPLC) , font plus de 18 atomes de carbone, comportent plusieurs doubles liaisons et sont issus après des réactions de désaturation et d 'élongation des 2 acides gras essentiels (AGE) en C18 des séries n-3 et n-6 ne pouvant être synthétisés par l'organisme et devant être apportés par l'alimentation : Acide linoléique (C18:2 n-6), acide alpha-linolénique (C18:3 n-3). Les autres AGPLC les plus importants sont l'acide arachidonique (C20:4 n-6), l'EPA (C20:5 n-3) et le DHA (C22:6n-3).

- On peut également citer les esters partiels moins répandus : mono et diglycérides.
1.5.1.2 Les lipides composés :

Ils contiennent une partie non lipidique dans leur structure :
- Phospholipides (acide phosphorique) ; ex : lécithine d'oeuf
- Glycolipides (composé glucidique)
- Lipoprotéines (composé protéique) : molécules de transport.
En général, ce sont des molécules à haute fonction biologique : constituants des membranes cellulaires, d'organites intracellulaires (mitochondries).
1.5.1.3 Les lipides dérivés :

Il s'agit des stérols (et stéroides à action hormonale). Ce sont des alcools complexes dont le cholestérol est le plus important d'origine animale. Constituant normal des membranes cellulaires, il est également le précurseur de la synthèse de l'acide cholique et des acides biliaires d'une part et des hormones stéroidiennes (surrénaliennes et sexuelles) d'autre part.
1.5.2 Le rôle des lipides, les besoins
1.5.2.1 Apport énergétique,

grâce à leur densité calorique élevée (9 Cal/g) : ils doivent représenter 30% de l'AET.
1.5.2.2 Rôle qualitatif structural et fonctionnel :

Les AGPLC sont des constituants majeurs des membranes cellulaires. Le DHA est ainsi retrouvé à des taux élevés dans la rétine et le cerveau.
Les AGPLC sont également précurseurs des éicosanoïdes, prostaglandines, thromboxanes, leucotriènes.
De nombreuses études chez l'animal et chez l'enfant (prématuré en particulier) ont souligné le rôle majeur des AGE essentiels dans le développement cérébral et rétinien et " affiné " les recommandations dans l'apport des AGE précurseurs mais également discuté la nécéssité d 'une supplémentation en DHA.
On a ainsi énonçé des recommandations d'apport :

    *
      Acide linoléique (C18:2 n-6): 2,5 à 10% de l'AET (un apport supérieur risque de bloquer la Delta 6 désaturase, freinant la synthèse des AGPLC ). La législation impose chez le nouveau-né à terme un apport de 300 à 600 mg/Kg/J soit 2,5 à 5,5 % de l'AET.
    *
      Acide alpha linolénique (C18:3 n-3): 0,2 à 0,5 % de l'AET. (70 à 150 mg/Kg/J)
    *
      Rapport Linoléique/Linolénique de 5 à 15
    *
      AGPLC n-3: 0,5% des AG totaux
    *
      AGPLC n-6: 1% des AG totaux.

Au vu de la teneur en DHA du lait maternel et d'une certaine immaturité enzymatique, la supplémentation en DHA (30 à 75 mg/Kg/J) semble particulièrement justifiée chez le nouveau-né et le prématuré en cas d'allaitement artificiel. Les huiles de poisson qui ont pu être proposées pour leur richesse en DHA sont également riches en EPA dont l'apport excessif peut freiner la synthése des autres AGPLC. Une attention toute particulière doit donc être apportée dans l'équilibre entre les différents AG en cas de supplémentation de l 'alimentation.
1.5.2.3 Véhicule des vitamines liposolubles

Les lipides sont les transporteurs indispensables à l'absorption des vitamines liposolubles (A,D,E,K) (Cf Vitamines)
1.6 Minéraux, macro-éléments
1.6.1 Sodium

Fonction des pertes rénales et extrarénales (cutanées et digestives) et des quantités de Na+ incorporées dans la synthèse des nouveaux tissus, les besoins peuvent être évalués de 1 à 2 mEq/Kg/J de la naissance à 3 ans.
1.6.2 Potassium

Les apports ( 1 à 2 mEq/Kg/J) doivent couvrir les pertes (fécales, urinaires, cutanées) et les besoins de croissance.
1.6.3 Calcium

Les besoins dépendent de la rétention calcique osseuse lors de la croissance, du coefficient d'utilisation digestive, de l'imprégnation vitaminique D.
Le squelette contient la quasi-totalité du calcium de l'organisme. L‘accroissement de la masse calcique osseuse est évaluée à 150 mg/J pendant la première année , 90 mg/J pendant la deuxième. Une partie du calcium est mobilisable et doit, en particulier, assurer un rôle biologique dans l'homéostasie sous forme de calcium ionisé (cofacteur enzymatique, rôle dans l'excitabilité neuromusculaire).

Les besoins quotidiens sont de :
- 400 mg avant 6 mois
- 600 mg de 6 à 12 mois.
Le rapport Ca/P doit être de 1,2 à 1,5 pour assurer l'équilibre nécessaire à l'ossification :
- 800 mg de 1 à 9 ans
-1000 mg de 10 à 12 ans
-1200 mg pendant la puberté
1.6.4 Phosphore

Egalement essentiel à la croissance osseuse, les besoins en phosphore sont liés en raison de leur liens métaboliques aux besoins en calcium. Le rapport Ca/P doit être impérativement supérieur à 1 avant un an puis les apports peuvent être identiques.
1.6.5 Magnésium

Mal connus chez l'enfant les besoins semblent convenablement couverts par l'alimentation (50 mg/24h chez le nourrisson, 100 à 200 mg / 24 h chez l'enfant).
1.7 Besoins en vitamines

Les besoins vitaminiques n'ont été pendant longtemps considérés que sous l'angle des maladies de carence : rachitisme, encore rencontré, scorbut, béribéri, etc..., maladies qui ne se voient plus dans notre pays. Il existe cependant, particulièrement chez l'enfant, des situations d'hypovitaminoses latentes, méconnues, qui sont peut-être fréquentes. Une alimentation déséquilibrée, à base d'aliments industriels, peut en effet facilement réaliser un apport vitaminique insuffisant. Les apports recommandés, mal appréciés, permettent cependant, s'ils sont respectés, d'éviter probablement ces situations de carence.

Apports vitaminiques recommandés chez l'enfant.
Vitamines /24 h
   
Nourrissons
   
Enfants de plus de 1 An
Vitamine A (µg)    
300 - 450
   
450 - 700
Vitamine D (UI)    
1000
   
400
Vitamine E (mg)    
3 - 5
   
6 - 7
Vitamine K (µg)    
5 -10
   
15 - 30
Vitamine B1 (mg)    
0,3 - 0,5
   
0,7 - 1
Vitamine B2 (mg)    
0,4 - 0,5
   
0,8 - 1,2
Vitamine B5 (mg)    
2 - 5
   
3 - 5
Vitamine B6 (mg)    
0,3 - 0,6
   
1 - 2
Vitamine B12 (µg)    
0,3 - 0,5
   
0,7- 1,4
Vitamine C (mg)    
30 -50
   
40 - 50
Acide Folique (µg)    
20 - 100
   
50 - 100
Biotine (µg)    
10 - 15
   
20 -30
Niacine (mg)    
5 - 6
   
9 - 13

Valeurs conseillées permettant d'éviter un état de carence et un risque de toxicité. La variabilité des besoins traduit les variations en fonction de la situation métabolique de chaque enfant, et surtout le caractère encore incomplet des connaissances sur ce sujet.
Depuis 1992, les aliments lactés diététiques 1er et 2è âge sont supplémentés à raison de 400 à 450 UI/l environ. Cette supplémentation est un peu faible et une couverture des besoins nécessite l'adjonction médicamenteuse de 400 à 800 UI/j.
1.8 Les oligo-éléments

Il y a 21 métaux lourds dans les tissus, un certain nombre étant reconnus comme essentiels. Il est cependant difficile de donner des recommandations d'apport. En pratique une alimentation équilibrée couvre bien les besoins et, en l'état actuel des connaissances, ce sont essentiellement les apports en fer et en fluor qui demandent une attention particulière.

Les besoins en fer sont plus importants au cours de la première année, particulièrement entre 6 et 12 mois, qu'à n'importe quel autre moment de la vie. Ils sont estimés à 10-15 mg/j.

Des apports suffisants en fluor devraient être assurés à tous les nourrissons dès les premières semaines de vie jusqu'à l'âge adulte, de l'ordre de 0,1 à 1 mg/j durant la première année, de 0,5 à 1,5 mg/j les deux années suivantes, de 1,5 à 2,5 mg jusqu'à 16 ans. Les eaux de boisson étant habituellement peu fluorées en France, une supplémentation médicamenteuse est nécessaire lorsque la concentration en fluor de l'eau de boisson est inférieure à 0,3 mg/L.

Apports recommandés (valeurs moyennes habituellement conseillées).
Oligoéléments (/ 24 h)
   
Nourrisson (1 mois à 1 an)
   
Enfants de plus de 1 an
Zinc (mg)    
5
   
10
Cuivre (mg)    
0,4-0,7
   
0,7-2
Chrome (ug)    
50
   
100
Manganèse (mg)    
0,4-0,8
   
1
Fer (mg)    
6-10
   
10
Fluor (mg)    
0,25
   
0,5-2
Sélénium (ug)    
10-15
   
20-30
Molybdène (ug)    
40-60
   
100-200
Iode (ug)    
40-50
   
70-120
Cobalt (ug)    
50-100
   
150-200

2 Le lait maternel
2.1 Rappel physiologique

La maturation mammaire (développement des canaux galactophores) se produit au cours de la grossesse sous l'action conjointe des oestrogènes et de la progestérone qui développe les acinis. Ces hormones sont d'origine ovarienne et surtout placentaire chez la femme enceinte.
La sécrétion lactée est elle-même sous la dépendance de la prolactine, secrétée par l'hypophyse antérieure dès le deuxième trimestre de la grossesse (une très légère secrétion lactée est possible au 5ème mois de grossesse), mais dont l'action est inhibée par les hormones placentaires. L'accouchement et la disparition du placenta lèvent cette inhibition permettant à la prolactine d'agir rapidement sur la glande déjà préparée : c'est la montée laiteuse.

La sécrétion lactée est favorisée par l'augmentation des glucocorticoïdes libres type Cortisol, liée en partie à la sécrétion accrue d'ACTH qui accompagne l'accouchement. Par contre, la sécrétion des gonadotrophines hypophysaires est bloquée par l'action de la prolactine, ce qui explique l'aménorrhée physiologique, transitoire de la lactation.

L'éjaculation du lait et l'entretien de la sécrétion dépendent d'un mécanisme neuro-hormonal induit par la succion du mamelon. Ces excitations mécaniques déclenchent, par l'intermédiaire du diencéphale, une sécrétion de prolactine et d'ocytocine. L'ocytine produite dans le lobe postérieur de l'hypophyse entraîne la contraction des cellules myoépithéliales qui entourent les acinis et l'éjaculation du lait.

Enfin, le diencéphale et par lui le cortex cérébral joue un rôle dans la sécrétion lactée, expliquant en particulier l'influence des émotions sur la sécrétion.

On retiendra de ce rappel physiologique que :
- la sécrétion lactée se prépare pendant la grossesse ; c'est donc à ce moment qu'il convient de conseiller ce mode d'allaitement à la future mère et de noter l'état des seins et des mamelons ;
- la mère doit avoir le désir de nourrir son enfant et un climat favorable doit être maintenu en évitant anxiété, émotions, soucis, douleurs (action diencéphalique) ;
- la succion joue un rôle important dans le déclenchement et le maintien de la sécrétion lactée.

Le colostrum constitue la première secrétion: Il s'agit d'un liquide jaune, de densité élevée (1040 -1060), riche en protéines (23g/L) et contenant une quantité importante d'acides aminés libres (20%). Il est, de plus, riche en sels minéraux (magnésium, calcium) et en immunoglobulines, surtout IgA. Il contient des macrophages, contribuant à la défense contre l'infection. Il favorise l'évacuation du méconium. . La sécrétion est facilitée par la mise au sein de l'enfant qui, s'il n'a reçu aucune alimentation, a soif et tète avec énergie. La quantité au début faible (20 à 40 ml seulement) va augmenter rapidement.
Le lait de transition succède au colostrum pendant une période intermédiaire de quelques jours qui aboutit au lait mature en 2 à 3 semaines.

Ce chapitre s'attache à décrire les qualités nutritionnelles du lait maternel par la description de la COMPOSITION DU LAIT MATURE

Une analyse comparative, même grossière, des laits des différents mammifères met en évidence les différences de composition liées aux différences de besoins de croissance et souligne la parfaite adaptation du lait à l'espèce.

De façon schématique, la teneur en protéines est d'autant plus élevée que la croissance est rapide; la teneur en lactose est d'autant plus élevée que la croissance cérébrale post-natale est importante; la teneur en graisses est d'autant plus élevée que les besoins énergétiques (notamment de thermo-régulation) sont importants.

Ces points sont illustrés dans le tableau suivant :
 

 Lapin
Homme
   
Temps de doublement du
poids de naissance
5 jours
5 mois
   
Teneur en Protéines
du lait maternel
13 g/100ml
1,2 g/100ml


Lapin
Homme
   
Poids du cerveau
10 g
1 250 g
   
Teneur en lactose
1,8 g/100ml
6,8 g/100ml


Baleine
Homme
         
Teneur en lipides
45 g/100ml
3,5 g/100ml

Pour souligner ses qualités, d'autant que les "habitudes alimentaires" l'ont au cours des décennies passées mis en concurrence avec le lait de vache, il est habituel de comparer point par point le lait de femme à la composition du lait de vache. Ceci permet d'expliquer les avantages de l'allaitement maternel et de comprendre les modifications apportées pour la conception des aliments lactés infantiles, même si l'objectif de la reconstitution industrielle du lait de femme tient de la gageure.

Tableau de Composition comparée lait de femme - lait de vache
( composition par décilitre)
     
LAIT DE FEMME
   
LAIT DE VACHE
Protides totaux (en grammes)
a) Protéines
- caséine
- lactosérum (protéines solubles)
. lactalbumine
. Bêta - lactoglobuline
. lactotransferrine
. immunoglobuline
b) Azote non protéique    
0,8 à 1,2
1,2
40%
60%
35%
0
15%
10%
0,05
   
3 à 3,5
3,5
80%
20%
7%
8%
0,2%
2%
0,03
Glucides (en grammes)
a) lactose
b) oligosaccharides    
7
6
1
   
5
5
traces
Lipides (en grammes)
AG saturés / AG non saturés
   
3 à 4
50%/50%
   
3 à 4
75 % / 25 %
Sodium (en milligrammes)
Chlore
Phosphore
Calcium
Rapport C/P
Magnésium
Total minéraux    
10 - 20
45
14-15
27-32
2
3,5
200
   
50 - 60
110
90
120
1,3
12
700
Fer (en microgrammes)
Zinc
Cuivre
Iode    
30 à 70
50 à 400
25 à 70
3 à 50
   
10
200 à 500
2 à 15
Vitamines
. A (UI)
. D (UI)
. E (mg)
. C (mg)    

200
20 à 40
0,35
4
   

45
25
0,1
10
Charge osmotique (mOsm/L)
Déchets solubles d'élimination urinaire    

90
   

280
Calories     
60 - 80
   
57 - 85
2.2 Les protéines
2.2.1 Les caséines

On note une faible proportion de caséines dans le lait de femme, en particulier au cours des premiers jours, pour atteindre le rapport classique de 40% dans le lait mature.
La caséine beta est la plus importante ; sa dégradation libère des peptides à activité biologique (activité opioide ou anti-infectieuse). La caséine K, plus récemment décrite, est une glycoprotéine contenant 50% de glucides. La digestion de la caséine pourrait libérer une fraction glycopeptidique stimulant la croissance des bifidobactéries.
Quoique moins riches en phosphore que dans le lait de vache, ces phosphoprotéines (complexe de caséinate de calcium et de phosphate de calcium) permettent d'apporter à l'enfant calcium et phosphore dans un rapport optimal facilitant leur absorption.
La précipitation intragastrique des protéines du lait de femme entraîne une coagulation fine permettant une vidange gastrique de 60 à 90'. A l'inverse, la précipitation du lait de vache du fait de sa richesse en caséines aboutit à une coagulation en gros blocs avec une vidange gastrique de 3 heures.

2.2.2 Les protéines solubles (du lactosérum)

- L'alpha lactalbumine, protéine de 14000 daltons, possède une structure en partie analogue au lysozyme mais également à la lactalbumine bovine.

- La lactotransferrine (25 % des protéines du lactosérum) a la propriété de fixer le fer à l'état trivalent et son avidité pour le fer est trois fois plus importante que celle de la sidérophiline. La glande mammaire a ainsi la capacité de capter le fer sérique et de le transporter jusque dans le duodénum du nouveau-né où il est absorbé et repris par la ferritine. Cette globuline, en s'emparant du fer nécessaire au développement de certaines bactéries, aurait ainsi un effet protecteur anti-infectieux.

- Le lait maternel contient par ailleurs un taux élevé d'immunoglobulines et de lysozyme (cf chapitre sur les facteurs de défense).

- Rappelons qu'il est dépourvu de bêta lactoglobuline.

2.2.3 L'équilibre en acides aminés (A.A.) du lait maternel est mieux adapté : peu de méthionine, plus de cystine. Le lait de femme est riche en taurine (8 mg/100ml) et en cystéine, A.A semi essentiels. Le rapport AA essentiels sur AA non essentiels est de 0,75.
2.2.4 L'azote non protéique

Il représente 20% de l'azote total du lait humain.
Il s'agit :
- d'acides aminés libres avec fort taux de taurine et d'acide glutamique.
- de l'azote contenu dans les oligo-saccharides (N-Acetylglucosamine).
- des nucléotides, molécules composées d'une base purique ou pyrimidique, d'un pentose et d'un (ou plusieurs) groupement phosphate. Précurseurs de la synthèse des acides nucléiques, on conçoit leur rôle biologique fondamental. Ils auraient par ailleurs de multiples autres effets ayant motivé la supplémentation des formules lactées aux U.S.A. et tout récemment en France.

On leur a attribué :
- des effets immunologiques : maturation des lymphocytes, production d'interleukine 2, activité NK.
- une meilleure biodisponibilité du fer.
- un effet favorable sur la croissance du bacille bifide.
- un effet stimulant de la croissance et de la maturation du tube digestif.
- une augmentation des taux circulants des HDL.

Leurs taux dans le lait maternel sont les suivants :
- Cytidine MP : 1 à 17 mg/L
- Uridine MP : 0,1 à 10,5 mg/L
- Adénosine MP : 0,1 à 5,4 mg/L
- Guanosine MP : 0,1 à 3 mg/L
- Inosine MP : 0 à 3 mg/L
2.3 Les glucides

Le lait de femme est plus riche en glucides que le lait de vache (6 à 7 g/L contre 4,5 à 5g/L), mais surtout, il s'agit de lactose beta, jouant un rôle important dans l'absorption du calcium et dans la formation des cérébrosides dont on conçoit l'importance au début de la vie quand la croissance du cerveau est particulièrement rapide. Une partie du lactose du lait de femme n'est pas hydrolysée et absorbée, sa transformation en acide lactique dans le colon entraine une baisse du pH, favorise le développement de la flore acidophile riche en bacilles bifides.
Les glucides du lait de femme sont également constitués de 15 à 20% d' oligosaccharides constituant le "gynolactose". Il s'agit de monosaccharides (galactose, glucose, fucose, N-Acetyl-glucosamine, N-Acetyl-galactosamine, acide neuraminique) incorporés dans des oligosaccharides dont la quantité et la variété sont très spécifiques au lait humain.
2.4 Les lipides

Si les taux sont proches dans le lait de femme et le lait de vache, la différence tient essentiellement dans l'aspect qualitatif et en particulier la richesse en acides gras polyinsaturés.
2.4.1 Quantité globale

Le taux moyen est de 3,5 g/100ml ; il est surtout très fluctuant au cours même de la tétée, d'une période à l'autre de la journée, en fonction de l'alimentation de la mère et bien sur d'une femme à une autre.
2.4.2 Composition

Le lait maternel est constitué de triglycérides (à 80%), de diglycérides, d'acides gras (AG) libres, de cholestérol et de phospholipides.
Les triglycérides sont composés d'une molécule de glycérol et de trois AG. La disposition des différents AG sur les trois sites de liaison du glycérol sont variables d'une espèce à une autre. Dans le lait de femme, on note une forte proportion d'acide palmitique (C16:0) et d'acide myristique en position C2, alors que les positions C1 et C3 sont surtout occupées par les AG insaturés. La disposition différente dans le lait de vache, où l'acide palmitique occupe les positions C1et C2, peut expliquer la moins bonne digestibilité et justifie la supplémentation des aliments lactés en graisses d'origine végétale et TCM.
Le lait maternel est toutefois essentiellement constitué d'AG à longue chaîne : 98% de C12 à C22.
2.4.3 AG insaturés

Les monoinsaturés :
- Acide palmitoléique (C16:1n-9) (0,5%)
- Acide oléique (C18:1 n-9) (25 à 30%)

Les polyinsaturés à longue chaine(AGPLC ou PUFA pour les anglophones) : Ils appartiennent à 2 " séries " et sont synthétisés par une suite de réactions enzymatiques d'élongation et de désaturation :

- Série n-6

    * Acide linoléique (C18:2 n-6) (10-15%)
    * Acide di-homo-gamma linolénique (C20:3 n-6) (0,3%)
    * Acide arachidonique (C20:4 n-6) (0,4%)
    * Acide docosatetraénoique (C22:4 n-6) (0,1%)

- Série n-3

    * Acide alpha linolénique (C18:3 n-3) (0,5-0,8%)
    * Acide éicosapentaénoique (C20:5 n-3) ( 0,12% ) (EPA)
    * Acide docosapentaénoique (C22:5 n-3) (0,5%)
    * Acide docosahexaénoique (C22:6 n-3) (0,4%) (DHA)

Les AG polyinsaturés jouent de multiples roles biologiques : précurseurs d'éicosanoïdes (prostaglandines), constituants membranaires (retrouvés à un taux élevé dans le cerveau et la rétine). Si la nature "essentielle" de l'acide linoléique est connue de longue date (parfois appelé vitamine F) et a fait l'objet d'une règlementation depuis plus de 20 ans, les connaissances sur les autres AG polyinsaturés à longue chaîne sont plus récentes.
Les étapes de désaturation des AG semblent moins fonctionnelles chez le nouveau-né surtout prématuré, en particulier pour la synthèse de DHA (série n-3) et d'acide arachidonique (série n-6). La présence de ces AGPLC dans le lait maternel revet une importance toute particulière à l'origine de nombreux travaux et d'essai de supplémentation. Les AG de supplémentation sont cependant pour la plupart issus d'huiles de poisson, riches en EPA dont l'apport en trop forte proportion pourrait freiner la synthèse d'acide arachidonique par blocage de la delta 5 désaturase. Un équilibre très soigneux est indispensable à respecter dans cette supplémentation et doit suivre les apports recommandés: 4 à 10% de l'AET pour l'acide linoléique, un rapport acide linoléique/acide alpha linolénique de 5 à 15, des AGPLC n-3 à 0,5% et n-6 à 1% des AG totaux.
2.5 Les sels minéraux

Le taux est beaucoup plus faible dans le lait de femme (200 mg/100ml) que dans le lait de vache (700 mg/100ml).
La charge de chlorure de sodium, plus élevée dans le lait de vache (27 mEq/l, contre 9 mEq/l) dépasse les possibilités d'élimination du rein du petit enfant, non encore mature.
Les taux de calcium et de phosphore plus élevés dans le lait de vache sont dus à sa richesse en caséines comportant plus de calcium, de phosphore et de magnésium. Le rapport calcium/phosphore est cependant très différent : 2,2 dans le lait humain contre 1,3 dans le lait de vache. 60 % du calcium du lait maternel est absorbé, contre 20 % seulement du calcium du lait de vache. La meilleure absorption du calcium contenu dans le lait maternel est du à ce rapport optimal, à la richesse en lactose et à la bonne digestibilité des graisses. La malabsorption des graisses favorise la perte fécale de calcium par constitution de savons. La constitution de ses graisses et l'activité lipasique intrinsèque du lait maternel sont donc des éléments importants de l'absorption du calcium. L'enrichissement corporel en calcium au cours des 4 premiers mois est évalué à 25-28 mg/J.
Pour le phosphore, l'absorption est de 90% et la rétention quotidienne de 12-13 mg/J.
2.6 Les oligo-éléments

Leur rôle biologique, quoiqu'encore imprécis par beaucoup d'aspects, est essentiel dans la constitution du squelette. Leur concentration est en règle générale plus élevée dans le colostrum que dans le lait mature et leur absorption meilleure que dans le lait de vache.

2.6.1 Le fer : 30 à 70 ug/100ml

Le fer contenu dans le lait de femme est intimement lié à la lactoferrine à 30-40%. On note toutefois que la lactoferrine n'est saturée qu' à 1 à 10% et que son rôle biologique réel reste obscur.
Un tiers du fer est fixé au globules graisseux (xanthine oxydase pouvant fixer 8 atomes de fer) ; une plus faible proportion est fixée aux caséines et au citrate.
Il existe des variations de la richesse en fer : en fonction du terme, de la nature colostrale ou mature du lait, du moment de la tétée. Par contre il semble que le statut en fer de la mère n'intervienne que peu dans la richesse en fer de son lait.
Quoiqu'il en soit, la biodisponibilité est élevée : 50 à 75 % du fer sont absorbés.

2.6.2 Le zinc : 50 à 400 ug/100ml

Le zinc est contenu dans le lactosérum (albumine, citrate) (45-58%), les globules graisseux (12-38%), les caséines (phosphosérines) (8-14%). Sa concentration baisse au cours de la lactation mais sa biodisponibilité est élevée, facilitée semble-t-il par la liaison au citrate.

2.6.3 Le cuivre : 25 à 70 ug/100ml

Le cuivre est lié aux protéines solubles, en particulier l'albumine (45-55%), aux caséines (quelques %) et aux graisses (20%).

2.6.4 Le manganèse : 0,4 à 5 ug/100ml

Sa plus grande partie est liée à la lactoferrine. Il a un rôle de cofacteur enzymatique (synthèse des polysaccharides).

2.6.5 Le Molybdène : 0 à 2 ug/100ml

2.6.6 Le Cobalt : 0,1 à 2,7 ug/100ml

2.6.7 L' Iode : 0,7 à 1,2 ug/100ml

2.6.8 Le Sélénium : 1,5 à 6 ug/100ml

2.6.9 Le Chrome : 1,4 à 4 ug/100ml

2.6.10 Le Fluor : 0,1 ug/100ml

Certains éléments, tels le sélénium, le chrome et le fluor peuvent présenter un risque de toxicité en raison d'une trop forte concentration dans l'environnement. D'autres métaux semblent n'avoir aucun rôle biologique et pouvoir comporter un risque toxique en raison de leur présence dans l'environnement et le risque de contamination du lait maternel : le mercure, le plomb (peintures, vernis), le cadmium (fumée de cigarette) et bien sur les éléments radioactifs.
2.7 Les vitamines
Vitamines (unités)
   
Lait de femme/L
   
Lait de vache/L
A (UI)
   
2000
   
1025
D (UI)
   
200-300
   
150
E (mg)
   
1,8-3,5
   
0,4
K (ug)
   
15
   
60
B1 (ug)
   
160
   
440
B2 (ug)
   
360
   
1750
PP (ug)
   
1470
   
940
B5 (ug)
   
1840
   
3460
B6 (ug)
   
100
   
640
B8 (ug)
   
5
   
35
B9 (ug)
   
52
   
55
B12 (ug)
   
0,3
   
4
C (mg)
   
38-43
   
11

On constate un taux faible de vitamines B1, B2, B6, B9, B12, et surtout de vitamine K pouvant ne pas couvrir les besoins du nouveau-né. Ceci justifie la supplémentation systématique en période néonatale (quelque soit le mode d'alimentation) pour couvrir le risque de maladie hémorragique.
De la même façon, le taux de vitamine D est très dépendant du statut vitaminique de la mère et peut justifier une supplémentation de l'enfant au sein (et de sa mère).
2.8 Les hormones et substances apparentées

Certaines hormones semblent avoir un rôle actif : l'insuline, le facteur de croissance épidermique (EGF), les prostaglandines et les hormones thyroidiennes (à un taux semble-t-il suffisant pour prévenir les séquelles d'une hypothyroïdie néonatale). Même si leur rôle biologique dans des conditions physiologiques reste obscur, de nombreuses autres substances hormonales sont contenues dans le lait humain : prolactine, stéroïdes ovariens et surrénaliens, calcitonine, érythropoïétine, neurotensine, somatostatine, bombésine.
2.9 Les facteurs de défense contre les infections

L'allaitement maternel peut -et doit- être considéré comme la "norme" physiologique de l'alimentation de l'enfant humain. Il constitue un mode de défense "passive" d'un bénéfice sur le plan immunologique.
2.9.1 Les immunoglobulines

Les IgAs contenus dans le colostrum puis le lait sont les facteurs de défense les mieux connus. Représentant 97% des protéines du colostrum initial, leur concentration peut être initialement de 5 à 15 g/L pour diminuer ensuite rapidement à 0,5 à 1 g/L, mais la quantité de lait ingérée augmentant rapidement, l'apport quotidien reste élevé, de l'ordre de 1g/J d'IgAs. Les IgAs ont une spécificité contre des agents infectieux bactériens ou viraux (Escherichia coli, Salmonella, Shigella, virus de la poliomyélite, etc) ou des protéines alimentaires présentes dans l'alimentation de la mère (Protéines du lait de vache, de soja).

Le lait humain contient également à une concentration sans commune mesure des IgG et IgM.
2.9.2 Les cellules du lait

Le colostrum contient des leucocytes (3.106/ml), dont 90% de macrophages et, 10% de lymphocytes. Leur nombre diminue ensuite et leur réel rôle biologique dans le tube digestif du nouveau-né est mal connu.
2.9.3 Les moyens de défense non spécifiques

- La lactoferrine capte le fer nécessaire à la croissance bactérienne (Gram - ). Elle aurait ainsi un rôle bactériostatique voire, quoique non démontré, bactéricide.
- Les ligands de l'acide folique et de la vitamne B12 ont un rôle équivalent par le même mécanisme de compétition avec la croissance bactérienne.
- Le lysozyme pourrait attaquer les membranes bactériennes.
- Le facteur de croissance du Bacillus bifidus contribue à l'installation d'une flore colique acidophile.
- On citera enfin de multiples facteurs de défense dont le rôle exact reste obscur : Interferon, Complément, Facteurs antibactériens, viraux ou parasitaires, Agents à rôle "anti-inflammatoire" pouvant notamment bloquer la libération de cytokines protégeant ainsi contre l'entérocolite ulcéro-nécrosante.
2.10 Conduite et hygiène de l'allaitement

- Il est nécessaire de faire une préparation psychologique pendant la grossesse plutôt que d'aborder le problème de l'allaitement "au dernier moment".
- Il faut souligner se valeur nutritionnelle mais également psychoaffective.
- La tétée est soumise à quelques règles simples :

    *
      nettoyage du mamelon à l'eau bouillie sans antiseptique, ni alcool avant la tétée,
    *
      tétée courte (moins de 15 minutes),
    *
      début de la tétée par un sein différent,
    *
      faciliter les premières succions par quelques pressions de l'aréole,
    *
      donner si possible les deux seins à chaque tétée sans s'inquiéter si l'enfant ne prend pas bien le second,
    *
      après chaque tétée, nettoyage des mamelons et aréoles à l'eau pour éviter la macération de lait dans les plis à l'origine des crevasses,
    *
      protéger les mamelons entre les tétées par une gaze stérile.

- Au cours de l'allaitement, il faut exclure tabac et alcool,
- Augmenter les ingestas caloriques de la mère. Pour faire 850 ml de lait (soit 570 Cal - besoins d'un enfant de 3 mois), il faut 700 Cal environ, d'origine alimentaire et de réserve.
- Ne pas augmenter la consommation lactée de la mère mais augmenter son apport hydrique.
- Le problème des médicaments passant dans le lait maternel. Si la mère doit poursuivre cette thérapeutique avec des médicaments potentiellement toxiques, il vaut mieux contre-indiquer l'allaitement.

A titre d'indication, on peut donner la liste suivante des médicaments formellement contre-indiqués : acide nalidixique, anticancéreux, anticoagulants oraux (sauf warfarine), antithyroïdiens de synthèse, atropine, chloramphénicol, dérivés de l'ergot de seigle (sauf METHERGIN), iodures, laxatifs (sauf mécaniques), lithium, métronidazole, morphiniques, éléments radioactifs, sulfamides, tétracyclines, tolbutamide.
En pratique

- Il est recommandé de pratiquer l'allaitement à la demande.
- Au départ 6 à 8 tétées espacées de 2h30 à 4 heures.
- La variabilité des horaires et du nombre de tétées dépend de la rapidité d'installation du rythme nycthéméral et du sommeil nocturne prolongé.
- A l'âge de 4 à 8 semaines, l'enfant a en règle 5 à 6 tétées assez régulières et a une durée de sommeil nocturne de 8 heures continues.
- Il ne faut pas abusivement considérer que chaques pleurs de l'enfant signifient qu'il a faim et le mettre au sein toutes les 1/2 heures.
- Il est inutile de peser l'enfant avant et après chaque tétée pour juger de la quantité bue, il suffit de s'assurer d'une prise de poids normale.
3 L'allaitement artificiel

Jusqu'au début du siècle le lait de femme était le seul aliment du nourrisson, au besoin par l'intermédiaire de nourrices dans les milieux aisés. A la fin du XIX ème siècle sont apparues les méthodes de conservation des aliments et donc du lait de vache. Le XX ème siècle a vu se perdre, pour de multiples raisons (travail des femmes, perte de l'exemplarité d'une génération à une autre, préoccupations esthétiques, psychologiques, promotion insuffisante voire encouragement à ne pas allaiter), la " traditon " et plus exactement la logique physiologique de l'allaitement au profit du lait de vache, puis de lait de vache modifié (coupé-sucré) et de préparations industrielles (lait concentré, concentré sucré, laits destinés aux nourrissons).
Par définition l'allaitement est artificiel quant il utilise un autre produit que le lait de femme (le plus souvent lait de vache ou produits industriels).
Le terme de lait est réservé aux produits naturels (lait de vache, lait de chèvre, etc...)
L'analyse comparative de la composition du lait de vache et du lait de femme a souligné l'importance de leurs différences et suggéré la nécessité de modifier la composition du lait de vache pour le rendre plus proche du lait maternel.
Le terme d'aliment lacté diététique a été utilisé pour les "laits industriels" fabriqués à partir de lait de vache avec des modifications destinées à ressembler au lait maternel. Ces modifications sont surtout quantitatives, le lait maternel restant qualitativement non reproductible, en particuler dans ses qualités immunologiques.
3.1 Législation
3.1.1 Arrétés de 1976 et 1978 sur la Composition des aliments lactés diététiques
(pour 100 Kcal)
   
Arrêté du 1.07. 1976
(1er âge)
   
Arrêté du 30.03.1978
(2è âge)
     
Aliment lacté
diététique
   
Aliment lacté
diététique " maternisé "
   
ALD pour  nourrissons de plus de 4 mois

LIPIDES

. graisses végétales
. acide linoléique
   

3 à 6 g

maxi. 40 %
300 à 600 mg
   

4 à 6 g

maxi. 40 %
300 à 600 mg
   

3,5 à 6 g

maxi. 50 %
300 à 600 mg
PROTIDES
   
1,8 à 3,5 g
   
1,8 à 2,6 g
   
3,5 à 5 g
LACTOSE
AUTRES SUCRES
   
> 70 %
< 30 %
   
100 %
-
   
> 50 %
(mono+disacch )20 %
SODIUM
   
< 60 mg
   
< 40 mg
   
< 80 mg
FER
   
> 0,75 mg *
   
> 0,75 mg*
   
> 0,75 mg**
VITAMINES +
OLIGOELEMENTS
   
> teneur du lait de femme
   
> teneur du lait de femme
   
> 2/3 des teneurs du lait de vache
* enrichissement en fer non obligatoire mais avec seuil minimum fixé.
** enrichissement en fer obligatoire

Au cours des années 1960-1970 de multiples modifications du lait de vache sont apparues pour donner des laits industriels dits "humanisés". Pour juguler une concurrence plus ou moins anarchique et dont le fondement scientifique était discutable, deux arrêtés pris en 1976 et 1978 ont donné des orientations et un "cadre règlementaire" nécessaires à la composition adéquate des aliments lactés diététiques (ALD) pour nourrisson. (cf. Tableau).
3.1.2 Cette règlementation s'est vue modifiée par un Arrété du 11.01.1994
Précisant de nouvelles dispositions sur la composition des laits artificiels conformes à de nouvelles normes européennes.
3.1.2.1 D'une manière générale
Ce nouvel arrété interdit toute dénomination ou présentation ayant pour objet une idéalisation du produit pouvant faire penser qu'un aliment lacté artificiel puisse avoir les mêmes qualités (nutritionnelles, immunologiques, etc) que le lait de mère. Ainsi les appellations laits " humanisés " et laits " maternisés " sont interdites.
Dans le même ordre d'idées, dans un souci de promotion de l'allaitement maternel, la publicité pour les laits artificiels est limitée aux journaux professionnels et certaines pratiques promotionnelles encourageant l'allaitement artificiel sont interdites ( J.O 4.06.1994)
3.1.2.2 Les préparations pour nourrissons (ex premier âge) :
Elles sont : " destinées à l'alimentation du nourrisson jusqu'à 4-6 mois et répondent à elles-seules aux besoins de cet âge ".
3.1.2.3 Les préparations de suite (ex 2ème âge) :
Elles sont : " destinées aux nourrissons de plus de 4 mois et constituent l'élément liquide principal d'une alimentation progressivement diversifiée".
3.1.2.4 Des allégations particulières sont définies :
- Protéines adaptées (cf)
- Lacose uniquement (seul glucide)
- Sans lactose (absence de lactose)
- Sans saccharose ( absence de saccharose)
- Faible teneur en Sodium( <39mg/100 Cal)
- Enrichi en fer.

Un certain nombre de supplémentations (AGPLC, Nucléotides) ou d'appellations devenues habituelles (laits hypoallergéniques, pour prématurés, laits de régime) ne sont pas règlementairement définies.
3.2 Composition des préparations pour nourrissons (ex 1er âge)

Elles sont destinées aux nourrissons de moins de 4 à 6 mois ( période correspondant à l'alimentation lactée exclusive - avant diversification).
3.2.1 Composition réglementaire

- Apport calorique : 60-75 Cal/100 ml
- Composition pour 100 Cal :

    *
      Protéines :
          o
            Lait de vache
                +
                  " non modifiées " : 2,25 à 3 g
                +
                  " modifiées " (Caséine/Lactosérum <1) : 1,8 à 3 g
          o Soja (+ ou - LV) : 2,25 à 3 g
    *
      Lipides : 3,3 à 6,5 g (Acide linoléique : 300 à 1200mg)
    *
      Glucides : 7 à 14 g
          o
            Lactose > 3,5 g
          o
            Saccharose < 20 %
          o
            Amidon < 30 %
    *
      Na : 20 à 60 mg
    *
      Ca : >50 mg
    *
      Ph : 25 à 90 mg
    *
      Fer : 0,5 à 1,5 mg
    *
      Vit D : 1 à 1,25 ug

- Des recommandations sont données pour toutes les vitamines et tous les oligo-éléments.
3.2.2 Caractéristiques principales
3.2.2.1 Les protéines

Elles sont à un taux bien abaissé ( de l'ordre de 1,5 g/100ml) par rapport au lait de vache.
Le rapport caséine/protéines du lactosérum est celui du lait de vache 80/20 ou modifié pour diminuer le taux de caséine à 50/50 voire 40/60: allégation " protéines adaptées ", correspondant au profil protéique des anciens ALD " maternisés ".
Quelque soit ce taux, les protéines sont natives, non modifiées dans leur structure et , bien sûr, dans leur potentiel antigénique.
La supplémentation en nucléotides, très repandue aux U.S.A, n'est pas encore courante en France et n'est pas règlementé dans l'arrété du 11.01.1994 . Même si le rôle biologique des nucléotides est de mieux en mieux connu, le bénéfice de cette supplémentation est difficile à évaluer.
3.2.2.2 Les glucides

Le taux, supérieur au lait de vache, est de l'ordre de 7 g/100ml.
Le sucrage est le plus souvent mixte: lactose + polymères (dextrine) à un taux limité à 30%.
Le sucrage exclusif au lactose donne lieu à l'allégation " lactose uniquement ", correspondant aux anciennes formules dites "1er âge maternisé ".
Ces préparations sont bien sûr dépourvues de gynolactose (oligosaccharides).
3.2.2.3 Les lipides

Le taux moyen est de 3,6 g/100ml.
Pour un apport optimal en AG essentiels ( acide linoléique), une supplémentation en huiles végétales (palme, coco, soja, etc.) est nécessaire de longue date.
Certaines préparations enrichies en AGPLC des séries n-3 et n-6 ont été récemment mises sur le marché Français, notamment dans les produits pour prématurés (cf).
3.2.2.4 Minéraux, vitamines, oligo-éléments

L'apport en NaCl est limité, le rapport Ca/Ph modifié pour une absorption optimale.
L'enrichissement en fer est devenu la règle.
L'enrichissement en vitamine D est obligatoire en France pour mise en conformité des règles européennes avec des taux moyens de 40 à 45 UI/100ml. Cette supplémentaton n'est cependant pas suffisante pour couvrir la totalité des besoins et ne permet pas de supprimer la supplémentation médicamenteuse.
3.2.3 Liste des préparations pour nourrissons (disponibles en France) - cf tableau
GALLIA :     Gallia 1
GUIGOZ :     Guigoz 1
BLEDINA :     Alma 1 - Blédilait 1er âge.
MEAD JOHNSON :     Enfamil 1 - Enfalac -
MATERNA :     Materna Spécial 1er âge (protéines modifiées, lactose seul : ex. maternisé)
Materna 1
MILUPA :     Aptamil 1 avec Milupan (enrichi en AGPLC, lactose uniquement)
Lémiel 1
Milumel 1
MONT BLANC :     Aletina 1
NESTLE :     Nidal 1
NUTRICIA :     Nutricia 1
SODILAC :     SMA " classic " (protéines modifiées, lactose seul: ex-maternisé) (enrichi en nucléotides)
SMA " confort " (enrichi en nucléotides)
Modilac 1 (protéines modifiées, enrichi en nucléotides)
SOPHARGA :     Sophimil 1
3.3 Composition des préparations de suite (ex 2è âge)

Elles sont destinées aux nourrissons de plus de 4 mois, accompagnées de la diversification.
3.3.1 Composition réglementaire

- Apport calorique: 60 à 80 Cal/100ml
- Composition pour 100 Cal :

    *
      Protéines : 2,25 à 4,5 g
    *
      Lipides : 3,3 à 6,5 g
    *
      Glucides : 7 à 14 g
          o
            Lactose : >1,8 g
          o
            Saccharose-Fructose-Miel : < 20%
    *
      Na : 20 à 60 mg
    *
      Ca/Ph : entre 1,2 et 2
    * Fer : 1 à 2 mg
    * Vit D :1 à 3 ug

- Des recommandations sont données pour toutes les vitamines et tous les oligo-éléments.
3.3.2 Caractéristiques principales
3.3.2.1 Les protéines

Le taux de protéines est plus élevé (2,5 à 3 g/100ml) et le rapport caséine sur protéines solubles est celui du lait de vache (80/20).
3.3.2.2 Les glucides

Le sucrage est toujours mixte : lactose (70 % environ) + Dextrine maltose (30 % environ) ou plus rarement un autre sucre (saccharose).
3.3.2.3 Les lipides

Le taux de lipides est plus élevé mais toujours avec en enrichissement en acide linoléique par l'apport de lipides d'origine végétale.
3.3.2.4 Les minéraux, vitamines, oligo-éléments

Le taux de NaCl reste abaissé par rapport au lait de vache même s'il est supérieur aux préparations pour nourrissons.
L'enrichissement en fer est obligatoire. L'enrichissement en vitamine D appelle aux mêmes remarques que pour les préparations pou nourrisson.

Les préparations de suite sont au mieux utilisées jusqu'à 12 mois pour couvir les besoins de l'enfant de bien meilleure façon que le lait de vache: La couverture des besoins quotidiens est illustrée dans le tableau suivant pour un apport de 0,5 l à 9 mois.

     
Protéines
   
Fer
   
Ca
   
Vit A
   
Vit E
   
Ac linoléique
Préparation de suite
   
90%
   
70%
   
90%
   
55%
   
90%
   
50%
Lait de vache
   
110%
   
4%
   
100%
   
25%
   
5%
   
10%
3.3.3 Liste des préparations de suite : (disponibles en France)
GALLIA :     Gallia 2
GUIGOZ :     Guigoz 2
BLEDINA :     Alma 2 - Blédilait 2.
MEAD JOHNSON :     Enfamil 2 - Enfalac
MATERNA :     Materna 2
MILUPA :     Aptamil 2 - Lémiel 2 - Milumel 2
MONT BLANC :     Aletina 2
NESTLE :     Nidal 2
NUTRICIA :     Nutricia 2 - Nutrilon 2 (épaissi à la farine de Caroube)
SODILAC :     Modilac 2 - SMA 2
SOPHARGA :     Sophimil 2

Les différences d'une préparation à une autre restent minimes.
3.4 Les laits "de croissance"
Destinés aux enfants de 1 à 3 ans, ils n'ont pas de réglementation légale et ont pour objet d'apporter un lait de vache enrichi en Fer, Vitamines, Acide linoléique, sans pour autant remplir les critères des laits de suite.
Il s'agit de : Candia Croissance (Candia), Blédilait (Diepal-Jacquemaire), Nactalia (Gallia), Guigoz 1ers pas (Guigoz), Materna complet croissance (Materna), Milupa Eveil (Milupa), Nutricia croissance (Nutricia).
Même si ces produits sont enrichis en vitamines et oligo-éléments, leur justification entre 1 et 3 ans, si l'enfant a un régime bien diversifié et équilibré, reste à démontrer d'autant qu'ils sont nettement plus onéreux que le lait de vache.
Ils ne peuvent, à l'inverse, se substituer aux laits de suite entre 4 et 12 mois.
3.5 Les "laits de soja"

Leur fraction protéique est constituée de protéines isolées de soja ( par décret: 2,25 à 3 g/100Cal) et non de lait de vache.
Il s'agit de Gallia Soja (Gallia),Vegebaby (Sopharga), Prosobee (Mead Johnson) et Modilac Soja (Modilac).
Leur composition sur le plan glucides (sans lactose), lipides, minéraux, vitamines, doit répondre aux besoins du nourrisson et aux critères précis énoncés dans l'arrété du 11.01.1994 les règlementant au même titre que les produits à base de lait de vache. L'appélation " lait pour nourrissons ", même par extension, leur est toutefois interdite.
A l'inverse, de nombreux "laits de soja" commercialisés en magasins diététiques n'ont pas une composition conforme aux préparations pour nourrissons, notamment en acide linoléique, en calcium, etc.
L'indication principale pourrait être l'intolérance aux protéines du lait de vache, mais étant donnée la fréquence des intolérances associées protéines de lait-protéines de soja, ils sont peu employés en France.
3.6 Les aliments diététiques adaptés à certaines situations pathologiques
3.6.1 Les aliments de régime pour régurgitation

L'épaississement par de l'amidon ou des fibres (pectine), est un mode de traitement diététique des régurgitations simples du nourrisson.
Certaines formules " prêtes à l'emploi ", évitent de rajouter des épaississants dans le lait reconstitué tels que Gelopectose* ou Gumilk*.
Il existe 2 types d'épaississant : amidon précuit et farine de caroube. (cf tableau).
3.6.2 Les aliments appauvris en lactose

Les glucides sont de la dextrine maltose, du saccharose, des oses simples.
OLAC (Mead Johnson) AL 110 (Nestlé), Diargal (Gallia) et HNRL (Milupa) et Modilac sans lactose (Sodilac) sont 5 préparations ne contenant pas (ou que des traces) de lactose et répondent à l'allégation particulière " sans lactose ".
HN 25 (Milupa) contient 1,8 g de lactose pour 100 ml soit 20 % de glucides.
Ils sont également modifiés sur le plan protéique, non pas dans le sens de l'allégation " protéines modifiées " avec augmentation de la partie de protéines solubles, mais à l 'inverse en augmentant la part de caséine à 90 voire 100%.
Leur composition est plus détaillée dans le tableau suivant :

Composition /100ml
   

DIARGAL
   

AL110
   

HNRL
   

HN25
   

OLAC

Glucides (g)
   

8,95
   

7,4
   

9,5
   

9,5
   

6,8

DM-Amidon/Lactose
et autres sucres en %
   

100/0
   

100/0
   

50/0
Glu:15,Sacch:13,etc
   

51/18
Glu:4,Sacch:13,etc
   

100/0

Protéines (g)
   

2,2
   

1,9
   

2,5
   

2,5
   

1,5

Caséine/Lactosérum
   

100/0
   

100/0
   

90/10
   

90/10
   

80/20

Lipides (TCM)
   

3 (15%)
   

3,3
   

1,2
   

1,2
   

3,7

Na (mg)
   

45
   

23
   

40
   

40
   

20

Calories
   

72
   

67
   

59
   

59
   

68

Ces aliments peuvent être utilisés dans les intolérances au lactose, en particulier dans la phase de réalimentation des diarrhées aiguës du nourrisson. Leur utilisation prolongée dans ce contexte n'est pas recommandée, surtout pour les formules à teneur calorique faible (HNRL et HN25).
3.6.3 Les aliments diététiques acidifiés

L'acidification par ferments lactiques et l'adjonction de bifidobactéries ont pour but de favoriser la digestion de la caséine et d'améliorer la tolérance au lactose.
Il s'agit de Lactofidus (Gallia), Bio-Guigoz (Guigoz) et Pelargon (Nestlé).
Lactofidus présente 0,2 g/100ml d'acide lactique et une culture de Bifidobactéries.
Bio-Guigoz est enrichi en Streptococcus thermophilus (acide lactique: 0,2 g/100ml et pH à 4,8) et d'une culture de bifidobactéries (106/g de poudre).
Pelargon est enrichi en ferment lactique (Bacterium lactis acidi). La concentration en acide lactique est de 0,24 g/L. Le pH est de 5,2.
Utilisés dans les troubles digestifs mineurs du nourrisson (" coliques "), leur composition répond par ailleurs aux critères des préparations pour nourrissons.
3.6.4 Les aliments pour prématurés et nouveau-nés de petit poids de naissance

Ils ne répondent pas à une allégation règlementaire spécifique " pour prématurés ".
Il s'agit de PreAlma (Diepal-Jacquemaire), PreGallia (Gallia), PreGuigoz (Guigoz), PreEnfamil (Mead Johnson), PreAptamil et PreMilumel (Milupa), PreNidal (Nestlé).
Leur caractéristiques sont :
- Une teneur en protéines plus élevée que les préparations pour nourrissons (2 g/100 ml) avec une rapport caséine/protéines solubles modifié ( 30/70 ou 40/60).
- Un sucrage mixte Lactose + Dextrine.
- Un enrichissement en triglycérides à chaîne moyenne (20 à 40 % des lipides) ainsi qu'un enrichissement en acide linoléique, en acide linolénique et également en AGPLC des séries n-3 et n-6 (DHA) : Pre Aptamil, PreGallia, PreNidal, Pre Guigoz.
- Une teneur en électrolytes adaptée à l'immaturité rénale du prématuré.

Ces aliments sont destinés à couvrir les besoins de croissance en respectant les limites métaboliques des nouveau-nés prématurés et/ou de petit poids. Sans avoir de règlementation sur leur appellation " pour prématurés ", ils répondent aux critères des préparations pour nourrissons, en particulier en termes de vitamines, notamment D (40 à 80 UI/100ml ) E et K pour la prévention de la maladie hémorragique du nouveau-né, et d'oligoéléments.
3.6.5 Les aliments diététiques dits hypoallergéniques (HA)

Une confusion existe dans l'appellation HA du fait de l'absence de règlement précis quant à leur composition.
Récemment commercialisés, ces aliments ont pour but théorique de réduire le risque d'allergie alimentaire par une hydrolyse partielle (enzymatique et/ou thermique) de leur fraction protéique d'origine lactée.
Il s'agit de : Gallia H (Gallia), Guigoz HA (Guigoz), Alma H (Jacquemaire), Milumel HA (Milupa) - Enfamil HA (Mead Johnson), Nidal HA (Nestlé). Un aliment étiqueté HA peut être considéré à part du fait de l'origine des protéines hydroly-sées : il s'agit de Lactoprégomine (Milupa) dont les protéines sont des protéines de soja et de collagène de porc.
L'hydrolyse de ces protéines aboutit à des peptides de taille certes inférieure aux protéines natives du lait de vache mais de taille non négligeable (jusqu'à 5000 dalton voire plus).
Leur rôle préventif reste en cours d'évaluation ; s'il parait réel dans la prévention de l'intolérance aux protéines de lait de vache, la prévention de l'eczéma ou des allergies respiratoires est beaucoup plus discutable voire nulle. Ils ne doivent en tout cas jamais être utilisés dans les intolérances aux protéines du lait de vache avérées.
Leurs indications restent discutables. Ils pourraient se justifier dans l'allaitement d'enfants présentant des antécédents familiaux d'allergie, en particulier au 1er degré et en cas d'antécédents multiples.
Dans tous les cas, les modifications ne portent que sur les protéines, la composition en glucides et en lipides restant conforme à l'arrêté règlementant les préparations pour nourrissons.
3.6.6 Les substituts hydrolysés du lait

Ce sont des aliments destinés à l'alimentation d'enfants en situation pathologique et de prescription médicale. Leur composition et appellation ne sont pas légalement réglementées.
Ils présentent les caractéristiques suivantes :

- Protéines hydrolysées en très petits peptides (moins de 3500 Dalton) garantissant une réelle hypoallergénicité.
Les différences entre eux résident surtout dans l'origine et la nature des protéines hydrolysées :

    * Caséine : Galliagene Progress (Gallia), Nutramigen et Pregestimil (Mead Johnson).
    * Protéines du lactosérum : Alfare (Nestlé), Peptijunior (Nutricia).
    * Protéines de soja et collagène de boeuf : Pregomine (Milupa).

On note également une différence dans le degré de l'hydrolyse protéique. La majorité des protéines est constituée d'acides aminés libres ou de petits peptides de 2 à 5-6 acides aminés de moins de 1500 dalton ; une fraction plus faible mais non négligeable peut cependant atteindre dans certains produits, une taille maximale de peptides dans le "produit final" de 2000 à 3000 voire 5000 Dalton. Il faut d'ailleurs noter que le profil peptidique de ces hydrolysats n'est donné qu'avec réticence par les fabriquants et qu'il ne figure pas sur les fiches " notices ", alors que la taille des peptides résiduels est un élément important dans l'évaluation du risque allergénique.

- Absence de lactose ou simple traces : Glucides composés exclusivement de polymères.
- Enrichissement en TCM.
- Composition en minéraux, vitamines, oligo-éléments conforme à l'arrêté.

Leur composition est détaillée dans le tableau suivant :
     

Prégéstimil
   

Nutramigen
   

Galliagène
   

Alfare
   

Peptijunior
   

Prégomine

Protéines
   

Caséine
   

Caséine
   

Caséine
   

LactoS
   

LactoS
   

Soja/Collagène

g/100ml
   

1,9
   

1,5
   

1,9
   

2,24
   

2
   

2

Lipides g/dl
   

3,8
   

3,7
   

2,7
   

3,26
   

3,7
   

3,6

%TCM
   

55
         

40
   

50
   

50
     

% A Linol.
   

16%
   

16%
   

17%
   

12%
   

26%
   

13,5%

Glucides g/dl
   

6,9
   

6,8
   

9,6
   

7
   

6,7
   

8,6

Polymers
Lactose
   

100%
0%
   

100%
0%
   

100%
traces
   

98,5%
1,5%
   

98,5%
1,5%
   

100%
0%

Na (mg/dl)
   

32
   

20
   

45
   

43
   

20
   

39

Osmolarité/L
   

270
   

180
   

238
   

175
   

190
   

133

Calories/dl
   

68
   

68
   

70
   

66
   

66
   

75

Les indications sont essentiellement les intolérances aux protéines du lait de vache, les diarrhées graves, ou chez le jeune nourrisson (avant 3 mois), la mucoviscidose.
Conclusion

On comprendra au terme de cet exposé qu'il est difficile de se retrouver dans ce foisonnement de produits dont la diversité de composition, de présentation, et le manque de clarté réglementaire rendent délicate la bonne connaissance et la bonne prescription. Il est tout à fait illusoire de vouloir connaître parfaitement et dans le détail la composition de tous ces produits (plus de 60 préparations citées) qui, au demeurant, change régulièrement. L‘essentiel est de bien connaître les différentes catégories de produit pour éviter des erreurs diététiques grossières telle que la confusion laits sans lactose = laits de régime = laits sans protéines de lait de vache. Ce dernier tableau récapitule et classe les différents " laits " en fonction de leur catégorie (plus ou moins officielle).

Classification des préparations lactées
 
     
Préparation
pour
Nourrisson
   
Lait de
suite
   
Lait de croissance
   
Lait
de soja
   
Lait pauvre en lactose
   
Lait acidifié
   
Lait pour prématuré
   
Lait
HA
   
Substitut
hydrolysé
Gallia
   
Gallia 1
   
Gallia 2
   
Nactalia
   
Gallia
Soja
   
Diargal
   
Lacto-
fidus
   
Pre
Gallia
   
Gallia H
   
Galliagene
Guigoz
   
Guigoz 1
   
Guigoz 2
   
1ers pas
               
Bio-Guigoz
   
Pre
Guigoz
   
Guigoz HA
     
Blédilait
   
Alma 1
Blédilait1
   
Alma 2
Blédilait 2
   
Blédilait
                     
PreAlma
   
Alma H
     
 Materna
   
Spécial 1
Materna 1
   
Materna 2
   
Complet
croissance
                                   
Mead Johnson
   
Enfamil 1
   
Enfamil 2
         
Prosobee
   
Olac
         
Pre
Enfamil
   
Enfamil HA
   
Pregestimil
Nutramigen
Milupa
   
Aptamil 1
Lemiel 1
Milumel 1
   
Aptamil 2
Lémiel 2
Milulel 2
   
Eveil
         
HN25
HNRL
         
Pre
Aptamil
Pre
Milumel
   
Milumel HA
Lacto
Pregomine
   
Pregomine
Mont Blanc
   
Aletina 1
   
Aletina 2
                                         
Nestlé
   
Nidal 1
   
Nidal 2
               
AL110
   
Pelargon
   
PreNidal
   
Nidal HA
   
Alfare
Nutricia
   
Nutricia 1
Nutrilon 1
   
Nutricia 2
Nutrilon 2
   
Croissance
                                 
Peptijunior
Sodilac
   
Modilac1
SMA
classic
SMA confort
   
Modilac 2
SMA 2
   
Candia
croissance
   
Modilac
Soja
   
Modilac sans lactose
                       
Sopharga
   
Sophimil 1
   
Sophimil 2
         
Vegebaby
                             

Les laits épaissis
     

Med Johnson
   

Nutricia
   

Blédina
   

Milupa
   

Sodilac
   

Nestlé
Guigoz
   

Gallia

Pour 100 ml
   

Enfamil
AR
   

Nutrilon
AR
   

ALMA AR
   

Milumel
AR
   

Modilac
AR
   

Nidal AR
Guigoz Cft
   

Gallia AR

Glucides
   

7,5 g
   

8,2 g
   

8,6 g
   

7,7 g
   

7g
   

7,9 g
   

7,9 g

Lactose
   

57%
   

75%
   

76%
   

78%
   

71%
   

76%
   

77%

Dextrine
   

13%
   

25%
   

24%
   

22%
   

3%
           

Amidon
   

30%
Riz
                     

26%
Maïs
   

24%
Maïs
   

23%
Maïs

Fibres
         

0,4g
caroube
   

0,5g
caroube
   

0,4g
caroube
                 

Lipides
   

3,5g
   

3g
   

3,5g
   

3,4g
   

3,6g
   

3,1g
   

3,5g
4 La diversification

La diversification est l'introduction progressive à partir de 4 mois des aliments autres que le lait pour habituer l'enfant en l'espace de plusieurs mois à une alimentation proche de l'adulte.
4.1 Les différentes catégories d'aliments

Un aliment est une substance naturelle consommée en l'état ou après transformation.
Un nutriment est une substance chimique (glucide, lipide, protide).
Il est habituel de classer les aliments en cinq groupes aux caractéristiques différentes.
4.1.1 Oeuf - poisson - viande + légumes secs

On distingue 2 sous-groupes :
4.1.1.1 Oeuf - poisson et viande

1. Valeur biologique
Il s'agit de la principale source de protéines (20 % de leur poids en moyenne).
Les protéines d'origine animale sont riches en acides aminés (AA) essentiels.
On note par ailleurs la richesse en vitamines :
- B1 - PP dans la viande
- A - D dans le poisson
- A - PP dans l'oeuf.

2. Valeur calorique
Elle dépend de la valeur en lipides.
Le dicton "le poisson le plus gras est plus maigre que la viande la plus maigre" ne repose sur aucun fondement scientifique.
En effet, dans la viande du même animal la teneur en lipides peut varier de 1 à 5 en fonction de son site dans le corps et du mode de préparation culinaire.
Pour mémoire, la teneur en lipides est de :
- 2-3 % dans la viande de cheval
- 10 % dans la viande de boeuf - poulet
- 30 % dans la charcuterie
- 0,55 % dans le poisson maigre
- 12 % dans le poisson gras

3. La digestibilité
Elle est variable en fonction de la richesse en fibres et en tissu conjonctif et du mode de cuisson.
4.1.1.2 Les légumes secs

1. Valeur biologique
Ils comportent 25 % de protéines mais avec un facteur limitant, le plus souvent la méthionine.

2. Valeur calorique
Elle est élevée du fait de la richesse en glucides (50 %).

3. La digestibilité
Elle est faible du fait de la richesse en fibres.
4.1.2 Le lait et les fromages

1. Valeur biologique
Elle est élevée puisqu'il s'agit de protéines d'origine animale sans facteur limitant.
C'est d'autre part la principale source de calcium de l'organisme.

2. Valeur calorique
Dépend de la teneur en graisses : lait entier, demi-écrémé, écrémé, fromages maigres ou gras.

3. La digestibilité est élevée de l'ordre de 95 %
4.1.3 Les graisses et les corps gras

Il s'agit de produits transformés par une séparation des lipides du reste des composants d'un aliment.
L'apport énergétique est élevé :
- 9 Cal/g pour l'huile
- 8 Cal/g pour le beurre
- 4 Cal/g pour la crème fraîche.
Ils représentent un apport exclusif de lipides avec AG saturés (beurre) ou insaturés (huiles de tournesol, maïs, soja, pépin de raisin ou graisses de poisson).
Ils sont riches en vitamines liposolubles notamment A.
La digestibilité est variable, fonction de l'état physicochimique et du mode de cuisson.
4.1.4 Les céréales et dérivés

Il s'agit d'aliments à vocation énergétique du fait de leur richesse en glucides (70 %) sous forme d'amidon.
Ils sont dépourvus de graisses mais contiennent 10 % de protéines (sous forme de gluten pour certaines céréales) dont la valeur biologique est variable (le facteur limitant est le plus souvent la lysine).
Ils sont par ailleurs marqués par :
- la richesse en fibres (son),
- la pauvreté en eau,
- la richesse en vitamines (B1, B2, PP).
Leur digestibilité dépend de leur richesse en fibres.
4.1.5 Les légumes et les fruits

Ils ne comportent pratiquement pas de protéines et peu de lipides (sauf les olives, avocats et fruits oléagineux).
Ils comportent des glucides dont la majorité sont des glucides non assimilables (cellulose, hémicellulose, pectines, lignines).
Leur valeur énergétique dépend de la teneur en glucides assimilables :
- 20 % pour pommes de terre, bananes,
- 10 % pour fruits, carottes, navets,
- 5 % pour légumes verts.
Ils sont par ailleurs marqués par la richesse en eau, en oligo-éléments, en vitamine C, en potassium (à l'état frais) et en magnésium.
La digestibilité est variable en fonction de la teneur en fibres.

La cuisson est nécessaire pour les tubercules et la plupart des légumes verts. Elle permet un éclatement de la cellulose et de l'amidon et améliore la digestibilité.
Elle dénature cependant la vitamine C et l'eau de cuisson emporte souvent les oligo-éléments et les sels minéraux (d'où l'intérêt de la cuisson à la vapeur)

L'alimentation est bien équilibrée lorsqu'elle comporte un ou plusieurs éléments de chacune de ces 5 catégories d'aliments. Sans aller jusqu'à une rigueur fastidieuse en voulant équilibrer chaque repas, il faut tout au moins essayer d'obtenir un tel équilibre sur les différents repas de la journée. Ceci est valable chez l'adulte mais également chez l'enfant dès lors qu'il est diversifié.
4.2 Conduite pratique de la diversification

L'alimentation est bien équilibrée lorsqu'elle comporte un ou plusieurs éléments de chacune de ces 5 catégories d'aliments. Sans aller jusqu'à une rigueur équilibrer chaque repas, il faut tout au moins essayer d'obtenir un tel équilibre sur les différents repas de la journée. Ceci est valable chez l'adulte mais également chez l'enfant dès lors qu'il est diversifié.
4.2.1 Les farines

Il s'agit en général du premier aliment introduit dans la diversification.
Son introduction avant 3 mois n'a pas de justification nutritionnelle même s'il est vrai que "la farine dans le biberon du soir améliore le sommeil, mais surtout celui des parents !".
Il s'agit de farines dont les origines sont des céréales, des légumineuses, des tubercules.

Modalités d'apport : L'utilisation de farine dans les biberons n'a rien "d'obligatoire".
- après 3 mois,
- sans gluten jusqu'à 6 mois,
- en petite quantité dans le biberon (2 à 3 cuillers mesurettes de lait), puis progressivement sous forme de bouillie à 12 % à 6 mois.
- sans saler, ni sucrer,
- utiliser les farines précuites, diastasées,
- reconstituer les farines "lactées" dans de l'eau et non du lait.
4.2.2 Les fruits et les légumes

En dehors des qualités nutritionnelles de ce groupe d'aliments (cf.) ils ont comme intérêt leur grande diversité de goût et de texture.

Modalités d'apport :
- sous forme de bouillon pour diluer le lait au départ (modification du goût)
- en soupe épaisse on introduit dans le biberon ensuite,
- à la cuiller enfin en purée fluide vers 4-5 mois si l'enfant a bien sûr un développement neurologique normal lui permettant une déglutition de "solides",
- varier les purées de légumes plus ou moins caloriques en fonction de la richesse en pommes de terre ou en légumes verts,
- donner des fruits crus pelés et bien mûrs.

Que penser des petits pots ?
Ils ont des avantages certains :
- garantie bactériologique,
- garantie chimique (pesticides, etc, ...),
- garantie vitaminique.

Ils ont l'inconvénient de leur coût et d'une certaine solution de facilité pour les parents et l'enfant qui s'accomode parfois difficilement d'aliments à la texture moins homogène et moins lisse et refuse les "morceaux".
On peut par contre assez facilement introduire des petits pots "avec morceaux".

Quelques idées fausses :
- en dehors du goût, le bouillon de légumes n'a pas d'intérêt nutrionnel,
- les épinards ne sont pas particulièrement riches en fer.

Tableau I : Introduction des fruits et légumes
Age approximatif
     
3 mois
    Jus / compote de fruits : quelques cuillères à café à 1 repas.
4 - 5 mois
    Légumes mixés : quelques cuillères à café puis largement à 1 repas
Compote / jus quelques cuillères à café à 2 repas.
6 - 8 mois
    Légumes à 2 repas : moulinés puis en grumeaux
Compote : 50 g (2 cuillères à soupe)
Fruits écrasés : 100 g (1 tasse à café) en 1 ou 2 fois
12 - 24 mois
    Légumes écrasés à la fourchette en petits morceaux
18 mois
    Légumes secs en purée.

Suggestion de légumes : salade cuite, haricots verts, courgettes, tomates, aubergines, endives, betteraves rouges, brocolis, choux-fleurs. Epinards et carottes sont à donner avant 6 mois sous forme de conserves spéciales pour enfant (les conserves destinées aux bébés de moins de 4 moins contiennent moins de 5 mg pour 100 g de nitrates).
4.2.3 Les viandes - poissons, oeufs

Ils sont inutiles avant 6 mois.
50 g de poisson = 50 g de viande = 1 oeuf sur le plan de l'apport protidique.
4.2.3.1 L'oeuf

Un oeuf apporte 6 g de protéines (12 % du poids) totalement assimilables mais avec un potentiel allergénique notamment le blanc.
On apporte l'oeuf cuit : le jaune à 6 mois, puis l'oeuf entier vers 1 an.
4.2.3.2 La viande - le poisson

Les viandes doivent être apportées :
- bien cuites (risque de parasitoses des viandes crues),
- grillées, rôties ou bouillies,
- sans adjonction de graisses,
- sans sel.

Le poisson est cuit au court bouillon.
La quantité nécessaire est souvent bien inférieure à ce que donnent les parents :
- à 6 mois : 1 cuillère à café
- à 1 an : 2 à 3 cuillères à soupe (20-25 g)
On est loin du bifteck de 200 g donné dès l'âge d'un an.

Tableau II : Quantités journalières et texture de la viande et ses équivalents :
petits pots de légumes - viande, poisson, oeuf.
5 mois
   
6 - 7 mois
   
1 an
   
1 - 2 ans
10 g de viande mixée ou poisson
ou
1/3 d'oeuf de 60 g cuit dur. jaune + (blanc)
ou
85 g = 1/2 "petit pot" de légumes - viande/poisson
   
15-20 g (1 c. à soupe) de viande - poisson mixés
puis grumeaux
ou
1/2 oeuf de 60 g dur
jaune + (blanc)
ou
150 g presque un
"petit pot" de légumes - viande / poisson
   
20-30 g viande hachée
ou
poisson
ou
1/2 oeuf de 60 g
ou
170 g "petit pot"
légumes-viande/poisson
   
30 - 50 g de viande hachée puis en morceaux
ou
poisson
ou
1 oeuf de 60 g
ou
250 g = 1 "petit pot" 1/2
4.2.4 Le lait et les fromages
4.2.4.1 Le lait

Seul le lait 2ème âge permet de couvrir les besoins en fer et en acide linoléique notamment.
La présentation la plus pratique et la plus sûre est le lait UHT.
Le lait ne doit pas être donné cru mais au moins pasteurisé (bouilli 10 minutes).
Le lait demi-écrémé n'a pas de justification particulière chez l'enfant.
Récemment, sont apparus les laits enrichis (en fer notamment) dits de "croissance" (Candia - Milupa - Blédina - Nutricia), destinés aux enfants de 1 à 3 ans. S'il apportent un bénéfice sur le plan du fer, ils ne peuvent toutefois être considérés comme des équivalents d'ALD 2è âge et en aucun cas être recommandés à leur place.
4.2.4.2 Les fromages

Yaourts et petits suisses : 5 mois.
Fromages fermentés : 1 an.
Tenir compte de la teneur en graisses très variable :
- fromages maigres 20 à 30 % : Petit suisse
- fromages gras 40 % : Munster
- fromages extra-gras 45 % : Gruyère - Cantal
- fromages double crème à-60 % : Bleus
4.2.5 Les graisses

Le beurre peut être introduit en petite quantité (1 noisette) dans la purée de légumes à 8 - 9 mois.
Il peut être remplacé par de l'huile (tournesol) pour sa richesse en AG insaturés.
Aux cinq catégories d'aliments, il faut rajouter les sucres et les boissons.
4.2.6 Les sucres simples

Il s'agit du saccharose plus le miel et les dérivés (confitures).
Du fait de leur goût sucrant et du risque cariogène, il ne faut les apporter qu'en petites quantités.
L'apport glucidique doit en effet être essentiellement représenté par les sucres l'absorption lente.
4.2.7 Les boissons

En dehors du lait l'enfant doit boire :
- de l'eau (eaux minérales naturelles offrant toutes garanties)
- éventuellement des jus de fruits frais (rapidement bu après leur préparation) en évitant les jus de fruits du commerce souvent resucrés.

Le jus de fruit avant 3 mois n'a plus de justification compte-tenu de l'enrichissement en vitamine C des ALD 1er âge. Il peut par contre avoir un effet péjoratif sur un reflux gastro-oesophagien et a souvent un effet indigeste lorsqu'il est associé au lait.

Toute boisson alcoolisée doit bien sûr être proscrite.
5 Pratique de l'alimentation - Les régimes

5.1 L'allaitement maternel (cf. le lait maternel)
5.2 L'allaitement mixte (2 ou 3 mois)
5.2.1 Mixte complet

Continuer les six tétées par jour en donnant les deux seins sans que la durée de la tétée excède 15 minutes.
A chaque tétée, compléter avec un lait 1er âge préparé de la façon suivante :

    *
      60 g d'eau (Evian) + 2 mesures arasées de lait 1er âge.

L'enfant prend ce qu'il veut.
Surveiller la courbe de poids pour éviter sous ou suralimentation (pesée hebdomadaire).
5.2.2 Mixte alterné

Maintenir les six repas par jour mais remplacer une ou plusieurs tétées par un biberon de lait 1er âge préparé de la façon suivante :

    *
      120 g d'eau + 4 mesures arasées de lait 1er âge.

Maintenir la tétée du matin et celle du soir et alterner la tétée au sein et au biberon.

Dans les deux cas ne pas oublier :
- Vitamine D : 1 à 2 gouttes de stérogyl
- Fluorure de sodium : 1 comprimé de 0,25 g de fluorure de Na (NAF).
5.2.3 Sevrage

A la fin du 3ème mois, on remplace progressivement les 6 tétées par des biberons : 130 g de lait 1er âge, préparé de la façon suivante :

    *
      130 g d'eau + 4 mesures 1/3 de lait.

Au moment de l'arrêt complet du sein, prescrire à la mère :
- de réduire les boissons,
- de bander les seins.
Ceci en général suffit, associé à la fin des succions. Si nécessaire, ajouter :
- Lasilix : 2 comprimés par jour pendant 2 jours,
- Cycladiène : 5 mg : 3 comprimés par jour pendant 4 jours.

NB : Dans l'allaitement mixte se discute la place des aliments dits hypoallergéniques (cf.), voire des substituts du lait (cf.).
5.3 L'allaitement artificiel

En général : une mesurette de lait dans 30 ml.

1ère semaine :
   
- 6 ou 7 biberons
- Augmenter de 10 ml/jour
6 à 7 x 10 le premier jour
6 à 7 x 60 le 7ème jour.
2ème semaine :
   
- 6 x 80 (ou 7 x 70 ml)
3ème semaine :
   

- 6 x 90 (ou 7 x 80 ml)
4ème semaine :
   

- 6 x 100 (ou 7 x 90 ml)
2ème mois :
   

- 6 x 110 ml
3ème mois :
   

- 6 x 120 ml.

Schématiquement, on augmente de 10 ml chaque biberon :
- tous les jours la première semaine,
- les 2è, 3è et 4è semaines
- les 2è et 3è mois.

On prescrit vitamine D (400 à 800 UI) et Fluor (1/4 mg).
5.4 Les régimes diversifiés
Apport quotidien à 5 mois (6 ème mois)

Aliments
   
Quantités
Préparation de suite :
Farine ss gluten :
Légumes mixés :
Fruits :
Eau :     750 ml (25 mesures)
15 g
50-100 g (1/2 pot)
40 ml jus, 50g compote
Quantité pour biberons
Menu type à 5 mois (6 ème mois) : Répartition en 5 repas
MATIN :
MATINEE :
MIDI :
GOUTER :
SOIR :     Biberon 180-210 ml eau + 6-7 mesures + 3 cc farine sans gluten (matin ou soir)
40 ml Jus fruits
75 g Légumes verts mixés + Biberon 120-150 ml + 4-5 mesures
Biberon 180-210 ml + 6-7 mesures
180-210 ml + 6-7 mesures + 3 c à c farine sans gluten (matin ou soir)

 
Apport quotidien à 6 mois (7 ème mois)

Aliments
   
Quantités
Préparation de suite :
Viande :
P. de terre/Légumes :
Jus de fruits/Fruits :
Farines/Sucres :
Matières grasses
Eau     700 ml (21 mesures)
10 g
25 g/100 g
50 ml/ 75 g
30 g / 5 g
5 g
Qté pour biberons
Menu type à 6 mois (7 ème mois) : Répartition en 5 repas
MATIN :
MATINEE :
MIDI :


GOUTER :
SOIR :     Biberon 210 ml + 7 mesures + 3-5 c à c farine
50 ml Jus fruits
2 c à c de viande ou poisson ou 1/2 jaune d'oeuf
100 g légumes verts + 25 g Féculents + 5 g beurre
75 g fruits + eau
Biberon 210 ml + 7 mesures
Biberon 210 ml + 7 mesures + 3-5 c à c farine

 
Apport quotidien à 9 mois

Aliments
   
Quantités

Préparation de suite :
Produit laitier (yaourt, fromage blanc) :
Viande ou équivalent :
Céréales/Biscuits/Pain :
P de terre :
Légumes :
Fruits :
Jus de Fruits :
Sucre :
Matières grasses :
Eau :
    500 ml (15 mesures)
½ pot
20 g
20 g (2 biscuits)
20 g
350 g
200 g
50 ml
10 g
5 g
Pour biberon + eau de boisson
Menu type à 9 mois : Répartition en 5 repas
MATIN :
MATINEE :
MIDI :



GOUTER :
SOIR :     Biberon 240 ml + 8 mesures de lait+ 8 c à c farine ou Biscuits
50 ml jus fruits + 1 Biscuit
2 c à c viande variée ou poisson ou un jaune d'oeuf 100 g
Légumes + 50 g Féculents (pomme de terre, petites pates type vermicelle)
+ 1 noisette de beurre ou une cuiller à café d'huile
100 g fruits écrasés - Eau
Biberon 240 ml + 8 mesures
150 g Légumes (Potage ou purée)
½ yaourt + 5 g Sucre ou Fruits (selon le midi)

 
Apport quotidien à 1 an

Aliments
   
Quantités

Lait de croissance ou Lait UHT :
Yaourt Fromage :
Viande ou Equivalent :
Céréales Biscuits Pain :
P de terre Pâtes Riz :
Légumes :
Fruits Jus :
Graisses (beurre/huile) :
Sucre :
Eau
    500 ml
1 pot /15 g
25 g / 1/2 oeuf
25 g / 2-3
100 g
200 g
150 g 50 ml
10 g (5/5)
15 g
Pour boisson (ou biberon)
Menu type à 1 an : Répartition en 4/5 repas
MATIN :

MATINEE :
MIDI :



GOUTER :
SOIR :     260 ml Bouillie ( 8 mesures + 10 c à c farine)
ou 230 ml Lait de croissance ou lait UHT entier + Biscuits ou pain
50 ml Jus de fruit + 1 biscuit ou pain à grignoter
3 c à c Viande variée ou poisson ou 1/2 oeuf (blanc et jaune)
100 g Légumes/ 50 g Féculents + 1 noisette beurre ou 5 ml huile
100 g Fruits ou Yaourt + 2 c à c sucre ou confiture
Pain à grignoter, Eau
Biberon 250 ml ou moins et Biscuits et/ou Fruits
100 g Légumes/ 50 g féculents (PDT ou vermicelle)
(soupe ou purée) + 5 g Beurre ou 5 ml huile
Yaourt + 2 c à c sucre ou confiture ou 100 g Fruits (selon le midi) - Eau

 
Erreurs diététiques au cours de la diversification

Quand on fait :
   

On risque :
Utilisation du lait de vache :     Carences en fer, acides gras essentiels, vitamines.
Excès de protides.
Excès de farines :     Dyspepsie des farineux.
Obésité.
Régime hyperprotidique :     Induction d'obésité.
Diarrhée du colon irritable
Exclusion abusive (eczéma) :     Carence protéique.
Excès de sucres (saccharose) :     Obésité. Caries.
Absence de fibres :     Troubles du transit
Excès de sel :     Induction précoce de l'HTA.
Charge osmotique pour le reinSpécificité des principaux paramètres biologiques chez le nouveau-né, le nourrisson et l'enfant
Henri Bruel, Florence Monginet

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 10 janvier 1999

Questions d'examen

1 Hématologie
1.1 Lignée rouge
1.2 Leucocytes
1.3 Plaquettes
2 Hémostase
3 Fonction rénale
   

3.1 Filtration glomérulaire
3.2 Diurèse
3.3 Pouvoir de concentration des urines
3.4 Equilibre sodé
3.5 Protéinurie
3.6 Valeurs ioniques plasmatiques
3.7 Phosphatases alcalines sanguines
4 Immunologie
Question d'examen

    1. Décrire les particularités de la numération formule sanguine du nouveau-né et du nourrisson, de l'hémostase et de la fonction rénale des six premiers mois de vie.

 
1 Hématologie
1.1 Lignée rouge

Chez le nouveau-né et en particulier le prématuré, le taux moyen des globules rouges est 5 téra/l avec une hémoglobine à 18 g/l et un volume globulaire moyen supérieur à 100 fl (macrocytose). L'anémie est donc définie par un taux d'hémoglobine inférieure à 13 g/ litre. Il faut noter que si les prélèvements sont réalisés par micro-méthode, les valeurs de l'hématocrite surtout sont majorées.

A partir du premier mois de vie, le taux de globules rouges et de l'hémoglobine diminue jusqu'au 3ème mois. A trois mois, le taux moyen d'hémoglobine est de 11,5 g/dl. Il remonte ensuite progressivement et les chiffres atteignent ceux de l'âge adulte vers l'âge de 6 ans.
1.2 Leucocytes

Le chiffre global à la naissance varie entre 9 et 30 giga/l (moyenne à 18) avec une prédominance de neutrophiles (61%). Le taux des neutrophiles chute dès la deuxième semaine.

Le taux de leucocytes va rapidement baisser dans le premier mois de vie, avec progressivement inversion de la formule et prédominance de lymphocytes (inversion physiologique)

Jusqu'à l'âge de trois ans environ, le taux global de leucocytes est supérieur à 10 giga/l, avec persistance de l'inversion. Entre 4 et 7 ans, le taux rejoint les chiffres adultes avec prédominance de neutrophiles.
1.3 PLaquettes

Les nouveau-nés à terme ont un taux de plaquettes normal, identique à celui de l'adulte. Chez les prématurés, le taux est plus faible mais entre 150 et 450 000/mm3.
2 Hémostase

Chez le nouveau-né, il existe des différences importantes du taux de certains facteurs de la coagulation par rapport à ceux de l'adulte.

Ainsi si le taux de fibrinogène, de facteur V et de facteur VIII sont similaires à ceux de l'adulte, le taux des facteurs vitamine K dépendants (II, VII, IX, X) est nettement plus bas (de l'ordre de 30 à 60%) et ce d'autant plus que le terme est moins avancé.

Différents facteurs (XI, XII, prékallicréine, kininogène), qui initient la coagulation plasmatique endogène sont également à un taux abaissé ainsi responsables d'un allongement du temps de céphaline activée et ce d'autant que le nouveau-né est plus jeune.

L'activité fibrinolytique est augmentée les 6 premières semaines de vie (taux du plasminogène diminué et taux des activateurs augmenté).

Rappelons que le chiffre des plaquettes est égal à celui de l'adulte chez le nouveau-né eutrophique, à terme ou prématuré.
3 Fonction rénale
3.1 Filtration glomérulaire

La filtration glomérulaire est calculée en pratique par la clearance de la créatinine ou de l'inuline. La clearance de la créatinine correspond au volume de plasma complètement épuré de la créatinine par minute. Le résultat doit toujours être reporté pour 1,73 m².

Clearance = U.V.
              P

Chez l'adulte, elle est en moyenne de 120 ml / minute pour 1,73m².
La filtration glomérulaire va se mettre en place dans les premières semaines de vie et ne sera comparable à l'adulte que vers l'âge de deux ans. Chez le prématuré, elle est corrélée à l'âge gestationnel ; elle va rapidement doubler après les deux premières semaines de vie. Cette filtration glomérulaire basse chez le nourrisson est importante à connaître pour l'adaptation des drogues à élimination rénale (comme par exemple les aminosides).
3.2 Diurèse

La plupart des nouveau-nés urinent dans les 24 heures et au plus tard à 48 heures de vie.
Le volume de diurèse augmente progressivement, de 30 à 60 ml le premier jour pour arriver aux valeurs adultes entre 8 et 14 ans.
. 2,5 ml/h à 2 jours
. 5 ml/h à 3 jours
. 20 ml/h à 1 an     . 30 ml/h à 5 ans
. 40 ml/h à 8 ans
. 60 ml/h à 14 ans

Tableaux à venir
3.3 Pouvoir de concentration des urines

L'osmolarité urinaire chez le nouveau-né est de 600 à 700 mosmol/l. L'âge de maturation se situe entre 6 et 11 mois, pour atteindre les concentrations de l'adulte (1.200 mosmol/l). Le rein du nouveau-né et du nourrisson s'adapte mal à une surcharge hydrique.
3.4 Equilibre sodé

La fonction de concentration du sodium est normale chez le nouveau-né à terme. Chez le prématuré il existe une excrétion augmentée du fait de l'immaturité avec risque de déshydratation et déplétion sodée pendant les trois premières semaines de vie.
3.5 Protéinurie

Elle peut être retrouvée jusqu'à 0,5 g/l dans les premiers jours de vie.
3.6 Valeurs ioniques plasmatiques

Elles sont peu différentes chez l'enfant et l'adulte. Les prélèvements en micro-méthode conduisent à surévaluer la kaliémie par hémolyse du sérum.
3.7 Phosphatases alcalines sanguines

Chez l'enfant leur taux est nettement augmenté avec des chiffres allant jusqu'à 4400 UI/ml, en période pubertaire.
4 Immunologie

Les cellules de l'immunité apparaissent vers la 12ème semaine de vie intra-utérine. Les lymphocytes B et T circulent à la 20ème semaine de vie intra-utérine, d'où la possibilité d'un diagnostic anténatal. Ce système immunitaire est fonctionnel mais n'a pas été sollicité car le foetus est dans un environnement axénique. D'ailleurs, les organes lymphoïdes ne sont pas développés à la naissance mais ils apparaissent ensuite selon les infections. Normalement, le foetus ne produit pas d'immunoglobulines. A la naissance, il ne dispose que des IgG maternelles qui traversent le placenta (immunisation passive). Ces immunoglobulines sont progressivement catabolisées et ont pratiquement disparu à 6 mois

A partir de la naissance, le nouveau-né et le nourrisson synthétisent progressivement ses propres immunoglobulines. Les taux de l'adulte ne sont atteints qu'en plusieurs années, en particulier les IgA et IgM. Le taux des IgG est le plus bas au 6ème mois car la secrétion du nourrisson est encore faible et que les IgG maternelles ont disparu. Le pourcentage des lymphocytes B et T évoluent également. Le taux des B passe de 35 % à la naissance à 25 % ultérieurement. Le taux des CD4 et CD8 est plus élevé chez le nourrisson que chez l'adulte (environ 3000 CD4 la 1ère année à 800 après 6 ans, comme chez l'adulte). Cette notion est importante pour la surveillance des enfants atteints par le V.I.H.

Remarques : Les pages suivantes sont des normes de références qui peuvent être consultées mais ne sont pas à apprendre.

Hématologie
cité dans : Hematology of Infancy and Childhood
D.G. Nathan and FA Oski - W.B. Saunders Company 1993

Tableaux à venir

 

Coagulation
cité dans : Pédiatrie Pratique - Périnatologie
R. Perelman. Ed. Maloine.

Tableau à venir

 

Immunologie
cité dans : Hematology of Infancy and Childhood
D.G. Nathan and FA Oski - W.B. Saunders Company 1

Tableaux à venir

  Situation sanitaire et sociale des enfants
Michel Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 12 janvier 1999

1 Données démographiques
1.1 La natalité
1.2 La mortalité
1.3 Accroissement
1.4 La population étrangère
1.5 Evolution
1.6 Les facteurs démographiques - La politique internationale
1.7 La mortalité infantile
1.8 La mortalité chez les enfants de 1 à 4 ans
   

1.9 La mortalité chez les enfants de 5 à 14 ans
2 La morbidité
2.1 Chez l'enfant de 0 à 6 ans
2.2 Chez A l'âge scolaire
2.3 Pour le grand enfant et l'adolescent
2.4 Problèmes sociaux
3 Problème d'éthique médicale en pédiatrie

Annexe

La pédiatrie n'est pas une spécialité comme les autres. C'est une médecine générale appliquée à une période spéciale de la vie : celle de la croissance. Elle s'étend donc de la naissance à 17 ans, englobant différentes périodes :
- la première année : celle de l'"infans", de l'enfant qui ne parle pas et qu'individualise la mortalité infantile (mortalité de la première année),
- la deuxième année, pendant laquelle l'enfant est encore très dépendant de sa mère,
- la troisième année : période où l'enfant doit commencer à élargir son horizon,
- les 4ème, 5ème, 6ème années : l'âge de l'école maternelle,
- de 6 à 10 ans : l'âge de l'école élémentaire (C.P., C.E 1, CE.2, CM.1, CM.2),
- de 11 à 18 ans : enseignement secondaire, technique ou universitaire,
- de 9 à 15 ans : c'est la période pubertaire variable selon les enfants, débutant plus tôt chez les filles que chez les garçons, s'étalant sur trois ou quatre ans.

L'adolescence chevauche et suit la période pubertaire.

Cette classification est plus exacte que celle de premier âge, deuxième âge, (le troisième âge commence à 65 ans !), de nourrissons, d'âge préscolaire, termes qui sont imprécis.
Une tranche d'âge peut se définir exactement en prenant la précaution statistique d'inclure la date du début et celle de la fin dans la classe d'âge déterminée. Par exemple : la tranche 0-5 ans inclue les six premières années de la vie ; la période 0-6 jours (néonatale précoce) inclue les sept premiers jours de vie ; une gestation de 37 semaines signifie que la 37ème semaine est écoulée et qu'on entre dans la 38ème semaine.

La médecine des enfants revêt une importance particulière par :
- le nombre des enfants : 25,8 % de la population a moins de 20 ans en 1997,
- la mortalité et la morbidité élevées dans ce groupe particulièrement vulnérable,
- la nécessité de surveiller la croissance et le développement psychomoteur et mental, activité préventive de base,
- le fait que les méthodes préventives sont particulièrement valables à cette époque de la vie (vaccinations, éducation sanitaire de la mère, des parents, de l'enfant lui-même),
- le fait qu'on sait maintenant que certaines affections de l'adulte ont leur point de départ dans l'enfance et résultent d'un défaut de prévention à cet âge de la vie ; par exemple : la suralimentation au cours des premières semaines de vie entraîne une obésité, elle-même facteur d'hypertension, d'athérome, de troubles vasculaires,
- le fait que les mesures préventives relativement simples ont une efficacité très grande : abaissement du taux de mortalité infantile de 120 à moins de 4,9 ‰ en 75 ans, de 1920 à 1995,
- le fait que l'enfant constitue un "capital" pour le pays, qu'il faut protéger.
1 Données démographiques

La natalité et la mortalité aux différents âges de la vie conditionnent la proportion d'enfants dans la population générale. Rappelons que la population française était de 48 millions en 1964, 52.600.000 en 1974, elle est de 58.723 millions au 01/01/98. Ce dernier chiffre incluant les étrangers résidant en France (un peu moins de 4 millions) mais excluant les nationaux résidant dans les Départements et Territoires d'Outre Mer ou à l'étranger.

La pyramide de population est la représentation de la structure par sexe et par âge de la population. Sa forme est généralement triangulaire avec, en ordonnées les âges, en abscisses la quantité d'individus pour chaque âge, d'un côté le sexe masculin, de l'autre, le sexe féminin.
C'est la photographie de la population d'un pays à un moment donné, obtenue généralement grâce à un recensement de la population. (Dernier recensement français en 1990).

Figure1 : Population de la France
évaluation provisoire au 1er janvier 1998
    1 : Déficit des naissances dû à la guerre de 1914-1918 (classes creuses)
2 : Passage des classes creuses à l'âge de fécondité
3 : Déficit des naissances dû à la guerre de 1939-1945
4 : "Baby Boom"
5 : Passage de la fécondité au dessous de 2enfants par femme

On notera sur la pyramide française de 1998 :
- de 1970 à 1975, un rétrécissement de la base traduisant la diminution du nombre des naissances. Depuis 1977, le phénomène s'est inversé provisoirement : arrivée à l'âge de procréation des enfants du "baby boom" de la période 1950,
- depuis 1983, stabilisation de la base,
- le nombre de naissances plus élevé chez les garçons que les filles (sex ratio : 104 garçons pour 100 filles),
- une mortalité plus grande dans le sexe masculin, sensible dès la naissance mais créant un groupe féminin de 60 à 90 ans plus important que le groupe masculin,
- les deux encoches, reflet des deux guerres 1914-1918 et 1940-1945 (morts + diminution des naissances pendant ces périodes troublées).

On peut également sur une pyramide estimer le nombre, donc le pourcentage de chaque tranche d'âge.

Les adultes doivent produire pour assurer la vie et l'éducation des jeunes et les retraites des personnes âgées.

Mais, une population évolue avec :
- d'une part des "entrées" : ce sont les naissances. La natalité dépend elle-même de la fécondité, de la nuptialité, des divorces, etc...
- d'autre part, des "sorties", ce sont les morts : mortalité.
Les migrations : émigrations et surtout les immigrations en France jusqu'en 1976, interviennent également.

 
Tableau I
France Métropolitaine : Indicateurs démographiques 1987 à 1997
Tableau - FRANCE métropolitaine. Indicateurs démographiques 1987 à 1997
     
1987
   
1988
   
1989
   
1990
   
1991
   
1992
   
1993
   
1994
   
1995
   
1996
   
1997
Naissances (m)
Décès (m)
Excédent naturel (m)
Solde migratoire
Variation totale    
768
527
240
44
284
   
771
525
247
57
304
   
765
529
236
71
307
   
762
526
236
80
316
   
759
525
234
90
324
   
744
522
222
90
312
   
712
532
179
70
249
   
711
520
191
50
241
   
730
532
198
40
238
   
735
537
199
35
234
   
725
534
191
40
231
Taux de natalité (t)
Taux de mortalité (t)
Taux de mort. infantile (r)    
13,8
9,4
7,8
   
13,7
9,3
7,8
   
13,6
9,4
7,5
   
13,4
9,3
7,3
   
13,3
9,2
7,3
   
13,0
9,1
6,8
   
12,3
9,2
6,5
   
12,3
9,0
5,9
   
12,5
9,1
4,9
   
12,6
9,2
4,9
   
12,4
9,1
5,1
Indice de fécondité (e)
Espérance de vie :
- hommes (a)
- femmes (a)    
1,80

72,0
80,3
   
1,80

72,3
80,5
   
1,79

72,5
80,6
   
1,78

72,7
80,9
   
1,77

72,9
81,1
   
1,73

73,2
81,4
   
1,65

73,3
81,4
   
1,65

73,7
81,8
   
1,70

73,9
81,9
   
1,72

74,1
82
   
1,71

74,2
82,1
Mariages (m)
Taux de nuptialité (t)    
265
4,8
   
271
4,8
   
280
5,0
   
287
5,1
   
280
4,9
   
271
4,7
   
255
4,4
   
254
4,4
   
255
4,4
   
281
4,8
   
285
4,9
Population (1) (m)
Moins de 20 ans (1) (m)
65 ans ou plus (1) (m)

Moins de 20 ans (1) %
65 ans ou plus (1) %    
55966
15853
7558

28,3
13,5
   
56270
15793
7719

28,1
13,7
   
56577
15720
7872

27,8
13,9
   
56893
15632
8036

27,5
14,1
   
57218
15523
8201

27,1
14,3
   
57530
15397
8361

26,8
14,5
   
57779
15259
8519

26,4
14,7
   
58020
15171
8683

26,1
15,0
   
58258
15150
8859

26,0
15,2
   
58492
15160
9012

25,9
15,4
   
58723
15142
9172

25,8
15,6
(a) années - (e) enfants pour une femme - (m) milliers - (r) pour 1000 naissances - (t) pour 1000 habitants - (1) en fin d'année
Source : INSEE
1.1 La natalité

Elle se mesure par le taux brut de natalité (nombre de naissances vivantes pour 1 000 habitants). Le taux de natalité en France est passé de 17,5 %° en 1966 à 13,6 %° en 1976 et oscille maintenant entre 12 et 14 %°, (en 1997 12,57 %°). Il doit être comparé à celui des pays sous-équipés : 35 à 50 %°.
Ce taux dépend de la structure par âge de la population et le taux de fécondité (nombre d'enfants pour 1000 femmes en âge de procréer : 15 à 45 ans) est plus exact. Encore plus exact est le taux de reproduction : nombre de filles rapporté au nombre de femmes de 15 à 45 ans.
On utilise de plus en plus des indices synthétiques reflétant mieux le comportement de la population.
Ainsi l'indicateur dit "somme des naissances réduites", dit encore "indicateur conjoncturel de fécondité" est un des plus parlants puisqu'il exprime le nombre moyen des naissances vivantes par femme.

Il était de :
- 2,90 en 1964
- 2,47 en 1970
- 1,93 en 1975
- 1,95 en 1980     - 1,81 en 1985
- 1,78 en 1990
- 1,70 en 1995
- 1,71 en 1997

Un chiffre de 2,1 est le minimum permettant d'assurer la stabilité de la population (remplacement de la mère et du père), compte tenu de la mortalité. Tout chiffre inférieur implique une diminution et, à terme, la disparition de cette population. La situation est devenue préoccupante en France en 1976 (1,8), s'est stabilisée à 1,8 ensuite mais se détériore progressivement depuis 1989.
Le problème est donc très préoccupant mais se retrouve dans tous les pays industrialisés :

En 1997 :
- Royaume-Uni : 1,71     - Irlande : 1,91     - Allemagne : 1,32

et surtout, en Europe du Sud : Italie (1,18) et Espagne (1,14).

Les seuls pays où la fécondité a augmenté sont les pays scandinaves : Norvège 1,91 ; Danemark 1,75.
Ceci explique l'intérêt porté par les gouvernements à la naissance du troisième enfant. On notera cependant le caractère hypothétique de cet indice car on ne peut connaître le nombre exact d'enfants qu'auraient les femmes avant qu'elles atteignent l'âge de la ménopause.

Les démographes étudient encore :
1. Les effets de la contraception : Les femmes de 20 à 44 ans sont 70 % à avoir recours à une méthode contraceptive. Si ce pourcentage est le même qu'il y a 20 ans, ce qui a changé en revanche, c'est le nombre de femmes utilisant la pilule : de 28 % à l'époque, le chiffre est passé à un peu plus de 40 %. Chez les moins de 30 ans, elle est utilisée par 3 femmes contraceptées sur 4. Le stérilet est en recul et concerne 23 % des femmes ayant recours à la contraception et concerne surtout celles qui ne veulent plus avoir d'enfants. Enfin, 29,4% des femmes n'utilisent aucun moyen contraceptif.
2. Les effets de la libéralisation de l'avortement : la baisse de la natalité a commencé bien avant la loi de 1974 autorisant l'avortement dans certaines conditions. Le nombre d'avortements légaux après une augmentation régulière de 1976 (134 173) à 1983 (182 862) a tendance à diminuer 173 335 (1985), 156.000 déclarés en 1995. Cette diminution concerne la quasi totalité des départements et témoigne d'une stabilisation relative du phénomène. Les IVG (interruptions volontaires de grossesse) traduisent les limites de la contraception.
3. Le problème de la stérilité qui peut relever de la femme, de l'homme ou du couple et contre laquelle les études sur la fécondation et la reproduction permettent de lutter.
4. La nuptialité. Le mariage est depuis plus de 20 ans l'objet d'une désaffection de plus en plus grande. Le nombre de mariages en 1997 est de 284.500. Le taux de nuptialité, c'est-à-dire le nombre de mariages de célibataires pour 1.000 personnes de chaque génération, de 8,1 en 1972 est tombé à 4,8 en 1987, il est de 4,8 en 1996. On sait que beaucoup de femmes vivent en "union libre" mais certaines "régularisent" la situation lors de la survenue d'un enfant. Cependant l'augmentation des naissances hors mariage est régulière. 150 492 en 1985 représentant 19,6 % du total des naissances, 216.000 en 1989 soit 28,2 % des naissances, 31,9 % des naissances en 1991 et 39 % en 1996 alors que pendant plusieurs décennies la proportion s'était stabilisée à 6 %.
L'âge moyen du mariage augmente dans les deux sexes (29 ans pour les hommes et 27,6 ans pour les femmes).
La proportion de naissances de parents étrangers dans l'ensemble des naissances est stable (11 %).
C'est surtout la naissance du 3è enfant qui est touchée.
L'intégration des naissances hors mariage dans la fécondité par rang confirme que la baisse de la fécondité en France résulte de façon quasi exclusive de la diminution des naissances de rang 3 et plus.

Tableau II
Caractéristiques de la descendance finale des générations
(Naissances par femme, sauf âge de la maternité)
Générations
   
Descendance finale
   
Age moyen à la maternité
   
Descendance
à 24 ans révolus
   
à 29 ans révolus
1940
1945
1950
1955
1960
1963
1965
   
2,42
2,22
2,11
2,12

(1,99)
   
26,4
26,0
26,5
27,0
   
0,96
0,99
0,88
0,77
0,66
0,56
0,49
   
1,82
1,74
1,54
1,48
1,39
1,27
Les taux correspondant aux années postérieures à 1991 sont pris égaux à ceux observés, au même âge en 1991, pour les générations 1955 ou avant dont la descendance est déjà largement constituée. La génération 1963 fait l'objet d'une estimation particulière, précisée dans le texte.

On notera que pour les femmes nées entre 1930 et 1955 le nombre de premier enfant est sensiblement le même : 87 à 84 % des femmes ont un enfant. Il en est de même pour le deuxième enfant 65 à 61 % ; par contre le pourcentage de femmes ayant trois enfants tombent de 40 à 25 %. Le désir d'un ou de deux enfants est donc constant et c'est sur la venue du 3ème enfant qu'il faut faire porter l'effort. Pour les 4è et 5è enfants les chiffres déjà bas ont encore baissés, mais il s'agit de femmes alors relativement âgées et on ne tient pas à voir se développer les grossesses après 38 ans et même 35 ans.
5. Le divorce. Légère diminution en 1996 avec 120.300, contre 122.000 l'année précédente. Mais pendant les années 1985-1990, la moyenne annuelle était plus faible : elle tournait autour de 106.000.

L'âge de la femme au moment du mariage joue un rôle important. 76 % des mariages avant 20 ans sont rompus dans les 7 années qui suivent. Le moment où naît le premier enfant a aussi une influence sur la fréquence du divorce qui est plus fréquent quand les enfants naissent avant le mariage. La fréquence des remariages chez les divorcés baisse au profit d'une remise en couple après divorce, traduction de la désaffection vis-à-vis du mariage.

L'étude des conséquences du divorce et notamment du droit de garde des enfants du couple fait apparaître que dans 85 % des cas (1985) le droit de garde revient à la mère aussi bien dans les divorces par consentement mutuel (47 % des cas) qu'en cas de faute ou de rupture de la vie commune.

Le nombre des naissances vivantes annuelles est également utile à connaître en pédiatrie : 878 000 en 1964, il décroît jusqu'en 1976 : 720 000 puis augmente jusqu'en 1981 : 806 000 pour redescendre ensuite et varier entre 700 et 750.000 par an (725.000 en 1997).

Pour un département comme l'Ille-et-Vilaine, le nombre de naissances est tombé de 13 663 en 1972 à 10 875 en 1976, ce qui ne manque pas de retentir sur l'activité des maternités, les activités pédiatriques et les effectifs scolaires. Il est remonté en 1979 à 11 597, en 1980 à 12 400, mais reste stable vers 11.000 depuis 1985 (11.063 en 1996).
1.2 La mortalité

La mortalité se mesure par le taux brut de mortalité : nombre de morts rapporté à 1 000 habitants. Ce taux dépend aussi de la structure de la population. Il est inférieur à 10 en France depuis 1986 (10,7 en 1966, 10,5 en 1976, 9,8 en 1986, 9,2 en 1995). Le nombre de décès est de 534.000 en 1997 soit un de taux de mortalité de 9,1 décès pour 1000 habitants.

L'espérance de vie à la naissance est passée de 1964 à 1997 de 68 à 74,2 ans pour les hommes, et 75,6 à 82,1 pour les femmes.
1.3 Accroissement

La différence entre les taux bruts de natalité et de mortalité mesure l'accroissement de la population. En 1997, il est de : 12,4 - 9,1 = 3,3 ‰. Ce chiffre est faible, et dans certains pays occidentaux, existe déjà un excédent des décès sur les naissances. Ce chiffre doit être comparé à l'accroissement des naissances dans les pays sous-équipés qui est de 2 à 3 %, aboutissant ainsi à un doublement de la population en 20 à 35 ans.

Par exemple, l'Inde, avec 500 millions d'habitants, comptera un milliard d'habitants dans 30 ans. L'excédent de population de la Chine en trois ou quatre ans représente la population entière de la France.

A noter que l'accroissement naturel est lié à la structure de la population et ne contredit pas les chiffres alarmants de l'indice de fécondité. Il prouve seulement qu'il faut un certain temps pour apprécier l'évolution démographique.
1.4 La population étrangère

La population étrangère est difficile à définir (étrangers mariés à des français...)
Elle est de 3,6 millions, stable depuis plus de 20 ans : 6,4% de la population totale en 1990, 6,8% en 1975.
Cette population est composée essentiellement de portugais (649 714), algériens (614 207), marocains (572 652), italiens (252759), espagnols (216 047) africains noirs et malgaches (176 745), asiatiques (424 668), 197 712 turcs, 206 366 tunisiens.
Les travailleurs étrangers sont souvent accompagnés par leur famille : ils assurent d'ailleurs 11 % des naissances françaises.
Ces migrants transplantés avec leurs habitudes et leurs coutumes, souvent ne parlant pas le français à leur arrivée, posent des problèmes de santé publique. Ils alourdissent les statistiques de mortalité et de morbidité et nécessitent un effort particulier de Protection Maternelle et Infantile. Les difficultés économiques et notamment l'augmentation du chômage ont amené le gouvernement à prendre différentes mesures pour limiter l'immigration et favoriser le retour dans le pays d'origine et depuis 1976, on estime que le solde migratoire est nul.

Figure 3

Pyramides du Ghana et du Royaume-Uni
(sexe mâle à droite dans les figures anglo-saxonnes)

1.5 Evolution

Natalité et mortalité créent des types variés de pyramide de population :
- dans les pays sous-équipés, le nombre des naissances est élevé mais la mortalité est très élevée dès la première année : la pyramide est donc large, son sommet peu élevé. Le groupe de 0 à 15 ans représente 50 % de la totalité. C'est une pyramide de population jeune (Figure 3a) ;
- dans les pays industrialisés, de type occidental, la natalité et la mortalité sont faibles. La pyramide prend une allure cylindrique. Le groupe de 0 à 15 ans ne représente plus que 25 % de la population, par contre le groupe des personnes âgées augmente : 18 à 20 %. C'est une pyramide de population vieille (Figure 3b).

Entre ces deux types extrêmes existent des situations intermédiaires. Certaines d'entre elles peuvent être provisoirement favorables : par exemple, la diminution de la classe des jeunes par rapport aux générations précédentes représentant la tranche active, limite les dépenses d'élevage et d'instruction ; mais à la génération suivante, la tranche active trouve une situation plus difficile, ayant à satisfaire les besoins d'une tranche plus importante de personnes âgées.

La répartition par groupe d'âge de la population française montre une diminution progressive des classes jeunes (0 - 19 ans) qui passe de 34,1 % (1966) à 25,9 % (1995) et une augmentation des personnes âgées (60 ans ou plus) 20, % en 1995 (dont 6,6% 75 ans ou +).
Mais les activités en faveur de l'enfant étant différentes suivant l'âge, il est plus intéressant, en pédiatrie, de connaître le nombre d'enfants par tranche d'âge. Pour 800 000 naissances par an, on aura :
- à 1 an : 788 000 enfants
- à 2 ans : 780 000 enfants

Soit au total : près de 12 millions d'enfants

figure 4

Evolution de la pyramide de population en France de 1775 à 1982

1.6 Les facteurs démographiques - La politique internationale

Jusqu'à la fin du XVIIIè siècle, l'Etat n'a pas eu de politique démographique et s'est fait l'instrument plus ou moins actif selon les époques, de la politique et de la morale de l'Eglise catholique (interdiction du divorce et de l'avortement). Depuis un siècle, les choses ont bien changé et le développement de la planification dans tous les domaines : économique, éducatif, sanitaire, social oblige à préciser le volume de la population, sa composition et son évolution.

La fécondité a commencé à décliner dans les pays industrialisés dans les années 1960. Certains pays sont plus touchés que d'autres mais cette évolution entraîne inéluctablement un vieillissement de la population. Les raisons de la baisse de fécondité sont souvent évoqués : l'urbanisation, le développement du travail féminin, les difficultés de logement, un sentiment diffus de crainte devant l'avenir.

Une politique démographique peut viser à encourager ou, au contraire, à limiter les naissances par une action directe : contraception, avortement, prévention de la mortalité, lutte contre la stérilité, etc... ou une action indirecte : législation sur l'héritage, le travail féminin, les allocations familiales, le logement, etc...

Tous les gouvernements qui se sont succédés ces dernières années souhaitent assurer au moins le remplacement des générations et ont donc décidé d'apporter à la famille, priorité de notre société, le soutien nécessaire à son épanouissement. La politique familiale est une priorité qui doit permettre de mieux compenser les charges familiales et de donner aux familles les moyens de mieux concilier la vie professionnelle et la vie familiale. D'où le plan familial de 1986.

L'aide de l'Etat à la famille en espèces ou en nature revêt des formes très diverses qu'on peut classer (J.M DELARUE) :
- en aide systématique s'appliquant à la naissance, l'éducation, les "handicaps" particuliers : protection de la femme au travail, congé maternité, garde de l'enfant. Ces aides sont accordées sans condition de ressources.
- certaines aides privilégiant les familles défavorisées ayant un faible revenu. Ces aides sont accordées avec condition de ressources.
- enfin, certaines formes d'aides privilégiant les familles nombreuses. Ces sont les allocations familiales versées à toutes les familles à partir de deux enfants. Elles augmentent avec le nombre d'enfants. 2 enfants : 675 F, 3 enfants 1.539 F, 4 enfants 2.404 F, par enfant supplémentaire : 864 F/mois.
Majoration par enfant : entre 10 et 15 ans : 190 F, de plus de 15 ans : 337 F.
- Les avantages fiscaux : l'impôt sur le revenu tient compte des charges des familles depuis 1945 par le système des "parts" : un couple = 2 parts, un enfant = 1/2 part. Le troisième enfant = 1 part. Le revenu est divisé par le nombre de parts et c'est à ce "quotient familial" qu'est appliqué le taux de l'impôt, mais cet avantage est inférieur aux aides accordées aux parents célibataires ce qui encourage le non mariage ou le divorce.
Certains impôts locaux, taxe d'habitation en particulier, tiennent compte également des charges de familles.

Malgré sa diversité, l'aide sociale à la famille ne représente que 14,6 % des dépenses sociales.
1.7 La mortalité infantile

C'est la mortalité de la première année de vie. Son taux est calculé par le nombre de morts au cours de la première année de vie rapporté à 1 000 enfants nés vivants. Ce taux est un bon indice du niveau de santé d'un pays. Très élevé dans les pays sous-équipés : 150 à 300 pour mille, il s'est fortement abaissé dans les pays occidentaux, descendant à 20, 15 et même 10 pour mille (4,8 en France en 1995).

L'évolution du taux de mortalité infantile est connue en France depuis longtemps grâce aux statistiques tirés des registres paroissiaux et surtout depuis 1800 des registres d'Etat Civil. La courbe est très évocatrice puisqu'elle se maintient en plateau jusqu'à la fin du 19ème siècle (180 à 200 %), puis baisse ensuite régulièrement, avec des remontées passagères au moment des guerres du XXème siècle.

Figure 5
Courbe de mortalité infantile en France depuis 1800

En Ille-et-Vilaine, le taux de mortalité infantile est passé de 32 en 1962 à 19 en 1965, 13,1 en 1975, 8,1 en 1985, 7,8 en 1990, 4,4 en 1996. Le nombre de naissances étant sensiblement de 11 000 par an, on sauve donc maintenant chaque année 275 enfants, ce qui est un résultat très appréciable. Cette amélioration est liée aux progrès médicaux (antibiotiques, vaccinations...) mais aussi aux lois sociales (Code de la Famille, Ordonnance de 1945 sur la PMI et la Médecine Scolaire, Aide à la Famille) et à l'élévation du niveau de vie. La figure 5 montre nettement que la mortalité infantile baisse régulièrement depuis 1890, époque où l'industrialisation a permis d'améliorer l'hygiène.

Lorsque le taux de mortalité infantile descend en dessous de 30, et à plus forte raison, de 20 pour mille, ce qui est le cas en France, il est intéressant d'en étudier les composantes.

La mortalité infantile se différencie en effet :
- en mortalité néonatale de 0 à 27 jours,
- et mortalité post-néonatale de 28 à 365 jours.

Cette distinction repose sur les causes différentes de ces deux types de mortalité.

La mortalité post-néonatale est due principalement aux maladies infectieuses et à la malnutrition, elles-mêmes liées à la pauvreté et à l'ignorance. Ces causes, dites "exogènes", bien connues, ont pu être efficacement combattues par une meilleure hygiène de vie, l'éducation sanitaire, les vaccinations, les antibiotiques, les lois sociales. L'importante baisse de la mortalité infantile est due avant tout à la baisse de la mortalité post-néonatale. Dans les pays industrialisés, c'est la Mort Subite du Nourrisson qui représente maintenant la première cause de cette mortalité.

La mortalité néonatale, au contraire, relève surtout de causes dites "endogènes" mal connues. Dans les premiers jours de la vie, on s'aperçoit que les trois causes de mort principales sont : la prématurité, les malformations, le mauvais déroulement de l'accouchement ; mais ce sont encore des étiquettes qui couvrent beaucoup d'ignorance étiologique et physiopathologique, bien que de très gros progrès aient été réalisés depuis 20 ans.

Cette mortalité néonatale est elle-même subdivisée en mortalité néonatale précoce (0-6 jours) et tardive (7 à 27 jours). La grande majorité des morts se produit encore pendant les premiers jours de la vie, bien que les progrès réalisés en néonatologie maintiennent en survie un certain nombre d'enfants ; cette survie pouvant même se prolonger plusieurs mois.

On appelle mortalité périnatale, l'addition de la mortalité foetale tardive (mort-nés) et de la mortalité néonatale précoce en les rapportant généralement toutes les deux au nombre de naissances vivantes. Ceci évite les erreurs d'appréciation sur la vitalité de l'enfant à la naissance (faux mort-nés) et se justifie par le fait que les causes de mort sont assez souvent les mêmes.

Figure 6
Schéma des différentes périodes de la grossesse et de la première année
Grossesse
   
Nais
   
sance    
1ere année
   
1 an
1er trimestre
Embryon
   
2è trimestre
Foetus
   
3è trimestre
Foetus
   
0    
6 j
   
7 j    
27 j
   
28 j    
365 j
Avortement
   
Mortalité
foetale tardive
   
Mortalité néonatale
   
Mortalité
postnatale
précoce
   
tardive
Mortalité périnatale

Cette mortalité périnatale demeurait très élevée : 26 pour mille en 1970 alors que le taux de mortalité infantile n'était qu'à 17 pour mille. Elle constituait donc un problème important de santé publique, justifiant les mesures spéciales qui ont été prises (voir PMI) et qui ont abaissé le taux de 26 à 10,7 pour mille en 1986.

Tableau IV
     
Mortalité infantile
   
Mortalité.Néonat. Précoce
   
Mortinatalité
   
Mortalité Périnatale
   
Mortalité Néonatale
   
Mortalité  Post-néonatale
     
IetV
   
F
   
IetV
   
F
   
IetV
   
F
   
IetV
   
F
   
IetV
   
F
   
IetV
   
F
1970
1975
1980
1985
1990
1995
   
18,7
13,1
11,2
8,1
6,8
6,3
   
18,2
13,8
10,0
8,3
7,3
4,9
   
12,4
7,5
4,3
3,8
2,0
2,4
   
10,2
7,3
4,4
3,4
2,4
2,1
   
13,6
9,5
8,5
6,8
5,2
4,6
   
13,3
10,9
8,6
7,3
5,9
5,3
   
25,9
16,9
12,7
10,6
7,2
7,6
   
23,4
18,1
12,9
10,7
8,3
7,4
   
-
-
6,5
5,2
3,4
4,1
   
12,6
9,1
5,8
4,6
3,6
2,9
   
-
-
4,6
2,9
3,4
2,17
   
5,5
4,6
4,3
3,7
3,7
1,96

 

Le tableau IV montre l'évolution depuis 20 ans des composantes de la mortalité infantile. Les mortalités périnatale et néonatale ont chuté dans les années 1970, continuant à diminuer depuis mais plus lentement atteignant des taux faibles parmi les meilleurs taux étrangers (Scandinavie, Japon, Suisse, Pays-Bas). La mortalité post-néonatale se stabilise à un taux faible.

Il reste à envisager la mortalité pendant la grossesse. On peut diviser la grossesse en trois périodes de 12 semaines chacune. Un enfant ne peut vivre qu'après 26 semaines de vie intra-utérine (180 jours dans la législation française qui fait partir encore la grossesse du quinzième jour qui suit la date du début des dernières règles). Toute naissance avant ce terme est donc un avortement (fausse couche) et après 27 semaines, l'enfant peut naître mort, c'est un mort-né (mortalité foetale tardive), ou vivant : c'est un prématuré, immature. Il peut être difficile d'établir la différence entre avortement et mort-né en se basant uniquement sur la durée de gestation souvent difficile à préciser. Il est plus facile de se baser sur le poids et désormais doit être considéré comme mort-né tout foetus dont le poids de naissance est supérieur ou égal à 500 grammes. Ceci entraîne ipso facto que tout enfant de ce poids ayant manifesté un signe quelconque de vie doit être considéré comme vivant, prématuré et s'il meurt être comptabilisé dans la mortalité infantile ; en général comme il ne vit que quelques heures, dans la mortalité néonatale précoce.

On connaît mal, faute d'un bon enregistrement, l'incidence des avortements provoqués ou spontanés, ce qui rend difficile d'apprécier les effets des lois sur la contraception et sur l'interruption volontaire de grossesse (avortement légal). En 1994, 166 933 avortements ont été enregistrés.

On connaît le taux de mortalité infantile et périnatale pour chaque département. On sait qu'il y a une très grande inégalité entre les régions. La mortalité infantile était et est encore plus élevée dans le Nord et l'Est (pays des mines) et en Bretagne (pays agricole). L'explication est simple : la mortalité infantile est liée à la catégorie socio-professionnelle : elle atteint les taux les plus élevés chez les manoeuvres, les salariés agricoles et les taux les plus bas (sensiblement la moitié) dans les professions libérales et les cadres supérieurs. La connaissance de ces faits conduit à renforcer les mesures préventives dans certaines régions et l'évolution des taux permet de suivre l'efficacité des mesures appliquées. En 1976, c'est en se basant sur les taux de mortalité périnatale que des mesures particulières ont été prises dans le département du Nord et en Corse.

Le tableau V chiffrant l'évolution de la mortalité infantile en fonction de quelques catégories socio-professionnelles, entre 1956 et 1983, montre :
- une évolution favorable dans tous les milieux,
- une différence encore importante mais moindre en fonction du milieu social,

On retrouve chez le foetus et le nouveau-né la surmortalité masculine. L'excédent de garçons est de 10 à 20 % parmi les mort-nés et de 35 à 40 % chez les enfants nés vivants et décédés rapidement. Or, il naît plus de garçons que de filles (sex ratio 105 contre 100). En considérant l'ensemble de la mortalité intra-utérine, il faudrait imaginer un excédent masculin important au départ, non démontré et contraire au processus génétique de détermination du sexe.

Tableau V
Evolution de la mortalité infantile de 1956 à 1983
en fonction de la catégorie socio-professionnelle (INSEE)
 
C.S.P
   
1956 - 1960
   
1961 - 1965
   
1966 - 1970
   
1976 - 1983
Manoeuvre    
44,8
   
36,2
   
30,4
   
13,3
Salarié agricole    
35,3
   
27,7
   
23,9
   
10,7
Cadre moyen    
19,7
   
16,1
   
14,1
   
7,9
Profession libérale    
17,0
   
14,7
   
12,2
   
8,0
 
1.8 La mortalité chez les enfants de 1 à 4 ans

Elle est inférieure à 0,5 pour 1 000 et continue à diminuer lentement. Cette mortalité est due essentiellement aux accidents (37 %) qui précèdent de loin les anomalies congénitales (11,8 %) et les tumeurs malignes et leucémies (7,7 %). La mortalité par infections pulmonaires (4,3 %) et générales (4,3 %) a considérablement régressé, bien que ces maladies soient encore fréquentes.
1.9 La mortalité chez les enfants de 5 à14 ans

La mortalité de 5 à 14 ans est la plus faible de toutes les classes d'âge avec des variations faibles dans le temps ; elle est environ de 0,25%° pour les garçons et 0,17%° pour les filles.
Ce sont les accidents qui constituent la moitié de ces décès ; la deuxième cause est représentée par les tumeurs et les leucémies.
2 La morbidité

On sait que la fréquence d'une maladie se juge par son incidence (nombre de nouveaux cas pendant une période donnée) et sa prévalence (nombre de cas existant à une date ou pendant une période donnée). Il est assez difficile de connaître avec précision la morbidité d'un pays car les renseignements fournis par les hôpitaux, les dispensaires, les consultations, les médecins privés traduisent des activités particulières qui ne peuvent être rapportées à l'ensemble de la population. Un des objectifs des trois certificats médicaux obligatoires au cours des deux premières années de vie est justement d'établir des bases solides pour construire une politique sanitaire valable.
Sans avoir de renseignements précis, on sait cependant que la situation a bien évolué depuis 50 ans.
2.1 Chez l'enfant de 0 à 6 ans

Les maladies nutritionnelles, de carence, ont pratiquement disparu, même le rachitisme. Elles sont maintenant d'un type opposé : l'obésité par surcharge calorique.
Les maladies infectieuses bactériennes : diphtérie, typhoïde... sont également bien maîtrisées par les progrès de l'hygiène, l'élévation du niveau de vie, les vaccinations, les antibiotiques.
Il reste essentiellement les maladies virales, encore que nous puissions vacciner contre la poliomyélite qui maintenant a pratiquement disparu en France, la rougeole, les oreillons, la rubéole et l'hépatite.
L'accent doit être mis sur d'autres troubles, essentiellement sur le dépistage des infirmités et inadaptations et, naturellement, leur correction dans la mesure du possible.
Les définitions doivent être claires : une lésion organique peut donner une infirmité et cette infirmité entraîner un handicap, c'est-à-dire une mauvaise insertion familiale, scolaire et sociale.

Il faut différencier :
- les infirmités motrices : l'infirme moteur cérébral a théoriquement une intelligence normale ou subnormale ; en fait une paralysie importante entrave généralement le développement mental et on parle alors d'IMOC (Infirmité Motrice d'Origine Cérébrale)
- les infirmités sensorielles (auditives et visuelles) qui gênent la relation de l'enfant et de son entourage,
- les déficiences mentales
- et enfin, les inadaptations : sous ce vocable, on regroupe les différents troubles du comportement liés le plus souvent aux problèmes sociaux et familiaux.
Il faut savoir que, bien souvent, plusieurs infirmités peuvent être associées et s'accompagner d'une inadaptation sociale.

Les données épidémiologiques sur ces troubles manquent ou sont difficiles à interpréter étant donné la diversité des méthodes employées, la variabilité des critères retenus, les différences entre les groupes étudiés. La non-formation du personnel du santé, y compris les médecins, à l'examen de l'audition et de la vision par exemple, ne favorise pas l'établissement de données portant sur l'ensemble de la population.

Des travaux effectués en France et à l'étranger, il ressort cependant que :
- 0,5 % des enfants sont sourds profonds, (1 pour 2 000)
- 5 % sont hypoacousiques et risquent, de ce fait, de présenter des troubles du langage.
- 10 à 15 % ont des anomalies de la vision,
- 3 à 4 % ont un strabisme,
- 0,15 % présentent une infirmité motrice cérébrale.

Pour les retards mentaux, il faut tenir compte du degré de débilité et on estime qu'il y a :
- débiles légers : 35 000 par an
- débiles moyens : 5 600 par an
- débiles profonds : 1 500 par an (2 %°)

On note également :
- troubles du comportement : 7,5 %°
- états psychotiques : 1,37 %°

Ceci donne les dimensions d'une activité pédiatrique nouvelle à la fois curative et préventive.
Il est très difficile d'évaluer les motifs de consultation pédiatrique courante. Nous ne reviendrons pas sur les causes déjà vues lors de la mortalité, qui sont des causes caricaturales de la morbidité, en rappelant cependant la fréquence des accidents pendant l'enfance.
Parmi les troubles dits mineurs, les plus fréquents sont les atteintes des voies respiratoires (rhume, otite, bronchite...), les troubles digestifs (vomissements, diarrhées), les troubles cutanés (eczéma, allergie, angiome...), les troubles orthopédiques. Parmi ces maladies, signalons le rhume commun (la rhinopharyngite), affection à virus peu immunisante qui atteint les enfants sept à huit fois au cours des premières années et dont le traitement pose un problème pédiatrique difficile.
Une mention particulière doit être faite pour les troubles d'adaptation, déjà signalés, d'aspects variés, et dont l'importance croît avec les bouleversements apportés aux traditions familiales.
2.2 A l'âge scolaire

Les difficultés scolaires, les retards dans la scolarisation constituent une cause importante de consultation (20 % de redoublants à la première année d'école élémentaire). Ces difficultés peuvent être dues à une infirmité, mais relèvent beaucoup plus souvent d'une inadaptation familiale et sociale.
Le problème des caries dentaires doit également être abordé en pédiatrie. C'est une maladie touchant presque toute la population et entraînant des dépenses importantes (10 % du budget de la sécurité sociale). Or, elle peut être réduite de 70 % grâce à des conseils d'alimentation (pas de sucre entre les repas), des conseils d'hygiène (brossage des dents) et la prise de fluor.
2.3 Pour le grand enfant et l'adolescent

On verra que la croissance s'est accélérée au cours des derniers siècles et se termine à 17 ou 18 ans. La longueur de la période de l'adolescence s'est ainsi accrue avec, d'un côté l'apparition plus précoce de la puberté et de la maturité (trois ans d'avance en un siècle) et, de l'autre, l'allongement des études entraînant un retard de l'insertion dans la vie productive. Cet allongement est une des causes du malaise de la jeunesse actuelle. La précocité des relations sexuelles a créé un problème de grossesse chez les adolescentes et celui de la contraception à cet âge.
En plus de ce problème, se pose à cet âge le problème des suicides, de la drogue, de la délinquance juvénile. De nombreux travaux ont été réalisés sur ce sujet, mettant en évidence la disparition de l'idéal familial, le relâchement des liens familiaux et le rôle de l'insertion socio-professionnelle (Zazzo).
Ceci nous amène à parler d'autres problèmes sociaux.
2.4 Problèmes sociaux :
- problème du travail de la mère, pendant la grossesse d'abord puis ensuite pendant les premiers mois de vie de l'enfant qui pose celui de la garde des enfants durant cette période (crêche,...) ;
- problème de la formation des parents pour l'élevage et l'éducation de leurs enfants, y compris l'éducation sexuelle ;
- problème des enfants battus ou maltraités, aux aspects médicolégaux difficiles ;
- problème des enfants plus ou moins abandonnés ; un grand nombre d'enfants doivent être entretenus complètement ou partiellement par la collectivité. En 1986, 10 500 enfants sont pupilles de l'Etat, 110 000 enfants sont confiés temporairement à l'Aide Sociale à l'Enfance, 105 000 sont surveillés, plus de 200 000 familles sont secourues financièrement. Ces chiffres soulignent l'importance de ce problème de l'aide sociale à l'enfance qui, en dehors de son coût, n'a pas encore de méthodes bien définies.

Il nous faut compléter ce panorama de la pathologie de l'enfant en insistant sur la prévention et la pédiatrie préventive. La surveillance de la croissance somatique et du développement psychomoteur, intellectuel et mental est bien développée en France. Elle fait l'objet de 20 examens obligatoires et gratuits au cours des six premières années. Ces examens sont faits dans 66 % des cas par les médecins généralistes de famille.
Il est donc nécessaire que les étudiants en médecine connaissent parfaitement les étapes de ce développement, soient familiarisés avec les méthodes simples d'examens, connaissent les facteurs jouant sur ce développement : alimentaires, sociaux, affectifs, etc...
Dans cette optique de prévention, nous pouvons dès maintenant, signaler le dépistage de la phénylcétonurie (PCU) et de l'hypothyroïdie chez pratiquement tous les nouveau-nés français et le développement des méthodes de dépistage prénatal pendant la grossesse.

 

Figure 7
La santé de l'enfant concerne un vaste domaine ou à côté du
médecin interviennent d'autres personnels et les familles
Les soins aux enfants représentent 20 à 40 % de l'activité du médecin généraliste

3 Problème d'éthique médicale en pédiatrie

Le principe de base de la morale médicale est le respect de la vie humaine.

L'éthique est l'application de la morale à diverses situations et les progrès de la médecine, aussi bien dans la technique que dans l'organisation des soins, posent de nombreux problèmes d'éthique.

A l'échelon international, se pose la question d'une éthique différente dans les pays équipés et sous-équipés : nous dépensons des sommes énormes pour quelques enfants pouvant bénéficier d'interventions admirables mais onéreuses alors qu'ailleurs des enfants meurent de faim !

Un autre aspect est, dans une société ayant institué un système de soins accessibles à tous (type sécurité sociale), d'imposer un certain nombre de mesures pour protéger l'individu et limiter les dépenses de la collectivité, (exemple : vaccination antitétanique). Certains parlent d'atteinte aux libertés individuelles !

Un troisième aspect est la question du bien fondé de certaines thérapeutiques (maintien de la vie à tout prix). En pédiatrie, cet aspect est de pratique journalière : faut-il maintenir la réanimation d'un nouveau-né ? Faut-il opérer une malformation entraînant la mort certaine chez un enfant par ailleurs handicapé (exemple : trisomique 21 avec atrésie duodénale) ?

Il s'agit là d'un débat auquel très tôt l'étudiant doit participer. A côté du principe de base de la morale médicale, il convient d'envisager toutes les conséquences de la décision à prendre, immédiates ou à moyen terme, mais dans cette évaluation il convient de tenir compte des effets secondaires connus ou prévisibles et de toujours penser qu'il en existe d'imprévisibles (retentissements sur la vie familiale, les relations du couple, le développement des autres enfants, la situation professionnelle, etc...).

La tendance est souvent de faire prendre la décision par un groupe comportant au besoin des non-médecins : psychologues, travailleurs sociaux, juristes, prêtres... Une telle tendance conduit à demander à la Société d'établir des règles, ce qui est fait pour la contraception et l'avortement et vient d'être fait par la loi sur la bioéthique. ; mais l'absence de réglementation dans d'autres domaines maintient entière la responsabilité du médecin.

L'aspect économique, souvent évoqué de nos jours, doit être envisagé avec prudence. On risque dans cette voie de ne plus vouloir soigner les enfants grands handicapés, mais il faudra alors fixer la limite du handicap tolérable. Ceci ne signifie pas que le médecin doive se désintéresser de cet aspect du problème. Le médecin doit savoir qu'aucun type de société du monde actuel ne peut appliquer à la totalité de sa population les techniques médicales mises au point. Il faut effectuer des choix ce qui est difficile, pénible, gênant mais c'est au médecin plus qu'à l'administration de les faire.
Un premier pas est déjà d'éviter de gaspiller temps et argent et dans cette voie il nous paraît nécessaire que le futur médecin connaisse le coût des examens courants (annexe suivante).

 
Annexe

Coût des principaux examens (au 1/04/96)
Examens
   
Montant
(en Francs)
NFS avec plaquettes (B40) B = 1,80 F    
72,00
Fer sérique (B30)    
54,00
Ionogramme (Sodium, Potassium, Chlore) (B20)    
36,00
Transaminases (B25)    
45,00
SGPT + SGOT (B20) chaque    
36,00
Glycémie (B10)    
18,00
Urée sanguine (B10)    
18,00
Calcémie (B15)    
27,00
VS (B8)    
14,40
Culot urinaire (B75)    
135,00
Antibiogramme (B40)    
72,00
Coproculture de B30 à B120 :      
- B 30    
54,00
- B 120    
216,00
Radio : Z1 = 10,95 F      
- pulmonaire face      
- abdomen sans préparation, face    
142,35
- du bassin      
TOGD (Z1 35)    
383,25
U.I.V. (Z1 30) de base    
328,85
E.C.G. (K 6,5) K = 12,60 F    
81,90
E.E.G. (K 30)    
378,00
Scanner Z19 ou Z38 (selon nomenclature), éventuellement
K5 Z = 10,95      
Prix de journée au CHU de Rennes en 1995 :
- en Pédiatrie, prix de journée
- en Réanimation-enfants, soins coûteux
Forfait journalier à la charge du patient ou mutuelle    
3 182,00
6.843,00
70,00
L'enfant de la naissance à 5 ans
Michel Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 14 janvier 1999

Objectifs pédagogiques
Objectifs pratiques
1 L'enfant de la naissance à 24 mois
1.1 Examens systématiques
1.2 Les vaccinations
1.3 Les examens au cours des quatre premiers mois
1.4 De quatre à huit mois
1.5 L'examen du neuvième mois
   

1.6 Evolution de 9 à 24 mois
1.7 L'examen du 24ème mois
2 L'enfant de 2 à 5 ans
2.1 L'examen
2.2 L'examen de la vision
2.3 L'examen de l'audition
2.4 L'examen général
2.5 L'examen de l'appareil locomoteur
Objectifs pédagogiques

    (cf : Développement psychomoteur, examen de la vision, de l'audition et croissance)

Objectifs pratiques

    1. (cf : Développement psychomoteur et examen de la vision et de l'audition)
    2. Remplir les 2è et 3è certificats de santé (9ème et 24ème mois)

 
1 L'enfant de la naissance à 24 mois

C'est pendant cette période où les acquisitions psychomotrices sont rapides que doivent être dépistées les anomalies motrices et sensorielles. De même, la croissance doit être surveillée régulièrement afin de dépister le plus tôt possible un ralentissement. C'est aussi pendant cette période que seront réalisées les vaccinations.
1.1 Examens systématiques

L'enfant va donc bénéficier d'examens systématiques réguliers dont trois feront l'objet d'un certificat médical obligatoire au cours  :
- des 8 premiers jours de vie,
- du 9ème mois,
- du 24ème mois.

Les autres examens systématiques sont prévus à 1, 2, 3, 4, 5, 6, 12 mois, puis au 16è et 20è mois, enfin tous les 6 mois jusqu'à 6 ans. Le relais est ensuite pris par la médecine scolaire.
Ces examens peuvent être pratiqués gratuitement dans les centres de PMI ; s'ils sont pratiqués au cabinet d'un médecin privé, ils sont remboursés à 100 %.
Pour les trois examens faisant l'objet d'un certificat médical obligatoire, une partie de ce certificat comportant seulement des renseignements administratifs, est envoyée par les parents à la Caisse d'Allocations Familiales pour bénéficier des prestations ; l'autre partie, complétée par le médecin, est à envoyer au médecin coordinateur de la PMI à la DAS.
1.2 Les vaccinations

Ce chapitre sera détaillé dans le cours qui lui est consacré au certificat de pédiatrie. Il s'agit seulement de situer les dates recommandées actuellement pour les vaccinations (calendrier vaccinal 1996-1997) dans le déroulement des examens systématiques :
- dès le 1er mois : BCG,
- à partir de 2 mois : Diphtérie - Tétanos - Poliomyélite - Coqueluche - Hemophilus influenzae b (Hib) - Hépatite B.
- 3 mois : Diphtérie - Tétanos - Polio - Coqueluche - Hib - Hépatite B (2ème injection).
- 4 mois : Diphtérie - Tétanos - Polio - Coqueluche - Hib - Hépatite B (3ème injection).
- 12 mois : Rougeole - Oreillons - Rubéole + Test tuberculinique
- 15 à 18 mois : Diphtérie - Tétanos - Polio - Coqueluche - Hib ( 1er rappel) - Hépatite B (4ème injection).
- 5 - 6 ans : Diphtérie - Tétanos - Polio (2ème rappel) - Hépatite B (1er rappel).
- Avant 6 ans : BCG (la vaccination BCG doit être pratiquée pour l'entrée en collectivité).
1.3 Les examens au cours des quatre premiers mois

Vers 3 à 5 mois, les réflexes archaïques disparaissent. L'hypertonie des membres s'atténue et va faire place à une hypotonie.

Simultanément, apparaissent :
- le maintien de la tête qui doit être tenue ferme à deux mois,
- l'ouverture des mains,
- le redressement du tronc : en position assise, on voit la courbure dorsale disparaître d'abord dans la partie supérieure.

Les examens s'attacheront à suivre le développement des fonctions oculo-motrices :
- réflexes posturaux avec la disparition de la manoeuvre des "yeux de poupée", apparition des mouvements conjugués des yeux entre eux, puis des yeux et de la tête ;
- réaction sensori-motrice à la vue d'un objet : fixation oculaire puis convergence et poursuite oculaire, faisant appel progressivement à la rotation synergique des yeux et de la tête.

L'enfant, enfin, entre en contact avec son entourage auquel il répond avec un regard vif, éclairant et, dès 2-3 mois, l'apparition du sourire à la vue d'un visage humain animé.

Récemment, Albert Grenier a attiré l'attention sur une nouvelle méthode d'examen du nouveau-né : la motricité libérée. L'enfant est en position assise, sur un petit banc fabriqué à sa mesure, la nuque fixée par la main de l'examinateur. On supprime ainsi les réponses obligatoires du type réflexe de Moro, déclenchées par les mouvements de flexion ou déflexion de la nuque. L'enfant apaisé va fixer son regard sur celui de l'examinateur, s'intéresser à un objet et même porter la main jusqu'à lui.

Cet examen ouvre des possibilités nouvelles à la fois pratiques (dépistage d'anomalies motrices) et théoriques (existence précoce de réponses que l'on croyait le fruit d'une maturation neurologique et qui sont en fait masquées par les réflexes primaires).

Le cinquième examen systématique, celui effectué à quatre mois, est détaillé dans le carnet de santé bien que ne donnant pas lieu à production d'un certificat médical. A cet âge, en effet, le maintien de la tête doit être obtenu ainsi que le sourire-réponse. Le régime alimentaire doit commencer à se diversifier et les premières vaccinations doivent avoir été entreprises.
1.4 De quatre à huit mois

L'enfant entre dans une phase d'hypotonie des membres, alors que l'axe corporel offre un renforcement de son tonus actif. Au contrôle statique et dynamique de la tête, succède le contrôle statique et dynamique de la station assise.
Malgré l'hypotonie de ses membres inférieurs, l'enfant commence à pouvoir se redresser sur ses pieds de façon brève : c'est le stade du "sauteur".
Enfin, c'est à cet âge que va se développer la préhension : la station assise permet à l'enfant de développer sa perception d'un espace à trois dimensions et la notion de relief. Il aperçoit l'objet et veut le saisir. La main incertaine tombe en planant et l'enfant cherche à saisir l'objet en ratissant. Puis la préhension va s'améliorer mais demeure grossière, se faisant par le bord cubital et la paume.

A 6 mois, l'enfant a une alimentation diversifiée, les premières vaccinations sont terminées. Sur le plan psychomoteur, il tient parfaitement la tête et le tronc quand il est maintenu en position assise, il s'oriente en tournant la tête vers la souche d'un bruit. En décubitus ventral, il soulève la tête et les épaules. Couché sur le ventre, il passe en décubitus dorsal. La préhension est encore palmaire, il attrape un objet sur une table et peut le passer d'une main à l'autre. Il différencie les visages familiers et étrangers, sourit devant un miroir, gazouille. C'est à cet âge également qu'il faut détecter la persistance d'un strabisme.

Entre 7 et 12 mois, la préhension passe du bord cubital au bord radial et de la paume de la main vers l'extrémité des doigts, avec d'abord une participation du pouce puis la préhension fine entre le pouce et l'index. A 12 mois, l'enfant prend une pastille et la remet dans le flacon. Ce test permet d'apprécier la vision, la préhension et le développement intellectuel.
1.5 L'examen du neuvième mois

Cet examen donne lieu à la rédaction du deuxième certificat obligatoire.

Son but est :
- d'apprécier l'évolution de la croissance et le développement psychomoteur ;
- de rechercher des malformations ou anomalies méconnues lors des examens antérieurs. C'est ainsi qu'on découvre souvent un souffle systolique ;
- de dépister des anomalies neurologiques et en particulier sensorielles ;
- de vérifier que les vaccinations obligatoires ont bien été appliquées.

La consultation du carnet de santé et l'entretien avec la mère permettent de connaître rapidement les antécédents de l'enfant et, en particulier, son état lors de l'examen du huitième jour.

On notera les affections et les hospitalisations survenues depuis cette période et notamment la survenue possible de convulsions.

On contrôlera les pratiques alimentaires. A cet âge l'enfant doit être à quatre repas pris à la cuillère, avoir un régime diversifié, l'apport lacté doit encore être de 500 ml par jour de lait 2ème âge. Il doit recevoir un apport vitaminique suffisant (jus de fruits ou hydrosols polyvitaminés, vitamine D 800 à 1200 unités par jour) et du fluorure de sodium (0,25 - 0,50 mg/j).

On précisera les conditions de vie : conditions de l'habitat, mode de garde de l'enfant : soit la mère à la maison, soit, si elle travaille, garde à la maison, (par qui ?), placement en nourrice, en crèche traditionnelle ou familiale.

La durée du sommeil sera précisée : normalement, l'enfant doit dormir 11 à 12 heures la nuit, 1H30 le matin, 2 à 3 heures l'après-midi. On notera la prise éventuelle de médicaments, notamment de sédatifs le soir, devant faire rechercher un trouble de la relation de l'enfant et de son entourage.

On commencera d'abord par les épreuves sensorielles et psychomotrices, sans déshabiller l'enfant, en le laissant assis dans les bras de sa mère.

Le développement somatique sera ensuite apprécié par la prise de mensurations : poids, taille, périmètre crânien. Les chiffres trouvés seront reportés sur les courbes de croissance du carnet de santé qui, régulièrement tenues, permettent immédiatement de porter un jugement sur la vitesse de croissance. En moyenne, un nourrisson de 9 mois mesure 70 cm, pèse 8,5 kg, a un périmètre crânien de 45 cm.

- Le gain pondéral est important : 5 à 6 kgs depuis la naissance, mais une courbe de poids excessive, dépassant notamment le 97ème percentile, conduit à rechercher une erreur de régime.
A l'inverse, une courbe de poids insuffisante doit faire penser à une carence d'apport ou une maladie digestive (maladie coeliaque, mucoviscidose).
- La croissance en taille est très rapide : l'enfant, en un an, va grandir de 20 centimètres. Une insuffisance du développement statural sans déficit pondéral doit faire penser à une hypothyroïdie et faire pratiquer une mesure de l'âge osseux et un dosage de la TSH et de la T4.
Une insuffisance staturo-pondérale harmonieuse oriente vers une lésion organique (cardiopathie, néphropathie), une infection chronique ou récidivante (examen des urines) ou un problème psycho-social.
- La mesure du périmètre crânien est importante puisqu'elle reflète le développement du cerveau. A cet âge, la fontanelle antérieure est fermée mais on constate encore une dépression à son niveau. Un périmètre crânien excessif doit faire songer à une hydrocéphalie ou à un épanchement sous-dural après avoir éliminé une macrocéphalie familiale. A l'opposé, un périmètre crânien insuffisant traduit une microcéphalie invitant à rechercher des signes neurologiques anormaux et un retard du développement psychomoteur.
Beaucoup plus exceptionnellement, la forme spéciale du crâne avec soudure précoce des sutures et disparition des fontanelles, fera porter le diagnostic de crâniosténose.

Dès l'inspection, on pourra remarque une pâleur cutanéo-muqueuse liée à l'anémie hypochrome si fréquente à cet âge, que confirmera un taux d'hémoglobine inférieur à 11 grammes pour 100 ml. Cette anémie est facilement corrigée par un régime apportant du fer et on sait qu'elle peut être prévenue par un régime correct (apportant céréales et légumes verts) et l'utilisation des "laits de suite", enrichis en fer (8 mg par litre).

On notera l'état de la peau : l'évolution des angiomes plans ou tubéreux signalés précédemment, l'existence éventuelle d'une dermite ou d'un eczéma. Enfin, on recherchera soigneusement comme précédemment l'existence d'une cyanose discrète pouvant s'exagérer au cri et invitant à rechercher une cardiopathie.

L'auscultation cardiaque peut révéler un souffle passé inaperçu jusque là. On recherchera des symptômes d'accompagnement et une radiographie du thorax ainsi qu'un électrocardiogramme seront éventuellement demandés. Il ne faut pas inquiéter inutilement les parents mais le souffle sera suivi lors des examens ultérieurs.

L'audition sera testée par la voix chuchotée en donnant le prénom de l'enfant, en prenant soin de mettre la main devant la bouche et en sachant "calibrer" sa voix autour de 20 décibels. On peut utiliser également les jouets sonores. L'enfant, à cet âge, tourne la tête vers la source sonore à l'horizontale ou vers le bas. Les mois suivants, il regardera vers le haut. En cas de non-réponse, on peut utiliser les bruits familiers : bruit de la cuillère sur la timbale ou le biberon, par exemple.

L'appareil oculaire sera examiné soigneusement avec une source lumineuse, la meilleure étant celle d'un ophtalmoscope. Les grosses malformations, les mouvements anormaux auront probablement été relevés antérieurement et l'examen visera essentiellement à dépister un strabisme. Le test du reflet pupillaire de la lampe est imprécis et on aura recours au test de couverture (cover test). En masquant un oeil, on note si l'oeil opposé, prenant la fixation, bouge, ou bien en découvrant l'oeil, on note s'il reste fixe ou au contraire, bouge pour prendre la fixation. Un strabisme persistant à cet âge nécessite un examen ophtalmologique spécialisé.

Il est difficile de mesurer l'acuité visuelle à cet âge et le système des boules calibrées de Sheridan n'est pas utilisé en France. Par contre, un retard dans l'évolution de la préhension doit faire rechercher un trouble de la vision. De même, une vive réaction lorsqu'on cache un oeil peut déjà faire évoquer une mauvaise vision de l'oeil opposé (test d'échappement).

On terminera cette partie de l'examen par celui de la cavité buccale : les premières incisives apparaissent en moyenne à 6 mois. En moyenne, à 9 mois, les quatre incisives médianes sont présentes, l'éruption des incisives latérales est en cours.
On examinera aussi les tympans, surtout si l'enfant a déjà présenté une ou plusieurs otites.
Une attention particulière sera apportée à l'étude du développement psychomoteur et mental. C'est un examen qui demande patience et douceur et ne peut être bien fait qu'avec la participation de l'enfant et de la mère. On utilisera le test de Brunet-Lézine ou la version française du test de Denver (Sénécal-Bouchard) , qui permet de mieux apprécier les variations individuelles qui existent normalement. Ces tests étudient la motricité globale, la motricité fine, le langage et la sociabilité.

A cet âge, l'angle poplité est ouvert à 160°, l'angle des adducteurs à 140° et dans la manoeuvre du foulard, le coude dépasse la ligne médiane. L'enfant commence à s'asseoir seul et la station assise sans appui, le dos droit, est généralement acquise à la fin du 8è mois. Il commence à se déplacer "à quatre pattes" ou en propulsant sur son arrière train. La station debout avec appui est acquise avec proéminence des fesses. L'enfant, couché sur le dos, se retourne tout seul à plat ventre.

Pour l'observation de la motricité, du tonus et des réflexes ostéo-tendineux, on recherchera une asymétrie entre les deux hémicorps, une spasticité. On vérifiera la présence des réponses posturales normales à cet âge (signes du parachute, signe du plongeon), dont l'absence ou l'asymétrie peut traduire un déficit mineur :
- signe de parachute : l'enfant en position assise étend le bras pour parer à la chute s'il est poussé latéralement par l'observateur.
- signe du plongeon : l'enfant, projeté brusquement en avant vers le plan d'examen par l'observateur, répond par un mouvement de défense associant extension des membres supérieurs et ouverture des mains pour parer à la chute.

La préhension s'affirme et s'achemine, après la préhension avec participation du pouce, vers la préhension fine par la prise pouce-index. L'enfant prend un cube dans chaque main, joue à frapper deux objets, examine une clochette et va la faire tinter, joue à jeter ses jouets, mange seul un biscuit.

Sur le plan du langage, le bail est remplacé par des onomatopées que l'enfant va répéter : ba, pa, da, ma ; il réagit à son prénom.
L'enfant sait distinguer les étrangers de son entourage familier. Toute séparation déclenche de vives réactions d'angoisse et des pleurs. C'est la réaction de l'angoisse des huit mois (Spitz).
1.6 Evolution de 9 à 24 mois

Au cours du dernier trimestre de la première année, la préhension s'affine, le contrôle de la station debout s'affirme et l'enfant est capable de faire quelques pas tenu par les mains.

De 12 à 18 mois, apparaît la marche indépendante : l'enfant va pouvoir explorer l'espace lointain et faire certains apprentissages.

Après 18 mois, les progrès de la marche sont rapides : l'enfant va pouvoir monter seul sur les pieds, un escalier qu'il gravissait depuis quinze mois environ à quatre pattes. Puis il va les descendre. Il va marcher à reculons, commencer à lancer une balle, à donner un coup de pied dans la balle.
Dans la station debout, il présente une lordose lombaire et un genu valgum avec pieds plats qui peuvent persister jusqu'à 6 et 7 ans.
Sa motricité fine se développe, il met et retire une pastille d'un flacon, il commence à faire une tour avec des cubes, il gribouille avec un crayon.

Dans cette période, le langage se développe : entre 12 et 18 mois, ce sont les premiers mots, exclamations ou onomatopées avec attribution d'une valeur significative. On arrive au mot-phrase, "maman" signifie aussi bien "j'appelle maman" que "voilà maman qui arrive" ou "voilà le sac de maman". A 18 mois, apparaissent les premières associations de mots : "papa parti". Entre 24 et 27 mois, le vocabulaire s'enrichit mais le langage reste encore enfantin. Entre 27 et 30 mois, c'est l'apparition du "Je" qui implique que l'enfant s'individualise en tant que personne, puis apparaissent des phrases de 3 ou 4 mots. A 36 mois, la syntaxe est bonne.

Cette évolution du phonème à la syllabe, au mot puis à la phrase, se fait dans un ordre de succession strict bien que l'apparition des différents stades puisse varier suivant les collectivités, les niveaux socio-économiques, les familles et même, au sein d'une même famille, d'un enfant à l'autre. Le langage, encore plus que le développement psychomoteur est fonction de la qualité affective et culturelle du milieu, mais le langage ne peut se constituer si la perception auditive est déficiente.

Les réactions sociales de l'enfant sont de plus en plus nombreuses : il demande en montrant du doigt, il imite les actions simples, se sert d'une cuillère, enlève un vêtement, demande son pot, demande à boire, à manger, reconnaît des images, montre les parties du corps...

Ce développement des fonctions cognitives peut être suivi par l'examen clinique et la pratique des tests (de Gesell ou en France, Brunet-Lézine, Test de Denver,...)

Ces tests aboutissent à donner un âge de développement psychomoteur, soit global, soit par secteur de développement (QD) mais il s'agit d'une estimation du moment, qui ne permet pas de prévoir l'évolution et de porter un jugement définitif.
Les conditions de vie sont d'une importance capitale pour l'édification optimale de la personnalité, car les capacités d'adaptation du jeune enfant aux variations des conditions de vie sont faibles et la méconnaissance de sa fragilité risque d'entraîner des destructurations importantes.

Rappelons enfin que c'est au cours de la deuxième année que doivent être pratiqués :
- les injections de rappel des vaccinations DT Poliomyélite - Coqueluche,
- le test tuberculinique contrôlant l'efficacité du BCG,
- les vaccinations recommandées : rougeole, rubéole et les oreillons.
1.7 L'examen du 24ème mois

C'est au terme de cet examen qu'est rédigé le troisième certificat médical obligatoire.
Au cours de l'examen, sera effectué un bilan du développement somatique, neurologique et psycho-affectif de l'enfant. Le terme "bilan" implique qu'on envisage l'évolution de ces différents paramètres et qu'on étudie les différents facteurs, non seulement médicaux mais aussi familiaux et sociaux qui interviennent dans cette évolution.
L'examen peut permettre de déceler une anomalie jusque là passée inaperçue ou nouvellement extériorisée, de suivre l'évolution d'une anomalie antérieurement diagnostiquée et traitée.
L'examen sera fait en présence de la mère ou mieux des parents, permettant d'apprécier les relations des parents et de l'enfant et même des parents entre eux. C'est aussi l'occasion d'établir un dialogue et donner des conseils aux parents. L'interrogatoire et l'examen du carnet de santé renseignent sur les affections qu'a pu présenter l'enfant : affections respiratoires, notamment des voies aériennes supérieures, otites, plus rarement infections urinaires qui ont dû faire penser à une malformation de l'appareil urinaire et , enfin, convulsions, allant de la convulsion hyperpyrétique aux différentes formes de la comitialité.

A deux ans, l'enfant est capable de manger seul à la cuillère et doit recevoir une alimentation diversifiée et équilibrée, comportant un bon apport vitaminique (l'apport systématique de vitamine D est recommandée jusqu'à l'âge de 18 mois puis l'hiver en fonction de l'ensoleillement) et 0,50 à 0,75 mg de fluorure de sodium. On recommandera de ne pas donner de glucides entre les repas.
Le sommeil nocturne est de 12 heures et après le déjeuner, l'enfant dort 1 à 2 heures.

Les mensurations préciseront le poids, la taille, le périmètre crânien.

 
     
Taille
(cm)
   
Poids
(kg)
   
Périmètre
crânien (cm)
Garçons    
85,6 + 3
   
12,8 + 1,20
   
49 + 1,2
Filles    
84,3 + 3,1
   
11,6 + 1,16
   
47,5 + 1,5
(d'après Sempé)

Surtout, l'enregistrement de ces mensurations sur le carnet de santé et la mise à jour des courbes permettront de juger la vitesse de croissance. Tout retard de croissance staturo-pondérale devra faire rechercher la cause.

L'éruption dentaire n'est pas encore terminée mais 16 dents existent déjà sur 20 qui marquent la dentition de lait.

L'examen général n'a rien de particulier, mis à part l'hypotonie propre à cet âge. On regardera, comme à 9 mois, l'état de la peau et de la cavité buccale.

L'examen sensoriel est déjà plus facile mais les gros troubles auront été dépistés auparavant. Il se peut que le strabisme n'ait pas encore été diagnostiqué.

L'attention peut être attirée par des petits signes : clignement des yeux ou attitude tête penchée, enfant indifférent à des jouets, enfant qui bute ou tombe souvent.

La mesure de l'acuité visuelle peut se faire par les jouets miniaturisés de Sheridan (peu connus en France) ou, pour une partie des enfants, par les tests images notamment ceux de l'échelle de Pigassou.
Il y aura intérêt à demander systématiquement l'examen par un ophtalmologiste lorsqu'existent des antécédents familiaux. L'étude de la réfraction sur cyclopégie permettra de préciser et de corriger une myopie, une hypermétropie (normale de 1 à 2 dioptries à cet âge), un astigmatisme. Il faut insister sur l'anisométropie (différence de réfraction entre les deux yeux) souvent responsable d'amblyopie.

Pour l'audition, un certain nombre de signes peuvent attirer l'attention : l'entourage a noté que l'enfant ne tourne pas la tête lorsqu'on l'appelle, lorsqu'une porte se ferme violemment, quand on entre dans la pièce, que l'enfant est apathique avec parfois des colères violentes. C'est souvent, nous l'avons vu, des troubles du langage, qui doivent conduire à rechercher une audition déficiente. L'audition sera testée comme au 9ème mois.

L'examen neuro-psychique sera pratiqué minutieusement :

Dans le test de Denver, on apprécie :

a) la motricité globale, par :
- marche à reculons,
- lance une balle,
- monte des marches et les descend,
- donne un coup de pied dans une balle,
- tient sur un pied.

b) la motricité fine, par :
- gribouille spontanément,
- retire la pastille du flacon,
- effectue une tour de 4 à 8 cubes,
- copie un trait vertical.

c) le langage, par :
- montre les parties de son corps,
- fait une phrase de deux mots,
- suit deux ou trois directions,
- nomme une ou plusieurs images,
- dit nom, prénom puis sexe,
- utilise le pluriel.

d) la sociabilité, par :
- lave et sèche ses mains,
- met ses chaussures,
- enlève un vêtement,
- demande son pot,
- se sert d'une cuillère,
- est propre de jour puis de nuit,
- joue en groupe.

Les items de Brunet-Lézine sont assez remarquables :
- coup de pied dans le ballon sur ordre,
- tour de six cubes,
- essaie de plier le papier en deux,
- imite un trait,
- place trois morceaux sur la planchette,
- nomme deux et montre quatre images.

Questions :
- monte et descend seul l'escalier,
- phrase de plusieurs mots,
- se nomme par son prénom,
- aide à ranger ses affaires.

L'enfant, à cet âge, peut présenter des troubles du comportement social. Le fait qu'il réalise son identité en tant qu'individu semble à l'origine de ce qu'on appelle la phase d'opposition ou de négativisme : l'enfant dit non à tout, ce qui est, pour lui, une manière de s'affirmer. Il ne faut, ni vouloir briser brutalement la révolte de l'enfant par des châtiments, ni tomber dans l'excès contraire, inspiré par les doctrines psychanalytiques d'un laxisme complet par crainte des frustrations et de "déviations".
Il faut rechercher les causes d'une apathie de l'enfant : telle qu'on la voit dans l'hospitalisme, mais qui peut relever d'un insuffisance intellectuelle ou même d'autisme.

Dans le domaine affectif, c'est l'âge des passions pour le père et la mère ou les aînés ; c'est aussi l'âge de la jalousie d'un frère ou d'une soeur plus petit. L'intérêt pour les autres enfants est vif mais le jeu est le plus souvent parallèle. Il y a aussi toute une série de rites : crainte de la nuit et de l'obscurité, besoin d'un compagnon en peluche.

Rappelons enfin qu'à deux ans, toutes les vaccinations et leurs rappels ont dû être faits, ce qu'on contrôlera facilement en examinant les pages vaccinations du carnet de santé.
2 L'enfant de 2 à 5 ans

A trois ans, l'enfant quitte son milieu familial pour entrer à l'école maternelle. Durant trois ans, il bénéficiera de plusieurs examens systématiques dont un à trois ans, lors de son entrée à la maternelle, sera envisagé ici et l'autre à cinq ans, sera envisagé avec la médecine scolaire.
Certains pourraient penser que l'examen à 3 ans, quatorzième examen systématique succédant aux examens du 9ème et du 24ème mois qui ont donné lieu aux certificats, ne constitue qu'une simple formalité, tous les troubles ayant été dépistés et traités auparavant. D'ailleurs, parents et médecins considèrent souvent que l'enfant à cet âge ne pose pas de problème.

Bien au contraire, la quatrième année de vie constitue un âge clef pour le dépistage des infirmités moyennes ou mineures et des inadaptations. En effet, à cet âge, on peut obtenir une certaine collaboration de l'enfant et les tests deviennent plus précis. Le développement psychomoteur et intellectuel est devenu plus complet et permet une meilleure exploration, même si avec l'âge, la dispersion des performances réalisées par l'enfant s'accroît. Ainsi en est-il du langage qui, au cours de la quatrième année de vie, doit être bien établi. Enfin, à cet âge, pratiquement tous les enfants français sont maintenant en classe maternelle ; l'examen bénéficie de cette scolarisation : possibilités d'avoir l'avis de l'enseignant, de revoir l'enfant au cours de l'année ou des années suivantes en cas de doute.

L'enfant de 3 ans possède une grande variété d'aptitudes physiques : il se déplace rapidement, commence à sauter, à enjamber, il attrape et jette une balle. Il aime être indépendant mais sa confiance en lui n'exclue pas le support d'un environnement familier qui le sécurise. Le langage bien établi lui permet de communiquer, de raconter des histoires, de donner libre cours à son imagination. L'attrait de l'action personnelle favorise l'apprentissage manuel et le développement intellectuel.

L'école maternelle doit favoriser l'évolution de l'enfant, le sortir du milieu familial qui a dû être le sien jusque là, lui offrir l'apprentissage de la vie collective, le préparer à s'adapter au milieu scolaire puis au milieu social de l'adulte. Cette aide au développement doit être sans excès et toujours complémentaire de la formation familiale. Les méthodes de l'école maternelle sont naturelles et souples, le rythme est adapté aux possibilités. Elles tiennent compte de la pensée enfantine telle qu'elle a été précisée par les psychologues. Les méthodes utilisées sont ouvertes et actives, permettant à l'enfant d'agir, de s'exprimer, en particulier par le jeu. La mise à sa disposition de plantes, d'animaux, d'outils, de matériaux, d'appareils, lui permet de satisfaire son besoin de créer. L'enfant prend conscience de ses possibilités ; il peut juger, comparer. Pour les grands (cinq ans), le calcul, la lecture, l'écriture vont constituer de nouveaux moyens de jouer.

L'examen ne devrait être pratiqué qu'après trois mois d'école, permettant de juger de l'adaptation de l'enfant à ce nouveau mode de vie. La convocation se fait par l'intermédiaire des enseignants qui peuvent fixer le jour et l'heure convenant aux parents. Ceci permet de retarder le rendez-vous si l'enfant est malade : on s'enquérera d'ailleurs de l'absentéisme qui, important, peut être l'indice de troubles de santé ou sociaux. La convocation est adressée aux deux parents, mais le plus souvent, c'est la mère qui sera présente, plus rarement le père, bien que partout, on note une augmentation de sa participation.

Le médecin dispose, avant l'examen, d'un certain nombre de documents :
- Le carnet de santé, document confidentiel, propriété de la famille qui naturellement a tout intérêt à le montrer au médecin examinateur. Très souvent, il est demandé par l'enseignant, ce qui est contraire au principe de confidentialité ; plusieurs circulaires ministérielles l'on rappelé : l'enseignant doit donc demander à la famille de remettre le carnet au personnel de santé. Sa présentation et sa tenue varient selon le département mais le remplissage par la famille et le médecin qui suit habituellement l'enfant donne déjà de bons renseignements sur la surveillance dont a bénéficié l'enfant Il peut servir d'introduction à l'entretien qui doit s'engager avec les parents  : on félicite les parents amenant un carnet bien tenu, à l'opposé, on s'enquérera des raisons pour lesquelles les pages sont peu ou pas remplies.

- La fiche remplie par les parents qui, en fait, reproduit les renseignements trouvés dans le carnet de santé.

- La fiche à remplir par l'enseignant est par contre un document fondamental. En effet, les enseignants des écoles maternelles connaissent parfaitement les possibilités de l'enfant et, après quelques semaines de présence à l'école, peuvent très bien déceler certains anomalies dans son comportement : apathie ou au contraire, trop grande turbulence, agressivité, troubles de la démarche, de la préhension , de la vue, de l'audition. Ces fiches ne sont pas toujours bien remplies, soit par manque de motivation des enseignants, soit par inadéquation de leur contenu trop vaste ou trop imprécis. Il en existe d'ailleurs de nombreux modèles mais un modèle a été mis au point en Ille-et-Vilaine, grâce à la collaboration d'enseignants, de pédiatres, de médecins de P.M.I, de psychologues et d'assistantes sociales. Elle permet par ailleurs aux enseignants de mieux préciser les anomalies qu'ils décèlent.

- Les documents de la P.M.I : tout enfant suivi par le service de P.M.I possède une fiche dont le type est lui aussi très variable suivant les régions. Actuellement, il est demandé aux médecins de P.M.I d'utiliser le dossier de médecine scolaire puisque c'est le service qui effectuera les examens de 3 ans et ne contient pas le compte-rendu des examens antérieurs. Le carnet de santé constitue donc le meilleur moyen de liaison.
2.1 L'examen

L'entretien avec les parents peut débuter par l'examen du carnet de santé et, pour commencer, par l'étude des courbes de développement et la situation des vaccinations : très souvent, manque de contrôle tuberculinique. Il sera pratiqué ultérieurement (intradermo-réaction à 10 unités d'IP 48) au besoin collectivement à toute la classe au cours d'une seule séance et la réaction lue 4 jours plus tard. Une revaccination sera proposée pour les enfants ayant une réaction négative (induration inférieure à 4 millimètres).

Pendant la conversation avec les parents, on demande à l'enfant, assis devant une table basse, de dessiner un bonhomme puis sa famille. Le test du bonhomme de F. Goodenough est un test universel, facile à pratiquer et à interpréter.
L'analyse d'urine (recherche de l'albumine et du glucose par des bandelettes réactives) est pratiquée sur les urines qu'il est préférable de demander à la mère de prélever et d'apporter.

La suite de l'examen peut varier selon l'examinateur. Toutefois, l'ordre suivant paraît satisfaisant.
2.2 L'examen de la vision

Les grosses lésions sont déjà connues. Le strabisme lui-même a dû être dépisté et traité. L'enfant porte des lunettes mais il convient de vérifier si la correction est toujours bonne en se souvenant que le spécialiste peut volontairement pénaliser un oeil. Mais, le strabisme peut avoir été méconnu car discret ou intermittent ou encore d'apparition récente ; il sera donc recherché par le test de couverture précédemment décrit et l'amblyopie précisée par le signe de la toupie (Sarniguet-Badoche) : dans le regard latéral, l'oeil amblyope ne peut suivre et l'enfant suit l'objet avec le bon oeil, en tournant la tête de plus en plus, puis le corps.

L'acuité visuelle sera mesurée par une échelle d'optotype. On peut essayer le Stycar Vision Test à 5 lettres en le présentant à l'enfant comme un nouveau jeu. Si l'enfant, ce qui est fréquent, ne peut reconnaître les lettres, on utilisera alors un optotype image : échelle de Pigassou, échelle de Rossano-Weiss ou échelle d'animaux d'Ardouin. Dans les deux cas, il suffit à l'enfant de désigner parmi les images déposées devant lui celle qui correspond à l'image qu'on lui montre sur la feuille du carnet (SVT) placé à 5 mètres ou sur le tableau placé à 4 mètres (Pigassou) (appariement).

On commence par les deux yeux, puis on teste séparément oeil droit et oeil gauche. Certains appareils (Scolar test) permettent d'effectuer cet examen facilement en offrant une séquence toute préparée d'images qui doivent être vues à 2,5 mètres pour éviter la dispersion de l'attention de l'enfant. L'examinateur assis à côté de l'enfant peut, par une manette, faire avancer ou reculer l'image. L'optotype rétro-éclairé se détache dans une fenêtre, supprimant, ou au moins diminuant, les effets de l'éclairage ambiant. Normalement, à cet âge l'acuité visuelle dépasse 12/10èmes. Un chiffre égal ou inférieur à 7/10èmes d'un oeil ou des deux yeux, doit entraîner un examen par le spécialiste. Il est rare qu'une acuité de 2 ou 3 dixièmes n'ait pas été découverte plus tôt.
On peut enfin, l'enfant assis et occupé à jouer, approcher un objet latéralement pour apprécier son champ visuel.
2.3 L'examen de l'audition

Il est souvent difficile à réaliser, dans des locaux mal adaptés, et l'enfant est encore trop jeune pour qu'on utilise l'audi-vérificateur : un petit nombre d'enfants de cet âge seulement accepte le casque et surtout, répond correctement en indiquant l'oreille qui reçoit le son.
On utilisera donc les jouets sonores de Moatti ou plus simplement la voix chuchotée.

Certains ont proposé la mesure de l'impédancemétrie, pratique relativement simple, mais pour l'instant encore du domaine du spécialiste.

Surtout, il convient de se rappeler qu'à cet âge, les troubles de l'audition entraînent un retard de l'acquisition du langage. Il faudra donc apprécier la force et la modulation des sons émis ainsi que le vocabulaire qui doit être étendu et intelligible. Ceci se fait en demandant à l'enfant son prénom et son nom de famille, de dire son sexe, de voir s'il emploie le "je", le "moi", le "tu", s'il suit trois directions, s'il comprend :sur, dedans, faim, froid, fatigue,...

En cas de mauvaise réponse et après avoir examiné les oreilles de l'enfant à la recherche d'un éventuel bouchon de cérumen, on étudiera le comportement de l'enfant dont certains traits ont déjà pu donner l'alarme. Ces symptômes minutieusement décrits par Gesell et Amatruda concernent :

- L'audition et la compréhension du langage : indifférence générale aux sons, absence de réponse aux mots, réponse aux bruits mais pas à la voix.

- La vocalisation et la production des sons : caractère monotone de la voix, vocalisation peu distincte, rareté du rire, pauvreté des essais vocaux, vocalisation à la recherche d'une sensation vibratoire, mouvements répétés de heurts de tête et de piétinements à la recherche de cette même sensation, hurlements et cris perçants pour exprimer aussi bien le plaisir que la contrariété ou un besoin.

- Attention visuelle et compréhension réciproque : attention et vigilance visuelle accrues, tendance marquée à l'imitation lors du jeu, attention particulière pour les gestes et les déplacements de l'entourage, vivacité inhabituelle des gestes.

- Relations sociales et adaptations : relations subnormales lors des jeux vocaux avec d'autres nourrissons dans la même chambre, intérêt plus marqué pour les choses que pour les personnes, expression du visage, investigatrice, parfois de surprise ou de dépit, alternance de méfiance et de coopération, réaction marquée aux louanges et marques d'affection.

- Comportement affectif : cris de colère pour manifester un besoin. On attire l'attention sur soi, tension, résistance et colère provoquées par l'absence de compréhension, tendance à l'obstination et la taquinerie, instabilité provoquée par la difficulté à se faire comprendre, explosion de mauvaise humeur provoquée par les contrariétés, initiatives impulsives et intempestives.

Le test des phrases consiste à demander à l'enfant de répéter des phrases ou d'exécuter des ordres que donne l'examinateur placé derrière l'enfant.

Le test des mots avec indicateur d'images est plus complexe. L'enfant montre du doigt l'image correspondant à la forme phonétique entendue. En fonction de mots bien choisis, il est possible de préciser les troubles d'identification.

Dans le test d'Olivaux, on dispose 25 images devant l'enfant. L'observateur, placé à un mètre en face de l'enfant, nomme l'image à voix chuchotée et note les bonnes réponses. Un nombre insuffisant de bonnes réponses fait recommencer l'épreuve en demandant à l'enfant de regarder l'observateur. Un pourcentage de bonnes réponses meilleur grâce à la lecture sur les lèvres accroît les doutes sur la valeur de l'audition.
2.4 L'examen général

A cet âge, il ne comporte rien de particulier. On recherchera l'existence de hernies, surtout inguinales qui, sauf contre-indication, auront dû être opérées, les bandages étant inefficaces et même nuisibles. Plus que la palpation des orifices herniaires, on recherchera la notion de "hernie sortie" qui doit entraîner l'intervention chirurgicale.

On examinera les organes génitaux : prépuce, orifice de l'urètre à la recherche d'un hypospadias à corriger vers 6 ans, la position des testicules.

On examinera la cavité buccale. L'enfant doit avoir ses 20 dents de lait. A l'aide d'une sonde et d'un miroir, on recherchera les caries. Celles-ci sont fréquentes et on en profitera pour donner des conseils de prévention : brossage des dents après chaque repas, pas de sucreries entre les repas, prise de fluorure de sodium (1 mg/j).

2.5 L'examen de l'appareil locomoteur : il est systématique

Le pied plat est la règle à cet âge et ne doit surtout pas donner lieu au port de semelles orthopédiques qui le rendraient permanent.
Le pied dévié en dedans est lié à une antéversion exagérée du col fémoral, qui se corrigera au cours de la croissance.
Si l'enfant ne pose pas bien son talon par terre, se méfier d'une hémiplégie fruste et pratiquer un examen neurologique minutieux.

Au niveau du genou, le genou valgum est très fréquent et se constate au maximum à 4 ans : les genoux se touchent et il existe en même temps un certain degré de récurvation. Il faut surveiller l'évolution et la correction se fera généralement spontanément vers 6-7 ans.
Le genou varum est plus rare et s'accompagne de torsion de la portion jambière.

L'inégalité des membres inférieurs entraîne un déséquilibre du bassin et retentit sur la colonne vertébrale. On mesure la longueur des membres cliniquement et radiologiquement.
Une boiterie à la marche peut être une luxation congénitale de la hanche généralement décelée plus tôt au cours des premiers mois ou au moment de la marche, ou un début de coxa plana ou d'une ostéochondrite de hanche.

Au niveau de la colonne vertébrale, on note fréquemment, liée à l'hypotonie, une lordose lombaire due à la proéminence de l'abdomen, compensée par une cyphose dorsale, anomalie sans gravité et qui se corrige avec le développement de la musculature de la paroi abdominale.
On peut découvrir une anomalie congénitale non décelée jusque là. L'existence d'une rotation vertébrale, traduction d'une scoliose structurale, malformation essentielle, est beaucoup plus grave car évolutive.

Au niveau de la colonne cervicale, l'attitude penchée de la tête, d'un torticolis pouvant entraîner une asymétrie de la face et du crâne, nécessite une correction précoce.

Enfin, à cet âge, on s'attachera plus encore à l'étude du développement psychomoteur et intellectuel. Il ne s'agit pas de faire un examen complet spécialisé mais, par quelques items, d'apprécier si le développement de l'enfant est normal ou présente des anomalies nécessitant l'avis d'un spécialiste.

L'examen recherchera :

- des troubles du langage : retard, langage "bébé", troubles articulatoires souvent liés à une perturbation des relations de l'enfant et de son entourage ou à un trouble de l'audition :
- des troubles du comportement à type d'inhibition, d'instabilité, de non-participation à la classe. Ce sont des manifestations le plus souvent banales mais qui peuvent marquer le début d'une structuration pathologique caractérielle, névrotique ou psychotique, donc à surveiller ;
- des troubles psychosomatiques alimentaires, sphinctériens, du sommeil,...; douleurs abdominales, eczéma, asthme,...
- des difficultés de contrôle tonique et moteur souvent liées à un malaise relationnel de l'enfant et de son entourage et aggravées par la mauvaise tolérance de l'entourage. Ils aboutissent à l'instabilité psychomotrice avec troubles de l'attention.
- des dyspraxies, déficits de l'organisation et de la réalisation de certains gestes souvent liés à une désorganisation du schéma corporel et de l'organisation spatiale.

La latéralité, c'est-à-dire la dominance fonctionnelle d'un côté du corps n'est pas encore bien établie à cet âge et ne peut guère être évaluée définitivement avant 6-7 ans. L'éducation joue un rôle considérable dans l'établissement de cette latéralisation. On la recherchera donc au niveau de la main (distribution des cartes, diadococinésie), de l'oeil (visée), du pied (coup de pied dans le ballon, saut sur un pied) et si la dominance gauche semble exister, on évitera certains dressages sociaux par contrainte ou simplement par l'exemple.

Pour faciliter cet examen psychomoteur, on peut encore, à cet âge, utiliser le test de Brunet-Lézine ou le D.D.S.T. dont nous donnerons les différents items qui seront reportés sur le graphique pour en faciliter l'interprétation (voir chapitre : Développement psychomoteur et affectif).

Certains enfants paraissent particulièrement à risque : ce sont ceux vivant dans un milieu familial perturbé ou dans des conditions socio-culturelles et économiques défavorables : transplantés, ethnies diverses, logement en cités d'urgence, bilinguisme, placements multiples, non valorisation de l'école, parents séparés, parents alcooliques ou en hospitalisation psychiatrique.

Une enquête a montré que sur 100 enfants en classe de perfectionnement, 70 avaient été en maternelle et parmi eux, 42 trouvés "à problèmes" à l'âge de trois ans. Dans le groupe des 100 témoins, 69 enfants avaient été en maternelle et un seul trouvé en difficulté. On ne saurait trop insister sur ces faits trop souvent négligés par les médecins, peut-être parce que les solutions de ces problèmes sont difficiles et non médicales.

Ceci souligne également la nécessité d'envisager l'enfant dans sa "globalité" et d'effectuer un travail d'équipe avec la collaboration des psychologues, des enseignants, des travailleurs sociaux.

En terminant l'examen, non seulement on aura pu déceler les troubles éventuels, mais on aura dû évaluer leur répercussion sur l'enfant et son entourage. Ceci conduit souvent à donner des conseils aux parents, ce qui nécessite une grande disponibilité du médecin. Examen de la dentition et de la cavité buccale
caries et malpositions dentaires
Michel Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 14 janvier 1999

1 Examen de la dentition et de la cavité buccale
1.1 Eruption dentaire
1.2 Autres affections buccales
1.3 Les glandes salivaires
1.4 Examen de la dentition
   

2 Carie dentaire
2.1 Définition et épidémiologie de la carie
2.2 Physiopathologie
2.3 Prévention
1 Examen de la dentition et de la cavité buccale
1.1 Eruption dentaire

L'éruption dentaire, indicateur de maturité a été abordée dans le chapitre croissance et maturité.

Rappelons que la dentition comporte une première étape de 20 dents dites "de lait" car appelées à tomber et à être remplacées ; une deuxième étape de 32 dents qui, en plus du remplacement des 20 dents de lait est marquée par l'apparition à 6 ans des premières grosses molaires et à 12 ans des deuxièmes grosses molaires. L'apparition de la 3ème molaire ou "dent de sagesse" est variable après 18 ans.

- La première dent apparaît en moyenne à 6 mois, mais certains peuvent avoir des dents à la naissance (Louis XIV) ce qui gêne l'allaitement au sein et d'autres ne pas en avoir à 1 an.
- Les dents apparaissent toujours dans le même ordre : incisives médianes inférieures, puis supérieures, puis latérales et saut aux premières prémolaires. Les canines n'apparaissent qu'après. La première dentition est terminée à 30-36 mois.
- La deuxième dentition commence à 6-7 ans par la chute des dents de lait ; les premières apparues sont les premières remplacées.

Les dents peuvent présenter des anomalies de structure, des dystrophies. En effet, le bourgeon dentaire, visible sur les radiographies du maxillaire, existe longtemps avant l'éruption et va subir l'agression soit d'agents infectieux (dent en bourse de Moser dans la syphilis congénitale), soit de certains médicaments (Tétracyclines à éviter chez la femme enceinte et le jeune enfant).

Ceci se traduit par des hypoplasies de l'émail ou des modifications de teinte (dyschromie) de la dent.
1.2 Autre affections buccales

1.2.1 Les aphtes : ulcération superficielle arrondie ou ovulaire, unique ou multiple, à fond blanc sale et entourée d'un liseré rouge vif mais surtout très douloureuse et gênant l'alimentation. Il y a souvent une adénopathie satellite. Ils guérissent en 8-10 jours.

1.2.2 L'herpès donne souvent une stomatite aiguë. La cavité buccale est parsemée d'érosions superficielles jaunâtres, entourées d'un liseré.
Les vésicules sont rarement observées car éphémères dans la cavité buccale mais elles peuvent se voir en bouquet sur le pourtour de l'orifice buccal. L'adénopathie satellite est de règle.

1.2.3 Le syndrome bouche-mains-pieds du à l'entéro virus Coxsachie A16 débute par un exanthème fait de petites vésicules bientôt suivi d'un exanthème localisé aux doigts et aux paumes ainsi qu'à la base des orteils et à la plante.

1.2.4 Le muguet est une candidose donnant une stomatite érythémateuse sur laquelle se détache de petites taches blanchâtres, crémeuses, adhérentes, difficiles à enlever (diagnostic différentiel : résidu de lait).

1.2.5 La brièveté du frein de la langue peut en fixant la pointe de la langue au plancher buccal entraver la sucions ou plus exceptionnellement et plus tard la prononciation. La freinectomie faite dans les premiers jours de la vie y remédie.

1.2.6 La langue marginée ou glossite exfoliatrice marginée est impressionnante par ses manifestations ; taches en anneaux sur la langue dessinant des festons changeant d'un jour à l'autre. L'affection probablement génétique est bénigne.
1.3 Les glandes salivaires

La glande sublinguale se palpe un doigt dans la bouche au niveau du plancher buccal, un doigt sur la peau sous maxillaire.

La parotide se palpe au niveau de la branche montante du maxillaire inférieur et l'orifice de son canal excréteur se recherche dans le sillon alvéolojugal au niveau de la première molaire.

1.3.1 La grenouillette est un kyste mucoïde de la sublinguale qu'on palpe au niveau du plancher buccal : ovalaire, de volume variable, son diagnostic est facile et le traitement est chirurgical : ablation du kyste et si récidive de la glande.

1.3.2 La lithiase sous mandibulaire est révélée par des signes d'obstruction mécanique : gonflement et saillie de la glande à l'occasion d'un repas, parfois douloureux, pouvant se compliquer d'accidents inflammatoires, notamment du canal de Wharton. Le traitement consiste en l'ablation chirurgicale du calcul.

1.3.3 La parotidite récidivante de l'enfant est souvent confondue avec les oreillons (parotidite due au virus ourlien). Il s'agit d'un gonflement de la parotide dont l'expression fait sourdre une salive purulente. La sialographie donne une image caractéristique de taches dispersées, en "plomb de chasse". La résolution est spontanée en 8 à 10 jours mais la maladie récidive souvent par poussées.
1.4 Examen de la dentition

Le diagnostic de la carie dentaire est facile ; il nécessite un miroir et une sonde. Le miroir permet de voir et surtout d'éclairer les faces latérales des dents. La sonde permet d'explorer tout endroit suspect, y compris dans les sillons. La sonde est promenée sur les endroits suspects (anomalies de la teinte qui peut devenir crayeuse ou au contraire brune, voire noire) et doit accrocher et même pénétrer dans une cavité pour affirmer la présence certaine d'une carie ; ceci ne permet de dépister que les caries des faces triturantes. La carie des faces médianes et distales peut être suspectée mais ne peut être confirmée que par la radiographie.

De la même façon, on examinera attentivement les gencives qui doivent être roses et non saignantes. Tout aspect anormal fera demander l'avis d'un spécialiste.

- Pour les malpositions et les troubles de l'articulé, il convient de se rappeler que normalement l'arcade supérieure chevauche et circonscrit l'arcade inférieure. Tout autre aspect est anormal et entraîne un traitement spécifique. La date d'intervention est variable : très précoce, dès la première dentition, en cas de prognathisme ou de rétrognathisme ; en général vers 7 ans mais de toute façon elle doit être faite avant 12 ans, date limite de remboursement des soins par la Sécurité Sociale. En cas de dysharmonie dento-maxillaire génétique ou acquise, l'extraction de dents saines, en général prémolaires, est souvent nécessaire.

- Le développement de la dentition et toute anomalie doivent être notés dans le carnet de santé de l'enfant. Il devrait en être de même pour les soins dentaires.
2 Carie dentaire
2.1 Définition et épidémiologie de la carie

La carie est une affection des tissus durs de la dent qui progresse de dehors en dedans et aboutit à la cavitation. Cette affection n'a aucune tendance à la guérison spontanée et peut être à l'origine d'infections localisées voir généralisées . Chez l'enfant, elle peut entraîner des troubles de l'alimentation, du sommeil et du comportement.

Toute carie doit être traitée, même celle des dents de lait car une carie avancée nécessite l'extraction de la dent ; or des avulsions répétées aggravent le déséquilibre alimentaire en faveur des glucides cariogènes et provoquent des dysmorphies et des parodonties génératrices de nouvelles caries.

C'est une maladie très répandue : lors d'une enquête effectuée à Strasbourg, 97% des enfants ont été trouvés porteurs de caries. Le coût de cette pathologie dentaire est une lourde charge sociale puisque le remboursement des soins dentaires représente 10% des prestations en nature versées par l'assurance maladie du régime général et que ce remboursement est loin de couvrir les dépenses réelles.

Or, il est facile, par des méthodes relativement simples, de réduire de 70% ces caries, donc ces frais ; cette prévention est basée sur nos connaissances physiopathologiques.
2.2 Physiopathologie

Dans le mécanisme complexe de la carie dentaire, on peut isoler trois conditions :
- la présence de débris alimentaires glucidiques,
- la présence d'une flore microbienne,
- une défaillance du terrain, en l'occurrence une moindre résistance de la dent.

Le liquide buccal, visqueux, à base de glucides, s'insinue partout dans les sillons, les espaces interdentaires, la région cervicale, toutes régions qui échappent au nettoyage mécanique de la langue et des joues ; ce liquide va constituer la plaque dentaire. Au niveau de la plaque, les bactéries prolifèrent dans cet excellent milieu de culture, métabolisent les sucres et entraînent la formation d'acides organiques qui attaquent l'émail dentaire, détruisant progressivement les cristaux d'apatite. Les espaces inter-cristallins se remplissent de matériel organique, ce qui favorise l'invasion et la prolifération bactérienne.

Outre la carie, la plaque sous-gingivale propage la lésion inflammatoire vers le ligament, le cément et le tissu alvéolaire, réalisant une parodontopathie profonde.
2.3 Prévention

La prévention tient compte de ces faits :

2.3.1 Lutte contre la flore microbienne

Elle est encore limitée car on ne peut utiliser en permanence les antibiotiques. Mais certains antiseptiques en bains de bouche ou en dentifrices, de même que certains vaccins sont à l'essai.

2.3.2 Amélioration des habitudes alimentaires

Les glucides constituent la base de l'alimentation de l'enfant (60 à 70% de l'apport calorique) mais leur consommation doit être limitée aux repas. Il faut proscrire l'usage de sucreries en dehors des repas : sirop au moment du goûter, bonbons le soir pour endormir l'enfant. Des recherches se poursuivent pour mettre au point des produits non fermentescibles (Sorbitol, Xylitol, Glycyrrhizine, Monéllin, Miraculine).
Le rôle du médecin est considérable dans l'éducation de la population pour réaliser cette meilleure hygiène alimentaire. Il sera aidé dans cette tâche par les brochures qui existent mais sont mal employées. Une des meilleures dans notre expérience est intitulée : "Stéphane a mal aux dents" et peut être lue aux jeunes enfants comme un conte où les méchants sont microbes et caries et les bons, hygiène et fluor.

2.3.3 Amélioration de l'hygiène bucco-dentaire

Un brossage méticuleux des dents et des gencives permet d'éliminer les résidus glucidiques et d'éviter la formation de la plaque dentaire. Il doit être pratiqué après chaque repas, de préférence avec un dentifrice fluoré.
L'apprentissage d'un brossage des dents efficace doit se faire dès l'école maternelle au cours des 4ème et 5ème année de la vie et naturellement se poursuivre par la suite. Ceci supposerait que les cantines et les restaurants aient des installations sanitaires permettant ce brossage et que l'usage de brosses à dents pliables, en tube, soit répandu.

2.3.4 Renforcement de la résistance de la dent par le fluor

L'action du fluor est différente selon le stage de développement de la dent. Durant la première phase de formation et de minéralisation de la couronne, il semble que très peu de fluor soit incorporé à l'émail. Par contre, l'enrichissement est considérable au cours de la deuxième phase qui marque l'accomplissement de la minéralisation de la couronne et l'éruption de la dent. Enfin, dans la troisième phase, post-éruptique, l'enrichissement en fluor s'obtient dans le milieu buccal par contact direct avec la dent. De plus, le fluor réduit la solubilité de l'émail, inhibe la croissance et le métabolisme des bactéries. Ainsi s'expliquent les différents procédés proposés par l'administration du fluor et l'âge auquel il faut les appliquer.

1° La prescription du fluor aux futures mères pendant la grossesse est peu efficace, le rein et le système osseux maintenant le fluor au niveau constant dans le sang de 0,01 à 0,15 mg/l ; d'autre part, le placenta constitue une barrière et la concentration du fluor dans le sang du foetus est toujours inférieure (1/10ème à 1/4) à celle du sang de la mère.
Par contre, dès la naissance, un apport adéquat de fluor est nécessaire, d'abord par ingestion, ensuite par ingestion et application locale jusqu'à la fin de l'éruption dentaire.

2° Une des manières les plus aisées d'administrer le fluor est la fluoration artificielle des eaux par adjonction de fluor permettant d'arriver à une concentration de 1 mg de fluor par litre d'eau. Cette méthode a été largement diffusée à l'étranger (Grande Bretagne, Pays-Bas, Canada, U.S.A, etc...) et le nombre de publications tendant à démontrer son efficacité est impressionnant. Il faut, bien entendu, vérifier au préalable la teneur normale de l'eau de boisson en fluor. Nous devons à Garnier et ses collaborateurs du Centre de Recherches Odontologiques de Strasbourg de connaître les taux de fluor des eaux de France (1972). La plupart des taux étaient compris entre 0,30 et 0,10 ppm (Lille : 0,26, Marseille : 0,11, Dijon : 1,10). Le laboratoire de l'Ecole Nationale de la Santé Publique a étudié des eaux de la région de Rennes, qui ont aussi un taux très faible : < 0,07 ppm. Par contre, certaines localités ont une eau contenant suffisamment de fluor : par exemple, Bordeaux avec un taux de 1,25 ppm. Il convient donc d'adapter d'action à chaque région.

La fluoruration de l'eau potable n'est pas, pour l'instant, autorisée par la Ministère de la Santé Publique mais la section des eaux du Conseil Supérieur d'Hygiène Publique a donné un avis favorable pour un taux admissible de fluor de 1,5 mg/l.

Bien que la fluoruration de l'eau de distribution représente pour beaucoup le moyen le plus efficace et le moins coûteux pour atteindre 90% de la population, son efficacité dépend de la quantité d'eau ingérée chaque jour et son application se heurterait probablement à une opposition de principe des défenseurs de l'écologie et, de toute façon, cette technique demeure inapplicable lorsque les sources d'eau potable sont dispersées (petites communautés).

Beaucoup d'enfants étant nourris actuellement au lait sec reconstitué, il est intéressant de connaître la teneur en fluor des eaux minérales. Si Vichy St Yorre et Vichy Célestin contiennent beaucoup de fluor (8,3 et 6,02), par contre les eaux utilisées pour l'enfant en contiennent beaucoup moins : Vittel Hépar : 0,62, Contrexéville : 0,58, Evian : 0,50, Charrié : 0,42, Volvic : 0,22, Vittel Grande Source : 0,22, Badoit en contient 1,7 mais c'est une eau gazeuse.

3° L'adjonction de fluor au sel de cuisine a été essayé en Suisse et en Hongrie. En France, le gouvernement a accepté le principe de mettre en vente un sel fluoré en 1985 (250 mg/kg de sel).

4° L'ingestion de comprimés dosés à 0,25 mg de fluorure de sodium ou de fluorure de calcium est le procédé qui, actuellement, est le plus utilisé en France. La dose est variable selon l'âge et la forme : pour le fluorure de sodium 0,25 mg de 0 à 2 ans, 0,50 mg de 2 à 4 ans, 0,75 mg de 4 à 6 ans, 1 mg au delà de 6 ans ; pour le fluorure de calcium 0,25 mg de 0 à 1 an, 0,50 mg de 1 à 2 ans, 0,75 mg de 2 à 3 ans, 1 mg au delà de 4 ans. Les comprimés très petits, sans saveur et sans odeur, sont aisément acceptés par les enfants et l'idéal est d'en prescrire la totalité ou une partie le soir au coucher, après le brossage des dents, en recommandant de les laisser fondre dans la bouche afin de bénéficier de l'action locale du fluor. Le fluorure de sodium existe aussi en gouttes, 4 gouttes = 0,25 mg.

La difficulté est d'assurer une prise régulière pendant des années, ce qui paraît difficile à de nombreux auteurs qui préfèrent la fluoration de l'eau. Cependant , la prise quotidienne de vitamine D pour prévenir le rachitisme constitue un exemple réussi d'administration journalière, il est vrai, limitée aux premières années.

5° Le fluor peut également être utilisé en applications locales. Il s'agit de créer ou de maintenir la résistance de la surface adamantine de la couronne par formation de fluoropatite ; la méthode est valable à tout âge. Les solutions utilisées sont soit le fluorure de sodium à 2%, soit le fluorure d'étain à 0,4%. Les méthodes varient selon les auteurs : elles sont, semble-t'il, efficaces mais doivent être répétées deux à six fois par an. Les gelées fluorées prolongent le contact avec la dent mais diminuent la diffusion et les échanges chimiques ; leurs essais n'ont pas démontré leur supériorité par rapport aux solutions aqueuses. Plus intéressante serait l'utilisation de vernis dentaires, combinés au scellement des sillons dentaires, méthodes actuellement à l'étude (Franck).

Le fluor peut également être utilisé en bains de bouche.

Les dentifrices fluorés (en Europe, fluorure de sodium ou fluorure d'amines) sont efficaces à la condition de ne pas contenir de carbonate calcique qui forme un combiné insoluble avec le fluor. Il n'y a qu'intérêt à proposer le brossage des dents avec les dentifrices de ce type.

6° Il n'existe pas d'arguments d'ordre médical contre-indiquant le fluor aux doses indiquées. On connaît très bien les méfaits des doses plus élevées (8 à 10 mg/l) génératrices d'une fluorose chronique avec ses signes dentaires et osseux (dystrophies dentaires avec érosion et coloration de l'émail, déformation des maxillaires et des côtes, douleurs articulaires, ankylose, calcifications des ligaments).

Par contre, le fluor n'est pas tératogène et, en particulier, ne saurait être incriminé lors de la naissance d'un enfant atteint de trisomie 21. De même, il ne joue aucun rôle dans les affections endocriniennes. Des études ont prouvé qu'il n'entre pas en compétition avec l'iode au niveau de la thyroïde. Il n'est pas toxique pour le rein et, à la dose recommandée, n'entrave pas l'action des enzymes.

Les arguments contre le fluor sont essentiellement d'ordre psychologique. Il suffit de semer le doute et alors de paraître de bon sens en préconisant l'abstention, donc la sécurité. Il est alors difficile de prouver l'efficacité et l'innocuité de la méthode et de combattre les slogans comme "liberté individuelle" ou "pollution chimique". Or, il est bon de rappeler que le Ministère anglais de la Santé, l'Organisme Européen de Recherches sur la Carie (O.R.C.A) ont tous pris position en faveur de la fluorisation, réalisée déjà naturellement dans des centaines de communautés.
Rhumatologie infantile
S. Jean

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 27 avril 1999

1 Les signes d'appel
1.1 La douleur
1.2 Déformations
1.3 Fractures
2 Sémiologie articulaire
3 Sémiologie tendineuse
   

3.1 Signes fonctionnels
3.2 Examen physique
4 Sémiologie musculaire
5 Sémiologie rachidienne
5.1 Syndrome douloureux
5.2 Déformation
1 Les signes d'appel
1.1 La douleur
Dans un premier temps il est essentiel de préciser les différentes caractéristiques de cette douleur :

- Horaire et type de douleur :
Mécanique
   
Inflammatoire
calmée par le repos
   
peu ou pas calmée par le repos
pas de réveil nocturne
   
réveil nocturne vers 3-4 heures
pas de raideur matinale
   
raideur matinale

- Mode de début : brutal ou insidieux

- Evolution :

    * Amélioration : spontanée, sous traitement (lesquels?), position antalgique ?
    * Aggravation : brutale ou progressive ?- Intensité : Il existe des échelles d'auto-évaluation

- Facteurs déclenchants

- Type de douleur : brûlure, décharge électrique continue ou paroxystique

- Site de la douleur : site initial (articulaire, para-articulaire ou autre) ou irradiations
Cas particuliers - Interprétation de la douleur chez le nourrisson et le jeune enfant :
Même après l'acquisition de la parole, l'enfant n'exprimera pas la douleur comme un adulte. Il faut donc accorder d'autant plus d'importance à l'observation et aux commentaires des parents.

- Difficulté de localiser la douleur
- Impotence fonctionnelle résultante : enfant grognon dès qu'on le mobilise, difficultés de déshabillage, diminution des activités ludiques, position antalgique et attitude vicieuse.
- Retentissement psychomoteur. Les douleurs chroniques peuvent être responsables d'un état d'apathie
- Réactions émotionnelles (cris, pleurs ...). Elles peuvent aider à évaluer l'intensité de la douleur mais dépendent d'autres phénomènes (la faim, la fatigue, la peur du médecin ...)
1.2 Déformations
Elles peuvent être : congénitales ou acquises ( => date de début )?, douloureuses, aggravatives
1.3 Fractures
Il faut alors essayer de savoir si elle est survenue sur un os sain ou pathologique.
Si elle est survenue pour un traumatisme minime (ex : chute de sa hauteur) ou même sans traumatisme, alors il s'agit d'une fracture pathologique.
2 Sémiologie articulaire
- Préciser l'horaire de la douleur.
- Rechercher l'existence d'une raideur matinale et préciser sa durée.
- Analyse des signes locaux :

    * couleur, rougeur, aspect cyanotique, etc...
    * gonflement (= hydarthrose)? : impression de rénitence (plutôt liquidien) ; impression d'empâtement (plutôt synovite)
    * augmentation ou diminution de la chaleur cutanée.

- Amplitudes articulaires :

    * Mobilité active ( mouvements effectués par le patient)
    * Mobilité passive ( mouvements imposés par l'examinateur)

La hanche
   
Le poignet
   
Le coude
   
Les métatarsophalangiennes
3 Sémiologie tendineuse
3.1 Signes fonctionnels
- douleur d'installation progressive,
- augmentée par la mise en jeu des muscles concernés,
- calmées par le repos puis permanentes.
3.2 Examen physique
la douleur est réveillée par :
- la palpation du tendon notamment au niveau des insertions tendineuses,
- la mise en tension passive du tendon,
- la contraction contre résistance du muscle qui reproduit la douleur.
4 Sémiologie musculaire
- Douleur :

    * crampes
    * myalgies : douleurs souvent mal localisées, souvent insomniantes

- Amyotrophie : fonte musculaire, évaluée comparativement à l'autre côté.
- Déficit musculaire
5 Sémiologie rachidienne
5.1 Syndrome douloureux
5.1.1 Définitions
- cervicalgie : douleur localisée au rachis cervical.
- névralgie cervico-brachiale : douleur par atteinte d'une racine cervicale appartenant au plexus brachial.
- dorsalgie.
- lombalgie : douleur localisée au rachis lombaire.
- sciatique : douleur provenant du rachis lombaire irradiant au membre inférieur selon le trajet L5 ou S1.
- cruralgie : douleur provenant du rachis lombaire irradiant au membre selon le trajet des racines L3 ou L4.
5.1.2 Interrogatoire
Il préciser les caractères : horaire de survenue, facteurs favorisants tels que la toux.
5.1.3 Examen clinique
- mobilité rachidienne lombaire :
# en flexion : chez les grands enfants et les adolescents, on peut utiliser le test de Schöber pour apprécier la mobilité élective du segment lombaire, qui est proportionnelle à l'augmentation de distance séparant deux points lombaires lors du passage de la position debout à la position penchée en avant. Le point inférieur est situé à l'intersection de la verticale passant par les épineuses et de l'horizontale tangente à l'espace L5-S1 ; le point supérieur est mesuré 10 cm plus haut.
# en latéroflexion : recherche d'une cassure.
# en extension : recherche d'une douleur provoquée, évocatrice d'une pathologie de l'arc postérieur.
- mobilité rachidienne cervicale :

    * mesure de la distance menton-sternum ou occiput-mur
    * étude des rotations

- mobilité dorsale :

    * elle est très faible. On peut mesurer la mobilité des articulations costo-vertébrales par la mesure de l'ampliation thoracique : différence de périmètre de la poitrine entre inspiration et expiration forcées.

- points douloureux à la palpation :

  # au niveau rachidien.
  # au niveau paravertébral : contracture musculaire.
  # signe de la sonnette : la palpation latérorachidienne de l'émergence de la racine réveille l'irradiation douloureuse au membre inférieur.

- signes de tension radiculaire :
# signe de Lasègue : l'enfant étant en décubitus dorsal , on soulève le membre inférieur en extension. Le signe de Lasègue est dit positif si cette manoeuvre réveille une douleur dans le membre inférieur. Il faut noter l'angle pour lequel la douleur apparaît . Il témoigne d'une atteinte radiculaire L5 et S1.
# signe de Thomas (ou Lasègue inversé) : L'enfant étant en décubitus ventral, on fléchit le genou sur la cuisse. Le signe de Thomas est dit positif si cette manoeuvre réveille une douleur en face antérieure de cuisse. Il témoigne d'une atteinte radiculaire L3 ou L4.
- examen neurologique à la recherche :

    * paresthésies,
    * déficit sensitif subjectif,
    * déficit moteur,
    * réflexes ostéotendineux,
    * signes pyramidaux.

- examens des sacro-iliaques :

    * le patient se plaint d'une fessalgie,
    * douleurs à la pression en regard des épines iliaques postéro-supérieures,

      signe du trépied : l'appui prononcé au niveau du sacrum réveille une douleur des sacro-iliaques (patient en décubitus ventral).

5.2 Déformation
5.2.1 Dans le plan frontal : la scoliose
Il faut la rechercher systématiquement chez tout enfant, spécialement en période pubertaire.

Elle associe une inclinaison latérale, à droite ou à gauche de la verticale, à une rotation autour de l'axe rachidien, responsable de la gibbosité.

Diagnostic différentiel : attitude scoliotique où il n'y a pas de rotation des corps vertébraux. Les déformations disparaissent en décubitus ventral et en antéflexion du tronc. Elle est due à une inégalité de longueur des membres inférieurs, une attitude vicieuse de hanche. Il faut toujours faire un examen neurologique complet à la recherche de maladies neurologiques sous-jacentes.

A l'inspection on note :

    * une déviation latérale par rapport à un fil à plomb placé en regard de l'épineuse de C7.
    * on recherche la gibbosité, l'enfant étant penché en avant. C'est une saillie des côtes liée à la rotation des corps vertébraux. Sa hauteur se mesure du côté sain, symétriquement à la ligne des épineuses.

5.2.2 Dans la plan sagittal :
- cyphose : accentuation de la courbure dorsale,
- hyperlordose : accentuation de la lordose lombaire ou cervicale.
En résumé
La sémiologie de rhumatologie pédiatrique peut être :
- soit isolée : dominée par la douleur ou la déformation,
- soit associée, d'où la recherche :
# des antécédents personnels,
# des antécédents familiaux de rhumatisme,
# de fièvre : importance, évolution dans la journée, associée à des frissons ?
# d'une asthénie, anorexie, amaigrissement,
# d'une hépatosplénomégalie, adénopathies,
# d'une éruption cutanée :
- de type érythémateuse, fugace,
- à type de desquamation au niveau des coudes, des genoux, des lombes, dans le cuir chevelu (psoriasis).
L'imagerie en pédiatrie :
indications, résultats, contraintes
Catherine Tréguier

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 29 avril 1999

1 Appareil digestif
1.1 Clichés d'abdomen
1.2 Echographie
1.3 Opacification
2 Appareil urinaire, rétropéritoine et pelvis
2.1 Clichés d'abdomen
2.2 Echographie
2.3 Cystographie
2.4 Urographie intra-veineuse
2.5 Etudes scintigraphiques
2.6 Examens d'indication moins fréquente
   

3 Appareil ostéo-articulaire
3.1 Les étapes de l'ossification : l'âge osseux
3.2 Détermination radiologique de l'âge osseux
3.3 Appareil ostéo-articulaire
4 Appareil respiratoire et cardio-vasculaire
4.1 Voies aériennes supérieures
4.2 Thorax
5 Neuro-radiologie
5.1 Le crâne normal
5.2 Le rachis normal
5.3 Système nerveux central
1 Appareil digestif
1.1 Clichés d'abdomen (A.S.P.)
1.1.1 Pneumatisation digestive
Chez le nouveau-né, la pneumatisation intestinale est liée à la progression de l'air dégluti dès la naissance. L'air atteint les dernières anses iléales vers la 6ème heure de vie et le rectum vers la 12ème heure : notion fondamentale pour l'étude radiologique des occlusions néonatales, importance de noter l'heure de réalisation du cliché par rapport à la naissance.

Trois points fixes sont reconnaissables sur un cliché d'abdomen :

    * la clarté gastrique, visible sous l'hémi-coupole diaphragmatique gauche,
    * le premier duodénum, à droite de la ligne médiane dans la région épigastrique,
    * le rectum, en avant du sacrum.

Il n'est pas possible d'identifier le grêle et le colon de façon fiable chez le jeune enfant en cas de dilatation importante sur des notions topographiques ou morphologiques. Une hyperaération digestive ou au contraire un abdomen opaque peuvent se rencontrer dans diverses circonstances normales ou pathologiques.
1.1.2 Calcifications abdominales
Leur topographie oriente vers l'étiologie :

    * rétro-péritonéale : penser lithiase rénale
    * en fosse iliaque droite : penser stercolithe appendiculaire
    * hypocondre droit : lithiase biliaire, hépatoblastome.

1.2 Echographie
Technique très performante en pédiatrie, aucune sédation n'est nécessaire.
1.2.1 Organes pleins
- Foie et voies biliaires :

    * Foie : pas de particularités, échostructure fine et régulière, légèrement supérieure à celle de la corticale rénale à partir de l'âge de 6 mois.
    * Vésicule biliaire : toujours visible chez le nouveau-né, après un jeûne de 3 heures. La longueur moyenne est de 3 cm (1,5 à 3 cm avant 1 an, 3 à 7 cm au-delà) ; l'épaisseur de la paroi est inférieure à 2 mm.
    * Voie biliaire principale : calibre inférieur à 3 mm quelque soit l'âge.

- Pancréas :

    * habituellement facile à explorer chez l'enfant, son échostructure est homogène et faible, inférieure à celle du foie ;
    * il paraît proportionnellement plus gros que chez l'adulte, dès l'âge de 1 an son épaisseur moyenne est de 1,5 à 2 cm ;
    * le canal de Wirsung est en général décelable, son calibre est de l'ordre du millimètre.

- Rate :

    * échostructure très fine homogène, inférieure à celle du foie ;
    * son grand axe, étudié sur une coupe oblique intercostale, mesure 4 cm à la naissance et augmente d'environ 0,5 cm par an jusqu'à l'âge de 15 ans.

1.2.2 Organes aériques

- Tube digestif :

    * les parois du tube digestif sont bien visibles, avec une couche externe hypoéchogène, correspondant à la paroi musculaire et mesurant moins de 2 mm d'épaisseur, et un liseré hyperéchogène central correspondant à la muqueuse. Le contenu est variable : aérique, inducteur de cônes d'ombres mobiles, liquidien plus ou moins échogène et homogène, animé de mouvements, solide d'échostructure hétérogène variable.

En pathologie, les anomalies de la paroi du tube digestif sont à rechercher dans la maladie de Crohn ou le purpura rhumatoïde.

Certaines zones sont faciles à repérer :

    * oesophage abdominal, en avant de l'aorte, sous le diaphragme : la recherche d'un reflux gastro-oesophagien est possible par échographie ;
    * pylore, en avant du tronc porte, dans le prolongement de l'antre gastrique : en cas de sténose du pylore, l'hypertrophie du muscle pylorique est mesurable sur l'échographie remplaçant l'opacification gastrique.

      L'échographie apporte :
      - des données morphologiques et biométriques :
          o le pylore présente deux composantes :
                  - échogène centrale, souvent incurvée correspondant au canal pylorique
                  - hypoéchogène en manchon périphérique correspondant à la couche musculaire ; Il faut mesurer la longueur du canal (L) et l'épaisseur du muscle (e)
o

Valeurs normales
   
L = 10 mm
   
e = 2 mm
S.H.P.
   
L > 15 mm
   
e > 4 mm

          Entre ces valeurs, existent des formes intermédiaires pouvant poser des problèmes de diagnostic.

      - des données dynamiques indispensables au diagnostic :
          o le canal pylorique ne s'ouvre pas,
          o les passages sont rares ou absents,
          o les ondes péristaltiques antrales viennent buter contre l'obstacle.

    * intestin grêle : le contenu et la mobilité des anses est appréciée
    * colon droit et caecum dans la fosse iliaque et le flanc droit,
    * colon transverse, sous le foie.

En pathologie, la recherche d'une invagination intestinale aiguë (télescopage d'un segment intestinal dans le segment d'aval), se fait par l'échographie. L'image de cocarde due à l'invagination des tuniques digestives associée à des adénopathies mésentériques est facilement retrouvée à l'échographie.
· rectum.
1.3 Opacification
1.3.1 Produits de contraste et moyen d'administration
- par voie haute :

    * baryte diluée dans un biberon ou au moyen d'une sonde oesophagienne,
    * produits iodés hydrosolubles.

- par voie basse : baryte diluée,

    * produits iodés hydrosolubles iso-osmolaires ou hyper-osmolaires si besoin d'effet osmotique (dilution du méconium),
    * air avec pression inférieure à 120 mm Hg contrôlée par manométrie.

1.3.2 Résultats
- oesophage :

    * les plis muqueux sont moins proéminents que chez l'adulte ;
    * les empreintes de l'aorte, de la bronche souche gauche et de l'oreillette gauche sont nettement visibles en dehors de toute pathologie ;
    * chez le jeune enfant, l'oesophage est très flexible et un aspect très tortueux mais fugace peut s'observer à tous les niveaux.

- estomac (chez le nouveau-né et le nourrisson) :

    * grand axe oblique, proche de l'horizontale, même en orthostatisme, majoration possible par une du colon transverse (plicature gastrique).;
    * région antro-pylorique orientée de façon marquée vers l'arrière.

- duodénum : la position normale de l'angle duodéno-jéjunal, à gauche de la ligne médiane, doit être recherchée sur tout examen radiologique digestif supérieur de l'enfant sur une incidence de face.

- intestin grêle :

    * augmentation progressive du calibre avec l'âge ;
    * plissement muqueux peu marqué chez le jeune enfant ;
    * hyperplasie des formations lymphoïdes de la dernière anse iléale constituant un aspect normal.

- caecum et colon droit :

    * mobilité fréquente chez le nouveau-né et le nourrisson par défaut d'accolement.

2 Appareil urinaire, rétropéritoine et pelvis
2.1 Clichés d'abdomen
- Décubitus de face :
avec cache plombé chez le garçon, sauf en cas de recherche de lithiase.

    * Contours des reins mal visibles (faible épaisseur des fascia graisseux et superposition des structures digestives).
    * Visualisation spontanée de la vessie possible, sans valeur, isolée du contexte clinique.

- Décubitus de profil :
si calcifications, masse abdominale, ou pour analyse du rachis lombo-sacré.
2.2 Echographie
Technique essentielle dans l'exploration de l'appareil génito-urinaire en pédiatrie, sondes de fréquence adaptée au gabarit de l'enfant.
2.2.1 Rein
Aspect plus globuleux que celui de l'adulte.

Volume :
- Evalué à partir du diamètre transversal moyen et de la longueur ; l'épaisseur est équivalente à la moitié de la longueur ; le rein gauche est légèrement plus grand que le droit.
- Largeur moyenne du rein :

    * A la naissance : 4 à 4,5 cm - A 1 an : 6 cm
    * A 5 ans : 8 cm
    * A 10 ans : 10 cm

Contours :
- lobulations foetales visibles à l'état normal chez le nourrisson ;
- à gauche, aspect de rein dromadaire par voussure du bord externe ;
- la partie antérieure du pôle supérieur peut être barrée par une bande hyperéchogène correspondant au septum inter-réniculaire, stigmate de la fusion des deux masses rénales primitives, à ne pas confondre avec une cicatrice corticale.

Différenciation cortico-médullaire :
- Les pyramides sont hypoéchogènes, triangulaires à base corticale.
- A la base de chacune, il existe un accident acoustique dense, dû à l'artère arquée.
- L'échostructure rénale évolue avec l'âge :

    * jusqu'à 2 à 3 mois : médullaire < foie < corticale (grande richesse en glomérules et présence de 20 % des anses de Henlé dans la corticale, augmentant le nombre des interfaces).
    * au-delà : médullaire < corticale < foie < sinus.

Sinus du rein :
- Faiblement développé, avant 6 mois pas d'hyperéchogénicité centrale visible dans 90 % des cas ; cavités intra-rénales visibles, à lumière virtuelle ; l'épaisseur du bassinet mesure mois de 2 à 3 mm, quel que soit le degré d'hydratation, sur une coupe transversale moyenne (coupe de référence).
2.2.2 Vessie
Etude systématique au cours d'une échographie de l'appareil urinaire :

    * commencer l'examen par la région pelvienne, le contact froid du gel déclenche souvent la miction,
    * la vessie a des parois fines et réguliéres, les jets urétéraux sont parfois visibles.

Echographie rénale : analyse systématique :

    * de la taille rénale,
    * de l'épaisseur du cortex,
    * de l'échogénicité,
    * de la différenciation cortico-médullaire (présente, absente, inversée),
    * de la présence de kyste, de dilatation, de calcification, de tumeur.

2.2.3 Surrénales
A la naissance : bien visibles car le rapport volumique entre surrénale et rein est de 1/3 ; la médullo-surrénale est plus échogène que la cortico-surrénale.
Chez l'enfant, elles ne sont en général pas visibles.
2.2.4 Appareil génital féminin
Nécessité d'une bonne réplétion vésicale (patience).

- Vagin : structure, tubulée, en rail, longeant la paroi postéro-inférieure de la vessie.

- Utérus : son aspect morphologique varie avec l'âge :

    * utérus impubère : taille : 3 + 0,5 cm ; corps très fin, isthme et col deux fois plus épais, représentant les 2/3 du volume global ; situé en position haute dans le pelvis, comme la vessie.
    * utérus pubère : taille moyenne : 5 à 8 cm de longueur et 2 à 4 cm d'épaisseur, aspect : corps plus gros que col, la transformation est progressive à partir de 6 à 8 ans.
    * en période néo-natale (4 à 6 premières semaines), en raison de l'imprégnation hormonale : taille : 4 à 5 cm ; aspect tubulaire, sans dissociation col-corps, lumière hyperéchogène visible.

- Ovaires :

    * difficiles à voir avant 3 ans, en dehors de la période néo-natale (position haute et mobilité) ;
    * avant la puberté, le volume est voisin de 1 cm3 ;
    * l'augmentation de taille des ovaires précède les modifications utérines ; dès 6 ans, de petites formations folliculaires, de moins de 2 cm de diamètre peuvent être visibles;
    * ovaire pubère : aspect hétérogène, volume d'environ 5 cm3.

2.3 Cystographie
2.3.1 Cystographie Radiologique
Technique :
- examen réalisé en dehors d'une infection urinaire ou sous couverture anti-infectieuse, sans anesthésie, par une équipe entraînée ;
- voie rétrograde (sus-pubienne uniquement chez le nouveau-né garçon en rétention) ;
- produit de contraste injecté en perfusion lente (hauteur de 1 mètre) jusqu'au besoin mictionnel ;
- tous les clichés englobent la totalité de l'arbre urinaire, l'utilisation de l'ampliphotographie ou de la numérisation permet de réduire la dose d'irradiation.

Vessie :
- morphologique : en début de remplissage, saillie horizontale de la barre inter-urétérale visible ; en semi-réplétion, prolongement inguinal inféro-latéral possible, uni ou bilatéral (vessie à"oreilles") ; contours réguliers en réplétion, irrégularités habituelles au cours de miction ;
- Capacité vésicale : 30 à 50 cm3 chez le nouveau-né, 50 à 100 cm3 à l'âge de 1 an, 100 à 200 cm3 vers 7 ans.
- Résidu post-mictionnel : sans valeur chez l'enfant (conditions de miction peu physiologiques) ; chez le nourrisson, le plancher vésical est en position haute, vestige de la position foetale.

Urètre :
- chez la fille, la morphologie est simple
- chez le garçon, l'urètre a trois portions :

    * urètre prostatique (1) : marqué par la lacune postérieure du veru montanum (V), prolongé par les freins du veru (à ne pas confondre avec une valve). En cours de miction et en dehors de tout obstacle sous-jacent, l'utricule prostatique et les canaux déférents peuvent s'opacifier (G) ;
    * urètre membraneux (2) : court, marqué par l'empreinte extrinsèque du sphincter externe ;
    * urètre spongieux (3) : calibre régulier avec deux petits renflements, l'un postérieur, bulbaire, l'autre rétro-méatique au niveau de la fossette navicualire ; opacification possible des glandes de Cowper (C) (trajet horizontal, pseudo-diverticulaire de longueur et d'aspect variable).

2.3.2 Cystomanométrie
Facilement couplée à la cystographie radiologique (double sonde).
2.3.3 Cystographie isotopique
enregistrement continu sur l'ensemble de l'appareil urinaire pendant l'examen ;
technique très sensible et moins irradiante que la cystographie radiologique ;
résolution spatiale moins bonne et méconnaissance possible d'un reflux masqué par la vessie.
2.4 Urographie intra-veineuse (U.I.V.)
2.4.1 Technique
Chez le nourrisson : jeûne de trois heures suffisant, produit à faible osmolalité préférable, à raison de 1,5 à 2 cm3/kg, jusqu'à 3 cm3/kg chez les enfants de moins de 10 kg.

Nombre réduit de clichés : un vers la 3ème minute après injection : position et taille des reins, début d'opacification des cavités ; puis un à deux clichés en totalité entre la 5ème et la 10ème minute : morphologie des cavités, des uretères et de la vessie ; adapter, sans rigidité, ce schéma à chaque examen.
2.4.2 Artifices techniques
distension gastrique par de l'air (boisson gazeuse), pour visualiser les reins ;
sonde vésicale pendant l'U.I.V. si reflux vésico-urétéral important connu.
2.4.3 Résultat
Jusqu'à l'âge de 1 mois, qualité variable : mauvaise concentration du produit de contraste et retard d'opacification des cavités possibles sans pathologie sous-jacente en raison de l'immaturité rénale (filtration glomérulaire faible, environ 40 ml/mn, et secteur de diffusion extra-cellulaire deux fois plus importants que dans le rein mature).

Reins : L'U.I.V., mieux que l'échographie, montre :

    * la position des reins et leur axe global (parfois parallèle au rachis) ;
    * leur taille, peut être mesurée de façon reproductible bien que fausse (agrandissement radiologique et obliquité) par rapport à la hauteur de L1 - L3 quel que soit l'ëge de l'enfant.

Les cavités sont réparties en trois groupes principaux, quelquefois en deux (bifidité pyélique).
Les tiges calicielles peuvent être de longueur réduite avec bassinet globuleux. Au niveau des pôles, surtout supérieurs, les calices sont composés.

Uretères :

    * aspect rubané et coudé dans leur portion initiale, fréquent chez le nourrisson (uretères foetaux) ;
    * variabilité du trajet pelvien de l'uretére au cours d'un examen.

2.5 Etudes scintigraphiques (en dehors de la cystographie isotopique)
- D.T.P.A. (Tech 99 m Acide Diéthylène Triamine Pentaacétique) :

    * analyse fonctionnelle quantitative de chaque rein ;
    * sensibilisation par des épreuves dynamiques possible ;
    * irradiation très faible.

- D.M.S.A. (Tech 99 m Acide Dimercapthosuccinique) : analyse morphologique du parenchyme rénal ; résolution spatiale améliorée par l'utilisation d'incidences multiples ; absence de spécificité et irradiation équivalente à celle d'une U.I.V.
2.6 Examens d'indication moins fréquente
- Pylographie trans-lombaire
- Tomodensitométrie (T.D.M.)
- Imagerie par résonance magnétique (I.R.M.)
3 Appareil ostéo-articulaire
3.1 Les étapes de l'ossification : l'âge osseux
3.1.1 Os longs
Les os longs obéissent à l'ossification enchondrale, ils comportent une diaphyse et une ou plusieurs épiphyses séparées par des zones de cartilage de croissance ou physe.
3.1.1.1 Diaphyses
Elles sont toutes visibles dès la naissance, de contours nets. Progressivement, elles prennent leur aspect définitif : adaptation des courbures aux contraintes mécaniques et épaississement des corticales au niveau des concavités.

Aspects particuliers :
- Parfois, à la naissance : densification globale avec corticale et médullaire étroite (disparition en quelques semaines).
- Aspect ondulé des bords du radius et du cubitus.
- Appositions périostées possibles de 2 à 6 mois, symétriques et régulières chez 35 à 50 % des enfants normaux.
- Visibilité du canal du vaisseau nourricier sous forme d'une fine ligne radioclaire, en particulier sur l'humérus, le tibia et le fémur.
3.1.1.2 Métaphyses
La limite est toujours nette, mais devient frangée en cours de croissance, quand le cartilage de conjugaison (ou physe) s'amincit

Aspects particuliers :
- Aspect cupuliforme de la métaphyse cubitale inférieure et de l'extrémité antérieure des côtes.
- Bandes claires métaphysaires en période post-natale (elles régressent en quelques semaines).
- Stries denses, parallèles à la physe, ou stries d'arrêt de croissance, fréquentes chez l'enfant.
- Crêtes ou pseudo-lacunes d'insertions réalisant des zones irrégulières (insertion fémorale inférieure du grand adducteur)
- Lacune corticale ou "cortical defect" chez 40 % des enfants avec un pic de fréquence vers 6 ans : localisations préférentielles : extrémité inférieure du fémur et supérieure du tibia. Il s'agit d'une lacune ovale, centrée sur la corticale, multicyclique, de taille variable (< 3 cm en moyenne), soufflant la corticale sans la rompre. L'évolution se fait vers la disparition progressive avec parfois phase de densification en motte, ou quelquefois vers une extension aboutissant à un fibrome non ossifiant.
3.1.1.3 Epiphyses
En dehors des points épiphysaires du genou et de l'épaule partiellement ossifiés dès la naissance, les épiphyses sont entièrement cartilagineuses et donc radiotransparentes.
Elles apparaissent suivant une chronologie connue, avec des variations possibles, sans symétrie obligatoire, sous forme de noyaux ronds et réguliers qui grossissent et se modèlent en s'adaptant aux contraintes mécaniques de leur fonction.

Aspects particuliers :
- Tous les noyaux épiphysaires sont susceptibles, pendant leur période de croissance rapide, de prendre un aspect irrégulier, fragmenté (noyau fémoral antérieur, calcanéen postérieur, tubérosité tibiale antérieure).
- Certains points peuvent être, à un moment donné, très denses : phalanges.
- Il existe de très nombreuses possibilités de noyaux surnuméraires.
- Au niveau de l'épaule et de la hanche, quant l'articulation est soumise à une traction importante un phénomène de vide articulaire peut apparaître sous forme d'un croissant gazeux intra-articulaire.
3.1.2 Os ronds
Les seuls os ronds visibles dès la naissance sont le calcanéum, l'astragale et le cuboïde tarsien. Les autres apparaissent de façon chronologique et évoluent suivant le même schéma que les points épiphysaires.

Aspects particuliers :
- Aspect fragmenté, à un moment de leur évolution (pisiforme et rotule)
- Fusions possibles par défaut de segmentation de l'ébauche mésenchymateuse (au niveau du carpe entre pyramidal et semi-lunaire, os crochu et grand os).
3.2 Détermination radiologique de l'âge osseux
3.2.1 Principes
Elle repose sur l'évaluation de la chronologie d'apparition des noyaux épiphysaires et des os ronds, de leur croissance, de leur modelage et de la disparition des cartilages de conjugaison, par rapport à des données de référence.
Les points épiphysaires visibles à la naissance sont :

    * les points fémoraux inférieurs (32 semaines de vie foetale pour les filles, 34 pour les garçons) ;
    * les points tibiaux supérieurs (35 semaines pour les filles, 37 pour les garçons) ;
    * les points huméraux supérieurs, de façon inconstante.

Les os ronds visibles à la naissance :

    * au niveau du tarse : astragale, calcanéum et cuboïde ;
    * au niveau du carpe : aucun.

Il existe une asymétrie de développement entre le côté gauche et le côté droit, la maturation osseuse est plus lente chez le garìon que chez la fille.
3.2.2 Indications
- Discordance entre âge civil et développement staturo-pondéral ;
- Surveillance de maladie endocrinienne, métabolique ou générale : hypothyroïdie, rachitisme, insuffisance rénale...
- Problème médico-légal.
3.2.3 En pratique
Il faut utiliser en fonction de l'âge, la méthode la moins irradiante et la plus facilement reproductible :

    * Nouveau né : genou gauche de face et cheville gauche de profil ou hémi-squelette.
    * A partir de l'âge de 3 mois et jusqu'à la fin de la croissance : main-poignet gauche de face.
    * Entre 8 ans et 13 ans : ajouter le coude gauche de face et de profil.
    * Vers la fin de la croissance : test de Risser pour déterminer l'arrêt définitif de la croissance.

Tableau I : Méthodes de détermination radiologique de l'âge osseux
Région
   
Auteurs
   
Date
   
Pays
   
Principe et âge concerné
Main + poignet
gauche
    Greulich et Pyle

Sauvegrain et Nahum

Sempé
   
1959
 
1965
 
1971
   
USA
 
France
 
France
    Comparaison à des clichés 0 à 15 ans (fille) à 17 ans (garçon)
Comparaison à des schémas

Cotation de chaque point
Genou Gauche
    Pyle et Hoerr    
1955
   
USA
    Comparaison à des clichés 0 à 15 ans (fille), à 18ans (garçon)
 Coude gauche
face, profil
    Sauvegrain et Nahum    
1962
   
France
    Cotation de chaque point
11 à 15 ans (garçon)
9 à 13 ans (fille)
 Hémi-squelette
    Lefebvre et Koifman    
1965
   
France
    Addition du nombre de points 0 à 30 mois
Crête iliaque
    Risser    
1948
   
USA
    Cotation du noyau de la crête iliaque à partir de 13 ans (fille) 15 ans (garçon), durée 3 ans.
 
3.3 Appareil ostéo-articulaire
3.3.1 Longueur des membres inférieurs
3.3.1.1 Techniques de mesures radiologiques
Cliché en totalité debout de face en charge, pieds nus
Avantage : repérer le niveau de chaque articulation en charge.
Inconvénients : mesures faussées par mauvaise position, irradiation.

Cliché en totalité de face en décubitus
Avantage : limiter les risques de mauvaises positions lors de la prise du cliché.
Inconvénient : pas d'information en charge.

Cliché en décubitus, localisé sur les interlignes articulaires de la hanche, du genou et de la cheville, avec mesure par une règle plombée
Avantage : réduit les pièges liés à la position debout et l'irradiation.
Inconvénient : ne donne pas une vue morphologique de l'ensemble du squelette des membres inférieurs.

Cliché numérisé en T.D.M.
Avantages : mesure facile des différents segments de membre, vision structurale globale correcte, irradiation réduite.
3.3.1.2 Asymétrie de longueur et d'épaisseur des membres inférieurs
Raccourcissement : anomalie congénitale, immobilisation prolongée, maladie neurologique, paralysie, lésion du cartilage de croissance, irradiation
Vérifier l'association à des lésions cutanées ou osseuses sous-jacentes.
3.3.2 Hanche
L'articulation coxo-fémorale est exposée à différentes affections en fonction de l'âge :

    * nouveau-né, nourrisson : luxation et ostéoarthrite ;
    * 3 à 8 ans : synovite aiguæ transitoire et ostéochondrite ;
    * 8 à 15 ans : épiphysiolyse.

D'autres affections peuvent se rencontrer : ostéomyélite ou lésion traumatique (décollement épiphysaire néo-natal, fracture de fatigue, arrachement apophysaire...).
Chez l'enfant, toute boîterie doit faire examiner la hanche. Le bilan radiologique repose sur un cliché de bassin de face en décubitus (sans aucune zone osseuse masquée par un éventuel protège-gonade), un cliché des hanches de profil en décubitus (position de la grenouille) et une échographie.
3.3.2.1 L'échographie de hanche
Elle a plusieurs indications :
- dépistage de la luxation congénitale de hanche, de la naissance à l'âge de 1 mois et jusqu'à 2 - 3 mois suivant la corpulence de l'enfant.
- dépistage d'un épanchement intra-articulaire :

    * arthrite septique néonatale,
    * synovite aiguë de hanche

- recherche d'une hypertrophie synoviale (arthrite chronique juvénile).

Deux plans de coupe électifs sont réalisés :
- coupe frontale externe chez le nouveau-né et le nourrisson, passant par le centre de la cavité cotyloïdienne.

Eléments analysés : position et couverture osseuse de la tête fémorale ; morphologie du rebord osseux ; toit cartilagineux et position du limbus.
   

- Echographie de la hanche normale
1 : bord externe de l'aile iliaque rectiligne, parallèle au plan de travail ;
2 : labrum ;
3 : trou anéchogène du toit cartilagineux ;
4 : front osseux métaphysaire fémoral supérieur ;
5 : tête fémorale ;
6 : grand trochanter ;
7 : cartilage en Y ;
8 : toit du cotyle.
   

- Echographie de hanche, principales anomalies observées au cours de la maladie luxante.
a et b : Dysplasique ;
c : Luxée.

- coupe sagittale chez l'enfant plus grand.

Eléments analysés : épanchement intra-articulaire ; épaississement de la capsule; décollement périosté ; hyperplasie synoviale.
    Appareil capsulo-synovial
Anatomie normale
1 : bourrelet cotyloïdien
2 : ligament transverse de l'acétabulum
3 : prolongement de la capsule sur la goutière du tendon réfléchi du droit antérieur
4 : ligament rond
5 : capsule
6 : synoviale
7 : arrière fond du cotyle
    Coupe longitudinale oblique de la hanche
1 : tête fémorale
2 : cartilage de croissance
3 : col fémoral
4 : cotyle
5 : interligne articulaire
6 : ligament ilio-fémoral
7 : muscle psoas iliaque
8 : muscle droit antérieur
9 : muscle couturier
10 : peau
11 : épaisseur du récessus antérieur (entre 2 et 4 mm)
3.3.2.2 Radiographie du bassin de face
Effectuée au cours du 4ème mois, elle doit êre parfaite : ailes iliaques et trous obturateurs symétriques, superpositions des bords supérieurs des noyaux ischiatiques et pubiens, rachis médian et fémurs parallèles au rachis. Les éléments à étudier sont morphologiques et géométriques :

Eléments morphologiques normaux : aspect creusé et répartition régulière de la densification osseuse du toit du cotyle ; talus bien saillant.

Eléments géométriques normaux :
- les noyaux fémoraux supérieurs, lorsqu'ils sont apparus doivent se projeter en dessous de la ligne des cartilages en Y (A) et en dedans de la verticale abaissée à partir du point le plus externe du toit du cotyle (B) (quadrant inféro-interne de la construction d'Ombredanne) ;
- le point le plus haut de chaque col fémoral doit se situer sous la ligne des cartilages en Y, de façon symétrique et à la même distance des branches ischio-pubiennes ;
- la ligne de Putti (C), verticale tangente au bord interne de la métaphyse fémorale supérieure, coupe le cotyle dans sa moitié interne ;
- l'angle acétabulaire est inférieur à 35° à la naissance et diminue de 2° par mois jusqu'à 6 mois.

La luxation se traduit par une excentration et une ascension de l'extrémité supérieure du fémur, la dysplasie, par un défaut de modelage du fond du cotyle qui est court, non creusé et trop oblique, avec un déport de la charge minérale, centrée sur l'empreinte trop externe du noyau fémoral.

 
   

Sur les 2 schémas :

- à gauche : hanche normale

- à droite : hanche luxée
3.3.3 Coude
   

Aspect normal du coude : liseré coronoïdien (a), liseré du court supinateur (b), la ligne humérale antérieure passe en arrière du tiers antérieur du noyau condylien, l'axe du radius passe au centre du noyau condylien de face et de profil, quel que soit le degré de flexion.
3.3.4 Pied


Radiographie du pied
a) Face. b) Profil.

Sur l'incidence de face : pied à plat, axe de la jambe parallèle à l'axe global de l'arrière-pied, l'angle astragalo-calcanéen mesure 40° chez le nouveau-né, puis entre 15° et 30° à 5 ans. Chez l'enfant, l'axe de l'astragale passe au niveau de la base du premier métatarsien (1), l'axe du calcanéum, au niveau de la base du 5ème (2). Chez le nouveau-né, l'axe de l'astragale passe en dedans de la base du premier métatarsien (3).

L'angle calcanéum-cinquième métatarsien est nul.

Sur l'incidence de profil : pied à plat sur un plan dur, axe de la jambe perpendiculaire à l'axe global du pied, l'astragale est incliné dans l'axe des métatarsiens, le calcanéum est incliné en haut et en avant, l'angle astragalo-calcanéen est de 30 à 50°.

Ces angles n'ont qu'une valeur indicative car l'axe du calcanéum et de l'astragale ne peuvent être tracés de façon rigoureusement reproductible et ces angles dépendent de la qualité de l'incidence. Compte tenu de ces précautions, certaines anomalies peuvent être systématisées.
4  Appareil respiratoire et cardio-vasculaire
4.1 Voies aériennes supérieures
4.1.1 Fosses nasales et rhino-pharynx

Cliché de profil pris en inspiration nasale, bouche fermée (difficile à réaliser chez l'enfant de moins de 3 ans). L'épaisseur des parties molles du cavum est équivalente à la hauteur du corps du sphénoïde en regard du fond de la selle turcique (figure 1).
   

Fig. 1 Voies aériennes normales de profil en inspiration.
1 : tissus adénoïdiens du cavum
2 : langue
3: voile du palais et amygdales
4 : paroi postérieure du pharynx
5 : vallécule
6 : pharynx
7 : épiglotte
8 : vestibule laryngé
9 : replis ary-épiglottiques
10 : cordes vocales et ventricules de Morgani
11 : sous-glotte

T.D.M. ou I.R.M.
4.1.2 Larynx et trachée

- étage sus-glottique : clichés de profil aux 2 temps de la respiration (ampli photo, numérisation),
- étage sous-glottique : clichés de face aux 2 temps de la respiration (figure 2),
- trachée : clichés de face et de profil (figure 3).
    Fig. 2 Etage sous-glottique de face
a) Inspiration : trachée presque rectiligne, aspect en sablier large de la glotte.
b) Expiration : trachée en baïonnette droite, épaulement sous-glottique en voûte romane.
    Fig. 3 Pathologie sous-glottique.
a) Sous-glotte normale.
b) Laryngite : sous-glotte effilée.
c) Angiome : sous-glotte asymétrique.
4.2 Thorax
4.2.1 Cliché de thorax de face
L'obtention d'un cliché inspiré, en incidence de face, nécessite de recourir à des artifices variables en fonction de l'âge : décubitus, système de contention, incidence en "dos-plaque"...
4.2.1.1 Particularites liées à la technique :
- dos-plaque : côtes horizontales, clavicules se projetant au-dessus des premières côtes ; agrandissement géométrique de la silhouette médiastinale par rapport au thorax ; aspect surélevé de la pointe du coeur, lorsque le cliché est pris en hyperlordose.
- décubitus : vascularisation équivalente à la base et au sommet
- quand le cliché n'est pas strictement de face : asymétrie de transparence parenchymateuse ne permettant pas l'interprétation du cliché
4.2.1.2 Particularités liées à l'âge :
- parties molles :

    * plis cutanés chez le nouveau-né ;
    * opacités mammaires en période pré-pubertaire

- médiastin :

    * arc moyen bombé, bouton aortique peu saillant ;
    * trachée déviée à droite dans sa portion inférieure, aspect en baoïnnette en expiration,
    * visualisation du bord droit de l'oreillette gauche à travers l'oreillette droite, sous la bronche souche droite ;
    * opacité thymique modifiant le médiastin antéro-supérieur, coiffant la masse cardiaque en avant. Les contours sont nets et de forme variable : ondulé, géométrique, curviligne.

L'opacité est bilatérale et asymétrique, sa forme varie avec la respiration, les changements de position et, dans le temps, en fonction des stress.
Quelles que soient sa forme et sa taille, cette opacité est antérieure (signe de recouvrement hilaire) ; n'entraîne aucun signe de compression ; disparaît en règle après l'âge de 3 ans.
Une localisation aberrante est possible, cervicale ou médiastinale postérieure. Un débord thymique, surtout gauche, peut s'observer au-delà de 3-ans, nécessitant un contrôle échographique et un bilan général. L'absence d'opacité thymique chez le nourrisson doit faire évoquer un désordre immunitaire (syndrome de Di George), une rubéole congénitale.
4.2.2 Clichés complémentaires
4.2.2.1 Clichés de profil
- Particularités : l'espace clair rétro-sternal peut être comblé jusqu'à l'âge de 3 ans par l'opacité thymique. ; la transparence du cliché, en regard du rachis dorsal, augmente régulièrement de haut en bas ; une empreinte tranchéale antérieure due au tronc artériel brachio-céphalique peut s'observer, elle disparaît chez l'enfant plus âgé.

- Intérêt : il n'est jamais pratiqué en première intention.; il aide à la localisation topographique d'une anomalie, l'analyse du médiastin (sites ganglionnaires), l'évaluation du degré d'insufflation.

4.2.2.2 Cliché filtré pour l'analyse du médiastin.
4.2.2.3 Cliché en expiration ou en Valsalva
- Particularités : souvent difficile à obtenir, il peut être remplacé par une étude scopique, une séquence en ampli-photo ou par des clichés de face en décubitus latéral (poumon déclive en expiration et poumon proclive en inspiration).

- Intérêt : recherche d'un trappage aérien, mise en évidence de la déformation d'une structure molle ou de la mobilité d'un épanchement.
4.2.3 Echographie
La nature cartilagineuse d'une grande partie du squelette thoracique chez le nourrisson permet le passage des ultrasons.
Couplée au Doppler, l'échographie permet une bonne étude du coeur, des gros vaisseaux, des structures médiastinales et des épanchements pleuraux.
Le thymus est finement échogène et homogène, son échostructure est inférieure ou égale à celle du foie.
Elle est intéressante dans l'exploration de masse thoracique surtout pariétale ou médiastinale.
4.2.4 Tomodensitométrie (T.D.M.)
Collaboration difficile à obtenir avant l'âge de 3 à 4 ans (sédation indispensable).

- Parenchyme avant 5 ans, image de qualité médiocre car :

    * le gradient de densité entre le tissu parenchymateux et l'air pulmonaire est peu favorable en raison de la grande quantité en eau ;
    * les tassements parenchymateux, liés au décubitus et à la sédation sont plus fréquents.
    * les battements transmis par le coeur rendent difficiles l'analyse des régions paracardiaques.

- Thymus : il est situé juste en arrière du manubrium sternal, en avant des gros vaisseaux. Il s'étend de façon plus ou moins importante vers le bas, en avant du coeur et du péricarde. Il est homogène, avant et après injection de produit de contraste. Son contenu en graisse augmente avec l'âge.
4.2.5 Imagerie par résonance magnétique (I.R.M.)
L'examen nécessite une immobilité absolue et prolongée (30 à 45-minutes), ce qui impose une sédation avant l'âge de 5 ans.
Elle est utile dans l'exploration des masses médiastinales.
4.2.6 Explorations vasculaires
La part des explorations vasculaires a considérablement diminué depuis l'échocardiographie. Elles restent nécessaires dans le cadre du bilan pré-opératoire de certaines cardiopathies complexes.
5  Neuro-radiologie
5.1 Le crâne normal
Le crâne est la seule partie du squelette où coexistent les deux types d'ossification :
- l'ossification de membrane concerne la plus grande part de la voûte et de la face. La croissance s'effectue sous la poussée cérébrale (pour la voûte) et par les tractions musculaires (pour la face).
- l'ossification enchondrale intéresse essentiellement la base.
5.1.1 Voute
5.1.1.1 Forme
Chez le nouveau-né, la forme du crâne est variable, en partie par détermination génétique, et par le modelage in utero.
5.1.1.2 Les sutures
En période néo-natale immédiate, il peut exister un chevauchement transitoire (3 à 4 jours) palpable des sutures lambdoïde et sagittale, lié à l'accommodation du crâne lors de l'accouchement. Puis les bords des sutures sont rectilignes, très faiblement minéralisés, parfois invisibles. Leur largeur est variable, pouvant être supérieure au centimètre à la naissance.
A partir de 2 mois, les bords deviennent net et commencent à se créneler, la largeur est régulière, d'environ 3 mm, puis 2 mm à partir de 1 an.

Les sutures inconstantes ou surnuméraires, pouvant simuler des fractures :
- sutures pariétales longitudinales et fissures pariétales, uni ou bilatérales, uniques ou multiples. Elles sont perpendiculaires à la suture lambdoïde et se dirigent en avant, leur longueur est variable.
- suture métopique frontale, verticale et médiane, disparition dans 90 % des cas avant la 3ème année.
- suture mendosale entre les parties membraneuses et enchondrale de l'écaille occipitale, elle persiste quelques semaines.
- synchondroses occipitales, autour du trou occipital, elles persistent jusqu'à environ 3 ans

Os surnuméraires :
- os wormiens : réalisant une mosaïque de petits os inclus dans la suture lambdoïde, ils peuvent être idiopathiques ou se recontrer dans certaines affections (trisomie 21, hypothyroïdie, dysostose cléïdo-crënienne...).
- os pariétal ou os inca, unique ou fragmenté, situé au sommet de l'occipital.
5.1.1.3 Les fontanelles
- La fontanelle antérieure ou bregma est large, losangique, au confluent des sutures coronale, inter-pariétale et métopique, fermeture entre 15 et 18 mois.
- La fontanelle postérieure ou lambda, triangulaire, se situe au confluent des sutures lambdoïde et interpariétale, elle est petite et disparait vers 2 à 3 mois. - Les fontanelles latérales sont petites :

    * antérieures ou ptériques, entre le pied de la coronale et la pariéto-temporale, fermeture vers 3 mois.
    * postérieures ou astériques, entre le pied de la lambdoïde et la pariéto-occipitale, fermeture vers 2 ans.

5.1.1.4 Aspect de la voûte

- lisse chez le nouveau-né ;
- les empreintes cérébriformes apparaissent vers 3 ans, régulièrement réparties, sont maximales vers 7 ans, diminuent et se stabilisent vers 14 ans.
Les empreintes vasculaires apparaissent entre 1 et 5 ans et prédominent dans les régions pariétales. Les granulations de Pacchioni ne sont visibles qu'à partir de 10 ans.

5.1.2 Base du crâne
Elle répond à une croissance enchondrale. Les synchondroses disparaissent pour la plupart vers 2 ans. La synchondrose sphéno-occipitale est la mieux visible (cliché de profil), elle peut persister jusqu'à 14 ans.
Chez le nouveau-né, l'absence de pneumatisation donne à la base un aspect très dense contrastant avec la faible minéralisation de la voute.

Les sinus vont se développer progressivement :

    * cellules ethmoïdales, dès la naissance ;
    * cellules mastoïdiennes, à partir des premiers mois ;
    * sinus maxillaires, à partir de 18 mois, parfois avant ;
    * sinus sphénoïdal, à partir de 3 ans ;
    * sinus frontaux, à partir de 6 à 7 ans.

La selle turcique est peu profonde à la naissance, elle se prolonge en avant par la gouttière optique, réalisant un aspect en oméga ou en J. La synchondrose inter-sphénoïdale peut être visible pendant la première année. Le canal crânio-pharyngien (persistance du trajet de la poche de Rathke) est présent chez 10 % des nouveau-nés, sous forme d'une image canalaire, à orientation antéro-inférieure, à partir de la partie la plus basse de la selle.
5.1.2.1 Anomalies de forme du crâne
Une anomalie de forme du crâne doit conduire à l'étude des différentes sutures.

- Absence d'anomalie des sutures

    * variante morphologique,
    * déformation plastique du prématuré ou du rachitisme,
    * empreinte in utero.

- Disparition d'une ou plusieurs sutures ou craniosténose
La croissance se fait à partir des autres sutures, de faìon normale ou majorée, parallèlement à la suture atteinte, aboutissant à une déformation inesthétique, spécifique de la suture atteinte ; en pratique, le grand axe du crâne indique la suture atteinte.

Signes radiologiques directs d'atteinte d'une suture :

    * bords trop nets, soulignés par un liseré dense, points de fusion partielle ; disparition totale.

Signes indirects :

    * déformation crânio-faciale,
    * développement d'impressions cérébriformes,
    * déformation de la base

5.1.2.2 Les lacunes du crâne
Elles sont assez rares chez l'enfant, le diagnostic étiologique peut être orienté par la topographie, l'aspect (taille, limites), le caractère unique ou multiple, le contexte clinique et l'association à d'autres lésions.

Exemples :
- Lacunes pariétales para-médianes postérieures :  foramen pariétaux le plus souvent symétriques normaux.
- Lacune à l'emporte-pièce à bords nets : granulome éosinophile.
5.1.3 Calcifications
- Normales :

    * aucune avant 1 an,
    * faux après 3 ans,
    * épiphyse après 10 ans,
    * plexus choroïdes vers 12 ans.

- Pathologiques :

    * infection (toxoplasmose, CMV),
    * tumorale (crânio-pharyngiome),
    * vasculaire (Sturge Weber),
    * phacomatose (sclérose tubéreuse de Bourneville).

5.2 Le rachis normal
Evolution morphologique des vertèbres - aspects radiographiques principaux
    - Les vertèbres du nouveau-né ont une forme rectangulaire ou ovalaire.
- La densité osseuse est importante.
- Une bande claire verticale, ou synchondrose (®) sépare le corps vertébral de l'arc postérieur.
- Les disques intervertébraux sont très hauts, preque autant que la hauteur d'un corps vertébral.
    - Le bord antérieur est marqué par l'encoche artérielle (Þ).
- Le bord postérieur est marqué par l'encoche veineuse moins profonde(®).
- La fente vasculaire qui relie ces 2 encochesest plus ou moins large.
Ces structures correspondent inter-protovertébraux (cf. embryologie).
    - Un aspect d'os dans l'os est habituel dans le premier mois.
- Il correspond à une densité plus grande dans le centre du noyau d'ossification du corps vertébral par rapport à sa périphérie.
    Chez l'adolescent et parfois chez l'adulte, peuvent se retrouver :
- la fente vasculaire , ou fente de Hahn, parfaitement délimitée par une corticale nette (Þ),
- les encoches antérieures et postérieures.

6-7 ans : apparition de déformations antérieures en marche d'escalier correspondant aux listels ou anneaux cartilagineux.

Vers 12 ans : ossification des listels cartilagineux qui deviennent les listels ou anneaux osseux.
    Vers 14-18 ans, les listels marginaux fusionnent avec les corps vertébraux.

La largeur du canal rachidien évolue en fonction de l'âge. Différentes tables de références ont été établies :

    * sur l'incidence de profil : pour le rachis cervical ;
    * sur l'incidence de face : pour les segments dorsaux et lombaires.

Au niveau lombaire, le canal s'élargit progressivement de L1 à L4.
Particularités au niveau du rachis cervical
 
   

- Dans la période néonatale, l'arc antérieur de l'atlas est souvent invisible, n'étant pas encore ossifié.

- On observe une ligne claire, transparente, horizontale : synchondrose unissant le corps et la base de l'odontoïde. Elle disparaît vers 5 ans.
   

Entre 2 et 5 ans apparaît un noyau d'ossification secondaire qui formera le sommet de l'odontoïde : c'est l'ossicule de Bergman.

(Cet ossicule correspondrait au corps du proatlas). Il fusionne avec le corps de l'odontoïde vers 10-12 ans.
    Chez l'enfant, la position très haute de l'arc antérieur de l'atlas chevauchant le sommet de l'odontoïde doit être considérée comme normale jusqu'à 7 ans.
   

Pseudo luxation de C2 sur C3 :
Cet aspect est particulier à l'enfant jusqu'à 7-8 ans.
2 à 3 mm de décalage entre C2 et C3 sont possibles.
La ligne cervicale postérieure de Swischuk* permet de différencier cette pseudo luxation d'un aspect pathologique.
C'est la ligne qui unit les corticales antérieures des arcs postérieurs de C1 et C3.

* Swischuk L.E. Emergency radiology of the acutely ill injured child. The Williams and Wilkins company, Baltimore, 1979.

Normalement elle est soit tangente à la corticale antérieure de l'arc postérieur de C2... soit elle traverse cette corticale...
   

... soit elle passe à moins de 1 mm en avant.

En cas de luxation pathologique C2/C3, la ligne de Swichuk coupe l'arc postérieur de C2 en arrière de sa corticale antérieure.
   

En cas de fracture des pédicules de C2, la ligne de Swichuk passe à plus de 2 mm en avant de la corticale antérieure de l'arc postérieur de C2.
    Chez l'enfant le diastasis atlo-axoïdien doit être considéré comme normal jusqu'à 5 mm dans les premières années.
   

Parties molles prévertébrales : doivent être mesurées en inspiration et en extension.

* de C1 à C4 : valeur de la moitié d'un corps vertébral. a = b/2

* de C4 à C7 : valeur d'un corps vertébral . a' = b'
5.3 Système nerveux central
Le cerveau et la moëlle épinière, enfermés dans des structures osseuses, ne sont pas accessibles à l'examen clinique direct et nécessitent toujours un examen instrumental.

L'échographie est réalisée chez le nouveau-né et le nourrisson.
Les deux autres grandes approches neuro-radiologiques -la T.D.M. et l'I.R.M.- sont extrèmement productives, mais elles impliquent toutes deux, une immobilité totale et donc, chez l'enfant jeune, une sédation dont les modalités dépendent de l'appréciation de chaque équipe.
5.3.1 Echographie transfontanellaire
Elle ne nécessite aucune sédation, elle est utilisable en toute circonstance, sans déplacer l'enfant, aussi longtemps que les fontanelles ne sont pas fermées (9 mois). La qualité de l'examen diminue au fur et à mesure que les dimensions de la tête s'accroissent et que les fontanelles se ferment.
5.3.1.1 Par la fontanelle antérieure

L'échographie se conduit comme un examen clinique : il faut réaliser un certain nombre d'images selon les plans de base, que l'examinateur complète en fonction de la clinique et de ses constatations en cours d'examen. Utilisant une sonde de 7,5 ou de 5 Mhz, il doit explorer :

    * un plan sagittal médian passant par la fissure inter-hémisphérique (gyration médiane), le corps calleux, le troisième ventricule, ses récessus et la région para-sellaire, le tronc cérébral, l'aqueduc et le quatrième ventricule, le vermis, la grande citerne et le trou occipital.

   

Coupe sagittale médiane.

    * un plan para-sagittal oblique de chaque côté, passant par la partie haute des hémisphères, les ventricules latéraux, les noyaux gris centraux avec, d'avant en arrière, la tête du noyau caudé, le sillon thalamo-caudé, le noyau lenticulaire et le thalamus flanquant la capsule interne, le carrefour ventriculaire et le plexus choroïde, la corne temporale et l'ensemble des structures choroïdiennes et hippocampiques.

   

Coupe parasagittale.

    * un plan sagittal latéral de chaque côté, étudiant pour l'essentiel, la région insulaire et ses vaisseaux.
    * un plan coronal antérieur, passant par les lobes frontaux, les cornes frontales, les toits orbitaires et la fissure inter-hémisphérique antérieure.

    * un plan coronal intermédiaire antérieur étudiant la convexité cérébrale, les cornes frontales, les foramens inter-ventriculaires de Monro, le 3ème ventricule et la région supra-sellaire avec le polygone de Willis et ses branches, les vallées sylviennes, les régions insulaires et les striatums.

   

Coupe coronale moyenne passant par les trous de Monro.

    *
      un plan coronal intermédiaire plus postérieur, étudiant la convexité, les corps ventriculaires, le corps calleux, le 3ème ventricule, le tronc cérébral et latéralement, les citernes choroïdiennes et les régions insulaires.
    *
      un plan coronal postérieur passant par les carrefours ventriculaires et les plexus choroïdes.

   

Coupe coronale postérieure passant par les carrefours ventriculaires. (V) vermis, (Pc) plexus choroïdes, (cc) corps calleux.
5.3.1.2 L'échogénicité des structures encéphaliques est relativement monotone :
- les liquides sont anéchogènes,
- le parenchyme cérébral présente une échogénicité variable selon sa texture et selon l'orientation par rapport à la sonde des fibres et des vaisseaux.

    * vu par la grande fontanelle, le tronc cérébral est très échogène dans sa partie antérieure (fibres transverses ou croisées) et peu échogène dans sa partie postérieure (fibres longitudinales).
    * la substance blanche périventriculaire est plus échogène en coupes coronales qu'en coupes sagittales.

Toute modification de la texture tissulaire (sang, oedème, nécrose, tumeur charnue) apparaît sous forme d'une hyperéchogénicité doit être vue selon les deux plans de coupe.

L'étude vasculaire peut se faire par l'échographie Doppler pulsé qui apparaït prometteuse pour l'étude fonctionnelle de la circulation cérébrale. Par la fontanelle antérieure, plusieurs vaisseaux peuvent Étre étudiés : artère cérébrale antérieure en avant du genou du corps calleux, artère carotide interne à la sortie du canal carotidien, tronc basilaire en avant du tronc cérébral et artère cérébrale moyenne dans la vallée sylvienne. On détermine par Doppler, les vélocités absolues durant la systole et la diastole et surtout l'indice de résistance ou indice de Pourcelot. Chez l'enfant à terme, la valeur normale de cet indice est de 0,70 à 0,05 ; il est plus élevé chez le prématuré. 
5.3.2 Tomodensitométrie (T.D.M.)
5.3.2.1 Technique :
- Elle peut être réalisée en coupes axiales ou en coupes quasi coronales, sur l'extrémité céphalique.
- Chez le tout petit, la faible absorption des rayons par la voûte (fine et faiblement minéralisée) doit faire utiliser un programme d'examen incluant des paramètres de correction.
5.3.2.2 Aspect normal :
- chez le nouveau-né à terme :

    * l'anatomie est peu différente de l'anatomie classique ; seule la partie antérieure de la citerne insulaire est plus large en raison de l'inachèvement de l'opercule frontal ;
    * la densité parenchymateuse est moindre en raison du défaut de myélinisation à cet âge et de la grande hydratation du parenchyme. Les mesures de densité doivent être comparatives et non pas absolues, l'étalonnage des machines étant fait pour des têtes "adultes".

- chez le prématuré :

    * l'anatomie cérébrale dépend du degré de maturation : à 28-semaines de vie foetale, les sillons de deuxième ordre commencent seulement à être reconnaissables ; les cavités ventriculaires sont relativement plus larges que celles de l'enfant à terme ; le cavum du septum persiste jusqu'après la naissance.
    * compte tenu de l'hypodensité cérébrale (90 % d'eau contre 75% chez l'adulte), les structures durales et les sinus veineux dure-mériens, apparaissent relativement hyperdenses.

Si le volume cérébral est d'environ 350 ml à la naissance (à terme), il a presque atteint son volume définitif à l'âge de 4 ans (fermeture des sutures). L'examen T.D.M. est très utile pour l'exploration de l'étage sus-tentoriel (calcifications, lésions hémorragiques) et, avec une technique appropriée, pour l'étude de la base (rochers) ; il est en revanche insuffisant pour l'exploration du tronc cérébral et de la fosse postérieure et encore plus pour l'étude du canal rachidien, du moins sans opacification
5.3.3 Imagerie par résonance magnétique (I.R.M.)
Cette technique est en passe de remplacer, pour l'étude du système nerveux central, la T.D.M. Sa sensibilité permet une étude poussée de la morphologie cérébrale et médullaire, et l'analyse des divers compartiments de substance grise (cortex, noyaux profonds). L'accès à tous les plans de coupe permet une étude anatomique plus complète que par T.D.M.

- Il est possible d'apprécier le développement de la myélinisation depuis la naissance jusqu'à son apparence mature vers l'âge de 18 mois, ainsi que ses anomalies.

La myélinisation corticale est apparente chez le nouveau-né dans les régions hippocampiques, occipitales et rolandiques. De là, elle s'étend en tâche d'huile pour se compléter en quelques semaines.

La myélinisation de la substance blanche se fait d'abord faisceau par faisceau :

    * tronc cérébral dès la naissance,
    * radiations optiques et capsule interne entre 2 et 4 mois,
    * corps calleux vers 8 à 10 mois,
    * le processus se déroulant de la moëlle vers les hémisphères et là, de l'arrière vers l'avant jusqu'à son achèvement vers 15 - 18-mois.

- L'étude des structures de la ligne médiane est fondamentale en I.R.M. : corps calleux, région hypo-thalamo-hypophysaire, région pinéale, fosse postérieure et tronc cérébral.
- La moëlle est parfaitement analysable depuis le trou occipital jusqu'à sa terminaison en regard de L1 (quel que soit l'âge).

A côté de ces trois méthodes fondamentales, les autres approches neuro-radiologiques ont vu leur rôle se réduire, ou bien disparaitre.

- l'angiographie reste nécessaire dans la pathologie vasculaire,
- la myélographie couplée à la T.D.M. est utile dans certaines indications limites de l'I.R.M. au niveau médullo-rachidien (scolioses en particulier).

 

Des ouvrages de références sont la base de ce résumé :
1. Abrégé de Radio-Pédiatrie, Ph. DEVRED, MASSON
2. Le squelette normal de l'enfant, M. LABRUNE, GUERBET

Le prématuré
D. Oriot

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 2 mars 1999

1 Définition
2 Incidence de la prématurité
3 Etiologies
4 Affirmer la prématurité
5 Physiopathologie
6 Aspect clinique
   

7 Pathologies du prématuré
7.1 Pathologie des premiers jours
7.2 Pathologie tardive
8 Mortalité et morbidité
9 Perspectives d'avenir
1 Définition
- enfant né avant 37 SA révolues,
- il existe une grande hétérogénéité : prématuré eutrophique et prématuré hypotrophe ; prématuré < 28 SA, de 28 à 32 SA et de 33 à 36 SA ;
- la mortalité et la morbidité sont plus importantes chez le prématuré que chez le nouveau-né à terme.
2 incidence de la prématurité
- variable selon les pays, les régions et les conditions socio-économiques.
- en France en 1980 : 5,6% contre 2,5% en Finlande et en Suède.
- dans la région Poitou-Charentes, l'incidence de la prématurité est passée de 6,8% en 1981 à 4,8% en 1988.
- la majorité des prématurés ont entre 33 et 36 SA ; les enfants de terme < 32 SA représentent 1,4 % de l'ensemble des naissances.
3 Etiologies
3.1 Les plus fréquentes :
- grossesses multiples qui sont en augmentation depuis la procréation médicalement assistée : grossesses induites et FIVETE. Elles représentent 10 à 20 % des menaces d'accouchement prématuré.

- RCIU : associé ou non à des malformations foetales.

- anomalies utéro-placentaires : béance cervico-isthmique, malformation utérine, insuffisance placentaire, placenta praevia, hydramnios.

- toxémie gravidique et HTA incontrôlée.

- infections génito-urinaires (streptocoque B, E. Coli) ou généralisées (grippe, rubéole, CMV, toxoplasmose, listériose,...).

- facteurs favorisants :

    * âge < 18 ans ou > 35 ans,
    * tabagisme,
    * multiparité,
    * mauvaises conditions socio-économiques : fatigue liée au travail professionnel ou familial, déplacements quotidiens, position debout prolongée, surmenage...

Papiernick a établi un Coefficient de Risque d'Accouchement Prématuré (CRAP) rassemblant plusieurs de ces éléments.
3.2 Prématurité par décision médicale :
Il s'agit d'enfants pour lesquels le risque de poursuivre une grossesse est plus important que celui de déclencher un accouchement prématuré.

- toxémie gravidique et HTA maternelle,
- RCIU,
- diabète maternel,
- iso-immunisation rhésus,
- placenta praevia hémorragique et hématome rétro-placentaire,
- souffrance foetale aiguë.

Ces enfants représentent 20 à 30% des prématurés dans un service spécialisé.
4 Affirmer la prématurité : déterminer l'âge gestationnel
Afin de déterminer le terme d'un nouveau-né, on peut avoir recours à différents critères :
4.1 Date des dernières règles
L'existence de cycles irréguliers ou de métrorragies du 1er trimestre rendent l'estimation difficile à partir de ce seul critère.
4.2 Echographie précoce (< 12 SA) pendant la grossesse
Quand elle est réalisée, elle permet de préciser le terme avec une faible marge d'erreur.
4.3 Morphogramme
Les valeurs du P, de la T et du PC doivent être reportées sur des courbes établies sur une population de référence. Ces critères ne sont cependant pas fiables en cas d'hypotrophie ou de RCIU. Le PC, reste l'élément le plus corrélé au terme, sauf en cas de RCIU global.
4.4 Examen neurologique (Tableau II)
L'examen neurologique permet de quantifier le terme avec une assez bonne précision. Il évalue la maturation cérébrale de l'enfant sur différents critères : le tonus passif (extension des 4 membres chez les grands prématurés, flexion des membres supérieurs à partir de 34 SA, quadriflexion à 40 SA), les mouvements spontanés, les réflexes archaiques et les réflexes oculaires.

Cependant, cet examen neurologique n'est que peu contributif dès qu'il existe une pathologie interférant avec l'examen lui-même ou bien une atteinte neurologique.
4.5 Examens électrophysiologiques
EEG, potentiels évoqués visuels et auditifs peuvent donner une estimation assez précise du terme en l'absence de pathologie neurologique.
4.6 Critères morphologiques externes de Farr (Tableau I)
Ces critères ont une meilleure sensibilité que l'examen neurologique, mais ont une reproductibilité modérée. Ils s'intéressent au développement des plis plantaires, de la chevelure, du lanugo, de la position des testicules ou de l'écartement des grandes lèvres, de la consistance du cartilage de l'oreille, de l'aspect et de la consistance de la peau, de l'aspect du mamelon et de la taille de l'aréole, de la présence ou non d'un oedème et de la longueur des ongles.

Ces critères ne sont pas affectés par l'hypotrophie ni les pathologies habituelles du prématuré.

Le poids du placenta est un critère trop imprécis pour être utilisé. Les critères radiologiques (apparition des points d'ossification) sont exceptionnellement utilisés.
5 Physiopathologie
Le prématuré est caractérisé par une absence de réserves et une immaturité biologique.
5.1 Absence de réserves
C'est surtout lors du 3è trimestre de la grossesse que se constituent les réserves foetales : énergétiques (graisses, glycogène), en oligo-éléments (fer, calcium,...) en en vitamines (surtout D).
5.2 Immaturité biologique
Ceci concerne un certain nombre de grandes fonctions biologiques mais aussi certaines voies métaboliques particulières :

    * thermorégulation,
    * synthèse de surfactant,
    * automatisme respiratoire,
    * épithélium vasculaire,
    * fonctions tubulaires rénales,
    * immunité humorale,
    * immunité cellulaire,
    * synthèse de prothrombine à partir de la vitamine K,
    * glucuroconjugaison hépatique de la bilirubine,
    * synthèse d'érythropoiétine,
    * digestion des graisses.

6 Aspect clinique
Le prématuré est un petit enfant bien proportionné, au visage menu et grâcieux. Il est recouvert de vernix caséosa. Sa peau est fine et érythrosique, parfois rouge vif. Elle est douce et de consistance gélatineuse. Il existe parfois un oedème au niveau des extrémités. Le lanugo, plus ou moins important, recouvre ses épaules et son dos. L'absence de relief et la mollesse du pavillon de l'oreille, de même que l'absence de striation plantaire, la petite taille des mamelons et l'aspect des organes génitaux externes sont des critères importants de prématurité ; ils sont à comparer aux critères de maturation neurologique. Le prématuré a un tonus qui est fonction de son âge gestationnel. Le prématuré < 32 SA a des mouvements spontanés en salve.
7 Pathologies du prématuré
7.1 Pathologie des premiers jours
7.1.1 Hypothermie :
- due au déséquilibre entre une thermogénèse limitée et une thermolyse intense.

- grave quand T° < 35°C avec les risques d'hypoglycémie, d'hypertension artérielle pulmonaire (HTAP), de pathologie du surfactant secondaire et d'hémorragie péri et intraventriculaire (HPIV). L'hypotermie aggrave morbidité et mortalité.

- nécessite une prévention adaptée : chaîne de chaud depuis la réanimation en salle de naissance et le transport médicalisé jusque dans l'unité spécialisée; environnement avec une T° ambiante proche de la T° de neutralité thermique de l'enfant ; hygrométrie à 50% ; incubateur à double paroi ou tunnel ; bonnet, chaussons, couverture en plastique alvéolé ou en aluminium.
7.1.2 Respiratoire
(cf. cours sur la pathologie respiratoire du nouveau-né).

- retard de résorption du surfactant (RRLA) : surtout s'il s'agit d'un prématuré né par césarienne avant tout début de travail. Le RRLA réalise un syndrome interstitiel transitoire qui évolue en général favorablement.

- pathologie du surfactant : la maladie des membranes hyalines (MMH) est due à une insuffisance en surfactant. Elle réalise un syndrome alvéolaire. Elle nécessite toujours une ventilation mécanique et une oxygénothérapie importantes. L'inhalation de liquide amniotique clair ou méconial entraîne également l'apparition d'un syndrome alvéolaire, mais celui-ci n'est pas isolé car il existe en plus des zones atélectasiées ou un syndrome interstitiel. L'infection pulmonaire peut donner des images de syndrome alvéolaire. Enfin, il peut apparaître un syndrome alvéolaire secondaire chez un prématuré qui présentait un RRLA avec une dyspnée intense et prolongée associée à une hypoxie et une acidose ventilatoire. En effet, ces modifications humorales, peuvent à elles seules inhiber la méthyl transférase responsable de la synthèse du surfactant chez l'enfant de termes < 35 SA.

- Apnées : elles sont très fréquentes chez le prématuré < 32 SA; il peut s'agir d'apnées syndromatiques qui sont alors l'expression d'une autre pathologie (respiratoire, persistance du canal artériel, HPIV, méningite, ischémie cérébrale, métabolique, anémie, relfux gastro-oesophagien, infection, hyperstimulation vagale par des prothèses) ou bien d'apnées idiopathiques dues à une immaturité neurologique. Seules ces dernières peuvent bénéficier efficacement d'un traitement analeptique respiratoire par tri-méthyl-xanthine : caféine ou théophylline.
7.1.3 Hémodynamique
- retour en circulation foetale (RCF) : il réalise une hypoxémie réfractaire due à un shunt D ---> G par le FO et/ou le CA. Le RCF est secondaire à une hypothermie, une acidose, une hypoxie ou une hypercapnie qui augmentent les RAP. Il apparaît dès que la pression artérielle pulmonaire devient supérieure à la pression artérielle systémique et peut donc compliquer n'importe quelle pathologie respiratoire grave. Il met en jeu le pronostic vital de l'enfant et nécessite toujours une hyperventilation plus ou moins associée à un support inotrope et/ou des vasodilatateurs.

- persistance du canal artériel (PCA) : elle réalise un tableau de fuite diastolique aortique éventuellement compliquée de surcharge pulmonaire et de défaillance cardiaque, secondaire à un shunt G ---> D au travers du CA encore perméable. La cause en est un retard de fermeture du CA favorisée par l'existence d'une pathologie respiratoire initiale. Le traitement repose sur la restriction hydrique, la fermeture "chimique" du CA par l'utilisation d'indométhacine (inhibiteur des protaglandines) ou la ligature chirurgicale du CA en cas d'échec ou de contre-indication de l'indométhacine.
7.1.4 Neurologique
- hémorragie péri et intra-ventriculaire (HPIV) : elles sont retrouvées dans 15 à 50 % des cas chez les prématurés < 1500g selon les séries. Elles sont dues à la fragilité de l'endothélium vasculaire cérébral, aux troubles de l'hémostase, à l'hypothermie, à l'hypoxie ou à l'hypercapnie. Elles réalisent 4 stades évolutifs de gravité croissante : I sous-épendymaire ; II intra-ventriculaire ; III intra-ventriculaire avec dilatation ventriculaire ; IV intra-ventriculaire et intra-parenchymateux. Le pronostic neurologique est largement compromis dans les stades III et IV, mais il n'est pas toujours normal dans les stades I et II.

- leucomalacie péri-ventriculaire (LMPV) : elle touche 15 à 25 % des prématurés < 1500 g. Elle réalise une ischémie multifocale du cerveau profond due à des modifications du débit sanguin cérébral soit anténatales soit postnatales induites par un collapsus, une hypoxie prolongée, une hypercapnie, une PCA. L'évolution se fait vers une nécrose et la cavitation. Le pronostic dépend de l'étendue ou non à l'ensemble du cerveau et de l'importance de l'atteinte des zones postérieures.
7.1.5 Métaboliques
- hypoglycémie : glucose < 1,6 mmol/l (0,30 g/l) ; elle existe chez 6 à 10 % des prématurés alors qu'elle ne touche que 0,3 % des nouveau-nés globalement. Elle est due à un excès de dépenses (thermorégulation et respiration), à de trop faibles réserves (stock de glycogène) et l'immaturité de la néoglucogénèse. Sa symptomatologie est très diversifiée (trémulations, apnée, cyanose, refus du biberon, insuffisance respiratoire, convulsions, hypothermie, accès de pâleur, troubles du tonus) mais ne doit en aucun cas être attendue avant de mettre en route un apport précoce de glucose : en gavage gastrique continu pour les enfants proches du terme et exempts de pathologie particulière, sinon par perfusion d'une solution de sérum glucosé à 10 % pour assurer un apport de 0,30 à 0,60 g/kg/h de glucose. La surveillance de la glycémie capillaire par DestrostixÒ doit être systématique pour tout prématuré dès la salle de naissance. Toute hypoglycémie méconnue ou non traitée est grevée de lourdes séquelles neurologiques. En cas d'hypoglycémie, il faut pratiquer une injection IV de 3 à 4 ml/kg de sérum glucosé à 10 % suivie d'un relais par une perfusion IV continue assurant des apports de 0,30 à 0,60 g/kg/h de glucose.

- hyponatrémie : Na < 130 mmol/l ; elle est due à une immaturité tubulaire avec fuites urinaires sodées et à l'insuffisance hormonale et/ou inactivité sur le tubule. Elle réalise une rétention hydrique dans le secteur interstitiel. C'est la raison pour laquelle, l'apport hydrique initial doit être restreint.

- hypocalcémie : modérée si < 2 mmol/l, sévère si < 1,75 mmol/l ; elle est due à l'action de la calcitonine (sollicitée par les hormones glucoformatrices), à l'hyperphosphorémie initiale, à la carence en vitamine D maternelle et à la privation du Ca maternel. Elle touche dans sa forme modérée plus de 50 % des prématurés. Elle entraîne une hyperexcitabilité avec trémulations et hypertonie, mais parfois dans les cas les plus graves, des convulsions, cyanose, apnées, vomissements, oedèmes, cardiomégalie, tachycardie, troubles ECG (allongement du segment QT). Le traitement repose avant tout sur la prévention par un apport précoce de calcium (0,3 g/kg/j) et de vitamine D (1500 u.i./j). Devant une hypocalcémie vraie, la supplémentation calcique doit être majorée de 1000 à 1500 mg/m2/j de calcium élément en IV puis per os en association à la vitamine D. Devant des troubles neurologiques ou cardiaques graves, il faut pratiquer une injection IV très lente de chlorure de calcium à la dose de 10 à 20 mg/kg/j.
7.1.6 Susceptibilité aux infections
- le prématuré est un être immuno-déprimé dans la mesure où il a une carence en C3, en IgA, en IgM, en macrophages et en lymphocytes actifs. Il existe d'autre part une altération de tous les stades de la lutte anti-infectieuse.

- ceci explique la gravité évolutive des infections materno-foetales et les concepts thérapeutiques que l'on doit adopter face à toute suspicion d'infection materno- foetale.

- les infections nosocomiales touchent environ 30 % des prématurés. Elles sont d'autant plus fréqentes que l'enfant est prématuré et qu'il a des prothèses (sonde d'intubation, cathéter,...).

- toute anomalie survenant chez un nouveau-né doit faire évoquer en premiere intention une infection.

- la prévention des infections nosocomiales repose sur des éléments architecturaux et de fonctionnement des unités de néonatologie et de réanimation : box individuel, nettoyage quotidien, stérilisation entre chaque malade, circuits différenciés entre le "propre" et le "sale". D'autre part, l'asepsie des soins est fondamentale : lavage des mains avant et après chaque soin, port d'une sur-blouse spécifique à l'enfant lors des soins, utilisation de matériel à usage unique, asepsie chirurgicale pour l'introduction des prothèses endo-vasculaires.
7.1.7 Hépatologique
- hypovitaminose K1 : elle induit une hypoprothrombinémie avec un risque hémorragique important. Sa prévention repose sur l'injection systématique à tout nouveau-né de 3 à 5 mg de vitamine K1 dans la première heure de vie.

- ictère : il touche plus de 80 % des prématurés ; il est dû à une faible glucuroconjugaison hépatique de la bilirubine associée à d'autes éléments : taux d'albumine bas, hypoglycémie, cycle entéro-hépatique déficient, éventuelle collection sanguine localisée. Son risque est une encéphalopathie : l'ictère nucléaire. Sa prévention repose sur la surveillance répétée du taux de bilirubine et la mise sous photothérapie.
7.1.8 Hématologique : l'anémie précoce
- elle est due à un défaut de synthèse et/ou de réponse à l'érythropoiétine, à la faible masse globulaire du prématuré, à sa croissance rapide et aux prélèvements sanguins.
- le nadir se situe vers 4 à 8 semaines de vie pour atteindre ensuite un plateau vers 3 à 4 mois.
- le traitement repose sur les transfusions sanguines ; l'érythropoiétine obtenue par génie génétique est à l'essai.
7.1.9 Digestive
- résidus gastriques et syndrome de stase duodéno-pylorique : ils réalisent une intolérance digestive transitoire à la quantité et/ou à l'osmolarité du lait introduit dans l'estomac. Un repos digestif de 24 à 48 heures suivi par une réintroduction très progressive suffisent généralement.

- syndrome du bouchon méconial : c'est une occlusion néonatale due à une immobilité du méconium dans le côlon gauche. Le thermomètre ou le toucher rectal peuvent permettre de lever cet obstacle. Parfois, ce n'est que le lavement à la GastrografineÒ qui fait le diagnostic et le traitement. Il convient néanmoins de rechercher une mucoviscidose ou une maladie de Hirschsprung.

- entérocolite ulcéro-nécrosante (ECUN) : elle touche 1 à 3 % des prématurés (surtout < 32 SA) et 10 à 25 % de ceux avec insuffisance respiratoire ; elle est due à plusieurs facteurs plus ou moins associés : ischémie mésentérique, pullulation microbienne intra-luminale, hyperosmolarité digestive. Elle réalise un tableau d'occlusion avec péritonite et infarctus mésentérique dans un contexte d'infection généralisée. Le pronostic vital et fonctionnel sont en jeu. Le diagnostic est confirmé par la mise en évidence d'air extra-luminal : pneumatose pariétale, périportale, pneumopéritoine. Le traitement repose toujours sur une prise en charge ventilatoire, hémodynamique, nutritionnelle, une antibiothérapie adaptée. Les formes les plus graves nécessitent une prise en charge chirurgicale.
7.2 Pathologie tardive
7.2.1 Anémie tardive
- elle est d'origine carentielle : faibles réserves en fer et en folates qui se constituent lors du dernier trimestre de la grossesse.
- sa prévention repose sur la prescription systématique de fer et de folates lors de la sortie de l'unité de néonatologie.
7.2.2 Rachitisme
- il est d'abord dû à une hypophosphorémie et à une hypocalcémie qu'il convient de corriger par une supplémentation adaptée.
- il s'y associe une carence en vitamie D qui doit être traitée et prévenue par l'apport systématique de 1500 u.i./j de vitamine D à tout nouveau-né.
8 Mortalité et morbidité de la prématurité
Un certain nombre de données sont actuellement disponibles pour apprécier le pronostic des prématurés.
8.1 Evolution globale
- Chez les < 32 SA et/ou < 1500 g (POPS, n = 1338, Lancet 1991)

    * mortalité : 30 %
    * séquelles majeures : 20 %
    * séquelles mineures : 35 %
    * normaux : 15 %

- 40 % des survivants ont besoin d'une éducation spécialisée.
8.2 Facteurs influençant la mortalité
- la mortalité est une fonction inverse de l'âge gestationnel : 100 % à 22 SA et 30 % à 28 SA (Working Group on Very Low Birth Infants. 4 pays n = 910, Lancet 1990).
- critères de survie chez le prématuré, par ordre décroissant :

    * âge gestationnel plus grand,
    * poids de naissance plus élevé,
    * fille,
    * grossesse singleton

(Phelps, Society of Pediatric Research, Anaheim 1990).
8.3 Facteurs influençant la morbidité :
- le pourcentage de séquelles majeures est indépendant du terme (POPS, n = 1338, Lancet 1991)
- éléments favorisant les séquelles : HPIV, PCA, poids < 750g et durée de ventilation (Koons, n=73 et P < 1000 g, Society of Pediatric Research, Anaheim 1990).
8.4 Séquelles :
- données générales chez les < 32 SA et/ou < 1500 g (POPS, n = 1338, Lancet 1991).
 
Type de séquelles
   
TOTAL
   
Séquelles majeures
   
Séquelles mineures
Pschycomotrices
Visuelles
Auditives
Langage
Respiratoires    
45 %
28 %
6 %
10 %
27 %
   
17 %
2 %
2%
20 %
1 %
   
28 %
26 %
4 %
20 %
26 %
 
- fibroplasie rétro-lentale :

    * < 1500 g : 50 % dont 2 % de cécité (édito, Lancet 1991)
    * 1000-1500 g : 0,5 % de cécité (édito, Lancet 1991)
    * < 1000 g : 8 % de cécité, 7 % de déficit visuel mineur, 85 % normaux (Koerner, 26 centres, n= 1634 et P < 1000g VLBWI Symposium, Zurich 1989).

- bronchodysplasie pulmonaire :

    * > 1500 g : 5 %
    * < 1500 g : 20 %
    * < 1000 g : 50 %
    * < 700 g : 90 %

(Bancalari, VLBWI Symposium, Zurich 1989).

- HPIV :

Une étude récente montre que les stades I et II ne sont pas anodins. 38 prématurés avec un P < 1500 g, une HPIV de stade I ou II et un examen normal à 1 et 2 ans, ont été revus à 6 ans ; ils présentaient des difficultés d'apprentissage, de langage, de lecture et de coordination de façon significativement plus importante que les nouveau-nés à terme auxquels ils avaient été appariés à l'âge de 1 et 2 ans (Lowe, n=38, P w 1500 g, AJDC 1990).
9 Perspectives d'avenir
- réduction des causes de la prématurité par amélioration des conditions socio- économiques et maîtrise des grossesses multiples.
- dépistage des menaces d'accouchement prématuré : fibronectine cervico-vaginale.
- extension du monitoring non invasif du prématuré : pH continu, tonométrie.
- respirateur et incubateur asservis par des rétro-contrôles informatiques.
- utilisation thérapeutique des protéines du surfactant en complément du surfactant exogène : protéine A
- manipulation pharmacologique des résistances artérielles pulmonaires : NO.
- mesure du débit et du volume cérébral : NIRS (near infrared spectroscopy).
- érythropoiétine recombinante en traitement préventif.
L'hypotrophe
D. Oriot

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 2 mars 1999

1 Définition
2 Incidence
3 Etiologies
4 Conduite à tenir
5 Physiopathologie
   

6 Aspect clinique
7 Pathologies du RCIU
8 Mortalité et morbidité
9 Perspectives d'avenir
1 Définition
- nouveau-né dont le P < 10è percentile pour le terme
- hypotrophie sévère si P < 3è percentile
- RCIU si P et T < 10è percentile
- hétérogénéité :

    * RCIU à terme et RCIU prématuré
    * RCIU partiel portant sur le P, P+T et global : P+T+PC

2 Incidence
- par définition : 10 % des naissances
- nouveau-nés de P < 2500 g : 6-8% dans les pays occidentaux contre 24% dans les pays en voie de développement (malnutrition).
3 Etiologies
3.1 les plus fréquentes
- 35 % : syndrome vasculo-rénal,
- 10 % foetopathies infectieuses : CMV, rubéole, toxoplasmose, syphilis, parvovirus B19.
- 10 % chromosomiques et géniques,
- 5 % toxiques (alcool, tabac, héroïne)
- 5 % grossesses multiples
- 4 % maladie maternelle : diabète, néphropathie, cardiopathie,
- 1 % placentaires : artère ombilicale unique, insertion vélamenteuse du cordon.
Dans 30 % des cas, la cause n'est pas retrouvée.
3.2 Malnutrition maternelle
Si l'index pondéral <1,2 il y a un risque de donner naissance à des RCIU.
4 Conduite à tenir
4.1 Pendant la grossesse :
- affirmer le RCIU : il est évoqué sur la hauteur utérine et la prise de poids et confirmé par l'échographie : mensurations < 10è percentile pour le terme (diamètre bipariétal, abdominal transverse, longueur du fémur, estimation du poids foetal).

- apprécier la gravité : sur la date d'apparition du RCIU (< 26 SA, entre 26 et 34 SA ou > 34 SA), le ralentissement de la croissance du PC, l'insuffisance de liquide amniotique, la vitalité foetale (rythme cardiaque foetal, mouvements actifs du foetus, doppler des artères utérines, ombilicales et cérébrales, Manning).

- rechercher une cause par l'échographie morphologique à la recherche de malformations présentent dans 15 à 18 % des RCIU. Recours éventuel à l'amniocentèse pour caryotype, la cordocentèse pour diagnostic de foetopathie, pouvant alors déboucher sur la proposition d'interruption médicale de grossesse.

- porter une éventuelle indication d'extraction foetale devant une malnutrition sévère en sachant le risque de prématurité par décision médicale, les limites d'intervention à respecter idéalement (> 31 SA et > 1000 g) et les possibilités d'évaluation de la maturité pulmonaire (L/S).
4.2 A la naissance :
- affirmer le RCIU : sur le P, la T et le PC mais aussi le pli cutané et l'index pondéral (P = 100P/T3) inférieur au 10è percentile.
- évaluer la gravité de la souffrance foetale aiguë (SFA) surajoutée
- compléter l'enquête étiologique si nécessaire.
5 Physiopathologie
5.1 Syndrome vasculo-rénal
- il est dû à une micro-angiopathie thrombotique placentaire avec déséquilibre entre TxAS et PG12 et endothéline et EDFR.
- il entraîne une baisse du transport tissulaire en O2 (TaO2)
- la baisse du TaO2 a deux conséquences sur le foetus :

    * redistribution de la perfusion vers les organes nobles longtemps préservés (myocarde, cerveau) au détriment des adipocytes, des muscles, du thymus, des surrénales du foie.
    * perturbation de la relation "croissance-différenciation" avec une maturation et une différenciation précoces après arrêt de la multiplication cellulaire.

5.2 Déficit hormonal :
- le taux de GH est normal chez les RCIU,
- il existe une baisse de l'IGF1 et de l'activité thymidine au cordon qui est une fonction directe du poids,
- on retrouve également une baisse de l'IL-1 in utéro, lors de la 1ère année et même après plusieurs années de recul au niveau de la production des macrophages.
6 Aspect clinique
Trois aspects sont rencontrés :
- le foetus "araignée" est l'aspect réalisé par un enfant à terme dont seul le P est très en deçà des normes pour le terme alors que la T et le PC sont normaux. Le nouveau-né a des membres très longs et grêles et un tronc étroit alors que la tête paraît relativement grosse avec un visage en forme triangulaire. La peau est plissée du fait de l'absence de tissu adipeux sous-cutané et de l'existence de muscles peu développés. La vigilance est présente et le tonus est en quadriflexion.
- les trois paramètres du morphogramme sont atteints (P, T et PC) donnant à l'enfant un aspect plus harmonieux mais il existe une maigreur impressionnante et un aspect fripé des téguments. La vigilance est parfaite et le tonus paraît souvent exagéré.
- l'hypotrophie porte sur les trois paramètres mais, de plus, il s'agit d'un prématuré avec son aspect extérieur caractéristique.
7 Pathologies du RCIU
7.1 Hypothermie
- elle est toujours à prévenir par la chaîne du chaud,
- le RCIU a des stocks en glycogène et en acides gras (AG) très diminués.
7.2 Respiratoire
- il existe une plus faible incidence de la MMH chez l'enfant RCIU que chez l'enfant eurtrophique pour un terme donné.
- ceci est dû à une avance de maturation de la lécithine synthétase.
7.3 Hémodynamique
- elle est fonction du terme.
7.4 Neurologique
- il existe une avance de maturation du SNC.
- la SFA est plus fréquente chez les RCIU entraînant une ischémie-anoxie qui peut retentir sur le fonctionnement de plusieurs organes : cerveau, foie.
- c'est un facteur de gravité du RCIU.
7.5 Métabolique
- hypoglycémie : touche 15 à 20 % des RCIU ; elle est due à la pauvreté des stocks de glycogène et d'AG, à une néoglucogénèse inefficace et une grande consommation par le cerveau (60% de l'énergie) et éventuellement par une masse globulaire augmentée. Elle nécessite la même attitude préventive décrite pour le prématuré.
- hypocalcémie : secondaire à l'hypoglycémie. Sa prévention est identique à celle du prématuré.
- hypoprotidémie : due à un défaut de synthèse hépatique d'albumine. Elle entraîne des oedèmes interstitiels.
7.6 Susceptibilité aux infections
La même prévention des infections s'impose de façon identique à celle développée chez le prématuré, d'autant que plusieurs facteurs plaident en faveur de certains désordres immunitaires :

    * baisse profonde de l'immunité cellulaire probablement due à une hypotrophie thymique
    * baisse de la production de certaines cytokines : IL-1.

D'autre part, le nouveau-né hypotrophe a un faible, voire une absence d'élévation de la CRP au cours des infections.
7.7 Hépatologique
- ictère : il est dû à une immaturité hépatique si le nouveau-né est aussi prématuré, mais est surtout dû à l'augmentation de la quantité d'hème induit par la polyglobulie.

- troubles de l'hémostase : ils sont présents dans 50 % des cas d'hypotrophie. Ils sont transitoires et se caractérisent par un défaut de synthèse de plusieurs éléments plus ou moins associés : fibrine, facteurs II, V, VII, X et plaquettes. Dans 10% des cas, il existe une véritable CIVD. Leur traitement est symptomatique.

- cholestase prolongée : elle existe dans 10 % des cas. Elle se traduit par la persistance des anomalies de l'hémostase associée à un ictère à bilirubine conjuguée avec une cytolyse et une insuffisance hépato-cellulaire plus ou moins marquée. Histologiquement, il s'agit d'une cholestase intense, diffuse avec nécrose centro-lobulaire alors que les vaisseaux et les canalicules biliaires sont normaux. Elle peut être prolongée jusqu'à 6 mois, mais régresse spontanément habituellement. Son existence et son intensité sont corrélées à l'importance de la SFA surajoutée.
7.8 Hématologique
- polyglobulie : hématocrite veineux > 65 % : elle touche 15 à 20 % des hypotrophes et s'associe à une érythroblastémie (> 2000/mm3). Elle est due à l'augmentation de la masse sanguine secondaire à l'hypoxie in utéro. Elle entraîne une hypoglycémie et un syndrome d'hyperviscosité sanguine associant un ou plusieurs signes suivant s: érythrocyanose diffuse, hyperexcitabilité, tachypnée, oligo-anurie, intolérance digestive, cardiomégalie. Le risque est l'ischémie multifocale due à l'hyperviscosité (convulsions, thrombose des vaisseaux rénaux, ECUN, myocardiopathie, insuffisance hépatique). Le traitement repose sur la soustraction d'un certain volume de sang (à calculer en fonction de l'hématocrite et du P de l'enfant) et son remplacement par le même volume de plasma ou d'albumine afin de ramener l'hématocrite à 50 %.
- neutropénie : elle s'associe à l'érythroblastémie et disparaît en moins d'une semaine.
- thrombopénie : elle touche 2/3 des hypotrophes. Elle est d'origine périphérique, due à la destruction splénique et à une consommation dans les sludges.
7.9 Osseuse :
- le risque de rachitisme secondaire est identique à celui d'un nouveau-né eutrophique et nécessite donc une prévention de 1500 u.i de vitamine D dès la naissance
- il n'existe pas de retard d'âge osseux en cas d'hypotrophie foetale.
7.10 Digestive et nutrition
- ECUN : le risque est d'autant plus grand que le nouveau-né est un hypotrophe prématuré avec polyglobulie.
- besoins nutritionnels : ils sont très augmentés chez l'enfant hypotrophe. Plusieurs éléments illustrent cette différence entre un prématuré eutrophique et un enfant hypotrophe (Senterre, 1987) :
1 - gain pondéral souhaité (1er mois de vie)

    * à terme, eutrophique : 10g/kg/j
    * prématuré : 15g/kg/j
    * RCIU : 20g/kg/j

2 - besoins caloriques (en cal/kg/j)
 
     
Prématuré
   
RCIU
Métabolisme de base    
60
   
70
Croissance    
20
   
20
Rattrapage    
0
   
50
Total    
80
   
140


3 - Les besoins qualitatifs sont également augmentés.
8 Mortalité et morbidité
8.1 Pronostic vital
- mortalité périnatale du syndrome vasculo-rénal : 10 à 35 %
- mortalité néonatale dans le RCIU : 10 %
- critères pronostiques :

    * intensité du RCIU
    * prématurité surajoutée
    * SFA surajoutée
    * malformations associées.

8.2 Pronostic somatique
- 100 % de rattrapage du P à 12 mois,
- 75 % de rattrapage de la T sur plusieurs années,
- 50 % de rattrapage du PC sur plusieurs années,
- valeur du PC à 6 mois comme élément prédictif du rattrapage ultérieur,
- suivi spécialisé prolongé pour le rattrapage de la taille.
8.3 Pronostic neurologique
- type et importance des séquelles chez les RCIU (Cuckier-Hemery, Port-Royal, 1987)
 
     
RCIU
   
Prématuré < 32 SA
Psychomotrices
Visuelles
Auditives
Langage
Troubles du langage    
26 %
18 %
4 %
37 %
30 %
   
25 %
28 %
6 %
40 %
-
 
- troubles du comportement très fréquents : troubles du sommeil, de l'alimentation, anorexie, agitation psychomotrice, hyperactivité, absence de concentration, difficultés d'apprentissage rendant l'intégration dans la famille et à l'école difficile.
- critères de bon pronostic neurologique (Hack, Cleveland, n= 249, NEJM, 1991)

    * absence de SFA
    * rattrapage du PC à 8 mois

9 Perspectives d'avenir
- prévention du syndrome vasculo-rénal par l'aspirine (Uzan, Tenon, n= 323, Lancet, 1991).
- lutte contre le tabac et la malnutrition,
- extension des vaccinations : ROR et CMV
- diagnostic précoce par vélocimétrie
- marqueurs de l'hypotrophie foetale
- relation "macrophage-RCIU"
- récepteurs tissulaires à IGF-1
- indications du traitement par GH.
Le post-mature
D. Oriot

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 2 mars 1999

1 Définition
2 Incidence
3 Etiologies
4 Physiopathologie
   

5 Aspect clinique
6 Pathologies
7 Mortalité et morbidité
Conclusion
1 Définition
- enfant né après 42 SA révolues.
- l'hypotrophie est souvent associée à la post-maturité car la prolongation de la grossesse entraîne une réduction du gain pondéral.
2 Incidence
- elle était d'environ 5 % il a quelques années,
- la surveillance obstétricale de la fin de la grossesse devrait pouvoir permettre d'éviter la post-maturité.
3 Etiologie
- elle est totalement inconnue.
4 Physiopathologie
- la prolongation de la grossesse au-delà de 42 SA aboutit à une insuffisance placentaire.
- il en découle une baisse du TaO2 placento-foetal et une diminution des apports nutritifs.
- le risque est double :

    * celui de la souffrance foetale aiguë (SFA) pouvant aboutir à l'extrême : à une mort in-utéro ou à une ischémie-anoxie néonatale sévère par insuffisance placentaire et/ou par inhalation méconiale avec ses conséquences neurologiques.
    * celui de l'hypotrophie et du défaut de réserves constituées en fin de grossesse, donnant une hypoglycémie néonatale précoce.

5 Aspect clinique
Le revêtement cutané du post-mature est très particulier : peau pâle, craquelée, desquamante et sans vernix caséosa ni lanugo. Une coloration verdâtre est possible par imprégnation méconiale qui est visible également sur le cordon. Le panicule adipeux sous-cutané est réduit. Les ongles et les cheveux sont longs. En l'absence de pathologie neurologique grave, le regard est très éveillé avec des yeux grand ouverts attestant d'une maturation de la vigilance. L'enfant a une position quadrifléchie identique à celle d'un nouveau-né à terme.
6 Pathologies
6.1 Inhalation méconiale
- elle est plus fréquente chez le post-mature du fait de la conjonction de la SFA (et donc de l'émission de méconium) et du déclenchement de mouvements respiratoires in utéro.
- elle nécessite une réanimation adaptée en salle de naissance avec aspiration première des voies aériennes inférieures avant toute ventilation.
- elle doit être prévenue par une collaboration obstétrico-pédiatrique permettant d'aspirer le pharynx dès la sortie de la tête à la vulve, puis de poursuivre l'aspiration sous laryngoscope dès que l'enfant est sorti.
6.2 Ischémie anoxie cérébrale
- elle est due à l'insuffisance placentaire anténatale qui peut être éventuellement aggravée par une inhalation méconiale,
- elle nécessite une prise en charge adaptée à la naissance,
- l'importance de l'acidose métabolique associée, est un facteur de mauvais pronostic.
6.3 Hypoglycémie
- elle est aggravée par la SFA,
- le contrôle de la glycémie capillaire doit être fait systématiquement dès la naissance et la prévention assurée par l'apport d'une solution glucosée à 10% (I.V ou per os) dès les premières minutes de vie.
Les différentes pathologies de l'hypotrophie peuvent s'associer à celle de la post-maturité.
7 Mortalité et morbidité
7.1 Mortalité
- la mortalité périnatale est deux fois plus élevée que pour l'enfant à terme. Elle devient quatre fois plus élevée si le nouveau-né est hypotrophe.
- la mortalité post-néonatale est également augmentée.
7.2 Morbidité
- elle est plus élevée que celle du nouveau-né à terme du fait d'éventuelles séquelles pulmonaires et neurologiques.
Conclusion
La post-maturité peut être prévenue par un diagnostic précis du terme en début de grossesse et la surveillance étroite de la fin de la grossesse de façon à porter à temps les indications d'un déclenchement de l'accouchement ou d'une extraction du foetus s'il existe une menace vitale.
Adaptation du nouveau-né à la vie extra-utérine
C. Le François

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 2 mars 1999

La naissance est certainement le moment le plus dangereux de la vie ! En effet, pendant 40 semaines le foetus a été complètement dépendant de sa mère et brutalement il doit se prendre en charge et s'adapter à une vie extra-utérine totalement différente.

Les deux premiers problèmes qu'il devra résoudre en urgence et réussir sans faille sont :

    * son démarrage ventilatoire,
    * et son adaptation circulatoire, couple indissociable.

Son aération pulmonaire doit être rapide et durable associée à la chute des résistances capillaires pulmonaires.

Pour réussir une aération rapide de son poumon, le nouveau-né doit posséder une maturité pulmonaire suffisante, une commande ventilatoire en bon état, un appareil musculaire normal. La maturité pulmonaire anatomique et biochimique n'est bien établie qu'après 35 semaines d'aménorrhée après la phase de maturation alvéolaire permettant le maximum d'échanges gazeux entre l'alvéole et le sang des capillaires. Le liquide pulmonaire, sécrété dès la 17e semaine, excrété pour la plus grande partie dans la cavité amniotique et réabsorbé pour l'autre part par les lymphatiques et les capillaires pulmonaires, favorise le développement des alvéoles pulmonaires à partir des structures initiales.
A la naissance, après l'expulsion du liquide alvéolaire par les voies aériennes favorisée par la compression thoracique, l'aération rapide des poumons se fait grâce à l'ouverture du "parachute pulmonaire" sous l'influence des stimuli physiques et gazométriques. Cette inflation pulmonaire permet l'érection des capillaires pulmonaires et la chute des résistances pulmonaires qui entraîne immédiatement un afflux de sang au poumon (figure 1).

Figure 1 : La quantité de sang qui traverse les poumons est beaucoup plus grande lorsque les alvéoles sont pleins d'air à pression circulatoire égale.

Les dépressions nécessaires pour ouvrir les alvéoles pulmonaires à la première inspiration sont importantes. En effet, en ventilation spontanée le nouveau-né doit développer des dépression de -40 à -70 cm d'eau pour faire entrer dans son poumon un volume courant de gaz d'environ 30 ml. Il existe une pression d'ouverture pour faire parvenir le gaz dans l'alvéole et ce n'est que lorsque cette pression critique est atteinte que l'air peut pénétrer dans les alvéoles (figure 2).

Figure 2 : Courbes pression-volume, lors des deux premiers mouvements ventilatoires.
(Tiré de Karlberg et Cole, 1962).

Cette physiologie est nécessaire à connaître pour la réanimation du nouveau-né en salle de travail ou il faudra, au cours des premières insufflations, savoir appliquer des pressions positives souvent supérieures à la pression dite de "sécurité" de 30 cm d'eau. Cette inflation pulmonaire provoque immédiatement l'érection des capillaires pulmonaires.

La sécrétion de substances vasodilatatrices locales : histamine, prostaglandines, angiotensine, bradykinine et monoxyde d'azote (NO) favorise l'ouverture de ces capillaires pulmonaires et les maintient ouverts (figure 3).

Figure 3 : Chute des résistances pulmonaires : les différents facteurs mis en jeu
(AGII : angiotensine II ; EDFR : endothélial-relaxing factor ; PG : prostaglandine ; QP : débit pulmonaire).
 

 

La bonne oxygénation et la baisse immédiate de la capnie favorisent la vasodilatation capillaire, alors que l'acidose, quelle soit respiratoire ou métabolique, ainsi que l'hypoxie provoquent une vasoconstriction pulmonaire et le retour en circulation foetale (figure 4).

Figure 4 : Rôle de l'hypoxie et de l'acidose sur les résistances pulmonaires.
(D'après Rudolph A. M., J. clin. invest. 1966)

En cas d'asphyxie périnatale il faudra donc aider à l'inflation pulmonaire et lutter en premier lieu contre l'HYPOXIE et l'ACIDOSE par la prise en charge ventilatoire et l'oxygénation.

L'adaptation cardiovasculaire se produit en même temps que la mise en route ventilatoire afin de réaliser rapidement une circulation de type "adulte" après une phase transitionnelle : circulation pulmonaire à basse pression, circulation systémique à haute pression. Immédiatement après la section du cordon, le débit du ventricule gauche doit doubler, les résistances systémiques s'élèvent et le myocarde doit s'adapter à ce surcroit de travail. C'est la libération massive de catécholamines pendant l'accouchement qui permet cette adaptation.
La circulation foetale est résumée sur la figure 5

Figure 5

A la naissance les deux circulations se mettent en série avec la circulation pulmonaire à faible pression et la circulation systémique à forte pression. Il y a d'abord une circulation transitionnelle avec inversion des flux dans le CA et fermeture fonctionnelle du Foramen Ovale à cause de l'augmentation de pression dans l'oreillette gauche du fait du retour veineux pulmonaire puis une circulation Adulte après fermeture définitive des 2 schunts.
Les deux modes de circulation sont résumés sur la figure 6

 

Hémodynamique foetale
1. VO = veine ombilicale
2. CVA = canal veineux Arantuis
3. VCI = veine cave inférieure
4. OD = oreillette droite
5. FO = foramen ovale
6. OG = oreillette gauche
7. VG = ventricule gauche
8. AO = aorte
9. VCS = veine cave supérieure
11. VD = ventricule droit
12. AP = artère pulmonaire
13. CA = canal artériel
14. A. ombilicales
   
Hémodynamique Néonatale

    * Ouverture du poumon
    * Erection des capillaires pulmonaires
    * Diminution des résistances pulmonaires
    * Retour VP : veines pulmonaires
    * OG : Fermeture du foramen ovale FO
    * VG - Aorte
    * Inversion du shunt puis fermeture CA
    * Tissus - VCI + VCS ® OD ® VD ® AP ® Poumons ® VP

2 circulations en série :
- Circulation pulmonaire à faible pression
- Circulation systémique à forte pression
Fermeture des 2 shunts :
- Foramen Ovale
- Canal artériel    

Toutes ces modifications se produisent immédiatement à la naissance :

    * expulsion du liquide alvéolaire
    * inflation pulmonaire
    * chute des résistances capillaires pulmonaires grâce à leur vasodilatation
    * adaptation du coeur gauche et de la pression artérielle

Ces changements doivent être DURABLES pour obtenir une bonne adaptation à la vie extra-utérine. L'aération pulmonaire doit rester correcte et l'enfant ne doit pas refermer ses poumons à chaque expiration. C'est grâce au film liquidien qui tapisse les alvéoles et en particulier au SURFACTANT qu'il contient, que le nouveau-né peut maintenir correctement ses alvéoles ouvertes en fin d'expiration et garder un volume résiduel. Le surfactant pulmonaire est synthétisé par les pneumocytes de type II. Après la 35e semaine sa synthèse est assurée par la LECITHINE-SYNTHETASE, enzyme stable et résistante. Par contre entre 22 et 35 semaines sa synthèse est assurée par une METHYL-TRANSFERASE qui est plus fragile ; cet enzyme peut être inhibée par l'asphyxie, l'hypothermie, l'hypoperfusion pulmonaire, l'oedème pulmonaire. Le surfactant peut donc être insuffisamment fabriqué à cause d'une immaturité des pneumocytes ou désorienté ou détruit par un " stress néonatal ". Ce surfactant est constitué d'un mélange de phospholipides dont le composé principale est la dipaLmitoyl phosphatiDyl choline et de protéines qui favorisent son étalement et son orientation à la surface des alvéoles. Son rôle principal est de diminuer la tension superficielle, de permettre la création du volume résiduel pulmonaire, d'éviter les atélectasies à l'expiration, l'exsudation et l'oedème donc la création des membranes hyalines. Sa production est accélérée par les glucocorticoïdes et les hormones thyroïdiennes, base du traitement préventif de la maladie des membranes hyalines du prématuré. En cas de détresse respiratoire chez un prématuré le surfactant de remplacement doit être administré très rapidement dans une sonde d'intubation pour éviter la formation des membranes hyalines source principale d'insuffisance respiratoire néonatale du prématuré.

L'état circulatoire doit aussi rester stable et se maintenir sur un modèle adulte. Toute hypertension artérielle pulmonaire, vasoconstriction capillaire pulmonaire qui entraîne des pressions des cavités droites supérieures aux pressions gauches systémiques, entraînera en effet un Retour à la Circulation Foetale (RCF) avec shunts droit-gauche au niveau du foramen ovale et du canal artériel. L'hypoxémie sera alors majeure. Cet accident (RCF) se rencontre fréquemment au cours des détresses respiratoires du nouveau-né.

La Thermorégulation : est le troisième problème à résoudre pour le nouveau-né.
- La Thermolyse foetale se fait par le débit placentaire qui est un échangeur thermique. La température du foetus est supérieure à celle de sa mère de 0,3 à 0,8°C.
- A la naissance, la thermolyse va être très importante. Le nouveau-né arrive mouillé, son rapport surface corporelle/poids est élevé et ses pertes par évaporation, radiation, conduction, convection, se font rapidement et doivent être évitées. Il est très sensible au froid : un nouveau-né nu et exposé à 24°C baisse sa température de 0°25C par minute s'il n'est pas soumis à une ambiance lui délivrant une température proche de sa température de neutralité thermique de 32°C (nouveau-né à terme), 35°C (prématuré), 22°C (adulte).
- La thermogenèse est possible au pris d'une dépense énergétique importante. Le nouveau-né ne possède que la thermogenèse chimique (sous la dépendance des catécholamines) pour produire de la chaleur. Celle-ci s'obtient à partir des stocks glycogéniques hépatiques et des graisses brunes ; par contre, le nouveau-né n'a pas de thermogenèse musculaire (frissons ou exercice musculaire) car ses systèmes extra-pyramidal et pyramidal sont immatures.
- L'hypothermie est très délétère, elle entraîne hypoglycémie, vasoconstriction pulmonaire, baisse de la synthèse du surfactant et hémorragie péri ou intraventriculaire.
Conclusion :
C'est grâce à la meilleure connaissance de tous ces phénomènes d'adaptation que l'on peut comprendre les gestes de réanimation à faire en salle de travail au cas ou le nouveau-né aurait des difficultés d'adaptation à la vie extra-utérine ainsi que les grandes pathologies respiratoires du nouveau-né et leur prise en charge.
Réanimation en salle de travail
C. Le François

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 2 mars 1999

Un nouveau-né en difficulté dans les premières minutes de vie est presque toujours un enfant dont l'adaptation CARDIO RESPIRATOIRE à la vie extra utérine est perturbée à la suite d'une Souffrance Foetale Aigue (S.F.A) anté ou périnatale facteur d'ANOXIE-ISCHEMIE.

Cette SFA est quelquefois imprévisible, brutale mais le plus souvent elle survient dans un contexte materno obstétrical pathologique permettant de prévoir l'accident et de mieux l'appréhender :

    * Une maladie maternelle connue (diabète, lupus, hypertension artérielle, maladie cardiaque psychiatrique ...)
    * Une prise de médicaments pendant la grossesse ou un accident.
    * Une pathologie obstétricale (toxémie gravidique, Hellp syndrome, cholestase gravidique, placenta mal inséré praevia, une béance du col utérin, une rupture prématurée de la poche des eaux avec infection vaginale et chorioamniotite).
    * Une infection maternelle (infection urinaire vaginale chorioamniotite, fièvre isolée, portage de germes vaginaux).
    * Une pathologie foetale de repérage clinique ou échographique, tel un retard de croissance intra utérin, une souffrance foetale chronique.
    * Une menace d'accouchement prématuré.
    * En cours d'accouchement les accidents sont plus difficiles à prévoir car souvent brutaux : dystocie mécanique ou dynamique, métrorragies d'un placenta praëvia, hématome rétroplacentaire aigu, procidence du cordon.

Plus rarement l'enfant est atteint d'une malformation ORL - Respiratoire - Cardiovasculaire Digestive ou d'une Pathologie Neuromusculaire qui lui causent des difficultés d'adaptation.

Exeptionnellement il s'agit d'une intoxication médicamenteuse maternelle.

Enfin soulignons encore que même un accouchement qui paraît normal, peut être mal supporté par l'enfant qui peut présenter une mauvaise adaptation à la vie extra utérine et avoir besoin d'une réanimation de " démarrage ".

L'ETAT CLINIQUE de l'enfant est apprécié par le score d'APGAR. Cette "note de naissance" renseigne parfaitement sur la façon dont il a supporté son accouchement et apprécie ses capacités immédiates à adapter sa circulation et sa respiration (fréquence cardiaque - qualité de du cri - couleur) ainsi que le retentissement neurologique (tonus - réactivité) de cette naissance. Il est côté de O (état de mort) à 10 pour un bébé à terme vigoureux et sans problème.

COTATION D'APGAR
CRITERES
   
COTATIONS
   
SCORE
OBTENU
0
   
1
   
2
     
Pouls
   
0
   
100 / mn
   
+ 100 / mn
     
Respiration
Cri
   
0
   
Cri faible
   
cri vigoureux
     
Tonus
(mouvements)
   
0
   
extrémités
   
tout le corps
     
Réactivité à
l'excitation plantaire
   
0
   
grimaces
   
vive avec des cris
     
Couleur
   
bleu - blanc
   
bleu aux extrémités
   
rose sur tout le corps
     
 
   
 
 
   
 
 
   
TOTAL
     
 

Ce score doit être établi à une minute, 5 puis 10 minutes tout en entreprenant les gestes adéquates pour aider le nouveau-né à corriger l'hypoxémie, l'hypercapnie et l'acidose qu'entraîne l'asphyxie périnatale s'il y a un problème. Chez l'enfant prématuré surtout, des difficultés d'adaptation et un mauvais Apgar permettent souvent de prévoir des difficultés postnatales importantes, en particulier une détresse respiratoire, hémodynamique puis des séquelles neurologiques. Chez l'enfant à terme, une bonne réanimation entraînant une récupération rapide est de meilleur pronostic.

Quoiqu'il en soit la réanimation du nouveau-né en salle de travail, lorsque l'enfant n'arrive pas à faire correctement son adaptation à la vie extra-utérine, est parfaitement codifiée et résumée sur la pyramide des gestes à accomplir ci-jointe.
 

 
Ces gestes constituent la base de toute réanimation du nouveau-né asphyxique en salle de travail. Ils sont accomplis l'un après l'autre en fonction de la récupération du bébé, sans précipitation, ni affolement même chez un enfant de très petit poids.

Quelques situations doivent être connues pour leur adapter une thérapeutique particulière dès la salle de travail :

- le diagnostic anténatal par échocardiographie d'une hernie diaphragmatique ou sa suspicion devant des difficultés respiratoires, un abdomen plat et des bruits du coeur déviés à droite (hernie gauche la plus fréquente) contre-indiquent toute ventilation au masque et impose la mise en place immédiate d'une sonde gastrique en aspiration continue ainsi que l'intubation trachéale avant le transfert de l'enfant.

- une atrésie des choanes suspectée sur une dyspnée de type obstructif confirmée à l'aspiration nasale peut être améliorée par la pose d'une canule buccale avec oxygénation ou en cas de besoin par une intubation buccale.

- un syndrome de Pierre Robin (hypoplasie mandibulaire, fente palatine et glossoptose) nécessite en cas d'asphyxie aiguë une intubation qui peut être difficile, mais peut être améliorée par la simple pose d'une canule buccale avec oxygénation et la position ventrale en attendant le transfert. Le masque laryngé de pratique non encore courante pour la réanimation du nouveau-né pourra être utilisé en salle de travail.

- la suspicion d'une atrésie de l'oesophage : devant un bébé asphyxique, ballonné (type III) et qui mousse est une contre-indication absolue à tout apport alimentaire précoce. Elle nécessite une mise en proclive, une aspiration continue du cul de sac oesophagien supérieur avec en cas de besoin, une ventilation sur tube endotrachéal, en se méfiant du ballonnement abdominal du fait de la fistule inférieure. Le test de la seringue en confirmera le diagnostic.

- les enfants porteurs de laparoschisis ou d'omphalocèle seront transportés dans un sac stérile ainsi que les spina bifida qui n'auront pas bénéficié du diagnostic anténatal.

- l'inhalation méconiale sera prévenue en cas de post maturité, de souffrance foetale aiguë, de liquide méconiale par une aspiration à la vulve avant le dégagement des épaules ou si ce geste n'a pas été possible ou suffisament efficace par une aspiration buccale efficace, voire trachéale avant la première inspiration.

- L'infection materno-foetale en particulier à streptocoque B, à colibacilles, quelque fois à listéria est souvent présente dans tous ces cas. Il faudra la diagnostiquer et la traiter rapidement par antibiotiques après les prélèvements.

- Le pneumothorax est souvent une complication de l'inhalation ou de la rétention de liquide alvéolaire. Mais il peut aussi survenir spontanément à l'occasion des inégalités de pressions pulmonaires et du poumon inhomogène du nouveau-né. Il nécessite une oxygénothérapie voire une exsufflation ou un drainage pleural.

- La naissance d'un enfant prématuré et en particulier d'un enfant de moins de 32 semaines doit être entourée de beaucoup de précautions. Les risques de souffrance foetale aiguë, d'hypothermie, d'hypoglycémie et surtout de détresse respiratoire avec absence ou destruction du surfactant y sont très fréquents. Contrairement a ce qu'il a été préconisé il y a quelques années, l'intubation systématique des "prématurismes" (bébés de moins de 28 semaines de moins de 1 kg) ne doit pas être systématique. Beaucoup de ces enfants ont une maturité pulmonaire correcte et peuvent s'adapter à la ventilation aérienne. En cas de détresse respiratoire, une C.P.A.P. nasale peut être tentée après un démarrage au ballon - en cas d'inefficacité de ces techniques qui doivent rester les moins traumatiques possibles, une intubation trachéale avec instillation intra-trachéale de surfactant (Curosurf 200 mg/kg) puis une extubation la plus rapide possible seront pratiquée.

- en présence d'un retard de croissance intra-utérin, l'hypoglycémie est fréquente et doit être prévenue par un apport précoce de glucose soit per os en alimentation gastrique continue soit intra-veineuse par sérum glucosé 10 % avec un débit de 3 ml/kg/heure voire plus en cas d'hypoglycémie repérée au dextrostix.

- un nouveau-né de mère diabétique aura la même prévention tant l'hypoglycémie d'un hyper-insulinisme difficile à contrôler peut être fréquente et grave.

- jumeaux ou grossesses multiples sont sources de difficultés néonatales, souvent dès la salle de travail. Les syndromes transfuseur transfusé entraînant anémie aiguë pour l'un et anasarque et polyglobulie pour l'autre devront être traité en salle de travail.

- enfin, il faut connaître le retentissement de certains médicaments administrés à la mère : morphinique avec son antidote le Narcan (100 _ /kg) et les benzodiazapines neutralisés par Anexate 10 _ /kg. Les b -bloquants fréquemment employés pour diminuer la tension maternelle, entrainent bradycardies et hypoglycémie que l'on peut traiter par Isuprel (0,1 à 1_ /kg) ou glucagon (0,25 mg/kg/IV).

L'enfant ayant été mis en condition, s'il ne naît malheureusement pas dans un centre Obstétrico Néonatal, sera transferé et la médicalisation se poursuivra sans faille. Elle consiste a contacter le service d'accueil et le SMUR néonatal, à réunir les documents obstétricaux, à constituer le dossier pédiatrique, à informer les parents, à leur présenter leur bébé, à leur faire signer l'autorisation de soins, à prélever le placenta et un échantillon de sang maternel (10 ml sur tube sec et 5 ml sur anticoagulant). A aucun moment, il ne faudra interrompre la "chaine du chaud", de l'oxygène, du maintien hémodynamique, de l'apport glucosé pendant le transfert.

La prise en charge correcte d'un nouveau-né en difficulté dès la salle de travail est très importante. Bien souvent elle permet d'éviter les pathologies néonatales ultérieures et met l'enfant à l'abri des séquelles neurologiques graves après une anoxie ou une ischémie périnatale.

Par contre un nouveau-né qui va bien, après clampage et section du cordon, sera délicatement séché sur table chauffante, aspiré doucement de façon atraumatique ce qui permettra de vérfier la perméabilité des choanes et la perméabilité oesophagienne. Un examen rapide éliminera une malformation non diagnostiquée aux examens anténataux ou une pathologie débutante. Puis l'enfant sera pesé, recera 2 mg de vitamine K pour prévenir la maladie hémorragique aura une désinfection oculaire. Il sera habillé et rendu à l'amour de ses parents.

Détresses respiratoires du nouveau-né et cardiopathies à révélation néonatale
C. Le François

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 5 mars 1999

1 Analyse clinique
1.1 Anamnèse
1.2 Clinique
1.3 Analyse radiologique
1.4 Gaz du sang
1.5 Echocardiographie
   

1.6 Bilan biologique
2 Etiologies des insuffisances respiratoires
2.1 Les maladies pulmonaires
2.2 Les obstructions hautes
2.3 Les causes chirurgicales
2.4 Les causes cardiovasculaires

Pathologie la plus fréquente de la période néonatale, facteur de mortalité et de morbidité, la détresse respiratoire du nouveau-né nécessite une démarche logique qui passe par :

    * une analyse clinique,
    * une analyse radiologique,
    * une analyse gazométrique,
    * des échocardiographies.

aboutissant à un diagnostic étiologique et une conduite pratique.
Indépendamment de toute cause, l'insuffisance respiratoire du nouveau-né est dangereuse par l'hypoxémie, l'acidose mixte qu'elle entraîne et les troubles hémodynamiques qui lui sont souvent associés.
Soulignons tout de suite la fragilité et la fatigabilité d'un nouveau-né en insuffisance respiratoire d'autant qu'il s'agit souvent d'un enfant prématuré, chez qui l'aggravation peut être brutale d'où la nécessité d'une surveillance constante.

Tout nouveau-né en insuffisance respiratoire est en danger de mort.
1 L'ananalyse clinique comporte :
1.1 L'anamnèse (elle va permettre de suspecter l'étiologie de la détresse respiratoire) :
Etude de la grossesse :

    * pathologies maternelles en particulier : diabète, toxémie, infections
    * traitements
    * résultats des échographies et des examens obstétricaux, notion d'hydramnios.

Terme :

    * prématurité (détresse respiratoire d'autant plus fréquente que l'enfant est plus prématuré)
    * bébé à terme (³ 37 s.)
    * post maturité (> 41 s.), (facteur de souffrance foetale aiguë).

Etude de l'accouchement :

    * qualité et quantité du liquide amniotique (notion hydramnios, d'oligoamnios, liquide teinté).
    * césarienne ou voie basse, avec ou sans manoeuvres obstétricales. Forceps ou ventouse.

Présence ou non de notion de souffrance foetale aiguë :

    * APGAR qui reflète l'état de l'enfant à la naissance et la qualité de son adaptation à la vie extra utérine.

Gestes de réanimation entrepris.
Mode d'installation de la détresse respiratoire.
1.2 La clinique :
L'examen doit être doux et atraumatique. En aucun cas l'enfant ne sera sevré de son oxygènothérapie.

Analyse de la fréquence respiratoire : fréquence normale 40 à 60 respirations/mn. Polypnée, bradypnée, apnées.

Signes d'obstruction et de rétraction : qu'analyse au mieux le score de Silverman, côté de 0 à 10 en fonction de l'intensité de l'atteinte respiratoire.

Score de Silverman
     
 0
   
1
   
2
Balancement
thoraco abdominal

Tirage

Entonnoir Xyphoïdien

Battement des ailes du nez

Geignement expiratoire
   

Absent

Absent

Absent

Absent
Absent
   
Thorax immobile
 

Intercostal discret

Modéré

Modéré
Audible
au stéthoscope
   
Respiration paradoxale

Intercostal

Intense

Intense
Audible

 

Existence d'une cyanose, soit généralisée et intense, soit peri buccale, sensible ou non à l'oxygène. Elle signe une hypoxie déjà sévère. Elle est à différencier de la cyanose des mains et des pieds signe de stase que l'on voit souvent chez le nouveau-né à terme bien portant.

Retentissement hemodynamique et cardiovasculaire :

    * fréquence cardiaque (normale 140 à 150 battements par mn), tension artérielle,
    * temps de recoloration cutanée, hépatomégalie,
    * présence d'un souffle cardiaque à l'auscultation, palpation des pouls,
    * diurèse

Retentissement neurologique : examen prudent et limité en raison de l'insuffisance respiratoire aiguë.
1.3 L'analyse radiologique
Elle est capitale.
Elle nécessite un cliché thoracique, de face, bien centré, avec des clavicules symétriques, une tête posée sur l'occiput en rectitude, cliché en inspiration (8 espaces intercostaux).
Elle comprend l'étude du parenchyme pulmonaire, des plèvres : pneumothorax, épanchement, des coupoles diaphragmatiques, du coeur (index cardio-thoracique, silhouette cardiaque), du médiastin, des os, des prothèses.
Le cliché thoracique permet de confirmer le diagnostic étiologique.
Un abdomen sans préparation est parfois utile, il visualise la répartition des gaz et la place de la sonde gastrique.
1.4 Les Gaz du sang
Ils jugent du retentissement de l'insuffisance respiratoire sur l'hématose et de sa gravité.

2 techniques sont possibles avec leurs avantages et leurs inconvénients :

- technique non invasive :

    * saturation en oxygène (SaO²)
    * PO² transcutanée (TcPO²)
    * PCO² transcutanée (TcPCO²).

- méthode invasive : nécessite 1 prélèvement de sang artériel donc une spoliation sanguine :

    * soit sur un cathéter aortique ou radial
    * soit en périphérie sur une artère radiale ou humérale. Elle permet l'analyse de la PaO², de la PaCO² du PH sanguin, de la réserve alcaline.

Résultats :

    * l'hypoxémie se juge en fonction de la fraction inspiratoire de l'oxygène (FIO² 21 à 100 %). Elle analyse la gravité de l'atteinte pulmonaire. La PaO² normale à terme sous une FIO² de 21 % est aux alentours de 90 mm de mercure. L'hypoxémie est considérée comme dangereuse pour une PaO², inférieure à 50 mm de mercure (7 KPA). Chez l'enfant prématuré la PaO² doit être comprise entre 50 et 70 mm de mercure. L'hyperoxie entraîne un risque de fibroplasie rétrolentale et de cécité chez l'enfant prématuré). La SaO² normale est de 95%. Du fait de la courbe de dissociation de l'hémoglobine chez l'enfant prématuré, elle ne doit jamais dépasser 98% pour éviter les risques d'hyperoxie.

    * L'hypercapnie, signe l'hypoventilation alvéolaire et l'acidose ventilatoire. La pCO² normale est de 40 mm de mercure (5 KPA) Au dessus de 60 à 65 mm de mercure, elle fait discuter la prise en charge ventilatoire. Une pCO² inférieure à 30 mm de mercure est dangereuse, principalement chez l'enfant prématuré car elle entraîne une vasoconstriction cérébrale.

    * L'acidose est mixte. Le PH normal du nouveau-né est de 7,35 à 7,40. L'acidose est dangereuse pour un PH < 7,20. Il faut d'abord corriger l'acidose ventilatoire et l'hypoxémie. L'acidose métabolique du nouveau-né est le plus souvent d'origine anoxique et se corrige par la prise en charge ventilatoire et l'oxygénation. Il est rare qu'une réserve alcaline très basse nécessite l'apport de bicarbonate de sodium. Il est dangereux d'injecter du bicarbonate chez un nouveau-né hypercapnique. Le bicarbonate (Co3HNa) se transforme en C02 et s'accumule dans un système clos. L'acidose métabolique devient alors une acidose ventilatoire, le PH restant très bas.

1.5 L'échocardiographie
Elle est souvent nécessaire chez un nouveau-né en insuffisance respiratoire. Elle élimine une cardiopathie congénitale associée ou responsable de l'état clinique. Elle analyse la fonction ventriculaire gauche, le débit cardiaque, le remplissage du coeur, la fonction ventriculaire droite, le degré d'hypertension artérielle pulmonaire, l'état du canal artériel et le sens du shunt principalement chez le prématuré.
1.6 Le reste du bilan biologique est classique :
Ionogramme, Glycémie, Calcémie, Numération Formule Sanguine, une hémostase, et des analyses à la recherche d'une infection néonatale : CRP, fibrinogène, étude bactériologique des prélèvement périphériques, des hémocultures. (on évitera de faire la ponction lombaire chez un nouveau-né en insuffisance respiratoire, oxygéno-dépendant).

Au terme de ce bilan clinique et para-clinique, on peut savoir :

    * le degré de gravité de l'insuffisance respiratoire,
    * son étiologie.

2 Les étiologies des insuffisances respiratoires
Elles sont classables en 5 catégories (liste que l'étudiant doit connaître par coeur).
- Les maladies pulmonaires de loin les plus fréquentes :

    * Maladies des membranes hyalines.
    * Rétention de liquide alvéolaire.
    * Inhalation amniotique ou méconiale.
    * Collections gazeuses intrathoraciques : pneumothorax, pneumomédiastin.
    * Les infections néonatales avec atteinte respiratoire.

- Les obstructions d'origine ORL :

    * atrésie des choanes, syndrome de Pierre Robin, osbtruction laryngée ou trachéale.

- Les malformations chirurgicales, souvent diagnostiquées en période anténatale par l'échographie :

    * hernie diagphragmatique, atrésie de l'oesophage, fistule oeso trachéale, anomalie de la paroi abdominale (omphalocèle, laparoschisis).

- Les causes cardiovasculaires :

    * Une cardiopathie congénitale à révélation néonatale.
    * Retour en circulation foetale avec persistance d'une hypertension artérielle pulmonaire, le plus souvent associée à une maladie pulmonaire.

- Une maladie neuromusculaire pourra être cause d'hypoventilation alvéolaire et d'apnées avec mauvaise adaptation respiratoire. 

Les particularités cliniques et paracliniques ainsi que les prises en charge de chacune des pathologies sont résumées dans les tableaux suivants.
2.1 Les maladies pulmonaires
Etiologies-Physiopathologies
   
Particularités cliniques et paracliniques. Diagnostic
   
Traitement
Maladie des membranes Hyalines :
Absence ou destruction du surfactant alvéolaire
ß
Atélectasies + oedème
ß
Membranes Hyalines d'où
Shunt intra pulmonaire +
Vasoconstriction capillaire
pulmonaire HTAP
ß
Retour en cirulation foetale
+
Troubles hémodynamiques
   

    * Prématurés. Rôle favorisant ® S.F.A, stress.
    * Détresse respiratoire précoce avec score de Silverman élevé.
    * Hypoxémie ® Cyanose (acidose, mixte)
      Hypercapnie croissante
    * Radiographie : granité pulmonaire, effacement des bords du coeur + bronchogramme aérien
    * Troubles hémodynamiques : marbrures, hypo TA
    * Analyse du surfactant trachéal
    * Attention aux infections associées
    * Complications pneumothorax, hémorragies pulmonaires.

    Prévention :
- de la prématurité, de la SFA
- corticoïdes maternels.
Traitement :
- Oxygénothérapie.
- C.P.A.P.
- Surfactant précoce (Curosurf)
-Ventilation assistée + P.P.C.
-Ventilation Haute Fréquence
- No inhalé.
- Correction du collapsus par remplissage + Dopamine et/ou Dobutrex selon hémodynamique.
  Retention de liquide alvéolaire
Inhalation de liquide
amniotique clair
   

    * Détresse respiratoire, moins grave transitoire.
    * Enfant né par césarienne
    * Polypnée prédominante, peu de signe de lutte : Silverman peu élevé
    * Hypoxémie - Pas d'hypercapnie
    * Radiographie : surcharge interstitielle
    * Attention aux infections associées et au pneumothorax

    - Oxygénothérapie sous Hood.
- Correction des troubles hémodynamiques.
Inhalation méconiale
   

    * Post maturité + S.F.A. ou Hypotrophie et souffrance foetale chronique.
    * Enfant "noyé", asphyxié - Apgar bas.
    * Encombrement bronchique - Aspiration pro-ductive + verdâtre, polypnée, peu de rétraction.
    * Hypoxémie, hypercapnie, acidose.
    * Radiographie : opacités inhomogènes, hyper-clartés, pneumothorax et pneumomédiastin, troubles de ventilation.
    * Attention aux infections associées.

    - Prévention de la SFA.
- Aspiration avant la 1è inspiration (à la vulve) avant dégagement des épaules.
- Aspiration soigneuse en salle de travail.
- Oxygénothérapie, ventilation assistée sous anesthésie.
- NO SI RCF.
- Antibiothérapie
Collections gazeuses
intra thoraciques
=
Pneumothorax
Pneumomédiastin
Pneumo péricarde
   

    * Nouveau-né ventilé au masque.
    * Rétention de liquide. Inhalation amniotique ou moeconiale.
    * Latence possible : détresse respiratoire s'aggravant brutalement. bradycardie. Apnée. Syndrome cave supérieur, ballonement abdominal.
    * Hypercapnie et hypoxie brutale.
    * Epreuve de la lampe.
    * Radiographie - poumons noir (incidence de Muller) - Poumon décollé de la paroi - Thymus volant, médiastin. cerné par un liseré gazeux

    - Prise en charge ventilatoire oxygénation.
- Exsufflation à l'aiguille.
- Drainage pleural
- Oxygénothérapie.
- Calme.

Infections pulmonaires
Toutes les étiologies peuvent masquer une infection néonatale : (Streptocoque B, Colibacille, Listeria).
   

    * Terrain : mère infectée, fièvre, chorio amniotite. Portage streptocoque B, infection urinaire, rupture prématurée poche des eaux.
    * Signes généraux d'infection néonatale.
    * CRP élevée. Fibrinogène élevé ou bas en cas de C.I.V.D. Troubles de l'hémostase.
    * Myélémie, thrombopénie.
    * Bactériologie positive (gastrique, méconium, hémoculture, uroculture, LCR)

    - Même prise en charge + antibiothérapie après prélèvements :
- Amoxicilline.
- Céphalosporines III
- Aminoside
2.2 Les obstructions hautes
Etiologies
   
Particularités cliniques et paracliniques diagnostic
   
Traitement.
Atrésie des choanes

Imperforation de la paroi postérieur des fosses nasales. Le plus souvent membraneuse, quelques fois osseuse, dans un cadre malformatif.
   

    * Détresse respiratoire avec signes de lutte cyanose qui disparaît aux cris, bouche ouverte.
    * Butée de la sonde à 3 cm dans les narines.
    * Risque d'apnées.

   

- Canule buccale ou si besoin intubation buccale.
- Intervention ORL
- Calibrage par sonde.
- Soins locaux.
Syndrome de Pierre Robin

Retro micrognatisme
Glossoptose
Fente palatine
   

    * Détresse respiratoire + lutte.
    * Apnées obstructives et centrales

   

- Décubitus ventral
- Canule buccale ou si besoin intubation. Elle est souvent difficile (se servir d'une grande lame).
Obstacles laryngés ou malformations glottiques ou sous glottique :

Kystes branchiaux, goître, tumeur, abcès retropharyngé, angiome, lymphangiome, sténose congénitale.
Diasthème laryngé
Méningocèle
Laryngites traumatiques ou infectieuses.
Paralysies des adducteurs
Laryngomalacie
   

    * Dyspnée inspiratoire, signes de lutte + Stridor/
    * Anomalie du cri.
    * Dysphagie.
    * Radiographie du larynx.
    * Echographie cervicale.
    * Scanner
    * Endoscopies ORL

   

- Intubation si détresse respiratoire.
- Traitement chirurgical.
- Trachéotomie quelque fois nécessaire.
Obstacles trachéaux

Tumeurs
Kystes neuro entériques
Kystes bronchogéniques
Anomalies arcs vasculaires
Trachéomolacie
   

    * Difficultés respiratoires et à l'alimentation.
    * Dyspnées. Wheezing
    * Malaises, crise de cyanose.
    * Stridor
    * Echographie
    * Scanner ou IRM thoracique.
    * Transit oesophagien +++
    * Endoscopies : laryngotrachéo bronchoscopie, oesophagoscopie

   

- Intubation si nécessaire.
- Traitement chirugical.
2.3 Les causes chirurgicales
Etiologie - Physiologie
   
Particularités cliniques et paracliniques - Diagnostic
   
Traitement
Hernies diaphragmatiques

Brêche diaphragmatique laissant passer une partie des viscères abdominaux dans le thorax.
90% hernies gauches.
Passage des viscères variables dans la chronologie de la grossesse.
D'autant plus grave que plus précoce car hypoplasie pulmonaire
   

    * Diagnostic anténatal par échographie.
    * Détresse grave, cyanose intense, thorax distendu immobile silencieux, du côté atteint. Bruits du coeur déviés à droite si hernie gauche. Abdomen plat, vide.
    * Radiologie : hyperclartés dans l'hémithorax gauche. Coeur refoulé à droite, moignon pulmonaire écrasé. Abdomen vide
    * Hernie droite : symptomatologie en 2 temps. Masse hépatique dans l'hémithorax. Détresse hémodynamique.

   

- CI à la ventilation, au masque si diagnostic connu ou suspecté.
- Ventilation sur tube.
- Sonde gastrique en aspiration.
- Proclive.
- Voie d'abord, perfusion.
- Intervention.
- Réanimation post opératoire, difficile. Mortalité lourde.
Atrésie de l'oesophage

interruption de l'oesophage.
Fistule oesotrachéale du bout inférieur dans 70% des cas
   

    * Diagnostic anténatal difficile.
    * Hydramnios.
    * Hypersalivation, encombrement.
    * Détresse respiratoire.
    * Ballonnement abdominal.
    * Fausses routes de salive et de liquide gastrique par la fistule du bout inférieur.
    * Test de la seringue.
    * Abdomen sans préparation avec sonde gastrique poussée dans le cul de sac supérieur.

   

- CI absolue à l'alimentation.
- Proclive
- Aspiration continue du cul de sac supérieur et de la bouche.
- Oxygénation.
- Perfusion.
- Ventilation assistée à minima avant fermeture de la fistule du bout inférieur.
Fistules oeso trachéales    

    * Diagnostic difficile.
    * Fausses routes.
    * Crise de ballonnement abdominal.
    * Troubles de ventilation. Atélectasies.
    * Transit oesophagien peut visualiser la fistule.
    * Endoscopie bronchique et oesophagienne.

   

- Gavage.
- Cure chirurgicale de la fistule.
Malformations pulmonaires

Malformation adénomatoïde du poumon.

 

 
   

    * Détresse respiratoire souvent bien supportée.
    * Abdomen normal. Diagnostic différentiel avec hernie diaphragmatique gauche.
    * Hyperclartés thoraciques avec abdomen sans préparation normal.

   

- Intervention chirurgicale.
- Lobectomie
Emphysème lobaire géant    

    * Détresse respiratoire secondaire et souvent bien supportée. Malformation le plus souvent gauche.
    * Radiologie : hyperclarté unilatérale, diagnostic différentiel pneumothorax. Voir incidence de Muller (face à rayon horizontal)

   

- Traitement chirurgical.
2.4 Les causes cardio-vasculaires

Une cardiopathie congénitale à révélation néonatale accompagnera souvent une détresse respiratoire et sera diagnostiquée par échocardiographie. Deux grands tableaux cliniques feront suspecter l'existence d'une anomalie cardiaque devant un nouveau-né en insuffisance respiratoire

Þ Des signes d'insuffisance cardiaque
Þ Une hypoxémie réfractaire à l'oxygène.

2.4.1 Signes d'insuffisance cardiaque
Devant des signes d'insuffisance cardiaque : Hépatomégalie, Tachycardie, Gros Coeur radiologique, on évoquera 5 diagnostics :
2.4.1.1 Une malformation obstructive de la voie gauche
2.4.1.1.1 Hypoplasie du ventricule gauche

Le diagnostic de cette malformation est souvent fait à l'échographie anténatale, ce qui permet l'Interruption Thérapeutique de Grossesse (ITG). Si l'enfant naît, la défaillance cardiaque s'installe brutalement dans les premiers jours de vie associant détresse respiratoire, choc cardiogénique, souvent détresse neurologique associée.
A l'examen les pouls sont abolis, l'hépatomégalie est énorme et l'auscultation peut retrouver des bruits sourds et un galop. Il existe des troubles métaboliques sévères avec acidose, hyperazotémie, hyperkaliémie, temoin d'une insuffisance rénale, hypoglycémie, atteinte de l'hémostase. Le diagnostic facilement évoqué repose sur l'échocardiographie.
Cette cardiopathie demeure au dessus de toute ressource thérapeutique.

2.4.1.1.2 L'interruption de l'arche aortique
L'interruption totale de l'aorte horizontale peut être plus ou moins étendue et variable par rapport à l' émergence des vaisseaux brachiocéphaliques. Elle s'associe avec une CIV et un canal artériel qui vascularise la partie inférieure du corps. Ce canal artériel doit rester perméable et la mise sous prostaglandines E1 (Prostine) permet de conduire l'enfant à l'intervention.
2.4.1.1.3 La Coarctation de l'aorte.

Elle est plus fréquente et se présente sous forme d'une défaillance cardio-respiratoire aiguë vers la 2è semaine. Dans sa forme néonatale, elle est souvent associée à un shunt gauche-droit de CIV. Le diagnostic est envisagé devant un souffle et l'absence de pouls fémoraux avec une différence tensionnelle entre les membres supérieurs où il exite une hypertension et les membres inférieurs où on note une hypotension. Le diagnostic préçis se fait à l'échocardiographie. Le traitement est d'abord médical, digitalo-diurétique. En cas de mauvaise tolérance, une intervention chirurgicale (opération de Crafoord), permettra de réséquer la zone rétrécie, ce qui diminuera le shunt gauche-droit de la CIV et l'hyperdébit pulmonaire.

2.4.1.2 Un shunt gauche-droit

   1. Large CIV (communication interventriculaire)
   1. C.A.V (canal atrio ventriculaire), cardiopathie du Trisomique 21, suspecté sur le tableau d'insuffisance cardiaque, l'hypervascularisation pulmonaire et à l'électrocardiogramme, un axe " au plafond ", perpendiculaire à D1, négatif en aVF.
   1. C.A (Canal artériel) "malin"

 

Ces 3 cardiopathies se ressemblent avec polypnée, insuffisance cardiaque, poumons hypervascularisés. (Il n'y a jamais de cyanose puisque c'est un shunt gauche-droit isolé).
2.4.1.3 Devant un tableau d'insuffisance cardiaque néonatale
une myocardiopathie, en particulier par maladie métabolique, une myocardite infectieuse plus rare, une fibroélastose ou une tumeur cardiaque beaucoup plus rare, seront diagnostiqués à l'échocardiographie ainsi qu'un épanchement péricardique.
2.4.1.4 Les cardiopathies complexes
Associent insuffisance cardiaque et cyanose à un degré divers comme un tronc artériel commun, un ventricule unique, un ventricule droit à double issue.

Le retour veineux pulmonaire anormal total (RVPA), est très particulier. Le collecteur qui draine les 4 veines pulmonaires se jette dans les cavités droites.
Le tableau complet de RVPA total, sous diaphragmatique bloqué, associe une détresse respiratoire, une cyanose, une hépatomégalie avec à la radiographie un petit coeur et une surchage veineuse pulmonaire majeure avec un aspect de miliaire à gros grains.
L'échocardiographie retrouve alors un ventricule droit dilaté, hypertrophique, une grosse artère pulmonaire, et une petite oreillette gauche alimentée par une CIA. Le collecteur peut être visualisé parfois derrière l'oreillette gauche.
Seul un traitement chirurgical d'urgence, peut sauver cet enfant.
2.4.1.5 Enfin lorsque l'échocardiographie est normale,
le tableau d'insuffisance cardiaque néonatale doit faire rechercher :

    * une fistule artério veineuse, principalement cérébrale (anévrisme de l'ampoule de Gallien), plus rarement hépatique ou placentaire (chorioangiome).
    * des troubles du rythme néonataux, souvent dépistés à la période anténatale. Il s'agit principalement des tachycardies supra ventriculaires avec les syndromes de Wolf Parkinson White. Ils sont facilement réductibles par la Striadyne puis par la Digitaline et la Cordarone aidée par les manoeuvres vagales.
    * plus rarement se sont des bradycardies, en particulier des blocs auriculoventriculaires comme au cours des lupus maternels à traiter par Isuprel.

2.4.2 Devant une cyanose réfractaire
La vacularistation pulmonaire radiologique oriente le diagnostic :
2.4.2.1 Si la vascularisation pulmonaire est augmentée ou normale, il s'agit vraisemblablement d'une transposition des gros vaisseaux

C'est une malformation très fréquente ; l'aorte transposée naît du ventricule droit en avant de l'artère pulmonaire qui naît du ventricule gauche. Les deux circulations se font donc en parallèle et la survie n'est possible que par l'existence des shunts permettant un mélange de sang entre ces deux circulations (foramen ovale et canal artériel).
La cyanose apparaît très précocément dans les premières heures de vie, elle est l'élément dominant. Par contre, les signes fonctionnels respiratoires sont souvent modérés et l'auscultation cardiaque est souvent normale.
L'électrocardiogramme est normal ou montre des signes de surcharge ventriculaire droite.
La silhouette cardiaque peut orienter le diagnostic, en montrant un aspect d'oeuf posé sur le diaphragme avec un pédicule étroit.
L'oxymétrie retrouve une PaO² éffondrée, même sous oxygène pur.
Le plus souvent l'enfant supporte assez bien sa malformation à condition que ses shunts naturels soient fonctionnels.
L'échocardiogramme affirme la malformation, en montrant les gros vaisseaux en position de transposition.
Les prostaglandines, en maintenant le canal artériel ouvert, ainsi que l'intervention de Rashkind qui effondre la cloison interauriculaire par une sonde à ballonnet au cours d'un cathétérisme permettent de passer le cap en augmentant le mélange de sang.
La détransposition des gros vaisseaux ou "switch", doit être faite rapidement après la naissance. Cette intervention donne d'excellents résultats.

2.4.2.2 Si la vascularisation pulmonaire est diminuée, le volume du coeur oriente le diagnostic

- Si le coeur est de volume normal : Index Cardio Thoracique (ICT) < 0,60.
Il s'agit probablement d'une forme grave de Tétralogie de Fallot, associant atrésie pulmonaire à septum interventriculaire ouvert, aorte à cheval sur la CIV et hypertrophie ventriculaire droite. Dans ce cas, il n'y a jamais d'insuffisance cardiaque, mais une hypoxémie réfractaire avec cyanose plus ou moins importante et des malaises. Sur la radiographie, on retrouve des poumons hyperclairs et une image de coeur en sabot avec une pointe relevée et une absence d'arc moyen gauche en rapport avec l'atrésie pulmonaire.
L'échocardiographie montre la malformation anatomique et précise le type d'atrésie pulmonaire et l'état des branches pulmonaires. Les prostaglandines permettent là encore, de maintenir ouvert le canal artériel pour vasculariser le poumon.
Une intervention palliative, intervention de Blalock Taussig (anastomose de l'artère sous clavière sur l'artère pulmonaire), permet de vasculariser le poumon et d'attendre la réparation complète qui se fera plus tardivement.

L'atrésie tricuspide et l'hypoplasie des branches pulmonaires qui est souvent associée à cette anomalie, peut aussi être évoquée. L'électrocardiogramme montre un axe gauche (moins 30°) et une surcharge auriculaire droite. Là encore l'échographie en fera le diagnostic.

- Il existe un gros coeur : ICT 0,60 à 0,65.
Il y a cyanose, poumons radiologiquement hyperclairs et rapidement association avec une insuffisance cardiaque droite.
On pense alors à une Trilogie de Fallot, qui associe sténose ou atrésie pulmonaire à septum interventriculaire intact et C.I.A.
Sur la radiographie, le coeur est gros et a une forme d'as de pique. Là encore l'échocardiographie fera le diagnostic.

- Si le coeur est énorme, un ICT > 0,70 avec une cyanose et des poumons clairs, on pensera alors à une anomalie d'EBSTEIN.
Il s'agit d'une malformation de la tricuspide qui s'insère très bas dans les cavités droites, de telle sorte que le ventricule droit est très petit, on parle de ventricule droit "croupion".
L'échocardiographie en fait le diagnostic.
2.4.2.3 Le retour en circulation foetale (RCF)
Il ne s'agit pas à proprement parler d'une cardiopathie mais de la persistance des shunts extra pulmonaires, au niveau du canal artériel, et de la communication interauriculaire shuntant de droite à gauche, comme pendant la vie foetale.

Du fait de l'hypertension artérielle pulmonaire et de la vasoconstriction des capillaires pulmonaires, le plus souvent secondaires ou associés à une maladie parenchymateuse, les pressions dans les cavités droites demeurent anormalement élevées d'autant qu'il existe souvent un collapsus périphérique avec des pressions dans les cavités gauches plus basses. Cette hémodynamique particulière, qui ressemble à celle de la circulation foetale, entraîne des shunts droit-gauche au niveau du canal artériel et de la communication interauriculaire (voir adaptation circulatoire à la vie extra-utérine).

Cette absence de baisse de résistance des capillaires pulmonaires est rarement primitive, en rapport avec une anomalie des capillaires. Le plus souvent, il s'agit de la persistance de l'hypertension artérielle pulmonaire prénatale entrant dans le cadre d'une maladie pulmonaire : maladie des membranes hyalines, inhalation méconiale, infection néonatale et particulièrement infections à Streptocoque B ou à Colibacille.

L'échocardiographie en urgence, est nécessaire pour affirmer qu'il n'y a pas de malformation cardiaque et pour apprécier le degré de l'hypertension artérielle pulmonaire, de l'insuffisance tricuspidienne associée, de la fraction d'éjection ventriculaire et du débit cardiaque gauche.

Dans cette pathologie, il faut assosier le traitement de la maladie pulmonaire ayant entraîné hypoxémie et acidose mixte, le traitement de la mauvaise hémodynamique systémique avec correction de l'hypotension et du bas débit cardiaque, ainsi que la diminution de l'hypertension artérielle. Le monoxyde d'azote (NO), est un puissant vasodilatateur capillaire pulmonaire et permet la chute des résistances capillaires pulmonaires et la diminution de l'hypertension artérielle pulmonaire.

Il existe donc de nombreuses causes à l'insuffisance respiratoire aiguë du nouveau-né.

Chaque cause, a ses particularités et son traitement. Cependant, on peut dégager :

une prise en charge globale de l'enfant en insuffisance respiratoire.

Répétons encore que ces nouveau-nés sont très fatigués et très fragiles. Ils utilisent toute leur énergie à respirer et décompensent à la moindre stimulation, donc dans toute leur prise en charge, il faudra beaucoup de douceur, de confort et éviter tout stress.

    * Le nouveau-né en insuffisance respiratoire sera mis sur table de réanimation avec régulation automatique de sa température.
    * Un sac à urine sera mis en place.
    * Une sonde gastrique sera mise au sac (avant la 1ère radio) pour éviter le ballonnement fréquent.
    * L'enfant ne sera alimenté en aucun cas.
    * Une voie d'abord sera mise en place, soit sur un cathéter ombilical, artériel ou veineux soit sur un cathéter épicutanéocave soit sur un cathlon périphérique. Il sera pérfusé pour éviter l'hypoglycémie. Très rapidement (J2), la nutrition parentérale sera débutée, si l'alimentation par voie gastrique ne peut être réalisée.
    * L'oxygénation se fera soit sous Hood avec un apport d'oxygène réchauffé, humidifié en surveillant en permanence la FIO² (Fraction Inspiratoire d'Oxygène), soit avec une ventilation pharyngée et une pression de distension alvéolaire (C.P.A.P Continous Positive Airway Pressure). Soit en ventilation assistée conventionnelle ou par oscillations à haute fréquence selon les indications.
    * L'intubation pour aspiration et ventilation, ainsi que pour l'administration de surfactant, se jugera sur le contexte évolutif et sur le degré de prématurité.
    * Une PaO² < 60 Torr sous une FIO² de 60% doit faire envisager la mise sous ventilation et sous pression distension alvéolaire.
    * Une PaCO² > 60-65mm de mercure, doit faire prendre en charge la ventilation assistée, surtout en cas d'enfant prématuré qui va s'épuiser rapidement et faire des apnées.
    * Le surfactant sera administré si le diagnostic étiologique est celui d'une maladie des membranes hyalines.
    * Il faudra évacuer les épanchements liquidiens, gazeux par des drains pleuraux, si ils sont mal supportés. Cependant, un pneumothorax chez un gros bébé qui ne fait pas d'apnées et ne présente pas d'hypercapnie, peut être respecté. Il faut alors bien oxygéner et surveiller ce bébé en permanence car l'asphyxie peut être brutale.
    * Les troubles hémodynamiques seront corrigés après analyse échocardiographique par remplissage et / ou tonicardiaque (Dobutrex ou Dopamine). L'HTAP sera traitée par monoxyde d'azote.
    * L'antibiothérapie sera débutée après les prélèvements néonataux, dès la suspicion d'une infection. En cas d'insuffisance respiratoire et d'oxygéno-dépendance, il ne faudra pas pratiquer de ponction lombaire qui risquerait d'entraîner une apnée et un arrêt cardiaque.
    * La surveillance sera permanente tant que dure la détresse respiratoire :

          o Ventilatoire :
                + FI0²
                + SaO²
                + TCPO²
                + TCPCO²
                + Réchauffement et humidification des gaz.

          o Hémodynamique :
                + Scope : alarmes vérifiées à 80 - 180 bpm/mn
                + Tension artérielle non invasive toutes les 15 , puis 30 mn, puis plus espacée selon l'améliration.

          o Diurèse.
          o Température.
          o Comportement neurologique.

Un nouveau-né en insuffisance respiratoire aiguë est en danger de mort
ou
un enfant à risque de séquelles neurologiques .
Il nécessite une surveillance de tous les instants.

D'une bonne prise en charge néonatale dépend toute une vie
Ictères à bilirubine non conjuguée du nouveau-né
G. Defawe

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 5 mars 1999

1 Métabolisme de la bilirubine
2 Définitions des hyperbilirubinémies non conjuguées pathologiques
3 Principales étiologies des ictères à bilirubine non conjuguée
3.1 L'ictère simple du nouveau-né
3.2 Les ictères secondaires aux hémolyses
   

3.3 Ictères par défaut de glycuroconjugaison hépatique
4 Traitement des ictères à bilirubinémie non conjuguée
4.1 L'exsanguino-transfusion
4.2 Les agents médicamenteux
4.3 La photothérapie
Objectifs 

    1. Décrire le métabolisme de la bilirubine.

    2. Décrire la physiopathologie de l'ictère simple du nouveau-né et citer quelques circonstances favorisantes.

    3. Donner les taux sanguins pour lesquels l'hyperbilirubinémie non conjuguée peut devenir pathologique, toxique.

    4. Citer les principales étiologies des ictères à bilirubine non conjuguées.
    5. Citer méthodes et indications des différentes thérapeutiques.

L'ictère à bilirubine non conjuguée, est un symptôme fréquent chez le nouveau-né âgé de quelques jours ;

Il faut d'emblée le différencier des ictères à bilirubine conjuguée, pathologie révélée en général plus tardivement (après le 15ème jour de vie).

La bilirubinémie non conjuguée peut être toxique lorsque le taux dépasse un seuil fixé arbitrairement à 350 mmol/l ,en effet, elle est insoluble dans l'eau et soluble dans les graisses, notamment du système nerveux central.
1 Le métabolisme de la bilirubine
 

Dans le système réticulo-endotélial :
L'hème provient de la dégradation des globules rouges (80 %) mais aussi des cytochromes (20 %). L'hème est ensuite transformé en biliverdine grâce à l'hème oxygénase puis en bilirubine grâce à une réductase. La bilirubine est déversée dans le secteur vasculaire.

Dans le secteur vasculaire :
La bilirubine peut être soit liée à l'albumine (deux sites connus de liaison) soit libre. Une partie de cette forme libre pourra se fixer sur des sites cutanés ; la partie restante est la seule toxique pour l'organisme.
A noter que le dosage de bilirubine standard ne tient pas compte de la forme liée et non liée à l'albumine.

Dans le foie :
La bilirubine est captée au pôle vasculaire de l'hépatocyte ; deux proteines de transport Y la ligandine et Z transportent la bilirubine qui vient de perdre sa liaison avec l'albumine, vers l'hépatocyte.
Dans l'hépatocyte, la bilirubine sera conjuguée à de l'acide glucuronique sous l'influence de l'enzyme glycuronyl transférase. L'acide glycuronique est un produit intermédiaire du cycle de Krebs.
La bilirubine parvient au pôle biliaire de l'hépatocyte, passe dans la voie biliaire puis le duodénum.

Dans l'intestin :
La bilirubine conjuguée va se transformer en urobilinogène (qui peut être réabsorbé et donner de l'urobiline, éliminable dans les urines,) et en stercobilinogène puis stercobiline qui colore les selles.
A noter que certaines bactéries intestinales possédent un enzyme la bêtaglycuronidase capable de redéconjuguer la bilirubine qui repasse alors dans la circulation générale.
2 Définition des hyperbilirubinémies non conjuguées pathologiques
Tous les nouveau-nés présentent un ictère dit physiologique maximum au cinquième jour de vie. La surveillance de cet ictère en Maternité s'effectuera par la mesure du taux de bilirubine accumulé au niveau des sites cutanés (bilirubinomètre) et s'il y a doute, on pratiquera un dosage sanguin.

On dit qu'il y a hyperbilirubinémie non conjuguée pathologique lorsque le taux de bilirubine est :
-supérieur à 10 % du poids du corps pour un enfant de poids de naissance < 2 kgs 500 (exemple : 150 mmol/l pour un enfant de 1500 gr).
- supérieur à 250 mmol/l pour un enfant de poids de naissance > 2 kgs 500.
3 Les principales étiologies des ictères à bilirubine non conjuguée
3.1 L'ictère simple du nouveau-né
3.1.1 Physiopathologie
En période néonatale, il y a accumulation de bilirubine ; en effet, les globules rouges du nouveau-né ont une demi-vie plus courte, l'activité cytochrome est très importante, l'hème oxygénase secrété sous l'influence de l'adrénaline et du glucagon est très actif.

Cette bilirubine n'est pas totalement captée, loin s'en faut, par le pôle vasculaire de l'hépatocyte ; en effet, une partie du courant sanguin peut, dans les premières heures de vie, court-circuiter le foie par le biais du canal d'Arantius ; la proteine Y et la proteine Z ne sont synthétisées qu'en post-natal.

Dans la cellule hépatique, l'enzyme glycuronyl transférase n'est synthétisé que progressivement ; l'acide glucuronique, qui se lie à la bilirubine, est un intermédiaire du cycle de Krebs lui-même dépendant des apports énergétiques, faibles dans les premières heures de vie.

Au total : excès de production de bilirubine et défaut de captation hépatique et de conjugaison de cette bilirubine.

Une hypoglycémie et/ou une hypothermie (défaut d'apport d'acide glucuronique, activation de l'hème oxygénase), une hypoxie périnatale (persistance de la perméabilité du canal d'Arantius, synthèse retardée des enzymes), les collections sanguines (bosse séro-sanguine, céphalhématome), ou encore d'autres facteurs intervenant dans l'adaptation à la vie extra-utérine, pourront majorer cet ictère simple.
3.1.2 Diagnostic
C'est un diagnostic d'élimination : test de Coombs direct négatif, absence d'incompatibilité dans le système AB0.
3.2 Les ictères secondaires aux hémolyses
La destruction exagérée des globules rouges conduit à la formation d'hème puis de bilirubine.Toutes les causes d'hémolyse peuvent donc entraîner un ictère à bilirubine non conjugée.
3.2.1 Les incompatibilités sanguines foeto-maternelles
- les allo-iso-immunisations rhésus, (antigènes responsables : D ou plus souvent maintenant c C E). Le diagnostic est fait le plus souvent pendant la vie foetale ; le test de Coombs direct chez le nouveau-né est positif.

- l'incompatibilité dans le système ABO : ce diagnostic est évoqué de principe lorsque la mère est de groupe O+, que l'enfant est de groupe A ou B. L'hémolyse est moins sévère que dans les ictères par allo-iso-immunisation. Le test de Coombs direct est le plus souvent négatif. Le diagnostic repose sur la mise en évidence dans le sang maternel d'agglutinines irrégulières de type anti A ou anti B.
3.2.2 Les hémolyses par microsphérocytose.
3.2.3 Les hémolyses par hémoglobinopathie.
3.2.4 Les hémolyses par enzymopathie : déficit en glucose 6 phosphate deshydrogènase, déficit en pyruvate kinase.
3.2.5 Les hémolyses dans le cadre des infections parasitaires, virales ou bactériennes.
3.3 Les ictères par défaut de glycuroconjugaison hépatique
- ictère au lait maternel : une lipase contenue dans certains laits maternels, hydrolyse les triglycérides ; les acides gras libérés agissent comme inhibiteurs compétitifs de la bilirubine au niveau de la glucuronyl transférase. L'ictère reste modéré, dure le temps de l'allaitement, ne contre-indique en rien l'allaitement maternel.

- ictère de l'hypothyroïdie : l'ictère à bilirubine non conjuguée est l'un des signes classiques de l'hypothyroïdie congénitale ; les hormones thyroïdiennes sont en effet nécessaires à la synthèse de l'enzyme glycuronyl transférase.

- ictère de la maladie de Gilbert : il est lié à un déficit partiel de la glycuronyl transférase ; il s'agit d'une maladie autosomique dominante ; l'ictère reste modéré en période néonatale.

- l'ictère de la maladie de Crigler Najjar : il s'agit d'un déficit enzymatique complet dans la forme du type I, partiel dans la forme du type II, seul viable.
4 Traitement des ictères à bilirubinémie non conjuguée
4.1 L'exsanguino-transfusion
Elle se discute lorsque le taux de bilirubine est supérieur à 350 mmol/l ; elle permet dans le même temps une élimination de la bilirubine, des anticorps, une correction de l'anémie ; cette technique expose cependant à des complications.
Son indication actuelle est réservée aux allo-iso-immunisations sévères.
4.2 Les agents médicamenteux
- les métalloporphyrines agissent en inhibant l'hème oxygénase donc en limitant la production de biliverdine puis de bilirubine. Elles ne sont pas utilisées en France et sont plutôt réservées au traitement des ictères ABO.

- le phénobarbital (Gardénal )agit en favorisant la synthèse des proteines Y et Z et la synthèse de l'enzyme glycuronyl transférase. L'utilisation du Gardénal est actuellement réservé à l'ictère de la maladie de Crigler Najjar du type II.

- le clofibrate (Lipavlon) agit en favorisant la synthèse de l'enzyme glycuronyl transférase ; il est couramment utilisé chez l'enfant prématuré.
4.3 La photothérapie
La lumière bleue ou verte, agit en transformant la molécule de bilirubine non soluble dans l'eau, en deux photo-isomères solubles dans l'eau, donc atoxiques.
La photothérapie reste par sa facilité d'emploi le traitement de choix de la majorité des ictères à bilirubine non conjuguée ; elle a cependant ses impératifs et ses inconvénients : danger de l'irradiation oculaire, risque d'apnée ....
Les anémies du nouveau-né
E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 5 mars 1999

Objectifs
1 Anémies par déperdition sanguine
1.1 Signes de l'anémie
1.2 Causes
   

2 Anémies hémolytiques
2.1 Causes immunologiques
2.2 Causes non immunologiques
3 Conduite à tenir devant une anémie du nouveau-né
Objectifs

    1. Enumérer les étiologies des anémies du nouveau-né.

    2. Anémies immunologiques du nouveau-né.
    3. Conduite à tenir devant une anémie du nouveau-né.

Il faut se rappeler que chez le nouveau-né, il existe une polyglobulie physiologique avec macrocytose ; le taux d'hémoglobine varie entre 160 et 180 g/l. Une anémie peut être définie chez un nouveau-né par une chute du taux de l'hémoglobine au-dessous de 150 g/l.
L'anémie n'est pas toujours évidente. En effet, bien que la pâleur soit frappante chez ce petit enfant, elle peut être masquée par l'érythrose habituelle du nouveau-né ou par l'existence d'un ictère débutant.
Les anémies hémolytiques d'origine centrale sont exceptionnelles chez le nouveau-né : maladie de Blockfan-Diamond à révélation précoce, anémie secondaire à une infection congénitale à parvorivrus B19.
Nous envisagerons seulement les anémies d'origine périphérique, c'est-à-dire avec une production médullaire normale.
1 Anémies par déperdition sanguine
La masse sanguine d'un nouveau-né est de l'ordre de 80 ml/kg, soit 250 ml environ. Une spoliation sanguine de 15 à 20% peut rapidement retentir sur l'état hémodynamique de l'enfant.
1.1 Signes de l'anémie
Ils dépendent du site de l'hémorragie, de son importance et de son caractère aigü ou chronique. Il n'existe pas d'ictère, hormis l'ictère physiologique. Le tableau peut être :
- une pâleur simple, isolée
- polypnée, tachycardie et chute de la tension artérielle sont en faveur d'une hémorragie aiguè. Une insuffisance cardiaque avec hépatomégalie est plutôt évocatrice d'un saignement chronique.
-  mauvais comportement neurologique, convulsions évoquent un saignement ventriculaire ou sous-arachnoïdien. L'échographie transfontanellaire, la ponction lombaire ou la tomodensitométrie aident au diagnostic.
1.2 Causes
1.2.1 Hémorragies anténatales
1.2.1.1 La transfusion foeto-maternelle : elle est fréquente (0,5 ml à 40 ml) mais seulement dans 1 % des cas, la perte sanguine dépasse 40 ml. Dans certains cas, elle peut être expliquée par une amniocentèse traumatique ou une version céphalique.
Il peut s'agir d'un tableau d'hémorragie chronique, variété la plus fréquente, dûe à un saignement minime pendant une période prolongée avant l'accouchement ou d'une hémorragie aiguè se produisant au moment du travail. On peut reconnaître la transfusion foeto-maternelle par l'existence d'hématies foetales dans le sang de la mère (test de Kleihaeur).

1.2.1.2 La transfusion foetale survient dans 20 % des jumeaux univitellins, un des jumeaux est polyglobulique alors que l'autre est anémique.
1.2.2 Les hémorragies per-natales
Elles sont liées à des lésions obstétricales du placenta ou du cordon (placenta praevia, rupture ou incision placentaire, décollement placentaire, rupture des vaisseaux). Ces hémorragies sont responsables d'une anémie sévère.
1.2.3 Les hémorragies post-natales
Le diagnostic peut être facile s'il s'agit d'hémorragie extériorisée, mais plus difficile en cas d'hémorragie interne. Ces hémorragies sont : les hémorragies ombilicales, la bosse séro-sanguine (hématome sous-cutané crânien), céphalhématome (décollement périostique ne chevauchant pas les sutures), hémorragies digestives, hématurie, ou hémorragie interne (hématome sous-capsulaire du foie, hémorragie cérébrale). Ces hémorragies internes peuvent apparaître 24 à 48 heures après une délivrance traumatique.
Dans toutes ces situations, il faudra transfuser l'enfant à la naissance avec des globules rouges déplasmatisés si possible. Pour les anémies sévères, il s'agit d'une urgence thérapeutique.
2 Anémies hémolytiques
Le tableau associe des signes d'anémie comme précédemment mais en plus un ictère et une splénomégalie.
2.1 Les causes immunologiques
Le test de Coombs sur les hématies de l'enfant est positif.
2.1.1 Incompatibilité rhésus (D)
La prévalence du génotype rhésus négatif est de 15 % (cde/cde). Il existe deux autres groupes majeurs du système rhésus Cc et Ee liés à l'antigène D et les trois groupes se transmettent en bloc. Leur fréquence est CDE = 14 %, CDe = 41 % et cde = 39 %.
L'exemple typique de l'incompatibilité foeto-maternelle est représentée par l'incompatibilité rhésus D où l'enfant possède l'antigène D et la mère en est dépourvue. Celle-ci fabrique des anticorps anti-D qui traversent le placenta et détruisent les globules de l'enfant. Cette incompatibilité est devenue rare depuis la prophylaxie des gammaglobulines anti-D. Le diagnostic repose sur l'existence d'une anémie hémolytique et la positivité du test de Coombs.

2.1.1.1 Quatre tableaux cliniques peuvent s'observer dans l'incompatibilité rhésus à la naissance. Durant la vie foetale, les risques sont liés à l'anémie responsable d'hypoxie et non à l'hyperbilirubinémie qui est éliminée grâce au placenta. Il se produit une hématopoïèse extra-médullaire avec hépatosplénomégalie. Après la naissance, l'hyperbilirubinémie pourra être dangereuse.

    * mort foetale in-utéro due à une hypoxie majeure

    * anasarque foeto-placentaire. Oedème foetal important des membres et de la face, volumineuse ascite, hépatosplénomégalie, anémie très importante. Un collapsus s'observe lorsque l'anémie est intense.

    * ictère grave. Un ictère apparait dès les premières heures et s'aggrave rapidement avec pâleur. La splénomégalie est fréquente. L'hyperbilirubinémie constitue le risque majeur avec la survenue d'un ictère nucléaire (passage de la bilirubinémie libre vers les noyaux gris centraux). Cet ictère nucléaire réalise ensuite une encéphalopathie avec une contracture des muscles du dos et de la nuque, voire un opisthotonos, l'apparition de mouvements, enroulement des bras avec extension des membres inférieurs ; l'évolution se fait généralement vers la mort. Des formes séquellaires peuvent survenir avec hypotonie, athétose et surdité. Ce dramatique tableau peut être évité par une exsanguino-transfusion.

    * les formes atténuées. Il s'agit d'un ictère précoce apparaissant dans les 48 premières heures.

2.1.1.2 Le diagnostic biologique de l'incompatibilité rhésus repose sur :

    * l'anémie, bilirubine élevée, présence d'érythroblastes circulants, réticulocytes élevés

    * mère rhésus D négatif et enfant rhésus positif,

    * Coombs direct positif sur les hématies de l'enfant.

2.1.1.3 Le traitement de l'incompatibilité rhésus se schématise de la façon suivante:

- Préventif
La prévention de l'immunisation rhésus repose sur l'injection de gammaglobulines anti-D chez des femmes rhésus négatif. L'injection doit être pratiquée dans les 72 heures qui suivent l'accouchement (100 à 300 mg). Les injections doivent être effectuées aux femmes rhésus négatif après la naissance d'un enfant rhésus positif ou après un avortement spontané ou provoqué.
Il faut surveiller régulièrement les femmes rhésus négatif, dont le père de l'enfant est rhésus +. La recherche d'un anticorps anti-D dans le sérum maternel s'effectue au 3è, 6è, 8è et 9è mois de gestation. Lorsque les anticorps s'élèvent, on pourra être amené à effectuer une amniocentèse avec dosage de la bilirubine amniotique (indice optique sur le diagramme de Liley) qui permet, en fonction du terme, de préciser la gravité de l'atteinte foetale. On peut enfin doser l'hémoglobine foetale par ponction de sang foetal.

- Curatif
Il dépend de la gravité de deux paramètres : l'anémie et l'hyperbilirubinémie
- ictère exagéré : surveillance très précise du taux sur le diagramme. Il nécessite souvent une photothérapie.
- ictère grave : la photothérapie, parfois insuffisante, doit être associée à une transfusion d'échange. Le volume échangé, par volume de 10 à 20 ml, est de 1,5 à 2 fois la masse sanguine. On utilise du sang frais et irradié.
- anasarque foeto-placentaire : c'est une urgence. Dès la salle de travail, on transfuse des érythrocytes pour corriger l'anémie puis on exsanguine.
2.1.2 Incompatibilité ABO
Ce diagnostic n'est pas toujours facile à mettre en évidence d'autant plus que le test de Coombs est parfois négatif, en raison de la faiblesse antigénique. L'ictère est moins sévère que dans l'incompatibilité rhésus mais la conduite à tenir est la même.
2.1.3 Incompatibilité dans des groupes mineurs
Ces incompatibilités, certes rares, peuvent donner des hémolyses sévères. Les anticorps les plus fréquents sont les anti-c, anti E et anti-Kell. La conduite est identique à celle de la maladie rhésus mais il n'y a pas de prévention.
2.1.4 Anémie hémolytique maternelle auto-immune
Passage transplacentaire d'anticorps anti-érythrocytaires.
2.2 Causes non immunologiques
2.2.1 Anémies hémolytiques constitutionnelles
Elles peuvent se révéler par une hémolyse avec un ictère important en période néonatale. En l'absence de cause immunologique évidente (test de Coombs négatif), il faut principalement évoquer une maladie de Minkowski-Chauffard ou un déficit en G-6PD. Si le diagnostic n'est pas fait en période néo-natale, il faut le prévoir à l'âge de 6 mois. La conduite à tenir dépend de l'importance de l'anémie et de l'hyperbilirubinémie : simple surveillance, photothérapie ou transfusion d'échange.
2.2.2 Causes infectieuses
Ces anémies d'origine infectieuse, relèvent généralement d'un mécanisme complexe (sidération de l'érythropoïèse, hémolyse et parfois hémorragie). Toutes les infections néo-natales peuvent être en cause :

    * microbiennes : streptocoque, Listeria, Staphylocoque
    * parasitaires : toxoplasmose, paludisme, syphilis
    * virales : rubéole, cytomégalovirus, herpès...

3 Conduite à tenir devant une anémie du nouveau-né
Devant cette anémie du nouveau-né, il faut :
- évaluer la gravité de l'anémie qui peut nécessiter un traitement de toute urgence, indépendamment de toute étiologie. En effet, une anémie sévère peut être responsable d'un choc ;
- dans la plupart des cas, rechercher l'étiologie, en tenant compte des antécédents familiaux, des circonstances de la grossesse et de l'accouchement et notamment la recherche d'une spoliation sanguine. Il faut effectuer un test de Coombs direct chez l'enfant. Si le test de Coombs est positif, ceci traduit l'existence d'un anticorps immun dont il convient de rechercher l'antigène responsable avec la recherche d'aglutines. Le Coombs négatif n'élimine pas formellement une incompatibilité, notamment dans le système ABO, mais incite à rechercher une cause non immunologique.

Toutefois, quelle que soit l'étiologie, il faut surveiller l'augmentation de la bilirubinémie libre pour éviter la survenue d'un ictère nucléaire (cf cours : ictère du nouveau-né).
Les infections néonatales
C. Yvenou

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 8 mars 1999

1 Infection bactérienne par contamination anté ou pernatale
1.1 Aspects cliniques
1.2 Diagnostic
1.3 Germes responsables
1.4 Traitement
1.5 Prévention
2 Contamination bactérienne postnatale
2.1 Clinique
2.2 Circonstances favorisantes
   

2.3 Traitement
2.4 Prévention
3 Infections virales & parasitaires
3.1 Rubéole congénitale
3.2 Cytomégalovirus
3.3 Herpès néonatal
3.4 Hépatite B
3.5 Hépatite C
3.6 VIH
3.7 Parasites

La pathologie infectieuse concerne 1% des nouveau-nés, qui constituent une cible privilégiée car :

    * La peau est fragile et son pouvoir bactéricide est faible du fait de son pH alcalin,
    * La muqueuse digestive est perméable,
    * La phagocytose est moins efficace,
    * L'immunité cellulaire ne s'installe que progressivement.

3 grands modes de contamination :
- Anténatale materno-fœtale

    * Précoce :
          o transplacentaire.

            Elle peut entraîner un avortement, un accouchement prématuré, une embryopathie ou une foetopathie.

    * Tardive : (>5mois)
          o hématogène : bactériémie et/ou septicémie chez la femme,
          o amniotique.

- Pernatale :

    * par le liquide amniotique,
    * si la poche des eaux est rompue,
    * par la filière génitale.

- Postnatale : germes provenant de la mère ou de l'environnement
1 Infection bactérienne par contamination anté ou pernatale
1.1 Les aspects cliniques, 4 grands tableaux :
1.1.1 La septicémie
- Altération majeure de l'état général
- Teint gris
- Collapsus
- Oedèmes
- Hypo ou hyperthermie
- Hépatosplénomégalie
- Ictère, purpura,
- Troubles du rythme respiratoire (polypnée, apnée)
- Hypotonie
1.1.2 La méningite
Isolée ou associée à la septicémie.
Les signes d'appels sont différents de ceux que l'on retrouve chez l'adulte ou le grand enfant :
- Convulsions
- Fontanelle bombée
- Geignement
- Coma
- Refus de boire et /ou vomissement
1.1.3 Tableau focalisé
- Infection urinaire (souvent accompagnée d'un ictère)
- Entérocolite
- Ostéo-arthrite
- Conjonctivite
- Infection pulmonaire
Ces différents tableaux peuvent être isolés ou ajoutés à la septicémie.
1.1.4 Tableaux localisés
= Porte d'entrée
- Cutanée
- Infection ombilicale ou mammaire
- Diarrhée
Qui favorisent l'entrée du germe dans l'organisme.
1.2 Le diagnostic repose sur 2 éléments
1.2.1 L'interrogatoire : à la recherche d'un contexte infectieux maternel récent :
- Fièvre maternelle récente (quelques heures ou quelques jours avant l'accouchement)
- Infection urinaire
- Infection vaginale
- Durée d'ouverture de la poche des eaux (risque de colonisation après 12 heures)
- Liquide amniotique teinté ou fétide
- Manoeuvres obstétricales
1.2.2 Les examens paracliniques :
- Numération et formule sanguine :

    * Anémie
    * Hyperleucocytose >30 000
    * Leucopénie <5000
    * Myélémie
    * Thrombopénie
    * CRP à 24 heures de vie (car elle ne s'élève que secondairement)
    * Fibrinogène >3

- Prélèvements bactériologiques :

    * Centraux : liquide céphalo-rachidien, hémoculture, culot urinaire)
    * Périphériques : gastrique et méconial.

L'examen direct a une bonne valeur d'orientation.
La découverte d'un germe à la culture dans le sang ou le LCR impose le diagnostic.
En ce qui concerne les prélèvements périphériques, sont considérés comme significatifs :
- des prélèvements positifs au même germe sur plusieurs sites
- des prélèvements positifs au même germe chez la mère et chez l'enfant
1.3 Les germes responsables
1.3.1 Contamination anténatale :
- Streptocoque B le plus souvent
- Colibacille
- Listéria
- Staphylocoque
1.3.2 Contamination postnatale :
- Bacilles G –
- Staphylocoques
1.4 Traitement :Urgent
1.4.1 Antibiothérapie :
Association bactéricide à spectre étendu et bonne diffusion méningée.
- Amoxicilline + Aminosides si Streptocoque B.
- Cephalosporine + Aminosides si G –.
- Amoxicilline + céphalosporine + Aminosides en l'absence d'orientation étiologique et en attendant les résultats des prélèvements bactériologiques.

Par voie intraveineuse, pendant :
- 10 j pour une septicémie.
- 21 j pour une méningite.
1.4.2 Maintien des grandes fonctions vitales
Température, équilibre hydro-électrolytique, hémodynamique, respiration.
1.5 Prévention

- Dépistage du portage maternel pendant le 3ème trimestre de la grossesse.
- Hémoculture et traitement antibiotique de la mère en cas de fièvre.
- Traitement d'une infection urinaire ou vaginale.
Agents habituels de l'infection périnatale
 
GERMES
   
ANTENATALE
Transplacentaire
   
PERNATALE
Amnios
   
Pelvis
    POSTNATALE

Cocci :
Entérocoque
- Streptocoque B
Staphylocoque
Gonocoque
         


++
+
   

+
++
++
++
   


++
++
Bacilles G+
Listéria    

++
   

++
   

++
   

+

Bacilles G-
Entérobactéries :
- Colibacille
Klebsielle
Proteus
Serratia

Pseudomonas
   
 
   


++
+
+


+
   


++
+
+


+
   


+++
+++
+
++

+++
Syphilis    
+++
   
 
   
+
     
Candida          
+
   
+
   
+++
Virus
Rubéole
Cytomégalovirus
Herpès I
Herpès II
Hépatite B
Hépatite C
HIV    

+
+
+
+
+
+
+
   
 
   




+
   


+


+
Parasites
Toxoplasmose    

+
   
  
           
 
2 Contamination bactérienne postnatale
2.1 Clinique
- Septicémie
- Méningite
- Suppuration localisée : ombilicale, oculaire, ostéo-articulaire …
2.2 Circonstances favorisantes
- Prématurité
- Porte d'entrée : malformation urinaire …
- Thérapeutique invasive : cathéter, drainage pleural, intubation trachéale …
2.3 Traitement
- Guidé par les données bactériologiques.
2.4 Prévention
- Lavage des mains.
- Réalisation des gestes " agressifs " (pose de cathéter) selon les règles de l'asepsie.
- Matériel à usage unique.
- Propreté et stérilité des divers objets nécessaires aux soins.
- Limitation de l'antibiothérapie à des situations où le risque infectieux est avéré.
3 Les infections virales
3.1 La rubéole congénitale
Elle est consécutive à une infection maternelle primaire par le virus de la rubéole, transmis au fœtus par voie hématogène placentaire.
Les formes les plus graves (malformations cardiaques, oculaires, cérébrales, surdité) se voient dans les contaminations des 2 premiers mois de la grossesse. Les atteintes plus tardives (RCIU, atteinte hématologique, anomalies osseuses, hépatosplénomégalie) sont liées au mode d'action du virus (cytolytique et inhibiteur de mitoses).
Le diagnostic repose sur les sérologies. Une séroconversion avant la 18ème semaine de grossesse pose le problème d'une décision d'interruption de grossesse.
L'étude des anticorps par prélèvement de sang fœtal au cordon permet de préciser cette indication.
3.2 Le cytomégalovirus
La transmission se fait par voie hématogène transplacentaire.
Qu'il s'agisse d'une primo-infection ou d'une atteinte récurrente chez une femme enceinte, le risque d'atteinte fœtale est d'environ 50%.
La forme grave associe aux signes habituels de l'infection généralisée (ictère, hépatosplénomégalie, purpura, thrombopénie, pneumonie, des anomalies du développement céphalique (microcéphalie, calcifications périventriculaires, surdité, retard psychomoteur et hypotrophie).
Les formes plus discrètes ne dispensent pas d'un suivi prolongé ( retard psychomoteur, surdité).
Le diagnostic d'infection fœtale se fait  par la recherche de virus dans le liquide amniotique, par prélèvement de sang fœtal (culture de virus et recherche d'IgM spécifiques).
Le diagnostic d'atteinte fœtale nécessite des examens échographiques répétés qui cherchent à mettre en évidence des signes de foetopathie.
A la naissance, sont nécessaires :

    * une échographie transfontanellaire
    * un isolement du virus sur urines fraiches
    * une recherche d'Igm spécifiques

Le nouveau-né doit être isolé car il est contagieux.
Il n'existe pas de traitement curatif.
3.3 Herpès néonatal
L'infection herpétique néonatale touche 1 à 3 nouveau-nés pour 10 000 naissances. Elle est le plus souvent due au virus Herpès Simplex de type 2 (prédominant dans le tractus génital).
Le risque pour le nouveau-né est neurologique et ophtalmique. Le pronostic vital peut être mis en jeu si l'atteinte est disséminée.
3 modes de contamination sont possibles :

    * anténatal, par voie transplacentaire, en cas de primo-infection chez la mère, ou par voie ascendante si la poche des eaux est rompue.
    * pernatal , par contact avec des lésions génitales actives.
    * postnatal : à partir de lésions labiales.

Le mode d'accouchement découle de l'histoire clinique de la patiente dans les mois précédents et de l'examen gynécologique très soigneux en début de travail.
La présence de lésions herpétiques génitales en début de travail peut conduire à une césarienne avant rupture des membranes.
En l'absence de lésions cliniques, un accouchement par voie basse peut être possible (sous couvert d'un badigeonnage de la muqueuse vaginale avec une solution iodée).
A la naissance, le nouveau-né recevra un bain à la Bétadine diluée suivi d'un rincage soigneux. Un collyre antiviral est instillé pendant plusieurs jours.
Le diagnostic de l'infection chez le nouveau-né requiert un isolement du virus dans les sécrétions, la recherche d'IgM spécifiques, le dosage d'interféron dans le LCR.
Un traitement par Aciclovir Ò est mis en route en attendant les résultats.
3.4 Hépatite B
La contamination du nouveau-né est possible :

    * si l'hépatite est survenue pendant le troisième trimestre de la grossesse.
    * si la mère est porteuse de l'antigène HBS au cours du 3ème trimestre de la grossesse, avec ou sans antigène Hbe.
    * si la mère est porteuse chronique d'HBS.

Le portage chronique survient chez 40% des enfants de mères porteuses chroniques pour le virus B. Il peut être asymptomatique, ou s'accompagner d'une élévation des transaminases et évoluer vers une hépatite chronique, une cirrhose ou un hépatome.
A la naissance le nouveau-né reçoit dans les 24 premières heures une séro-vaccination (Immunoglobulines spécifiques par voie intra musculaire, vaccination par une première dose de vaccin qui sera renouvelée à 1 et 2 mois .
3.5 L'hépatite C
La contamination du nouveau-né se fait in utero ou en post partum.
Une infection associée par le VIH augmente le risque de transmission materno-fœtale.
Le diagnostic passe par la détection de l'ARN viral par PCR en anténatal et / ou la persistance d'anticorps anti-VHC au delà de 6 mois de vie.
3.6 Le VIH
Le risque de transmission materno-fœtale est lié à la charge virale maternelle (qui doit donc être traitée avant et pendant l'accouchement. Parallèlement le nouveau-né doit être traité par Azt pendant 6 semaines.
3.7 Les parasites
3.7.1 La toxoplasmose
Liée à une coccidie dont l'hôte spécifique est le Chat.
80% des femmes en âge de procréer sont immunisées.

    * La toxoplasmose acquise frappe 7% des non-immunisés.
    * La toxoplasmose congénitale concerne 3/1000 naissances.
    * La toxoplasmose oculaire est responsable de 90% des choriorétinites de l'enfant, et 25% des choriorétinites de l'adulte (par l'intermédiaire d'une atteinte fœtale).

3.7.2 Clinique :
La révélation peut être parfois tardive (choriorétinite)
Dans ¼ des cas, la symptomatologie est :

    * neurologique : encéphalomyélite
    * ophtamologique
    * septicémique

3.7.3 Le diagnostic
Il repose sur la mise en évidence du parasite dans le placenta, le sang du cordon et le liquide céphalo-rachidien par inoculation intrapéritonéale à la Souris (résultats en 4 à 6 semaines), la recherche par PCR dans le liquide amniotique et la mise en évidence d'anticorps spécifiques chez la mère et le nouveau-né :

    * chez la mère, une séroconversion , la présence d'anticorps de type IgM spécifiques, ou un taux d'anticorps supérieurs à 300 rendent très probable une infection récente (les anticorps apparaissent en 10 à 15 jours et atteignent leur maximum en 2 mois). Un interruption thérapeutique de grossesse est indiquée en cas d'atteinte fœtale sévère et en cas d'infection précoce et certaine.

    * chez l'enfant : il faut doser les IgM spécifiques (seuls 25% des nouveau-nés atteints sont porteurs de ces anticorps , qui sont transitoires), suivre l'évolution des anticorps (qui diminuent de moitié tous les mois quand il s'agit d'anticorps transmis).

3.7.4 Surveillance ultérieure et traitement :
Si le nouveau-né présente des signes d'infection  : Traitement d'urgence par pyriméthamine et sulfadiazine, et acide follinique en traitement continu, sous couvert d'une surveillance hématologique :

    * pendant un an dans les formes sévères,
    * 6 mois puis un mois sur 2 jusqu'à 12 mois dans les formes patentes,
    * 3 cures de 2 mois dans la 1ère année pour les formes latentes.

Les Aberrations chromosomiques
B. Le Marec

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 18 février 2000

1 La trisomie 21
1.1 Clinique
1.2 Cytogénétique
2 Mécanisme des aberrations chromosomiques
3 Autres principales aberrations chromosomiques
3.1 Trisomie 18
   

3.2 Trisomie 13
3.3 Maladie du cri du chat
4 Syndromes de Turner et de Klinefelter
4.1 Syndrome de Turner
4.2 Syndrome de Klinefelter
4.3 Conclusion
Objectifs

1. Donner l'incidence de la trisomie 21 en fonction de l'âge. Expliquer la différence entre une trisomie 21 libre et une trisomie par translocation, donner les risques de récurrence dans les deux cas et la conduite à tenir à la grossesse suivante.

2. Décrire les modifications morphologiques retrouvées au niveau de la tête et au niveau de la main et citer les principales malformations viscérales de la trisomie 21.

3. Décrire les mesures préventives qui permettraient de diminuer le nombre de naissances de trisomiques 21.

4. Indiquer les informations et les conseils à donner aux parents d'un enfant trisomique 21 et énumérer les institutions existant pour ce type d'enfants.

5. Décrire les signes cliniques devant faire évoquer le syndrome de Turner chez un nouveau-né, chez une fillette, chez une adolescente.

6. Donner les formules chromosomiques du syndrome de Turner et du syndrome de Klinefelter et citer deux autres examens complémentaires à demander lorsqu'on suspecte un syndrome de Turner.

7. Décrire l'avenir d'un enfant atteint du syndrome de Turner.

8. Expliquer le principe technique, l'interprétation et l'intérêt de la recherche du sexe chromatinien.
1 La trisomie 21

Décrite par Seguin (1846) sous le nom d'idiotie furfuracée, connue dans les pays anglo-saxons sous le nom de syndrome de Down, l'idiotie mongolienne a été rattachée en 1959 par Lejeune, Gauthier et Turpin à une anomalie chromosomique : une trisomie 21.

Par cette découverte s'ouvrait un nouveau chapitre de pathologie, celui des aberrations chromosomiques dont la trisomie 21 reste le type le plus fréquent.

Son incidence est de 1 cas pour 600 à 650 naissances vivantes, ce qui signifie pour le département d'Ille-et-Vilaine, qui compte 12 000 naissances/an, 20 cas nouveaux de trisomie 21 par an. Cela représente la cause la plus fréquente d'arriération mentale en France.

Toutefois, l'incidence varie avec l'âge de la mère : 1/2 000 à 20 ans ; elle augmente peu jusqu'à 30 ans, puis passe à 1/300 à 35 ans ; elle est de 1/200 à 38 ans ; 1/100 à 40 ans et 1/50 à 45 ans. Un tiers de trisomiques naissent donc de mères âgées de plus de 38 ans.
1.1 Clinique

L'enfant naît généralement à terme avec un poids de naissance normal.
Le diagnostic est parfois difficile chez le nouveau-né et en particulier chez le prématuré. C'est l'association d'une dysmorphie et d'une hypotonie qui conduit au diagnostic.
1.1.1 La dysmorphie

L'aspect de la tête et du visage est évocateur :
- la tête est petite, arrondie, la nuque aplatie, le faciès rond avec un profil plat ;
- les fentes palpébrales sont obliques, en haut et en dehors ;
- il existe un épicanthus, donnant un aspect d'écartement exagéré des yeux (hypertélorisme) ;
- le nez est court, peu saillant, avec une racine effacée ;
- les oreilles sont souvent bas implantées, petites, rondes, mal ourlées ;
- la bouche est petite, la langue est souvent plicaturée, et surtout protruse, la voûte palatine ogivale ;
- la première dentition est tardive ; et les dents apparaissent dans un ordre irrégulier ;
- à la périphérie de l'iris, quand il est bien bleu, on voit souvent de petites taches dites de Brushfield ; le strabisme est fréquent.

La main est particulièrement caractéristique :
- les doigts sont courts et larges ;
- au 5è doigt, il existe une brachymésophalangie avec clinodactylie ; la phalange moyenne du cinquième doigt est anormalement petite, faisant penser qu'il n'existe que deux phalanges à l'auriculaire et d'ailleurs, ce doigt ne présente souvent qu'un seul pli de flexion ;
- les dermatoglyphes sont très particuliers : dans un grand nombre de cas les les deux plis de la paume sont remplacés par un pli palmaire unique transverse (mais ce caractère n'est pas constant ; il se retrouve dans d'autres aberrations chromosomiques et aussi chez 1 % des sujets normaux).

Les enfants ont souvent un retard statural, mais non pondéral. Il existe souvent une hernie ombilicale et même un diastasis des grands droits. Les deux premiers orteils sont trop espacés.
1.1.2 Les malformations
1.1.2.1 Les malformations cardiaques
sont présentes dans près de 50 % des cas. Il s'agit le plus souvent d'un canal atrio-ventriculaire (cardiopathie non cyanogène avec souffle, gros coeur à la radiographie, axe hyper droit à l'E.C.G.). Dans sa forme complète, comportant CIA + CIV + fentes mitrale et tricuspidienne, cette cardiopathie est très sévère, le plus souvent mortelle dans la première année de vie. Le traitement chirurgical reste grevé d'une lourde mortalité.
1.1.2.2 Les malformations digestives :

- atrésie duodénale et surtout,
- sténose duodénale incomplète entraîne des vomissements.

Les malformations cardiaques et digestives sont donc à rechercher systématiquement en période néonatale chez le trisomique 21. Elles peuvent être à l’origine de diagnostic anténatal (nous y reviendrons).
1.1.2.3 L'arriération mentale

L'encéphalopathie se traduit à la naissance par une hypotonie contrastant avec l'hypertonie physiologique du nouveau-né normal. Elle est constante et est un argument diagnostique lorsque la dysmorphie est douteuse.

L'encéphalopathie devient plus évidente avec la croissance. Le retard du développement psychomoteur est constant dès la première enfance : il est exceptionnel qu'ils aient acquis la marche à un âge normal (avant 18 mois) ; toutefois l'arriération mentale devient souvent plus évidente plus tard devant une acquisition très tardive du langage. Au total un faible pourcentage aura l'apprentissage de la lecture et moins encore celui de l'écriture.

Le QI se situe généralement aux environs de 50 à l'âge de cinq ans mais il va souvent décroître ensuite.

Le diagnostic est en général facile à porter. Il se pose parfois lorsque la dysmorphie est discrète et surtout à la naissance ou lors des premiers mois de la vie, avec :
- le myxoedème du nourrisson,
- la maladie des épiphyses ponctuées, beaucoup plus rare,

Bien entendu, dans tous les cas douteux, le caryotype confirme la trisomie.
1.1.3 Evolution

Alors que la croissance pondérale est souvent normale, la croissance staturale se fait en général à -2DS au-dessous de la moyenne (d'où un excès pondéral relatif). La dysmorphie s'atténue avec le temps mais à l'âge adulte, ils auront vite un aspect précocément vieilli.
Mais la gravité des cardiopathies entraîne le décès d'un certain nombre d'entre eux de façon précoce. En l'absence de ces malformations, l'espérance de vie a dépassé 55 ans.
Ces enfants sont réputés sensibles aux infections, en particulier à la tuberculose. Ils devront bénéficier de toutes les vaccinations.
On insiste sur la fréquence des leucémies aiguës dix fois plus élevées chez ces enfants que dans la population générale.

Adultes, ces sujets restent petits, volontiers obèses, après l'âge de la puberté qui survient à la date normale. Les filles sont règlées normalement et peuvent être fécondes avec, alors, le risque d'avoir un enfant trisomique 21 : ceci pose un problème nouveau depuis que ces jeunes filles vivent dans des établissements mixtes et les familles doivent en être averties. Le trisomique est stérile.

L'arriération mentale est un problème social. Les parents doivent être informés dès la naissance de la gravité de la maladie mais, bien entendu, en donnant cette information, le médecin devra tenir compte de la situation particulière de chaque famille.

Ces enfants peuvent parfaitement être suivis dans une maternelle normale. A six ans, ils sont souvent maintenus une année de plus en classe maternelle. Puis se pose le problème de la scolarité obligatoire : c'est alors que les parents perçoivent le plus cruellement le fait que leurs enfants sont handicapés mentaux car ils ne peuvent suivre une scolarité normale. Depuis quelques années, on tente de mettre en place partout des "classes intégrées" c'est-à-dire des classes spéciales pour un petit groupe (de 8 environ) d'enfants handicapés mentaux (presque toujours des trisomiques) ; mais cette classe est située dans une école primaire ordinaire ce qui permet un certain contact avec les autres enfants (et en même temps un contact des enfants normaux avec des handicapés, ce qui est extrêmement utile).

Ou bien encore, on tentera d'apporter les rudiments de scolarité dans les Instituts Médico-Pédagogiques (IMP) puis dans les Instituts Médico-Professionnels (I.M.Pro) ; là, on tentera de leur apprendre les rudiments d'un travail manuel permettant d'entrer dans les Centres d'Aide par le Travail (C.A.T) où ils sont faiblement rénumérés pour un rendement partiel.

Pour l'avenir matériel de ces enfants, les parents sont souvent soucieux de leur assurer un minimum de ressources en souscrivant à des assurances spéciales. Les parents d'enfants inadaptés ont créé des associatons telles que "Les Papillons Blancs" qui développent entraide et services spécialisés. Regroupés au sein de l'U.N.A.P.E.I. (Union Nationale des Associations de Parents d'Enfants Inadaptés), ou de l'A.P.A.J.H (Association de Placement et d'Aide aux Jeunes Handicapés) ; ces associations sont très actives auprès des pouvoirs publics.

Des dispositions sociales visent à soulager les familles :
- il existe une allocation spéciale aux handicapés (versée par les Caisses d'Allocations Familiales) ;
- ces sujets bénéficient de la carte d'invalidité qui entraîne certains avantages sociaux pour la famille de l'enfant (une demie part supplémentaire dans le calcul de l'impôt, gratuité de la vignette automobile et dans certaines villes, gratuité des transports publics pour l'enfant atteint).

Ces enfants sont donc une lourde charge pour les familles et la société, mais une meilleure connaissance du mécanisme de la maladie conduit à pouvoir préconiser quelques mesures préventives : c'est toute la politique du diagnostic prénatal sur lequel nous reviendrons. Mais parler d’éradication possible de la trisomie 21 est inacceptable et d’ailleurs inexact : la naissance d’un trisomique 21 de mère jeune est un fait imparable.
1.2 Cytogénétique

Le caryotype est toujours indispensable, non pas tellement pour confirmer le diagnostic posé cliniquement, mais pour le conseil génétique. Le caryotype révèle dans 95 % des cas une trisomie libre, (c'est-à-dire que les trois chromosomes 21 sont bien isolés) par rapport à la trisomie par translocation et homogène c’est-à-dire présents dans toutes les cellules par opposition à la trisomie 21 en mosaïque, rare (2 % des cas).

L'aberration chromosomique est due ici à une maldisjonction des deux chromosomes 21 au moment de la méiose ; un des gamètes garde les deux chromosomes 21 et se fusionne ensuite avec le gamète du sexe opposé, réalisant ainsi une cellule trisomique. Cette maldisjonction est fréquente chez la femme de plus de 40 ans et s'explique en partie par le vieillissement des ovules qui existent chez la fille dès la naissance et qui sont ainsi soumis à de nombreuses agressions. Mais cette trisomie libre peut se voir aussi cependant chez la femme jeune. Dans ce dernier cas, le risque de survenue d'un nouvel enfant trisomique 21 est faible, mais certainement nettement supérieur à celui de la population générale ( 1 % c'est-à-dire celui d'une femme de 40 ans). Enfin, on a pu prouver que la non-disjonction était parfois d'origine paternelle !
Dans 5 % des cas de trisomie 21, on ne retrouve que deux chromosomes 21 libres, le troisième est transloqué sur un autre chromosome, généralement le chromosome 14, plus rarement du groupe 21 - 22. Il s'agit alors d'une trisomie par translocation.
La translocation peut se produire au moment de la méiose, qui a donné le gamète fécondé : c'est une translocation "de novo". L'enfant trisomique 21 est le seul a avoir un caryotype anormal ; les caryotypes des parents sont normaux ; dans ce cas, le risque d'avoir un nouvel enfant trisomique 21 pour la mère est faible, (de l'ordre de 1 %).
Mais parfois, cette translocation est familiale. La mère (ou plus rarement le père), bien qu'étant cliniquement tout à fait normale, est porteuse de la translocation. Elle n'a qu'un chromosome 21 libre, l'autre est transloqué. Lors de la méiose, le risque d'une malségrégation des chromosomes est considérable, le chromosome transloqué suivant le chromosome porteur en même temps que l'autre chromosome 21. Dans une translocation d'un 21 sur un 14, le risque théorique de voir naître une trisomique est de 1/3 à chaque naissance.
En fait, il est plus faible (1/5) lorsque le parent transloqué est la mère, 1/20 lorsque c'est le père.

Ces notions ont conduit à la mise en place du diagnostic prénatal, qui fera l'objet d'un chapitre particulier.
2 Mécanisme des aberrations chromosomiques

Les aberrations chromosomiques résultent donc d'accidents mécaniques subis par le chromosome lors de la division cellulaire.
Lors de la méiose, deux mécanismes sont possibles :
- la non disjonction aboutissant à des anomalies du nombre : ex. Trisomie 21 ;
- la cassure aboutissant à des anomalies de stucture :

    * la cassure simple entraîne la perte d'un fragment de chromosome, il s'agit d'une délétion simple,
    * la cassure double peut permettre une délétion intercalaire, le segment distal se recollant au segment restant avec ou sans inversion.
    * Enfin, en cas de casssure, le fragment libre peut rejoindre un autre chromosome ; il y a alors translocation.

Les possibilités sont nombreuses et la nomenclature a été fixée lors de réunions internationales (CHICAGO, 1956 - PARIS, 1971). Le caryotype indique le nombre total de chromosomes, les chromosomes sexuels, les anomalies autosomiques : l'homme normal = 46, XY ; le trisomique = 47, XY, + 21.

Dans les anomalies de structure :
(-) indique une délétion, par exemple :

    *
      (5p-) indique une délétion du bras court du 5,
    *
      (18q-) indique une délétion d'un bras long de 18.

(+) indique une adjonction : dans la translocation, on met entre parenthèses les chromosomes entre lesquels se sont faites les translocations. 45, XY, t (14q ; 21 q) signifie qu'il y a translocation d'un bras long du 14 sur un bras long du 21 : c'est la translocation robertsonienne la plus couramment à l'origine d'une trisomie par translocation.
3 Autres principales aberrations chromosomiques
3.1 Trisomie 18

(1 cas sur 5000 naissances, c'est-à-dire qu'elle constitue la moins rares des aberrations chromosomiques après la trisomie 21).

La trisomie 18 réalise un aspect assez évocateur, associant chez un RCIU, le plus souvent de sexe féminin :
- des anomalies du crâne et de la face (front fuyant, dolichocéphalie, nez petit et pointu, oreilles mal ourlées, pointues et d'implantation basse : "oreille de faune", bouche petite, rétrognathisme), parfois fente labiale et fente palatine.
- des anomalies des extrémités :

    * poings fermés, chevauchement du 3ème doigt par l'index, et du 4è par le 5è, pli palmaire unique, modification des dermatoglyphes ;
    * pieds varus équin, gros orteil court et en flexion dorsale permanente, pied en piolet.

- des malformations viscérales (cardiaques, rénales) ou de la paroi abdominale (omphalocèle).

L'évolution est rapidement mortelle (par cardiopathie surtout).
Sa relative fréquence conduit les gynécologues à la redouter systématiquement devant tout R.C.I.U inexpliqué débutant au 2è trimestre.
Aujourd’hui le diagnostic anténatal est presque toujours fait à partir des signes échographiques (omphalocèle, cardiopathie, main qui reste fermée) associés à un RCIU.
L’évolution, toujours mortelle, fait qu’il n’y a pas de problème éthique à leur interruption.
3.2 Trisomie 13 (1 cas sur 9 000 naissances)

La trisomie 13 associe une microcéphalie, des anomalies oculaires, souvent une fente labiale bilatérale et une fente palatine, parfois une cyclopie. Il existe un pli palmaire transverse et surtout une polydactylie.
Le pied est le plus souvent en talus, avec hexadactylie.
Les malformations cardiaques et rénales sont quasi-constantes de même que les anomalies du cerveau.
Cette aberration est incompatible avec la vie.
Là encore, aujourd’hui, le diagnostic anténatal est fait et est suivi d’une interruption médicale de grossesse.
3.3 La maladie du cri du chat

Cette maladie est due à une délétion du bras court du chromosome 5 (5p-). Son incidence serait 1/50 000 à 1/100 000 naissances.

La maladie tire son nom du cri plaintif émis par ces enfants, cri qui évoque le miaulement du chat et s'explique par une hypoplasie du larynx.
Il existe par ailleurs, diverses dysmorphies : hypertélorisme, épicanthus, obliquité des fentes palpébrales vers le bas, pli palmaire transverse.
Le retard du développement psychomoteur, très important, est constant mais l'absence de malformation viscérale fait que ces enfants vivent.
Cette délétion est parfois en rapport avec une translocation réciproque équilibrée chez un des parents et nécessite donc toujours d'avoir le caryotype des parents.
4 Syndromes de Turner et de Klinefelter
Parmi les quatre anomalies gonosomiques qui peuvent s'accompagner d'une intelligence normale, deux ont un phénotype normal (47,XXX et 47,XYY) ; deux ont un phénotype anormal : le syndrome de Turner et le syndrome de Klinefelter.
4.1 Syndrome de Turner
 4.1.1 Diagnostic positif
4.1.1.1 Chez le nouveau-né ou le nourrisson

Il touche environ un nouveau-né de sexe féminin sur 5.000, réalisant alors le classique status de Bonnevie-Ullrich qui associe :
- cou palmé (pterygium colli) : replis cutanés s'étendant de la pointe de la mastoïde à l'acromion d'où un cou élargi, avec implantation basse des cheveux, de traitement chirurgical difficile (risque de cicatrices chéloïdiennes) ;
- lymphoedème, présent dès la naissance, au dos des mains et des pieds et qui persistera plusieurs semaines, voire plusieurs mois ;
- la taille est déjà petite, souvent inférieure au 3è percentile ;
- la dysmorphie faciale n'attire que rarement l'attention à ce stade ;
- les malformations viscérales, en particulier cardiaques ne conduisent qu'exceptionnellement au diagnostic à cette période, sauf parfois la coarctation de l'aorte qui doit, chez un nouveau-né de sexe féminin, faire rechercher ce diagnostic.
4.1.1.2 Chez l'enfant ou l'adolescente

Le diagnostic est alors suspecté devant l'association :
- retard statural ;
- chez une fillette : dysmorphique, aux nombreuses anomalies, en particulier osseuses, parfois porteuse de malformations viscérales, présentant une aménorrhée primaire, ayant une intelligence normale.

1. Le retard statural : motif fréquent de consultation, il ne manque pratiquement jamais, aboutissant sans poussée de croissance pubertaire, à une petite taille (1,45 m en moyenne), ne constitutant que rarement un nanisme (défini par une taille inférieure de trois déviations standard au moins par rapport à la moyenne pour l'âge)

2. La dysmorphie est plus évidente à cet âge :
- bouche aux commissures labiales abaissées ("en chapeau de gendarme"), épicanthus, ptosis, microrétrognathisme,
- thorax large ("en bouclier") avec écartement intermamelonnaire augmenté,
- cubitus valgus, classique mais sans valeur car physiologique dans le sexe féminin ; la brachymétacarpie du 4è doigt, plus visible lorsque le poing est fermé, est parfois évocatrice,
- au niveau de la peau, citons la fréquence des naevi pigmentaires.

3. Les anomalies ossseuses doivent être recherchées de façon systématique :
- au niveau de la main, outre le retard d'ossification, on a décrit de nombreux signes, dont le plus caractéristique constitue le signe d'Archibald : la ligne joignant les têtes des 4è et 5è métacarpiens n'est plus tangente à celle du 3è en raison de la brièveté du 4è métacarpien, cette brièveté est parfois caricaturale ; on peut retrouver parfois au niveau des pieds une brièveté du 4è métartarsien ;
- au niveau du genou, le signe de l'enclume tibiale, ou signe de Kosowicz est constitué par une déformation de la partie interne de la métaphyse tibiale supérieure, véritable déformation exostosique en forme d'enclume, s'accompagant parfois d'une inclinaison du plateau tibial interne avec un condyle fémoral interne plus développé en hauteur que l'externe.

4. Les malformations viscérales touchent essentiellement les reins et le coeur :
- les malformations rénales sont présentes dans la moitié des cas, mais le plus souvent sans traduction clinique, représentées essentiellement par le rein en fer à cheval, qui expose toutefois aux complications de la stase urinaire ; on remarque parfois des anomalies de position (rein pelvien) ou de nombre (bifidité pyélocalicielle) ;
- les malformations cardiaques toucheraient une turmérienne sur quatre ; elles sont représentées essentiellement par la possibilité de coarctation de l'aorte ; les autres sténoses sont plus rares ; les anomalies septales sont exceptionnelles.

5. L'aménorrhée primaire est constante, s'accompagnant d'infantilisme avec absence de caractères sexuels secondaires (absence de développement mammaire avec aréoles non pigmentées, pilosité axillaire absente et pubienne réduite) ; les oragnes génitaux externes sont infantiles.
- L'échographie pelvienne révèle l'existence d'un utérus petit avec ovaires réduits à l'état de bandelettes ;
- Sur le plan biologique : on peut confirmer l'atteinte gonadique avec sécrétion de LH et FSH plasmatiques élevés, absence d'élimination de prégnandiol et 17 cétostéroïdes à la limite inférieure de la normale.
Les thyroïdites auto-immunes sont particulièrement fréquentes.

6. L'intelligence normale : la débilité mentale ne fait pas partie du syndrome de Turner ; même si un très faible pourcentage semble présenter une débilité franche, l'immense majorité aura une intelligence normale. Les hypoacousies par trouble de la perception sont par contre fréquentes pouvant retentir sur les acquisitions.
4.1.1.3 Chez le foetus

- C'est le plus souvent l'hygroma kystique cervical, cloisonné, parfois volumineux, réalisant alors la classique "coiffure de pharaon" qui conduit au diagnostic échographique, parfois dès la 16è semaine d'aménorrhée ; il est souvent associé un oedème du foetus avec ascite et oligo-amnios. La découverte de cette image échographique est évocatrice du syndrome de Bonnevie-Ullrich et justifie la réalisation d'un caryotype foetal. L'échographie endovaginale permet d'obtenir des images encore plus précoces.

- En fait il semble bien que les hygromas kystiques volumineux et précoces (début du 2è trimestre) conduisent de façon inéluctable au décès foetal : ce n'est que lorsque une connexion se produit entre le système lymphatique cervical postérieur et le système jugulaire, que l'hygroma kystique du cou peut disparaître, laissant comme "cicatrice" le cou palmé.

- La découverte d'une malformation urinaire et en particulier d'un rein à fer à cheval peut amener au diagnostic anténatal du syndrome de Turner ; cette situation semble en fait plus rare que la découverte d'une coartation de l'aorte qui semble assez souvent être un signal d'appel surtout lorsque s'y associe un hygroma cervical.
4.1.2 Evolution - Traitement

Le retard statural semble pouvoir être amélioré par l'hormone de croissance humaine si ce traitement est commencé tôt.
Lorsque apparaît une maturation osseuse, l'aménorrhée primaire et l'infantilisme seront traités par des oestrogènes qui entraîneront rapidement une féminisation sur le plan physique et psychologique ; on mettra en route des cycles artificiels et on observera libido et vie sexuelle normales.

Des espoirs de grossesse apparaissent chez les jeunes femmes grâce aux dons d'ovocytes.
4.1.3 Diagnostic étiologique
4.1.3.1 Monosomie X

Elle correspond au caryotype 45,X (associé à une chromatine sexuelle négative : absence de corpuscule de Barr sur le frottis jugal). C'est le syndrome turnérien le plus pur, le plus complet et le plus fréquent (plus de la moitié des cas).
On se souviendra que :
- la monosomie X représente 10 % des avortements spontanés précoces alors qu'elle ne se retrouve à la naissance que chez un nouveauné sur 5.000 ; la quasi-totalité des caryotypes 45,X conduit donc à une fausse couche spontanée ;
- l'X perdu est le plus souvent d'origine paternelle, ce qui rend compte du fait que l'âge maternel moyen n'est pas augmenté contrairement à la trisomie 21.
4.1.3.2 Mosaïques sans anomalies de structure de l'X

Elles représentent la deuxième cause de syndrome de Turner.

- Ces mosaïques habituellement ne comportent pas de chromosome Y : la plus fréquente et de loin, est la mosaïque 45,X/46XX ; plus rarement on retrouvera : 45,X/46,XX/47XXX ou 45,X/47,XXX.

Les mosaïques comportant un chromosome Y, beaucoup plus rares, posent des problèmes différents :
- du point de vue clinique elles ne donnent pas toujours des syndromes de Turner et on peut tout rencontrer, du syndrome de Turner typique au phénotype masculin normal ;
- du point de vue évolutif : ces anomalies chromosomiques exposent à un risque majeur de gonadoblastome et justifient une résection préventive des gonades.
4.1.3.3 Mosaïques avec anomalies de structure de l'X

Elles sont également nombreuses. Nou citons les principales d'entre elles.
- L'existence d'un isochromosome pour le bras long de l'X (deux fois le bras long et absence de bras court) est la moins rare ; il y a donc une monosomie pour le bras court de l'X et une trisome pour le bras long ; cela s'écrira : 46,X,i(Xq) ; pterygium colli et coarctation de l'aorte seraient particulièrement rares dans cette forme.
- Le chromosome X en anneau ou r (X) réalise une amputation des deux fragments distaux avec fusions secondaires des deux extrémités ; presque toujours cette anomalie chromosomique est observée en mosaïque : 45,X/46,X,r(X). C'est dans cette seule variété de syndrome de Turner que se rencontrerait un retard mental vrai.
4.1.4 Diagnostic différentiel
4.1.4.1 Chez le foetus

C'est à ce moment que se posent les véritables problèmes car il faudra éviter les pseudo-hygromas, visibles entre 10 et 13 semaines, transitoires, non cloisonnés : ils correspondent en fait à un retard de communication lymphaticojugulaire physiologique.
Mais l'hygroma kystique peut être en rapport avec une authentique aberration chromosomique autre : trisomie 18 et surtout trisomie 21 : c'est dire que le caryotype foetal est indispensable lors de la découverte de cette image. Mais il pourra être normal et correspondre, en particulier, à un syndrome de Noonan. Enfin la découverte d’un syndrome de Turner en diagnostic anténatal pose des problèmes éthiques : cela justifie-t’il une interruption médicale de grossesse ? La réponse à cette question n’est pas simple et peut varier individuellement.
4.1.4.2 Chez l'enfant
Le syndrome de Noonan, à transmission autosomique dominante, doit être évoqué devant tout phénotype turnérien chez un garçon ou chez une fille turnérienne à caryotype normal (quoiqu'il puisse exister semble-t-il d'authentiques syndromes de Turner à caryotype normal) ; dans le syndrome de Noonan, la cardiopathie retrouvée sera une sténose pulmonaire et la dysmorphie différente (fentes palpébrales franchement obliques en bas et en dehors).
4.2 Syndrome de Klinefelter

Contrairement au syndrome de Turner, il n'est que rarement une affection pédiatrique. Plus fréquent que le syndrome de Turner, il touche un sujet masculin sur 1.000 ; comme dans la trisomie 21, l'âge maternel moyen est plus élevé que dans la population générale.
4.2.1 Diagnostic positif
4.2.1.1 Avant la puberté
Il existe déjà des signes d'orientation et pourtant le diagnostic est rarement suspecté devant :
- un retard staturo-pondéral, mais ce signe est rarement à l'origine du diagnostic, car le klinefeltérien est trop souvent pensé en termes de sujet de grande taille.
- parfois un retard psychomoteur ou un retard scolaire,
- des anomalies génitales :

    * cryptorchidie ;
    * volontiers associée à une hypoplasie de la verge ;
    * voire un hypospadias ;
    * un signe paraît avoir une valeur particulière : l'existence d'un raphé périnéal médian, saillant et anormalement pigmenté ;

Cependant des sécrétions hormonales ne sont pas modifiées par rapport à un garçon normal.
Il n'existe pas de dysmorphie particulière.
4.2.1.2 Chez le sujet pubère
La morphologie du klinefeltérien est variable, classiquement il est :
- longiligne ;
- macroskèle ;
- d'aspect gynoïde avec une ceinture scapulaire peu développée ; mais ces signes sont inconstants et certains de ces sujets sont de morphologie masculine normale, voire de petite taille ;
- la gynécomastie vraie, le plus souvent modérée, souvent asymétrique, au début est inconstante. Elle peut apparaître après la puberté, elle est parfois beaucoup plus tardive ;
- par contre l'atrophie des testicules est constante ; ceci contraste avec un développement normal de la verge et du scrotum, en taille et en pigmentation. La pilosité pubienne est souvent triangulaire, horizontale, de type féminin ; les testicules petits sont mous, indolores à la pression. La prostate, au toucher rectal, est normale.

Le reste de la puberté s'est effectué normalement. A signaler toutefois une pilosité thoracique pauvre, une barbe absente ou rare :
- la stérité est constante par azoospermie et de nombreux klinefeltériens sont dépistés dans les consultations de stérilité ;
- les troubles du comportement sexuel sont fréquents : absence de libido, absence d'érections spontanées ; l'activité sexuelle est diminuée.

 L'étude endocrinienne montre :
- l'excrétion des 17 cétostéroïdes est variable : parfois normale, parfois abaissée ;
- la biopsie testiculaire confirme : l'azoospermie, l'absence de maturation des cellules de la lignée germinale qui s'arrête généralement au stade de spermatocytes, la présence exclusive de cellules de Sertoli, la sclérohyalinose tubulo-interstitielle augmentera progressivement.

 Le développement intellectuel : la majorité des sujets atteints des syndromes de Klinefelter ont un développement intellectuel normal et un certain nombre peut entreprendre des études supérieures.
Mais un nombre - dont la proportion reste discutée - a un retard mental à l'origine de difficultés scolaires et d'inadaptation socio-professionnelle.
4.2.2 Diagnostic étiologique
- Le syndrome de Klinefelter correspond au caryotype 47,XXY dans plus de 80 % des cas ; ce caryotype est homogène, s'accompagnant d'une chromatine sexuelle positive (un corpuscule de Barr sur le frottis buccal).

- Dans les autres cas, on retrouve un autre caryotype :

    * 47,XXY en mosaïque. Les moins rares sont : 47,XXY/46,XX ou 47,XXY/46,XY ; dans ce dernier cas il a pu être observé une exceptionnelle spermatogénèse.

4.2.3 Diagnostic différentiel

Le caryotype 48,XXXY : il s'accompagne d'un hypogonadisme et d'une arriération mentale. C'est souvent ces cas qui conduisent au diagnostic chez l'enfant en raison d'une hypoplasie de la verge et des bourses. C’est sans doute, d’avoir classé ces sujets dans le cadre du Klinefelter classique (47,XXY) qui a fait parler de retard mental.

Le caryotype 49,XXXXY n'entre pas dans le cadre du syndrome de Klinefelter. Il s'agit d'un tableau associant :
- une arriération mentale profonde parfois plus encore que dans la trisomie 21 ;
- une dysmorphie : hypertélorisme, épicanthus avec des fentes palpébrales un peu obliques en haut et en dehors, leur donne un air vague de trisomique 21 ; mais on ne retrouve pas les anomalies dermatoglyphiques de la trisomie 21 ;
- des signes osseux : le plus fréquent est la synostose radiocubitale supérieure ;
- le frottis buccal montre la présence de 3 corpuscule de Barr.

Le caryotype 48,XXYY ne constitue pas non plus un syndrome de Klinefelter même si le phénotype s'en rapproche souvent - aspect parfois gynoïde -, hypogonadisme avec grande taille de gynécomastie) ; l'arriération mentale marquée de ces sujets se différencie du Klinefelter 47,XXY ou du syndrome 47,XYY qui avait été un moment appelé, de façon très inapropriée, le "chromosome du crime".

L'association à une trisomie 21 : n'est pas exceptionnelle, réalisant alors le caryotype 48,XXY,+21, c'est-à-dire une double trisome ; dans ce tableau seuls se verront les signes cliniques de la trisomie 21 ; c'est seulement l'étude du caryotype qui fera la preuve des deux aberrations chromosomiques concomitantes. Seul un examen clinique très soigneux du sujet permettrait de retrouver les maîtres symptômes du syndrome de Klinefelter : atrophie testiculaire, très inhabituelle dans la trisome 21, ou gynécomastie, voire grande taille qui n’existe jamais dans la trimosie 21.
4.3 Conclusion

Syndrome de Turner et syndrome de Klinefelter doivent être bien connus car, répétons le, ils posent aujourd'hui le problème de la conduite à tenir lors de la découverte anténatale, chez une femme qui avait eu une amniocentèse pour dépistage de trisomie 21, d'une de ces deux anomalies. C'est pour cette raison que la notion de retard mental dans telle ou telle variété de ces syndromes, a pris une telle importance.
Le conseil génétique
B. Le Marec

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 18 février 2000

1 Parents ou enfants atteints de maladie héréditaire
2 Problèmes de la consanguinité
3 Morts-nés malformés
4 L'enfant handicapé mental sans diagnostic précis
5 Parents ayant un enfant porteur d'une aberration chromosomique
6 Couple stérile ou ayant eu des faussese-couches à répétition
7 Femme enceinte demandant un diagnostic anténatal
   

7.1 Aberration chromosomique
7.2 Maladie autosomique dominante
7.3 Maladie autosomique récessive
7.4 Maladie récessive liée à l'X
7.5 Anomalie multifactorielle

Conclusion
Objectifs

1. Dresser un arbre généalogique correspondant aux hérédités autosomique dominante, autosomique récessive et récessive liée au sexe ; définir le risque de récurrence dans les trois modes d'hérédité ; citer deux maladies se transmettant selon chacun de ces trois modes.

2. Expliquer une mutation instable et en donner un exemple.

3. Savoir interpréter sur un arbre généalogique, les données de la biologie moléculaire.

4. Expliquer le danger des mariages consanguins.

5. Exposer l'intérêt et les méthodes de prévision du risque chez les filles d'une famille présentant des cas de maladie récessive liée à l'X (prendre un exemple).

6. Expliquer les risques de la consanguinité.

7. Expliquer la différence entre une mutation génétique et une anomalie chromosomique.

8. Citer les trois trisomies les plus fréquentes et leurs principaux signes.

9. Citer les principales indications du caryotype sur sang, de l'amniocentèse précoce pour caryotype foetal et en dehors du caryotype foetal.

10. Citer les principales malformations dépistables par l'échographie.

11. Donnez les principales indications du diagnostic prénatal et les méthodes utilisées pour chacune d'entre elles.

12. Expliquer l’intérêt et les limites des marqueurs sériques.

13. Définir l'hérédité multifactorielle, donner des exemples et expliquer les principes du conseil génétique dans ce cas.

14. Expliquer les problèmes posés par l’interruption tardive de grossesse.

15. Devant un mort-né malformé, indiquer l'intérêt de préciser le diagnostic et les méthodes à employer pour y arriver.

16. Donner le principe du diagnostic préimplantatoire.

Pendant longtemps, le but du conseil génétique était d'apprécier un risque de récurrence. Depuis l'apparition des techniques de diagnostic anténatal, ce que les couples viennent demander de plus en plus, est la certitude d'un enfant normal d'où l'importance du développement des techniques de diagnostic anténatal.
Les techniques de biologie moléculaire viennent récemment de renforcer son importance et son intérêt.

Les circonstances qui conduisent un couple en conseil génétique sont très variables :
- parents ou enfants atteints de maladie héréditaire dont ils veulent apprécier le risque de récurrence,
- parents ayant eu un enfant mort-né malformé,
- parents ayant un enfant handicapé mental, sans diagnostic précis,
- parents ayant un enfant porteur d'une aberration chromosomique et qui craignent la récurrence lors d'une nouvelle grossesse.

Enfin, trois types de consultants sont rencontrés en conseil génétique, qui sont du domaine de la pédiatrie préventive:
1. couple stérile ou couple ayant eu des fausses-couches à répétition,
2. jeunes couples qui se posent un problème de consanguinité,
3. enfin, motif de consultation de génétique de plus en plus fréquent, femme enceinte qui craint ou pour qui l'on craint, soit une aberration chromosomique soit une maladie héréditaire, soit une malformation et venant demander un diagnostic anténatal :

Il y aura donc ici deux situations totalement différentes :
- la femme ayant un antécédent et dont on surveille la grossesse en cours pour vérifier que tout se passe bien, ce qui est, heureusement, le cas le plus fréquent,
- la femme sans antécédent chez qui l'on vient brusquement de découvrir une anomalie pour laquelle on demande l'avis du généticien afin d'aider l'obstétricien à porter un diagnostic et de fixer une conduite à tenir. Il va falloir apporter évidemment ici un soutien psychologique à cette femme dont le désarroi est d'autant plus grand que, aujourd'hui, la grossesse est presque toujours programmée et donc fortement désirée.

Quelques soient les causes qui ont conduit le couple à consulter, rappelons que l'interrogatoire -fondamental- doit être le plus minutieux possible, presque "policier", essayant de retrouver un certain nombre de données qui ont pu être oubliées par la famille.
1 Parents ou enfants atteints de maladie héréditaire (pour laquelle on demande d'apprécier le risque)
La démarche est toujours la même :
- tout d'abord connaître le diagnostic précis,
- connaissant l'affection en cause, vérifier qu'il s'agit bien d'une maladie héréditaire et non d'une affection acquise,
- préciser ensuite son mode de transmission,
- seulement, alors, on pourra apprécier le risque.

Il faut donc :
a) toujours posséder le diagnostic précis, ce qui n'est pas toujours évident et peut exiger une hospitalisation pour bilan : il faut se souvenir que la possiblité de diagnostic anténatal justifie donc maintenant des examens difficiles voire douloureux chez des arriérés profonds qui n'en tireront bien évidemment aucun avantage mais qui pourront être indispensables au diagnostic et par là même pourront aider la famille ;

b) éliminer tout ce qui n'est pas héréditaire et ce n'est pas toujours non plus évident.
Bien sûr, parfois tout est simple lorsque l'on a la preuve d'une foetopathie -par exemple rubéolique- ou au contraire la notion d'une maladie héréditaire ayant atteint plusieurs sujets de la famille ;

c) il faut encore préciser son mode de transmission.
Les quatre modes de transmission les plus courants sont :
- dans la transmission monofactorielle :

    * l'hérédité autosomique dominante,
    * l'hérédité autosomique récessive,
    * l'hérédité liée au sexe (le plus souvent récessive liée au sexe).

- mais il existe aussi une hérédité multifactorielle.
Rappel des principaux modes de transmission
1.1 L'hérédité autosomique dominante

Se transmettent selon ce mode pratiquement toutes les anomalies des protéines de structure et en particulier un très grand nombre de dysmorphies squelettiques (achondroplasie, certaines polydactylies ; maladie exostosante, maladie de Marfan, fragilité osseuse constitutionnelle type Lobstein par exemple, ou encore, l'anémie hémolytique de Minkowski-Chauffard).
- L'affection atteint les hommes et les femmes.
- Un sujet atteint naît d'un sujet atteint.
- Dans la descendance d'un sujet atteint, il y a pour moitié de sujets atteints et pour moitié de sujets sains.
- On peut voir une transmission directe de père à fils.
On voit la maladie se transmettre de générations en générations selon un aspect "vertical" de l'arbre généalogique.
Dans cette situation, le gène a se manifeste dès qu'il est présent, à l'état hétérozygote (Aa) ; à la méiose, il y a un risque sur deux de transmettre le gène muté selon l'échiquier de croisement ci-dessous (le conjoint étant toujours homozygote normal(AA) ; il y a donc un risque sur deux de voir réapparaître un sujet atteint dans la descendance (Aa).
 
   
A
   
a
A
   
AA
   
Aa
A
   
AA
   
Aa
   
Un risque sur deux

Mais, un caractère autosomique dominant peut avoir :
- une pénétrance incomplète,
- une expressivité variable.

L'expressivité variable est représentée par la gravité plus ou moins grande de la maladie ; ainsi la maladie de Lobstein peut se traduire par une forme gravissime avec nombreuses fractures ou, au contraire, par la seule anomalie de la structure dentaire (dentinogénèse imparfaite).

La pénétrance incomplète est définie par l'existence de sujets atteints, nés de parents paraissant eux-mêmes indemmes et qui ont pourtant transmis la maladie (ex : maladie de Recklinghausen probablement).

L'absence d'antécédents héréditaires dans une maladie que l'on sait dominante, signe la mutation souvent liée à un âge paternel élevé, qui n'a pratiquement pas de risque de se renouveler dans la même génération (mais, par contre, entraînera dans la descendance du sujet atteint, s'il survit, 50 % de sujets atteints).

Enfin dans certains cas, on voit la maladie s'aggraver avec les générations : c'est la notion d'anticipation. Ceci est en particulier le cas des maladies par mutations instables représentant une des grandes acquisitions de la biologie moléculaire.
Plusieurs maladies à transmission autosomique dominante sont dues à ce mécasime : myotonie de Steinert, chorée de Huntington (l’X fragile, situé bien sûr sur le chromosome X est en rapport avec le même mécanisme).
Le mécanisme en est semblable : un triplet normalement présent à un certain nombre d’exemplaires, va pour des raisons inconnues, se mettre à augmenter de taille.
Ainsi pour la myotonie de Steinert, le triplet (CTG)n est situé en 19q13 ; il est normalement présent entre 5 et 27 fois. Si le nombre n augmente au dessus de 50, le gène est anormal (prémutation) puis la maladie apparait et va s’aggraver de génération en génération (anticipation).
Lorsque la transmission se fait par une femme on va passer d’une forme moyenne à une forme néonatale gravissime (mortelle ou laissant des séquelles sévères : la forme congénitale) : ici la répétition est présente plusieurs centaines de fois.
C’est un mécanisme semblable qui explique la chorée de Huntington (CAG)n et le syndrome de l’X fragile : (CGG)n.
A noter : la forme congénitale de Steinert n’apparait que lorsque la transmission se fait par une femme : un gène autosomique (situé en 19) peut donc être influencé par le sexe. Il est soumis à l’empreinte du sexe : c’est la notion d’empreinte parentale.
1.2 L'hérédité autosomique récessive
L'aspect de l'arbre généalogique est ici exactement le contraire : "horizontal". Tous les malades se situent dans la même fratrie, atteignant garçons et filles, les parents étant indemnes ; la descendance d'un sujet atteint est indemne cliniquement, mais parents et descendance sont hétérozygotes.

Ici le sujet atteint est homozygote (aa) né de deux parents hétérozygotes (Aa).

Le risque de récidive donné par l'échiquier de croisement ci-dessous est donc de 1/4 à chaque nouvelle naissance.

   
A
   
a
A
   
AA
   
Aa
a
   
Aa
   
aa
   
Un risque sur quatre

La descendance d'un sujet malade épousant un sujet sain (non atteint) ne sera bien entendu, constituée que d'hétérozygotes. Il est exceptionnel de voir deux générations successives de sujets malades, mais cela est possible : un sujet malade pouvant épouser un hétérozygote avec alors un risque de 1/2 ; cette situation constituant la pseudo dominance.

Ce mode de transmission est retrouvé à peu près dans toutes les maladies du métabolisme cellulaire (anomalies des sucres : type galactosémie, glycogénoses, anomalies des lipides ; neurolopidoses, type maladie de Gaucher, anomalies des acides aminés, dont l'exemple est représenté par la phénylcétonurie ; anomalie des hormones dont le type est représenté par l'hyperplasie virilisante des surrénales).
Enfin, la mucoviscidose, la plus fréquente des maladies héréditaires en Europe (1/2.500 naissances) se transmet aussi de cette façon.
La consanguinité signalée ici dans ce type de transmission sera discutée plus loin.
Bien entendu, ce risque de récurrence de 1 sur 4 est toujours un risque statistique la survenue d'un enfant atteint n'impliquant nullement que les trois suivants seront normaux. Au contraire, on peut voir successivement plusieurs enfants atteints : nous connaissons ainsi une famille de PCU ayant quatre enfants et les quatre enfants sont tous atteints.
Les hétérozygotes sont des sujets normaux et il est parfois important de l’expliquer aux sujets lorsque, par exemple, après la découverte d’un sujet mucoviscidosique, on a été amené à tester toute la famille.
Si le dépistage des hétérozygotes, souvent possible aujourd’hui par la biologie moléculaire, est souhaitable dans la famille d’un sujet atteint (pour que les hétérozygotes vérifient que leur conjoint ne l’est pas), il est par contre tout à fait impensable de faire ce dépistage des hétérozygotes dans une population : le risque serait alors qu’ils soient considérés comme des " tarés ".
1.3 L'héréditéliée au sexe

Elle est presque toujours récessive liée au sexe.
L'affection est récessive, exigeant donc pour se manifester l'état homozygote : l'hétérozygote transmet mais n'est pas atteint.
Or, tout se passe comme si le chromosome Y ne portait pas de gènes (il ne sert qu'à induire le testicule) et donc un sujet XY (masculin) ne possédera pas sur son Y de gène capable de protéger contre les effets du gène muté situé sur l'X : il sera donc malade.
Il n'est ni véritablement homozygote, ni réellement hétérozygote : on dit qu'il est hémizygote.
Les femmes XX porteuses à l'état hétérozygote seront vectrices de l'affection.
Ainsi dans la descendance d'une femme vectrice de l'hémophilie XhX, la moitié des filles sera vectrice, la moitié des garçons sera malade.
   
Xh
   
X
X    
XhX
   
XX
Y    
XhY
   
Xy

Dans cette situation, tout le problème consistera dans le dépistage des hétérozygotes puisque pour quatre génotypes ; filles vectrices, filles indemnes, garçons atteints, garçons indemnes, il n'y a que trois phénotypes : garçons atteints, garçons indemnes, filles (vectrices ou non).
Ce dépistage des femmes vectrices dans l’hérédité liée à l’X n’a vraiment été résolu que par l’apparition de la biologie moléculaire.
En effet, en raison de la mise au repos d’un X dès les premiers stades de l’embryon (le phénomène de lyonisation, du nom de Mary Lyon qui a décrit le phénomène), une femme vectrice peut mettre majoritairement au repos un X porteur de la mutation et ses examens seront alors normaux : une femme vectrice de la myopathie de Duchenne peut ainsi avoir un taux de CK normal (par contre si ce taux est augmenté, cela signifie qu’elle est sûrement vectrice). Il en est de même dans l’hémophilie : un taux de facteur VIII abaissé chez une vectrice possible signifie qu’elle est vectrice ; mais un taux normal ne permet pas d’affirmer qu’elle n’est pas vectrice.

Si l'affection est compatible avec la vie et la reproduction (comme c'est le cas de l'hémophilie actuellement), la descendance d'un homme atteint sera tout à fait différente selon l'échiquier de croisement ci-dessous :
   
X
   
X
Xh    
XhX
   
XhX
Y    
XY
   
XY

Toute les filles seront vectrices, tous les garçons seront indemnes.
Ici deux génotypes correspondent à deux phénotypes et le problème de dépistage des hétérozygotes ne se pose donc plus.
Les sujets féminins homozygotes atteints constituent un phénomène exceptionnel en dehors du daltonisme, car le gène de l'affection étant ici très fréquent, on peut rencontrer l'union d'une femme vectrice avec un homme atteint selon l'échiquier de croisement ci-dessous.
 
   
Xd
   
X
Xd    
XdXd
   
XdX
Y    
XdY
   
XY

Se transmettent selon ce mode de l'hérédité récessive liée à l'X : par exemple les deux hémophilies A et B, les deux types de daltonisme (protanopie et deutéranopie), la redoutable myopathie de Duchenne (où les sujets masculins meurent souvent avant d'avoir assuré leur descendance), mais aussi de très nombreuses maladies (on en connait plusieurs centaines).

Mais l'hérédité liée au sexe peut être également, quoique beaucoup plus rarement, dominante liée au sexe. Tel est le cas par exemple, du rachitisme vitamino-résistant hypophosphatémique.
Le caractère rachitisme (Xr) étant dominant, aussi bien le sujet masculin XrY que le sujet féminin XrX seront atteints et transmettront l'affection. Mais les deux échiquiers de croisement montrent bien la différence des deux situations :
 
 
   
Xr
   
X
X
   
XrX
   
XX
Y
   
XrY
   
XY
     
Femme atteinte

Quand la femme atteinte transmet le rachitisme vitamino-résistant, elle a dans sa descendance : 1/2 de filles atteintes et 1/2 de garçons atteints.
Ceci n'est pas différent de l'hérédité autosomique dominante.

 
 
   
X
   
X
Xr
   
XrX
   
XrX
Y
   
XY
   
XY
   
Homme atteint

Par contre quand un homme atteint de rachitisme vitamino-résistant le transmet, il donne :
- son X à toutes ses filles,
- son Y à tous ses garçons,
la transmission est tout à fait différente :
- toutes les filles sont atteintes,
- tous les garçons sont indemnes.

Ceci est bien entendu très différent de l'hérédité autosomique dominante où l'on peut voir une transmission père-fils. Dans l'hérédité dominante liée au sexe, il n'y a :
- jamais de transmission père-fils,
- on ne voit jamais de filles indemnes nées d'un père atteint.

La négation d'une de ces deux affirmations suffit à éliminer l'hérédité dominante liée au sexe et montre alors que le gène est autosomique dominant.
1.4 L'interprétation d'un arbre généalogique au moyen de la biologie moléculaire
Les situations sont totalement différentes :
- lorsque le gène a seulement été localisé : on devra utiliser des marqueurs, c'est-à-dire des liaisons génétiques (polymorphismes de restriction. ou plus récemment micro-satellites),
- lorsque le gène a été clôné : on peut faire la recherche directe des mutations
1.4.1 Principes de l'utilisation des marqueurs
Sans entrer dans les détails techniques, rappellons seulement que grâce aux "enzymes de restrictions" qui coupent l'ADN en des sites particuliers -sites eux-mêmes objets de mutation précise- et lorsque l'on connaît la place précise d'un gène sur un chromosome donné et lorsque l'on possède une "sonde" capable de reconnaître le fragment contenant le gène, on peut suivre la transmission de ce gène à travers une famille. Bien entendu, ces techniques de restriction sont basées sur les polymorphismes utilisables quelque soit le mode de transmission de l'affection.

Prenons deux exemples :

Même si le gène de la myopathie de Duchenne est aujourd'hui clôné, cet exemple nous paraît particulièrement typique de la technique d'utilisation des marqueurs.
I3 est décédé de myopathie de Duchenne qui touche également II1. On sait donc que I2 (soeur de malade et mère de malade est vectrice certaine).
Grâce à une sonde donnée que l'on possède qui explore la partie du bras court du chromosome X où, on le sait, est situé le gène de la myopathie, on a pu montrer qu'il existe dans cette famille un polymorphisme de restriction : l'étude familiale a donné les résultats suivants :

I1 : 1
I2 : 1 - 2
II1 : 2
II2 : 1 - 1
II3 : 1
II4 : 1 - 2

La mère I2 est vectrice certaine et est 1-2 et elle a transmis à son fils atteint le chromosome X porteur d'un polymorphisme 2
Donc, dans cette famille, la myopathie est liée au marqueur 2. Ceci est confirmé par l'existence du fils normal II3 : il a reçu de sa mère le marqueur 1. On peut donc en conclure que II2 qui est 1-1 a donc reçu de sa mère le X porteur du gène normal : elle est non vectrice : elle ne devra avoir aucun diagnostic anténatal pour sa grossesse.
Par contre, II4 est 1-2 : elle a donc reçu de son père 1 (comme sa soeur II2) mais de sa mère, le marqueur 2 situé sur l'X porteur de la myopathie. Elle est donc vectrice.
Elle attend un foetus de sexe masculin porteur du marqueur 1, c'est-à- dire que le foetus a hérité de l'X maternel porteur du gène sain : il est indemme (s'il avait été 2, il aurait été atteint).

Grâce à ces techniques on a pu dans cette famille, informative, explorer complètement et assez tôt pour que l'on puisse pratiquer des examens anténataux à temps, répondre aux deux problèmes fondamentaux :
- Différenciation des mères vectrices et non-vectrices,
- Chez les mères vectrices, différenciation des sujets masculins indemmes ou atteints.

Mais ces techniques ne sont pas seulement utilisables dans l'hérédité récessive liée à l'X, mais aussi dans l'hérédité autosomique récessive ou dominante.

 
II1 est décédé de mucoviscidose, maladie autosomique récessive ; II3, vivant en est également atteint.
La biologie moléculaire a montré que pour les sondes KM19 et XV2C, le sujet II3 est :
- XV2C : 1 1
- KM19 : 2 2

 

Pour les mêmes sondes :
- I1 est :

    *
      XV2C : 1 2
    *
      KM19 : 2 2

- I2 est :

    * XV2C : 1 1
    * KM19 : 2 1

On peut donc en conclure que le sujet mucoviscidosique II3 a reçu l'ensemble (appellé haplotype) que nous appellerons B, constitué par XV2C : 1 et KM19 : 2 à la fois de son père et à la fois de sa mère. Le sujet II2 a reçu de son père XV2C : 2 et KM19 : 2 (haplotype que nous appellerons D) et de sa mère XV2C : 1 et KM19 : 1 (haplotype que nous appellerons A).

 
Un diagnostic anténatal est pratiqué lors de la grossesse II5. La biopsie de trophoblaste montre que le foetus est BD : il a donc D du père (gène normal) et B de la mère (gène pathologique) : il est donc hétérozygote c'est-à-dire normal.

Cette technique de recherche des haplotypes est encore parfois utilisée dans la mucoviscidose lorsque l'on n'a pas pu caractériser les deux mutations.
En effet, la mucoviscidose représente un bon exemple d'affection de la 2ème situation .
1.4.2 lorsque le gène est clôné
On peut effectuer la recherche directe de la mutation par PCR.
La mutation la plus couramment retrouvée, est la mutation delta F 508, (le plus souvent associée à ce que nous avons appellé l'haplotype B).

Ainsi, dans cette famille, II3 sera Delta F 508 homozygote, I1 et I2 Delta F 508 hétérozygotes ainsi que le foetus II5 ;
Si II4 est Delta F 508 hétérozygote cela signifie qu'elle est hétérozygote et l'on peut discuter la recherche de la mutation Delta F508 chez son conjoint (ou chercher en fait toutes les mutations courantes, actuellement plus de 20).
Par contre II2 est homozygote non 508 : il est donc homozygote sain et ne pourra jamais avoir d'enfant mucoviscidosique.
Mais, la mutation delta F 508 n'est que la mutation la plus courante : on en connaît aujourd'hui plus de 800.

Les techniques sont également applicables dans l'hérédité autosomique dominante ; mais elles posent des questions d'éthique particulières :
- soit en raison de la pénétrance incomplète et de surtout l'expressivité variable,
- soit du caractère parfois tardif de la maladie ou de sa gravité (polykystose rénale) et des problèmes que posent la révélation du diagnostic (chorée de Huntington).
En effet, dans ce dernier cas, un diagnostic anténatal positif sous entend que le parent transmetteur, encore cliniquement sain va être un jour atteint de cette redoutable maladie : ceci pose le problème d’un éventuel dépistage présymptomatique.
1.5 L'hérédité multifactorielle

Elle est beaucoup plus complexe et son étude est en pleine évolution.

Ici participent à la fois l'influence du milieu, l'influence de l'hérédité sous la forme non plus d'un seul gène, mais de plusieurs gènes (hérédité polygénique).

Sans entrer dans les détails, rappelons que le risque de récurrence est d'autant plus élevé que, dans une même famille, les sujets atteints sont plus nombreux, les cas sont plus graves, les sujets atteints sont plus proches parents (contrairement aux autres modes d'hérédité où, qu'il y ait un ou dix sujets atteints, le risque reste le même).

Ce mode d'hérédité correspond à la transmission de nombreuses anomalies et, en particulier :
- la fente labio-palatine,
- la luxation de hanche,
- la sténose du pylore,
- le spina-bifida et l'anencéphalie.

Il est difficile de faire la part de l'acquis et de l'héréditaire. Le conseil génétique y est particulièrement difficile, nuancé (exemple : les cardiopathies congénitales).
2 Les problèmes de consanguinité

On est en présence d'un jeune couple venu consulter avant ou après le mariage dans la famille desquels on ne retrouve aucun antécédent pathologique mais qui redoute la survenue d'une maladie héréditaire en raison du lien de parenté qui les unit l'un à l'autre.

Ici, bien entendu, le risque est de voir apparaître une affection autosomique récessive dans la descendance. Le risque est d'autant plus grand que les conjoints sont plus proches parents.

En effet, plus ils sont proches, plus leurs ancêtres communs sont proches et plus ils ont donc de risque d'avoir reçu en commun un gène défavorable à l'état hétérozygote. Ce que l'on calculera est donc le risque d'être tous les deux hétérozygotes.

Ainsi, deux cousins germains ont 1 risque sur 8 d'être hétérozygotes pour le même gène et donc 1 risque sur 32 (1/8 x 1/4) d'avoir un enfant atteint de maladie autosomique récessive (ce qui n'est pas très élevé par rapport au risque de 1 à 2 % de malformations admis pour toute grossesse).

Deux cousins issus de germains n'ont qu'1 risque sur 32 d'être hétérozygotes pour le même gène et donc un risque sur 128 d'avoir un enfant atteint. Au-delà, on peut dire que l'on cesse d'être apparenté.

Un union consanguine, sans accidents, à une génération précédente dans la famille n'augmente que très peu les risques.

Les problèmes de consanguinité (augmentant le risque des affections autosomiques récessives) rendent compte du danger de l'inceste (père-fille ou frère-soeur essentiellement) où la consanguinité est maximum et risque donc très souvent de faire ressurgir des affections récessives à l'état homozygote.
(Pour mémoire le coefficient de consanguinité, notion assez souvent utilisée, correspond à la moitié du risque d’être hétérozygote).
3 Les morts-nés malformés

Pour tenter de porter un diagnostic génétique, il faut encore tenter d'avoir un diagnostic précis : ainsi, les nanismes chondro-dystrophiques léthaux en période néonatale sont nombreux mais répondent parfois à une mutation dominante (qui n'a donc pratiquement aucun risque de réapparaître), parfois à une anomalie autosomique récessive, avec donc un risque de récurrence de 25 %.

Pour tenter dans le peu de temps disponible après la naissance d'un enfant mort-né malformé d'obtenir un diagnostic précis, il faudra :
- tenter de faire un caryotype par prélèvement de sang intracardiaque (ce prélèvement servira également à mettre de côté un peu de sang sur EDTA pour une éventuelle étude de l’ADN).
- surtout, toujours photographier, ce qui est probablement le plus important.
- toujours radiographier le squelette en entier.
- Obtenir l'autopsie (que demande de plus en plus souvent la famille), indispensable au bilan des malformations et donc au diagnostic.

Si l'on n'a pu obtenir cette vérification anatomique, seules persisteront dans le dossier photographies et radiographies. Mais à partir de ces deux types de documents, le conseil génétique pourra souvent trancher entre malformation sporadique ou mutation dominante au risque de récurrence faible, parfois aberration chromosomique qui entraînera des examens chez les parents, surtout possible maladie autosomique récessive avec un risque de récurence de 25 % que l’on ne peut pas toujours éliminer.
Mais, répétons-le, il faut pour cela avoir en main un minimum de documents et ce minimum est certainement représenté par les photographies et les radiographies du squelette complet de l'enfant mort-né montrant bien les extrémités.
4 L'enfant handicapé mental sansdiagnostic précis

Il pose des problèmes difficiles et angoissants : s'agit-il d'une maladie du métabolisme dont on ne peut faire la preuve. (risque de récurrence de 25%) ?
S'agit-il d'une anomalie accidentelle, sporadique, évitable à la prochaine grossesse ?
(embryofoetopathie, souffrance néonatale). S'agit-il d'un retard mental lié à la fragilité du chromosome X.

Il n'est pas toujours facile de trancher et de conseiller : un bilan en hospitalisaton ne suffira pas toujours à apporter le diagnostic précis qu'on attendait. Il est pourtant indispensable si l'on veut tenter de faire un diagnostic anténatal à la grossesse suivante.
5 Parents ayant ou ayant eu un enfant porteur d'une aberration chromosomique

La trisomie 18 ou la trisomie 13 constituant des syndromes polymalformatifs dépistés aujourd’hui grâce à l’échographie (doigts se recouvrant dans une main fléchie + polymalformations viscérales de la trisomie 18, polydactylie + fente labiale + polymalformations de la trisomie 13), c’est le plus souvent après interruption médicale de grossesse avec le diagnostic que ces parents sont vus en consultation de génétique. La grossesse suivante bénéficiera d’amniocentèse pour rassurer ces couples (dont le risque de récurrence est mineur).
On aura la même conduite avec des parents ayant un enfant trisomique 21 que l’enfant soit vivant ou décédé ou que la grossesse ait été interrompue.
Dans les problèmes de trisomie 21, il faudra toujours s’assurer que la trisomie était une trisomie libre (95% des cas environ) et non d'une translocation (5 %). Dans ce dernier cas bien entendu, le caryotype des parents est indispensable pour rechercher une translocation familiale (on le demandera toujours chez un trisomique 21, même si la mère est âgée).

Plus rarement, l'aberration chromosomique pourra être : une trisomie en mosaïque n'affectant qu'une partie des cellules seulement ; une délétion partielle touchant un fragment seulement de chromosome.

Ces deux dernières situations se retrouvent quelquefois devant des tableaux d'arriérés mentaux dysmorphiques. C'est pourquoi il faudra toujours demander un caryotype chez un handicapé mental dysmorphique, surtout s'il est porteur de malformations, encore plus si ses dermatoglyphes paraissent inhabituels.

Ceci a un intérêt pratique : en effet, ces trisomies partielles ou ces monosomies partielles (rares, il est vrai) peuvent être liées à des translocations familiales et possèdent alors un risque de récurrence relativement important (de telles familles constituent bien entendu actuellement une des indications formelles du diagnostic anténatal par amniocentèse précoce).

Rappelons que les ambiguités sexuelles ne sont qu'exceptionnellement liées à des anomalies caryotypiques.

Les anomalies gonosomiques sont parfois dépistées chez l'enfant comme le syndrôme de Turner (le plus souvent 45,X) avec cou palmé, nanisme et chez la jeune fille, aménorrhée, impubérisme, mais intelligence normale.

Néanmoins, le plus souvent, les anomalies gonosomiques seront dépistées par le gynécologue ou l'endocrinologue (nous y reviendrons au dernier chapître).

Il faut bien entendu, rappeler ici que l'étude du caryotype, même dans ses techniques les plus modernes et les plus approfondies (permettant de détecter quelques 500 bandes) ne permet en aucune façon d'explorer une mutation génétique (il y a sans doute 150 000 gènes) et on ne peut pas avec un caryotype, par exemple "voir" une mutation sur l'X dans un cas d'hémophilie !!!. On entre là dans le domaine de la biologie moléculaire.
6 Couple stérile ou ayant eu des fausses-couches à répétition
Ce couple est le plus souvent envoyé par le gynécologue ou l'endocrinologue. Rappelons que le caryotype doit toujours être demandé devant une stérilité inexpliquée : on recherchera alors une anomalie gonosomique (en particulier un syndrome de Klinefelter : 47, XXY).
Dans les fausse couches à répétition, on recherchera une translocation équilibrée chez un des parents (plus souvent la mère).
7 Femme enceinte demandant un diagnostic anténatal

Il faut d'abord se rappeler que si le diagnostic anténatal ne peut que répondre à une question précise, par exemple : "l'enfant attendu est-il trisomique 21 ?", il ne permet nullement de dépister toutes les malformations ou toutes les causes de handicap mental contrairement à ce que croit souvent le couple. Pour faire un diagnostic anténatal, il faut toujours savoir exactement ce que l’on cherche (c’est-à-dire avoir un diagnostic préçis) être sûr d’avoir un moyen diagnostique pour le chercher. Puisqu’il peut, si l’examen est positif conduire à une interruption médicale de grossesse si le couple le demande, il ne pourra donc être effectué (loi de Bioéthique du 29 Juillet 1994) que pour des affections d’une particulière gravité et incurables.

Il faut se souvenir également, avant de se lancer sur un diagnostic anténatal, qui peut déboucher sur une interruption de grossesse tardive, qu'il est indispensable de connaître les options philosophiques du couple à ce sujet.

On peut donc être amené à demander un diagnostic anténatal pour dépister :
- une aberration chromosomique,
- une maladie autosomique dominante,
- une maladie autosomique récessive,
- une maladie récessive liée à l'X,
- une anomalie multifactorielle.

Les moyens que l'on possède tournent autour de deux grandes méthodes :
- l'échographie,
- les prélèvements foetaux représentés par :

    * l'amniocentèse et plus récemment,
    * la biopsie de trophoblaste (voire la ponction du cordon).

7.1 Une aberration chromosomique

Elle pourra être recherchée :

1. Lorsque la mère est "âgée" pour être enceinte (on sait qu'après 40 ans le risque de trisomie 21 est de 1 % et de 2 % à 45 ans). C'est le cas de beaucoup le plus fréquent qui conduit à la demande de diagnostic anténatal.
2. Lorsque les parents ont déjà eu un enfant trisomique 21 par trisomie libre et refusent de courrir à nouveau le risque (chiffrable à environ 1 %).
3. Lorsque, et c'est la situation la plus rare, l'un des parents se sait porteur d'une anomalie de structure chromosomique qui est le plus souvent une translocation équilibrée.

Les méthodes de diagnostic : actuellement c'est avant tout l'amniocentèse pratiquée à 15 semaines d'aménorrhée qui permettra d'établir le caryotype foetal et dans 97 % des cas environ de rassurer le couple.
Beaucoup plus rarement, on aura recours à la biopsie du trophoblaste (dont le risque de fausse couche est beaucoup plus élevé et donc les indications plus limitées) :
- lorsque la mère est porteuse d'une translocation,
- voire qu'elle est âgée de plus de 40 ans et a des antécédents de césarienne.

Dans des cas plus rares, la découverte tardive, par échographie de malformations spécifiques va orienter vers tel diagnostic : par exemple une atrésie duodénale ou un canal atrio-ventriculaire découverts en échographie doit -à priori- faire penser à la trisomie 21. On peut donc être amené à demander un caryotype foetal tardivement ; on pourra dans ce cas faire un caryotype sur sang foetal (par ponction du cordon) soit par placentocentèse voire un examen par les techniques d’hybridation in situ (F.I.S.H) permettant de vérifier qu’il n’y a bien que 2 chromosomes et non pas 3.
7.2 Une maladie autosomique dominante
La plupart du temps on n'a aucun moyen de diagnostic anténatal :
- Le caryotype sur liquide amniotique n'apporte rien.
- On ne connaît pas, le plus souvent, l'anomalie en cause. Il ne reste guère que l'échographie qui peut parfois apporter une solution en montrant certaines malformations squelettiques graves.
- La biologie moléculaire permettra sans doute de répondre dans un avenir proche, mais au prix de problèmes éthiques complexes (en raison des problèmes d’expressivité variable).
7.3 Une maladie autosomique récessive

Jusqu'à un passé récent tout reposait sur un dosage de l'enzyme déficient : ou bien cet enzyme était connu et dosable et le diagnostic anténatal était alors possible (type : AlphaL-iduronidase dans la maladie de Hurler) ; ou bien le dosage enzymatique était impossible et le diagnostic anténatal également. Cela a été longtemps le cas de la plus commune des maladies autosomiques récessives : la mucoviscidose ; puis le dosage des isoenzymes de la phosphatase alcaline dans le liquide amniotique à 18 semaines d'aménorrhées a permis ce diagnostic anténatal. La biologie moléculaire, après étude préalable de la famille, permet maintenant un diagnostic anténatal de certaines maladies métaboliques. De plus en plus souvent, le gène ayant été clôné et l'étude directe de la mutation étant possible alors, on pourra faire cette étude même si l'enfant malade est décédé : c’est le cas dans la mucoviscidose où il suffira de caractériser la mutation en cause chez les 2 parents : si les 2 parents sont D F508 à l’état hétérozygote, il suffira de vérifier que le foetus n’est pas homozygote D F508.
Les dosages enzymatiques ne sont possibles que lorsque le cas index a été correctement étudié ce qui justifie, rappelons le encore, les bilans d'arriérés mentaux profonds.
Ces dosages enzymatiques ont été pendant longtemps effectués sur des cultures cellulaires faites à partir de cellules prélevées après amniocentèse, c'est-à-dire qu'on ne pouvait jamais avoir le résultat de ces dosages avant la 22ème semaine.
Mais la biopsie de trophoblaste, effectuée à 11 semaines, permettant de prélever un fragment de tissu sur lequel on peut faire directement le dosage enzymatique et avoir le résultat en 24 ou 48 heures, a tout modifié.
C'est également la biopsie de trophoblaste qui est utilisée lorsque les techniques de biologie moléculaire sont utilisées, mais rappellons que cela exige des explorations préalables de la famille.
Interrompre par les techniques de l'IVG une grossesse à 11 semaines ou bien faire une interruption à 22 semaines d'un enfant dont les mouvements actifs sont perçus par la mère, ne représente pas du tout la même chose !
7.4 Une maladie récessive liée à l'X

Le diagnostic de sexe par caryotype foetal (jadis effectué par amniocentèse à 17 semaines, aujourd'hui par biopsie de trophoblaste à l1 semaines) a déjà été un apport important ; un foetus féminin, ne peut être atteint de certaines maladies : Myopathie de Duchenne, Hémophilie A ou B en particulier).

Jusqu'à un passé récent, on ne pouvait aller plus loin et on devait se résoudre à interrompre tous les garçons si on avait la preuve (ou seulement quelquefois une probabilité) que la mère était vectrice.
C'est dans ce domaine que la biologie moléculaire a tout modifié, permettant souvent de différencier garçons indemmes et garçons atteints.
Encore faut-il se souvenir que cela exige une étude familiale préalable : ce n'est pas à 10 semaines d'aménorrhées qu'on entreprend l'étude en biologie moléculaire d'une famille de myopathes ! Ces études, longues et coûteuses, devront être proposées systématiquement dès le diagnostic de l'affection posé. Cela permettra de savoir si la mère est vectrice ou non et ce n'est que si on sait que la mère est vectrice que l'on proposera alors sur le fragment de placenta prélévé par biopsie du trophoblaste, de faire l'étude du caryotype ; s'il s'agit d'un garçon, l'étude en biologie moléculaire permettra de dire s'il est normal ou atteint : on ne doit donc plus être conduit à interrompre des grossesses de garçons pour qui la probabilité qu'il s'agisse de garçons normaux était très grande !

Pour l'hémophilie, si l'examen chromosomique a montré qu'il s'agissait d'un foetus mâle chez une mère vectrice, la biologie moléculaire permettra de faire la preuve de l'absence (ou de la présence) de la mutation. Ce n’est plus que dans des circonstances exceptionnelles que l’on sera amené à faire un dosage du facteur antihémophilique en cause (VIII ou IX) sur ponction du cordon.
7.5 Une anomalie multifactorielle

Elles sont représentées souvent par des malformations graves : anomalies du tube neural (anencéphalie ou spina bifida), fente labiale ou palatine, voire cardiopathie congénitale.

Parfois le diagnostic anténatal -qui conduirait en cas de diagnostic positif d'un enfant atteint à l'interruption de grossesse- n'est pas acceptable au point de vue éthique, en particulier si la malformation est curable chirurgicalement : (ex: la fente labiale dont le diagnostic échographique est pourtant possible).

Ailleurs la malformation est soit incompatible avec la vie (anencéphalie) soit si grave qu'elle semble pour certains pouvoir justifier l'interruption de grossesse (spina bifida). Si l'échographie dépiste très bien et très tôt l'anencéphalie, il n'en est pas de même pour le spina bifida : il faut donc toujours avoir affaire à d'autres méthodes biochimiques en particulier le dosage de l'alpha foetoprotéine soit dans le sérum maternel vers la 16ème semaine d'aménorrhée (ce dosage fait partie des " marqueurs sériques " : nous y reviendrons au chapitre sur le diagnostic anténatal), soit dans le liquide amniotique vers la 17-18ème semaine, soit même dans les deux à la fois, couplées bien entendu avec l'examen par un échographiste de référence et la recherche dans le liquide amniotique sur l’électrophorèse de cholinestérases amniotique. Encore faudra-t’il différencier méningocèle de bien meilleur pronostic (mais beaucoup plus rare), du myélo méningocèle, beaucoup plus sévère mais représentant plus de 80% des cas de spina bifida (hydrocéphalie, pieds bots recherchés en échographie).

Quant aux malformations cardiaques graves, leur dépistage échographique se fait aujourd’hui entre les mains d'échocardiographistes spécialisés.
Conclusion

L'introduction, puis la mise à la disposition des couples de la contraception voire de l'interruption volontaire de grossesse font que les couples qui ont déjà eu un enfant "anormal" demandent de plus en plus un conseil génétique.

Un diagnostic anténatal, posé sur des indications précises va pouvoir en rassurer un bon nombre. Mais il doit être le fruit d'un travail d'équipe (obstétriciens, échographistes, biochimistes, cytogénéticiens) dont le centre est représenté par la consultation de génétique.

Le diagnostic anténatal n'est pas une porte ouverte supplémentaire aux interruptions de grossesses, cette fois tardives : c'est le seul moyen actuellement d'éviter un nombre certainement important d'interruptions volontaires de grossesses en attendant les possibilités de traitement anténatal que l'on entrevoit déjà dans quelques affections. Mais, c’est répétons-le, un travail d’équipe, celui de la médecine foetale.
Le diagnostic prénatal
B. Le Marec

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 18 février 2000

1 Diagnostic anténatal des aberrations chromosomiques
1.1 Mères âgées de plus de 38 ans
1.2 Après un enfant atteint de trisomie 21
1.3 Lorsqu'un membre du couple est porteur d'une anomalie chromosomique
1.4 Amniocentèse pour motif psychologique
1.5 Caryotype sur marqueurs sériques
1.6 La clarté nucale
   

1.7 Caryotype sur signes d'appel échographiques
2 Indications du diagnostic prénatal en dehors des aberrations chromosomiques
2.1 Maladies génétiques
3 Diagnostic anténatal des malformations
3.1 Diagnostic uniquement échographique
3.2 Diagnostic parfois biologique
4 Diagnostic préimplantatoire

Il consiste à pratiquer un examen sur le foetus pour vérifier qu'il est indemne de l'affection qu'on a des raisons de craindre.

Ceci sous-entend que de nombreuses conditions soient réalisées :

1. On sait exactement ce que l'on cherche. Ce n'est pas l'arriération mentale que l'on veut dépister mais telle cause précise d'arriération mentale, par exemple la trisomie 21.

2. On possède un examen capable d'en faire la preuve : par exemple, le caryotype dans la trisomie 21.

3. On a des raisons de l'effectuer : par exemple, pour antécédent d'aberration chromosomique, ou plus souvent un âge maternel élevé (nous y reviendrons).

4. Il s'agit d'une affection grave pour laquelle on n'a pas de traitement et qui pourrait donc justifier, si le diagnostic était positif, une interruption de grossesse : c'est évidemment ici que se posent les problèmes éthiques les plus difficiles : à partir de quand une affection est-elle grave ou à partir de quand cesse-t'elle d'être grave, c'est-à-dire ne justifiant plus l'interruption de grossesse ? Est-il légitime de faire un diagnostic anténatal lorsque l'on possède un traitement (exemple : la phénylcétonurie) ? etc...

5. Enfin, et ce n'est pas le moindre problème, puisque le diagnostic anténatal peut déboucher sur une interruption de grossesse, on se sera au préalable renseigné sur la position du couple vis-à-vis de l'interruption de grossesse.
1 Le diagnostic anténatal des aberrations chromosomiques
Il s'effectue par le caryotype foetal. Il doit être proposé dans plusieurs situations qui feront l'objet d'une prise en charge par la Sécurité Sociale.
1.1 Les mères âgées de plus de 38 ans

En fait, c'est l'indication la plus fréquente, et jusqu'à un passé récent, elle constituait la quasi totalité des indications : en effet, la possibilité du diagnostic anténatal par amniocentèse pour réaliser le caryotype foetal et vérifier que l'enfant n'est pas trisomique 21 est progressivement passé dans le moeurs.

Actuellement, toute femme de plus de 38 ans, qui en fait la demande à son gynécologue ou à son généraliste, pourra bénéficier de cette technique avec prise en charge totale de la Sécurité Sociale. Aujourd’hui, une grande partie des femmes de France de plus de 38 ans aura bénéficié de cette technique.

Pourquoi a-t'on, en France, choisi l'âge de 38 ans - et non de pas 35 ans comme dans la plupart des pays d'Europe ? Parce qu'on a considéré, à juste titre, qu'il n'était pas licite de pratiquer un geste (l'amniocentèse) qui avait un risque de fausse-couche provoquée de 0,5 %, tandis que le risque de découverte d'une trisomie 21 n'avait pas atteint précisément 0,5 % (chiffre atteint seulement à 38 ans).

Si dans 3 % des amniocentèses, une anomalie du caryotype foetal conduit à une interruption de grossesse, elle conduit surtout dans 97 % des cas à rassurer la mère en montrant un enfant normal.

Le caryotype foetal est presque toujours pratiqué par amniocentèse vers 15-16 semaines d'aménorrhée et exige environ 2 semaines pour avoir les résultats (nécessité de cultures cellulaires). Pour certains la biopsie de trophoblaste (faite à 11 semaines) et n'exigeant pas de culture avec donc un résultat infiniment plus rapide, aurait du remplacer l'amniocentèse. Mais, si la biopsie de trophoblaste donne un résultat plus précoce et plus rapide (avec donc une interruption de grossesse infiniment mois mal vécue parce que moins tardive dans les rares cas où il faut la pratiquer), elle est aussi beaucoup plus dangereuse : on considère que le risque de fausse-couche provoqué par la biopsie de trophoblaste se situe aux environs de 3 à 5 % selon les auteurs, alors que celui de l'amniocentèse n'excède pas 0,5 %.
Actuellement on essaie de faire l'amniocentèse plus tôt, avec des techniques de culture plus rapides afin d'obtenir le résultat le plus tôt possible.
1.2 Après un enfant atteint de trisomie 21 (par trisomie libre ou par translocation)

On proposera systématiquement un diagnostic anténatal ; le risque de récurrence en cas de trisomie 21 libre reste faible (1%) mais l'angoisse est telle que le diagnostic anténatal est indispensable. En fait, cette pratique du diagnostic anténatal a beacoup diminué l'intérêt de la question qui était essentielle il y a 20 ans : s'agit'il d'une trisomie 21 libre ou par translocation ? (puisque dans les deux cas la conduite à tenir reste la même, mais que seul est différent le risque de récurrence).

L'existence d'une trisomie 21 libre dans une famille ne justifie pas le diagnostic anténatal chez les proches parents. Encore faut-il s'être assuré que le trisomique était bien atteint d'une forme libre ; or le caryotype n'a pas toujours été effectué chez les trisomiques nés avant les années soixante-dix.
1.3 Lorsqu'un membre du couple est porteur d'une anomalie chromosomique

En général une translocation équilibrée découverte par exemple après des fausses-couches à répétition, il existe alors pour la descendance un risque de translocation désiquilibrée : c'est dans ce genre de transolocation où le risque d'aberration chromosomique foetale est maximal que pourrait se discuter une biopsie de trophoblaste.
Mais cette situation est, heureusement, rare.
1.4 L'amniocentèse pour motif psychologique
En dehors des trois premières indications où le caryotype foetal est remboursé par la Sécurité Sociale (il est maintenant à la nomenclature), il peut être discuté l'opportunité d'une amniocentèse pour motif pshychologique, par exemple une mère anxieuse, un couple qui a eu un enfant handicapé mental pour une autre raison qu'une aberration chromosomique.
1.5 Le caryotype sur marqueurs sériques

Mais compte tenu de la fréquence de la trisomie 21 dans la population générale, on s'est posé, depuis quelques années, la question d'un dépistage de masse de la trisomie 21 sans attendre que la mère soit âgée de 38 ans.

La recherche de petits signes échographiques pose des problèmes sur lesquels nous reviendrons.

- C'est au niveau des marqueurs sériques de la trisomie 21 que l'on s'est attardé depuis plusieurs années pour tenter une évaluation du risque de trisomie 21 tenant compte à la fois du taux des marqueurs mais aussi de l'âge maternel.
- On a utilisé soit seul, soit, ce qui est mieux, deux au trois de ces marqueurs en même temps :

    *
      l'alpha foeto protéine sérique maternel dont la diminution serait évocatrice,
    *
      l'hCG sérique : ici c'est l'augmentation qui serait évocatrice.
    *
      l'oestriol maternel qui serait diminué

On parle souvent de triple test.

Mais quelques soient les marqueurs sériques utilisés, dont les taux doivent être évalués en percentiles, il ne pourrait s'agir d'autre chose que d'une évaluation du risque : par exemple une femme de 35 ans qui aurait des hCG supérieurs au 95è percentile aurait un risque d'attendre un trisomique 21, non pas de 1/300 comme une femme de son âge mais de 1/100 comme une femme de 40 ans et ceci justifierait donc de faire le caryotype foetal. Toutefois, rappelons bien qu'un taux non modifié ne donne pas la certitude d'un enfant normal.
Enfin et surtout ces examens, pas toujours bien compris ou bien expliqués, sont souvent générateurs d'une anxiété parentale difficile à maitriser.
Cette indication du caryotype foetal est aujourd’hui prise en charge par la Sécurité Sociale lorsque le risque dépasse 1/250.
1.6 La clarté nucale

mesurée à 11 SA, ne doit pas dépasser 3 mm. Là encore, ce risque définit seulement une population à risque de trisomie 21 et n’est pas, bien sûr, synonyme de trisomie 21. Mais il justifie le caryotype foetal ; dans cette situation l’angoisse parfois générée à 11 SA rend difficile d’attendre jusqu’à 15 SA la date de l’amniocentèse et l’on est parfois conduit à faire une biopsie de trophoblaste.
1.7 Le caryotype sur signes d'appel échographiques
- Il peut s'agir de "petits signes" recherchés de façon systématique. Mais la découverte en est plutôt le fait d'échographistes chevronnés (échographistes "de référence") : il peut s'agir d'un fémur court, d’os propres du nez anormaux, d'un Dopler ombilical perturbé, tout signe qui doit faire évoquer une trisomie 21 et faire pratiquer un caryotype foetal. Mais, il faut se souvenir que ces signes ne sont pas très fidèles et difficiles à interpréter.

- Parfois, il s'agit de signes beaucoup plus évocateurs liés à une malformation foetale : une atrésie duodénale (dont on sait qu'elle est en rapport avec une trisomie 21 dans un tiers des cas), un canal atrio-ventriculaire (soupçonné par l'échographiste et confirmé par l'échocardiographiste). Dans ces cas là le caryotype s'impose. Or, il s'agit souvent de découverte tardive : à l'échographie morphologique de la 22è semaine voire plus tard. Le problème est alors d'avoir un résultat le plus rapide possible pour, s'il faut interrompre la grossesse, le faire au plus tôt : c'est dans ce genre de situation que le caryotype foetal peut être effectué pour des raisons de rapidité, directement sur sang foetal, prélevé par ponction de cordon ce qui permettra un résultat en quelques jours.
- Parfois, on peut être amené à discuter une interruption de grossesse très tardive. Il faut savoir que contrairement à la plupart des législations européennes qui interdisent toute interruption de grossesse après 25 SA, la loi française de 1976 autorise, en cas de malformation grave du foetus, une interruption de grossesse sans limitation de date.

Ceci peut paraître très choquant mais cette loi a aussi permis aux Centres de Diagnostic Anténatal d'épargner de nombreuses grossesses : en effet, si à 24 semaines et demi, on découvre une atrésie duodénale dans un pays à la législation contraignante, on aura tendance à interrompre immédiatement la grossesse sans attendre de savoir s'il s'agit d'un trisomique ou d'un enfant au caryotype normal qui aurait été -après intervention en période néonatale- un enfant normal.
2 Les indications du diagnostic prénatal en dehors des aberrations chromosomiques
Si elles sont très nombreuses, elles ne représentent au total qu'un très faible pourcentage des indications.
2.1 Les maladies génétiques
2.1.1 Les indications du sexe foetal
Elles sont représentées par les maladies à transmission récessives liées à l'X, après que l'étude de la famille en biologie moléculaire ait montré que la femme était vectrice : myopathie de duchenne, hémophilie, essentiellement. Le prélèvement (pour caryotype foetal) est fait en même temps que celui pour biologie moléculaire par biopsie de trophoblaste à 11 semaines d'aménorrhée. On aura le résultat très rapidement. On aura prélevé en même temps un fragment de trophoblaste pour l'étude de la biologie moléculaire. Si le caryotype est féminin, on arrête les examens puisque le foetus ne peut être atteint ; si le caryotype est masculin au contraire on effectue l'étude en biologie moléculaire pour savoir s'il est atteint (une fois sur deux) ou indemne (une fois sur deux).
2.1.2 Dans les maladies du métabolisme, à transmission autosomique récessive.
On effectuera le dosage enzymatique sur biopsie de trophoblaste sous réserve d'avoir la certitude du diagnostic pour le cas index : se tromper de dosage enzymatique, en se trompant de maladie ce sera évidemment catastrophique ; on ne fait pas un diagnostic anténatal pour mucopolysaccharidose en général mais, par exemple, pour Maladie de Hurler : il faut être donc sûr de ce diagnostic.
2.1.3 Lorsque le gène a été localisé, une étude en biologie moléculaire est possible.

L'étude en biologie moléculaire nécessite en général l'étude préalable de la famille par les marqueurs que représentent les sondes (technique des RFLP ou des micro satellites) alors qu'on ne sait toujours pas quel est le produit fabriqué par le gène. C'est donc là encore à la biopsie de trophoblaste que l'on s'adresse.
Lorsque le gène a été clôné, on peut parfois rechercher directement la mutation en cause dans la famille même si l'enfant est décédé sans prélèvement et ceci par des techniques plus rapides encore (PCR), (exemple : recherche de la mutation delta F 508 de la mucoviscidose à l'état homozygote, si l'on sait que les deux parents sont hétérozygotes delta F 508). Là encore on s'adressera à la biopsie de trophoblaste.
 
*
* *
 

En fait, les localisations nouvelles des gènes, comme elles sont rapportées actuellement, posent des problèmes d'éthique difficiles : quand un gène est localisé, en principe le diagnostic anténatal en est possible par les sondes en biologie moléculaire. Mais s'il est possible, est-il souhaitable ? Faut-il effectuer un diagnostic anténatal d'une affection qui n'entraine ni la mort, ni retard mental sévère, voire qui se ne se manifestera peut-être qu'à l'âge adulte, et encore parfois de façon pas toujours sévère ? Sera-t'il par exemple éthique de faire demain le diagnostic anténatal de la maladie de Marfan ?
3 Le diagnostic anténatal des malformations
Il s'adresse presque toujours à l'échographie, surtout si l'on a pu prouver à la grossesse qui a donné naissance à un enfant malformé que le carytotype foetal était normal.
3.1 Le diagnostic est uniquement échographique
3.1.1 La situation est simple quand il s'agit de vérifier que l'enfant n'est pas atteint de ce que l'on a des raisons de craindre ; c'est-à-dire vérifier qu'il n'y a pas eu récurrence et ceci quelque soit la malformation.
Dans ces cas, il faudra demander que cette vérification soit effectuée par un échographiste "de référence" souvent sur l'échographie morphologique de la 22è semaine, parfois plus tôt grâce aux sondes endo-vaginales.

3.1.2 Beaucoup plus complexe est le problème de la découverte lors d'une grossesse sans antécédents d'une malformation foetale.

Elle a lieu dans le contexte d'une famille bouleversée par cette annonce. Là encore il faudra s'aider d'un deuxième avis échographique pour tenter :
- d'affirmer le caractère isolé ou non de la malformation,
- chercher des signes d'association : par exemple devant tout omphalocèle il faut chercher systématiquement une non ouverture des doigts évoquant une trisomie 18.
- avoir posé l'indication d'un caryotype foetal (situation déjà examinée).
- en sachant que parfois, il faudra s'opposer à la famille qui désire une interruption de grossesse manifestement non indiquée : malformation qui guérira définitivement au prix d'une ou plusieurs interventions comme par exemple une fente labio-palatine isolée ou ne mettant en jeu que le pronostic fonctionnel (amputation partielle des membres par exemple).
3.2 Parfois le diagnostic échographique s'aidera de la biologie
C'est le cas dans les anomalies de la gouttière neurale et plus spécialement du spina bifida dont on connait la difficulté du diagnostic échographique.

On s'aidera :
- du dosage sérique de l'alpha foeto protéine à 16 SA, ici augmentée en cas d'ouverture du tube neural.
- de l'amniocentèse pour doser dans le liquide amniotique l'alpha foeto protéine à la recherche de son augmentation et une modification de l'électrophorèse des cholinestérases amniotiques.
4 Diagnostic pré-implantatoire

Tout récemment, le Diagnostic Préimplantatoire (D.P.I) a commencé à se mettre en place en France : il consiste à faire le diagnostic sur l’embryon à 4 ou 8 cellules (réalisé par P.M.A), dont on aura prélevé 1 cellule pour y réaliser l’examen désiré : sexe dans les maladies liées à l’X, biologie moléculaire dans la mucoviscidose.
On implantera alors que les oeufs dont on est sûr qu’ils soient indemnes : de sexe féminin pour les maladies liées à l’X, non homozygotes pour D F508 dans la mucoviscidose.

Cette technique, hautement sophistiquée nécessitant de passer par les techniques de Procréation Médicalement Assistée (avec tous ses aléas) posant des problèmes d’éthique nouveaux (que faire des oeufs non utilisés, intégrité de l’embryon, etc...), reste pour l’instant du domaine des indications exceptionnelles, par exemple couple ayant subi plusieurs interruptions médicales de grossesse et refusant de courir à nouveau ce risque.
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* *

En conclusion, le diagnostic anténatal, en raison les progrès de la biologie moléculaire et de l'échographie, tend chaque jour à s'étendre et pose des problèmes d'éthique chaque jour plus complexes : jusqu'où l'accepter ? A partir de quand doit-on, passé le terme de la 12è semaine date limite de l'IVG, refuser une Interruption Médicale de Grossesse qui ne serait qu'une IVG déguisée ?

Problème difficile auquel chacun doit s'efforcer individuellement de réfléchir.
Les maladies héréditaires du métabolisme
B. Le Marec

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 18 février 2000
Objectifs

1. Expliquer le mécanisme physiopathologique des erreurs du métabolisme par déficit enzymatique. Citer deux maladies de ce type et leur incidence.

2. Décrire les raisons du dépistage systématique de l'hyperphénylalaninémie chez le nouveau-né.

3. Décrire la technique du dépistage de la PCU (prélèvement, Guthrie et fluorométrie, résultats, causes d'errreur).

4. Indiquer les principes de traitement de la PCU

Il s'agit de déficits héréditaires enzymatiques pratiquement toujours à transmission autosomique récessive :
- les parents hétérozygotes sont d'aspect normal,
- les enfants atteints sont homozygotes. Le risque se situe donc dans la fratrie de l'enfant atteint : bien entendu, il est de 1/4 à chaque grossesse.

Elles répondent toutes au même modèle :

Une substance A est normalement transformée en une substance B par l'action d'un enzyme.
Or cet enzyme est absent : donc A ne peut être transformé en B.

Généralement, A est alors transformé en une substance C ; on va donc retrouver :
- en aval du blocage, un défaut de B ;
- en amont du blocage, un excès de A ;
- une élimination anormale du corps C.

La galactosémie répond parfaitement à ce type de maladie autosomique récessive : il s'agit d'un défaut de galactose 1 phosphate uridyltransférase qui transforme normalement le galactose en glucose 1 phosphate (lequel va entrer dans le cycle du glucose).

Les conséquences de ce défaut enzymatique seront donc un excès de galactose qui va se comporter comme un toxique (et qui sera éliminé dans les urines : il existe dans les urines un sucre, mais ce sucre n'est pas du glucose).

Cette affection se traduira par un ictère avec vomissements qui aboutira progressivement à une cirrhose :
- s'accompagnant de cataracte,
- et de déchéance mentale progressive.

Un régime sans glucose permettrait une rétrocession imparfaite de la cirrhose, mais généralement pas de la cataracte et encore moins de l'encéphalopathie qui, lorsqu'elle est constituée, va persister. C'est dire la gravité de cette maladie qui généralement tue le premier enfant et c'est seulement lors de la deuxième grossesse que l'on tentera de faire dès la naissance la preuve de l'affection. Elle est extrêmement rare (probablement de l'ordre de 1 pour 50 000 naissances) et ceci rend compte du fait que l'on n'a pas cru devoir généraliser un test de dépistage systématique que certains avaient proposé (examen sur tache de sang séché comme le test de Guthrie que nous reverrons).

 
La phénylcétonurie (P.C.U.)
(voir aussi dépistage dans cours P.M.I et erreurs innées du métabolisme)

 

Il s'agit d'une maladie plus fréquente puisque son incidence est de 1 pour 15 000 naissances (50 à 60 cas par an en France).

La P.C.U. est liée à l'absence d'un enzyme, la phénylalanine hydroxylase, qui normalement permet de transformer la phénylalanine en tyrosine.

Ce blocage du catabolisme de la phénylalanine entraîne une augmentation de son taux sanguin, (normalement inférieur à 4 mg/ml). Cette accumulation va léser les cellules cérébrales et entraîner une encéphalopathie très grave. A un certain taux de phénylalaninémie (15 - 20 mg/ml), il y a passage dans les urines d'acide-phényl-pyruvique et par une voie métabolique accessoire (hydroxylation en ortho alors que la tyrosine est hydroxylée en para) formation d'acide ortho- hydroxy-phényl-pyruvique.

La maladie fut découverte par hasard par Fölling, un biochimiste. Examinant deux enfants encéphalopathes de la même fratrie, il obtint, en ajoutant du perchlorure de fer à leurs urines, une coloration verte inattendue. Il découvrit qu'elle était due à la présence d'acide phényl-pyruvique et démontra le mécanisme de la maladie qu'il appela "idiotie phényl-pyruvique".

Dans les années 1950, Bickel montra qu'en mettant les enfants en régime dépourvu ou très pauvre en phénylalanine, on évitait l'encéphalopathie.

La clinique est très pauvre et se réduit pratiquement à l'apparition d'une encéphalopathie au cours des premiers mois de la vie. Il n'existe ni malformations, ni dysmorphie, c'est une "encéphalopathie nue", mais, par contre, les convulsions sont fréquentes et en particulier l'épilepsie grave de type spasmes en flexion.

Cette encéphalopathie peut être évitée par le régime qui doit être institué aussi précocément que possible, dès les premiers jours de vie. C'est dire l'intérêt du dépistage néonatal appliqué systématiquement à tous les nouveau-nés français.

La recherche de l'acide phényl-pyruvique dans les urines est un test facile mais trop tardif. Facile car la réaction au perchlorure de fer se fait en trempant une bandelette dans l'urine : la bandelette vire au vert en présence d'acide phényl- pyruvique. Mais cette réaction est abandonnée comme moyen de dépistage car l'apparition d'acide phényl-pyruvique est relativement tardive et nécessite un taux élevé et déjà toxique de phénylalaninémie.

Le dépistage se fait donc en mesurant le taux de phénylalanine (PA) dans le sang. Le sang est prélevé sur un papier buvard spécial après piqûre au talon. Le sang doit imprégner complètement, recto-verso, deux des cercles du carton. Ce carton est ensuite adressé, par la poste, à un laboratoire agréé régional où s'effectue le dosage de la PA.

Celui-ci peut se faire soit par le test de Guthrie, soit par fluorométrie.

Le moyen diagnostique utilisé a longtemps été le test de Guthrie, test biologique dont le principe est le suivant : à un milieu de culture de bacilles subtilis, on ajoute un antagoniste, la thiénylalanine qui empêche la poussée du bacille ; cet effet antagoniste peut être levé par la phénylalanine. Un disque de papier buvard imprégéné de sang est donc placé sur un milieu de culture de bacilles subtilis contenant l'inhibiteur. Normalement, le bacille ne pousse pas. Par contre, s'il existe de la PA dans le sang testé, le bacille pousse et la taille de la colonie sera d'autant plus importante que la quantité de PA sera grande. La comparaison à des disques témoins contenant des doses connues de PA permet de chiffrer le taux de PA. Il s'agit donc d'un dosage quantitatif mais grossier. Il découle de ce qui vient d'être dit que le test de Guthrie ne peut être fait chez des enfants recevant des antibiotiques qui inhiberaient la poussée du bacille. Il va de soi également qu'il faut attendre que l'enfant soit alimenté par du lait contenant de la PA pour pratiquer le prélèvement. Le prélèvement doit être fait à J3 après 72 heures de vie.

A peu près partout, ce dépistage de masse est effectué par la fluorométrie, méthode plus précise. Après éluat du disque de papier buvard, le dosage est quantitatif et peut être pratiqué même sous antibiotiques.

Un résultat de 10 mg/ml traduit l'existence d'une hyperphénylalaninémie mais tout résultat atteignant ou dépassant 4 mg/ml est considéré comme suspect et oblige à pratiquer un nouvel examen sans délai. Or, l'enfant est sorti de la maternité et il faut alerter les parents, le médecin traitant et les services de P.M.I. pour faire le plus rapidement possible un nouveau prélèvement et un nouveau dosage, au besoin après administration de vitamine C (coenzyme) qui, lorsque l'augmentation est liée à l'immaturité, facilite le retour à une réponse normale. Si le taux de PA demeure élevé, l'enfant doit être dirigé vers un centre spécialisé où des examens complémentaires : chromatographie des acides aminés, dosage de la tyrosine, seront faits et si la P.C.U. est confirmée, l'enfant sera mis au régime. La PA étant un acide aminé indispensable, il faut déterminer le taux acceptable. Le régime sera pauvre en protéines et celles-ci seront apportées soit par des hydrolysats de protéines dans lesquels on aura éliminé la PA, soit par des mélanges d'acides aminés sans phénylalanine.

En France, on utilise surtout le Lofénalac ou l'Albumaid au départ, puis à l’âge du régime diversifié, des aliments hypoprotidiques.

Dès que possible, l'enfant sera rendu à sa famille et mènera une vie aussi normale que possible, ; établir un régime acceptable pose de nombreux problèmes pratiques qui doivent être enseignés aux mères à qui on donnera un éventail de menus établis soit suivant le système pondéral, soit suivant le système volumétrique. C’est dire l’importance d’une bonne collaboration entre le médecin et la diététicienne. Au début, le contrôle sera hebdomadaire puis il s'espacera à partir du sixième mois. Ce contrôle sera poursuivi pendant des années y compris pendant la scolarité ; la question d'élargir, voire d'arrêter le régime entre 8 et 10 ans est discutée.

Le traitement est maintenant bien codifié et on doit arriver absolument à obtenir des enfants normaux. Avec le temps, ce succès pose maintenant le problème de la descendance des filles traitées pour la P.C.U. dès la naissance et qui justifie que les filles continuent à prendre des aliments de régime afin que l’acceptabilité en soit correcte le jour où il faudra les remettre au régime pour leur grossesse : à défaut de ce régime, les enfants de mère PCU présenteront : microcéphalie, cardiopathie et retard mental.

La pratique du dépistage systématique a permis de mieux connaître les différentes formes d'hyperphénylalaninémies. D'après Rey, on peut distinguer :
- Les déficits en phénylalanine hydroxylase avec les variants habituels suivants :

    * une activité nulle, c'est la forme classique P.C.U.,
    * une activité à 3 %, c'est la forme atypique ou "méditerranéenne",
    * une activité de 3 à 6 %, c'est la forme modérée.

- Les déficits du système cofactoriel caractérisés par une activité phénylalanine hydroxylase normale et :

    * soit un déficit complet de synthèse des bioptérines (déficit en neurotransmetteurs) donnant une hyperphénylalaninémie,
    * soit un déficit incomplet donnant des formes pseudo-transitoires,
    * soit un déficit en dihydroptéridine réductase, cofacteur nécessaire à l'hydroxylation de la phénylalanine en tyrosine.

Dans ces variants, l'hyperphénylalaninémie est moins élevée que dans la P.C.U. classique et chute brutalement lors du régime. La tolérance à la PA est plus grande. La biopsie hépatique montre une activité normale de la phénylalanine hydroxylase et il faut alors préciser le bloc métabolique (étude urinaire BH4).
La mucoviscidose
M. Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 18 février 2000

1 Epidémiologie - Physiopathologie
2 Sémiologie clinique
2.1 Manifestations respiratoires
2.2 Manifestations digestives
2.3 Manifestations hépatiques
2.4 Autres manifestations
   

3 Diagnostic positif - Diagnostic anténatal
4 Evolution et pronostic
5 Traitement
5.1 Prise en charge respiratoire
5.2 Prise en charge digestive et nutritionnelle
Conclusion
Objectifs

1. Décrire la génétique de la mucoviscidose.

2. Décrire les connaissances pathogéniques actuelles.

3. Décrire les manifestations cliniques.

4. Décrire les modes de révélation de la maladie.

5. Décrire les moyens diagnostiques de la maladie.

6. Donner le conseil génétique dans cette maladie.

7. Décrire la prise en charge thérapeutique.

La mucoviscidose ou fibrose kystique du pancréas est la maladie héréditaire la plus fréquente dans la population de race blanche dite encore caucasienne. Elle a été individualisée anatomiquement en 1936 et cliniquement en 1953.

Il s'agit d'une exocrinopathie généralisée, frappant les glandes séreuses et les glandes à sécrétion muqueuse. Sont touchés principalement : l'appareil respiratoire, le tube digestif et ses annexes (pancréas, foie et voies biliaires), mais également les glandes sudoripares et le tractus génital.

L'atteinte des glandes à mucus semble liée à la production de sécrétions visqueuses (d'où le nom donné à la maladie, mucus visqueux), collantes, vraisemblablement insuffisamment hydratées.

Bien que l'espérance de vie des patients soit encore réduite, des progrès très importants ont été réalisés depuis quelques années au niveau de la recherche fondamentale et de la génétique, laissant espérer une meilleure compréhension de la maladie et l'orientation vers une thérapeutique curative.
1 Epidémiologie - Physiopathologie

La mucoviscidose se transmet sur le mode autosomique récessif, c'est- à-dire que seuls les homozygotes sont malades. L'incidence se situe aux environs de 1 sur 2000 à 1 sur 3000 naissances vivantes. Les hétérozygotes, phénotypiquement normaux, représentent environ 4 % de la population générale.

L''identification directe du gène et de ses différentes mutations est possible depuis 1989. Le gène CF (CF pour Cystic Fibrosis) est un grand gène de 250 kilo-bases qui code pour une protéine de 1480 acides aminés appelée protéine CFTR (Cystic Fibrosis Transmembrane conductance Regulator). Une mutation du gène CF entraîne donc un défaut dans la protéine CFTR, à l'origine de la mucoviscidose.

En 1999, plus de 800 mutations ont été isolées, mais la plus fréquente, (là encore découverte en 1989) baptisée D F 508, est présente chez environ 70% des malades. Cette mutation consiste en la délétion d'un acide aminé, une phénylalanine en position 508, due à une mutation portant sur le dixième exon du gène.

Il semble que les patients homozygotes à la mutation D F 508 aient une forme plus sévère que les hétérozygotes pour cette mutation et pour une mutation non D F. En l'absence de D F, il est difficile de prévoir la sévérité plus ou moins grande de l'évolution. Il n'y a pas de réelle corrélation clinicogénétique ; la mutation D F 508 est néanmoins plus souvent associée avec l'insuffisance pancréatique ; une autre mutation plus rare R117H ne s'observe que dans les formes adultes avec agénésie déférentielle (mode de révélation lors d'un bilan de stérilité masculine) ; certaines mutations rares ne donneraient que des formes cliniques discrètes.

Dès 1953, l'élévation anormale de la concentration du chlore et du sodium de la sueur suggérait une implication des transports électrolytiques au niveau des canaux sudoraux, mais la corrélation entre cette anomalie, asymptomatique, et les autres manifestations cliniques restait inconnue. Les travaux de recherche fondamentale les plus récents, conduits au niveau des canaux sudoraux et de la muqueuse des voies respiratoires, permettent maintenant de dire que :
- l'épithélium respiratoire et des glandes sudorales est imperméable à l'ion chlore,
- il existe de plus une réabsorption exagérée de sodium,
- les cellules épithéliales sont insensibles à la stimulation par les substances bêta adrénergiques.

La protéine CFTR est une protéine transmembranaire apparentée à la vaste famille des glycoprotéines qui sont les transporteurs d'ions ou de métabolites. Les canaux chlore sont structurellement normaux mais la protéine CFTR intervient dans la régulation du transport des ions chlore.

De nombreux points restent encore à éclaircir :
- il faut établir des liens entre l'anomalie de la perméabilité de l'ion chlore et l'anomalie de l'ion sodium et de l'ion bicarbonate constatée pour l'un au niveau des voies respiratoires, pour l'autre au niveau des canaux pancréatiques ;
- de même, il faut établir le lien entre cette anomalie et les anomalies du milieu endo-bronchique : modification du mucus avec sécrétion de mucines anormales, colonisations microbiennes spécifiques (staphylocoque doré et Haemophilus influenzae puis Pseudomonas aeruginosa).

Une fois installée, l'infection endobronchique est définitive et évolutive sous forme latente et insidieuse ou sous forme d'exacerbations entraînant une réaction inflammatoire avec réponse hyperimmune. Il se crée alors un cercle vicieux d'hypersécrétion et d'inflammation entretenu par les médiateurs bactériens et cellulaires. Obstruction, infection et inflammation bronchiques s'associent ou se succèdent pour conditionner l'évolution inexorablement progressive vers la destruction des parois bronchiques et du parenchyme pulmonaire.

L'obstruction des canaux pancréatiques aboutit à un déficit secrétoire pancréatique exocrine, responsable d'une maldigestion et d'une fibrose progressive du pancréas (d'où le nom de fibrose kystique du pancréas donné par les anglosaxons). Le mucus, trop épais au niveau du tube digestif, peut favoriser la survenue d'occlusion néonatale (iléus méconial), ralentir le transit et contribuer à la malabsorption intestinale des nutriments. L'obstruction des voies biliaires peut rendre compte des lithiases observées à ce niveau, des micro-vésicules et en partie de la cirrhose du foie qui peut venir compliquer l'évolution de la maladie. L'obstruction des canaux déférents est responsable de stérilité par azoospermie.
2 Sémiologie clinique
Au polymorphisme des atteintes correspond de multiples expressions de la maladie. L'âge d'apparition des premiers symptômes est très variable. Le poumon est généralement normal à la naissance, alors que les lésions pancréatiques et les anomalies du mucus intestinal existent dès la phase foetale.
2.1 Manifestations respiratoires

Les signes respiratoires et l'infection des voies aériennes dominent largement le tableau clinique dans la majorité des cas et conditionnent le pronostic vital et la qualité de la survie.

Le syndrome respiratoire est peu spécifique : toux chronique, sèche, quinteuse, rapidement productive, bronchites infectieuses et/ou asthmatiformes marquées par leur caractère récidivant.

Les premières manifestations sont le plus souvent précoces (avant l'âge de 1 an dans environ 80 % des cas). La dystrophie thoracique (avec cyphose dorsale et thorax en carène) et l'hippocratisme digital, d'apparition précoce témoignent de l'évolutivité de cette bronchopathie chronique obstructive.

Les aspects radiologiques sont évocateurs par l'association et la diffusion d'images bronchiques et alvéolaires pourtant non spécifiques : épaississement péribronchique avec image en rails, distension pulmonaire avec emphysème, atèlectasie segmentaire ou sous-segmentaire en bande, foyer alvéolaire mal systématisé, opacité aréolaire cernant des bronchectasies en "bouquet".

Une pathologie rhinosinusienne qui augmente avec l'âge s'y associe : sinusite chronique, polypose nasale, surdité de transmission.

Trois germes pathogènes sont responsables de la plupart des épisodes de suppuration bronchique :
- le staphylocoque doré,
- l'Haemophilus influenzae,
- et surtout le Pseudomonas aeruginosa (bacille pyocyanique). L'infection chronique à pyocyanique constitue le problème infectieux principal et marque le plus souvent un tournant évolutif péjoratif de la maladie. Certaines souches dites "mucoïdes" se développent au sein de microcolonies entourées d'une matrice exopolysaccharidique (slime). Ce caractère mucoïde est pratiquement spécifique de l'infection. L'incidence des souches mucoïdes augmente avec l'âge et l'évolutivité de la maladie respiratoire. Il est probable que le slime augmente l'adhésion des bactéries aux structures contaminées et gêne la pénétration des antibiotiques. Des infections virales, aspergillaires ou mycobactériennes peuvent également se surajouter.

L'atteinte bronchopulmonaire évolue par poussées qui conduisent en quelques mois ou plusieurs dizaines d'années à l'insuffisance respiratoire voire au coeur pulmonaire chronique. Les poussées de surinfection s'accompagnent d'une anorexie qui contraste avec l'augmentation des dépenses énergétiques. Cela aboutit à une dénutrition et/ou un retard pubertaire.

Cette évolution peut être émaillée de complications pouvant engager le pronostic vital tels des pneumothorax volontiers récidivants ou des hémoptysies.

Le décès survient en règle au décours d'une exacerbation des signes respiratoires d'allure infectieuse accompagnés de signes d'insuffisance cardiaque droite ou globale dans environ 1/3 des cas.
2.2 Manifestations digestives

Les manifestations digestives expriment d'une part l'insuffisance pancréatique exocrine, d'autre part, les propriétés physiques spécifiques des selles.

L'iléus méconial est une occlusion aiguë néonatale par le méconium insuffisamment liquéfié du fait d'une sécrétion protéolytique insuffisante par le pancréas et des glandes intestinales. Il constitue la manifestation initiale de la maladie dans 10 % des cas ; l'occlusion siège en règle au niveau de l'iléon terminal avec apparition dès la 48ème heure de vomissements, de ballonnement sans émission de méconium. Dans la moitié des cas environ, cette occlusion est simple et peut être levée par des lavements évacuateurs et hyperosmolaires. Ailleurs, l'association à une atrésie iléale, un volvulus du grêle ou une péritonite méconiale par perforation impose le recours à la chirurgie (résection plus ou moins étendue avec anastomose terminale en un ou deux temps).

Chez l'enfant, plus souvent chez l'adulte, une occlusion de même nature peut survenir, réalisant un iléus stercoral pouvant se compliquer d'invagination. Chez le nourrisson, le prolapsus rectal est toujours évocateur et justifie un test de la sueur systématique.

L'insuffisance pancréatique exocrine s'exprime chez environ 90 % des patients. Elle est responsable d'une diarrhée chronique avec émission de selles volumineuses, graisseuses et nauséabondes.

Cette diarrhée chronique de maldigestion est responsable de l'hypotrophie pondérale puis staturale qui contraste d'ailleurs chez le nourrisson avec un appétit conservé (en dehors des épisodes d'infections respiratoires). Cette maldigestion, objectivée par la mesure de la stéatorrhée, s'accompagne de carences secondaires en vitamines liposolubles et oligoéléments.

La fibrose pancréatique peut s'étendre aux îlots de Langherans. Dans 5 à 10 % des cas, le plus souvent à l'adolescence, apparaît alors un diabète sucré insulino-dépendant. Des poussées de pancréatite aigüe peuvent exceptionnellement survenir.

Le reflux gastro-oesophagien est essentiellement une complication de la bronchopneumopathie chronique. Il est en règle acquis, lié à l'emphysème pulmonaire et aux modifications du gradient de pression abdomino-thoracique (quintes de toux). Gastrite et duodénite peuvent également se voir.
2.3 Manifestations hépatiques

L'atteinte hépatobiliaire est fréquente mais ne conduit à la cirrhose que dans 10 à 15 % des cas. Un ictère rétentionnel par syndrome de la bile épaisse peut être révélateur en période néonatale.

La cirrhose de type biliaire est précédée par des montées transitoires des transaminases et des gamma GT. Elle peut se compliquer de décompensation oedématoascitique, d'insuffisance hépatocellulaire ou d'hypertension portale avec apparition de varices oesophagiennes et/ou gastriques avec risque hémorragique.

Enfin, la vésicule biliaire est fréquemment atrophique et les lithiases, en règle asymptomatiques, sont de plus en plus souvent observées avec la prolongation de la survie.
2.4 Autres manifestations

Le diagnostic de mucoviscidose doit être évoqué devant d'autres manifestations, plus ou moins fréquentes, d'âges d'apparition variés. Ce peut être :
- une hypotrophie pondérale isolée, inexpliquée par ailleurs, souvent précoce (difficulté à récupérer le poids de naissance),
- forme oedémateuse avec hypoprotidémie et anémie (nourrisson),
- perte accrue de sel par la sueur pouvant entraîner une déshydratation aiguë ; la saveur anromalement salée des téguments est parfois remarquée par les mères de ces enfants (baiser salé),
- myocardiopathie non obstructive,
- diabète, lorsque le pancréas endocrine est à son tour atteint, notamment chez l'adulte.
- arthropathie,
- manifestations génitales qui posent actuellement un problème avec la survie prolongée de ces enfants ; la stérilité est la règle chez les hommes (atrésie des canaux déférents entraînant une azoospermie, lésions fréquentes de la prostate et des vésicules séminales) ; chez le femme, il existe une hypofertilité par modification de la glaire cervicale. Néanmoins de nombreux cas de grossesse sont maintenant rapportés.
3 Diagnostic positif - Diagnostic anténatal

Le diagnostic de la maladie repose sur le test de la sueur : mesure de la concentration du chlore sur un échantillon de sueur d'au moins 100 mg recueillis par iontophorèse. Normalement, la sueur contient moins de 40 mmol/l de chlore. Le test est pathologique au-delà de 60 mmol/l ; il doit être répété à plusieurs reprises en cas de doute (entre 40 et 60 mmol/l) étant donné les conséquences thérapeutiques et psychologiques mises en jeu. Ce test doit être effectué avec soin par un laboratoire spécialisé ; deux tests positifs sont nécessaires pour affirmer le diagnostic.

Dans 90% des cas, la biologie moléculaire permettra de retrouver la même mutation sur chaque chromosome (homozygote) ou 2 mutations différentes (hétérozygote composite).

Un dépistage néonatal est désormais possible, par le dosage de la trypsine immuno-réactive (TIR) sur éluat de sang séché à 3 jours de vie, en même temps que le dépistage de la phénylcétonurie, de l'hypothyroïdie et de l'hyperplasie congénitale des surrénales.Un taux élevé correspond au passage d'une trypsinogène dans le sang circulant en raison de l'obstruction des acini pancréatiques ; avec l'âge, le taux décroit puis devient inférieur à la normale. En cas de TIR élevée une recherche des principales mutations du gène CF est effectuée, avec l'accord parental préalable. Si à court les bénéfices de ce dépistage sont maintenant bien établis, à long terme, ils doivent encore être évalués;

Un diagnostic anténatal est possible pour les couples hétérozygotes repérés par la naissance d'un enfant atteint ou le risque de récurrence est alors de 1/4 (affection autosomique récessive). Néanmoins, le généticien est de plus en plus confronté à la demande de couples à risque faible, notamment lorsqu'il s'agit de fratrie de parents d'enfants atteints. Actuellement, compte-tenu de sa précocité, mais aussi de sa meilleure fiabilité, le diagnostic anténatal par les procédés de la biologie moléculaire à partir d'un prélèvement de villosités choriales à la 10è semaine d'aménorrhée est utilisé de préférence à celui par l'étude des enzymes digestives dans le liquide amniotique à 18 semaines d'aménorrhée. L'identification des mutations les plus couramment rencontrées permet le plus souvent un diagnostic direct.

Le diagnostic anténatal par biologie moléculaire doit être alors précédé d'une étude familiale de l'ADN, celle-ci devant avoir lieu avant la grossesse ou à son tout début pour en connaître les résultats avant la date du diagnostic foetal ; la recherche des mutations est effectuée parallèlement chez le foetus.
4 Evolution et pronostic

Il existe une très grande variation d'évolutivité d'un patient à l'autre, et pour un même patient au niveau des différents organes ou appareils concernés. Le clinicien ne dispose pas d'un marqueur fiable de cette évolutivité. Sont en règle utilisés :
- les épreuves fonctionnelles respiratoires et la gazométrie,
- le dosage pondéral des gammaglobulines sériques, témoignant de l'importance de la suppuration bronchique,
- le score de Shwachman, prenant en compte des items fonctionnels, respiratoires, nutritionnels et radiologiques.

Quoiqu'il en soit, les progrès du traitement symptomatique ont permis une sensible amélioration du pronostic. La médiane de survie, qui était de quelques années en 1936, est maintenant supérieure à 30 ans dans les centres spécialisés. Ceux-ci se sont organisés en consultations multidisciplinaires où sont également pris en compte les problèmes psychologiques et sociaux inhérents à une maladie chronique évolutive à potentialité léthale, débutant dans l'enfance, sans anomalie du niveau intellectuel, de transmission héréditaire.
5 Traitement

Le traitement est long, à vie, et n'est pour l'instant que symptomatique. Les thérapeutiques sont souvent contraignantes et doivent viser à une insertion familiale, scolaire, puis professionnelle des patients qui doit demeurer le plus longtemps possible satisfaisante.

La qualité et l'acceptation des soins reposent sur une collaboration permanente entre médecin traitant, équipe paramédicale (kinésithérapeute, infirmière) et les centres spécialisés.
5.1 Prise en charge respiratoire
La prise en charge respiratoire repose essentiellement sur la kinésithérapie respiratoire et le traitement anti-infectieux :
5.1.1 La kinésithérapie respiratoire est déterminante

Elle vise à préparer l'évacuation des sécrétions par la toux, de façon à rétablir au mieux et de façon aussi prolongée que possible la perméabilité des voies aériennes.

Pour liquéfier les sécrétions, on utilise aérosols et vibrations manuelles. Les aérosols peuvent être employés pour hydrater les sécrétions par simple humidification ou nébuliser des molécules mucolytiques qui peuvent être utiles lorsque, malgré un encombrement manifeste, la toux est peu productive. Les vibrations manuelles appliquées sur la paroi thoracique ont pour but d'abaisser la viscosité des sécrétions en les fragmentant.

Pour mobiliser les sécrétions, la technique de kinésithérapie de référence est l'accélération du flux respiratoire qui doit être adapté à l'âge de l'enfant : d'abord passive chez les nourrissons, elle devient active chez l'enfant ; chez l'adolescent et l'adulte, la kinésithérapie évolue vers les techniques d'auto-drainage.

Gymnastique et rééducation respiratoire visent à éviter la dystrophie thoracique ; la pratique d'un exercice physique adapté aux épreuves d'effort et au goût du sujet est vivement conseillée.

Quelque soit la méthode retenue, la kinésithérapie doit être très régulière, quotidienne et notamment l'encombrement bronchique étant maximal en fin de nuit, la séance du matin au réveil est conseillée.
5.1.2 L'antibiothérapie

L'utilisation des antibiotiques doit obéir à un certain nombre de principes généraux :
- Le choix des antibiotiques doit se fonder sur l'analyse bactériologique quantitative et qualitative de la flore du pus d'expectoration.
- La prévention des résistances du fait de la chronicité de la suppuration bronchique, passe par l'association d'antibiotiques bactéricides peu sélectionnants.
- De fortes posologies sont en règle nécessaires sur des cures de deux semaines au minimum du fait d'une pharmacocinétique particulière caractérisée par un raccourcissement de la demi-vie d'élimination. Ces fortes posologies permettent en outre d'augmenter le passage bronchique faible pour la plupart des molécules.
La plupart des surinfections bronchiques imputables au staphylocoque doré sont contrôlées par une antibiothérapie prolongée par voie orale. Les épisodes de surinfection à Haemophilus influenzae sont aisément contrôlées par une antibiothérapie spécifique par voie orale.
- Les antibiotiques antipyocyanique appartiennent essentiellement à trois familles : les bêtalactamines, les aminosides, les fluoroquinolones. Bêtalactamines et aminosides représentent l'essentiel de l'arsenal thérapeutique ; elles ne sont administrables que par la voie parentérale.

Les cures d'antibiotiques améliorent de façon immédiate et indéniable l'état clinique des patients. Dès lors que l'infection à pyocyanique est chronique, des cures trimestrielles peuvent être mises en route et non plus uniquement sur la seule exacerbation des signes respiratoires. Le bénéfice tiré des cures intraveineuses semble renforcé par une antibiothérapie administrée à domicile par voie d'aérosols (Colimycine ou Tobramycine). Dans la mesure du possible, une hospitalisation à domicile doit si possible relayer l'hospitalisation traditionnelle afin de ne pas couper le patient de son milieu familial, scolaire ou professionnel.
5.1.3 Autres mesures

- Les bronchodilatateurs doivent être utilisés chaque fois qu'il existe un bronchospasme réversible aux explorations fonctionnelles respiratoires.

- De nouvelles molécules permettent de fluidifier le mucus et notamment la rh DNase, enzyme catalytique d'hydrolyse de l'ADN extracellulaire particulièrement sèche dans les sécrétions bronchiques purulentes des patitents atteints de mucoviscidose. Utilisée par voie aérosol, elle permet de diminuer la viscosité du mucus alors plus facile à évacuer par la kinésithérapie. Ce produit est pour l'instant prescrit dès que l'obstruction respiratoire est objectivée par les explorations foncitonnelles respiratoires.

- Un reflux gastro-oesophagien nécessite d'être traité pour son propre compte.

- Les vaccinations doivent être effectuées selon le calendrier habituel, en n'omettant pas la vaccination antirougeoleuse qui s'impose et en associant annuellement le vaccin antigrippal.

- En cas d'insuffisance respiratoire chronique évoluée, l'analyse des gaz du sang peut conduire à une oxygénothérapie nocturne.

- La greffe pulmonaire peut apparaître comme la chirurgie de l'ultime recours. L'espoir soulevé ne doit pas occulter les difficultés immédiates ni les incertitudes à long terme, en particulier, quant au contrôle des manifestations de rejet chronique.
5.2 Prise en charge digestive et nutritionnelle

Auparavant, le régime alimentaire classique proposé était hyperprotidique, pauvre en graisses à chaînes longues et enrichi en triglycérides à chaînes moyennes ; il se voulait hypercalorique mais les 130 à 140 % des apports recommandés pour l'âge, classiquement requis, étaient rarement obtenus.

L'apparition d'extraits pancréatiques en microsphères gastro-protégées, hautement concentrées en lipase est venue bouleverser ces données, en permettant une diminution franche de la stéatorrhée résiduelle. Le régime doit donc être hypercalorique, normolipidique, sous contrôle de l'opothérapie pancréatique renforcée. L'augmentation des apports lipidiques et donc énergétiques améliorent sensiblement l'état nutritionnel des patients en répondant au moins pendant une certaine période à la majoration des besoins énergétiques imputables à la bronchopneumopathie chronique.

En outre, le régime normocalorique est beaucoup plus attractif et diversifié et répond mieux aux exigences d'insertion sociale des adolescents et des adultes. Les posologies d'extraits pancréatiques doivent être adaptées par les malades eux-mêmes en fonction de leurs repas.

Par ailleurs, il faut assurer une supplémentation en vitamines liposolubles : 7500 à 10000 UI par jour de vitamime A, 1200 à 1500 UI de vitamine D, 5 à 10 mg/kg de vitamine E sous forme d'acétate de tocophérol, de la vitamine K chez le nourrisson ; Il en va de même des oligoéléments en particulier du zinc et du sélénium.

Du fait des déperditions sudorales, une supplémentation en chlorure de sodium est nécessaire, surtout en cas de forte châleur.
Conclusion

La mucoviscidose reste une maladie grave sans traitement curatif, mais dont la prise en charge précoce et adaptée améliore le profil évolutif.

La prévention génétique est actuellement possible ; la greffe est un grand espoir pour certains enfants ou adolescents. Les avancées de la recherche fondamentale et surtout génétique avec les connaissances de plus en plus précises du trouble primaire laissent espérer un traitement absolu. Déjà, des essais de thérapie génique in-vitro et chez l'homme, sont actuellement en cours.
Les troubles fonctionnels
Ph. Dardenne

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 26 mars 1999

1 Troubles fonctionnels du nourrisson
1.1 Pathologie des trois premiers mois
1.2 Pathologie dite "du deuxième semestre" (3-12 mois)
2 Le grand enfant
   

2.1 Enurésie
2.2 Encoprésie
2.3 Douleurs abdominales
2.4 L'insomnie
Sous ce terme, on désigne des troubles pour lesquels les manifestations somatiques (ou "expression somatique") sont au premier plan du tableau clinique et qui comportent, dans leur déterminisme des troubles de la relation enfant entourage.

Nous étudierons successivement :
- Les troubles fonctionnels du nourrisson : coliques du premier trimestre, insomnie, anorexie, vomissements, mérycisme ;
- Quelques symptômes observés fréquemment chez l'enfant plus grand : énurésie, encoprésie, douleurs abdominales.
1 Troubles fonctionnels du nourrisson
Ces troubles ne sont pas superposables à la catégorie troubles fonctionnels de l'adulte, en effet :
- l'enfant (et plus encore le bébé) traduit volontiers les troubles de son psychisme et de sa relation à autrui par des dysfonctionnements au niveau du corps ;
- l'enfant est un être en plein développement, constituant sa future personnalité, selon des étapes dans sa maturation psychique : ainsi faut-il toujours faire référence à l'âge du bébé, de l'enfant en ce qui concerne les troubles fonctionnels ("à chaque âge sa pathologie"), l'apparition (et la disparition) des troubles est en relation avec le stade naturatif. Une insomnie du premier semestre n'est, par exemple, pas comparable à une insomnie de la deuxième année ; l'anorexie "nerveuse" commune survient après 6 mois et une anorexie très précoce doit être considérée différemment ;
- les troubles dans la relation enfant-entourage sont des troubles de l'interrelation, chacun des protagonistes est à la fois agissant et réagissant ; le bébé, l'enfant n'est pas passif, il induit des conduites qui peuvent paraitre distordues chez les parents et notamment la mère ; l'accent avait surtout été mis sur le poids de facteurs désorganisants pour l'évolution de l'enfant chez la mère et les parents, il faut, dans cette perspective, s'intéresser aux représentations que les parents se font de l'enfant, représentations imaginaires en grande partie, qui ont fait parler d'interrelations fantasmatiques entre parents, surtout la mère et le nourrisson.
1.1 Pathologie des trois premiers mois
1.1.1 Les coliques du premier trimestre ou cris paroxystiques ou coliques idiopathiques

Cette affection débute 8 ou 15 jours après la naissance, par des cris survenant peu après le repas, durant plus ou moins longtemps. L'enfant parait souffrir du ventre, aussi parle-t-on volontiers de "coliques".

L'examen clinique est nécessaire et montre souvent un discret météorisme. Le bébé est en bonne santé, mais décrit par les parents comme "nerveux".

SPITZ avait déjà noté la conjonction de deux facteurs, la rencontre d'une mère anxieuse ("sollicitude excessive et anxieuse de mère") et d'un "bébé hyperactif" comme conditions favorables, sur le plan psychique et relationnel, de survenue des coliques du premier trimestre. L'évolution spontanée vers la guérison se fait aux alentours de trois mois.
1.1.1.1 L'examen clinique
Ce syndrome débute habituellement entre le huitième et le quinzième jour, quelquefois dès le retour de la maternité. Il est caractérisé par l'existence de cris survenant peu après le repas et qui vont durer plus ou moins longtemps, quelquefois jusqu'au repas suivant. Ils surviennent plus volontiers à la fin de l'après-midi et dans la soirée ; ils ne durent pas, en général, au-delà de la première partie de la nuit. Pendant qu'il crie l'enfant paraît souffrir du ventre et il est remarquable que les mères, presque toujours, parlent spontanément de "coliques". D'ailleurs, il existe souvent une symptomatologie à ce niveau : l'abdomen est un peu tendu, météorisé, l'émission de gaz intestinaux fréquente. Les cris sont calmés par l'alimentation mais pour une courte durée et, bientôt, les cris reprennent. Ce fait aboutit généralement à une suralimentation.

Ce nourrisson, par ailleurs, est en bonne santé, se développe normalement et même, quelquefois, prend du poids de façon excessive. Il est volontiers décrit comme "nerveux" car il est effectivement hypertonique. Ce qui est frappant et conduit au diagnostic est précisément ce contraste entre un enfant apparemment en bonne santé et l'anxiété flagrante de la mère et de l'entourage avec, parfois, une succession spectaculaire de changements intempestifs... Le plus souvent, le transit intestinal est normal ; il peut exister des épisodes de diarrhée ou de constipation modérées (mais, dans ce contexte ils inquiètent beaucoup).
1.1.1.2 Conditions de survenue
Un certain nombre de constatations ont conduit à proposer une compréhension "psychologique" de ce syndrome : d'une part, il survient entre une mère manifestement anxieuse (sollicitude "excessive et anxieuse" de SPITZ) et un nourrisson considéré comme "hypertonique" ; d'autre part, le bercement, la sucette, font disparaître les cris, de même que la séparation de la mère et de l'enfant. Ce syndrome ne serait jamais observé dans les collectivités d'enfants. Enfin, la prise en charge médico-psychologique permet souvent de voir diminuer ou disparaître les troubles du jour au lendemain sans autre intervention thérapeutique.

Il est habituel d'observer que la "colique" survient dans une relation particulière marquée par la difficulté maternelle à gérer son anxiété et son agressivité par rapport au bébé. Cependant, d'autres études n'ont pas retrouvé ces facteurs émotionnels maternels, et concluent à des difficultés transitoires du développement, somme toute banales ou à des perturbations qui s'originent chez l'enfant.
1.1.1.3 Attitude pratique
L'attitude du médecin est le premier élément thérapeutique. Le "traitement" commence vraiment quand les parents, plus ou moins désemparés, ayant en général consulté déjà plusieurs médecins, rencontrent une personne qui paraît bien connaître la symptomatologie de leur enfant et montre de la disponibilité. La deuxième étape consiste à rassurer les parents sur l'absence de maladie grave, ce qu'ils redoutent toujours si on leur permet de l'exprimer (hernie, occlusion, malformation, intolérance, etc...). Cela suppose une bonne connaissance du syndrome, afin de n'être pas soi-même dominé par l'arrière-pensée d'une atteinte organique. Un examen clinique soigneux est évidemment indispensable.

Dans ces conditions, on peut faire une prescription modeste, comportant un produit susceptible de diminuer le météorisme intestinal, ou parfois un sédatif à faibles doses.
1.1.2 L'insomnie précoce
L'insomnie est un symptôme répandu dont la fréquence croit actuellement. Selon DEMENT, l'insomnie correspond, en tant que trouble du sommeil à des difficultés d'installation et de maintien du sommeil. La labilité du sommeil et de son organisation chez le jeune enfant fait que le sommeil est un indicateur très sensible du développement psychique de l'enfant et de son aménagement relationnel.

Le nouveau-né dort environ 19 H par jour, sortant du sommeil pour les repas, les phases de veille et de sommeil sont réparties sur les 24 H. Le rythme nycthéméral ne s'établit que progressivement, le sommeil, réparti en sommeil calme et agité (à peu près de durée équivalente au début), va s'organiser peu à peu. Il y a donc quelques mois d'instabilité, qui peuvent désorienter les parents et le médecin qui a pour rôle de dédramatiser la situation et de surveiller l'évolution. Cependant, il ne doit pas sous-estimer la valeur d'un trouble du sommeil très persistant : si l'insomnie peut être en rapport avec de mauvaises conditions entourant le sommeil du bébé (bruit, horaires irréguliers,...) avec des erreurs de puériculture (suppression prématurée du repas de nuit, horaires, durée et rations ne tenant pas suffisamment compte des besoins personnels du bébé) il faut savoir que l'insomnie peut exprimer les difficultés relationnelles entourage-bébé, (discontinuité dans les soins, multiplicité des personnes qui s'occupent du bébé, trop grande rigidité ou, à l'opposé, laxisme dans les horaires du coucher) et qu'il sera important d'aborder l'ensemble de la relation mère-bébé et de ne pas hésiter à transmettre le problème au spécialiste.

L'insomnie est le plus souvent agitée, donnant l'impression d'une lutte contre le sommeil, avec parfois, des balancements rythmiques ou des conduites qui semblent auto-agressives (l'enfant se cogne contre les barreaux du lit par exemple), l'insomnie calme ou "silencieuse" est plus insolite, le bébé restant de longues heures les yeux ouverts sans crier. On a pu retrouver cette insomnie dans les antécédents de psychose infantile.
1.2 Pathologie dite "du deuxième semestre" (3-12 mois)
1.2.1 L'anorexie
Symptôme qui reste fréquent bien que l'information l'ait diminué en prônant l'attitude de ne jamais forcer un enfant à manger, elle survient en règle générale à partir de 5-6 mois ; S'installant plus ou moins rapidement c'est une conduite d'opposition entre l'enfant qui refuse et l'entourage qui force et qui utilise les moyens les plus divers pour alimenter l'enfant (jeux, contrainte, distraction, surprise,...).
A noter que :
- la courbe pondérale progresse, malgré l'apparente faible quantité de nourriture acceptée, la soif est conservée ;
- l'enfant est décrit comme en avance sur le plan du développement et "sans problème" s'il n'y avait pas la corvée des repas, l'enfant est décrit comme plutôt gai, c'est un bon critère distinctif.

Cette anorexie simple "réactionnelle" (outre qu'elle apparait souvent lors du sevrage ou de la diversification de l'alimentation, ou encore à l'occasion d'un épisode fébrile intercurrent) doit être abordée avec tact : il s'agit, pour le médecin, de rassurer les parents, notamment la mère, quant au pronostic somatique, de les amener à cesser de se focaliser sur l'alimentation et donc d'entrer dans la conduite d'opposition de l'enfant.

De toute autre gravité est l'anorexie complexe (qui peut s'installer plus précocément, dès le premier mois) intense, résistante aux méthodes usuelles d'abord, véritable désintérêt vis-à-vis de la nourriture, la retation mère-enfant est particulièrement distordue et cette anorexie relève d'un abord pédo-psychiatrique.
1.2.2 Les vomissements
Après avoir éliminé une béance hiatale ou une autre maladie digestive, ils ont des relations étroites avec l'anorexie, l'enfant se laissant gaver en quelques sorte, puis vomissant tout ou partie du repas. D'abord épisodiques, à la fin d'un repas qui a pu demander des efforts de l'entourage, ils peuvent devenir quotidiens ou pluri-quotidiens. Même si l'enfant parait bien manger, pour vomir ensuite, une enquête soigneuse retrouve souvent une phase d'anorexie qui précède les vomissements.
Parfois les vomissements revêtent un caractère intense, qui peut menacer la vie de l'enfant (ce qui rejoint le problème de l'anorexie complexe).
1.2.3 Le mérycisme
Ce symptôme peut s'observer à tous les âges. Il est plus fréquent au cours du 2ème semestre, et chez le garçon.

Il s'agit d'un vomissement provoqué par une série d'activités complexes du pharynx, de la musculature thoraco-abdominale et diaphragmatique. Une partie plus ou moins importante des aliments est rejetée, "vomie", mais l'enfant en garde une fraction dans la bouche et la mâchonne interminablement pour la ravaler : "il rumine". Si une grande quantité d'aliments est vomie, une dénutrition s'installe et peut aboutir à une déshydratation. Ces enfants, considérés comme vomisseurs, sont souvent hospitalisés, parfois en urgence. A l'examen, il n'existe pas d'anomalie digestive, notamment pas de béance hiatale. L'appétit est d'ailleurs conservé.

Cinq points sont à souligner :
- Le comportement du nourrisson est particulier au moment ou il "rumine" il est entièrement absorbé dans son excercice, le regard vide, comme "abîmé dans la satisfaction".
- Cette attitude cesse dès qu'on s'approche de lui. On peut remarquer d'ailleurs chez ces enfants une particulière avidité du contact avec l'adulte : le regard est mobile, perçant, une bonne relation semble s'établir avec tous les adultes indifféremment.
- Le mérycisme peut échapper longtemps à l'observation, même en milieu hospitalier, ce symptôme n'apparaissant que lorsque l'enfant est seul ou se croit seul.
- On retrouve souvent à l'anamnèse des régurgitations précoces, dès la naissance : c'est cette expérience de régurgitation que l'enfant apprend ensuite à reproduire et qu'il perfectionne.
- Le mérycisme peut alterner avec d'autres activités répétitives (succion du pouce, manipulation d'une partie du corps : cheveux, oreilles, organes génitaux). Ces attitudes étant considérées comme des moyens déviés de "satisfaction auto-érotique".

L'évolution est généralement favorable. Elle n'entrave ni le développement moteur, ni le développement psychique de l'enfant. Quelquefois le symptôme est observé chez des enfants ayant par ailleurs les signes d'une pathologie plus grave.
2 Le grand enfant
2.1 Enurésie
2.1.1 Définition
L'énurésie est une miction active, complète, de caractère involontaire, qui se manifeste ou persiste au-delà de l'âge où le contrôle physiologique du sphincter vésical est normalement acquis. On ne parle pas d'énurésie avant l'âge de 3-4 ans.
C'est un trouble du comportement mictionnel, par défaillance du contrôle central de la contention des urines.
2.1.2 Les aspects cliniques
Ils sont variés ; c'est un motif fréquent de consultation au sein d'une population enfantine (10 à 15 % des enfants dont 65 % de garçons).

1 - Elle peut être :

    * soit primaire, c'est un retard du contrôle sphinctérien,
    * soit secondaire, elle réapparaît après un intervalle de propreté, l'énurésie primaire est la plus fréquente, 75 à 85 % selon les auteurs.

2 - Suivant le rythme, on différencie :

    * l'énurésie diurne, isolée, la plus rare : 3 % des cas.
    * l'énurésie nocturne, isolée, la plus fréquente : 65 % des cas.
    * l'association énurésie nocture + diurne étant retrouvée dans 1/3 des cas.

3 - Suivant la fréquence des mictions et d'après SOULE, on distingue :

    * l'énurésie totale : l'enfant mouille chaque nuit,
    * l'énurésie clairsemée : surtout après 8 ans, il existe parfois des corrélations entre les nuits humides et les évènements de la journée.
    * l'énurésie intermittente où les accidents ne surviennent qu'à certaines périodes.
    * l'énurésie épisodique et occasionnelle.

2.1.3 L'examen clinique de l'enfant énurétique
1 - précise le type de l'énurésie et ses circonstances de survenue,
2 - recherche les antécédents familiaux (fréquemment retrouvés, surtout en cas d'énurésie primaire).
3 - fait préciser :

    * le mode d'éducation sphinctérienne,
    * les réactions de l'enfant à son énurésie,
    * l'attitude de la famille,
    * les troubles associés éventuels chez l'enfant.

4 - contrôle l'absence d'atteinte somatique.
2.1.4 Le diagnostic différentiel
C'est celui des principaux dysfonctionnement mictionnels : incontrôle des pollakiuries (infection urinaire, lithiase) d'autant qu'elles reconnaissent des facteurs émotionnels,

- polyurie :

    * du diabète,
    * des syndromes polyuro-polydipsiques neuro hypophysaires, ou rénaux.
    * de la potomanie.

- incontinence véritable : trois catégories de malades peuvent faire hésiter :

    * les obstacles du bas appareil (valvules, sténoses de l'urètre postérieur, maladie du col) ; ils provoquent une rétention chronique d'urine avec miction par regorgement. Le diagnostic repose sur l'U.I.V suivie, au besoin, de cystographie.
    * l'épispadias facilement reconnu chez le petit garçon peut être ignoré chez la petite fille en l'absence d'un examen attentif de la vulve.
    * l'abouchement ectopique de l'uretère, rare chez le garçon, se fait soit à la vulve, soit dans le vagin, et se signale par l'association de mictions d'apparence normale et d'accidents de culotte.

- miction automatique des vessies neurologiques et autres dysfonctionnements nerveux, identifiés sur l'association de troubles sensitifs objectifs, du tonus et des réflexes de sphincter anal, un syndrome de la queue de cheval.

L'exclusion d'une maladie organique comporte trois étapes :

    * l'interrogatoire minutieux pour explorer la miction : sa qualité, son rythme nycthéméral et la défécation.
    * l'examen physique complet avec exploration attentive des organes génitaux externes, recherche d'une anesthésie en selle, du réflexe anal (toucher rectal).
    * l'examen cytobactériologique et chimique des urines peut être pratiqué systématiquement s'il s'agit du premier examen.

C'est sur ces bases cliniques précises que sera décidée (rarement) l'opportunité d'exploration radiologique et urologique spécialisée.
2.1.5 Facteurs étiologiques
Les facteurs psychologiques sont parmi les plus évidents dans la génèse de l'énurésie, sans que l'on puisse rejeter l'existence de facteurs constitutionnels favorisants.
Les "traumatismes psychiques", les discordes du milieu jouent un rôle au moins en tant que facteur aggravant ou déclenchant l'énurésie :

    * une déception (la plus fréquente est l'arrivée d'un puiné),
    * une séparation,
    * l'éveil des intérêts sexuels,
    * les découvertes sexuelles mal acceptées,
    * les difficultés dans le milieu familial et scolaire.

Chez les parents, on retrouve parfois des habitudes inadéquates dans l'établissement de la propreté :

    * attitude trop permissive empêchant l'organisation du contrôle mictionnel : eux-mêmes ont souvent été énurétiques,
    * ailleurs, des exigences beaucoup trop précoces qui mettent l'enfant devant un obstacle insurmontable.

L'enfant : il est illusoire de vouloir tracé un profil de l'énurétique. Le plus souvent, il s'agit d'énurésie commune. Dans de nombreux cas, on retrouve une anxiété, des cauchemars, des terreurs nocturnes. Les garçons sont souvent passifs, en retrait, ayant un grand besoin de réassurance. Les filles ont un comportement plus proche de la normale ; elles se caractérisent par un besoin d'indépendance en compétition vis à vis des garçons.

Ailleurs, l'énurésie peut être un élément secondaire dans un tableau prévalent de troubles psychiques majeurs (déficience intellectuelle, psychose,...).
2.1.6 Le traitement
Il est variable suivant le contexte psychologique : cependant il n'est jamais négligeable d'obtenir une disparition du symptôme source de conflits secondaires et maintenant l'enfant dans une attitude régressive, à condition de ne pas méconnaître et négliger les difficultés psychopathologiques sous-jacentes.

L'arsenal thérapeutique comporte :
1 - La prophylaxie, à savoir : éviter un apprentissage trop précoce de la propreté avant l'âge de la marche.

2 - Des règles pratiques : éviter l'absorption de diurétiques (thé, café, chocolat), la restriction liquidienne, prescrite le soir, est souvent contournée par l'enfant, plus ou moins consciemment ; par contre, il faut (et ce n'est pas facile, car c'est souvent caché par l'enfant comme par les parents) obtenir de l'entourage la surppression des mesures "anti-fuites" qui maintiennent l'enfant dans des positions régressives (couches, banbinette, etc...).

3 - Les thérapeutiques médicamenteuses : beaucoup ont été préconisées, seuls méritent d'être cités les antidépresseurs de la série des imipramines, qui ont un effet inhibiteur sur les muscles lisses, mais pas avant l'âge de 6 ans.

4 - L'information anatomique et physiologique : il est nécessaire de démystifier le symptôme de l'enfant et de lui faire abandonner l'idée qu'il est victime de quelque chose contre laquelle il ne peut rien faire. Pour cela, une information anatomique et physiologique sur le fonctionnement de son appareil urinaire est nécessaire. Il faut aussi rassurer l'enfant et ses parents sur l'absence d'anomalie organique toujours plus ou moins redoutée.

5 - Le conditionnement : on utilise des appareils placés entre le matelas et le drap : "pipi-stop", comportant un circuit électrique qui, en cas de miction, déclenche une sonnerie. Dès les premières gouttes, le contact est mis, une sonnerie provoque le réveil de l'enfant.

6 - Dans certains cas, une psychothérapie peut être proposée, sous diverses modalités, indication qui relève du spécialiste en psychiatrie infanto- juvénile.
2.2 Encoprésie
C'est le fait pour un enfant ayant dépassé l'âge habituel d'acquisition de la propreté (2-3 ans) de déféquer dans sa culotte. L'encoprésie doit être distinguée des incontinences du sphincter anal comme on peut en voir dans les syndromes neurologiques et dans certaines encéphalopathies.
Elle est moins fréquente que l'énurésie et plus souvent observée chez le garçon ; elle est presque toujours secondaire et diurne. Elle peut être flagrante (selle moulée), réaliser une fausse "diarrhée", ou être limitée à une souillure du slip. Elle peut s'accompagner de constipation ou même de rétention très importante ("mégacolon fonctionnel"). Il semble que l'enfant prend l'habitude de retenir ses matières, (avec des "ratés"). L'examen clinique du sphincter anal (neurologique et musculaire) est par définition normal, ce qui doit bien sûr être vérifié.
L'encoprésie a une réputation de gravité plus grande pour l'avenir que l'énurésie ; il est sûr qu'on observe souvent des troubles psychiques plus marqués, et le traitement bien plus difficile ne peut être symptomatique et relève, dans la plupart des cas, de consultations spécialisées en psychiatrie de l'enfant.
2.3 Douleurs abdominales
Le mal au ventre (ou "à l'estomac") est l'une des plaintes les plus fréquentes des enfants qui ont des troubles émotionnels. Ce peut être une réaction à un "forcing" alimentaire, l'expression d'une anxiété vive, un élément habituel chez un enfant ayant une tendance aux plaintes somatiques. Il peut survenir dans toutes les circonstances dans lesquelles d'autres enfants auraient des vomissements et il est souvent associé avec (ou remplacé par) des nausées et des vomissements. Une éventualité caractéristique est la survenue des douleurs le matin au moment de partir à l'école.
Le problème est de le distinguer des douleurs d'origine organique ; beaucoup d'appendicites sont enlevées à tort du fait d'un diagnostic insuffisant. A l'inverse, des appendicites véritables sont quelquefois méconnues, spécialement chez les enfants qui ont l'habitude de se plaindre de douleurs abdominales et/ou de nausées et vomissements.
Quelquefois des crises douloureuses abdominales ont pu être reconnues comme des équivalents épileptiques. C'est un diagnostic rare et difficile.
2.4 L'insomnie
L'insomnie apparait souvent à partir de la deuxième année, pouvant être en rapport avec de mauvaises conditions de sommeil (horaires anarchiques du coucher, suppression de la sieste pour que l'enfant dorme mieux la nuit, etc...) et aussi avec ce qui se déroule au cours de la journée (l'enfant est stimulé d'une façon intempestive, inadéquate et spécialement le soir, l'enfant est balloté d'un milieu de vie à un autre,...).

Trois sortes d'insomnies ont été décrites (HOUZEL) :
- d'endormissement : opposition au coucher le plus souvent ;
- anxieuse : avec souvent des terrreurs nocturnes, des cauchemars ou encore des réveils anxieux,
- d'excitation ou joyeuse : éveil prolongé nocturne, avec une attitude volontiers tapageuse de l'enfant ; il semble que ce soit l'expression d'une lutte contre un vécu dépressif chez l'enfant.

Parmi les facteurs autres d'insomnie, citons :
- les affections somatiques, notamment infectieuses,
- les encéphalopathies, les grandes déficiences intellectuelles (oligophrénie),
- les psychoses infantiles,
- le nanisme dit psycho-social (réduction du state IV du sommeil),
- certains traitements (les barbituriques par exemple).
Sémiologie de l'expression psycho-pathologique de l'enfant
Ph. Dardenne

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 26 mars 1999

1 Troubles psychosomatiques
2 Troubles du comportement
3 Syndromes névrotiques
   

4 Troubles graves
4.1 Etats psychotiques
4.2 Déficiences intellectuelles

La définition des problèmes psychologiques en termes de "maladie" se heurte à une difficulté diagnostique. Pour les maladies physiques il est relativement aisé d'en arriver à une définition et à des procédures diagnostiques valides. Pour les problèmes psychologiques, la validité et la fidélité des catégories et des instruments diagnostiques actuels n'ont pas été clairement établies.

Nous situerons le cadre clinique des dénominations les plus couramment utilisées :
- Troubles psychosomatiques
- Troubles du comportement
- Névroses
- Psychoses
- Déficiences intellectuelles
1 Les troubles psychosomatiques
Il s'agit de "maladies physiques dans le déterminisme ou l'évolution desquelles interviennent des facteurs psychiques ou conflictuels" (L. KREISLER)

La relation entre faits psychologiques et troubles somatiques ne doit pas être comprise en terme d'équation (tel "problème" = tel troubles) mais comme une interaction plus complexe qui n'obéit pas à la simple causalité linéaire.

On étudie, dans ce cadre, les troubles caractérisés par des anomalies définies de fonctions physiologiques ou d'organes, et qui, chez certains individus, sont significativement influencées par des facteurs psychologiques.

Ces troubles affectent les organes qui sont sous le contrôle du système nerveux autonome : tels que la peau, l'appareil respiratoire et cardio-vasculaire, le tube digestif, etc... Nous avons vu l'exemple des troubles fonctionnels du nourrisson.

L'asthme, l'eczéma, le rhume des foins, sont d'autres exemples typiques. Il est admis que dans ces affections, ou pour une même personne à des périodes différentes, l'allergie, l'infection, ou les "chocs" psychologiques peuvent être un important élément étiologique, dans un ensemble de facteurs.

Une autre éventualité caractéristique de l'enfance est le syndrôme des "vomissements cycliques". L'ulcère gastro-duodénal, la colite ulcéreuse, sont moins fréquents que chez l'adulte.
2 Les troubles du comportement
Par définition, ce sont des troubles qui sont actuels, observables directement dans les conduites et donc dans la relation enfant-entourage. Au cours de tout développement, les conflits sont inéluctables, avec leur accompagnement d'émotions, de représentations angoissantes, qui peuvent être corrélés à des symptômes très variés, fluctuants et transitoires.

Ceci pose la difficile question des variations normales dans le développement psychique de l'enfant et des troubles réactionnels (par rapport aux évènements ou à une défaillance de l'entourage).

Ce n'est que lorsque ces troubles perdurent, sous la même forme, qu'ils prennent une signification pathologique et doivent alors alerter le médecin. Quelques exemples :
- conduites d'opposition active (colères,...) ou passive (apathie),instabilité,
- conduites "agressives" (vols, mensonges, comportement de destruction, colères clastiques,...),
- menaces de suicide, voire tentatives de suicide, fugues rapprochées.
3 Les syndromes névrotiques
La symptomatologie névrotique de l'enfant est moins structurée et plus polymorphe que celle de l'âge adulte. Y-a-t'il vraiment des névroses infantiles ? Il est préférable d'employer l'expression "troubles névrotiques" qui regroupe les symptômes d'allure névrotique (par analogie avec la pathologie des adultes).

La question est celle de l'angoisse dont l'expression peut être directe (le jeu, le dessin de l'enfant la montre nettement dans certains cas,...) ou relativement organisée (phobie du noir, des animaux, de la maladie,..., conduites rituelles autour du coucher, attitudes obsessionnelles dans le jeu ou le travail scolaire).

Ces symptômes, souvent banalisés par la famille, peuvent s'accompagner de difficultés scolaires, d'inhibition scolaire (ou au jeu, plus grave) de tics, d'énurésie voire d'encoprésie persistante, etc... toutes manifestations qui amènent la famille à consulter.

Ailleurs, l'expression peut être corporelle, de manière variable (les troubles durables sont rares) :
- neurologique,
- respiratoire,
- digestive,
- génito-urinaire.

Il est rare d'observer les grandes crises d'hystérie à la "Charcot" du moins avant l'adolescence, quelquefois lors de crises d'allure comitiale, le diagnostic avec l'épilepsie est difficile.
Chez l'enfant, l'expression est volontiers somatique et ce n'est que par une analyse assez poussée qu'il sera possible de déterminer l'existence d'une organisation pathologique sous-jacente (névrotique ou autre) qui nécessitera une approche psychologique plus intensive.
Il est difficile chez l'enfant de faire la part de ce qui est "névrotique", simulation, et faux problèmes somatiques.
Il faut, d'autre part, ne pas confondre les symptômes névrotiques avec :
- les symptômes normaux du développement,
- les troubles réactionnels.
4 Les troubles graves du développement psychique de l'enfant : psychoses, déficiences intellectuelles
Les troubles graves du développement psychique de l'enfant concernent soit :
- le domaine des capacités intellectuelles (aptitude à réaliser des performances) et leur atteinte réalise un déficit intellectuel ;
- le domaine de la communication et de la capacité à établir avec le monde extérieur des relations affectives normales. Les atteintes les plus marquées dans ce domaine réalisent les états psychotiques.

Les deux types d'atteintes sont souvent intriquées et ce n'est que depuis quelques décades qu'ont été peu à peu distingués les deux types de troubles jusqu'alors confondus dans le groupe des arriérations mentales avec leurs variantes.

Tout naturellement c'est la forme la plus typique de troubles psychotiques qui a été reconnue et décrite la première (KANNER, 1943) sous le nom d'autisme infantile précoce. Autisme désigne le symptôme le plus caractéristique (retrait, isolement, difficulté à établir un contact avec l'environnement), et par extension tend à être utilisé pour d'autres états où existent également des troubles du contact.
4.1 Les états psychotiques
Le terme "psychose infantile" regroupe des états qui ont en commun :
- un retrait affectif majeur (troubles du contact),
- des troubles du fonctionnement intellectuel et de la vie émotionnelle,
- des troubles du comportement.

Ces troubles modifient d'une façon importante l'appréhension de la réalité alors que les fonctions perceptives sont apparamment indemnes. Ils aboutissent à une non structuration ou à une structuration dysharmonieuse de la personnalité.

Parmi les psychoses infantiles on peut distinguer (lorsque les troubles sont constitués, c'est-à-dire à partir de 2-3 ans) :
- l'autisme infantile,
- les psychoses non (ou moins) autistiques :

    * psychoses "déficitaires",
    * dysharmonies d'évolution.

4.1.1 Nous décrirons principalement les signes prémonitoires qui peuvent évoquer la possibilité de survenue d'une psychose chez un tout jeune enfant.

Aucun des symptômes pris isolément n'est pathognomonique ; ils ne sont pas tous présents pour un même enfant ; c'est leur association, leur tendance à persister et à s'aggraver qui conduisent au diagnostic. La symptomatologie est variable d'un enfant à l'autre et s'exprime dans les différents secteurs du développement.
4.1.1.1 Développement postural et moteur
- Il peut être dans les délais normaux,
- certains enfants peuvent même paraître gracieux et agiles,
- KANNER a signalé l'absence d'attitude anticipatrice et d'ajustement postural de l'enfant pris dans les bras,
- des attitudes particulières sont fréquentes : tête anormalement défléchie, "strabisme".
4.1.1.2 Relations avec les objets et le monde sonore
- absence d'intérêt pur les jouets, les hochets ou intérêt détourné, monotone, (il faut dépister une surdité par un examen audiométrique).
- des aptitudes inhabituelles sont possibles, de même qu'une mimique "intelligente",
- impression de surdité, absence de réponse aux stimulations verbales,
- pas de développement d'un langage communicatif.
4.1.1.3 Relations avec les personnes
- le regard n'est pas ou rarement utilisé dans les échanges avec les personnes. L'enfant donne l'impression de regarder "à travers", les personnes (sans les voir),
- l'apparition du sourire et de "la peur des étrangers" (vers le 8ème mois peuvent être perturbées ou absentes) ;
4.1.1.4 Des anomalies du comportement se manifestent parallèlement :
- enfant trop calme, ne criant pas, ou au contraire irritable, "tendu", criant continuellement.
- troubles alimentaires et troubles du sommeil,
- peurs ou fascinations massives, précoces, inhabituelles,
- prédominance des comportements "bizarres" et intérêt trop exclusif pour les activités solitaires :

    * porter à la bouche, flairer,
    * balancements (de la tête, du tronc...),
    * jeux de mains et de doigts devant les yeux.

4.1.2 L'autisme infantile précoce est la forme la plus caractéristique des troubles "psychotiques" du jeune enfant (mais il ne représente qu'une partie de l'ensemble des cas de psychoses infantiles). Le tableau constitué, vers l'âge de 3-4 ans associe :
- des troubles du contact avec le monde extérieur (désintérêt, indifférence, apparence de surdité...),
- des troubles du langage : absent ou très perturbé,
- des troubles du comportement : activités répétitives, réactions bizarres ou paradoxales, parfois automutilation,
- une anxiété très vive et/ou particulière : à l'occasion de changements mêmes minimes, ou pour des causes apparemment futiles (bruit d'appareil ménager, bruit du vent...),
- l'intelligence peut paraître bonne, en raison de l'aspect éveillé et de certaines aptitudes (parfois exceptionnelles : mémoire, habileté pour les puzzles...).
Un diagnostic et des soins très précoces sont nécessaires pour limiter les conséquences, pour l'enfant et sa famille.
4.2 Les déficiences intellectuelles
L'intelligence se développe régulièrement de la naissance à l'adolescence. On parle de déficit intellectuel lorsqu'on observe de façon persistante le retard dans cette évolution.

Seront envisagés successivement :
- Les ariérations mentales où le déficit intellectuel est au premier plan, avec une origine organique (neuro-biologique) reconnue ou supposée dans la plupart des cas.
- Les autres aspects de la déficience intellectuelle : plusieurs modes d'expression psycho-pathologique comportent ou peuvent comporter un déficit intellectuel : détériorations secondaires, carences affectives, certains état psychotiques, "pseudo-débilités".
4.2.1 Les arriérations mentales
(Arriération et débilité sont des termes équivalents. Arriération est le terme actuellement utilisé par l'O.M.S. Dans la pratique, débilité désigne plutôt les formes moyennes ou légères, arriération, les formes graves de déficit intellectuel).
4.2.1.1 Définition
Les arriérations mentales sont des insuffisances du développement de l'intelligence apparues dès la naissance ou à début très précoce. Leur gravité est très variable allant du grand infirme mental voué à l'asile au débile léger pouvant accéder, dans des conditions favorables, à l'autonomie.
Ceci a conduit à distinguer ces états selon le degré de l'atteinte,

a - Les arriérations mentales profondes et sévères.
L'âge mental ne dépasse pas 2 ou 3 ans. Ce sont de grands infirmes, sans langage, les plus atteints sont grabataires et des troubles végétatifs sont possibles avec, parfois, un risque vital.

b - Les arriérations mentales moyennes.
Quelques acquisitions sont possibles : propreté, début de lecture (mécanique) sans comprendre. Ces sujets peuvent être occupés mais n'ont pas la capacité d'auto-protection, l'assistance d'une tierce personne est nécessaire.

c - Les arriérations mentales légères (débililité légère).
Une autonomie partielle est possible : une éducation spécialisée permet des apprentisssages simples.

d - Niveau limite (intelligence limite).
Une vie autonome est possible avec une adaptation plus ou moins bonne pendant la période de scolarisation. Le plus souvent à l'âge adulte, il n'y a plus de difficultés d'adaptation.

La terminologie et les limites utilisées dans notre pays en fonction de l'usage, ou des règlements administratifs, peuvent être légèrement différentes.
4.2.1.2 Le diagnostic précoce
Il est indispensable pour adapter un traitement étiologique dans de rares cas (hypothyroïdie, phénylcétonurie,...) et éviter l'aggravation secondaire consécutive à un trop grand retard de diagnostic (réactions préjudiciables de l'entourage, stimulations insuffisantes, déformations et attitudes vicieuses...) et se pose dans des conditions très variées, selon le degré de l'atteinte, le contexte étiologique plus ou moins évocateur, les troubles associés, etc... Le contexte périnatal peut amener à suspecter le diagnostic dès la naissance, sinon c'est le retard des acquisitions qui fait évoquer cette éventualité.
4.2.1.3 L'étiologie
Elle est parfois évidente, mais, le plus souvent, le problème est difficile. L'enquête est conduite en fonction des données de l'anamnèse et de l'examen clinique, qui permettent d'évoquer une origine anténatale, prénatale, postnatale ou indéterminée. Les causes sont nombreuses (cf. chapitre Encéphalopathies).
- diagnostic évident : ex. : mongolisme, souffrance néonatale sévère...
- diagnostic fait après recours à un spécialiste : maladies et syndromes rares identifiés,
- des examens complémentaires ne sont faits qu'en fonction d'une présomption clinique précise (pour confirmation),
- s'il n'y a pas d'éléments d'orientation, les examens "à l'aveugle" sont le plus souvent inutiles.

Actuellement, pour 30 à 50 % des cas, l'étiologie reste indéterminée.
4.2.1.4 La structure psychologique du déficient intellectuel
Il peut y avoir une inégalité de développement des différentes fonctions. Le retard de langage, ou de la propreté, par exemple peuvent être plus importants que le retard global. Des capacités paradoxales (mémoire) peuvent être observées.
Le débile ne peut être comparé à un enfant de même âge mental, il n'est pas un enfant en réduction, réduit à la diminution du QI. C'est une personne, avec ses sentiments, ses motifs d'intérêt. Le pronostic évolutif n'est pas uniquement sous la dépendance du QI : il est très dépendant aussi du milieu de vie et des troubles associés qui sont fréquents. Ce sont des troubles neurologiques et sensoriels (infirmité motrice, épilepsie, déficits sensoriels...) et les troubles caractériels et affectifs (passivité ou excitation, symptomatologie de type "psychotique" ou "névrotique", délinquance, etc...). La situation d'échec, le rôle de l'entourage, favorisant ces réactions.

On voit donc l'importance d'une prophylaxie de toutes ces complications secondaires dans laquelle le médecin a un rôle à jouer.
4.2.1.5 L'attitude pratique
Le problème de la déficience mentale n'est pas seulement neurobiologique mais aussi social et éducatif. Trop souvent, dans le passé, les déficients mentaux ont été considérés comme un groupe homogène.
Ceci n'est pas vrai. La population déficiente mentale est aussi diverse par ses caractéristiques physiques, socioéconomiques, culturelles, et son comportement, que la populaiton en général. L'individu déficient mental doit bénéficier de la même considération que n'importe quel autre malade.

La plupart du temps, il n'y a pas de possibilité de traitement étiologique ; le problème qui se pose au médecin est de définir le degré de déficience mentale et de déterminer le pronostic de développement optimal. Ceci est essentiel pour aider les parents à accepter l'enfant et ses limites afin qu'ils puissent favoriser au mieux le développement de ses capacités.

Les déficients mentaux peuvent être divisés grossièrement en deux groupes :
1. ceux dont les capacités, bien que limitées, leur permettront de répondre favorablement à des programmes pédagogiques adaptés.
2. ceux dont les limites sont si importantes qu'elles exigent des soins de protection permanente.

Tous les efforts doivent être faits pour maintenir les sujets débiles moyens et légers dans leur famille et dans la communauté. On s'efforce de leur fournir dans des écoles spécialisées un programme éducatif correspondant à leurs besoins et à leurs capacités, l'enfant continuant, par ailleurs, de vivre dans la famille. C'est seulement après un essai bien conduit démontrant l'inaptitude à tirer profit d'un tel programme que l'on pourra envisager le placement.
Le placement peut être proposé pour ceux qui sont gravement retardés lorsque les parents apprécient pleinement les limites de leur enfant, et ses possibilités pour l'avenir. Dans cette démarche on tiendra compte de l'analyse éclairée des préoccupations des parents pour l'enfant, de la perspective restreinte d'un changement satisfaisant, de l'influence que la présence de cet enfant peut avoir sur la fratrie, etc...
Le rôle du psychiatre d'enfants est important. Puisque la plupart des parents savent déjà que leur enfant est déficient mental sa première responsabilité est de confirmer leur impression. En outre, il peut être d'un grand secours pour alléger les sentiments de culpabilité et d'anxiété qui existent toujours, sous des formes diverses, en déterminant de façon plus précise le degré du retard, sa cause éventuelle, et la perspective d'un développement optimum de l'enfant. Il peut consacrer le temps nécessaire pour bien faire comprendre aux parents leurs intérêts vis à vis des besoins de l'enfant, ceux des autres enfants, les leurs propres, et les difficultés auxquelles on peut s'attendre à l'avenir.
4.2.2 Les autres aspects de la déficience intellectuelle
4.2.2.1 Détérioration secondaire
(Synonyme de démence dans le terminologie classique).
C'est le cas d'enfants ayant eu préalablement une période de développement psychomoteur normal. Cette distinction entre arriérations et détériorations précoces peut paraître artificielle. Cependant, elle est utile pour la recherche précise d'une étiologie, et aussi parce que le problème se pose différemment, pour les parents, selon que l'enfant a été reconnu d'emblée arriéré ou a d'abord été considéré comme normal.
Ces détériorations sont secondaires à des maladies ou accidents connus : maladies dégénératives du système nerveux central et encéphalopathies progressives, méningites compliquées, encéphalites, traumatismes crâniens, etc... Quelquefois, elles sont en apparence primitives.
4.2.2.2 Carences affectives
SPITZ et d'autres auteurs ont montré à quel point le développement psychomoteur du jeune enfant est conditionné par les stimuli qu'il reçoit de son milieu, et, en particulier, de sa mère. L'enfant délaissé, l'enfant victime "d'hospitalisme"*, bien qu'ayant des potentialités intellectuelles normale, deviendront des débile, si l'on intervient pas à temps.
L'importance psycho-sociale de tels faits est considérable.

*Hospitalisme: ce terme désigne, selon SPITZ, l'état de jeunes enfants qui ont souffert de carence affective massive et prolongée. Il associe un retard du développement qui peut aboutir à un déficit intellectuel définitif et des troubles du comportement semblables à ceux de certains enfant psychotiques. Ce terme est aujourd'hui impropre car il est exceptionnel, que ces états surviennent à l'hôpital. En revanche, ils peuvent être observés dans les familles ou dans des institutions.
4.2.2.3 Psychoses
Psychoses et arriération mentale furent longtemps confondues, en particulier dans les formes précoces à type d'autisme car un déficit intellectuel apparaît secondaire. En réalité la distinction reste souvent difficile. D'un point de vue clinique, on peut opposer, dans la petite enfance, deux situations relativement bien définites :

a - le comportement psychotique :
- marqué par un trouble de la communication et du contact avec le monde extérieur, de l'adaptation au réel.
- reconnaissable grâce à des symptômes caractéristiques (bizarreries, troubles du langage, stéréotypies...),

On parle de psychose, ou d'état psychotique, lorsque ce syndrome est marqué par sa cohérence, sa gravité, sa tendance à persister ou à s'aggraver. L'évolution vers un tableau déficitaire (déficit intellectuel) est fréquente mais non constante.

b - L'arriération mentale :
L'atteinte intellectuelle est primitive mais elle favorise le développement de symptômes psychotiques, c'est-à-dire de traits de comportement identiques à ceux des enfants psychotiques, qui coexistent fréquemement, à des degrés divers.
4.2.2.4 Pseudo-débilité mentale
"La notion de pseudo-débilité mentale est fondée sur un principe théorique : l'existence d'un tableau équivalent à celui de la débilité chez des sujets dont le potentiel intellectuel proprement dit est intact, et sur un principe pratique : la possibilité de transformer le tableau par une rééducation ou une thérapeutique adéquats permettant au sujet d'acquérir ou de percevoir les donées qui lui font défaut" (J. de AJURIAGUERRA).
On conçoit l'importance d'une telle notion pour le diagnostic, le pronostic, et les indications thérapeutiques. Cette situation est celle d'enfants qui, du fait d'un handicap particulier (moteur, sensoriel...) ont acquis un retard par rapport aux enfants de leur âge. Ce retard peut être un simple décalage évolutif aisément curable par un traitement approprié et précoce.

Les principales causes sont les infirmités motrices cérébrales, les troubles sensoriels (amblyopie, surdité), certains troubles du langage, et des troubles d'origine psychique (enfant "instable", notion d'inhibition "névrotique").
Conclusion
Le devenir des sujets déficients mentaux n'est pas inéluctablement fixé par les limites de leurs possibiblités intellectuelles appréciées par le Q.I. Il dépend grandement de la qualité des soins qui seront proposés.

Ces enfants ont des besoins affectifs, pédagogiques, éducatifs, médicaux qui sont différents de ceux d'un enfant normalement doué. Leur famille a aussi besoin d'une aide surtout lorsqu'elle paraît réagir de façon inappropriée à cette épreuve (sollicitude excessive, dépression, hostilité, "rejet", etc...).

Il n'est pas vain d'envisager soigneusement les aspects médicaux du problème, notamment l'étiologie. Mais cette recherche est difficile à la fois au plan technique et psychologique. Elle doit être conduite avec compétence et une prudence particulière.

D'autre part, chez beaucoup d'enfants, la déficience intellectuelle est l'expression ou l'aboutissement de processus psycho-pathologiques qui doivent être distingués de l'arriération, avec des implications pratiques différentes. Le diagnostic est souvent difficile et les erreurs peuvent être lourdes de conséquences.

L'ensemble de ces faits justifie que tout enfant suspect de retard de développement intellectuel fasse l'objet d'investigations médico-psychologiques précoces. Les aspects médicaux (enquête étiologique) sont envisagés en fonction des données cliniques. Parallèlement, sont abordés les faits psychologiques qui constitueront l'essentiel des soins ultérieurs.
Troubles des conduites alimentaires
Ph. Dardenne

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 26 mars 1999

1 Anorexie mentale
1.1 Description
1.2 Sur le plan psychologique
1.3 Les formes cliniques
   

1.4 Evolution - pronostic
1.5 Traitement
2 Boulimie
3 Autres hyperphagies

Les conduites alimentaires sont déterminées par trois ordres de facteurs :
- neuro-physiologiques (la régulation de la faim et de la satiété se fait au niveau de l'hypothalamus surtout, mais en connexion avec l'ensemble du cerveau ;
- socio-culturelles (il y a un apprentissage des conduites alimentaires, culturel et familial),
- enfin, des facteurs reliés au développement de la personnalité, où le sens conscient et inconscient de l'alimentation va jouer un grand rôle (le lien aliment-mère reste prédominant dans les significations conscientes et inconscientes en relation avec la phase orale du développement qui marque la première année de l'enfant).

Les troubles des conduites alimentaires peuvent se faire :
- soit dans le sens de la restriction pour des motifs d'ordre social ou politique (grève de la faim, jeûne, etc...) ce qui en fait discuter le caractère pathologique ou non ;
- soit dans le contexte d'une pathologie psychiatrique :

    * la schizophrénie : la bizarrerie de la pensée, les émergences délirantes (avec éventuellement des phénomènes hallucinatoires), le repli sur soi.
    * les délires chroniques : le thème du délire est la crainte d'être empoisonné, reliée à des idées de persécution.
    * la mélancolie : le refus de l'alimentation peut être compris comme une conduite suicidaire ; la douleur morale, dans certains cas, des thèmes délirants (d'indignité, de faute ou encore de négation d'organe voire du corps dans le syndrome de COTARD) permettant de repérer l'état mélancolique.
    * la manie : l'hyperactivité du malade ne lui laisse en quelque sorte pas le temps de manger.
    * l'hypocondrie : la restriction alimentaire s'associe à un certain nombre de règles de vie auxquelles le malade s'astreint par peur de léser son corps (ou certains organes) ; souvent la restriction concerne certains aliments considérés comme nocifs.
    * les états démentiels, la confusion mentale : l'anorexie s'insère dans le cortège des perturbations de la plupart des fonctions intellectuelles.
    * les états dépressifs : où l'on peut noter tantôt une restriction (l'anorexie matinale du petit déjeuner est représentative), tantôt une hyperphagie que le déprimé décrit volontiers comme compensatoire à son malaise interne.
    * les états névrotiques : criante de prendre du poids perçue comme non fondée par le sujet, phobie de certains aliments.

- La restriction alimentaire peut s'observer dans certains syndromes organiques.

    * Si la cachexie hypophysaire de SIMMONDS est exceptionnelle (aménorrhée précoce, amaigrissement tardif, autres signes d'atteinte de l'antéhypophyse) de même la cachexie par tumeur hypothalamique et le syndrome de SHEEHAN (qui suit un accouchement ou un avortement) ; le diagnostic doit surtout se faire avec les maladies infectieuses (tuberculose, affections virales,...), des atteintes digestives (notamment gastriques) ou des cancers. C'est dire la nécessité d'un entretien et d'un examen général approfondi et de ne négliger aucun élément de l'anamnèse.
    * Enfin, une affection est caractérisée par la perte de l'appétit (c'est le sens du mot anorexie) qui en est le symptôme prédominant, masquant les autres signes.

1 L'anorexie mentale
Pour certains, elle constitue une entité clinique du fait de sa survenue au moment de l'adolescence ("anorexie mentale de la jeune fille"), du contexte relationnel, de la focalisation de la patiente sur le refus alimentaire, ce qui a pu faire parler d'une conduite addictive (comme les toxicomanes, ou encore la boulimie que nous décrirons plus loin).
1.1 Description
L'anorexie mentale essentielle de la jeune fille est la forme la plus typique et aussi la plus fréquente (avec une augmentation de sa fréquence actuellement).

Elle survient lors de l'adolescence entre 13 et 18 ans chez la jeune fille décrite comme "sans problème" auparavant ; l'anorexie survient apparemment comme un coup de tonnerre dans un ciel serein, à la suite d'une déception scolaire, sentimentale, d'un deuil ou d'un régime amaigrissant suivi à la suite d'une remarque "vexante" sur le physique de la patiente.

La triade (des 3 A) s'installe progressivement :
- Anorexie qui se majore petit à petit allant de la restriction plus ou moins qualitative (la viande, les aliments gras) au refus de l'alimentation quasi-total,
- Amaigrissement variable, pouvant aller jusqu'à 1/3 du pois,
- Aménorrhée, le plus souvent secondaire.

Pendant un moment, ces symptômes passent inaperçus de l'entourage qui a même pu encourager le régime au début, à la phase d'état, les conflits entre la patiente et son entourage deviennent majeurs, la patiente est décrite comme tyrannique, imposant ses volontés à sa famille, et elle décrit sa famille comme ne la laissant pas tranquille, l'épiant et ne pensant qu'à la faire manger.

D'autres éléments doivent retenir l'attention :
- l'hyperactivité sur le plan physique (l'anorexique est une fanatique du jogging) et aussi sur le plan intellectuel, comme s'il s'agissait d'accroître l'élimination des calories et des graisses indésirables,
- des épisodes de boulimie soigneusement cachées et très culpabilisés.

D'autres signes sur le plan somatique :
- la constipation qui est souvent précoce, tenace, en rapport avec le peu d'ingesta, et qui est souvent traitée par la patiente, avec excès, ce qui peut entraîner une maladie des laxatifs (avec hypokaliémie) :
- l'atteinte de la peau et des phanères, ongles cassants, cheveux secs et cassants,
- il peut y avoir une hyperpilosité (pas toujours en rapport avec un hypercorticisme lié à l'amaigrissement.

Le bilan biologique est d'abord peu perturbé, mais il peut s'aggraver au cours de l'évolution, notamment avec la dénutrition : baisse de la protidémie, troubles hydroélectrolytique renforcés par l'abus de laxatifs

Les fonctions endocriniennes sont normales pendant un long moment, ce n'est que dans les formes plus graves cachexiques que l'on constate un dysfonctionnement hormonal, une hypothermie, une hypotension artérielle avec bradycardie.

Dans certains cas le syndrome anorexique peut être évalué pour son propre compte lorsque la cachexie est installée.
1.2 Sur le plan psychologique
L'anorexique a la réputation d'avoir de bonnes capacités intellectuelles ; l'intellectualisation, la rationalisation sont en effet très marquées. Il existe une sorte de négation de l'image du corps, l'anorexique ne se perçoit pas comme maigre, elle paraît indifférente à l'amaigrissement, il existe une angoisse très marquée lors de toute ingestion d'aliments. L'ensemble a pu faire parler d'altération quasi délirante de la perception de son propre corps et aussi d'un maintien d'une excitation reliée à la faim ; une sorte d'"orgasme" de la faim.

Les relations de l'anorexique sont pauvres avec ses pairs ; il est aussi caractéristique de l'anorexique veuille participer à plusieurs activités mais être toujours près de la porte de sortie, c'est-à-dire, ni complètement dedans, ni complètement dehors par rapport aux activités ou à un groupe de personnes.

La famille est volontiers décrite comme ayant tendance à surprotéger l'anorexique, la mère a souvent une relation très conflictuelle avec sa propre mère ; en fait, ce qui nous paraît plus important, c'est la difficulté de la séparation tant au niveau des parents qu'au niveau de l'anorexique elle-même.
1.3 Les formes cliniques
A côté de cette forme type, on a décrit d'autres formes d'anorexie :
- les formes hystériques graves, fréquemment rencontrées chez la jeune fille, caractérisée par :

    * l'exhibition de la maigreur,
    * le comportement dissimulateur et mythomaniaque,
    * les formes à structure obsessionnelle, rares mais sévères, très ritualisées, vécues avec culpabilité et une importante note anxieuse,
    * les formes pré-psychotiques annonciatrices d'un début de schizophrénie où prédomine l'altération de l'image corporelle.
    * les formes hypocondriaques avec anxiété intense.

Selon l'âge : l'anorexie aurait meilleur pronostic quand elle surviendrait entre 15-16 ans ou 17-18 ans, cependant, il existe des formes précoces en-dessous de l'âge de 12 ans qui ont la réputation d'être plus sévères de même que les formes survenant au-delà de l'âge de 18 ans.

Selon le sexe : l'anorexie existe chez le garçon, beaucoup plus rarement, 10 % des cas. Classiquement l'anorexie est reliée à une structure psychotique, mais il existe aussi des anorexies mentales chez les garçons tout à fait comparables à celles de la jeune fille.
1.4 Evolution - pronostic :
- 1/3 des cas, évolue favorablement avec restauration des relations sociales, amélioration des relations avec la famille, reprise des règles (c'est un bon signe de l'arrêt du processus anorexique),
- 1/3 des cas, amélioration incomplète, avec souvent des rechutes et souvent une alternance des phases boulimiques et anorexiques,
- 1/3 des cas, évolution grave, restriction des relations avec l'entourage, persistance de la symptomatologie anorexique avec progressivement installation d'une sorte de dépression chronique,
- il existe un certain nombre de décès par cachexie ou plus souvent encore par suicide.
1.5 Traitement :
Il est extrêmement discuté, comprenant l'hospitalisation dans les formes d'amaigrissement important, quelque fois une réanimation est nécessaire.
L'hospitalisation permet un isolement de l'anorexique d'avec son entourage et aussi une chimiothérapie lorsqu'il existe des éléments dépressifs.
En même temps que la prise en charge somatique, il est nécessaire d'y adjoindre un abord psychothérapique individuel et familial .
2 La boulimie (hyperphagies - boulimie)
Les adolescents ou adolescentes décrivent la boulimie comme une sorte d'accès marqué par une sensation de faim, accompagnée d'une grande angoisse contraignant le sujet à absorber de manière impulsive une énorme quantité d'aliments ; et à la suite de cette ingestion, une grande culpabilité qui peut conduire à des vomissements provoqués.

Sur le plan psychopathologique, on retrouve de tels accès au cours de l'évolution de l'anorexie mentale, accès cachés et souvent suivis de vomissements provoqués ; au cours des états névrotiques notamment hystériques, au cours des états dépressifs.
3 Les autres hyperphagies
La boulimie doit être distinguée de :
- la phagomanie : habitude de grignoter entre les repas, non motivée par la faim,
- la sitiomanie : absorption impulsive de quantités énormes de nourriture.
- la voracité et la gloutonnerie : désir ardent et insatiable de manger sans prendre le temps d'apprécier,
- les hyperphagies habituelles et familiales.

Elles n'ont pas de signification univoque. Elles se rapportent :
- soit à une hyperphagie sans problème émotionnel, liée à des habitudes alimentaires ou à des facteurs héréditaires,
- soit à des hyperphagies réactionnelles compensatrices (notamment sur le fond dépressif).
Hypocalcémies du nourrisson et de l'enfant
C. Jézéquel

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 1er avril 1999

1 Hypocalcémies néonatales
1.1 Etude clinique
1.2 Biologie
1.3 Signes électriques
1.4 Diagnostic
1.5 Etiologie
2 Hypocalcémies du nourrisson
2.1 Diagnostic positif
2.2 Diagnostic étiologique
   

2.3 Evolution et pronostic
3 Hypocalcémies du grand enfant
3.1 Etude clinique
3.2 Examen clinique
3.3 Diagnostic positif
3.4 Diagnostic différentiel
3.5 Diagnostic étiologique
3.6 Formes étiologiques des hypoparathyroïdies
4 Traitement des hypocalcémies
Objectifs
1. Enumérer les signes cliniques pouvant évoquer une hypocalcémie néonatale.

2. Rédiger le schéma de traitement d'une hypocalcémie néonatale.

3. Décrire les signes cliniques et paracliniques de l'hypocalcémie du nourrisson.

4. Décrire les signes cliniques et paracliniques de la tétanie du grand enfant.

5. Enumérer les signes cliniques et biologiques d'une insuffisance parathyroïdienne.
 


L'hypocalcémie se définit biologiquement par une baisse du calcium total plasmatique au-dessous de 85 mg/litre chez le nourrisson et de 80 mg/litre chez le nouveau-né (calcémie < 2 mmol pour mille).

Nous étudierons successivement :
- Les hypocalcémies néonatales
- Les hypocalcémies du nourrisson
- Les hypocalcémies du grand enfant
- Le mode de traitement
1 Les hypocalcémies néonatales
La symptomatologie clinique des hypocalcémies du nouveau-né est trompeuse et très variée. Ce polymorphisme explique les difficultés de diagnostic. Les différents signes doivent donc être bien connus et recherchés, leur association est fréquente.
1.1 Etude clinique
1.1.1 Les signes neurologiques sont au premier plan :
1 - L'hyperexcitabilité généralisée est caractérisée par un tremblement plus ou moins important, des trémulations fines, spontanées ou provoquées, intéressant les membres, la face, le menton, durant quelques secondes ; elles s'accompagnent de cris et d'une agitation importante. Le signe de Moro est particulièrement net.
2 - Les troubles du tonus sont représentés par l'hypertonie du tronc, de la nuque, avec rejet de la tête en arrière, et des membres. Elle peut être observée à l'inspection ou à l'examen ; dans d'autres cas, c'est une hypotonie qui est notée.
3 - Les convulsions sont fréquentes et peuvent revêtir tous les types (tonico-cloniques, généralisées, hémi-convulsions ou état de mal).
4 - Tension de la fontanelle
1.1.2 Les signes respiratoires sont fréquents :
- gêne respiratoire avec cyanose,
- polypnée superficielle avec ou sans cyanose,
- accès de tachypnée avec respiration superficielle, véritable "flutter thoracique" entrecoupés par des pauses responsables parfois d'apnée avec cyanose,
- tableau de troubles respiratoires graves.
1.1.3 Les signes cardio-vasculaires :
- soit simple tachycardie pouvant atteindre 200 pulsations/minute, accompagnée de cyanose et s'accompagnant d'une cardiomégalie,
- soit des cas de mort subite souvent décrits.
1.1.4 Les signes digestifs :
- les vomissements sont fréquents et précoces, parfois précédés d'un refus de boire.
1.1.5 Autres signes :
- des oedèmes transitoires.
1.1.6 Les signes d'hyperexcitabilité neuro-musculaire
seront recherchés mais se révéleront souvent négatifs (pas de signes de Chvostek, ni de Lust, etc...).
1.2 Biologie
- La calcémie est abaissée à des taux inférieurs à 80 mg/litre soit < 2 mmol (taux physiologique des deux premiers jours de la vie). Des taux très bas (autour de 55 mg/litre, 48,5 mg/litre) peuvent être rencontrés.
- La phosphorémie est soit normale, soit augmentée et, dans ce cas, doit évoquer l'hypoparathyroïdie chronique si les valeurs sont constamment élevées.
1.3 Signes électriques
- les données de l'électroencéphalogramme sont variables et non spécifiques,
- l'électromyogramme peu réalisable à cet âge est presque toujours négatif,
- l'électrocardiogramme apporte des renseignements utiles au diagnostic : on note une tachycardie sinusale avec allongement des QT et une onde T pointue et symétrique. Le calcul de l'espace QT devra tenir compte de la fréquence cardiaque (pour un pouls à 120 par minute, l'espace QT normal est égal à 0,40 s). Il est bon de mesurer le rapport (aR aT/RR) qui se révèle supérieur à 0,42.
1.4 Diagnostic
Le diagnostic d'hypocalcémie suspecté par l'ensemble des signes cliniques doit être confirmé par le dosage de la calcémie.
Ces symptômes anormaux peuvent faire discuter une hypoglycémie néonatale, une méningite ou une hémorragie méningée.
1.5 Etiologie
Le nouveau-né qui ne reçoit aucun apport alimentaire présente une hypocalcémie physiologique. La calcémie s'abaisse les premiers jours pour se normaliser en une semaine environ.
1.5.1 Facteurs aggravant et favorisant des hypocalcémies néonatales
On retrouve dans 80% des cas, les facteurs suivants :
- prématurité, hypotrophie, gémellarité,
- grossesses pathologiques (toxémie gravidique, placenta praevia),
- nouveau-né de mère diabétique (la prescription de calcium est systématique),
- difficultés d'accouchement :

    * travail anormalement prolongé,
    * traumatisme obstétrical,
    * césarienne.

- la transfusion d'échange : en apportant de grandes quantités de citrate, réduit le taux de calcium ionisé, d'où l'obligation d'injecter du gluconate de calcium pendant l'opération.
1.5.2 Causes des hypocalcémies néonatales
1.5.2.1 L'hypoparathyroïdie transitoire du nouveau-né (Balsan)
Il existerait un excès de phosphore endogène ou exogène qui, associé à une diminution de la capacité d'épuration rénale entraînerait une hyperphosphatémie.
Cette hyperphosphatémie en l'absence de réponse parathyroïdienne adéquate provoque l'hypocalcémie. Ces phénomènes prendraient toute leur importance chez les nouveau-nés nourris au lait de vache après accouchements dystociques.
La conséquence pratique est d'apporter un apport calorique très précoce et pauvre en phosphore.
1.5.2.2 La tétanie hypomagnésémique
Une hypomagnésémie transitoire ou durable entraîne le même cortège de signes que les hypocalcémies néonatales. L'hypomagnésémie peut être associée à l'hypocalcémie. Le diagnostic en est difficile et repose sur le dosage du magnésium sérique et globulaire. Les chiffres normaux du nouveau-né sain sont de 19 mg/l (en moyenne) pour le magnésium sérique et de 56 mg/l pour le magnésium globulaire.

1.5.2.3 L'agénésie des parathyroïdes, les hémorragies des parathyroïdes, l'hypoparathyroïdie chronique peuvent être exceptionnellement envisagées.

L'évolution sous traitement est, en général, favorable.
Traitement préventif : La carence maternelle en Vit. D est un facteur favorisant de l'hypocalcémie néonatale. L'administration de Vit. D à la mère (100.000 U durant le troisième trimestre), est recommandable en particulier si la grossesse se déroule durant les mois d'hiver.
Le traitement consiste en injection I.V. immédiate de soluté de gluconate de Calcium et un contrôle régulier de la calcémie.
2 Les hypocalcémies du nourrisson
Dominée à cet âge par l'origine rachitique, l'hypocalcémie va se traduire surtout par des manifestations paroxystiques très fréquentes et banales : les crises convulsives.
- Les crises convulsives
Elles constituent le meilleur signe d'alerte. Présentes dans la moitié des cas d'hypocalcémies, les convulsions par hypocalcémie représentent environ 1/3 des convulsions du nourrisson neurologiquement normal. Les crises généralisées ou localisées associent les phases toniques puis cloniques. L'examen neurologique peut initialement montrer un déficit moteur post-crise, mais il se normalise ultérieurement. L'intervalle de temps entre les crises peut être variable.
- Les crises de tétanie
Elles sont rares, en particulier l'aspect "en main d'accoucheur" (le pouce se loge dans la gouttière formée par les autres doigts). Le laryngospasme est plus fréquent, caractérisé par une apnée brutale, pâleur livide ; il est parfois provoqué par des pleurs et des cris. La mort subite par ictus laryngée est toujours à craindre (2% des cas de Paupe).
- Les manifestations respiratoires
Il s'agit d'accès paroxystiques de tachypnée superficielle avec cyanose, tachycardie, stridor et reprise respiratoire bruyante.
- Les signes atypiques
On devra rechercher :
- un bombement de la fontanelle,
- des manifestations hémorragiques variées (purpura, ecchymose),
- une macroglossie.
- Formes latentes
Représentant près d'un quart des cas selon Paupe, l'hypocalcémie est totalement latente, sans aucune traduction clinique.
2.1 Diagnostic positif
Orienté par la symptomatologie fonctionnelle ci-dessus, il reposera sur les arguments cliniques, biologiques et électriques.

2.1.1 L'examen clinique recherchera les manifestations d'hyperexcitabilité neuro-musculaire.

Le signe de Chvostek : recherché en percutant un point situé à mi-distance du lobule de l'oreille et de la commissure labiale, consiste en une contraction en éclair du releveur de la lèvre supérieure. La contraction peut diffuser au releveur de l'aile du nez et à l'orbiculaire des paupières ou même de l'hémiface.

Trois signes analogues doivent être recherchés :
1. le signe de Weiss par percussion de l'angle externe de l'orbite permet d'obtenir une contraction très nette de l'orbiculaire,
2. le signe d'Escherich par percussion de la commissure labiale, on obtient une contraction très nette de l'orbiculaire,
3. le signe de Lust : flexion dorsale et relèvement du pied en abduction par percussion du col du péroné. C'est un signe de grande valeur.

Le signe de Trousseau a peu de valeur chez le nourrisson ; il consiste à provoquer un spasme tétanique à l'extrémité d'un membre en réalisant une ischémie transitoire par la pose d'un garrot pendant 5 à 10 minutes à l'avant bras. La main se met en gouttière recevant le pouce (main d'accoucheur) ou ce qui est plus fréquent chez le nourrisson, on obtient une fermeture du poing. Inconstant chez le nourrisson, il est de plus positif chez 6 % des sujets normaux.

Le reste de l'examen clinique devra rechercher les signes de rachitisme à leur tout début ou à un stade avancé (hypotonie, chapelet costal, bourrelets épiphysaires, déformation du thorax et des membres).
2.1.2 Signes biologiques
La certitude du diagnostic repose sur la mise en évidence de l'hypocalcémie avec des valeurs inférieures à 2 mmoles (ou 80 mg pou mille). La phosphorémie est soit normale, soit diminuée. Les phosphatases alcalines sont augmentées s'il existe un rachitisme. La calciurie est soit normale, soit diminuée. La phosphaturie est diminuée.
2.1.3 Signes électriques
2.1.3.1 L'électromyogramme
Peut révéler l'existence d'une hyperactivité myoélectrique sous la forme de doublets, de triplets ou de multiplets dont l'apparition est facilitée par la pose d'un garrot et par l'hyperventilation. Il s'agit donc d'un examen paraclinique fidèle et sûr.
2.1.3.2 L'électrocardiogramme
Examen simple et fidèle, il apporte des modifications très évocatrices qui portent sur la repolarisation ventriculaire.
- l'onde T prend un aspect, pointu, symétrique,
- l'allongement du QT se fait aux dépens du segment ST. QRS et T conservent une largeur normale. On admet que QT est allongé lorsque l'espace qui va du sommet de R au sommet de T est supérieur à 50 % de R.R. Le calcul se fait dans la dérivation où QT est le plus long en D2. L'ECG quotidien est donc un examen de surveillance et un excellent test évolutif.
2.1.3.3 L'électroencéphalogramme
Montre dans un quart à un tiers des cas des anomalies non spécifiques à type de dysrythmie lente ou d'altérations épileptiques (pointes ou pointes-ondes). La découverte d'altérations épileptiques pose évidemment un difficile problème de diagnostic différentiel qui ne pourra être tranché qu'après la correction de l'hypocalcémie et la disparition de ces signes électriques de comitialité sous traitement vitamino-calcique. Le problème du pronostic à long terme est encore plus difficile à porter.
2.2 Diagnostic étiologique
Parmi les facteurs étiologiques, il faut noter une notion de terrain, le facteur racial (noirs, nord africains), la prédominance du sexe masculin, le rôle évident de l'absence d'ensoleillement.
L'hypocalcémie peut être due :
- à un défaut d'absorption lié à une avitaminose D,
- à un défaut d'apport (prématuré, faible poids de naissance),
- très rarement, à un excès d'élimination.
2.2.1 Avitaminose D avec rachitisme (cf. cours rachitisme)
L'hypocalcémie du nourrisson est dans un peu plus d'un cas sur deux d'origine rachitique. L'hypocalcémie peut survenir à tous les stades de l'évolution du rachitisme, quelle que soit l'intensité de celui-ci.
L'hypocalcémie est due à l'avitaminose D qui diminue l'absorption intestinale du calcium. La carence en calcium entraîne une hyperactivité parathyroïdienne, mais en l'absence de vitamine D, la parathormone ne peut plus libérer le calcium de l'os. Elle a donc perdu son pouvoir hypercalcémiant.
L'hypocalcémie peut d'ailleurs survenir en début de traitement par la vitamine D.
2.2.2 Avitaminose D sans rachitisme
Représentant l'autre moitié des cas d'hypocalcémies, cette étiologie est curable dans tous les cas par la vitamine D. Il s'agit d'une avitaminose D à son tout début, sans signe osseux radiologique, survenant durant le premier trimestre de vie.
2.2.3 Autres étiologies
- Hypocalcémie survenant au cours de diarrhées chroniques d'étiologies variées (maladies coeliaque, mucoviscidose), d'insuffisance rénale, de rachitisme vitamino-résistant pseudo-carentiel.
- L'hypoparathyroïdie familiale à transmission récessive liée au sexe, touchant les garçons, associant aux signes de tétanie un retard mental et une cataracte profonde.
- L'hypoparathyroïdie transitoire idiopathique du nourrisson (Balsan) réalise un tableau d'hypocalcémie où prédominent les signes neurologiques. L'évolution est toujours favorable.
2.3 Evolution et pronostic
Le pronostic immédiat dominé par le risque de mort subite (par accident respiratoire ou cardiaque) impose un traitement rapide de l'hypocalcémie et de sa cause majeure : l'avitaminose D ; injection I.V. de gluconate de calcium vitamine D.

Le pronostic ultérieur est en général favorable. En cas de phénomènes convulsifs prolongés, des séquelles neurologiques ont été décrites (hémiplégies, retard psychomoteur, épilepsie). Il est d'ailleurs toujours très délicat de rattacher avec certitude une épilepsie à l'hypocalcémie des premiers mois.

Néanmoins, la survenue d'une spasmophilie ultérieure chez le grand enfant et l'adulte peut être en rapport avec une hypocalcémie du premier âge.
3 Les hypocalcémies du grand enfant
3.1 Etude clinique
La symptomatologie est dominée à cet âge par la tétanie, les convulsions et les troubles psychiques.
3.1.1 La tétanie
La tétanie est un groupement de symptômes sensitifs et moteurs à prédominance distale, à expression progressive centripète, survenant au cours d'accès répétés et transitoires (Royer).
Elle débute par des troubles sensitifs : picotements, fourmillements, puis sensation de tension profonde avec engourdissement et déficit variable des sensibilités superficielles et profondes.
Les troubles moteurs succèdent : fasciculations, raideurs gênant le mouvement des doigts et des membres, contractions douloureuses analogues à des crampes aboutissant à de véritables spasmes (main d'accoucheur, spasme carpopédal). Ces spasmes peuvent atteindre tous les muscles, le larynx ; ils peuvent entraîner la chute du sujet sans perte de connaissance.
Enfin, élément important de sémiologie, ces signes peuvent être isolés, groupés ou encore atténués.
3.1.2 Les convulsions
Elles peuvent prendre tous les types, localisées ou généralisées, survenir dans n'importe quelle circonstance, si bien qu'il est difficile de les distinguer des crises comitiales.
Elles sont d'autant plus fréquentes que le sujet est jeune.
3.1.3 Les troubles psychiques
Ils constituent la toile de fond tellement ils sont constants et fréquents, surtout dans le sexe féminin : accès dépressifs, anxiété, obsessions, terreurs nocturnes, tendance hystérique, voire même état psychotique. Tout le problème consiste à y penser et à pouvoir les rattacher à l'hypocalcémie.
3.2 Examen clinique
Il recherchera les signes de tétanie latente :
- le signe de Chvostek (avec épreuve hyperpnée de 3 minutes : ce signe est positif chez 8 à 10% des sujets normaux).
- le signe de Lust, la manoeuvre de Trousseau.
Chez le grand enfant, le test d'hyperpnée est réalisable : 60 respirations par minute pendant 75 secondes.
3.3 Diagnostic positif
Il reposera sur les signes biologiques et électriques (E.C.G., E.E.G et E.M.G) que nous ne détaillerons pas de nouveau.
3.4 Diagnostic différentiel
Il faut éliminer :
- L'épilepsie de l'enfant devant les crises de tétanie et les crises convulsives.
- Les troubles neuro-psychiques qui feront discuter une hystérie, un pithiatisme.
3.5 Diagnostic étiologique
Les Hypoparathyroïdies

3.5.1 Cliniquement les signes cardinaux sont :
- la tétanie,
- le spasme laryngé,
- l'épilepsie localisée ou généralisée,
- les troubles psychiques,
- les signes cutanés :

    * peau sèche, rugueuse, squameuse,
    * eczéma rebelle, alopécie,
    * ongles atrophiques, cassants,
    * mauvais état dentaire,
    * moniliase cutanée et digestive

- les signes osseux :

    * ostéocondensation avec corticales épaisses et bandes métaphysaires, rarement une ostéopénie.

- les signes oculaires :

    * cataracte en général postérieure avec calcification de la cornée,

- les signes neurologiques :

    * épisodes d'hypertension intra crânienne avec céphalée et oedème au fond d'oeil,
    * mouvements anormaux.

3.5.2 Biologiquement il existe :
- une hypocalcémie notable (60 à 70 mg/l)
- une hyperphosphatémie (60 à 70 mg/l).

Actuellement :
- valeur du dosage de la PTH,
- épreuve d'injection de PTH avec dosage de l'AMP cyclique urinaire.
3.6 Formes étiologiques des hypoparathyroïdies
- L'hypoparathyroïdie après thyroïdectomie (de 0,3 à 3%)
- L'hypoparathyroïdie idiopathique isolée : se manifestant durant la seconde enfance, due à des hémorragies ou à une agénésie des parathyroïdies. Il existe des formes familiales, soit autosomiques récessives, soit récessives liées au sexe, l'hypothèse d'une maladie auto-immune a également été soulevée.
- Le syndrome hypoparathyroïdie chroniques associé dans 10 % des cas à une maladie d'Addison et une moniliase.
3.6.1 La pseudo-hypoparathyroïdie (ostéodystrophie d'Albright).
Ce syndrome associe une insuffisance parathyroïdienne chronique, un nanisme avec obésité, des dysmorphies (face ronde, brachymétacarpie), des calcifications des tissus mous. Cette forme familiale, à transmission dominante s'accompagne d'une hypocalcémie (ostéodystrophie de type I), mais ne comporte parfois aucune perturbation biologique (ostéodystrophie de type II).

L'étiologie serait une insensibilité du tubule rénal à l'hormone parathyroïdienne, ce qui est prouvé par l'épreuve à la PTH.
3.6.2 Les carences en vitamine D
Elles peuvent survenir au cours des troubles d'absorption de la vitamine D : diarrhées d'origines diverses, insuffisance hépatique, cirrhose, carence en magnésium.
3.6.3 Le rachitisme vitamino-résistant pseudo-carentiel (R.V.R. de type III de Royer).
Maladie familiale, autosomique récessive, caractérisée par des signes de tétanie, elle donne une hypocalcémie basse avec un taux de phosphore élevé.
Le traitement (fortes doses de vitamine D) normalise la calcémie, la phosphatémie, les lésions squelettiques et permet une croissance normale si le traitement n'est pas arrêté.
3.6.4 L'insuffisance rénale chronique
3.6.5 Le cancer de la thyroïde avec hypersécrétion de la thyrocalcitonine. En 1970, Machlu en retrouve deux observations dans la littérature mais les radiographies répétées des nouveau-nés et des nourrissons risquent d'en augmenter l'incidence.
3.6.6 Autres étiologies
- intoxication par fluorure de sodium, oxyde de carbone, phénotiazines,
- au cours de transfusions, massives (par apport de grandes quantités de citrate),
- au cours de pancréatite aiguë, des états d'alcalose.

Les hypocalcémies de l'enfant représentent un chapitre important de la pathologie journalière pédiatrique. Il est donc indispensable d'en bien connaître les signes typiques et atypiques. Le traitement prophylactique de l'avitaminose D devrait diminuer son incidence et, par là, toutes les complications des hypocalcémies.
4 Traitement des hypocalcémies
- Les ingestions alimentaires apportent, en général, 600 mg de calcium par 24 heures.
- Les aliments riches en calcium sont essentiellement les produits laitiers (laits et fromages) et certains légumes secs.
- Les médicaments à base de calcium doivent être estimés en calcium-élément :

Exemple :

    * le gluconate de Ca comprend 90 mg de Ca pour 1 g,
    * le chlorure de Ca comprend 360 mg de Ca pour 1 g,
    * le carbonate de Ca comprend 400 mg de Ca pour 1 g,
    * le gluconalactate de Ca comprend 500 mg de Ca pour 1 g.

- Par voie veineuse, le seul sel de Ca bien toléré est le gluconate de calcium. Les autres sels de Ca peuvent s'administrer per os.
- Une contre-indication à souligner est la digitalisation. Il est dangereux d'injecter du Ca chez un sujet dont le coeur est imprégné de digitaline.

Vitamine D
Besoins physiologiques 1000 U/24H. Dans certains états pathologiques, les besoins peuvent être augmentés.

Hormone parathyroïdienne
Parathormone à injecter par voie intra-musculaire. Elle provoque une hypercalcémie, une hyperphosphatémie et une hyperphosphaturie. Son usage prolongé entraîne la formation d'anticorps.
Indications et traitements
- Traitement préventif par Vit. D administré au dernier trimestre de la grossesse.
- Hypocalcémie néonatale

    * traitement d'urgence : calcium par voie veineuse : 50 à 60 mg/kg de Ca, (gluconate de Ca 1g = 93 mg de Ca élément),
    * traitement d'entretien : Ca : 500 mg/24H per os
    * vitamine D doses habituelles : 1000 U/24H,
    * puis, traitement conventionnel vitamine D.

- Hypocalcémie du rachitisme

    * Traitement d'urgence : perfusion I.V de Ca élément : à 1500 mg/m²/24H => Gluconate de Ca
    * Traitement d'entretien : Vitamine D 2000 U/jour, Ca 500 mg/jour per os.

- Hypoparathyroïdie chronique :

    * Supplémentation calcique 1g/24H,
    * Réduction du P alimentaire,
    * Vitamine D 20 à 100 000 U/jour.

Le rachitisme
C. Jézéquel

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 1er avril 1999

1 Rachitisme commun ou carentiel
1.1 Causes de la carence en vitamine D
1.2 Symptomatologie clinique
1.3 Aspects radiologiques
1.4 Aspects biochimiques
1.5 Evolution et complications
   

1.6 Formes particulières
1.7 Traitement du rachitisme carentiel
1.8 Prévention du rachitisme carentiel
2 Rachitismes vitamino-résistants
2.1 R.V.R. secondaires
2.2 R.V.R. idiopathiques
Objectifs
1. Décrire le métabolisme de la vitamine D et ses principales activités métaboliques

2. Enumérer les facteurs épidémiologiques du rachitisme commun

3. Décrire (ou reconnaître) les signes cliniques, biologiques et radiologiques du rachitisme commun et citer ses complications.

4. Rédiger l'ordonnance du traitement du rachitisme carentiel.

5. Rédiger l'ordonnance de prophylaxie du rachitisme carentiel.

Définition
C'est une ostéomalacie : défaut de minéralisation par absence de dépôts de sels de calcium au niveau de la trame protéïque de l'os. C'est la conséquence d'une carence en dérivés actifs de la vitamine D.

En fonction de la dose minimale de vitamine D pour la guérison du rachitisme, on distingue :
- Le rachitisme carentiel vitamino sensible,
- Les rachitismes vitamino-résistants.

Physiologie de la vitamine D

Les besoins en vitamine D sont voisins de 400 U. par 24 heures. Les sources de vitamine D sont :
- soit exogènes alimentaires : les aliments naturels ne contiennent que peu de vitamine D sauf certains poissons et le jaune d'oeuf,
- soit endogènes : par synthèse au niveau de la peau par exposition au rayonnement ultra-violet.

La vitamine D circulante a deux origines : cutanée pour la vitamine D3 et digestive (vitamine D2 et vitamine D3). L'absorption digestive se fait au niveau du grêle.

Les vitamines D se transforment en dérivés actifs : au niveau du foie, c'est la formation du 25 OH D3 et au niveau du rein du dérivé actif : le 1 - 25 OH2 D3.

Les principales actions de la vitamine D (en ses dérivés actifs) sont :
- action intestinale : augmentation du transfert du calcium et de façon indépendante, augmentation de l'absorption du phosphore,
- action osseuse : fixation du Ca et du P, sur la trame protéique,
- action rénale : diminution de la calciurie (augmente la réabsorption tabulaire) et de la phosphaturie,
- action musculaire : augmentation de la concentration musculaire en A. T. P. et en phosphore.
1 Rachitisme commun ou carentiel
1.1 Causes de la carence en vitamine D
Les causes de cette carence sont doubles :
- le manque d'exposition des enfants à la lumière solaire ou l'inefficacité de cette exposition en raison de la latitude, des saisons, de la pollution atmosphérique, de la pigmentation cutanée marquée,
- l'insuffisance des apports alimentaires en vit. D. Ceci a conduit à l'enrichissement de certains aliments en vit. D. (Grande Bretagne, Etats-Unis) ou à la prescription médicale de vitamine D (France). Les aliments diététiques lactés sont maintenant supplémentés en Vit. D (400 à 600 U/litre).
Ces conditions se trouvent souvent réunies. De plus, à ces facteurs déterminants, peuvent s'ajouter des causes favorisantes : prédispositions familiales, prématurité, atteinte plus fréquente chez le garçon.
1.2 Symptomatologie clinique
C'est entre 6 mois et 4 ans que l'affection se voit électivement.
Le rachitisme commun carentiel se caractérise par une hypotonie musculaire et des altérations squelettiques atteignant tous les os, notamment au niveau des cartilages de croissance.
1.2.1 Hypotonie musculaire
Elle se présente à tous les stades. Due à l'action de la vitamine D au niveau du muscle, elle est responsable du retard des acquisitions motrices, de l'aspect ballonné de l'abdomen, des déformations thoraciques. L'hypotonie est liée à la déplétion phosphatée et à la carence en A.T.P. Elle est corrigée par l'administration de la vitamine D.
1.2.2 Modifications squelettiques
Dues à l'exubérance du tissu ostéoïde et à l'absence de charge en sels minéraux :
- Crâne : retard de fermeture des fontanelles. Cranio tabes (dépression en balle de celluloïde de l'écaille de l'occipital). L'ostéomalacie des os du crâne est responsable des déformations : aplatissement occipital, proéminence des bosses frontales.
- Thorax : chapelet costal : nodosités visibles ou palpables de la jonction chondro-costale. Déformations secondaires ou ramollissement : rétrécissement sous-mammaire, aplatissement antéro-postérieur.
- Os longs des membres : les lésions du cartilage de croissance se traduisent par l'existence de bourrelets épiphysaires notamment aux poignets et aux chevilles.
Le ramollissement des os entraîne des déformations : incurvations diaphysaires (membres inférieurs surtout), fermeture de l'angle cervicofémoral (Coxa-vara). Modification du bassin.
- Rachis : anomalies rares : accentuation de la cyphose dorsale.
1.2.3 Autres symptômes
Si la carence en vitamine D persiste, le retard de croissance en poids et en taille s'accentue. Il existe souvent associée une anémie hypochrome parfois accompagnée d'une splénomégalie avec myélémie (anémie type Von Jacksh Luzet).
La triade évocatrice = tétanie, laryngospasme, convulsion, conséquence de l'hypocalcémie (voir cours : tétanie et hypocalcémie).
Deux formes prolongées = retard staturopondéral, tableau de polycarences, anémie de Von Jacksh-Luzet.
1.3 Aspects radiologiques
Ils sont précoces et existent parfois au stade infra-clinique.

Voûte crânienne : souvent amincie.

Thorax : élargissement et incurvation concave en dedans de l'extrémité antérieure des côtes. Dans les formes graves, déminéralisation et fractures avec cals exubérants.

Os longs : au niveau de la métaphyse, lésions les plus précoces et les plus importantes : élargissement transversal de la métaphyse, incurvation en cupule, apparition de spicules latéraux ; aspect flou, dentelé de la ligne métaphysaire, traduisant l'évolution du rachitisme.

Au niveau de la diaphyse, les signes sont discrets (dans les formes modérées) : simple diminution de la densité osseuse ou importants : déformations diaphysaires, pseudo-fractures de Looser Milkman (trait radio-transparent perpendiculaire à l'axe de l'os). Les fractures vraies peuvent être multiples mais se voient plus rarement.
1.4 Aspects biochimiques
Il y a constamment une diminution de l'absorption intestinale de Ca et du phosphore. Le coefficient d'utilisation digestive du calcium (C.U.D.) est rapidement corrigé par l'absorption de vitamine D.

La calcémie est souvent normale et la phosphorémie habituellement basse. Toutefois, on a décrit 3 stades successifs caractéristiques de la carence en vitamine D (Fraser - Kooh - Scriver) :
- stade I : début de la carence : calcémie abaissée, phosphorémie normale,
- stade II : la réaction hyperparathyroïdienne du calcium devient efficace. La calcémie se normalise par sortie du calcium de l'os. La réabsorption tubulaire du calcium augmente (hypocalciurie), la phosphorémie est basse.
- stade III : carence prolongée et sévère en vitamine D, hypocalcémie par non réponse osseuse à la parathormone ; hypophosphorémie.

Autres paramètres biologiques à noter : les phosphatases alcalines sont augmentées : signe précoce fidèle et leur baisse permet de suivre l'évolution. Par ailleurs on note une hyperaminoacidurie.
Le dosage de la 25.OHD3 dans le sang, confirme la carence.
Le dosage radio-immunologique de la parathormone a permis d'affirmer la réalité du syndrome d'hyperparathyroïdie dans le rachitisme carentiel
1.5 Evolution et complications
L'évolution spontanée se fait vers la guérison par minéralisation progressive. Exceptionnellement, il peut y avoir fixation des déformations osseuses. Le traitement hâte cette évolution.

Les complications sont de deux ordres :
- Pneumopathies aiguës : gravité des infections bronchopulmonaires notamment à cause de la mollesse du gril costal et de la faiblesse musculaire.
- Hypocalcémie des stades I et III pouvant déterminer tétanie et crises convulsives.
1.6 Formes particulières
1.6.1 Forme du prématuré :
Le prématuré naît avec une réserve en calcium qui est très pauvre. Ses besoins en vitamine D sont accrus. Il existe sans doute un défaut de maturation de la 25 hydroxylase hépatique. Le taux de 25 OH D3 circulant est faible.
1.6.2 Forme à début tardif
Cette forme peut se voir dans la seconde enfance ou l'adolescence et ressemble à une ostéomalacie de l'adulte. La sensibilité à la vitamine D est le meilleur test.
1.6.3 Rachitisme aggravé par la prise d'anticonvulsivants
Ces médicaments inducteurs enzymatiques augmentent la production des dérivés vitaminiques.
1.7 Traitement du rachitisme carentiel
La base du traitement est la vitamine D synthétique. L'efficacité est comparable pour la vitamine D2 ou D3. Dans le rachitisme avec hypocalcémie, il est recommandé de fournir un apport supplémentaire de calcium.
1.7.1 Rachitisme débutant hypocalcémique à lésions osseuses discrètes :
- calcium : 40 mg/kgj
- Vitamine D : 2 à 5.000 U/24 heures.
1.7.2 Rachitisme à lésions évidentes normocalcémique hypophosphorémique :
- Vitamine D : 1 dose de charge 200.000 U puis dose quotidienne de 2.000 à 5.000 U./Jour.
1.7.3 Rachitisme grave avec hypocalcémie
- Normalisation préalable de la calcémie (perfusion I.V. de 200-600 mg/24 heures), puis traitement par vitamine D comme précédemment.

Le traitement corrige rapidement l'hypotonie musculaire et les signes biologiques. Les signes radiologiques de guérison (recalcification des métaphyses) apparaissent au bout de 4 semaines environ. Les déformations diaphysaires peuvent persister longtemps mais se corrigent très habituellement au cours de la croissance.
1.8 Prévention du rachitisme carentiel
400 à 1 200 unités par jour de vitamine D2 ou D3 jusqu'à 18 mois et pendant les périodes peu ensoleillées jusqu'à 5 ans suffisent à prévenir le rachitisme dans la majorité des cas. Cette dose doit être augmentée à 2.000 ou 4.000 U/jour chez le prématuré ou chez l'enfant à peau pigmentée.

Les aliments diététiques lactés pour nourrissons sont désormais (1992) enrichis en Vit. D (400 à 600 U/litre en moyenne). Ceci ne dispense pas de la prophylaxie médicamenteuse. Le nourrisson nourri au lait maternel doit également recevoir cette prophylaxie.

Si la vitamine D est donnée séparement, tenir compte de la teneur en Vitamine D des solutions de vitamines.
2 Rachitismes vitamino-résistants
Deux critères les définissent :
- l'absence d'activité des doses conventionnelles de vitamine D,
- la rechute à l'arrêt des doses fortes de vitamine D capable d'améliorer ce rachitisme.

On en distingue en général deux groupes :
1er groupe : rachitismes vitamino-résistants secondaires
Selon Dent, plus de 30 maladies peuvent s'accompagner de RVR.

Citons par exemple :

- maladies hépatiques : fistules biliaires, ictère chronique, (possibilité d'utiliser le 25 OH D3),

- ostéodystrophie rénale : rôle de l'insuffisance rénale et de l'hyperparathyroïdie : utilisation possible du 25 OH D3 et surtout du 1 25 OH2 D3,

- tubulopathies : acidose tubulaire distale, cystinose, tyrosinose, syndrome de Lowe.
2ème groupe : R.V.R. idiopathiques
- R.V.R. idiopathique hypophosphatémique familial : maladie héréditaire dominante atteignant surtout les garçons. Début assez tardif vers la deuxième année. La maladie se révèle par des déformations (genu valgum - varum, Coxa vara), faciès un peu particulier à front bombé, trouble de croissance : taille définitive entre 1,40 et 1,50. La radio montre des lésions métaphysaires et un aspect trabeculé de l'os. Le signe biologique essentiel est l'hypophosphorémie précoce et constante (30 mg°/oo). L'étiologie de ce RVR ne semble pas être un trouble du métabolisme de la vitamine D.
Le traitement associe des doses élevées de vitamine D (20 à 30.000 U. par jour) à une supplémentation en phosphore (environ 1 g/jour). Le rattrapage de croissance est incomplet.

- R.V.R. pseudo-carentiel familial décrit par Prader-Heredite autosomique récessive. Les symptômes sont très semblables à ceux du rachitisme vitamino sensible carentiel. L'hypocalcémie est constante. Ce type de rachitisme répond en général bien à de grosses doses de vitamine D . Le 1 - 25 OH2 D3 semble efficace dans ce R.V.R.

- R.V.R. à début tardif : cas isolés sans notion familiale. Début après la 5ème année de la vie. Signes cliniques et radiologiques très importants d'ostéoporose et d'ostéomalacie. Biologiquement il y a une hypophosphorémie et un hyperaminoacidurie.
Le traitement comporte de la vitamine D à fortes doses et une surcharge en Ca et en P. La pathogénie est inconnue.
Métabolisme glucidique
C. Jézéquel

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 1er avril 1999

Objectifs
1 Les hypoglycémies
1.1 Les voies métaboliques du glucose
1.2 Les hypoglycémies néonatales
1.3 Les hypoglycémies du jeune enfant
2 Le diabète sucré chez l'enfant
   

2.1 Rappel de physiopathologie
2.2 Symptomatologie clinique
2.3 Symptômes biologiques
2.4 Evolution
2.5 Complications
2.6 Traitement
Objectifs
Les hypoglycémies

1. Décrire les mécanismes régulateurs de la glycémie, les facteurs hypoglycéminants et hyperglycéminants.

2. Enumérer les causes favorisantes d'une hypoglycémie néonatale, en décrire les signes cliniques et biologiques, en rédiger le schéma thérapeutique.

3. Enumérer les principales causes des hypoglycémies de l'enfant.
Le diabète sucré chez l'enfant

1. Enumérer les signes révélateurs du diabète sucré de l'enfant.

2. Décrire la physiopathologie du diabète sucré de l'enfant.

3. Exposer les principes, la technique et l'interprétation du dosage du glucose et des corps cétoniques dans les urines.

4. Donner les principes du traitement (insulines, examens de contrôle, diététique) et déterminer la dose d'insuline d'après le carnet de surveillance dans différentes situations.

5. Donner les méthodes de dépistage d'une cétose et d'une acidocétose et rédiger le traitement correspondant.

6. Décrire les accidents immédiats dus au mauvais équilibre du diabète et rédiger le traitement correspondant.

1 Les hypoglycémies
Le taux de glycémie reflète un équilibre dynamique entre l'arrivée de glucose provenant de l'alimentation ou secrété par le foie et son utilisation. Les besoins élevés chez le nouveau-né et le jeune enfant, le peu de réserve hépatique, la complexité des mécanismes régulateurs expliquent la fréquence des hypoglycémies.

Deux problèmes se posent :
- diagnostiquer l'hypoglycémie,
- en déterminer la cause.

Un bref rappel physio-biologique en facilite la compréhension.
1.1 Les voies métaboliques du glucose, compréhension de l'hypoglycémie
1.1.1 Apport
Il peut se faire sous forme de polyosides, de diholosides : lactose (glucose + galactose), saccharose (glucose + fructose), maltose (glucose + glucose) ou sous forme de glucose pur (Lait AL 110).
1.1.2 Digestion - absorption
La digestion des polyosides et des diholosides se fait au niveau de l'iléon ; elle aboutit à des sucres simples qui sont absorbés activement. Il existe un taux maximum d'absorption de 12g pour 100 ml.
1.1.3 Devenir dans le sang
La glucosémie est stable, supérieure à 0,30 g/l chez le nouveau-né, à 0,50 g/l chez le jeune enfant (méthode à la glucose oxydase). Le maintien d'une glucosémie stable dépend de l'apport alimentaire, mais aussi d'une sécrétion hépatique (voies de la néoglucogénèse et de la glycogénolyse).
1.1.4 Utilisation
Le glucose est utilisé comme source énergétique par tous les tissus. A noter qu'il pénètre passivement au niveau du cerveau et des globules rouges. Le glucose est filtré au niveau du glomérule rénal et réabsorbé au niveau du tubule proximal.

N.B : 1 g de glucose = 5,5 mmoles (SI)
1.1.5 Régulation hormonale : Un système hormonal complexe régule la glycémie
     
Pénétration intra cellulaire
   
Activation glycogénolyse
Néoglucogénèse
   
Libération Ac Am musculaire
   
Lypolyse Glycérol
++
   
Cétogénèse
   
Résultats sur la glycémie
Insuline    
ä
   
æ
   
æ
   
æ
   
æ
   
æ
Glucagon          
ä
   
ä
   
ä
   
ä
   
á
Catécholamines    
æ
   
ä
   
ä
   
ä
         
á
ACTH                      
ä
         
á
Cortisol    
æ
   
ä
   
ä
   
ä
         
á
STH    
æ
               
ä
         
á

1.1.6 Conclusion : mécanisme de l'hypoglycémie

L'hypoglycémie peut être liée :
- à un défaut d'apport alimentaire ou de sécrétion hépatique par carence en substrats (acides aminés, glycérol, lactate)
- à une consommation excessive,
- à un déficit enzymatique congénital ou acquis,
- à une dysrégulation hormonale, soit hyperinsulinisme, soit diminution d'activité des hormones dites hyperglycémiantes (liée à un défaut de leur sécrétion ou à une inefficacité par manque de substrat).

1.2 Les hypoglycémies néonatales
1.2.1 Définition
Il y a hypoglycémie lorsque le taux de glucoce sanguin (par la méthode à la glucose oxydase) est inférieur à 0,30 g/l ou 1,5 mmol/l.
1.2.2 Classification physiopathologique
1.2.2.1 Pauvreté des réserves hépatiques :
Enfants de petits poids de naissance immatures, hypotrophiques.
1.2.2.2 Consommation excessive :
Hypotrophiques, polyglobuliques, présentant une érythroblastose foetale.
1.2.2.3 Hyperinsulinisme :
Nouveau-né de mère diabétique, adénome, (cellule B) du pancréas, syndrome de Wiedmann-Beckwith, incompatibilité Rhésus.

1.2.3 Symptomatologie - pronostic

L'hypoglycémie peut être responsable de manifestations cliniques variées : convulsions, insuffisance respiratoire. A l'inverse, elle peut être totalement asymptomatique. Mais dans tous les cas, le pronostic à long terme peut être péjoratif. Il n'y a pas de relations constantes entre le taux de la glucosémie et la sévérité des symptômes lors de l'hypoglycémie. Il semble qu'une chute rapide de la glucosémie soit un facteur important dans l'apparition des symtômes.
1.2.4 Conduite à tenir
- Il faut se méfier de la survenue d'une hypoglycémie chez les enfants à risque (nés de mère diabétique, hypotrophiques). Un traitement préventif est conseillé : mise en place d'une sonde naso-gastrique et nutrition entérale continue les premiers jours à base d'eau glucosée à 10 %, puis de lait maternel, en surveillant périodiquement la glycémie.

- Le traitement d'une hypoglycémie confirmée consiste en l'injection intra-veineuse de 2 ml/kg de glucose à 20 %. Parallèlement, une nutrition entérale continue est mise en place.
1.3 Les hypoglycémies du jeune enfant
1.3.1 Définition
Il y a hypoglycémie lorsque le taux sanguin du glucose (méthode à la glucose oxydase) est inférieur à 0,50 g/l ou 2,5 mmoles/l.
1.3.2 Classification physio-pathologique
1.3.2.1 Déficits enzymatiques
- de la glycogénolyse : glycogénose de type III (par déficit en amylo 16 glucosidase) ou de type VI (par déficit en phosphorylase),
- de la néoglycogénèse ou de la glycogénèse par carence en glucose 6 phosphatase (type I), en glycogène synthétase, en fructose phosphatase, en phosphoénol pyruvate carboxylase, en pyruvate carboxylase,
- intolérances au fructose, galactose, glycérol,
- aminoacidopathies : leucinose, acidémie méthylmalonique,acidémie propionique, tyrosinose.
1.3.2.2 Défauts de substrats
- malnutrition : Kwashiorkor, jeûne prolongé,
- hypoglycémie récurrente avec cétose.
1.3.2.3 Hyperinsulinisme
- pharmacologique : diabète traité par l'insuline,
- tumoraux-pancréatiques : adénome, nésidioblastose, hyperplasie,

    * extra-pancréatiques,
    * fonctionnels : leucino-sensible.

1.3.2.4 Déficits endocriniens
- insuffisance hypohysaire tumorale,
- déficit en HGH,
- déficit ou non réponse à l'ACTH,
- hyperplasie congénitale des surrénales,
- insuffisance surrénale.
1.3.2.5 Diverses ou acquises
- toxiques (alcools, agents hypoglycéminants, aspirine),
- insuffisance hépato-cellulaire (hépatites).
1.3.2.6 Idiopathiques
1.3.3 Symptomatologie
Elle est très variable, allant de troubles majeurs (coma, convulsions,...) aux troubles mineurs (sueurs, céphalées, asthénie, crampes,...)
1.3.4 Eléments du diagnostic
En dehors de tableaux cliniques évocateurs où hypoglycémie n'est qu'un élément d'un syndrome, l'orientation du diagnostic repose sur quelques critères cliniques et biologiques simples : l'âge, l'horaire de survenue, l'existence d'une hépatomégalie, l'existence d'une acidocétose avec cétonurie.

La confirmation du diagnostic sera apportée par des explorations biologiques plus complexes :
- dosage d'insulinémie (statique et dynamique après hyper ou hypoglycémie provoquée),
- épreuves d'hyperglycémie : per os, intra-veineuse, au glucagon,
- épreuves d'hypoglycémie : au tolbutamide, à la leucine.
2 Le diabète sucré chez l'enfant
Le diabète sucré chez l'enfant diffère du diabète de l'adulte par un certain nombre de points :
- la différence est fondamentale sur le plan physiopathologique. Le diabète de l'enfant est toujours insulinodépendant (DID) ; les dosages de l'insulinémie ont montré que, chez l'enfant, le diabète est insulinoprive. Le traitement sera donc un traitement substitutif par l'insuline exogène. L'origine immunologique paraît vraisemblable. Certains groupes HLA (Dr3 et Dr4) sont à risque.
Rappelons que l'adulte peut présenter outre ce type de diabète, un diabète non insulinodépendant de l'obèse ou du sujet âgé.
Ajoutons que l'enfant, devenu adulte, garde son type de diabète insulinoprive et insulinodépendant.
- la fréquence n'est pas comparable. Le nombre de diabétiques insulinodépendants est en France de 80 000 dont 4 000 enfants de moins de 5 ans (1 enfant pour 20 adultes).
- la clinique du diabète de l'enfant est simple, la maladie se révélant que rarement par des complications.
- les complications surviennent rarement dans l'enfance, mais le diabète de l'enfant a des incidences sociales que n'a pas le diabète de l'adulte.
2.1 Rapelle de physiopathologie
Le point de départ est la diminution puis l'arrêt de la sécrétion insulinique du pancréas.
Cette diminution d'activité insulinique gêne l'entrée du glucose dans la cellule. Le sucre augmente dans le secteur extra cellulaire d'où hyperglycémie. Celle-ci a pour conséquence la glycosurie qui tient sous sa dépendance la polyurie et la polydipsie.
Si la carence insulinique se prolonge, l'organisme utilise ses graisses, mais le métabolisme incomplet aboutit à la formation de corps cétoniques.
Ces corps cétoniques, métabolisables et donc utiles, vont cependant être nocifs par leur radical acide. Ceci aboutit à une acidocétose dont le terme ultime est le coma diabétique, coma acidosique.
2.2 Symptomatologie clinique
Elle est simple, faite de symptômes qui rapidement ne devraient pas passer inaperçus.
- polyurie : elle est rapidement gênante pour l'enfant, elle peut prendre le masque d'une énurésie qui réapparaît,
- polydipsie : elle détermine l'enfant à boire n'importe quoi, n'importe quand,
- polyphagie : du moins aussi longtemps que persiste une petite sécrétion d'insuline.
A ces trois symptômes essentiels, s'ajoutent souvent un amaigrissement, une fatigue progressive.

Il peut y avoir des modes de début particuliers :
- début de coma : coma calme avec hyperventilation et acidose,
- début par un syndrome douloureux abdominal souvent contemporain d'une acidocétose. Un interrogatoire simple permettra de retrouver l'existence des symptômes cardinaux précités.
2.3 Symptômes biologiques
2.3.1 Examens urinaires
Bandelettes réactives : glycosurie, acétonurie (Ketodiastix-KétodiaburstesT) ou examens de laboratoire.
2.3.2 Examens sanguins
- Au lit de l'enfant : estimation semi-quantitative de la glycémie (Dextrostix BM test glucose).
- Dosage de la glycémie. Pour sensibiliser le dosage, doser la glycémie postprandiale et non pas à jeun. Dans la règle, le diagnostic est facile.
2.4 Evolution
Dans la règle générale, sans traitement, l'évolution se fait vers l'acidose et la mort en coma métabolique.
Avec un traitement substitutif, l'évolution est favorable, mais le traitement doit être indéfiniment poursuivi. Il n'y a pas de diabète sucré transitoire chez l'enfant. Il peut exister cependant une rémission de durée variable.
Des rémissions plus ou moins complètes peuvent s'observer mais demeurent transitoires. Ces rémissions peuvent être prolongées chez le nourrisson non hypotrophique.
2.5 Complications
Elles ne sont pas apparemment précoces. Elles sont plus fréquentes si le diabète est mal contrôlé et ne surviennent en général qu'au bout d'une dizaine d'années de moyenne. Cependant, leur début infraclinique montre qu'elles se développent tôt et progressivement.
Ce sont avant tout des complications d'ordre vasculaire. Elles motivent une surveillance périodique.
2.5.1 L'oeil
La lésion essentielle est la rétinite diabétique dont l'aspect le plus caractéristique est le microanévrisme. On peut préciser les lésions par fluoroscopie. La rétinopathie diabétique d'évolution généralement lente peut aboutir à la cécité. La surveillance du fond d'oeil et l'angiofluorographie sont faites périodiquement.
2.5.2 Le rein
Ce sont les glomérulopathies diabétiques. La recherche de l'albuminurie est le moyen de dépistage employé. Mais, les méthodes traditionnelles sont peu sensibles. Le dépistage précoce d'une "microalbuminurie" est un témoin de l'atteinte rénale.
2.5.3 Le système nerveux
La neuropathie diabétique est tardive. Un témoin fréquent mais sans conséquence est l'abolition des réflexes ostéotendineux (notamment rotuliens). Retenir que le système vasculaire du diabétique vieillit précocément. L'infarctus du myocarde chez le jeune diabétique en est une manifestation.
2.5.4 Les complications infectieuses
Elles sont passées au second plan. Rappelons toutefois que la tuberculose est grave, ce qui justifie la vaccination B.C.G. particulièrement recommandée chez le diabétique (les autres vaccinations ne sont pas non plus contre-indiquées).
2.5.5 Retentissement social de la maladie
Il est important, nous n'en rappelons que les points essentiels :
1 - Retentissement familial : commun à toute maladie chronique. A retenir : l'hyperprotection maternelle, les modifications des rapports affectifs avec les parents et les autres frères et soeurs, l'indifférence, voire même la révolte du jeune adolescent. Il faut agir pour qu'il accepte et ne se sente pas différent des autres.

2 - La scolarité : elles est relativement facile. Elle est souvent un moyen de valorisation. Elle doit être la meilleure possible pour préparer la vie professionnelle.

3 - Le choix d'une profession : l'acceptation du diabétique par la société n'est pas un fait acquis. Certaines professions sont justement refusées. D'autres postes (notamment fonction publique) devraient être plus largement ouverts. Les solutions sont toujours individuelles.

4 - Le mariage : il pose le problème de l'hérédité , hérédité de prédisposition, de type autosomique récessif invitant à déconseiller le mariage entre diabétiques et même entre sujets à hérédité diabétique marquée. Le conjoint ne doit pas avoir une hérédité diabétique marquée. Pour le jeune femme, le problème de la grossesse ultérieure doit être envisagé. Les chances pour une femme diabétique, sans complications vasculaires, de mettre au monde un enfant normal sont bonnes. Découverte récente d'une relation entre diabète insulinoprive et groupage HLA : 8,15 ou 18 mais surtout DR 3 et 4.
2.6 Le traitement
Il comporte trois aspects principaux :
- Le respect d'une diététique évitant les apports exagérés en sucre d'utilisation rapide. Le régime doit être un régime normal pour un enfant de même âge. Certaines adaptations : régularité des repas, collations, sont parfois nécessaires.

- L'insulinothérapie substitutive (voir insulinothérapie)

- L'activité physique qui doit être régulière. Facteur de bon développement et d'équilibre chez l'enfant. Elle est possible et recommandée chez le diabétique. Des adaptations quant à l'alimentation et un traitement insulinique sont parfois nécessaires.

Insulinothérapie

L'insuline utilisée peut être d'origine animale (porc essentiellement). Elle peut être "humanisée" et avoir une formule chimique semblable à l'insuline humaine. On dispose aussi d'insuline de synthèse : l'Insuline Lilly (Umuline).

Les insulines peuvent être classées en trois groupes selon leur durée d'activité :
- Insulines ordinaires d'action rapide mais de durée brève (4 à 6 heures). Exemple : Actrapid, insuline ordinaire - Velosuline,...
- Insuline d'action prolongée : insuline protamine zinc - insuline ultra lente (durée en principe de 24 heures).
- Insuline d'action intermédiaire (14 à 16 heures environ). Exemple : Monotard (Insuline de Zn) - NPH Insulatard (Insuline à la protamine).

Le schéma d'utilisation comprend deux injections quotidiennes, parfois même trois injections.
L'utilisation de " stylos injecteurs " peut augmenter le confort du traitement.
Une autre solution possible est la perfusion d'insuline continue (pompe) avec adjonction de "bolus" avant les repas.

Le but du traitement est d'obtenir un contrôle aussi bon que possible : glycosuries faibles ou nulles, glycémies pré et post prandiales acceptables. Eviter les malaises hypoglycémiques sévères et assurer à l'enfant une vie harmonieuse et une croissance normale.

Surveillance : elle s'exerce à différents niveaux :
- Surveillance quotidienne : recherche de la glycosurie et de l'acétonurie (bandelettes réactives). Surveillance biquotidienne de la glycémie (bandelettes). Tenue du cahier de traitement. Cette surveillance a pour base l'éducation sanitaire de l'enfant et de sa famille. Elle doit permettre d'éviter les incidents liés au traitement : hypoglycémies graves et cétoses.

- Surveillance périodique (trimestrielle par exemple). C'est le but des consultations. Elle contrôle la surveillance quotidienne. Le dosage de l'hémoglobine glycosylée (Hb A 1c) permet d'estimer la moyenne des glycémies à moyen terme. On estime également la croissance de l'enfant et son développement pubertaire.

- Surveillance à moyen et long terme
C'est l'évaluation des résultats et le dépistage aussi précoce que possible des complications :

    * bilan ophtalmologique (fond d'oeil - angiographie)
    * bilan vasculaire,
    * bilan de la fonction rénale (microralbuminurie).

Le traitement du D.I.D. apparaît ainsi bien codifié. On dispose de moyens de surveillance qui en permettent une bonne application. Le but essentiel est, tout en permettant une vie scolaire, universitaire, professionnelle et familiale aussi normales que possible, d'éviter la survenue de complications qui peuvent grever lourdement l'avenir.
Il ne faut pas minimiser la contrainte inéluctable du traitement. L'enfant et surtout l'adolescent peuvent juger ces contraintes difficilement acceptables. Nous devons les aider et les soutenir dans leur effort. Des associations telles l'Aide aux jeunes diabétiques, ont été créées dans ce sens. Il faut aussi que les lois sociales favorisent l'intégration du diabétique.
Retard de croissance statural
(orientation diagnostique)
L. De Parscau, M. De Kerdanet

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 2 avril 1999

1 Eléments du diagnostic
1.1 Interrogatoire
1.2 Examen clinique
1.3 Courbe de croissance
1.4 Maturation osseuse
1.5 Examens complémentaires
   

2 Causes de retard de croissance
2.1 Retards de croissance constitutionnels
2.2 Retards de croissance secondaires à une pathologie chronique
2.3 Maladies endocriniennes
2.4 Autres causes
3 Principes du traitement
Objectifs
1. Paramètres d'exploration de la croissance

2. Eléments du diagnostic d'un retard statural

3. Etiologies des retards de croissance.

4. Diagnostic et principes thérapeutiques d'un déficit en hormone de croissance.

 
Introduction
Par définition on parle de retard de croissance statural lorsque la taille est inférieure à la taille moyenne pour l'âge (moins 2 écarts-types), en utilisant les valeurs de référence définies pour une population donnée (courbes de Sempé et Pédron pour la population française). Il suffit donc de disposer d'une mesure précise de la taille et de courbes de référence pour reconnaître un retard de croissance. La recherche d'une cause est essentielle pour le pronostic de taille et la discussion thérapeutique. Elle repose avant tout sur des données cliniques, la courbe de croissance et l'âge osseux qui permettent le plus souvent une première orientation diagnostique.
1 Eléments du diagnostic (tableau I)
Tableau I
Les éléments cliniques d'orientation en présence d'un retard de croissance.
 
1 Antécédents     Taille des parents
Poids et taille de naissance
Pathologie chronique
2 Examen     Signes dysmorphiques
Stade pubertaire
Signes de maladie chronique
3 Courbe de Croissance et âge osseux      
 
1.1 L' interrogatoire
Quand celui-ci est précis, cela économise souvent des examens inutiles :
- La taille des parents évaluée en écarts-types permet d'apprécier la part des facteurs génétiques dans le retard de croissance. On peut admettre que la taille normale de l'enfant est égale à la taille moyenne pour l'âge, corrigée de l'écart-type moyen des parents.

- Le poids et la taille de naissance comparés aux courbes de référence de la croissance foetale permettent de rechercher un retard de croissance intra-utérin.

- Un grand nombre de maladies chroniques peut retentir sur la croissance : il est donc important de rechercher en particulier des antécédents ou des symptômes évocateurs de maladies chroniques rénales, digestives, cardiaques, respiratoires ou métaboliques.
1.2 L'examen clinique
S'attachera à déceler des indices orientant vers l'une des nombreuses étiologies possibles.
- La recherche de signes dysmorphiques, en particulier des signes évocateurs de syndrome de Turner chez la fille doit être systématique. Le caractère harmonieux ou non du retard de croissance peut être apprécié en comparant la taille et l'envergure sensiblement égales chez l'enfant normal.

- Le stade pubertaire est essentiel pour interpréter le retard de croissance d'un enfant. Il sera apprécié par le volume testiculaire chez le garçon et le développement mammaire chez la fille ainsi que la pilosité pubienne et axillaire cotée de 1 à 5 selon le stade de développement.

- L'examen recherche enfin des signes en faveur d'une pathologie chronique rénale, digestive, cardiaque, respiratoire ou métabolique.
1.3 La courbe de croissance
Pierre angulaire du diagnostic, elle apporte une notion dynamique au retard statural. Elle permet d'estimer le début du retard de croissance et de calculer la vitesse de croissance exprimée en cm/an. Cette vitesse de croissance est calculée à partir de deux mesures précises de la taille espacées d'au moins 6 mois et peut-être comparée à des courbes de référence. Il faut donc insister sur la mesure régulière systématique de la taille des enfants lors de consultations. La technique de mesure doit être rigoureuse pour être reproductible : talons joints, genoux tendus, abdomen rentré et tête droite. Chaque mesure est soigneusement notée dans le carnet de santé, document de base pour reconstituer les courbes de croissance. La courbe de poids doit être étudiée parallèlement à la courbe de taille car certaines causes de retard de croissance entraînent une stagnation pondérale précoce (causes digestives par exemple) ; d'autres au contraire s'accompagnent d'une prise de poids normale voire excessive (hypothyroïdie, hypercorticisme).
1.4 La maturation osseuse ou "âge osseux"
Elle est évaluée par une radiographie du poignet et de la main gauche. La comparaison de cette radiographie à un atlas de référence (le plus utilisé est l'atlas de Greulich et Pyle) donne une valeur approximative le plus souvent suffisante en pratique clinique courante. Des méthodes plus précises sont basées sur le calcul d'un score tenant compte de la taille et de l'aspect de chacun des os du carpe et de la main.
1.5 Les examens complémentaires
- Le plus souvent un interrogatoire et un examen bien conduits, une courbe de croissance bien documentée et un âge osseux suffisent à orienter le diagnostic vers l'une des nombreuses causes de retard de croissance. Le bilan complémentaire sera alors fonction de cette orientation initiale.

- Si l'enquête clinique ne permet pas d'orienter le diagnostic étiologique, un minimum d'explorations s'impose pour rechercher une maladie pouvant se révéler par un retard de croissance isolé. Dans ce cadre, on recherchera de parti pris une tubulopathie, une insuffisance rénale, une intolérance au gluten, un déficit en hormone de croissance (GH), et une hypothyroïdie de révélation tardive. Chez une fille, on se méfiera d'un syndrome turnérien. Une première orientation peut donc être donnée par quelques examens complémentaires simples : numération formule sanguine, ionogramme sanguin, créatininémie, TSH et T4 libre, bandelette réactive urinaire, mesure de la diurèse. Il faudra dans un second temps discuter une étude de la sécrétion de GH sous stimulation, une biopsie jéjunale et un caryotype chez la fille.
2 Causes de retard de croissance (Tableau II)
Tableau II
Principales causes de retard de croissance
 
Retards de croissance constitutionnels
- Aberrations chromosomiques (Turner)
- Chondrodysplasies
- R.C.I.U.
- Petite taille essentielle

Retards de croissance secondaires à une maladie chronique
- Cardiaque ou pulmonaire
- Rénale (insuffisance rénale, tubulopathie)
- Digestive (intolérance au gluten)
- Métabolique

Maladies endocriniennes
- Hypothyroïdies
- Insuffisance somatotrope
- Hypercorticisme

Autres causes
- Retard pubertaire simple
- Nanisme psycho-social
 
2.1 Retards de croissance constitutionnels
Ils dépendent essentiellement de facteurs génétiques ou sont secondaires à une affection anténatale. Ils ont en commun une courbe de croissance habituellement assez régulière évoluant en dessous de la courbe - 2DS sans cassure franche et une maturation osseuse normale ou peu retardée (l'âge osseux est sensiblement égal à l'âge chronologique).

- Un grand nombre de maladies chromosomiques peuvent être en cause. Le retard de croissance peut s'intégrer dans un ensemble malformatif assez évocateur pour conduire au caryotype qui mettra en évidence l'anomalie chromosomique ; c'est par exemple le cas de la trisomie 21. Chez la petite fille, le syndrome de Turner doit être soigneusement recherché car le syndrome dysmorphique peut être très discret dans les mosaïques. Au moindre doute, il ne faut pas hésiter à demander un caryotype d'autant que ce diagnostic a maintenant une incidence thérapeutique.

- Les chondrodysplasies regroupent un ensemble de maladies osseuses constitutionnelles génotypiques, héréditaires, liées essentiellement à des troubles du développement des cartilages de conjugaison des os longs et des vertèbres. Ce diagnostic peut être suspecté devant un nanisme dysharmonieux associé à des déformations osseuses variables à préciser par des radiographies du squelette. Si certaines maladies sont faciles à reconnaître comme l'achondroplasie, ou certaines mucopolysaccharidoses en raison de signes cliniques évocateurs, beaucoup d'autres sont difficiles à identifier du fait de leur caractère frustre.

- Le retard de croissance intra-utérin sera facilement reconnu sur le terme, le poids et la taille de naissance. Un rattrapage statural post-natal est possible ; il apparaît alors habituellement avant l'âge de 2 ans. Passé cet âge, le retard statural a toutes chances de persister. Il peut être isolé ou entrer dans le cadre de syndromes particuliers associant des signes dysmorphiques variables et un éventuel retard mental.

- Les petites tailles essentielles représentent de loin la cause la plus fréquente des retards de croissance constitutionnels. Elles seront évoquées devant l'association d'un retard de croissance harmonieux, de petites tailles parentales, d'une vitesse de croissance diminuée et d'une enquête étiologique négative par ailleurs.
2.2 Retards de croissance secondaires à une pathologie chronique
La courbe de croissance peut objectiver une cassure correspondant au début de la maladie chronique. La maturation osseuse est retardée ; l'âge osseux est inférieur à l'âge chronologique.

- Toutes les causes d'hypoxie chronique, qu'elles soient le fait d'une atteinte respiratoire, d'une cardiopathie ou d'une anémie sévère chroniques peuvent retentir sur la croissance. Dans ce cadre, le retard de croissance n'est qu'un symptôme épiphénomène d'une pathologie déjà connue. Il est donc facilement rattaché à la cause.

- Les insuffisances rénales chroniques importantes quelle que soit leur cause s'accompagnent souvent d'un infléchissement de la courbe de croissance. Il en est de même des tubulopathies chroniques parfois évoquées devant une polyurie et reconnues sur les explorations biologiques (protéinurie, glycosurie, calciurie, troubles ioniques, acidose, défaut de concentration des urines). Le retard de croissance peut être le seul signe d'appel de ces maladies rénales justifiant la pratique systématique d'un ionogramme sanguin, d'une créatininémie et d'une bandelette urinaire réactive pour les dépister en l'absence d'orientation étiologique.

- Les carences d'apport et tous les syndromes de malabsorption ou de maldigestion chroniques peuvent retentir sur la croissance. Le plus trompeur est l'intolérance au gluten (maladie coeliaque). Il existe parfois un contexte évocateur avec une diarrhée chronique, une cassure de la courbe de poids après l'introduction du gluten, un météorisme abdominal contrastant avec une amyotrophie et un comportement triste. Mais là encore, le retard de croissance peut être le premier signe d'appel. Seule la biopsie jéjunale peut affirmer le diagnostic en montrant une atrophie villositaire totale.

- La plupart des maladies métaboliques héréditaires ou acquises peuvent affecter la croissance. Elles sont reconnues sur les signes associés au retard de croissance.
2.3 Maladies endocriniennes
Elles s'accompagnent d'un retard de maturation important.

- L'hypothyroïdie congénitale est devenue une cause rare de retard de croissance depuis la mise en place d'un dépistage néonatal. Mais certaines formes d'ectopie ou les formes acquises se révèlent plus tardivement. L'hypothyroïdie entraîne alors un retentissement statural et un retard de maturation osseuse encore plus important. La frilosité, la constipation, la lenteur intellectuelle sont plus inconstants. Les dosages de la TSH et des hormones thyroïdiennes permettent de prouver le déficit et de suspecter son siège central ou périphérique.

- Le déficit en hormone de croissance (GH)
La forme isolée idiopathique débute souvent entre 2 et 3 ans, parfois plus tard par un retard de croissance harmonieux avec une vitesse de croissance diminuée et un retard de maturation osseuse. Ces enfants ont souvent un visage triangulaire avec un front bombé et un petit menton et un excès de tissu adipeux sur le tronc. La notion d'une anoxie néonatale, d'une naissance par le siège et d'anomalies de la ligne médiane sont parfois retrouvées. Des hypoglycémies récurrentes néonatales et un micropénis sont évocateurs.
Plus évocateur est le contexte d'un déficit secondaire à une pathologie intracrânienne (neurochirurgie, radiothérapie, tumeur cérébrale,...)
Le déficit en hormone de croissance doit être confirmé par un test de stimulation et de sécrétion de GH (par arginine insuline ou propranolol glucagon). En cas de déficit le pic de GH est inférieur à 10 ng/ml. Dans les cas douteux une étude du profil de sécrétion nocturne de GH peut être nécessaire.
Si le déficit en GH est confirmé, le bilan sera complété par une étude de la sécrétion des autres stimulines anté-hypophysaires et par des examens à la recherche d'une cause tumorale (fond d'oeil, radiographie de selle turcique, scanner ou IRM). Le crâniopharyngiome est la tumeur la plus fréquente chez l'enfant. Elle est souvent calcifiée et érode la selle turcique.

- Les hypercorticismes seront facilement reconnus cliniquement d'autant que les plus fréquents sont iatrogènes secondaires à une corticothérapie prolongée. La maladie de Cushing est exceptionnelle chez l'enfant.
2.4 Autres causes
- Retard de croissance simple. Il est plus fréquent chez le garçon que chez la fille. La notion d'une puberté retardée est habituellement retrouvée chez l'un des 2 parents. Ces enfants présentent un ralentissement parallèle de la croissance staturale et de la maturation osseuse dont le début est parfois précoce, dès l'âge de 7 ou 8 ans. A l'âge théorique de la puberté, le pic de croissance habituel n'apparaît pas puisque la puberté est retardée et le retard statural s'accentue rapidement. Mais la courbe de croissance rejoindra son canal antérieur à la fin de la puberté et la taille définitive n'est que modérément diminuée. Ces retards pubertaires peuvent être difficiles à distinguer des hypogonadismes centraux ou périphériques en particulier chez la fille. Des explorations endocriniennes peuvent être nécessaires pour lever ce doute.

- Le nanisme psychosocial encore appelé nanisme de frustration ou par carence psycho-affective est la conséquence des difficultés relationnelles entre l'enfant et son entourage. Il sera évoqué sur le contexte social et familial plus que sur les explorations biologiques dont les résultats sont variables ; la sécrétion de GH en particulier peut être normale ou diminuée. La séparation de l'enfant de son milieu permet la correction des signes cliniques et biologiques.
3 Principes du traitement
Le traitement d'un retard de croissance doit toujours commencer par le traitement de la cause lorsqu'il est possible. C'est souvent le cas des retards de croissance secondaires à une maladie chronique, une atteinte endocrinienne ou une carence psycho-affective. En revanche, un traitement étiologique des retards de croissance constitutionnels est exceptionnellement possible.

La disponibilité de l'hormone de croissance biosynthétique a ouvert de nouvelles perspectives thérapeutiques. Le premier bénéfice a été de pouvoir donner une quantité suffisante d'hormone de croissance à tous les enfants présentant un déficit somatotrope. Mais l'hormone de croissance peut-elle aussi faire grandir des enfants ne présentant pas de déficit ? Une réponse partielle est apportée par les essais thérapeutiques dans le syndrome de Turner, qui montre une amélioration du pronostic de la taille définitive. L'association de petites doses d'hormones sexuelles améliorerait encore ce pronostic. Dans le cadre d'un protocole géré par l'association France Hypophyse, le syndrome de Turner est actuellement une indication reconnue de traitement par l'hormone de croissance dans les retards de croissance avant que la puberté ne soit trop avancée. D'autres essais de traitement par l'hormone de croissance dans les retards de croissance intra-utérins, les très petites tailles familiales, l'insuffisance rénale chronique et d'autres maladies, sont en cours. Il faut attendre les résultats de ces protocoles thérapeutiques coûteux et contraignant (une injection quotidienne sous-cutanée pendant une durée prolongée) avant d'élargir à long terme les indications. Il faut par ailleur s'assurer de l'absence d'effets secondaires à long temre de la GH, utilisée à des doses plus élevées que dans le déficit somatotrope.

Le retard simple de la puberté d'évolution spontanément favorable ne nécessite le plus souvent aucun traitement. Cependant, le contexte psychologique peut conduire à traiter les garçons de plus de 15 ans par de faibles doses d'androgènes ou des gonadotrophines chorioniques pour stimuler le démarrage pubertaire.

Une approche totalement différente consiste en un allongement des os des membres inférieurs réalisé par des chirurgiens orthopédiques. Il s'agit d'un traitement très lourd réservé à des cas exceptionnels très sélectionnés.

Enfin, les parents et le médecin auront également la tâche d'aider l'enfant à accepter l'idée d'une petite taille si, malgré le traitement, le pronostic reste inférieur à ses espérances.
 

En conclusion : cette approche des retards de croissance, volontairement schématique pour être plus didactique, permettra de reconnaître à moindres frais pour l'enfant les étiologies les plus fréquentes. L'attitude thérapeutique doit s'abstenir de tout enthousiasme inconsidéré tout en suivant de près l'évolution des études en cours qui conduiront probablement à un élargissement prudent des indications de traitement par l'hormone de croissance biosynthétique.

"POUR EN SAVOIR PLUS"
1. CHATELAIN P. - Retards de croissance : des progrès du diagnostic à l'aube de la thérapeutique.
Pédiatrie, 1987, 42, 331-7.

2. BRAUNER R, RAPPAPORT R. - Retards de croissance ; démarche diagnostique et possibilités thérapeutiques.
Médecine infantile, 1990, n° 1, 5-11

3. PIERSON M. - Retard de croissance staturale ; Etiologie, diagnostic, évolution et pronostic.
Rev Prat (Paris), 1990, 40, n° 10, 947-51

4. CHATELAIN P, DE PARSCAU L, NICOLINO M. - Hormone de croissance biosynthétique ; actualités et perspectives thérapeutiques.
Pédiatrie, 1989, 44, 175-82.
Pathologie de la puberté
M. De Kerdanet

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 2 avril 1999

1 Absence et retard pubertaire
1.1 Hypogonadisme hypergonadotrophique
1.2 Retards pubertaires secondaires à une cause connue
1.3 Retards simples et insuffisance gonadotrope
1.4 Conduite à tenir devant un retard pubertaire
   

2 Précocités pubertaires
2.1 Puberté précoce vraie ou centrale
2.2 Pseudo-puberté précoce
2.3 Puberté précoce dissociée
2.4 Conduite à tenir devant une suspicion de puberté précoce
Aspects cliniques de la puberté
Cette période comporte plusieurs types de modifications :
- génitales : acquisition de la maturation sexuelle
- corporelles : poussée de croissance, modification de la silhouette et des proportions du corps
- psychiques : modifications de la personalité et du comportement

Le début se situe en moyenne vers l'âge de :
- 9-10 ans pour les filles ;
- 12 ans pour les garçons.
Le processus dure environ 6 ans et est achevé, en moyenne vers 16 ans chez la fille , vers 18 ans chez le garçon.
Evaluation du développement pubertaire en pratique courante
Elle est obtenue par des moyens simples : observation et mesure.
- orchidomètre, double décimètre, toise.
- stades de TANNER.

A cette évaluation clinique est associée une évaluation paraclinique pouvant comporter :
- évaluation de la maturation squelettique avec la radiographie de la main et du poignet gauches (par convention internationale)
- étude de l'aspect des organes génitaux internes chez la fille par l'échographie pelvienne.
- enfin, mais surtout pour l'étude d'anomalies, les examens biologiques sont d'une grande utilité.
1 Absence et retards pubertaires
Il existe une difficulté à distinguer le retard pubertaire "simple" de l'hypogonadisme. Le problème survient plus souvent chez le garçon, il est le plus souvent intriqué avec un retard de croissance.

On parle de retard lorsque la puberté n'a pas débuté 2 ans après les limites habituelles, c'est à dire 14 ans chez le garçon et 12 ans chez la fille. Cette définition est d'ordre statistique (âge dépassant 2 écarts-types au dessus de la moyenne) et on y englobe donc 3% de sujets normaux situés au delà du 2° écart-type de la répartition gaussienne.

Les premiers éléments d'orientation sont le rapport entre l'âge statural (AS) et l'âge osseux (AO), et la réponse des gonadostimulines (FSH et LH) à la stimulation par le LHRH.
1.1 Hypogonadisme hypergonadotrophique
(Réponse très élevée à la LHRH)
1.1.1 Chez la fille
- Le syndrome de TURNER sera recherché en priorité - caryotype.
- La dysgénésie gonadique pure ne comporte pas d'anomalie chromosomique.
- Toute destruction ou lésion des ovaires peut être connue par l'analyse des antécédents : torsion, traumatisme, radiothérapie, chimiothérapie, chirurgie
1.1.2 Chez le garcon
- Anorchidie congénitale ou acquise : examen clinique et interrogatoire permettront de retenir ce diagnostic.
- Lésion de radiothérapie ou de chimiothérapie au niveau des gonades.
- (Syndrome de KLINEFELTER : puberté non retardée mais incomplète).
1.1.3 Dans les deux sexes : syndromes polymalformatifs variés
(voir ouvrages spécialisés)
1.2 Retards pubertaires secondaires à une cause connue
(ce contexte pathologique domine)

C'est à dire association du retard pubertaire à un retard staturo-pondéral, à un retard de la maturation osseuse et à une maladie causale (viscérale, métabolique ou endocrinienne)

- toute maladie chronique grave de l'enfance (ex. insuffisance rénale, asthme)
- malnutrition par maladie cœliaque ou anorexie mentale
- maladies endocriniennes : déficit en GH très souvent associé à une maturation et donc une puberté retardées, hypothyroïdie, maladie de CUSHING, hyperprolactinémie, et toute intervention sur l'hypophyse.
1.3 Retard simple et insuffisance gonadotrope
(réponse absente ou basse à la LHRH)
1.3.1 Retard Simple (ou adolescence différée )
- La puberté se développe après15 ans chez le garçon, 13 ans chez la fille.
- Beaucoup plus fréquent chez le garçon et souvent mal tolérée psychiquement à des degrés divers.
- Dans ce cas il existe une cohérence dans l'état de développement : Age statural = Age osseux = développement pubertaire
- Il existe souvent d'autres cas dans la famille : parents, fratrie.
- Chez le garçon, le volume testiculaire (environ 4 ml) est supérieur à celui d'un enfant.
1.3.2 Insuffisance Gonadotrope
- Age Statural et Age Osseux sont en moyenne moins retardés.
- Le volume testiculaire est faible (< 4 ml).
- On retrouve souvent un micropénis (taille de la verge inférieure à 4,5 cm) et ou une cryptorchidie traitée ou opérée uni ou surtout bilatérale.
- Quand s'y associe une anosmie, cette entité constitue le syndrome de KALMAN-DE MORSIER ou Dysplasie Olfacto-Génitale. Il existe souvent des cas familiaux d'hypogonadisme ou d'anosmie.
1.4 Conduite à tenir devant un retard pubertaire
1.4.1 Interrogatoire
- On recherchera les antécédents personnels périnataux et familiaux : taille et notions de retard pubertaire chez les parents et dans la fratrie.
- On recherchera les antécédents pathologiques notables : cryptorchidie, pathologies tumorales et leur traitement.
- Le carnet de santé permettra également d'établir une courbe de croissance.
1.4.2 Examen Clinique
- Etablir les stades de TANNER et examiner les organes génitaux externes.
- Rechercher des signes associés : dysmorphie, anosmie, autres anomalies endocriniennes, anomalies neurologiques, ophtalmologiques…
1.4.3 Examens Complementaires
- Faire systématiquement radiographie poignet et main gauches pour âge osseux et échographie pelvienne chez la fille.
- Test au LHRH mais peu discriminatif s'il est négatif.
- Test aux ß HCG chez le garçon (donne la valeur fonctionnelle du tissu testiculaire).
- Recherche de déficits hypophysaires associés en GH, TSH…
- Le taux de SDHA peut aider : haut dans l'insuffisance gonadotrope, bas dans le retard simple.
- En fonction de l'orientation : neuroradiologie et caryotype pourront établir le diagnostic étiologique.
1.4.4 Traitement
- Dans le retard pubertaire simple du garçon, problème le plus fréquent, la mise en route d'un traitement dépend des circonstances et en particulier de la tolérance psychologique : traitement par androgènes à faible dose, testostérone ou oxandrolone sur 3 à 6 mois.
- Substitution hormonale : testostérone chez le garçon, œstroprogestatifs chez la fille.
- Traitements séquentiels HMG-ßHCG et LHRH par pompe en injections sous-cutanées sont en fait décevants et plutôt réservés à l'âge adulte pour traiter les problèmes de stérilité souvent associés.
2 Précocités pubertaires
Définition : Survenue de la puberté avant 8 ans chez la fille, avant 10 ans chez le garçon. Définition statistique qui englobe les 3% de sujets normaux.
On doit distinguer la puberté précoce vraie des pseudo-pubertés précoces et des pubertés précoces partielles.
2.1 Puberté précoce vraie ou centrale
Due à une activation précoce de l'axe hypothalamo-hypophyso-gonadique.
2.1.1 Clinique
- Plus fréquent dans le sexe féminin.
- Premier pic de fréquence : 3 ans - 2° pic : 5 ans.
- Apparition de caractères sexuels secondaires, le plus souvent développement des seins et/ou de la pilosité pubienne.
- Chez le garçon :bapparition de CSS dont l'augmentation bilatérale et symétrique du volume testiculaire.
- Accélération de la vitesse de croissance.
- Accélération de la maturation osseuse.
2.1.2 Etiologies
Idiopathique :
- dans 80% des cas chez la fille,
- dans 20 % des cas chez le garçon.
2.1.2.1 dans un contexte connu :
- Gliome du chiasma (RECKLINGHAUSEN).
- Radiothérapie de l'encéphale.
- Hydrocéphalie.
2.1.2.2 dans un contexte facilement repérable :
- Anomalies cutanées, neurologiques ou ophtalmologiques.
- Anomalies osseuses.
(à part car "périphérique" syndrome de MAC-CUNE ALBRIGHT)
2.1.2.3  dans un contexte ou elle paraît isolée
Þ RECHERCHE D'UNE TUMEUR (gliome, hamartomes, autres tumeurs intra-crâniennes - astrocytomes, dysgerminomes secrétants des ß HCG)
- radiographie de crâne.
- examen ophtalmologique (champ visuel).
- scanner - IRM.
- marqueurs tumoraux.

Les tumeurs secrétant des ß HCG se présentent comme une puberté centrale mais les ß HCG remplacent la LH effondrée au test au LHRH comme la FSH
2.1.3 Traitement
En dehors du traitement éventuel de la pathologie causale.
Deux motivations :
- petite taille finale,
- tolérance psychologique.

Décapeptil ® injection IM mensuelles. La premiere injection chez la fille est entourée d'un traitement oral par antiœstrogènes (androcur®) pour éviter les effets d'une privation œstrogènique (hémorragie génitale).
2.2 Pseudo-puberté précoce
- Elles sont beaucoup plus rares, souvent faciles à repérer.
- Elles peuvent être isosexuelles ou hétérosexuelles.
- Le test au synacthène constitue un outil diagnostic de base.
2.2.1 Hyperplasie Congénitale Des Surrenales (forme à révélation tardives)
- virilisation chez la fille,
- virilisation chez le garçon avec testicules de petit volume.
2.2.2 Origine Tumorale
- L'enquête étiologique vise alors à repérer l'origine de la sécretion des androgènes ou des œstrogènes.
- Tumeur surrénalienne (secrétion d'androgènes, rarement d'œstrogènes).
- Tumeur ovarienne (secrétion d'œstrogènes et parfois d'androgènes).
- Tumeur testiculaire (l'un reste de petit volume, sécrétion de ß HCG).
- (Tumeur secrétant des ß HCG).
2.3 Puberté précoce dissociée
Apparition d'un caractère sexuel isolé : à différencier du début d'une puberté précoce vraie

    * prémature thélarche = seins chez la fillette.

      entre 1 et 3 ans, faisant parfois suite à l'intumescence mammaire post-natale qui peut persister jusqu'à 18 mois. L'évolution se fait vers la régression spontanée.

    * prémature pubarche ou ardrénarche = pilosité pubienne

      par élévation des androgènes surrénaliens, à différencier d'une forme rare d'hyperplasie congénitale.

    * prémature ménarche = hémorragie génitale isolée

2.4 Conduite à tenir devant une suspicion de puberté précoce
Le problème le plus fréquent sera, chez la fille d'établir la réalité du caractère précoce de cette puberté, chez le garçon d'établir le diagnostic étiologique. Il faut garder à l'esprit que tout facteur accélérant la maturation peut secondairement aboutir à un état de maturation avancée qui peut comporter une puberté précoce vraie.
2.4.1 Interrogatoire
On recherchera les antécédents personnels périnataux et familiaux : taille et notions d'une puberté avancée chez les parents et dans la fratrie.On recherchera les antécédents pathologiques notables : pathologies tumorales et leur traitement.
Le carnet de santé permettra également d'établir une courbe de croissance.
2.4.2 Examen clinique
- Etablir les stades de TANNER.
- Etablir le caractère central ou non de ce développement pubertaire.
- Rechercher des signes associés : dysmorphie, autres anomalies endocriniennes, anomalies neurologiques, ophtalmologiques…
2.4.3 Examens complémentaires
- Faire systèmatiquement radiographie poignet et main gauches pour âge osseux et échographie pelvienne chez la fille.
- Test au LHRH, testostérone.
- Le taux sérique d'œstradiol est peu fiable, on lui préfère l'urocytogramme ou le frottis vaginal (réalisation plus délicate chez la petite fille).
- Test au Synactène®, en particulier si orientation vers une pseudo-puberté précoce.
- Marqueurs tumoraux : ßHCG et alpha-fœto-proteines.
- En fonction de l'orientation : imagerie cérébrale, abdominale, gonadique pourront établir le diagnostic étiologique.
2.4.4 Traitement
- Le traitement étiologique comportera selon les cas chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie, traitement d'une hyperplasie des surrénales par hydrocortisone.
- Le traitement par DECAPEPTYL® est très efficace et permet la régression partielle des CSS, il doit toujours être associé à une attitude de soutien devant des manifestations souvent difficiles à vivre pour l'enfant et sa famille.
Dermatologie
C. Jézéquel

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 3 avril 1999

1 Dermatoses du nouveau-né
1.1 Erythème fessier
1.2 Maladie de Leiner-Moussous
1.3 Eczéma constitutionnel du nourrisson
2 Dermatoses de l'enfant
2.1 Impétigo
2.2 Prurigo strophulus
2.3 Gale
3 Angiomes de l'enfant
   

3.1 Angiomes tubéreux
3.2 Angiomes sous-cutanés
3.3 Angiomes plans
4 Acné
4.1 Physiopathologie
4.2 Acné de l'adolescent
4.3 Acné du nourrisson
5 Pédiculose
6 Verrues
Objectifs
1. Indiquer les raisons de la fréquence des érythèmes fessiers du nourrisson.

2. Citer les principales étiologies des érythèmes fessiers du nourrisson et donner les principes du traitement local.

3. Donner les éléments qui caractérisent la maladie de Leiner Moussous et indiquer les principes du traitement.

4. Citer les caractères cliniques qui permettent de porter le diagnostic d'eczéma atopique du nourrisson et rédiger l'ordonnance du traitement d'un eczéma débutant non infecté, d'un eczéma étendu et infecté.

5. Indiquer les recommandations générales à donner aux parents d'un nourrisson atteint d'eczéma atopique.

6. Rédiger l'ordonnance du traitement d'un impétigo, d'un prurigo.

7. Décrire les signes cliniques évoquant une gale et rédiger l'ordonnance du traitement d'une gale simple ou compliquée.

8. Définition et conduite à tenir devant un angiome tubéreux, un angiome plan.

9. Indiquer les éléments anamnestiques et cliniques qui permettent de poser le diagnostic d'acné de l'adolescent et en indiquer les principes de traitement.

10. Rédiger l'ordonnance du traitement d'une pédiculose du cuir chevelu.

11. Rédiger l'ordonnance du traitement des verrues simples.

Nombreuses sont les affections dermatologiques au cours de l'enfance. Seules les plus fréquentes seront retenues, tout d'abord au premier âge où elles sont assez particulières, puis chez l'enfant plus grand.
1 Dermatoses du nouveau-né
Il importe de rappeler qu'à cette période de la vie la peau diffère notablement de celle de l'adulte et de celle d'un enfant plus âgé. La couche cornée est mince. La peau du nouveau-né est particulièrement perméable à ce qu'on y dépose et elle n'oppose qu'un barrage insignifiant à la pénétration des germes. Son pH est alcalin, ce qui la rend encore plus sensible aux infections. Celles-ci réclament soit un simple traitement local, soit une antibiothérapie générale selon l'étendue et l'extension. Dans le très jeune âge, les glandes sudoripares sont peu fonctionnelles : au contraire, les glandes sébacées sont hyperactives, notamment chez le nouveau-né, probablement en raison de l'excès d'androgènes d'origine maternelle, ce qui explique les miliaires sébacées du nouveau-né sous forme de petits points discrètement jaunâtres au niveau du nez, du front, du menton.

Un nouveau-né peut présenter :
- Des lésions dermatologiques sans gravité qu'il importe de connaître :

    * de petits angiomes, plus ou moins rouges, qui siègent le plus souvent entre les sourcils et les cheveux de la base à la nuque et communément appelés "aigrettes". Ils sont bénins.
    * il faut aussi mentionner la tâche mongolique qui caractérise nombre d'enfants d'origine méditerranéenne et surtout asiatique. Elle siège sur la région sacrée, les fesses et la face postérieure des cuisses. Le plus souvent, elle est d'une seule tenue, d'aspect géographique, mais elle peut être déchiquetée et fragmentée. Il ne faut pas la prendre pour une ecchymose comme cela arrive parfois. Elle est due à un trouble de migration et de maturation des mélanophores. Elle disparaît toujours, souvent assez tard, vers 3 ou 4 ans.

- Des lésions plus graves et plus tenaces, heureusement rares, simplement citées, telles les dermatoses congénitales, particulièrement, les épidermolyses bulleuses, les icthyoses...

- En pratique courante, la dermatologie quotidienne du nourrisson est représentée par :

    * l'érythème fessier,
    * la maladie de Leiner-Moussous,
    * l'eczéma constitutionnel ou atopique.

1.1 L'érythème fessier
L'érythème fessier semble être la dermatose la plus répandue, se manifestant sous des aspects variés : étendue ou limitée, localisée ou plus volontiers dans les plis, ou sur les régions convexes...

Il faut insister sur le fait que cette peau déjà fragile du jeune enfant est, à ce niveau, soumise à des conditions particulières. Elle reste, en effet, en contact prolongé avec les selles et les urines, le plus souvent dans des couches ou des culottes occlusives qui favorisent la macération du siège. De plus, ces couches, ces culottes, en caoutchouc ou en matière plastique, de même que les produits de lavage avec des détergents divers, sont d'autant d'allergènes qui peuvent créer ou aggraver une dermatose. Les produits de toilette peuvent avoir une action topique indésirable : la peau riche en sébum à cet âge, est déjà grasse.

Ainsi plusieurs facteurs peuvent entraîner un érythème fessier :
- l'hyperacidité des selles,
- la fermentation ammoniacale de l'urine,
- l'irritation provoquée par les couches, les détergents, le plastique des culottes,
- l'infection microbienne ou mycosique.

Il est peut-être excessif d'affirmer que telle cause ne peut donner que tel type de lésion mais la prédominance au début d'un aspect doit orienter vers une étiologie particulière. L'analyse de la dermatose fessière doit tenir compte :
- de son aspect érythémateux simple, papuleux ou papulo-érosif,
- de sa topographie plus ou moins limitée,
- de sa prédominance péri-orificielle éventuellement.

En tenant compte de ces facteurs, il est en général facile de discerner la cause prédominante, sinon unique, de l'irritation.
1.1.1 Erythème fessier par hyper-acidité des selles
C'est un érythème particulièrement érosif, siégeant près de l'anus, s'étendant de façon centrifuge. Il est classique de souligner qu'il frappe surtout les enfants nourris au sein et qu'il se trouve souvent associé avec le syndrome bien connu de diarrhée commune post-prandiale avec rapidité du transit. Le lait de la mère ne contient pas d'autres glucides que du lactose alors que les laits industriels sont sucrés au saccharose, au dextrine-maltose, voire au miel. L'intestin du nourrisson n'ayant pas toujours une lactase parfaitement active dégrade mal le sucre que les bactéries intestinales transforment en acides organiques très irritants pour la peau. Les laits modernes sont maintenant sucrés au lactose et le mécanisme reste probablement valable pour eux.

En présence d'un tel cas, il ne faut pas interrompre l'alimentation au sein.
Sur le plan local, il faut s'abstenir de toute corticothérapie. Une simple pâte à l'eau, à l'oxyde de zinc, au rôle protecteur suffira pour obtenir la guérison qui survient en quelques jours.
1.1.2 Erythème dit "ammoniacal"
Par opposition à ce type d'érythème fessier qui s'observe dans les premiers mois de vie chez le nourrisson au sein, l'érythème dit "ammoniacal" survient plus volontiers chez un enfant plus âgé et à l'alimentation déjà diversifiée. C'est un érythème peu érosif, siégeant presque exclusivement sur les parties convexes au niveau des langes imbibés d'urines : fosses lombaires, face intérieure des cuisses. Il est dû à la dégradation de l'urée urinaire en ammoniaque par le bactérium ammoniogène.

Le traitement est assez simple. Fesses à l'air le plus possible et changes fréquents. Localement, une pâte d'oxyde de zinc suffira pour attendre la guérison.
1.1.3 Erythème de contact (intolérance)
Les habitudes de la civilisation moderne sont responsables du 3ème type d'érythème fessier. Il s'agit de celui qui est lié à une intolérance. Cette dernière peut être due :
- au textile synthétique des langes,
- au plastique de la culotte,
- aux produits de lessive et additifs du genre anticalcaire, assouplissements textiles, etc...

L'érythème qui en résulte est un érythème pouvant avoir plusieurs aspects recouvrant à l'origine les parties convexes antérieures et postérieures. Plus marqué sur la face antérieure, il dessine assez particulièrement un W (LARREGUE), l'ensemble étant parfaitement limité à la surface recouverte par les langes ou la culotte. Celle-ci sera naturellement incriminée devant les lésions cerclant la racine des cuisses et ceinturant le tronc.

Il faut laisser au maximum à l'air, utiliser des couches en coton lavées au savon, faire les soins de toilette avec un savon surgras, ensuite protéger la peau avec une pâte à l'eau.
1.1.4 Erythème d'étiologie infectieuse
Il doit être évoqué, devant un érythème débutant aux plis, pouvant prendre un aspect en Y dont les branches partent de chacun des plis inguino-cruraux pour remonter en arrière en une ligne unique jusqu'au sommet du pli interfessier. Cet érythème est rouge vif, volontiers érosif et extensif. Il est plus évocateur d'une mycose à candida lorsqu'il est de couleur rouge sombre. La mère en rattachera volontiers l'apparition à une poussée dentaire ou à une infection rhino-pharyngée banale.

Il importe peu de chercher à identifier un germe en dehors de cette suspicion de mycose. Le traitement met en jeu des antiseptiques colorés ou non. Il doit être parfaitement ordonnancé et expliqué pour pouvoir être appliqué efficacement à domicile :
- commencer par un bain de permanganate à 1/10 000ème, et plutôt que de faire délivrer à la mère des paquets de paillettes ou des comprimés dont la dissolution est imparfaite et provoquerait des brûlures du siège, prescrire une solution concentrée à diluer extemporanément.
- le bain achevé, on badigeonnera les lésions d'éosine ou de bleu de méthylène en solution aqueuse à 1 à 2 %, le plus souvent très active. Ces solutions colorées qui tachent le linge ne sont pas toujours appréciées. Il existe de nombreux antiseptiques incolores (Dermachrome, Solubacter, Héxomédine, ...) dont l'efficacité semble aussi régulière mais qu'un siège irrité tolère moins. S'il s'agit d'une mycose, employer Gel de Daktarin, Trimysten, ...

En résumé : l'érythème fessier du nourrisson est, en grande partie, évitable. Quelques mesures suffisent, en général, à prévenir l'apparition ou à limiter le développement. Il faut insister auprès des mères pour que, dans la mesure du possible, l'enfant soit changé souvent, que son siège soit tenu propre, lavé et soigneusement asséché, enduit d'une crème de protection peu occlusive ou talqué, mais jamais pommadé et talqué, ce mélange produisant de petites concrétions irritantes.
Conduite thérapeutique
Dans tous les cas, quelle que soit l'étiologie, il faut appliquer des règles bien précises qui constituent en quelques sorte le traitement symptomatique.
1 - Traitement symptomatique :
- Dans toute la mesure du possible les régions atteintes doivent être laissées à l'air (nu partiel ou total),
- Supprimer les causes d'irritation : aussi bien les agents en cause (textiles de l'habillement, en particulier couches) que les produits de toilette,
- Utiliser le savon de Marseille ou un savon surgras (Roche Posay, Lutsine, Roc, Cavaillés),
- Deux à trois fois par semaine, faire prendre un bain antiseptique avec du permanganate de potassium à 1/20 000, ou un savon liquide (par exemple : Septivon, 2 cuillères à soupe pour 10 litres d'eau), bien rincer,
- Après la toilette, la peau peut être protégée avec une préparation du type pâte à l'eau Roche-Posay, Aloplastine, Mitosyl, ...
2 - Traitement étiologique :
La recherche d'une étiologie (circonstances d'apparition, mode de début, analyse et topographie de la lésion, son extension et son évolution) est essentielle et doit guider une thérapeutique s'efforçant d'être spécifique ce qui n'est pas toujours facile, plusieurs étiologies pouvant s'intriquer dès le départ ou se succéder.

- Par hyperacidité des selles :

    * Carbonate de chaux, paquets à 0,25 g, un avant chaque tétée,
    * Adjonction à la tétée de dérivés du lait de vache.

- Erythème de contact (intolérance) :

    * Langes en coton lavés au savon de Marseille.

- Erythème infectieux :

    * Tous les matins, bain pendant 10 minutes environ, dans une solution de permanganate de potassium à 1/10 000ème (un paquet de 1 g pour 10 litres d'eau ou mieux à partir d'une solution mère de permanganate préparée en pharmacie).

    * Après séchage, appliquer en tampon sur les lésions :

      - soit des préparations type :
          o Eosine : 2 g
          o Eau distillé : q.s.p. 100 g.
      - ou solution de Millian à l'eau :
          o Cristal violet
          o ou violet de méthyle  25 g
          o eau distillée q.s.p. 100 g.

            Ne pas employer de solutions alcooliques plus pénétrantes mais qui sont douloureuses sur des épidermes irrités. - soit des spécialités : Hexomédine, Cetavlon crème, Dermachrome, Solubacter.

    * Le bleu de méthylène à l'eau est antibactérien.
    * Le violet à l'eau, la solution de MILLIAN sont antilevuriques.
    * Les préparations antifongiques, les antibiotiques sont utilisés seulement en fonction de l'étiologie.
    * Les corticoïdes locaux ont peu d'indications.

Dans chacune de ces trois éventualités :

    * Appliquer sur les lésions, 2 fois par jour, au doigt ou à la spatule :  ALOPLASTINE simple : 1 tube de 90 g

      ou une pâte avec :
      . oxyde de zinc
      . talc q.s.p. 100 g
      . glycérine
      . eau de chaux
      . onguent Bépanthène

1.2 Maladie de Leiner-Moussous

C'est une dermatose assez répandue et d'un tout autre aspect du fait de sa généralisation sur la majeure partie du corps.
C'est souvent par un érythème fessier d'apparence banale que la maladie se manifeste dans la 2ème ou la 4ème semaine de vie, parfois plus tôt. Mais un examen attentif aura remarqué que le véritable début se fait à partir d'un intertrigo inguino-crural.
Parallèlement, il existe :
- d'autres localisation d'intertrigo : cervicale, axillaire, rétro-auriculaire,
- un érythème du cuir chevelu (Dermite bipolaire).

La maladie peut se limiter à ces lésions dans sa forme atténuée. Cependant, il y a dans la plupart des cas, tendance à l'extension à partir de ces pôles inférieur et supérieur.

L'érythème s'étend de façon centrifuge, atteignant les fesses, les organes génitaux, les cuisses, les membres inférieurs souvent dans leur totalité, gagnant vers le haut l'abdomen et souvent précédé, en peau saine, de quelques médaillons érythémato-squameux.

Progressivement, la rougeur tend à recouvrir le corps tout entier, l'intertrigo axillaire se propageant sur le thorax et les membres supérieurs tandis que, pour sa part, l'intertrigo rétro-auriculaire se dirige vers les oreilles, le front, les joues.

Il n'y a ni vésiculations, ni suintement.

On voit apparaître en même temps, sur le cuir chevelu, une véritable carapace emprisonnant les cheveux et les sourcils, de couleur blanc grisâtre, qui se laisse facilement enlever par décapage, laissant apparaître une peau mince, rouge, saignant facilement.

Les lésions peuvent prédominer à l'un ou l'autre pôle (fessier ou céphalique) ; lorsque tout le corps est envahi, on a alors la grande érythrodermie desquamative classique car la literie de l'enfant va être parsemée pendant plusieurs jours de squames larges, épaisses, grasses et abondantes.

L'état général reste, le plus souvent, bon, même si la courbe pondérale n'est pas satisfaisante. L'enfant n'est pas fiévreux. Il n'y a pas d'adénopathies et l'on doit souligner particulièrement l'absence du prurit.

Malgré ces manifestations spectaculaires la maladie guérit et disparaît sans séquelles ni cicatrices avant le 3ème ou le 4ème mois.

Dans certaines formes localisées, on peut avoir tendance à confondre la maladie de LEINER-MOUSSOUS avec la dermite séborrhéique isolée du cuir chevelu communément appelée "croûtes de lait" et qui n'est qu'une exagération chez le nourrisson de l'hypersécrétion sébacée déjà soulignée à cet âge.

De nombreuses hypothèses pathogéniques ont été avancées pour expliquer cette curieuse affection mais aucune n'a été prouvée. On sait qu'elle n'est pas l'apanage des enfants nourris au sein et qu'elle survient tout aussi bien dans l'allaitement artificiel. Les théories infectieuses reposent sur la réalité d'épidémies de crèches, de l'efficacité des antiseptiques et accusent des streptocoques ou des staphylocoques peu virulents ou encore des levures. Récemment ont été rapportées des formes familiales dans lesquelles ont été mis en évidence un déficit héréditaire en fraction C5 du complément. Cette constatation est relativement rare. On pense plus généralement que la maladie de LEINER-MOUSSOUS n'est qu'un mode réactionnel du nourrisson en réponse à des agressions diverses.
L'acquisition la plus récente est le rapport qui paraît exister avec le psoriasis.
Traitement
1 - Précautions :

    * changer souvent l'enfant. Eviter la macération dans les urines,
    * le tenir de préférence déshabillé à l'air dans une pièce bien chauffée,
    * supprimer les couches et vêtement de laine ou en tissus synthétiques,
    * utiliser des langes et des chemises en coton,
    * les couches seront lavées au savon de Marseille, sans lessive et bien rincées.

2 - Une à deux fois par jour, bain, dans une solution de permanganate de potassium à 1/10 000 (1 g pour 10 litres d'eau, ou mieux, à partir d'une solution-mère de permanganate). Bain de 10 à 15 minutes. Eviter tout contact de la solution avec le visage. Savonnage après bain (Septivon, Lactacyd liquide, Bétadine Schub, ...).

3 - Appliquer après chaque bain sur les lésions avec un morceau de coton :

    * Solution de Millian à l'eau :

      . Vert de méthyle
      . Cristal violet  0,25
      . (ou violet de méthyle)
    * . eau q.s.p. 100 cm3 Laisser sécher. ou solution à l'éosine acqueuse à 2 %.

4 - Appliquer :

- Sur le corps : (appliquer sur les lésions)

    * soit Crème de DALIBOUR

      . Sulfate de cuivre : 0,05 g
      . Sulfate de zinc : 0,50 g
      . Oxyde de zinc : 2,5 g
      . Eau
      . Lapoline : 6 g
      . Vaseline : 15 g
      ou LACCODERME DALIBOUR

    * soit DERMO-CUIVRE : 1 tube de 25 g. 2 applications par jour

Si aspect mycosique : utiliser GEL DAKTARIN ou TRIMYSTEN, FAZOL, ...

- Sur le cuir chevelu, le soir :

    * SOLUCIRE salicylée à 1 %.

Le lendemain, faire un shampooing au savon de Marseille, rincer et appliquer crème de DALIBOUR.

- Sur le visage :

Faire tomber les squames avec : huile d'amande douce, 2 fois par jour.

- Plis de flexion (oreilles, aisselles, plis du cou, plis inguinaux) : les traiter avec vigilance :

    * solution de MILLIAN à l'eau,
    * EOSINE aqueuse à 2 %.

5 - Terminer le traitement par application d'huile d'amande douce sur les lésions cutanées sèches, "tannées" par les soins antérieurs.
Le traitement est astreignant, long et minutieux et demande beaucoup de temps chaque jour. Il est préférable qu'il se passe en milieu hospitalier.
Le régime alimentaire ne doit pas être modifié. L'apport de biotine, préconisé naguère, est tombé en désuétude ; d'autres auteurs ont rapporté des résultats accélérés par prise orale de levures.
Les antibiotiques par voie générale sont inutiles et ils sont même contre-indiqués localement.
Il est souhaitable de proscrire sur ces peaux fragilisées l'usage de désinfectants dangereux comme le borate ou l'héxachlorofène.
1.3 Eczéma constitutionnel du nourrisson
Qualifié d'atopique (ou étrange) par SULZBERGER, il est remarquable par le terrain sur lequel il survient. Les ascendants ou collatéraux ont déjà souffert de manifestations semblables ou de même nature : oedème de Quincke, asthme, rhume des foins, ... Parfois, ce qu'on peut appeler ce "terrain allergique" se complète d'une éosinophilie. De plus, l'eczéma n'apparaît pas habituellement avant 3 mois, ce qui laisse à penser qu'il implique des mécanismes incomplets avant cet âge, comme ceux de l'immunité, par exemple.

C'est essentiellement sur l'âge et la topographie des lésions que le diagnostic doit reposer :
- l'eczéma n'apparaît pas habituellement avant 3 mois,
- le début se fait à la face, sur les pommettes, le front. Jamais sur le cuir chevelu ou les sourcils, ni dans les plis ou aux abords immédiats des orifices naturels.

L'extension peut se faire sur toute la région céphalique mais respecte toujours les paupières, le nez, le pourtour de la bouche. Certains eczémas atteignent le tronc, la face externe des bras et des jambes par éléments dispersés, plus ou moins confluents et avec une particulière fréquence, les plis du coude, les creux poplités.

L'eczéma est érythémateux, mais aussi finement vésiculeux et suintant étant donné que la lésion microscopique de base est une spongiose épidermique. C'est une dermite extrêmement prurigineuse, au contraire de la maladie de Leiner-Moussous, ce qui entraîne une surinfection habituelle.

L'étude de cet eczéma du nourrisson ne met en évidence aucune réactivité de contact et, d'autre part, ni infection microbienne ou mycosique ce qui le différencie de l'eczéma de l'adulte.

L'évolution de cet eczéma atopique est très particulière. Elle se fait par poussées entrecoupées de rémissions plus ou moins totales.

Devant ces rechutes qui inquiètent les parents, on peut leur laisser espérer une guérison aux alentours de 18 mois. Mais il ne faut pas se dissimuler que, si tel est souvent le cas, par contre la guérison peut se fait attendre jusqu'à l'âge de 3 ans. A long terme, l'eczéma atopique du nourrisson guérira spontanément dans 80 % des cas. Mais il peut faire place alors à une manifestation allergique comme l'asthme.
Conduite à tenir
On doit envisager :
- le traitement de la poussée,
- le traitement du terrain,
- les précautions à prendre chez un eczémateux.

1 - Traitement de la poussée :

Différents stades à envisager :
1. Eczéma débutant non infecté :
- Prévenir les surinfections :

    * solutions faiblement antiseptiques :

      . pulvérisations d'eau d'Evian,
      . solution aqueuse d'HEXOMEDINE à 1%0, de sels d'ammonium quaternaire (CETAVLON),
      . compresses imbibées de "sérum zinc"
          o Sulfate de zinc : 1 g
          o Na CI : 7,5 g
          o Eau distillée : q.s.p. : 1 l.
      . colorants en solution aqueuse (éosine à 1 %), cristal violet ou violet de méthyle à 0,25 %.

    * crème de DALIBOUR (LACCODERME DALIBOUR),
    * pâte à l'eau et à l'oxyde de zinc (ALOPLASTINE).

Ne pas prescrire :

    * colorant solution alcoolique (douleurs et absorption),
    * topiques anti-histaminiques (allergisants et photosensibilisants, topiques avec mercure, acide borique, sulfamide, héxachlorofène (érythème et intoxication). Eviter les lésions de grattage :

      . couper les ongles ras,
      .  immobiliser les membres supérieurs dans des cylindres de carton (si le prurit le nécessite).

- Traiter la lésion allergique cutanée et le prurit :

    * crème corticoïde dont l'action anti-prurigineuse est rapide,
    * employer sur le corps les dérivés fluorés qui sont plus anti-inflammatoires : TOPSYNE ou SYNALAR (acétonide de fluocinomide) BETNEVAL ou DIPROSONE (bétaméthasone) EPITOPIC (difluprednate), sans antibiotiques associés.
    * employer sur le visage : dérivés non fluorés (par craintes d'atrophie cutanée) : TRIDESONIT, LOCAPRED, crème hydrocortisone. Utiliser de préférence les présentations crèmes aux présentations pommades et prescrire une posologie dégressive (2 fois, puis 1 fois par jour, puis tous les 2 jours).
    * pommade au goudron de houille (Carbo-Dome).

- Traiter l'agitation de l'insomnie :

    * sirop anti-histamique :

      . DOXERGAN, PHENERGAN, THERALENE, 1 à 2 c. à c. par jour,
      . POLARAMINE : 1/2 à 1 c. à c 2 à 3 fois par jour,
      . KANEURON, quelquefois nécessaire, 2 fois X gouttes.

2. Eczéma suintant :
Se garder de thérapeutiques trop agressives et commencer par des pulvérisations d'eau d'Evian, ou d'eau distillée, ou tamponnements avec une solution de nitrate d'argent à 1/200ème. Ce résultat obtenu, le traitement ultérieur sera celui indiqué au paragraphe précédent avec ces trois modalités (a, b, c).
3. Eczéma étendu et infecté :

    * savonnage avec savon antiseptique (SEPTIVON, LACTACID liquide, BETADINE SCRUB),
    * puis bains de permanganate de potassium à 1/10.000 pendant 10 jours suivis de soins locaux déjà mentionnés,
    * antibiothérapie (ERYTHROMYCINE, STAPHYLOMYCINE, OLEOANDOMYCINE, tétracyclines) si résistance. Eviter pénicilline et sulfamides.
    * pas de corticoïdes locaux, ni par voie générale.

4. Eczéma sec plus ou moins lichenifié :

    * Traiter le prurit avec des corticoïdes locaux.
    * Traiter la Xérose (peau sèche), avec des crèmes émollientes (Cold cream, Lipikar, par exemple).

2 - Traitement du terrain et prévention des rechutes :

Les tentatives d'action sur le terrain eczémateux sont infructueuses. La désensibilisation est illusoire à cet âge. On peut discuter l'éviction de certains aliments.
Les injections répétées d'histaglobine et d'allerglobuline ne sont pas efficaces de même que la vitamine F dont l'emploi est abandonné. Il faut être aussi peu agressif que possible.

3 - Recommandations d'ordre général :

Elles sont importantes :
- vêtements de coton et fil préférables à ceux de laine et de fibres synthétiques.
- Eviter la prise de poids excessive et diversifier l'alimentation (pas trop de lait).
- ne pas négliger le problème psychologique et informer la mère sur la maladie, notamment sur les rechutes.

Les vaccinations sont possibles en dehors des poussées et en commençant par des vaccins dilués pour tester la sensibilité (cf. cours plus loin).
Eczéma et vaccinations :
L'eczéma est donc une maladie pénible, gênante pour les parents et pour l'enfant quoique le grattage puisse entraîner des complications.
Le risque majeur est représenté par la greffe herpétique ou vaccinale déclenchant alors la gravissime pustulose de Kaposi Julisberg qui peut mettre les jours en danger ou se solder par des séquelles oculaires invalidantes.
On peut pratiquer, en dehors des poussées, le B.C.G. et les autres vaccins.
Toute réapparition de l'eczéma doit faire surseoir aux injections ultérieures qui ne devront être reprises qu'après une nouvelle épreuve.

En bref, ces trois dermatoses communes du nourrisson (érythème fessier, maladie de Leiner-Moussous, eczéma constitutionnel) ne sont pas au départ, des affections graves. Plutôt que de se résigner à les voir apparaître et évoluer, il faut essayer de les analyser, de les traiter avec méthode et de les prévenir avec sagacité. Leur bénignité ne doit pas être l'excuse d'une négligence de soins, ni avoir pour rançon une trop longue durée que des complications toujours dangereuses à cet âge pourraient émailler.
2 Dermatoses de l'enfant
Seront seuls envisagés :
- l'impétigo,
- le prurigo strophulus,
- la gale.
2.1 L'impétigo
Est d'observation banale. C'est une dermatose très contagieuse qui devient très fréquente dès le début de la fréquentation scolaire et sa constatation impose l'éviction par menace de propagation rapide aux autres élèves.

Il est caractérisé par une éruption bulleuse, provoquée surtout par le streptocoque, quelquefois le staphylocoque. Il est auto et hétéro inoculable.

L'affection débute par une petite bulle de 0 à 1,5 cm de diamètre développée par décollement à partir d'une tâche érythémateuse. Au bout de quelques heures, la bulle de contenu d'abord clair, se trouble et devient pustule. Très rapidement elle se rompt ou se dessèche tandis que le liquide se concrète en une croûte jaunâtre mellicérique. Cette croûte enlevée, à la pince ou arrachée par grattage, laisse apparaître une ulcération très superficielle, arrondie, laissant sourdre une discrète sérosité : celle-ci durcit en une nouvelle croûte. La lésion est strictement épidermique, sans infiltration, ni ulcération.

Le point de départ de l'impétigo est dû à une inoculation cutanée à partir de lésions diverses : coryza avec petites fissures des orifices narinaires, otite moyenne, dermatose prurigineuse infectée de causes diverses (eczéma, prurigo, gale ou simple écorchure, ...)

Le siège d'élection est le visage, notamment autour des lèvres, sur les joues, cette localisation représente la forme la plus banale et la plus fréquemment rencontrée dans le jeune âge. Elle s'étend rapidement à partir de la lésion initiale.
Mais on peut observer des impétigos du cuir chevelu, du tronc, ou des membres. Les lésions sont, le plus souvent, diffuses, se propageant par auto-inoculation. Il faut noter aussi qu'un impétigo peut s'eczématiser. A l'inverse, un eczéma infecté peut s'impétiginiser.

Dans le territoire infecté, existent des adénopathies inflammatoires et dans les formes étendues il faut craindre une néphrite impétigineuse compliquant les lésions mal soignées et traînantes.

La lésion type de l'impétigo étant purement épidermique, il ne subsiste pas de cicatrice. Cependant, dans certains cas, la lésion peut atteindre le derme et l'on a alors affaire à un ecthyma laissant une cicatrice déprimée et parfois pigmentée.

Bien traité, l'impétigo évolue en 4 ou 5 jours. Il faut procéder dans la majorité des cas, seulement à un traitement local : les lésions doivent être détergées de leurs croûtes par pulvérisations d'eau de Dalibour ou d'eau distillée, puis applications locales de solution d'Eosine à 2 %, de violet de gentiane, vert de méthyle, de même que l'application de pommades antibiotiques. L'antibiothérapie par voie générale ne doit être envisagée que dans les impétigos diffus et rebelles.
2.2 Prurigo strophulus
Affection également fréquente entre 1 et 6 ans, n'étant guère observée au-delà. Elle évolue par poussées précédées par un prurit. L'éruption se manifeste par l'apparition d'éléments qui sont d'abord des tâches érythémateuses de quelques millimètres de diamètre, puis érythémato-papuleuses, enfin vésiculeuses de plus petite taille encore. L'excoriation, due le plus souvent au prurit, fait apparaître de petites croûtes brunâtres enchâssées dans le derme et donnant à la palpation une impression de dureté. Ces éléments peuvent siéger sur toutes les parties du corps, notamment aux membres, respectant le visage. Chaque élément évolue en quelques jours et la survenue de poussées successives explique la coexistence d'éléments d'âge différent, ce qui fait évoquer quelquefois le diagnostic de varicelle, mais il n'y a pas d'énanthème, ni de localisation dans le cuir chevelu et la vésicule reste dure.

Du point de vue étiologique on pense actuellement que le prurigo trophulus est dû à des piqûres d'insectes et, à cet égard, on s'éloigne de plus en plus de la conception qui faisait intervenir un mécanisme allergique ou un terrain diathésique familial. L'incertitude règne cependant concernant la prédilection de cette affection pour le jeune enfant. Les parasites en cause sont de taille inférieure à 1 mm et appartenant à la famille des acariens ; ces parasites vivent sur les végétaux , sur des animaux tels que chats, chiens ou oiseaux tels que pigeons des villes qui seraient le vecteur du Dermanyssus Gallinae, parasite nocturne et thermotrope. Des preuves indiscutables ont été rapportées par la découverte du parasite lui-même, par la guérison par éloignement de toute source de parasites ou par le traitement insecticide.

Cette étiologie rend sans objet le traitement longtemps proposé qui consistait à la suppression d'un allergène dû à un aliment du type chocolat, fraises, poissons gras... et à l'inutilité de médications telles que solution de Bourget... Actuellement, il faut prescrire des anti-prurigineux, des sirops anti-histaminiques et localement des colorants de type éosine ou de crème de Dalibour prévenant la surinfection, et appliquer sur le corps de l'enfant des insecticides à base de D.D.T.. Ne pas négliger non plus de désinfecter la literie et d'éloigner les animaux domestiques ou les oiseaux suspects.
2.3 La gale
Il s'agit d'une affection qui devient de plus en plus fréquente.
Elle est due au Sarcoptes Scabei qui vient se localiser dans la peau. La femelle creuse dans l'épiderme une galerie dans laquelle elle dépose ses oeufs. Le sujet parasité a un prurit à prédominance nocturne qui, du reste, est observé sur d'autres membres de la famille ; ce fait est très évocateur de gale. La lésion de base se présente sous la forme d'un sillon, d'un trait fin, à trajet sinueux de teinte noirâtre que l'on peut mieux reconnaître à la loupe : une extrémité de ce sillon est marquée souvent par une petite élevure qui est "l'éminence acarienne". Ces sillons peuvent être nombreux et particulièrement siéger aux mains, aux poignets, dans les espaces interdigitaux. Chez les enfants, et ce, d'autant plus qu'ils sont jeunes, l'éruption est volontiers polymorphe faite de papules, de vésicules, de croûtes, de lésions de grattage ; la face est respectée ; les lésions sont plus souvent disséminées sur le thorax, l'abdomen, les membres que sur les régions génitales (ce qui est mieux observé chez les adultes).
Très souvent, la gale est infectée en raison des lésions de grattage, se compliquant d'impétigo ou d'eczéma.
Chez le nourrisson, la gale a une topographie particulière : lésions papulo-nodulaires des creux axillaires, du périnée, du scrotum, grains perlés des paumes et des plantes, possibilités de lésions du visage.

Traitement : il est mis en route sur l'aspect clinique des lésions. Les modalités dépendant du choix personnel de chacun. On peut proposer :
1 - Gale non compliquée :

    * savonnage soigneux sauf visage (savon de Marseille, SEPTIVON, BETADINE) ;
    * puis douche ou bain chaud (38°) 10 à 20 minutes ;
    * frotter avec une brosse souple ou un gant de crin les zones les plus atteintes. Rincer, essuyer ;
    * sur peau encore humide, application au pinceau plat d'ASCABIOLâ sur tout le corps ;
    * laisser sécher 15 minutes. Recommencer un nouveau badigeonnage ;
    * nouvelle application 24 heures plus tard, sans toilette préalable ;
    * en remettre sur les mains après chaque lavage.

Avant chaque application, changer literie et vêtements, à enfermer 48 heures dans un sac étanche avec de la poudre D.D.T., puis lessivage.
Traiter toute la famille le même jour.
Le prurit peut persister quelques jours. Les nodules rouges violacés 2 à 3 semaines.

2 - Gale compliquée par un impétigo ou un eczéma :

Dans un premier temps, il faut guérir la complication cutanée qui empêche l'application de la solution antiparasitaire qui serait trop irritante. Durant cette période, le Thiabendazol par voie buccale trouve son indication : MINTEZOL 25 à 50 mg/kg/j pendant 4 à 10 jours, après un repas normal du midi ou du soir.

- Impétigo :

    * ERYTHROMYCINE : 50 mg/kg/jour,
    * PYOSTACINE : 50 mg/kg/jour, par voie buccale.
    * Localement, matin et soir : savonnage et bain de permanganate au 1/10.000 ; application d'éosine à l'eau à 2 %, puis application de Crème BACITRACINE tant que persistent les croûtes.

       

- Eczéma : les mêmes soins locaux sont appliqués en remplaçant l'éosine par le nitrate d'argent à 1 % si les lésions sont suintantes.
En 6 à 10 jours, les téguments ne sont plus inflammatoires et alors le traitement antiscabieux spécifique peut être appliqué.
3 Angiomes de l'enfant
Les angiomes cutanés correspondent à une anomalie du développement des vaisseaux du derme et de l'hypoderme.
3.1 Angiomes tubéreux
Ils sont présents à la naissance ou plus souvent vont apparaître dans les premiers jours de vie.
C'est d'abord une tâche rose ou rouge qui en quelques jours va se surélever. Il y a un ou plusieurs angiomes ;
Les bords sont bien limités, la surface rouge plus ou moins claire, en net relief puis devient stable, enfin le centre blanchit et il régresse souvent complètement vers 3 ou 4 ans, laissant une zone dépigmentée et un peu "gaufrée".

Cette évolution bénigne conditionne la conduite à tenir :
- rassurer les parents,
- ne pas tenter des traitements agressifs (chirurgie précoce, radiothérapie, ...),
- les applications de neige carbonique ou d'azote liquide à la période d'extension sont discutées et pour le moment leur efficacité n'est pas démontrée,
- donc, le plus souvent : abstention thérapeutique.

Cas particuliers :
1. La blessure ou l'ulcération spontanée de l'angiome, est presque toujours bénigne, l'hémorragie cède facilement à la compression. La guérison de l'angiome est souvent plus rapide dans ces cas.
2. La palpation d'un pédicule battant dans l'angiome doit faire pratiquer la ligature.
3. L'angiome de la paupière peut retentir très précocement sur la vision et nécessite un traitement très précoce (corticothérapie générale).
4. Un angiome géant peut s'accompagner de thrombopénie.
5. Certains angiomes ne régressent pas spontanément (angiome de la lèvre par exemple) ou régressent incomplètement, dans ces cas une intervention chirurgicale est possible, avant la scolarisation si c'est en zone découverte.
3.2 Angiomes sous-cutanés
Ce sont des masses sous-cutanées, élastiques à la palpation, non douloureuses. La peau en regard est normale ou bleutée, ils peuvent être sous-jacents à un angiome tubéreux. L'angiome caverneux en est une variété.
3.3 Angiomes plans
Ce sont des tâches roses, rouges ou violacées, sans reliefs, s'effaçant à la pression. Ils sont présents dès la naissance. Certains sont tout à fait bénins, d'autres ont un pronostic redoutable.
3.3.1 Angiome plan de la nuque :
Très fréquent, il va disparaître ou persister à l'âge adulte ou il sera caché par la chevelure. Il ne nécessite aucun traitement.
3.3.2 Angiome plan du front :
En bande verticale ou en triangle au milieu du front, il est également très fréquent et il disparaît presque toujours dans les premières années.
3.3.3 Angiome plan, non médian et non systématisé :
Cet angiome n'est pas extensif, ni douloureux... Il est parfois inesthétique, dans ce cas, une thérapeutique est à envisager avec le spécialiste : utilisation actuelle du laser pulsé à colorant.
3.3.4 Angiomes plan systématisés :
Leur signification est très différente et ils imposent l'avis du spécialiste, en effet, il peuvent s'accompagner de graves anomalies vasculaires profondes, c'est le cas de l'angiome siégeant dans le territoire du trijumeau (syndrome de STURGE-WEBER-KRABBE), ou couvrant une grande partie d'un membre (syndrome de KLIPPEL-TRENAUNAY, syndrome de PARKES-WEBER).
4 Acné
4.1 Physiopathologie
L'acné est d'abord un trouble héréditaire de la kératinisation : des bouchons de kératine (comédons) obstruent les orifices pilo-sébacés.
A partir de la puberté, les glandes sébacées augmentent leur sécrétion, l'obstruction de l'orifice pilo-sébacé empêche l'excrétion normale du sébum, d'où plusieurs conséquences :
- formation de kystes sébacés,
- prolifération de micro-organismes (Propioni-bactérium acnés) et formation de pustules,
- hydrolyse du sébum par les lipases de ces germes et production d'acides gras libres irritants.
4.2 Acné de l'adolescent
Elle est très fréquente. Comédons, papules érythémateuses, pustules, kystes sébacés coexistent sur le visage, le haut du dos, parfois la face antérieure du thorax. Les aspects cliniques sont variés fonction de la prédominance ou non d'un type de lésion, de la localisation. L'acné débute dans l'adolescence et peut se poursuivre chez l'adulte jeune. Certaines thérapeutiques peuvent l'aggraver : corticoïdes, androgènes, oestroprogestatifs... ainsi que les soins cosmétiques inadaptés.

Traitement

On utilise le plus souvent la Vitamine A acide (Aberel ¡ , Efferderm ¡ ) qui est kératolytique, ou le péroxyde de Benzoyle (Cutacnyl) qui est comédolytique et anti-infectieux. Ces produits sont irritants et le patient doit en être prévenu (irritation maximum vers la 3ème ou 4ème semaine de traitement).
On peut associer localement une solution de progestérone (Progestosol) ou le Delipoderm qui ont une action anti-séborrhéique. Les cyclines per os ont un rôle anti-infectieux et surtout antilipasique.
4.3 Acné du nourrisson
Elle débute dès les premières semaines de vie, ou au bout de quelques mois. On trouve les lésions caractéristiques de l'acné : comédons, papules, plus rarement pustules.
Elle siège au visage. Non traitée, l'évolution va se poursuivre plusieurs mois ou années.
La cause n'est pas parfaitement connue, des soins d'hygiène non adaptés joueraient souvent un grand rôle.
5 Pédiculose
Chez l'enfant la pédiculose du cuir chevelu est très fréquente prenant même parfois l'allure d'une épidémie dans les collectivités. Elle se traduit par un prurit intéressant le cuir chevelu, la nuque et même la partie supérieure du dos. Ce prurit entraîne des lésions de grattage qui peuvent de surinfecter.
Le diagnostic est affirmé par la découverte des poux en écartant les cheveux et des lentes : ovoïdes, blanc-grisâtres, adhérentes au cheveu. Ces lentes ne doivent pas être confondues avec des cellules desquamées. Le diagnostic doit être systématiquement envisagé devant tout prurit du cuir chevelu même chez les enfants soignés des milieux favorisés.
Traitement
Il préconise actuellement :
- soit des poudres insecticides (D.D.T., Aphtiriaâ , Elentolâ ) actifs sur les poux adultes : après un saupoudrage soigneux des cheveux, la tête est recouverte d'un bonnet pour la nuit. Le lendemain : lavage avec un savon acide puis brossage avec un peigne fin. Recommencer huit jours puis trois semaines après pour tuer les dernières lentes venant d'éclore. Toute la literie devra être désinfectée (6 à 9 jours dans un grand sac avec la même poudre).
- soit plutôt par le PARA Aérosol Spécial Poux, actif sur les adultes et les lentes.
Une seule application suffit, suivie d'un shampooing 30 minutes après et d'un brossage fin.
A ne pas utiliser chez le nourrisson.
La désinfection de la literie et des vêtements se fait avec le même produit.
- le shampooing HEGOR antiparasite, seul actif sur adultes et lentes sera plutôt utilisé à titre préventif.
Traiter également tous les membres de la famille et tous les enfants dans les collectivités.
6 Verrues
Tumeurs épidermiques bénignes dues à un virus, les verrues sont contagieuses et fréquentes chez l'enfant.
Le diagnostic clinique est aisé : d'abord papules arrondies de 1 à 3 millimètres, à surface finement granitée, la verrue s'épaissit prend un aspect mamelonnaire et kératosique, mais demeure indolore.
Les verrues sont le plus souvent localisées aux doigts et au dos des mains. Uniques au début elles deviennent souvent multiples, confluant en placards ou au contraire se disposant en trainées. L'évolution est capricieuse ; après une phase d'extension les verrues disparaissent généralement spontanément ce qui rend difficile l'appréciation de l'efficacité de certaines thérapeutiques générales et psychothérapeutiques.
On appliquera des topiques kératocytiques : vaseline à 20 à 40 %, Trétinoïde (Effederm Crème ou lotion) ou on utilisera certains procédés dermatologiques : cautérisation par l'acide trichloracétique à 30 %, cryothérapie, électrocoagulation.
La verrue plantaire, forme particulière et douloureuse, peut nécessiter un traitement local (ablation).
Erythèmes chez l'enfant
(orientations diagnostiques)
C. Jézéquel

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 3 avril 1999

1 Causes des érythèmes chez l'enfant
2 Erythème médicamenteux : toxidermie
   

3 Epidermolyse staphylococcique aiguë
4 Erythème et maladie systémique

Analyse sémiologique :
C'est l'analyse de la lésion élémentaire : érythème pur ou associé (bulles - papules - vésicules, purpura).

- Erythème généralisé ou localisé. Caractères évolutifs.
- Signes d'accompagnement : prurit, fièvre, altération de l'état général.
Examens complémentaires :
Souvent peu utiles pour le diagnostic (NFS - critères d'inflammation). Ils peuvent préciser l'étiologie (recherches bactériennes ou virales - sérologies).
1 Causes des érythèmes chez l'enfant
Nous rappelerons brièvement les symptômes des classiques "Fièvres éruptives de l'enfant".

- Scarlatine : due à l'action d'exotoxines érythrogènes secrétées par les Streptocoques A à partir d'un foyer cutané ou oropharyngé. Début brutal avec fièvre, céphalées, maux de gorge, vomissements. Exanthème se généralisant progressivement plus marqué aux plis de flexion, durant environ huit jours et pouvant se terminer par une desquamation. Enanthème constant oro-pharyngé-lingual. Le Streptocoque A peut être retrouvé dans le prélèvement oro-pharyngé. Le traitement est la Pénicilline durant 10 jours. La recherche d'une protéïnurie s'impose. La glomérulonéphite étant la principale complication.

- Rougeole : l'exanthème est fait de maculo-papules érythémateuses séparées par des intervalles de peau saine. Il apparaît derrière les oreilles et a une évolution descendante en quelques jours. L'énanthème contemporain correspond au Signe de Köplick (petits points blancs bleutés sur la muqueuse buccale érythémateuse). Les autres signes sont : la fièvre, la toux, le catarrhe oculo-nasal.
La rougeole peut avoir des complications : surinfection des voies aériennes, encéphalites aiguës ou sub-aiguës (leuco-encéphalites sclérosantes subaiguës). L'incidence de la rougeole a décru grâce à la vaccination (voir cours).

- Rubéole : l'exanthème est peu différent de celui de la rougeole (morbilliforme). Il n'y a pas d'énanthème. La fièvre est peu intense. Il existe souvent des micropolyadénopathies et parfois des arthralgies.
Beaucoup de virus (écho - coxsackie) peuvent donner des éruptions identiques. Si nécessaire, la preuve sérologique vient confirmer le diagnostic de rubéole (séro-conversion avec IgM).
Les complications peuvent être : le purpura thrombopénique et l'embryofœtopathie rubéolique, si la rubéole primo-infection survient chez la femme enceinte (voir cours). La vaccination devrait entraîner l'éradication (voir cours).

- Roséole infantile - Exanthème subit.
Maladie éruptive de l'enfant entre 3 mois et 4 ans, dont l'agent causal principal est l'herpès virus type 6.
La triade diagnostique associe : une fièvre élevée souvent bien tolérée. Une défervescence brutale et l'apparition au 3ème-5ème jour d'un exanthème maculo-papuleux rose pâle et d'un énanthème sur le voile du palais. La durée de l'éruption est brève. Il existe souvent une neutropénie transitoire.
Les complications sont surtout celles de la fièvre (convulsions).

- Mégalérythème épidémique, c'est une maladie éruptive, surtout de l'enfant d'âge scolaire, dont l'agent causal est le Parvovirus B19. La fièvre s'associe rapidement à un exanthème du visage qui devient très rouge et parfois prurigineux. L'extension se fait aux membres et au tronc. Eruption maculo-papulaire ou réticulaire pouvant durer plusieurs semaines.
Il n'y a pas d'énanthème.
Les complications sont dues au terrain particulier :
- érythroblastopénie chez les sujets atteints d'anémie hémolytique.
- anasarque fœto-placentaire en cas d'infection en cours de grossesse.
2 Erythème médicamenteux : toxidermie
Les toxidermies sont les effets cutanés secondaires des médicaments. Il existe des formes bénignes souvent localisées : érythème polymorphe, urticaire.

Il existe une forme grave d'érythème généralisé avec épidermolyse aiguë (syndrome de Lyell).

L'érythème s'étend rapidement et le décollement bulleux donne un aspect fripé. Le moindre frottement accentue le décollement (syndrome de Nikolsky). Il y a une atteinte muqueuse et notamment conjonctivale. L'état général est altéré. Les séquelles (notamment oculaires) peuvent être graves.

Les médicaments le plus souvent en cause sont : les anti-inflammatoires, les sulfamides, les anticonvulsivants.
3 Epidermolyse spaphylococcique aiguë
Nécrolyse épidermique staphylococcique (ne pas l'appeler Syndrome de Lyell staphylococcique, ce qui entraîne une confusion avec la toxidermie). C'est un exanthème fébrile d'allure morbilliforme ou scarlatiniforme, se couvrant de bulles fragiles particulièrement péri-orificielles ou dans les zones de frottement. La rupture des bulles laisse de grandes érosions superficielles (décollement intra-épidermique). L'étude bactériologique permet de retrouver un staphylocoque lysogène producteur de l'exfolliatine. Le traitement comporte des soins : l'antiseptie locale et un traitement antistaphylococcique. La corticothérapie est contre-indiquée. L'évolution est habituellement favorable sans séquelles.
4 Erythème et maladie systémique
Sans vouloir être complet, nous citerons quelques maladies qui s'accompagnent volontiers d'un érythème. Certaines sont développées dans d'autres chapitres.

- Syndrome de Kawasaki : vascularite d'origine inconnue avec un syndrome inflammatoire. Atteintes adéno-cutanéo-muqueuses. Exanthème morbilliforme ou scarlatiniforme, suivie d'une desquamation tardive des extrémités. Enanthème buccal.
Complications cardio-vasculaires. Indication formelle des immunoglobulines.

- Maladie de Still : forme systémique d'arthrite chronique juvénile. Initialement, c'est souvent un état fébrile prolongé accompagné de rash cutané morbilliforme fugace.

- Erythème noueux : son aspect clinique est évocateur.
Apparition de nodules érythémateux dermo-hypodermiques, siégeant sur les crêtes tibiales ou cubitales. Evolution semblable à celle d'une ecchymose (dermite contusiforme). Il y a souvent de la fièvre. L'origine peut être inflammatoire (Maladie de Crohn) infectieuse (Streptocoque) ou médicamenteuse.

- Dermatomyosite : l'atteinte cutanée de cette maladie systémique est souvent un érythème localisé du visage d'évolution chronique.

- Lupus érythémateux : maladie auto-immune polyviscérale. L'exanthème est un rash érythémateux du visage en aile de papillon. C'est un des signes cardinaux. Le diagnostic sera confirmé par la recherche d'auto-anticorps.
La radiologie thoracique en pneumologie
E. Deneuville, C. Jézéquel

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 6 avril 1999
Objectifs
1. Citer les critères d'un bon cliché thoracique.

2. Décrire l'image radiologique du thymus.

3. Décrire les modifications observables sur un cliché pris en expiration.

Le cliché de thorax de face est un examen fréquemment demandé en raison soit d'une pathologie respiratoire, soit de signes cliniques à distance (douleurs abdominales, syndrome méningé, fièvre isolée).

Ce cliché doit être parfaitement de face, en inspiration (pris lors de la reprise après le cri chez le nourrisson). Les critères de symétrie sont la position des extrémités internes des arcs antérieurs des côtes sur la radiographie ; non strictement de face un hémi thorax peut apparaître plus clair que le côté opposé. En inspiration, les coupoles diaphragmatiques sont à hauteur du 6ème arc costal antérieur; la clarté trachéale apparaît rectiligne, légèrement à droite de la ligne médiane chez le nourrisson. En expiration, la trachée apparaît coudée à convexité droite, il existe une fausse cardiomégalie, une pseudo-hypervascularisation pulmonaire.

Particularité de l'enfant, le thymus qui est radiologiquement visible chez le nourrisson, est source d'images pièges -a fortiori lorsqu'il est volumineux- il se présente comme une opacité de tonalité hydrique du médiastin supérieur, effaçant la partie supérieure de la silhouette cardiovasculaire, la nature thymique de cette opacité est affirmée de face lorsqu'il existe une image d'encoche au niveau du raccordement entre thymus et masse cardiaque, ses bords latéraux sont ondulés, de profil l'opacité est antérieure et supérieure comblant l'espace clair rétro-sternal supra-cardiaque. En expiration, le thymus apparaît plus volumineux trapézoïde, les bords de celui-ci s'écartant latéralement. L'hypertrophie thymique n'est pas pathologique et n'entraîne jamais de signes de compression.

- Dans les pneumopathies aiguës, un seul cliché de face suffit le plus souvent, la localisation d'un foyer pulmonaire pouvant s'aider du signe de la silhouette.

- La suspicion de corps étranger inhalé nécessite un cliché de thorax de face en inspiration et expiration - à la recherche d'un piégeage expiratoire.

- Un cliché en décubitus latéral, rayon horizontal (coté pathologique placé en haut) peut être utile dans le diagnostic d'un épanchement gazeux pleural de petite abondance. Il est indispensable chez le nouveau-né en présence de troubles respiratoires avec une image de face normale prise en décubitus dorsal. De même, la recherche d'un épanchement liquidien pleural minime peut se faire par un cliché en décubitus latéral, rayon horizontal (coté pathologique placé en bas) ou incidence de Muller.
Infections respiratoires aiguës courantes de l'enfant
E. Deneuville, C. Jézéquel

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 6 avril 1999

1 Affections des voies respiratoires supérieures
1.1 Rhino-pharyngites et complications
1.2 Angines
   

2 Affections pulmonaires, bronchiques et parenchymateuses
2.1 Infections virales
2.2 Infections bactériennes
Objectifs
Affections des voies respiratoires supérieures
1. Enoncer les particularités anatomiques et physiologiques expliquant la fréquence des infections des voies aériennes supérieures chez l'enfant.

2. Donner l'incidence des rhinopharyngites de l'enfant et leurs étiologies.

3. Donner les signes cliniques du coryza du nourrisson et de l'enfant.

4. Rédiger l'ordonnance pour une rhinopharyngite non compliquée.

5. Citer les complications des rhinopharyngites aiguës chez l'enfant.

6. Expliquer les problèmes que pose la répétition, chez l'enfant, des rhinopharyngites, des otites.

7. Discuter les indications de l'antibiothérapie, de l'adénoïdectomie.

8. Citer les signes qui, dans les angines, plaident en faveur : de l'origine streptococcique, de l'origine virale.

9. Enumérer les complications d'une angine à streptocoque non ou mal traitée.

10. Rédiger l'ordonnance du traitement d'une angine présumée streptococcique.

11. Citer deux indications d'un prélèvement de gorge.

12. Donner les indications de l'amygdalectomie.

13. Enumérer les signes d'appel de l'otite moyenne aiguë chez le nourrisson.

14. Décrire et reconnaître les aspects normaux et pathologiques des tympans dans les otites aiguës et chroniques.

15. Donner les indications de la paracentèse.

16. Rédiger l'ordonnance de traitement d'une otite moyenne suppurée à germe identifié ou non.

17. Enumérer les complications des otites du nourrisson.

18. Donner l'âge d'apparition des différents sinus.

19. Enumérer les caractères cliniques et radiologiques d'une sinusite.

20. Rédiger l'ordonnance du traitement de la sinusite.

21. Enumérer les caractères d'une dyspnée laryngée.

22. Donner les causes les plus fréquentes de dyspnée laryngée chez l'enfant.

23. Enumérer les signes et l'évolution d'une laryngite sous-glottique, glottique, d'une épiglottite, due laryngite striduleuse.

24. Rédiger l'ordonnance pour une laryngite aiguë avec dyspnée chez un nourrisson.

25. Donner les principes de traitement d'une épiglottite.
Affections pulmonaires bronchiques et parenchymateuses
1. Enumérer les caractéristiques générales des bronchopneumopathies chez l'enfant.

2. Citer les principaux agents responsables des bronchopneumopathies de l'enfant.

3. Décrire les aspects sémiologiques des bronchopneumopathies de l'enfant.

4. Décrire les principaux aspects radiologiques des bronchopneumopathies aiguës de l'enfant

5. Exposer les signes cliniques et radiologiques d'une pneumonie à pneumocoques.

6. Donner les éléments anamnestiques et cliniques qui doivent faire évoquer le diagnostic de staphylococcie pleuro-pulmonaire.

7. Décrire les divers aspects radiologiques observés au cours de l'évolution d'une staphylococcie pleuro-pulmonaire.

8. Enumérer les éléments du pronostic de la staphylococcie pleuro-pulmonaire.

Elles sont le motif de consultation le plus fréquent : tout enfant fait de nombreuses infections des voies aériennes entre 0 et 4 ans.

Quoiqu'en général bénignes, leur gravité peut venir : soit de leur répétition, soit de complications suppurées, soit de leur retentissement fonctionnel (laryngite, bronchiolite).
L'immense majorité de ces infections est d'origine virale (90% au moins) et ne justifient pas de traitement antibiotique. Les bactéries en cause sont essentiellement : le streptocoque A, le pneumocoque, l'hémophilus influenzae et les antibiotiques de choix, la pénicilline V ou G, les ampicillines, les macrolides.
Pour décider de l'origine virale ou bactérienne, donc de l'opportunité du traitement antibiotique, le médecin ne dispose, en pratique, le plus souvent, que d'arguments cliniques dont le plus important est le type et l'étage de l'infection (voir tableau).
Mais il faut souligner que bon nombre d'infections à virus induisent une surinfection à germes figurés.

La récidive si fréquente de ces manifestations respiratoires est liée, d'une part, à la multiplicité des virus, d'autre part, à l'immunité incomplète ou temporaire conférée par bon nombre d'entre eux chez l'enfant qui doit créer ses défenses.
Les nécessités didactiques conduisent à séparer les atteintes des voies respiratoires supérieures des localisations pulmonaires, bronchiques ou parenchymateuses, bien qu'elles soient souvent associées.
1 Affections des voies respiratoires supérieures
1.1 Les rhino-pharyngites et leurs complications
Les rhino-phrayngites sont surtout observées chez le nourrisson, les angines chez l'enfant plus grand. Elles sont dues à l'inflammation du tissu lymphoïde particulièrement abondant et dont le développement se poursuit jusqu'à 4-5 ans, formant l'anneau de WALDEYER.
La rhino-pharyngite est de rencontre quasi-constante dans la pratique médicale infantile.
1.1.1 Etiologie
1.1.1.1 Facteurs déterminants
L'étiologie de la rhino-pharyngite est dominée par les virus qui trouvent, plus particulièrement dans les régions froides et humides, les conditions idéales pour se développer. Ceux qui affectionnent les voies respiratoires supérieures sont particulièrement nombreux.
Ils ont été classés par famille : myxovirus (influenzae, para-influenzae, syncitial respiratoire), adénovirus, rhinovirus, entérovirus, coronavirus.
Il faut y adjoindre le mycoplasme d'EATON, que l'on a reconnu être un germe figuré.
Dans chacun de ces groupes, on a pu individualiser de nombreux sérotypes pathogènes.
Les virus ne sont pas seuls en cause ; une surinfection bactérienne survient habituellement. Les fosses nasales contiennent en effet à l'état normal une flore variée non virulente (streptocoques de types divers, staphylocoques, hémophilus influenzae, aérobies...).
Lors de l'éclosion d'un coryza, ces germes se multiplient avec souvent une prédominance qui devient surinfection.
En fonction de l'âge ou d'une défaillance de l'état général, ces complications vont prolonger la maladie, faciliter les récidives et le passage à la chronicité.
Les facteurs allergiques, s'ils existent, vont en favoriser la survenue et souvent se déroulent alors des séquelles cliniques où il est malaisé de se retrouver.
1.1.1.2 Facteurs favorisants
Les fosses nasales sont, dans le jeune âge, des canaux étroits communiquant avec un cavum de petite dimension où s'étend en nappe le tissu lymphoïde dont le développement se fait au maximum au cours des premières années. L'inflammation de ce tissu produit ces intumescences que sont les végétations.
Le jeune enfant est incapable de se débarasser des sécrétions nasales et pharyngées, et sa position longtemps couchée en favorise la stagnation et l'accumulation, visibles sous formes de coulées mucopurulentes dans l'arrière gorge. La trompe d'Eustache, courte et rectiligne, s'ouvre largement sur ce carrefour et l'on a pu dire que les tympans étaient des classiques reflets de l'état du rhinopharynx.
La vie en collectivité (crèche) favorise la fréquence et l'extension de l'affection.
1.1.2 Aspects cliniques
Plusieurs modalités cliniques peuvent se rencontrer, de gravité variable :
1.1.2.1 Le catarrhe simple ou coryza
Il est à peine à mentionner ; sans fièvre, il se traduit simplement par un écoulement nasal clair non infecté, peu abondant. Il persiste quelques jours et disparaît ensuite. Il entraîne souvent une gêne respiratoire par état plus ou moins oedémateux de la muqueuse nasale rétrécissant le conduit aérien. Si rhinorrhée acqueuse récidivante, penser à l'allergie.
1.1.2.2 La rhino-pharyngite de l'enfant au-dessus de 2 ans
Cette limite un peu arbitraire est justifiée en raison de ce que l'on observe habituellement chez le nourrisson.
- La fièvre est le premier symptôme à apparaître : brutale, élevée, à 39°-40°, elle reste en plateau pendant deux à trois jours.
- Elle réagit bien aux antithermiques, et, à cet âge, retentit peu sur l'état général. La muqueuse nasale est rouge, irritée et produit des sécrétions plus ou moins épaisses : la voie est nasonnée, l'enfant respire bouche ouverte. La céphalée est inconstante. La toux et le larmoiement existent plus ou moins.
- La dysphagie traduit l'énanthème diffus de la cavité bucco-pharyngée ; mais les amygdales sont d'aspect subnormal, non infectées.
- Des douleurs auriculaires peuvent être notées, mais les conduits auditifs externes sont seuls irrités, les tympans sont normaux et conservent leur aspect blanc nacré.
- Des adénopathies périphériques sont fréquentes, de petit volume, indolores, sans péri-adénite, surtout rétrocervicales ou rétromaxillaires. Elles persisteront assez longtemps après l'épisode initial.
- A cet âge, l'état général est peu touché, hormis une anorexie passagère. Tout doit rentrer dans l'ordre en 3 jours avec une thérapeutique symptomatique.
1.1.2.3 La rhino-pharyngite du nourrisson

- L'encombrement O.R.L prend davantage d'ampleur.
- L'intensité de la fièvre expose à des convulsions hyperthermiques.
- La dysphagie se traduit plus volontiers par une anorexie brutale pour les aliments solides ; seuls les liquides sont absorbés.
- L'inflammation nasale et le jetage qui en découle provoquent une gêne respiratoire nette. Les glaires sont expulsées par des efforts de toux ou d'éternuement ; une courte crise d'étouffement peu survenir, calmée par leur rejet. Des vomissements apparaissent vite, provoqués par leur réingestion. Secondairement, les selles peuvent aussi être perturbées ; les glaires ingérées en modifient la flore habituelle et en accélèrent la fréquence. Une diarrhée authentique peu en découler.
- Cet état n'a pas de gravité en soi mais sa durée pendant 2 à 3 jours et son retentissement sur l'état général provoquent l'inquiétude du milieu familial.
- L'évolution est favorable dans la majorité des cas. Cependant, l'extension du processus hypersécrétant à l'arbre trachéo-bronchique, l'infection secondaire ou le passage à la chronicité sont autant de complications qui peuvent secondairement évoluer pour leur propre compte.
Etiologie des infections respiratoires de l'enfant
 
     
VIRUS
Influenzae
   
Parainfluenzae
   
VRS
   
Adénovirus
   
Rhinovirus
   
Coronavirus
   
Entérovirus
Rhinopharingite    
++
   
+++
   
+++
   
++
   
+++
   
++
   
++
Otite purulente                                          
Sinusite                                          
Angine          
+
   
+
   
++
               
+++
Epiglottite                                          
Laryngite    
++
   
++++
   
++
   
+
   
+
           
Bronchite    
+
   
+++
   
+++
   
+
   
+
           
Bronchiolite          
+
   
++++
   
+
   
+
           
Pneumonie    
+
   
+++
   
+++
   
+
                 
 
  
     
 BACTERIES
Streptocoque A
   
Streptocoque pneumoniae
   
Stahyolocoque aureus
   
Hemophilus influenzae
   
Anaérobies
   
Mycoplasma pneumonia
Rhinopharingite    
+
   
 
   
 
   
 
   
 
   
 
Otite purulente    
+
   
++++
   
+
   
++++
   
++
   
+
Sinusite    
+
   
++++
   
+
   
++++
   
++
   
 
Angine    
++++
   
 
   
 
   
 
   
 
   
 
Epiglottite    
 
   
+
   
 
   
++++
   
 
   
 
Laryngite    
 
   
 
   
 
   
 
   
 
   
 
Bronchite    
 
   
 
   
 
   
 
   
 
   
+
Bronchiolite    
 
   
 
   
 
   
 
   
 
   
+
Pneumonie    
 
   
++++
   
++
   
+
   
 
   
+++
 
La fréquence des germes isolés est indiquée selon une échelle graduée de 0 à ++++.
1.1.3 Le traitement
Bien qu'elles soient d'origine virale, elles sont encore souvent l'occasion d'une antibiothérapie dans l'espoir de raccourcir l'évolution et d'empêcher les complications bactériennes, notamment l'otite suppurée. Aucun de ces deux effets n'a cependant été démontré par des études comparatives sur une large échelle. Le traitement de la rhino-pharyngite non compliquée de l'enfant consiste dans le contrôle de la fièvre (paracétamol 60 mg/kg/j en 4 fois) et l'aspiration drainage des mucosités (poire en caoutchouc, gouttes NaCl 9%°). En cas de persistance : on ne doit recourir à l'antibiothérapie qu'après 3 à 4 jours d'évolution en raison d'une surinfection à rechercher (otite, pneumopathie).
1.1.4 Complications
1.1.4.1 Les otites
Elles sont à dépister systématiquement lors de l'examen général et sont surtout fréquentes entre 0 et 2 ans. L'examen auriculaire doit être fait systématiquement car une otite peut exister sans aucun signe d'appel et nécessite cependant une thérapeutique appropriée.

L'otite catarrhale se traduit par une phase d'inflammation transitoire : le tympan n'est plus nacré, mais n'est ni bombé, ni gris. Les douleurs peuvent être intenses, mais tout rentre dans l'ordre en 24 heures. Il ne s'agit là que d'une extension simple du processus général de la rhinopharyngite.

L'otite suppurée apparaît plus volontiers au 2ème-3ème jour bien que, parfois, elle puisse être inaugurale. La fièvre est élevée, le jetage nasal est évident mais l'enfant pousse des cris douloureux, intermittents, stridents, très évocateurs. Il porte parfois ses mains aux oreilles. Le tympan est gris, bombé. A ce stade, une paracentèse exploratrice, faite par un spécialiste, va retrouver une sécrétion épaisse et sous tension ; son évacuation amènera une sédation rapide des douleurs et de la fièvre. Les germes en cause sont essentiellement le pneumocoque et l'hémophilus, plus rarement le streptocoque A, parfois une entérobactérie ou un staphylocoque chez le très jeune nourrisson.

L'otite suppurée peut se rompre spontanément. Le diagnostic en est fait "à postériori" : la fièvre est tombée, les cris ont disparu et l'on découvre un écoulement de l'oreille externe. Des récidives sont possibles dans les jours qui suivent. En effet, l'expérience montre qu'il est difficile de stériliser complètement une oreille infectée malgré l'adjonction à ce stade d'antibiotiques. Après l'épisode initial, le tympan reste anormal dans son aspect et les récidives seront fréquentes au cours des rhino-pharyngites ultérieures.

Le traitement antibiotique est souvent probabiliste. En raison de la résistance fréquente de l'hémophilus aux b lactamines, on utilise volontiers l'Augmentin ou Ciblorâ , le Pédiazoleâ (érythromycine + sulfamide) ou une céphalosporine de 3ème génération. La durée est de 7 à 10 jours en moyenne.

En effet, si les complications par extension ont pratiquement disparu (mastoïdites), on voit encore des otites traînantes et des hypoacousies séquellaires dues en partie à une antibiothérapie trop courte et mal contrôlée. Une collection rétrotympanique plus ou moins épaisse et visqueuse se forme. C'est l'otite chronique à tympan fermé, grave en elle-même, génératrice de surdité importante ; elle peut évoluer vers l'otite fibroadhésive avec rétraction tympanique et nécrose de l'enclume. La paracentèse dans l'ensemble ne semble pas améliorer l'évolution ni les séquelles à long terme. Elle est cependant à faire si douleur intolérable, tympan bombé ou pour obtenir une culture du pus surtout après échec du traitement antibiotique.
1.1.4.2 Les sinusites
Elles font généralement suite aux rhino-pharyngites. Fièvre, douleur et gonflement locaux sont, le plus souvent, absents (sauf dans l'ethmoïdite). Le diagnostic doit être évoqué devant une rhinorrhée purulente persistante, une toux chronique et grasse à prédominance nocturne, un écoulement purulent sur le pharynx, des épisodes récidivants d'otite, angine, bronchite, des épistaxis itératives, une fièvre intermittente inexpliquée.

Le diagnostic est confirmé par la présence éventuelle de pus au niveau du méat moyen en rhinoscopie et surtout par l'opacité radiologique des sinus. Les germes en cause sont le pneumocoque et l'hémophilus le plus souvent (90%).

Traitement : AMPICILLINE ou ERYTHROMYCINE 100 mg/kg pendant 10-15 jours associée éventuellement à une corticothérapie (PREDNISONE 1mg/kg, pour favoriser le drainage du sinus bouché par l'oedème). Un traitement décongestif local peut être mis en oeuvre et utiliser l'ARGYROPHEDRINE 0,5 ou 1%, 3 à 4 pulvérisations par jour. La récidive après traitement demande le recours au spécialiste pour ponction, lavage ou drainage.

Il faut savoir que :
- Les sinus maxillaires existent à la naissance, qu'ils sont visibles sur une radio à partir de 18 mois et que leur inflammation est possible dès la cavitation (18 mois à 2 ans). Toutefois, la sinusite maxillaire est admise à partir de 3 ans.
- Les sinus ethmoïdaux existent et sont visibles sur une radio dès la naissance. L'ethmoïdite est possible à partir de 6 mois. Elle exige une surveillance étroite car elle peut entraîner des lésions osseuses, oculaires, neurologiques et vasculaires. Double antibiothérapie avec un anti-staphylococcique.
- Les sinus frontaux et sphénoïdaux n'apparaissent que vers 6-7 ans.
1.1.4.3 Les laryngites
Le larynx comporte 3 étages :
- étage sus-glottique,
- l'orifice glottique,
- l'étage sous-glottique.

Sur le plan anatomique et fonctionnel, il faut souligner quelques particularités chez l'enfant :
- Le larynx sus-glottique est étroit.
- Le larynx sous-glottique est limité en avant par des structures cartilagineuses peu extensibles et est riche en structures lymphoïdes, ce qui explique le retentissement fonctionnel d'une diminution de calibre.
Clinique commune
Toutes les dyspnées laryngées sont des bradypnées inspiratoires avec tirage, habituellement sus-sternal signant l'origine haute et cornage (modification de la voix) et toux aboyante.
1.1.4.3.1 L'épiglottite ou laryngite sus-glottique
C'est une maladie grave. L'épiglotte enflammée et souvent abcédée devient énorme, bascule et vient boucher le trou de la glotte.
Elle est presque toujours due à Haemophilus influenzae.

Diagnostic : L'épiglottite atteint l'enfant après 3 ou 4 ans, et associe : un syndrome de dyspnée laryngée, des signes généraux importants avec fièvre ; l'enfant est assis ou à 4 pattes, la dysphagie est si importante qu'il bave.
Devant un tel tableau, il ne faut jamais essayer d'allonger l'enfant, sous peine de risque de mort immédiate par arrêt cardio-respiratoire.

Le diagnostic de certitude est difficile, d'autant qu'il ne faut pas tenter d'examiner l'enfant, mais l'adresser immédiatement à l'hôpital où il sera examiné à proximité d'un matériel d'intubation et de trachéotomie.

Traitement : L'antibiotique habituellement utilisé est l'AUGMENTIN ou une céphalosporine de 3ème génération : CLAFORAN - ROCEPHINE, qui peut être commencée à domicile, par voie parentérale.
L'intubation éventuelle est très difficile, en position demi-assise. Si elle échoue, on a recours à la trachéotomie.
Cette attitude doit être d'autant plus rigoureuse qu'il s'agit d'une affection qui guérit en 3 ou 4 jours sous traitement bien conduit. La vaccination contre l'hémophilus est une mesure préventive efficace.
1.1.4.3.2 La laryngite sous-glottique
Le plus souvent virale, c'est une maladie sévère, mais pas grave comme l'épiglottite.

Diagnostic : C'est une dyspnée laryngée. La radio mettrait en évidence un épaississement muqueux sous-glottique. La laryngoscopie affirme le diagnostic en visualisant deux bourrelets rouges à l'étage sous-glottique.

Traitement : Il associe la mise en atmosphère humide, qui peut être réalisée dans la salle de bain, tous robinets d'eau chaude ouverts ; des anti-inflammatoires non stéroïdiens, des antalgiques, éventuellement des corticoïdes dont l'efficacité est discutée, souvent des antibiotiques.
1.1.4.3.3 Laryngite glottique
Le croup, obstruction du trou de la glotte par les fausses membranes de la diphtérie laryngée, est rare. Le corps étranger enclavé dans la glotte est plus fréquent.
1.1.4.3.4 Laryngite striduleuse ou "faux croup" ou "laryngite spasmodique"
C'est l'urgence nocturne par excellence. Passagère, elle ne dure que quelques heures. Son diagnostic différentiel avec la laryngite sous-glottique est difficile.

Diagnostic : Il s'agit d'un enfant souvent enrhumé. Les parents sont réveillés vers 1 heure du matin par un bruit de dyspnée laryngée. L'enfant n'est pas fébrile. Le faux croup peut être un mode d'entrée dans la rougeole. Il faut donc rechercher un signe de Koplik et rechercher le contage possible.

Traitement : Il peut être fait à domicile, associant : une mise en atmosphère humide, des compresses humides chaudes autour du cou, des anti- inflammatoires non stéroïdiens, des antalgiques, des corticoïdes, plus efficaces dans cette indication. L'enfant s'endort une à trois heures après et reste un peu enroué le lendemain.
1.1.4.4 Les trachéo-bronchites
Ce sont des complications habituelles dues surtout aux myxovirus para- influenzae : c'est la "bronchite" que connaissent bien les familles. La toux est fréquente, grasse, peu productive dans la mesure où le jeune enfant ne sait pas cracher ses sécrétions, parfois émétisante. Elle est en général plus nette en position couchée que debout : l'enfant jeune ingère ses glaires et ne commence à savoir se moucher que vers 4 ans environ. Ces trachéo-bronchites ne s'accompagnent pas d'anomalies auscultatoires : le murmure vésiculaire est conservé pourvu qu'on demande à l'enfant de tousser et d'ausculter après la quinte. Les bruits transmis sont une source d'erreurs classiques. Les radiographies pulmonaires ne retrouveraient qu'une accentuation des travées hilaires bilatérales, sans images systématisées.

Ces trachéo-bronchites peuvent, elles aussi, évoluer pour leur propre compte et, soit devenir chroniques traduisant ainsi une persistance des phénomènes inflammatoires, soit se surinfecter, surtout chez le grand enfant. Les sécrétions deviennent épaisses et verdâtres, et la température demeure à 37°1-38°. Elles représentent alors une indication aux antibiotiques, et tout particulièrement PENICILLINE. Mais elles peuvent aussi précéder des bronchopathies asthmatiformes ou des bronchiolites aiguës. La diffusion de l'infection respiratoire sur le trajet des voies aériennes supérieures est un bon signe clinique en faveur de son origine virale et dispense d'instituer un traitement antibiotique de première intention.
1.1.4.5 Récidives et leur traitement
Elles sont couramment observées dans les régions humides et posent des problèmes de pratique médicale. Elles ne comportent aucun risque s'il ne s'agit chaque fois que de rhino-pharyngite isolée non compliquée.

Les otites répétées ont un potentiel de surinfection locale qui peut provoquer des antrites ou des mastoïdites, et des hypoacousies.

L'infection des fosses nasales et des végétations adénoïdes peut retentir sur la dynamique respiratoire et s'accompagner secondairement d'insuffisance respiratoire chronique, dont la fréquence, il est vrai, est faible. L'irritation maintes fois répétée de l'arbre bronchique a été considérée par certains comme faisant le lit d'un asthme vrai. C'est dans le but de telles préventions qu'on peut recourir à divers moyens :
1.1.4.5.1 Curage des végétations adénoïdes
Il est certain qu'il s'agit là d'un foyer d'appel permanent et qu'à la longue peut se constituer un tableau d'obstruction du cavum : enfant pâle, hypotrophique, qui respire bouche ouverte, ronfle en dormant, à la voix constamment nasonnée, c'est l'aspect adénoïdien, avec état sub-fébrile permanent. Mais on ne peut en garantir la totale efficacité. Pratiquée trop tôt, l'adénoïdectomie sera sans effet par la repousse locale ; trop tard, elle laissera derrière elle une infection semi- permanente du cavum et des fosses nasales. Le choix du moment est guidé par la fréquence des récidives (au moins après la 3ème de l'année) ou vers l'âge de 4 ans.
1.1.4.5.2 Injections de gamma-globulines
Elles ne se justifient que s'il existe une carence en immunoglobulines, totales ou en sous-classe d'IgG,ce qui est rare. Leur prescription nécessite au préalable un dosage sérique. Chez le nourrisson, il est préférable d'utiliser des Ig intraveineuses à la posologie de 300 mg/kg toutes les trois semaines.
1.1.4.5.3 Les immunomodulateurs
Ces médicaments ont une action non spécifique au niveau du macrophage, ce qui active la réaction immunitaire. Ils sont donc indiqués en absence de déficit immunitaire évident. Toutefois on peut les prescrire en cure de 3 à 4 mois entre septembre et mars avant un bilan immunitaire systématique, chez les nourrissons âgés de 6 mois à 4 ans qui ont des rhinites à répétition d'abord claires puis purulentes. Ces surinfections diminuent ou disparaissent au cours de l'été et après l'âge de 5 ans. Le système immunitaire a acquis sa compétence.

1.1.4.5.4 C'est pour eux qu'il faut avoir recours aux cures climatiques et aux changements de climat. Il est souvent utile de les sortir des crèches où toutes les conditions sont remplies pour favoriser l'éclosion des épidémies virales.

Au total, autant la rhino-pharyngite aiguë est de diagnostic facile et de bonne évolution, autant elle posera des problèmes en cas de surinfection ou de récidives. Il semble surtout qu'il faille peser les indications thérapeutiques qui doivent être économes dans la mesure où un facteur infectieux n'est pas prouvé.
1.2 Les angines
Inflammation microbienne ou virale des amygdales et du pharynx, l'angine, chez l'enfant, doit toujours être considérée avec attention.
Elle est beaucoup plus fréquente que chez l'adulte.
Tissu lymphoïde jeune et en pleine expansion dans les premières années de la vie, l'amygdale est un terrain d'élection pour les affections de quelque nature qu'elles soient.
La vie en collectivité suscite endémies ou épidémies. Une équipe du Centre International de l'Enfance, étudiant en milieu scolaire pendant des années, a montré qu'il y avait au moins 80 % des enfants qui étaient ou avaient été porteurs de streptocoques dans la gorge.
Il faut souligner la nécessité qui se pose avant tout de reconnaître et d'identifier l'angine à streptocoques et beaucoup plus rarement l'angine diphtérique, toutes deux particulièrement graves dans leurs complications immédiates et lointaines et qui réclament chacune un traitement particulier précoce et efficace.
1.2.1 Examen clinique
1.2.1.1 Examen local
L'examen de la gorge n'est pas toujours chose facile et dans bien des cas, l'enfant ne s'y prête pas volontiers. Il faut donc savoir agir avec douceur et sans précipitation, se mettre dans de bonnes conditions d'éclairage, l'enfant étant couché.
Il importe de ne pas avoir la simple vue des amygdales mais de tout l'intérieur de la bouche. Il n'est pas toujours aisé d'apercevoir un enduit pultacé plus ou moins caché dans les replis des piliers.
Il faut s'efforcer de ne procéder qu'à une seule investigation mais ne point hésiter à la recommencer s'il persiste un doute d'exploration incomplète des amygdales, des piliers, de la luette, du voile du palais, de la paroi postérieure du pharynx, des muqueuses jugale, gingivale et linguale.
1.2.1.2 Examen régional
Il concerne les fosses nasales, les conjonctives, les oreilles, les aires ganglionnaires cervicales dont l'inflammation peut être concomitante.
1.2.1.3 Examen général
Il faut reconnaître une éruption et tous autres signes associés ou non : digestifs, broncho-pulmonaires, cardiaques, nerveux, articulaires, ganglionnaires...
L'interrogatoire notera les caractères de la fièvre, l'existence ou non d'anorexie, de dysphagie, de gêne respiratoire, de douleurs abdominales ou musculaires.
L'ensemble de cette enquête clinique doit pouvoir répondre à la question : s'agit-il d'une angine maladie ou d'une angine symptôme ? Comme on peut la rencontrer au cours d'une scarlatine, d'une mononucléose infectieuse, d'une méningite, d'une poliomyélite...
1.2.2 Etiologie
1.2.2.1 Données fournies par l'examen local
Cet examen objective des aspects très divers de l'atteinte amygdalienne : érythémateux, érythémato-pultacé, pseudo-membraneux, vésiculeux, ulcéreux, ulcéro-nécrotique, phlégmoneux.
L'atteinte est, dans la majorité des cas, bilatérale.
Ce sont les trois premiers qui posent surtout un problème étiologique devant engager une conduite thérapeutique spécifique.

- Angines érythémateuses et érythémato-pultacées :

Les angines érythémateuses sont surtout d'origine virale (8 à 9 fois sur 10 ) mais elles peuvent être d'origine bactérienne et streptococcique.
Les angines érythémato-pultacées sont, le plus souvent, d'origine bactérienne, et, dans la majorité des cas, d'origine streptococcique ; mais certaines peuvent être dues à des staphylocoques, des pneumocoques, des bacilles de Pfeiffer, de Friedlander. Elles sont plus rarement virales comme celles de la mononucléose infectieuse.
On connaît la relative bénignité des angines virales sur lesquelles l'antibiothérapie n'a d'ailleurs pas de prise et la gravité des angines à streptocoques du groupe A b-hémolytique que le traitement pénicilliné précoce guérit rapidement, empêchant les complications redoutables que sont le R.A.A. et la glomérulonéphrite. D'anciennes statistiques avait révélé que 1 % des angines à streptocoques étaient génératrices de R.A.A.. Cette affection ne s'observe plus que rarement ; cela tient au fait qu'il paraît de bonne conduite à beaucoup de praticiens d'entreprendre aussitôt pour toute angine diagnostiquée une cure par antibiotiques. Cependant, à l'heure actuelle où l'on essaie de limiter au mieux leur emploi dans la pratique courante, on peut, en s'aidant de la clinique et d'examens de laboratoire, avoir une attitude plus nuancée.
Le tableau ci-après énumère les critères de différenciation des angines streptococciques et des angines virales.
 
Angine aiguë streptococcique
   
Angine aiguë virale

- pas avant 3 ans
    - dès le premier âge
- fièvre rapidement élevée (39-40°)     - fièvre variable
- frissons, céphalée, vives douleurs      
- dysphagie intense localisée à l'oropharynx     - dysphagie plus diffuse
- rouge spécialement vif mais rapidement recouvertes dun enduit blanchâtre peu adhérent = angine érythémato-pultacée     - tuméfactions amygdaliennes modérées avec rougeur diffuse du pharynx, sans enduit le plus souvent = angine érythémateuse
- adénopathies sous angulo-maxillaires fermes, mobiles et douloureuses     - adénopathies plus étendues.
      - douleur locale avec sensation de cuisson
      - toux d'irritation
- langue saburrale
ni toux, ni coryza, ni laryngite, ni bronchite     - atteinte extensive des voies respiratoires : coryza, laryngite, trachéite
      - conjonctivite uni ou bilatérale
      - myalgies
- leucocytose avec polynucléose     - leucopénie plutôt que leucocytose
      - notion épidémique.
 

Se référant à ces caractères distinctifs, BREESE et DISNEY ont pu conclure, d'une part, à une étiologie streptococcique, confirmée ultérieurement, dans 75 % de leurs 495 cas et, d'autre part, à une étiologie non streptococcique également confirmée dans 77 % de leurs 704 autres cas. Il n'en demeure pas moins qu'il y a eu 25 % d'erreurs environ.

Il est évident qu'au moindre doute, il ne faut pas hésiter à prescrire de la PENICILLINE, surtout dans l'impossibilité d'avoir le secours d'examens de laboratoire. Il faut aussi rappeler que toute angine survenant chez un ancien R.A.A. doit obligatoirement être traitée en raison des risques d'atteinte cardiaque.
1.2.2.2 Les données fournies par le laboratoire
Le diagnostic d'angine bactérienne sera assuré par l'identification d'un germe après prélèvement de gorge. Il faut actuellement 24 heures pour reconnaître un streptocoque hémolytique et 48 heures pour l'identifier au groupe A B-hémolytique seul responsable des complications redoutées. Un typage plus précis n'est pas de pratique courante. Pour beaucoup d'auteurs, si l'on a, dans ce délai, la réponse du laboratoire, il n'y a pas préjudice pour le malade de l'avoir attendue avant d'engager le traitement, dans le cas, bien sûr, où l'angine a été diagnostiquée à son début.

Le prélèvement de gorge fait dans de bonnes conditions techniques (envoi et mise en culture) représente le seul moyen d'assurer le diagnostic. Le % de faux négatifs est faible.

Le dosage des antistreptolysines n'a guère d'intérêt à la phase initiale de la maladie et ne peut reflèter qu'un certain degré d'immunité ancienne. Fait à ce stade, il n'apporte qu'un chiffre servant de référence pour un dosage ultérieur dans un délai de deux semaines.

L'identification des virus ne peut apporter que des données d'ordre épidémiologique et n'a pas, pour le moment, de corollaire d'ordre thérapeutique. L'hémogramme apporte aussi des données non négligeables indiquées dans le tableau ci-dessus.
1.2.3 Le traitement
1.2.3.1 Angine virale,
érythémateuse, dont le contexte clinique répond assez étroitement à celui donné dans le tableau ci-dessus :
- on peut s'abstenir de toute antibiothérapie mais il est toujours prudent de faire un prélèvement pharyngé.
- Si le prélèvement s'avérait positif, recourir à l'antibiothérapie qu'il faudrait aussi mettre en oeuvre si l'évolution faisait penser à une surinfection.
- employer des antiseptiques locaux (collutoires pressurisés, pastilles à sucer) et des instillations nasales à base de soluté physiologique.
- en cas de fièvre élevée, prescrire des antithermiques notamment chez le jeune enfant où l'on a toujours la crainte de voir apparaître des convulsions mais dont la posologie ne doit pas entraîner une chute brutale de la température. Chez les enfants plus grands, il n'est pas toujours nécessaire de les employer et certains pensent que la fièvre favorise la sécrétion d'interféron, à action antivirale.
1.2.3.2 Angine microbienne,
érythémateuse ou érythémato-pultacée : elle est "a priori" streptococcique.
- Pénicilline G en injection ou aussi bien Pénicilline V par voie orale, 1 à 2.000.000 unités/J pendant 10 jours.
- Erythromycine à donner à la dose de 50 mg/kg/j en cas d'intolérance à la Pénicilline.
- Ampicilline, 100 mg/kg, mais savoir que dans les angines à streptocoques les échecs sont de l'ordre de 15 %.

En bref, en matière d'angine pas de surconsommation d'antibiotiques et rester fidèle à la Pénicilline.
1.2.3.3 Angines pseudo-membraneuses
La fausse membrane se reconnaît assez facilement. Elle se présente sous l'aspect d'un enduit continu, exsudat fibrineux : blanc jaunâtre ou grisâtre, de surface plus ou moins irrégulière, adhérent à la muqueuse mais pouvant en être détaché.
Elle doit immédiatement faire penser à la diphtérie, surtout si elle est rapidement extensive et si la muqueuse environnante est relativement pâle.
Mais elle peut se voir dans la mononucléose infectieuse ou même dans certaines angines streptococciques particulièrement graves. Notons aussi et plus particulièrement chez le nourrisson la possibilité d'étiologie mycosique.
Pour l'étiologie s'aider, bien entendu, de la notion ou non de vaccination antérieure. Faire toujours un prélèvement et, au moindre doute engager une sérothérapie antidiphtérique sitôt le prélèvement fait.
On doit d'autant plus craindre cette affection qu'on n'en a plus l'expérience et que des erreurs récentes viennent d'en rappeler la possibilité.
Si diphtérie ou crainte : sérothérapie 20.000 à 80.000 unités en une seule injection intra-musculaire.
Si streptococcie, recours à la pénicillinothérapie.
La mononucléose infectieuse relève du virus d'Epstein-Barr et ne nécessite que des soins locaux et une médication tonique.
1.2.3.4 Autres aspects des angines
Ils sont plus rares et posent moins de problèmes de diagnostic étiologique.
- aspect vésiculeux : c'est celui :

    * de l'angine herpétique avec ses excoriations polycycliques et d'autres localisations possibles, labiales et endobuccales. Les vésicules sont plus larges, plus douloureuses, plus nombreuses et plus antérieures.
    * de l'herpangine du jeune enfant avec des vésicules de petite taille le long du bord libre du voile, s'ulcérant rapidement, s'accompagnant de myalgies et de céphalées et dûes au virus Coxsackie A.

Dans ces deux éventualités, si l'amygale est à peine rouge, l'atteinte de l'état général est assez marquée. Toujours virales ces angines ne demandent que des soins locaux et une médication tonique (Vit. C).

- aspect ulcéreux et ulcéro-nécrotique :
Au cours d'hémopathies malignes ou bénignes (mononucléose infectieuse) qu'identifient hémogrammes et myélogrammes.

Aspect unilatéral :

    * de l'angine de Vincent, dans l'enfance, avec une ulcération irrégulière plus ou moins profonde provoquée par une association fuso-spirillaire. Répond bien à la pénicilline.
    * du phlegmon de la loge amygdalienne avec bombement interne, dysphagie intense, trismus et otalgie. Ampicilline et traitement chirurgical.

1.2.4 les angines récidivantes
- Souvent d'origine streptococcique, elles relèvent d'une pénicillinothérapie orale au long cours habituellement efficace et dont un des avantages est de retarder l'amygdalectomie jusqu'à l'âge de 4 ou 5 ans.
- Lorsque les amygdales restent hypertrophiées et cryptiques, elle recèlent de nombreux germes et il est souvent nécessaire de procéder à cette intervention.

Les angines récidivantes posent aussi le problème d'un déficit immunitaire dont il faut s'efforcer de reconnaître la cause générale ou locale. On retrouve les problèmes posés par les rhinopharyngites.

Les angines chez l'enfant, ne doivent jamais être considérées comme banales. Fréquentes et fort heureusement bénignes, dans la plupart des cas, elles doivent cependant amener chaque fois la réflexion du praticien en regard de leur étiologie et de leur traitement.
2 Affections pulmonaires, bronchiques et parenchymateuses
Plus encore que chez l'adulte elles sont, dans la grande majorité des cas, d'origine virale (virus influenzae et para-influenzae, virus syncitial respiratoire, adéno-virus...). Les atteintes primitives ou secondaires (surinfections) bactériennes relèvent surtout du pneumocoque, du staphylocoque, de l'hémophilus influenzae, du mycoplasme pneumoniae.

L'observation clinique permet de reconnaître des aspects sémiologiques plus particuliers au jeune enfant : une fréquence respiratoire plus grande, des signes de détresse tels que battements des ailes du nez, tirage, geingnement, une cyanose d'installation plus rapide, une tachycardie élevée, une agitation excessive, un météorisme abdominal, alors qu'une bradycardie, une irrégularité respiratoire, un trop grand calme sont des signes de haute gravité de même qu'une acidose respiratoire.

Par contre, on ne note presque jamais d'expectoration, l'enfant déglutissant ses crachats jusqu'à l'âge de 4-5 ans. Rien de particulier n'est à relever du point de vue radiologique sinon, chez le nourrisson, l'obscurcissement des champs pulmonaires lors du cri et une hyperclarté relative à la reprise inspiratoire.
2.1 Infections virales
2.1.1 La bronchite aiguë
Elle est habituellement virale. Elle est précédée ou accompagnée d'une atteinte naso-pharyngée. Le signe le plus constant est la toux sèche, rebelle, à recrudescence nocturne, devenant productive après deux à trois jours. L'examen physique révèle secondairement des râles diffus.
La palpation montre des frémissements produits par les sécrétions dans les troncs bronchiques.
A la radiographie, il existe une intumescence hilaire, avec accentuation des arborisations bronchiques.
Le pronostic est bénin.
2.1.2 La bronchiolite aiguë du nourrisson
Etiologie presque exclusive : le virus syncitial respiratoire (VRS).
Elle s'observe surtout dans les tous premiers mois de la vie (70 à 80 % des cas, durant les 6 premiers mois). L'obstruction bronchiolaire réalise une distension emphysémateuse du poumon, et de mauvais échanges gazeux au niveau de l'alvéole.
Précédée pendant 2 à 3 jours par une infection des voies aériennes supérieures, le début est brusque, et, en quelques heures, peut s'installer un tableau alarmant. Si la fièvre peut rester modérée, la toux est rebelle, l'enfant fait de grands efforts pour respirer et cette dyspnée est impressionnante ; une mousse aux lèvres apparaît souvent. L'enfant refuse de boire.
Le thorax est distendu, hypersonore, la respiration rapide et superficielle, avec tirage sous et intercostal.
A l'auscultation, il existe un sifflement expiratoire bronchique avec quelques râles alvéolaires fins, disséminés. Un silence respiratoire est l'indice d'une obstruction grave.
Les radiographies montrent une hyperclarté diffuse, prédominant aux bases, avec abaissement et immobilité des coupoles diaphragmatiques, distension thoracique, avec côtes horizontales. Les ombres broncho-vasculaires sont accentuées, mais il n'existe pas de foyer parenchymateux.

L'évolution est, le plus souvent, favorable, mais la mort brutale est toujours possible au cours d'une apnée, d'une défaillance cardiaque, d'une surinfection, ou d'un pneumothorax.

Le traitement comporte, outre l'oxygène et des aérosols fluidifiants, des antibiotiques si surinfection fondée sur des données bactériologiques. La kinésithérapie de drainage est un appoint indiscutable. Le passage en réanimation peut être nécessaire en raison :
- des difficultés respiratoires (acidose respiratoire), SaO2 abaissée ;
- il n'y a pas en principe de défaillance cardiaque sauf cardiopathie préexistante. En ce cas on applique le traitement de la défaillance cardiaque congestive (voir cours).
La corticothérapie ne paraît pas avoir un intérêt.

Le pronostic lointain n'est pas toujours favorable en raison de séquelles broncho-pulmonaires favorisant des infections récidivantes et aggravantes ou des fibroses s'étendant à bas bruit. La relation avec la maladie asthmatique doit toujours être envisagée.
2.1.3 Les bronchopneumopathies de l'enfant
Elles s'expriment sensiblement de la même façon que chez l'adulte, avec, cependant, majoration du facteur favorisant que représente la plus fréquente atteinte préalable des voies aériennes supérieures.

Elles ont souvent un début insidieux, avec fièvre modérée, toux sèche, aspect congestif du visage. Le début peut être brutal avec céphalées, courbatures, fièvre élevée. Les signes d'auscultation pulmonaire, râles divers, n'apparaissent qu'au 2ème ou 3ème jour ; ils sont souvent discrets.

Les radiographies montrent des images très variées :
- intumescence hilaire isolée ou associée,
- trainées hilifuges à prédominance hilo-basale donnant, avec l'épaississement hilaire, l'aspect classique en "ailes de papillon",
- condensation segmentaire dense, ou plus ou moins floconneuse, nodules plus ou moins disséminés dans les deux champs pulmonaires,
- plus rarement aspect de miliaire,
- réaction pleurale scissurale ou de la grande cavité.

Toutes ces images persistent habituellement très longtemps, 16 % d'entre elles persistent après 21 jours et certaines peuvent durer deux mois. Elles peuvent s'accompagner d'adénopathies.
L'examen du sang donne un taux normal de leucocytes, ou une leucopénie, argument en faveur de l'origine virale d'une pneumopathie. Mais la leucocytose en dehors de toute surinfection peut être rencontrée. Notamment quand les adénovirus sont en cause.
La vitesse de sédimentation est accélérée.

2.1.4 Les bronchopneumopathies chroniques

Elles ont fait l'objet d'études récentes et méritent une particulière attention depuis qu'on s'est rendu compte que 25 % d'adultes atteints de bronchite chronique avaient des antécédents respiratoires remontant à l'enfance.

Elles relèvent de causes diverses :
- certaines facilement reconnues comme la tuberculose, la mucoviscidose, la bronchectasie commune de l'enfant, les séquelles de bronchopneumopathies virales.
- certaines doivent être davantage recherchées comme les corps étrangers, les kystes congénitaux.
- certaines enfin sont plus rares comme le déficit en alpha 1 antitrypsine, la sclérose pulmonaire, la protéinose alvéolaire, une fistule trachéo-oesophagienne, une pneumopathie de déglutition par reflux gastro-oesophagien.

Une entité particulière a été décrite sous le nom de syndrome de Mac Leod ou poumon hyperclair unilatéral, survenant après guérison clinique d'une bronchopneumopathie virale et caractérisée par une diminution du murmure vésiculaire, une hyperclarté du côté où siégeaient les opacités et une diminution ventilatoire et circulatoire avec obstruction des petites bronches.
Ce syndrome, de physiopathologie inconnue, est définitif.
2.2 Infections bactériennes
2.2.1 La staphylococcie pleuro-pulmonaire
Observée surtout dans les premiers mois de la vie doit avoir un développement particulier en raison de son originalité et de sa gravité (voir cours).
 
2.2.2 La pneumonie à pneumocoques
90 % des infections bactériennes se voient plus tard, après 2 ans, avec un début brutal, fièvre à 40°, souvent isolée, où le frisson est remplacé par un vomissement. La douleur n'est pas toujours thoracique, elle peut être abdominale si bien qu'on pense plutôt à un syndrome méningé ou à une appendicite. Dans la plupart des cas, herpès labial, pommettes rouges.
La radiographie pulmonaire montre déjà une opacité qui va rapidement devenir homogène et, de segmentaire, s'étendre à tout un lobe.
Les signes physiques classiques de palpation, percussion, auscultation n'apparaissent qu'au bout de 36 à 48 heures (râles crépitants, souffle tubaire...).
La toux est inconstante et sèche : on ne notera pas d'expectoration rouillée.
La N.F.S. montre une hyperleucocytose avec polynucléose. L'hyperfibrinémie est constante.
L'apyrexie est rapidement obtenue en 24 ou 48 heures au plus sous traitement antibiotique par Pénicilline (1 à 2 millions d'unités/j) ou amoxicilline à maintenir pendant 10 jours.
On n'observe plus que rarement, actuellement d'abcès pulmonaires ou de pleurésies purulentes : il est bon, toutefois, de s'assurer d'un retour à la normale par un cliché pulmonaire en cours et en fin de traitement.
L'apparition puis la multiplication de Pneumocoques de sensibilité diminuée à la pénicilline voir résistant impose des doses d'amoxicilline supérieures ou égales à 80 mg/kg/j.
2.2.3 La pneumonie à hémophilus influenzae
Elle est moins souvent rencontrée en France qu'aux U.S.A. : on évoque cette possibilité devant des aspects radiologiques moins tranchés, une évolution plus longue par action moins spectaculaire de l'antibiothérapie.
2.2.4 Pneumonie à mycoplasme
C'est une pneumopathie interstitielle. Diagnostic confirmé par la sérologie.
Traitement : Tétracycline - Erythromycine - Binocycline ou abstention.
Staphylococcie pleuro-pulmonaire
E. Deneuville, C. Jézéquel

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 6 avril 1999

1 Etiologie
2 Clinique
2.1 Signes respiratoires
2.2 Signes abdominaux
2.3 Signes généraux
2.4 Signes physiques
   

3 Examens complémentaires
3.1 Radiologiques
3.2 De laboratoire
4 Evolution
5 Traitement
Maladie fréquente touchant surtout le nourrisson, qu'il faut savoir évoquer systématiquement devant un tableau de détresse respiratoire à cet âge.
Ce diagnostic devra être une hantise devant toute polypnée fébrile.
1 Etiologie
Les staphylococcies pleuro-pulmonaires surviennent à tout âge, mais surtout avant 6 mois. Pas de prédominance de sexe.
Frappent surtout :
- Les enfants hypotrophiques, anciens prématurés ;
- Les enfants des collectivités (crèche, pouponnière, maternité, hôpitaux) ;
- Les enfants atteints de mucoviscidose, d'a-gamma-globulinémie, ou de malformations pulmonaires.
Il faut en souligner la fréquence lors des saisons froides.
2 Clinique
Le début est habituellement brutal et associe trois ordres de signes, dont l'association fait porter le diagnostic :
2.1 Signes respiratoires
Polypnée, toux sèche, tirage, cyanose qui s'exagère lors de la mobilisation de l'enfant.
2.2 Signes abdominaux
Météorisme abdominal +++, qui peut faire penser à une occlusion.
2.3 Signes généraux
Température qui atteindra souvent 39 à 40°, surtout asthénie, enfant abattu, au teint pâle et grisâtre.
2.4 Signes physiques
Difficiles à mettre en évidence lors de l'examen ; seule une recherche soigneuse permettra de découvrir une diminution modérée du murmure vésiculaire, surtout une matité. Une défaillance cardiaque est possible.
3 Examens complémentaires
3.1 Radiologiques
Le tableau exige des clichés de thorax de face et de profil, en position assise.
3.1.1 Images des premières heures :
Opacités floconneuses à limites floues, parenchymateuses. Toujours bien vérifier le cul de sac. Rechercher une ligne bordante. Retenir la rapidité d'évolution. Répéter au moindre doute les clichés.
3.1.2 Images radiologiques du lendemain :
Elles associent des images pleurales et parenchymateuses ; il s'agit d'opacités plus ou moins localisées et segmentaires, non homogènes au sein desquelles apparaissent vers le 3ème ou 4ème jour des bulles isolées ou groupées. Ces images aériques claires, circulaires correspondent à une perte de substance bien limitée. Leur apparition se fait sans expression clinique. Elles peuvent toujours, par rupture de leur paroi, constituer des bulles géantes entraînant une détresse respiratoire par compression, par pneumothorax.Cette évolution particulière exige une surveillance radiologique bi-quotidienne avec nouveaux clichés à la moindre aggravation respiratoire.
3.1.3 Images pleurales :
- le plus souvent, pleurésie purulente avec opacité de la base.
- pyopneumothorax secondaire à l'éclatement dans la plèvre d'une bulle sous tension. Cet accident évolutif peut survenir du 3ème au 15ème jour de la maladie. Son installation est extrêmement brutale avec accentuation des signes de détresse respiratoire.
3.2 De laboratoire
- Numération formule : anémie modérée, leucocytose à polynucléose. La présence de leucopénie est habituellement le témoin des formes sévères.

- Ponction de plèvre : met en évidence la pleurésie purulente avec présence de staphylocoque ; il est capital de la découvrir. Cette ponction doit être faite systématiquement, même lorsqu'il n'y a qu'un comblement de cul de sac.

- Hémoculture : qui découvre souvent ce germe.
4 Evolution
Les morts sont encore possibles au cours de cette affection malgré l'antibiothérapie et de trois manières :
1. par forme toxique : il s'agit d'un tout petit nourrisson avec leucopénie et tableau de choc dans les 24 premières heures.
2. par pneumothorax : il s'agit d'une faute de surveillance, inadmissible actuellement.
3. dans les formes bilatérales.

En fait, dans l'immense majorité des cas, la guérison est obtenue. La température revient à la normale après le 10ème jour.

Les complications respiratoires, bulles géantes, pyopneumothorax, peuvent survenir jusqu'au 15ème jour, d'où la nécessité d'une étroite surveillance clinique et radiologique avec, auprès de l'enfant, tout le matériel pour intervenir sans délai et drainer en cas d'accident.

Après guérison du processus infectieux, il existe toujours une "restitutio ad integrum" quelles qu'aient été les lésions réalisées par la maladie.
5 Traitement
Le traitement de la staphylococcie pleuro-pulmonaire est avant tout un traitement antibiotique.

Les antibiotiques les plus utilisables actuellement sont : l'oxacilline, les céphalosporines, la fosfomycine. Les aminosides sont associés au moins dans le traitement initial. La Vancomycine est très active sur le staphylocoque doré mais elle est peu diffusible. Chaque fois que le germe peut être isolé le traitement sera guidé par l'antibiogramme. En cas de staphylocoque méthicillino résistant l'association fosfomycine et oxacilline est en général efficace. Les premiers jours du traitement de la Riamycine peut être associée.

La durée du traitement antibiotique est de 4 à 6 semaines. La voie parentérale peut être éventuellement relayée par une antibiothérapie orale.

Le pneumothorax et le pyopneumothorax peuvent obliger à un drainage de 4 à 7 j. environ avec un drain de Joly. Ceci s'impose dès que l'épanchement est abondant.
Primo-infection tuberculeuse
E. Deneuville, C. Jézéquel

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 7 avril 1999

1 Signes de la tuberculose initiale
1.1 Forme latente
1.2 Forme patente
2 Examens complémentaires
2.1 Examens courants de laboratoire
2.2 Recherche de l'allergie tuberculinique
2.3 Recherche du bacille de Koch
2.4 Signes radiographiques pulmonaires
3 Enquête étiologique
   

4 Evolution
4.1 Formes latentes
4.2 Formes patentes
5 Formes cliniques particulières
5.1 Méningite tuberculeuse
5.2 Formes du nourrisson
6 Traitement
6.1 Traitement préventif
6.2 Traitement curatif
Objectifs

1. Décrire la technique d'exploration de l'allergie tuberculinique par bague et intra-dermo réaction, et donner les critères d'interprétation.

2. Indiquer les circonstances épidémiologiques et cliniques dans lesquelles on doit évoquer le diagnostic de primo-infection tuberculeuse.

3. Décrire les aspects radiologiques de P.I.T de l'enfant non compliquée (virage récent et isolé).

4. Citer les complications locales liées à l'évolution de l'adénopathie trachéobronchique tuberculeuse.

5. Enumérer les éléments du pronostic d'une P.I.T.

6. écrire les principes du traitement et de la surveillance d'une primo-infection de l'enfant.

7. Citer les indications de la corticothérapie dans le traitement de la tuberculose de l'enfant.

8. Prescrire la conduite à tenir vis-à-vis de l'entourage d'un enfant présentant une primo-infection tuberculeuse.

9. Donner les indications de la chimioprophylaxie.

On désigne sous le nom de primo-infection tuberculeuse, l'ensemble des manifestations qui accompagnent ou suivent la pénétration de mycobactérium tuberculosis (bacille de Koch), dans un organisme humain.

Elle n'est que le début d'une maladie qui peut se manifester pendant toute la vie, d'où la dénomination de tuberculose initiale.

La contamination est avant tout inter-humaine, le plus souvent familiale. Le recul de l'infection est dû à la pratique, rendue obligatoire, en France, de la vaccination par le BCG et l'amélioration des conditions socio-économiques. Néanmoins, il apparaît toujours des cas isolés ou des foyers d'épidémie, autour d'un sujet contagieux.
1 Signes de la tuberculose initiale
Il faut distinguer deux formes : latente et patente.
1.1 Tuberculose initiale de forme latente :
Le seul symptôme est le virage des réactions cutanées à la tuberculine qui, de négatives deviennent positives, traduisant ainsi l'apparition de l'allergie tuberculinique. Cette découverte est toujours le fait d'une recherche systématique. Un examen clinique, minutieux et complet, ne découvre aucun signe général, fonctionnel ou physique, aucun signe radiologique ou bactériologique.
On ne peut parler de tuberculose latente que dans ces conditions précises et après des examens répétés qui ne révèlent rien.
Le diagnostic de tuberculose initiale reposant uniquement sur l'apparition de l'allergie tuberculinique, il est capital de savoir la rechercher.

Recherche de l'allergie tuberculinique :

Plusieurs tests sont utilisés : qualitatifs ou quantitatifs.
1.1.1 Test qualitatif :
D'utilisation simple et pratique, ils ne peuvent donner une idée de l'intensité de l'allergie.

La réaction transdermique : réalisée par la bague Mérieux ou Monotest.

Technique : la tuberculine est déposée sur un chaton de matière plastique muni de piquants. Il suffit d'appliquer ceux-ci contre la peau et de les maintenir au contact pendant quelques instants.

Lecture : au 4ème jour.

    * négative : aucune réaction locale,
    * positive : érythème + induration supérieure à 2 mm.

1.1.2 Les tests quantitatifs
L'intra-dermo réaction de Mentoux :

C'est méthode est très précise. Elle permet de faire pénétrer dans l'épaisseur du derme une quantité mesurable de tuberculine. En pédiatrie, on utilisera des solutions de tuberculine contenant 10 unités de tuberculine dans 1/10ème de Ml à injecter. Des solutions trop fortes (à 50 unités) sont à déconseiller, car elles donnent de fausses réactions positives : réactions croisées avec d'autres myco- bactéries atypiques, pouvant donc n'être pas spécifiques.

Technique : il faut employer une seringue étanche, graduée en centièmes de millilitre et une aiguille courte et fine à biseau court, parfaitement adaptée à la seringue.

L'aiguille est introduite tangentiellement à la peau, biseau en haut. Dès que le biseau a disparu, on pousse doucement l'injection qui doit être strictement intra-dermique. Il apparaît une petite papule. La distension des pores de la peau provoque le phénomène de peau d'orange. Cette constatation permet d'assurer que l'injection est bien intradermique. Le volume de la solution injectée doit toujours être de 1/10ème de ml.

Lecture : 3 jours après l'injection (72ème heure). Lorsqu'elle est positive, il y a rougeur et induration au point d'injection. L'élément essentiel est l'induration perçue au doigt. Cette induration doit être mesurée pour pouvoir être comparée ultérieurement à d'autres intra-dermo. Elle est dite positive lorsque la taille de l'induration atteint ou dépasse 10 mm.

Conclusion

Seule l'intra-dermo-réaction faite dans ces conditions permet d'obtenir une induration mesurable au millimètre comparable d'un examen à l'autre et d'un malade à l'autre sans tenir compte de la réaction érythémateuse qui n'est pas spécifique. Cette réaction est forte chez les sujets tuberculisés, faible chez ceux qui sont infectés par une mycobactérie atypique ou chez les sujets qui ont eu une vaccination antérieure par le BCG souvent ancienne et oubliée.
1.2 Tuberculose initiale de forme patente
En plus du virage des réactions cutanées à la tuberculine, elle s'accompagne de signes cliniques, radiologiques, bactériologiques, isolés ou associés.
1.2.1 Manifestations générales
1.2.1.1 Formes discrètes :
Ce sont les plus fréquentes : l'enfant est fatigué, anorectique ; il maigrit, travaille mal avec souvent un clocher fébrile vespéral. Ces signes deviennent alarmants par leur persistance et incitent à la recherche de la réaction tuberculinique. Seule est à retenir la notion de virage récent.
1.2.1.2 Formes bruyantes :
La typhobacillose. Le début est brusque. Chez un enfant en pleine santé, la fièvre s'élève rapidement à 39 ou 40°, avec céphalées, anorexie. La langue est propre, il existe une discrète splénomégalie.
Tout état fébrile prolongé avec conservation de l'état général doit faire évoquer une fièvre d'invasion tuberculeuse.
1.2.1.3 Erythème noueux :
Eruption longtemps considérée comme spécifique de la tuberculose, on sait qu'elle relève maintenant d'autres étiologies. Néanmoins, son apparition doit toujours comporter une étude de l'allergie tuberculinique.
Les éléments sont des nouures enchassées dans le derme, rouges ou rosées, douloureuses à la pression, peu nombreuses, évoluant par poussées qui se succèdent à un ou deux jours d'intervalle. Elles siègent à la face d'extension des membres, face antérieure du tibia surtout, parfois face postérieure de l'avant bras. Ces nouures, de tailles variées, deviennent en quelques jours moins sensibles, prennent une teinte violacée. Elles disparaissent en deux ou trois semaines.
1.2.1.4 Kérato-conjonctivite phlycténulaire :
Elle peut être isolée ou accompagner un érythème noueux. Elle réalise un tableau de conjonctivite unilatérale avec gêne oculaire, photophobie, larmoiements. Le pronostic est bon, la guérison sans séquelles.
2 Examens complémentaires
Quel que soit le tableau clinique réalisé, même en cas d'examen systématique de l'enfant, divers examens biologiques seront demandés.
2.1 Les examens courants de laboratoire
Hémogramme, vitesse de sédimentation globulaire (accélérée)... n'apportent rien de valablement positif pour le diagnostic.
2.2 Recherche de l'allergie tuberculinique
Il en est autrement de la recherche de l'allergie tuberculinique (cf. plus haut : forme latente)
2.3 Recherche du bacille de Koch
De même, la recherche du bacille de Koch est indispensable pour permettre d'affirmer le diagnostic et guider la thérapeutique en cas de résistance aux antibiotiques. Elle se fera :
2.3.1 Par tubage gastrique :
Sur un enfant à jeun : examen répété pendant plusieurs jours (au moins 3 jours de suite) et à renouveler si négativité le mois suivant. Le prélèvement sera examiné directement sur lame, cultivé en milieux spéciaux et inoculé au cobaye. Dans la série de GERBEAU, chez 16,8 % des malades, ces prélèvements se sont révélés positifs.
Malgré ce petit nombre de résultats positifs, cette recherche est indispensable.
2.3.2 Par examen et inoculation de l'expectoration
Dans les rares cas où elle existe. Chez les grands enfants, la production d'une expectoration peut être provoquée par inhalation de sérum salé hypertonique.
2.3.3 Par prélèvement endoscopique
Quand l'examen est réalisé.
2.4 Signes radiographiques pulmonaires
2.4.1 Le processus infectieux
La contamination par voie aérienne étant la plus fréquente, les bacilles inhalés se localisent habituellement en un point du poumon, s'y multiplient, créant le nodule primaire, ou chancre d'inoculation, le plus souvent de petite dimension et volontiers arrondi.

L'infection s'étend par les voies lymphatiques. Les ganglions satellites du territoire atteint sont alors envahis, augmentent de volume. Ils peuvent se fistuler et se vider par l'orifice de fistulisation. Ils siègent aux carrefours des axes bronchovasculaires prenant contact avec les vaisseaux, les nerfs et la paroi bronchique. L'inflammation péri-ganglionnaire atteint l'exo puis l'endobronche, comprimant les éléments péri-bronchiques. Les bronches peuvent être ainsi déplacées ou écrasées. L'obstruction bronchique est due pour une part à ce mécanisme d'écrasement, pour une autre part, à l'inflammation péri-ganglionnaire ayant gagné l'endobronche. Ces étapes évolutives expliquent les images radiologiques.
2.4.2 Les images radiologiques
Elles sont faites de 3 éléments : adénopathies médiastinales, lésion parenchymateuse, atélectasie ou emphysème.
2.4.2.1 Les lésions parenchymateuses :
Il s'agit généralement d'un nodule unique, le chancre arrondi ou ovalaire, dont le diamètre va de 5 à 20 mm. Les nodules multiples sont exceptionnels. Ils siègent le plus souvent au sommet. Sous traitement précoce, dans 50 % des cas le nodule disparaît en moins de 4 mois, dans 40 % des cas, il devient dense et se calcifie, le calcification commençant entre le 6ème et le 8ème mois de l'évolution.
2.4.2.2 Les adénopathies :
Les adénopathies médiastinales se traduisent par des opacités arrondies à bord convexe en dehors, débordant les limites du hile. Elles peuvent être multiples, uni ou bilatérales, s'étendant sur une partie ou sur toute la hauteur du médiastin. Leurs contours sont polycycliques. Le ganglion latéro-trachéal droit a une importance particulière parce qu'il draîne tous les lymphatiques du poumon droit et du lobe inférieur gauche. D'autre part, il peut s'ouvrir dans la trachée et provoquer chez le nourrisson la mort subite par inondation trachéo- bronchique.
Ces adénopathies persistent souvent, diminuant de volume en se sclérosant, elles peuvent se calcifier ou même disparaître.
Bien souvent, dans les formes évolutives, au cours des premiers mois, même sous thérapeutique, ces adénopathies s'étendent, se fistulisent et se compliquent de troubles de la ventilation.
2.4.2.3 Les opacités systématisées :
Elles apparaissent dans 20 à 40 % des observations et dans les trois premiers mois de l'évolution ; mais elles peuvent survenir jusqu'au 12ème mois après le début de la maladie. Il s'agit d'opacités objectivant un trouble de ventilation dont la topographie segmentaire ou lobaire souvent nettement accusée indique le territoire bronchique atteint.
Ces opacités systématisées sont d'autant plus fréquentes que les enfants sont plus jeunes. Elles apparaissent brusquement d'un examen radiologique à l'autre. Leur évolution est toujours la même en l'absence de traitement. Elles persistent sans se modifier pendant plusieurs semaines ou mois, puis se rétractent progressivement devenant plus étroites, plus denses et s'amenuisent quelquefois de plus en plus, ne persistent que sous l'aspect d'une opacité allongée, fine.
2.4.2.4 L'emphysème bulleux par compression et mécanisme de soupape est plus rare.
Des images supperposables sont obtenues par tomodensitométrie avec souvent plus de précision.
3 Enquête étiologique
Le contaminateur doit être soigneusement recherché par l'interrogatoire et l'examen systématique de tout l'entourage de l'enfant.
Lorsqu'il s'agit d'un enfant de moins de trois ans et en particulier d'un nourrisson ou lorsque plusieurs sujets de la fratrie sont atteints, l'origine est en règle familiale. Lorsque l'enfant est d'âge scolaire, l'enquête doit être plus élargie.
Si le contage est mis en évidence, il importe d'en préciser la date, l'importance et la durée.
4 Evolution
L'évolution de la primo-infection ne se conçoit plus maintenant que traitée.
4.1 Formes latentes
Le pronostic spontané est meilleur que celui des formes patentes. Mais le pourcentage de complications n'est pas nul. Dans le délai de 5 ans (relativement court en matière de tuberculose) on observe, suivant l'âge, de 1 à 6 % de complications méningées, miliaires, pulmonaires ou pleurales. La connaissance de ces faits impose le traitement systématique de cette forme latente.
On sera alors en droit de penser que la primo-infection ne sera marquée que par le virage des réactions tuberculiniques si la surveillance clinique et radiologique ne découvre aucune lésion organique pendant au moins un an.
4.2 Formes patentes
Malgré le traitement peuvent apparaître deux types de complications :
4.2.1 Les opacités sytématisées :
Quel que soit le mécanisme (compression de la bronche, granulome endobronchique et oedème de l'endobronche) ces opacités systématisées pouvant avoir une conséquence, une dilatation des bronches ultérieures. C'est dire qu'il importe de les découvrir le plus précocément possible afin de lever l'obstacle, soit par bronchoscopie (ablation du granulome) soit par un traitement par les corticoïdes. La persistance d'une atélectasie, pendant plus de trois semaines, entraîne habituellement l'apparition de bronchectasies dans les mois qui suivent. C'est pourquoi, ces enfants traités seront suivis systématiquement par une radiographie de face et profil du thorax, tous les trois mois pendant les six premiers mois au moins de l'évolution.
4.2.2 Les fistulisations
- Fréquence : 13 à 25 % selon les statistiques.
- Date de la fistulisation : précoce dans plus de la moitié des cas. Cependant 20 % des fistulisations peuvent se produire entre le 5ème et le 8ème mois du traitement.
- Signes cliniques : la fistulisation peut être totalement latente et découverte lors d'une endoscopie systématique. Une toux coqueluchoïde est loin d'être exceptionnelle. Elle est sèche ou productive, tenace.
Cet accident peut s'accompagner ou être précédé de fièvre (dans 70 % des cas), d'amaigrissement ou de stagnation pondérale.
Quant aux signes physiques, ils sont extrêmement discrets.
- Toute modification brusque de l'image radiologique constitue une indication à l'endoscopie.
On retrouve un infiltrat tâcheté (dissémination bronchogène) une opacité systématisée ou une image claire au sein d'un ganglion (caverne ganglionnaire).
- L'examen bactériologique est l'examen essentiel du diagnostic. Il découvre des BK dans le liquide gastrique, alors que jusque là les examens étaient négatifs.
- La bronchoscopie met en évidence :

    * soit un bombement de la paroi ;
    * soit une hernie inflammatoire du ganglion de la bronche ;
    * soit une fistulisation avec émission d'un caséum épais, blanc ou jaunâtre que l'on prélèvera ;
    * soit un granulome inflammatoire au pourtour de la fistule.

Quant aux autres complications d'ordre général : dissémination hématogène, elles ne se voient plus actuellement avec le traitement.
5 Formes cliniques particulières
5.1 Méningite tuberculeuse
La méningite tuberculeuse, si elle est devenue moins fréquente, reste encore exceptionnellement grave, du fait de la difficulté diagnostique et du retard apporté à la mise en oeuvre du traitement.
Elle frappe dans la majorité des cas, dans le semestre ou l'année qui suit le contact infectant et surtout l'enfant entre 2 et 6 ans. La contamination parait se faire à partir de foyers encéphaliques juxta méningés apparus au moment d'une dissémination hématogène.

Une phage prodromique est marquée par des signes variés : troubles du caractère, altération de l'état général, état subfébrile, crises convulsives isolées. Tous ces faits, alors que l'examen clinique semble n'apporter aucune étiologie, doivent conduire à explorer l'allergie tuberculinique et si celle-ci est positive, pratiquer une ponction lombaire.

Le tableau se complète par la suite. La fièvre, seul signe constant, dépasse hatibuellement 38° : elle s'accompagne de vomissements, peu nombreux, transitoires, d'asthénie, de troubles du caractére et de la conscience allant de la simple obnubilation au coma.
Des douleurs abdominales sont fréquentes, faisant poser le diagnostic d'appendicite. Les otalgies ne sont pas rares. Une atteinte des paires crâniennes peut apparaître.
Devant une incertitude étiologique, il ne doit jamais être prescrit à un enfant en état fébrile un antibiotique d'action antituberculeuse. Dans la crainte d'une méningite tuberculeuse, il faut alors procéder de la manière suivante :
- recherche de l'allergie : l'intra-dermo-réaction est le plus souvent franchement positive, mais exceptionnellement elle est négative, ce qui n'élimine pas le diagnostic.
- radiographie du thorax : montre souvent des séquelles d'une primo- infection, parfois miliaire, quelquefois rien.
- examen du fond d'oeil : montre souvent un flou papillaire et une fois sur trois des tubercules choroïdiens.
- une ponction lombaire : le liquide est clair ou opalescent avec :

    * hyperleucocytose de 30 à 500 éléments, à prédominance lymphocytaire,
    * hyperalbuminorachie de 0,60 à 2,5 g/l et plus,
    * glycorachie basse, inférieure à 0,30 g/l,
    * abaissement du taux des chlorures, inférieur à 6,5 g/l,
    * élévation de l'acide lactique supérieure à 300 mg/l.

Toute méningite lymphocytaire avec hypoglycorachie doit faire rechercher une méningite tuberculeuse qui est possible même en l'absence d'éléments de primo-infection évidente.

- On doit rechercher le BK (coloration de Ziehl, immunofluorescence, ensemencement, inoculation). L'identification du BK par biologie moléculaire est un moyen rapide d'identification.
- Vitesse de sédimentation, souvent accélérée.
- E.E.G. divers aspects (ondes lentes plus ou moins généralisées, signe de souffrance globale, tracé anarchique de mauvais pronostic).
5.2 Formes du nourrisson
- Début progressif avec état fébrile et toux,
- Ou brutal et rapide de miliaire + généralisée, ou de méningite,
- Adénopathies médiastinales ou péribronchiques souvent multiples et volumineuses,
- Gravité du pronostic.
6 Traitement
6.1 Traitement préventif
C'est la vaccination par le BCG. Celle-ci est souhaitable dès les premiers jours de la vie. Sinon, elle doit être faite dès la prise en charge d'un enfant, après avoir vérifié que la cuti était négative. Elle peut être réalisée par injection de 0,1 ml de suspension BCG strictement intra-dermique. En fait, on utilise le plus LA MULTIPUNCTURE (Monovax)
Il est essentiel de vérifier dans les trois mois qui suivent si les réactions tuberculiniques sont devenues positives et de le porter sur le carnet de santé. L'état de cette allergie tuberculinique sera vérifié systématiquement tous les ans jusqu'à trois ans, puis tous les deux ans.
En cas de réaction devenue négative, la revaccination au BCG est indiquée.

Complications de la vaccination :
- Complications générales : aucune.
- Complications locales : l'adénite à BCG ; elle est le plus souvent due à une faute technique et injection sous-cutanée. Elle n'entraîne aucun retentissement général, mais du fait de sa fistulisation peut durer plusieurs semaines ou mois.

Traitement :
Lorsque le ganglion est proche de la fistulisation, ponction à l'opposé du point déclive avec un vaccinostyl et lavage intra-cavitaire du ganglion avec une solution de TRECATOR. Cette ponction et ce lavage seront à refaire 3 à 4 jours plus tard. Habituellement après 2 à 3 ponctions, la guérison est obtenue.
6.2 Traitement curatif
6.2.1 Les différents anti-tuberculeux utilisés :
Le traitement anti-tuberculeux est donné en prise, le matin à jeun. Compte tenu des propriétés microbiologiques du BK, il serait préférable de laisser un délai d'une heure entre la prise médicamenteuse et le petit-déjeuner, ce qui en pratique quotidienne n'est pas toujours aisé à obtenir.

- La Rifampicine : actif sur les BK intra-cellulaires et extra-cellulaires, c'est un inducteur enzymatique hépatique qui n'a pas de toxicité directe. Il est utilisé à la dose de 10 à 15 mg/kg avant 2 ans et 10 mg/kg au delà de 2 ans. Les complications sont rares :
- accidents immuno-allergiques,
- érythème,
- prurit,
- douleurs abdominales,
- myalgies,
- des chocs anaphylactiques ont été décrits, ainsi que d'exceptionnelles anémies hémolytiques.

- L'Isoniazide-INH est également un produit très actif mais pour lequel il existe beaucoup plus de souches résistantes. Sa posologie est de 15 mg/kg avant 2 ans, 10 mg/kg au-delà de 2 ans. Il peut avoir une toxicité hépatique qui se traduit par une cytolyse particulièrement s'il est associé avec la Rifampicine du fait de son action d'induction enzymatique, la surveillance notera alors une élévation des transaminases ; il est beaucoup plus rare d'observer la survenue d'un ictère.
La posologie doit être réduite lorsque le taux des transaminases approche dix fois les valeurs normales. Il est préférable avant le traitement de réaliser un test d'acétylation qui consiste à rechercher la dose ajustée d'INH qui permet d'obtenir un taux sérique minimum efficace d'1 à 2 ug/ml 3 heures après la prise. Les adjuvants vitaminiques ne sont pas indispensables chez l'enfant. Les pansements gastriques modifient l'absorption de l'INH.

- L'Ethambutol est considérablement moins actif que l'INH, il est bactériostatique et a l'inconvénient de posséder une zone toxique proche de la zone thérapeutique. Il doit être utilisé à la dose de 20 à 25 mg/kg. Chez le grand enfant une surveillance de la vision des couleurs est nécessaire pour détecter la survenue (relativement rare) d'une névrite rétro-bulbaire.

- Le Pyrazinamide : c'est le plus puissant des anti-tuberculeux, il était beaucoup moins utilisé les deux dernières décennies car considéré comme très hépato-toxique. Il permet de raccourcir la durée totale du traitement. Des complications à type de cytolyse hépatique traduite par une élévation des transaminases, d'hyperuricémie ou d'arthralgies sont très peu fréquentes chez l'enfant mais impliquent l'existence de contrôles biologiques réguliers. La posologie est de 20 à 30 mg/kg.

- Streptomycine :

    * Action bactériostatique certaine ;
    * Mauvaise diffusion dans le LCR ;
    * Nourrissons : 5 cg/kg/j, I. M. ;
    * Grand enfant : 3 cg/kg/j, I. M. ;
    * Crainte de surdité d'apparition souvent rapide et évolutive ;
    * Ne pas employer plus de 2 mois.

- Acide para amino salicylique ou P.A.S. :

    * Faible action bactériostatique ;
    * Quelquefois troubles digestifs mineurs ;
    * 0,30g/kg/j per os ou I. V. ;
    * Ne pas dépasser 12 g/j.

- Les corticoïdes sont rarement utilisés en association avec les anti-tuberculeux, cependant leur usage peut être nécessaire en cas de troubles de ventilation de survenue récente, lors de la présence d'une adénopathie compressive ou d'une sténose inflammatoire bronchique. Cette association a également été utilisée lorsque l'on a observé des granulomes endobronchiques, ceci suppose bien entendu qu'une endoscopie bronchique ait été réalisée.
Il est nécessaire d'être prudent chez le nourrisson où l'existence d'une adénopathie latéro-trachéale compressive, en regard de laquelle la muqueuse de la trachée est fragile, contre-indique l'indication des corticoïdes qui majorent le risque de fistulisation.
Une pleurésie séro-fibrineuse implique également une association avec un traitement par corticoïdes, l'assèchement plus rapide réduit le risque de pachypleurite.
La posologie est d'1 à 2 mg/kg/jour pendant quinze jours à un mois avec ensuite un arrêt progressif.

Actuellement, en France, on n'utilise plus la streptomycine ni l'acide para-amino salicylique ou P.A.S., mais ces deux médicaments sont encore largement employés dans certains pays en raison de leur moindre coût.
6.2.2 Les indications
La primo-infection tuberculeuse de l'enfant, même dans sa forme latente, doit être traitée pour écarter le risque de survenue ultérieurement d'une tuberculose maladive.
6.2.2.1 Indication du traitement des primo-infections tuberculeuses latentes : (virage simple)
Ces primo-infections doivent être traitées même si elles ne sont pas récentes car une évolution vers une tuberculose pulmonaire n'est pas rare.
Le traitement doit comporter une bi-chimiothérapie (INH, Rifampicine) pendant six mois. Ce traitement évite les risques de résistance apparaissant lors des monothérapies.
6.2.2.2 Traitement des primo-infections tuberculeuses patentes :
Deux schémas sont encore utilisés :
1. Un traitement de neuf mois associant INH-Rifampicine-Ethambutol pendant trois mois, puis une double chimiothérapie par INH-Rifampicine pendant six mois ; on a au préalable vérifié la sensibilité du BK à l'INH.

2. Un schéma de traitement d'une durée de six mois comportant quatre anti-tuberculeux INH-Rifampicine-Pyrazinamide-Ethambutol pendant deux mois, puis relais par une double chimiothérapie par INH-Rifampicine pendant quatre mois. Le taux de rechute après arrêt du traitement est très faible. La poursuite du traitement au-delà des périodes indiquées est parfois nécessaire en cas d'absence de guérison radiologique.
6.2.2.3 Indication du traitement d'un nourrisson de parents bacillifères :
Si les intradermo-réactions sont négatives et les radios de thorax normales, l'enfant sera surveillé s'il a plus de 2 ans. Chez l'enfant de moins de 2 ans, il est préférable d'envisager une chimio-prévention par INH-Rifampicine ; si aucun signe clinique, radiologique et si les réactions cutanées tuberculiniques restent négatives, le traitement peut être interrompu après trois mois et l'enfant sera alors vacciné.
6.2.3 Cas particuliers
- Atelectasie par compression bronchique ganglionnaire : corticothérapie sauf dans le cas d'adénopathies latéro-trachéales droites où le risque de rupture intra-trachéale est à redouter (intervention chirurgicale en cas de compression trachéale et de risque de fistulisation).
- Méningite tuberculeuse. Traitement de 9 mois à 1 an avec 4 antibiotiques durant 2 mois puis 2 antibiotiques (idem formes patentes).

Il faut toujours adapter le traitement en fonction de l'antibiogramme.

Les études faites depuis plusieurs années ont montré que le traitement systématique (durée 9 mois minimum, 18 mois maximum) de la primo-infection tuberculeuse, en a fait disparaitre les complications générales et a atténué de façon très importante le risque évolutif ultérieur de maladie tuberculeuse dans ses diverses manifestations.
Corps étranger des voies aériennes
E. Deneuville, C. Jézéquel

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 7 avril 1999

1 Diagnostic précoce
1.1 Syndrome de pénétration
1.2 Période de tolérance
2 Diagnostic tardif
   

3 Traitement
3.1 Traitement préventif
3.2 Traitement curatif
Objectifs
1. Enumérer les circonstances cliniques qui doivent faire évoquer le diagnostic d'inhalation de corps étrangers.

2. Rédiger la demande d'examens radiographiques en cas de suspicion de corps étranger.

3. Décrire les aspects radiographiques observés en cas de corps étrangers intrabronchique.

Le corps étranger des voies aériennes chez l'enfant est un accident non exceptionnel à évoquer systématiquement, car la symptomatologie n'est pas univoque. Il peut être un accident grave exigeant un traitement d'urgence.
1 Diagnostic précoce
1.1 Syndrome de pénétration
Le diagnostic précoce peut être extrêmement facile lorsqu'est réalisé un syndrome dit de pénétration lors de l'inhalation du corps étranger :
- accès de suffocation brutale,
- dyspnée soudaine, avec angoisse, chez un enfant jusque là en bonne santé,
- quintes de toux explosives (qui, exceptionnellement, permettent l'expulsion du corps étranger),
- tirage, cornage, le tout pouvant aboutir à l'asphyxie.

Habituellement, ces symptômes s'atténuent progressivement, mais ce tableau peut passer inaperçu, survenant en l'absence des parents, ou être nié par l'enfant.

Il peut être moins spectaculaire : se limiter à quelques quintes de toux. Mais, même peu net, ce syndrome de pénétration est capital pour le diagnostic. C'est souligner l'importance de l'interrogatoire précis, détaillé, des parents, à la recherche :
- du moindre accès dyspnéique,
- et de la disparition d'un objet quelconque (fragments de jouets, épingles, barrettes, flèchettes de sarbacane, corps étrangers végétaux...).
1.2 Période de tolérance
En effet, après ce syndrome, survient la période de "tolérance" dont les signes varient avec la nature, et surtout le siège du corps étranger.
1.2.1 Corps étranger laryngé :
La symptomatologie est bruyante. Après un syndrome de pénétration dramatique qui a pu imposer la trachéotomie sans délai, le plus souvent les signes s'amendent avec persistance d'une dyspnée inspiratoire, d'une toux quinteuse plus ou moins aboyante, d'un tirage sus-sternal.
Le diagnostic sera affirmé par les examens radiologiques et la laryngoscopie directe. Un corps étranger situé dans le cou sera nettement mis en évidence par une radiographie de profil s'il est assez opaque.
Lorsqu'il est antérieur, il est très certainement dans le larynx.
Lorsqu'il est derrière les parties molles du larynx, il siège dans l'hypopharynx, voire dans l'oesophage cervical.
La laryngoscopie directe confirmera ce fait et permettra l'ablation instrumentale. Mais elle ne peut être faite que par un spécialiste entraîné, en prenant toutes les précautions nécessaires surtout s'il existe une dyspnée importante. On peut être amené à pratiquer une trachéotomie d'urgence.
1.2.2 Corps étrangers trachéaux :
La symptomatologie est caractérisée par un bruit de grelot ou de clapet intermittent dû à la mobilité du corps étranger.
Les accidents respiratoires paroxystiques peuvent être exagérés par le décubitus. L'enclavement dans la sous-glotte au cours d'une quinte de toux peut entraîner une apnée subite et la mort. C'est donc malgré l'amélioration secondaire une urgence thérapeutique.
La bronchoscopie permettra seule un diagnostic de certitude.
1.2.3 Corps étrangers bronchiques :
Ce sont les plus fréquents, avec une prédominance pour la bronche souche droite plus verticale, dans le prolongement de la trachée.
Le degré d'obstruction détermine la symptomatologie.
Interviennent donc :
- le calibre des bronches,
- le volume du corps étranger,
- sa nature : on oppose les corps étrangers organiques septiques (végétaux haricot, petit pois, cacahuète) susceptibles de se gonfler, de se fragmenter, aux corps non organiques, métalliques ou non, souvent mieux tolérés.

La radiographie du thorax permet d'évoquer ce diagnostic devant :
- le corps étranger, parfois opaque par lui-même,
- ou les effets qu'il entraîne :

    * syndrome d'atélectasie par obstruction complète,
    * emphysème par obstruction expiratoire à soupape pouvant se compliquer de pneumothorax, ou de pneumomédiatin,
    * association : atélectasie d'un lobe, emphysème d'un autre lobe.

Les clichés doivent être pris en inspiration et en expiration profondes.
Une hyperclarté expiratoire témoigne d'une zone où l'air est "piégé" en aval de l'obstruction.

L'interrogatoire doit s'acharner à retrouver un épisode dyspnéique plus ou moins intense, passé inaperçu ou oublié, car l'absence de toute symptomatologie fonctionnelle, quelques minutes ou quelques heures après l'épisode initial, est insuffisante pour écarter l'éventualité du corps étranger. Dans le doute, la bronchoscopie est indispensable pour affirmer le diagnostic et permettre l'extraction.
2 Diagnostic tardif
L'épisode initial est totalement ignoré s'il s'agit d'un nourrisson laissé sans surveillance. D'autre fois il n'a pas retenu l'attention du sujet ou de son entourage. Plusieurs jours ou semaines après l'inhalation du corps étranger se sont écoulés. Divers tableaux peuvent alors être observés :
- bronchite avec toux grasse,
- expectoration muco-purulente,
- asthme bâtard,
- le plus souvent bronchorrhée chronique avec fièvre et toux rebelle,
- abcès pulmonaire,
- rarement, réaction pleurale séro-fibrineuse ou purulente.

Le caractère tenace ou récidivant de telles manifestations doit faire pratiquer des radiographies pulmonaires qui objectiveront des images anormales, des troubles de la ventilation encore variables ou pérennisés.
Il est nécessaire devant ces tableaux de rechercher systématiquement la notion d'un syndrome de pénétration, en bref de penser au corps étranger. La bronchoscopie au moindre doute est alors nécessaire pour le déceler. Seule son ablation peut mettre un terme au syndrome clinique chronique pour lequel est vu le sujet.

Chez l'enfant et le nourrisson, peut être réalisé un tableau de trachéobronchite sévère : état général grave, fièvre à 40°, polypnée, faciès toxique, râles fins disséminés dans les deux champs. Cette symptomatologie est particulière aux corps étrangers organiques. Son pronostic est sévère.
3 Traitement
3.1 Traitement préventif
La prévention est essentielle : beaucoup de ces accidents peuvent être évités, notamment :
- si les objets ou jouets de petite taille restent hors de portée des enfants.
- si les jouets ne comportent pas de petits éléments mal fixés
- si l'on ne donne pas à mastiquer de bonbons aux sujets trop jeunes.
3.2 Traitement curatif
Le traitement consiste essentiellement en l'extraction par manoeuvres endoscopiques.
3.2.1 Rarement le sujet est en asphyxie
C'est surtout le cas des corps étrangers du larynx et de la trachée. Certes on peut faciliter l'expulsion du corps étranger en tenant l'enfant par les pieds, en le secouant et en frappant dans le dos, éventualité heureuse, mais exceptionnelle. Mais c'est une manoeuvre dangereuse car elle peut enclaver le corps étranger. Il peut s'agir d'une extrême urgence : la trachéotomie est alors nécessaire pour rétablir sans délai une respiratoire normale.

L'ablation du corps étranger ne sera pratiquée que secondairement en dehors de toute gêne respiratoire, par laryngoscopie directe.
3.2.2 Habituellement, siégeant dans les bronches
Le corps étranger, est relativement bien supporté et son extraction n'est pas une urgence.
Mieux vaut, en effet, attendre quelques heures et se mettre dans les meilleures conditions possibles d'extraction.
Ce délai permet :
- d'intervenir chez un sujet à jeun, évitant les vomissements,
- de préparer le malade par des calmants et des antispasmodiques,
- de réunir le matériel et personnel qualifié.

Dans la grande majorité des cas, l'extraction peut se faire par les voies naturelles, par laryngoscopie pour les corps étrangers laryngés, par bronchoscopie pour les corps étrangers trachéaux et bronchiques.
Rarement on doit avoir recours à une bronchotomie, rendue nécessaire par des corps étrangers enclavés.
3.2.3 Soins post-opératoires
Le sujet devra être gardé en observation durant quelques jours. Si l'intervention a été facile, non traumatisante, les soins post-opératoires seront réduits au minimum. Sinon, il faudra maintenir l'enfant au calme, prescrire des antibiotiques et, si besoin, des corticoïdes.
Les suites sont en général simples : les symptômes fonctionnels disparaissent. La voix peut être modifiée pendant quelques jours par irritation du larynx par le passage du bronchoscope.

Les complications sont rares :
- inondation bronchique du jeune enfant,
- infection pulmonaire,
- emphysème médiastinal et sous-cutané,
- impossibilité d'extraire le corps étranger.

En fait, l'énumération de toutes ces complications possibles et des difficultés que l'on peut rencontrer ne doit pas faire perdre de vue, que dans la plupart des cas, le corps étranger peut être extrait et l'enfant vite guéri.

Le plus important est de penser au corps étranger, d'en chercher les signes et de pratiquer une laryngoscopie ou une bronchocospie.
Asthme infantile
E. Deneuville, C. Jézéquel

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 2 novembre 1999

Epidémiologie - Définition
1 Physiopathologie
2 Caractéristiques cliniques
2.1 Nourrisson (< 2 ans)
2.2 Enfant d'âge scolaire
2.3 L'état de mal
3 Bilan
3.1 Chez le nourrisson
3.2 Chez l'enfant
4 Diagnostic différentiel
5 Médicaments à notre disposition
   

5.1 Antihistaminiques anti-H1
5.2 Cromones
5.3 Béta-2 stimulants
5.4 Atropiniques
5.5 Théophyllines
5.6 Corticoïdes par voie générale
5.7 Corticoïdes en inhalation
6 Traitement
6.1 Traitement de la crise
6.2 Traitement de fond
6.3 Traitement préventif
Objectifs
1. Citer les éléments cliniques et para-cliniques qui, en présence d'épisodes de dyspnée, orientent vers une origine asthamatique.

2. Décrire une crise d'asthme chez un enfant.

3. Décrire l'état de mal asthmatique.

4. Indiquer les modalités de la recherche d'une étiologie allergique chez un enfant asthmatique.

5. Rédiger l'ordonnance du traitement d'une crise d'asthme.

6. Rédiger les conseils à donner aux parents d'un enfant asthmatique pour sa surveillance et son éducation.

7. Citer les éléments de pronostic de la maladie asthmatique.

Epidémiologie - Définition
L'asthme infantile est la maladie chronique la plus fréquente de l'enfance, affectant plus de 10 % de la population pédiatrique.
50 % des asthmes débutent dans l'enfance avant l'âge de 5 ans. Le sex-ratio est en faveur des garçons : 2/1.
Depuis plusieurs années, il semble que la morbidité voire la mortalité augmente alors que des traitements efficaces sont disponibles suggérant un sous diagnostic et un sous traitement de l'asthme maladie.
L'asthme de l'enfant est une affection évolutive dans la compréhension de sa physiopathologie, l'approche de son diagnostic et de son traitement.
On peut considérer la maladie asthmatique comme un état constitutionnel dont les manifestations cliniques reconnaissent de multiples composantes étiologiques plus ou moins intriquées : allergiques, inflammatoires, infectieuses, neuro-végétatives ou phychiques.

La définition est clinique et fonctionnelle : dyspnée paroxystique sifflante, à prédominance expiratoire, récidivante, due à une obstruction bronchique variable dans le temps, régressant spontanément ou sous l'effet des bronchodilatateurs (BD).
C'est donc un syndrome obstructif (SOE) défini à l'aide de trois critères :
- dyspnée à prédominance expiratoire,
- expiration bruyante sifflante ("wheezing"),
- toux sèche ou productive.

On insiste beaucoup actuellement sur la composante inflammatoire de l'asthme avec cette dernière définition :
"Inflammation chronique et persistante des voies respiratoires avec quintes de toux, respiration sifflante, sensation d'oppression thoracique et difficultés respiratoires ; ces symptômes, en règle réversibles peuvent être sévères et exceptionnellement fatals".
1 Physiopathologie
La physiopathologie de l'asthme est complexe et, pour une part, encore inconnue. Elle fait intervenir l'hyper réactivité (HRB), définie comme une réponse anormale du muscle bronchique à des stimuli physiologiques comme le froid, l'effort ou l'hyper ventilation. L'HRB est multi factorielle résultant probablement d'un déséquilibre neurogène et d'une inflammation le plus souvent IgE médiée aboutissant à des phénomènes de bronchoconstriction, d'oedème muqueux et d'hypersécrétion bronchique.

La part neurogène peut faire intervenir :
- le système nerveux cholinergique (bronchoconstricteur prédominant sur les petites bronches, rôle dans l'asthme fort),
- le système nerveux adrénergique (par ses récepteurs a BC et surtout b 2+ à action bronchodilatatrice. L'hypothèse d'un dysfonctionnement de ce système dans l'asthme a été évoquée),
- le système non adrénergique, non cholinergique, avec libération de peptides tels que :

    * la substance P (augmentation de la perméabilité vasculaire et de la sécrétion muqueuse),
    * la neurokinine A (bronchoconstricteur),
    * la calcitonine GRP (vasodilatateur artériel et bronchique),
    * le VIP (BD puissant ; l'hypothèse d'un déficit en récepteur du VIP dans les voies aériennes).

La composante inflammatoire est secondaire à l'accumulation locale des cellules (mastocytes, PNE, PNN, macrophages, lymphocytes) sécrétrices de médiateurs préformés (histamine) ou néoformés (leucotriènes, protaglandines...).
On insiste sur l'existence de récepteurs nerveux à l'irritation situés dans la muqueuse ou près des capillaires à action proprioceptive et bronchoconstrictive et sur le rôle des lésions épithéliales entraînant la mise à nu des récepteurs des terminaisons nerveuses susceptibles d'être stimulés par les médiateurs de l'inflammation.

L'hyper réactivité bronchique a probablement deux origines : congénitale (et dans ce cas, elle est souvent associée à l'atopie) ou acquise après infection virale, notamment par le VRS, responsable de la majorité des bronchiolites du tout jeune enfant. On explique ainsi le rôle du VRS dans l'apparition de l'asthme :
- exacerbation ou induction d'une HRB par stimulation vagale (mise à nu de récepteurs par les lésions épithéliales),
- libération de médiateurs de l'inflammation (substance P, histamine, leucotriènes, ...)
- stimulation de la production d'IgE totales et spécifiques du virus avec augmentation de la perméabilité muqueuse favorisant la pénétration des allergènes.
2 Caractéristiques cliniques
Elles sont différentes dans l'expression et la prise en charge selon l'âge.
2.1 Nourrisson (< 2 ans)
L'asthme, dans cette tranche d'âge est encore trop souvent sous diagnostiqué et sous-traité. Le diagnostic est avant tout clinique et correspond à un SOE récidivant ou chronique caractérisé par la survenue d'au moins 3 épisodes de dyspnéee expiratoire sifflante avec ou sans intervalle entre les épisodes aigus.

- Le début peut être très précoce (premiers mois de vie)

- C'est souvent à l'occasion d'une infection virale en période épidémique autommo hivernale que le nourrisson débute sa maladie.

- L'asthme est le plus souvent infectieux et hypersecrétant avec encombrement, sibilances, fièvre parfois, possibilité de foyers radiologiques. Ces particularités cliniques sont liées aux particularités cliniques et fonctionnelles des voies aériennes : petitesse de l'arbre trachéobronchique, richesse en glandes à mucus, seuil de fatigue respiratoire abaissé.

- L'impact des facteurs environnementaux (tabagisme passif, mise en collectivité précoce, allergènes...) est maximal sur un appareil respiratoire immature avec :

    * seuil de réactivité bronchique diminué (HRB quasi physiologique à cet âge),
    * déficit en IgA sécrétoires (prédisposant aux infections),
    * vulnérabilité de ce poumon en phase de croissance alvéolaire rapide.

- Les crises sont souvent sévères avec une fréquence accrue d'état de mal parfois inaugural aggravant le pronostic.

- Pour évaluer la gravité de la crise, on appréciera :

    * les difficultés alimentaires (vomissements, fausses routes),
    * la détresse respiratoire (par fatique musculaire fréquente à cet âge),
    * l'existence d'un épanchement gazeux médiastinal (2° à la distension et à l'obstruction bronchiolaire),
    * d'une hypoxie et surtout,
    * d'une hypercapnie demandant un transfert en U.S.I (Unité de Soins Intensifs).

- L'évolution :

    * à moyen terme : l'intervalle libre n'est pas toujours asymptomatique comme dans l'asthme de l'enfant d'âge scolaire. Un encombrement chronique associé à des sibilants peut persister réalisant un tableau de BPCO hyper sécrétante.
    * à long terme : l'évolution est conditionnée par l'étiologie (et notamment l'allergie), la gravité initiale du tableau clinique et la précocité de l'instauration du traitement adapté. L'existence d'une pathologie pulmonaire associée (BDP, séquelle de pathologie néonatale...) est également un facteur péjoratif avec risque élevé d'HRB.

2.2 L'enfant d'âge scolaire
2.2.1 Le diagnostic est facile car les crises sont plus stéréotypées :

- Début : fin d'après-midi, nuit précédée de prodromes,

- Prodromes : variables d'un enfant à l'autre mais souvent constants chez le même enfant, prurit nasal ou oculaire, rhinorrhée, accès de toux spasmodique, agitation, douleurs abdominales.
Il est important de traiter dès l'apparition de ces signes.

- La crise : enfant assis, anxieux, agité. Soif d'air, thorax distendu, sonore, bloqué en inspiration. A l'auscultation, diminution du murmure vésiculaire et perception de sibilants. Attention, chez l'enfant à la différence de l'adulte, on peut avoir une polypnée.

- Evolution : résolution en quelques heures spontanément ou sous l'influence du traitement pour récidiver éventuellement les jours suivants. Typiquement, cette 2ème phase "hypersécrétante" comporte une recrudescence de la toux qui devient grasse. La fréquence respiratoire se normalise, l'enfant se détend mais est épuisé. Les crises peuvent se répéter à intervalles variables sur le même mode pendant quelques jours consécutifs, sur un mode atténué ou aggravé (cf. état de mal).
2.2.2 Les équivalents asthmatiques
Ils sont fréquents et souvent méconnus ou négligés :
- toux spasmodique chronique : souvent isolée chez l'enfant, sèche, quinteuse coqueluchoïde parfois, survenant plus volontiers la nuit, ou déclenchée par l'effort (jeu, rire, course), les changements de température, résistante aux sédatifs qui sont contre-indiqués, cédant aux BD ;
- accès de sibilances spontanément réversibles déclenchés par le rire, le changement de température, l'atmosphère polluée.
- l'asthme d'effort survient après un exercice violent comme la course. Il doit être différencié de la dyspnée qui disparait à l'arrêt de celui-ci.
2.3 L'état de mal
- crise d'asthme mettant en jeu le pronostic vital,
- classiquement, on parle d'état de mal quand on a une hypoventilation alvéolaire donc si on a une normocapnie et à fortiori si on a une hypercapnie, avec hypoxie.
- fréquence estimée de 5 à 7 %.
- rarement inaugural, il associe :
2.3.1 Clinique
- difficultés à parler et à tousser,
- blocage respiratoire du thorax,
- absence de sibilances,
- polynée

    * > 50 chez le petit enfant
    * < 30 chez le grand enfant

- à l'extrême, pause respiratoire,
- mise en jeu des muscles respiratoires accessoires,
- cyanose (hypoxie),
- sueurs, somnolence (hypercapnie)
- troubles hémodynamiques :

    * tachycardie > 130/mm puis bradycardie,
    * HTA ou hypo TA,
    * IVD (CPA)

- emphysème sous cutané parfois,
- pouls paradoxal > 20 mmhg,
- absence d'amélioration ou aggravation sous traitement.
2.3.2 Gazométrie
- hypoxie,
- surtout normo puis hypercapnie,
- acidose : gazeuse (liée à hypercapnie) et métabolique (augmentation des lactates par augmentation du travail des muscles respiratoires).
2.3.3 Le peak flow (débit expiratoire de pointe)
- pas toujours réalisable à ce stade,
- alarme quand les valeurs sont inférieures à 25 % par rapport aux valeurs attendues pour la taille.
2.3.4 La radio
- distension majeure,
- pneumothorax, pneumomédiastin,
- emphysème sous cutané,
- foyers.
2.3.5 Les facteurs favorisants / profil des enfants
- âge : plus fréquent chez le petit nourrisson (asthme infectieux, hypersécrétant à obstruction), étroitesse des voies aériennes, richesse en glandes muqueuses, épuisement plus rapide à cet âge,
- sexe : 2,5 garçon / 1 fille,
- asthme ancien et grave, antécédents d'état de mal, EFR pathologiques en période inter critique, corticodépendance, mauvaise compliance thérapeutique, grande labilité des DEP (Débits Expiratoires de Pointe),...
- facteurs déclenchants : défaut d'appréciation de la gravité de la crise, arrêt brutal d'une corticothérapie, exposition massive à un allergène, choc psycho affectif (adolescent +++).
2.3.6 Quand l'évolution est défavorable, l'autopsie montre :
- spasme bronchiolaire généralisé,
- obstruction bronchique diffuse liée à l'oedème et aux bouchons muqueux.
3 Le bilan
Il sert à affirmer le diagnostic, préciser l'étiologie, étudier les modalités évolutives car l'asthme est une maladie chronique dont la crise ne représente que l'aspect bruyant. Le pronostic fontionnel pulmonaire est surtout lié au syndrome obstructif, prolongé et souvent infra-clinique.
3.1 Chez le nourrisson
Quel bilan faut-il pratiquer ?
3.1.1 Bilan étiologique :
- Viroses +++. Le VRS (virus respiratoire syncitial) est souvent le mode d'entrée dans la maladie. Il existe un lien de causalité soit en révélant une allergie préexistante soit par la mise en place ou l'exacerbation d'une hyper réactivité bronchique.

- Allergie : diagnostic difficile à établir à cet âge à ne pas négliger. Il repose sur un certain nombre d'éléments : antécédents familiaux (asthme, rhinite), personnels (eczéma), IgE totales élevées (à interpréter en fonction des tests cutanés et de l'environnement). Mais la sensibilisation est évolutive et l'enquête devra être répétée au cours de l'évolution.

- Facteurs aggravants :

    * RGO (vomissements, toux de décubitus),
    * foyer infectieux ORL (hypertrophie adénoïde),
    * déficit en IgA, IgG (sous classe IgG2, G4),
    * déficit en a 1 antitrypsine,
    * environnement : crêche, tabagisme parental, animaux, ...

3.1.2 Bilan fonctionnel
- Radio pulmonaire,
- Gaz du sang,
- EFR sont difficiles à réaliser chez le nourrisson et restent du domaine des laboratoires spécialisés. Actuellement, on tend à les réserver aux asthmes difficiles à équilibrer.
3.2 Chez l'enfant
3.2.1 Enquête allergologique
- fréquemment positive : 80 % des cas.

- interrogatoire :

    * Antécédents familiaux et personnels : eczéma, urticaire, rhinite allergique, conjonctivite allergique.
    * Circonstances de survenue des crises : caractère saisonnier, contact avec un animal, ménage, poussière, ...
    * Examen clinique :
          o ORL : pâleur ou coloration lilas de la muqueuse pituitaire,
          o eczéma, yeux cernés.
    * Examens complémentaires :
          o hyperplasie en cadre des sinus maxillaires,
          o PNE > 500/mm3 (en dehors d'une parasitose) mais l'augmentation est inconstante.
          o IgE totales / RAST / tests cutanés allergologiques.

3.2.2 Facteurs non allergiques
- infectieux,

    * déficit en Ig (IgA, sous classes IgG),
    * infection ORL : sinusite chronique, adénoïde, otite séreuse, amygdalite, rhinite,

- RGO
- environnement : tabagisme passif, animaux, ...
3.2.3 Bilan fonctionnel
- Gaz du sang dans les formes graves.
- Radio pulmonaire le plus souvent normale en dehors des crises. En crise, elle montre de façon inhabituelle :

    * distension pulmonaire,
    * médiastin étroit,
    * côtes horizontalisées, élargissement des espaces inter costaux,
    * coupoles diaphragmatiques abaissées.

De principe on recherche, bien que ce soit peu fréquent :

    * une opacité témoignant d'une pneumopathie (fièvre),
    * un trouble de ventilation,
    * un épanchement gazeux pleural ou médiastinal.

- exploration fonctionnelle respiratoire :
Technique :

    * de base : mécanique ventilatoire, courbes débit volume, débits expiratoires forcés.
    * épreuves pharmaco dynamiques avec inhalation de métacholine ou d'air froid pour mettre en évidence l'HRB ou inhalabion d'un bronchodilatateur.

Résultats :

    * Asthme peu sévère : EFR normale. L'HRB est recherchée par des tests pharmacos à l'ACH. et ses dérivés ou par un stimulus physiologique comme le froid, l'hyperventilation.
    * Asthme sévère : EFR de base perturbées, plus ou moins réversible après BD. Si l'obstruction est irréversible, on ne doit pas exclure le diagnostic de principe car la part spastique de l'asthme peut être masquée par l'inflammation, un traitement corticoïde est tenté pendant 8 jours, l'absence d'amélioration doit faire reconsidérer le diagnostic et rechercher une BPCO.

4 Diagnostic différentiel
Attention, tout ce qui siffle n'est pas asthme, et d'autres causes de SOE sont à éliminer de principe en particulier chez le tout petit.
Les pseudo-asthmes doivent donc être éliminés par une enquête éliologique précise.

Les principes étiologiques :
- mucoviscidose (test de la sueur),
- corps étranger endobronchique,
- dyskinésie ou compression trachéobronchique (bronchoscopie, radios),
- arc vasculaire anormal (TOGD)
- pathologie d'inhalation (RGO souvent associé à l'asthme) et troubles de la déglutition pharyngo laryngés (radio cinéma de la déglutition), ...

De toutes façons, n'ayant pas à notre disposition de test absolu permettant le diagnostic de l'asthme et en raison des associations de pathologies possibles, il faut reconsidérer le diagnostic posé si l'évolution sous traitement est inhabituelle ou en cas d'échec thérapeutique.
5 Les médicaments à notre disposition
5.1 Antihistaminiques anti-H1
Nom commun
   
Nom de spécialité
   
Formes galéniques
   
Posologies
   
Effets indésirables
Astémizole     Hismanal     Comprimés à 10 mg
Suspension buvable
1 ml = 2 mg     0,20 à 0,25 mg/kg/j
en  1 prise le matin     Prise de poids
Cétirizine     Zyrtec     Comprimés sécables
à 10 mg     1 comprimé le matin
(enfant de plus de 12 ans)     Troubles digestifs
Bouche sèche
Vertiges, somnolence
Kétotifène     Zaditen     Gélules à 1 mg
Suspension buvable
5 ml = 1 mg     1 gélule ou
1 mesure de  5 ml matin et soir     Somnolence diurne
Sécheresse bucale
Sensations vertigineuses
(exceptionnelles)
Troubles digestifs non spécifiques
Prise de poids
Méquitazine     Primalan     Comprimés à 5 mg
Sirop 2,5 ml = 1,25 mg     0,25 mg/kg/j en 1 prise le matin     Sécheresse buccale (discrète et transitoire)
Loratadine     Clarityne     Comprimés à 10 mg     1 comprimé/jour      
5.2 Les cromones
Nom
commun
   
Nom de
spécialité
   
Formes galéniques
   
Posologies
   
Effets indésirables
Cromogycate disodique     Lomudal     Capsules de 20 mg     1 capsule x 3/j     Toux
Brochospasme
Urticaire
Dysurie isolée

Poudre pour aérosol
doseur
1 bouffée = 5 mg
    2 bouffées x 3/j

Solution pour nébulisation
Ampoules de 2 ml = 20 mg
    2 ampoules x 3/j
Nédocromile disodique     Tilade     Poudre pour aérosol
doseur
1 bouffée = 2 mg           Céphalées - Nausées
Eruptions cutanées, prurit
Sensation de bouffées de  chaleur
Irritation pharyngée
Goût amer
Vertiges
Bronchospasmes
5.3 Béta-2 stimulants
Nom
commun
   
Nom de
spécialité
   
Formes galéniques
   
Posologies(1)
   
Effets indésirables
Fénotérol     Berotec     Aérosol-doseur
1 bouffée = 200 µg     1 (à 2) bouffée(s) x 3/j     Tremblements
Tachycardie
Salbutamol     Ventoline

 
    Solution buvable
5ml = 2 mg     0,20-0,30 mg/kg/j
en  2 à 4 prises     Tremblements
Tachycardie
Céphalées, nervosité
Nausées, vomissements

 

 

 

 

 

 

 

 

 
comprimé à 2 mg     0,20-0,30 mg/kg/j
en 2 à 4 prises
Aérosol-doseur
1 bouffée = 100 µg     1 (à 2) bouffées(s) x 3/j
Solution pour
nébulisation
50 mg/10 ml     0,01 à 0,03 ml/kg
(tj < 1 ml) par
nébulisation x 3 à 4/j

Solution injectable

SC : 0,5 mg/ml
   

5-7 µ g/kg pouvant être

réutilisée toutes les 4 H
Solution injectable
IV : 1 ml = 1 mg     5 µ g/kg en 5 min
puis 0,2 à 1 g/kg/min
Ventodisk     Poudre pour inhalation bucale 1 dose = 200 µg     1 (à 2) bouffée(s) x 3/j
Ventadur     Comprimé(s) à libération prolongée
1 cm = 4 mg     1 cp x 2/j
Eolène    

Aérosol doseur

1 bouffée = 250 µg
    1 (à 2) bouffée(s) x 3/j
Terbutaline     Bricanyl     Comprimés à 2,5 mg     0,15-0,25 mg/kg/j
en  1 à 3 prises     Tremblements
Tachycardie
Sueurs, nervosité
Aérosol doseur
1 bouffée = 250 µg     1 (à 2) bouffé(e) x 3/j
Solution injectable
SC : 0,5 mg/ml    

5-7 µ g/kg pouvant être

réutilisée toutes les 4 H
Bricanyl
Turhuhaler     Poudre pour
inhalation buccale.
1 prise = 500 µg     1 (à 2) prise(s) x 2-3/j
Bricanyl LP     Comprimés
à libération prolongée
1 cp = 5 mg     1 cp x 2/j
B2 +
Atropinique     Bronchodual     Aérosol doseur     1 (à 2) bouffée(s) x 3/j    
idem
B2 longue durée d'action     Sérévent     Aérosol doseur
Diskuss (poudre)     1 bouffée = 25µg
1 bouffée = 50 µg    
idem
Foradil     Poudre pour
inhalation buccale     1 bouffée = 12 µg    
idem

(1) Il s'agit de posologies moyennes à adapter à chaque cas.
5.4 Les atropiniques
Nom
commun
   
Nom de
spécialité
   
Formes galéniques
   
Posologies
   
Effets indésirales
Ipratopium
Bromure     Atrovent     Aérosol-doseur
1 bouffée = 20µg     4 bouffées x 3/j     Sécheresse de la bouche
Irritation pharyngée
Oxitropium
bromure     Tersigat     Aérosol-doseur
1 bouffée = 100µg     2 bouffées matin et midi,
4 bouffées le soir     Sécheresse buccale rare
5.5 Les théophyllines
Nom
Commun
   
Nom de
spécialité
   
Formes galéniques
(1)
   
Posologies
(2)
   
Effets indésirables
Théophylline     - Théophylline Bruneau
- Dilatrane
- Théolair 125 mg
- Techniphyline
- Inophylline
(T. monoéthanolamine,
aminophylline)     A action immédiate :
- comprimés
- sirop
- suppositoires
- ampoules injectables     1) formes orales :
10 à 16 mg/kg/j en  4 prises
2) Suppositoires :
1 à 3/j
3) Formes inject :
6 à 7 mg/kg en 20 min, puis 0,7 à 1mg/kg/h sur  le nycthémère ables  IV (aminophylline)     Douleurs abdominales
Comportement agité
Nausées,  vomissements,
Céphalées, troubles  du sommeil
- Théolair LP
100, 175 mg
- Théophylline  Bruneau LP
50, 100, 200 mg
- Théostat
100 et 300 mg
- Euphylline
50, 100, 200, 300, 400 mg
- Armophylline
50, 100, 200, 300mg
- Cétraphylline
- Dilatrane à action
prolongée 50, 100, 200, 300 mg     A action prolongée :
- comprimés sécables
- microgranules présentées en gellules     de 10 à 20 mg/kg/j en 2 prises
à 12 h d'intervalle
(parfois 3 prises à 8 h  chez le nourrisson)

(1) La variété des formes galéniques disponibles est fonction de la spécialité.
(2) Il s'agit de posologies moyennes à adapter à chaque cas et en fonction des théophyllinémies.
5.6 Corticoïdes par voie générale
Nom
commun
   
Nom de
spécialité
   
Formes galéniques
   
Posologies
(1)
   
Effets indésirables
(2)
Prednisone     Cortancyl
1 et 5 mg     Comprimés     1 à 2 mg/kg/j     Désordres hydro-électro-
lytiques (hypokaliémie)
Troubles endocriniens et
métaboliques (ralentis-
sement de la croissance)
Troubles musculo-
squelettiques
(ostéoporose)
Troubles digestifs (ulcères gastro-duodénaux)
Troubles cutanés (acné)
Troubles neuro-
psychiques
(agitation, syndrome confusionnel)
Troubles oculaires
(glaucome)
Phénomène de rebond
de sevrage
Perturbations immunitaires
+ contre-indications
habituelles de toute
corticothérapie
Prednisolone     Solupred     Comprimés à 5 et 20 mg
Gouttes buvables
1 ml = 20 gouttes = 1 mg
Hydrocortancyl
5 mg     Comprimés à 5 mg
Dexaméthasone     Décadron     Comprimés à 0,5 mg     1 à 2 cp x 2/j
(à réserver au grand enfant ou à  l'adolescent en phase aiguë)
Soludécadron     Solution injectable
en IM ou IV 1 ml = 4 mg     0,5 mg/kg/j
en 4 à 8 injections
Méthyl-
prednisolone     Solumédrol
20, 40, 120     Solution injectable
en  IM ou IV
1 ml = 20 ou 60 mg     1 à 2 mg/kg/j
en 4 injections ou
perfusion IV continue

(1) Posologies moyennes à adapter selon l'âge et l'état de l'enfant.
(2) Ces effets sont observés lors de traitements prolongés.
5.7 Corticoïdes en inhalation
Nom
commun
   
Nom de
spécialité
    Formes galéniques    
Posologies
(1)
    Effets indésirables
Budésonide     Pulmicort spray
100 et 200     Aérosol-doseur
1 bouffée = 100 ou 200µg     1 à 2 bouffées
x 2-3/j ou prises     Gêne pharyngée
Raucité de la voix, toux

Contre-indications :
- tuberculose pulmonaire non traitée
- ulcère digestif non traité

Pulmicort
tubuhaler
200 et 400

Pulmicort pour
nébulisation
   

Poudre pour
inhalation buccale
1 prise = 200 ou 400 µg

dose à 0,5 mg ou 1 mg
Dipropionate
de béclométasone     Bécotide 50
ou  250     Aérosol-doseur
1 bouffée = 50 ou 250 µg
Flunisolide     Bromilide 250     Aérosol-doseur
1 bouffée = 250 µg
Flutaconazole     Flixotide     Aérosol doseur
1 bouffée = 250 µg
Diskuss : 1 dose = 500 µg

(1) Posologie moyenne à adapter selon l'âge de l'enfant.
6 Le traitement
6.1 Le traitement de la crise
Trois solutions :

6.1.1 Forme modérée à début précoce ou aucun facteur péjoratif ou de risque n'est retrouvé :

- Bronchodilatateur d'action rapide à poursuivre pendant 5 à 7 jours :

    * Xanthine : théophilline sirop : 12-15 mg/kg en 4 prises (jusqu'à 20-25 mg/kg/j chez le nourrisson),
    * et/ou Beta-2 stimulants :
          o Ventoline® : solution buvable chez le petit (2mg/5ml)

          o 5 ml/kg/j en 2-3 prises. Ventoline® en aérosol doseur : 1 à 2 bouffées x 3/j.
          o Bricanyl® en aérosol doseur : 1 à 2 bouffées x 3/j.

          o Avec une chambre d'inhalation. ou mieux encore les Beta-2 stimulants en nébulisation : 0,01 à 0,03 ml/kg. La nécessité d'y recourir correspond en général à une crise d'intensité un peu inhabituelle et il est bon qu'elle soit repérée par une consultation médicale.

Ne pas oublier, en particulier chez le nourrisson, l'antibiothérapie et la kinésithérapie en cas de syndrome fébrile associé ou d'hypersécrétion.
6.1.2 Forme prolongée plus ou moins résistante aux bronchodilatateurs
Dans ce cadre, il est vraisemblable que ce soient les lésions inflammatoires qui prédominent.
Outre le traitement précédemment décrit, y associer : une cure de corticoïdes par voie orale (Cortancyl, Solupred, Médrol) à la dose de 1 à 2 mg/kg/j pendant 5 à 7 jours.
6.1.3 Les formes graves
Elles imposent une prise en charge hospitalière avec :
- Oxygénothérapie,
- Bronchodilatateurs en nébulisation 0,03 ml/kg/4 à 6 heures.
- Corticothérapie par voie générale type Solumédrol à la dose de 1 à 4 mg/kg/j en 4 prises.

Evolution immédiate :
- La répétition des aérosols de Beta-2 stimulants de 20 en 30 minutes pourraient constituer dans cette situation une alternative intéressante en attendant l'effet de la première dose de corticoïdes injectés dès l'admission.
- S'il n'y a pas d'amélioriation rapide (après 2 aérosols) :

    * Saltutamol en perfusion ou
    * Théophylline en I.V

- En cas de non réponse, intubation et ventilation assistée.

Dans tous les cas, le traitement de la crise doit être poursuivi jusqu'à restauration fonctionnelle "ad integrum" avec EFR.
6.2 Traitement de fond
- Le traitement essentiel, une fois la crise passée, est le traitement de fond. C'est le plus difficile à instituer.
- Il nécessite une enquête précise et comporte plusieurs étapes.
6.2.1 Contrôle de l'environnement
- éviction des allergènes quand cela est possible (acariens, animaux, ...),
- salubrité des appartements (humidité, ...)
- suppression du tabagisme parental +++,
- retrait des crêches au moins pendant la période automno-hivernale (pas toujours possible),
- environnement extérieur (pollution dans les grandes villes), problème de santé publique.
6.2.2 Mise en route d'un traitement d'adaptation.
- Associé aux mesures de contrôle de l'environnement, il permet à l'enfant de s'adapter à son environnement et d'abaisser son seuil d'hyperréactivité bronchique non spécifique.
- Ce sont les médicaments : antihistaminiques, anti-H1 et les cromones.
- Ils sont utilisés seuls ou en association avec les autres médicaments de l'asthme et sont bien tolérés.
- Ils sont plus efficaces chez le nourrisson et le petit enfant, avec parfois quelques accès facilement jugulés.
- Souvent insuffisant quand prescrit seul chez l'enfant d'âge scolaire.
6.2.3 Institution d'un traitement symptomatique.
Bronchodilatateur et/ou d'une hyposensibilisation en cas de facteur allergique dument diagnostiqué.
6.2.3.1 Le traitement bronchodilatateur :
Beta-2 stimulants et théophyllines. Ce traitement est indiqué quand malgré les traitements précédents bien suivis, l'enfant continue à présenter des crises fréquentes (plus d'une par mois).

La théophylline dans ce cadre dite à libération prolongée se prend en 2 prises quotidiennes et nécessite une surveillance clinique et biologique pour atteindre un taux sérique efficace et éviter les manifestations d'intolérance. Il est souhaitable, surtout chez le nourrisson, de réaliser un cycle de théophylline (toutes les 3 heures) sur le nycthémère. A ce prix, ce traitement est efficace. Il est bien toléré dans une prescription sur de longues périodes.
6.2.3.2 Hyposensibilisation :
oui si les critères sont respectés :
- après l'âge de 3 ans,
- diagnostic étiologique précis isolant au maximum 2 allergènes responsables,
- intolérance à l'environnement allergisant malgré le traitement dit d'adaptation,
- acceptation par l'enfant (et la famille) d'un tel traitement comportant des injections multiples sur 2 ou 3 ans (voire plus)
- bonne tolérance locale et générale des injections.
6.2.4 Introduction d'une corticothérapie au long cours dans les formes les plus graves.
Ce traitement repose actuellement sur la prescription de corticoïdes sous forme inhalée, sans effet systémique et sans effet biologique néfaste sur l'axe hypothalamo-surrénalien (Bécotide - Pulmicort).
La composante inflammatoire apparaissant importante, les corticoïdes inhalés sont prescrits précocément en traitement de fond.
6.2.5 Traitement des autres facteurs de risque associés.
- compensation d'un déficit immunitaire partiel,
- traitement d'un reflux gastro-oesophagien,
- réadaptation à l'effort,
- kinésithérapie avec technique de drainage et éducation respiratoire,
- cures climatiques en altitude.
6.3 Le traitement préventif
Les objectifs actuels sont :
- la prévention primaire de l'asthme de l'enfant.
- la prévention des formes graves.
6.3.1 Prévention primaire.
Elle s'adresse au tout petit à risque avec :
- antécédents familiaux atopiques,
- antécédents personnels allergiques (eczéma),
- antécédents personnels respiratoires : bronchiolite.

Elle consiste en :
- un traitement de l'environnement,
- une lutte contre le tabagisme passif.

L'intérêt est de mettre rapidement en place un contrôle de l'environnement plus ou moins associé à un traitement d'adaptation (anti-H1).
6.3.2 Prévention des formes graves.
Chez tout enfant :
- traitement précoce (avec diagnostic précoce),
- mise en route rapide d'un traitement de fond individualisé,
- surveillance assidue : clinique fonctionnelle (peak flow, EFR),

et surtout :

- éducation de l'enfant et de sa famille dans le problème de la prise en charge d'une maladie nécessitant un traitement de longue haleine.
Uropathies malformatives
B. Frémond

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes
mis à jour le 14 mars 2000

1 Dépistage anténatal
2 L'infection urinaire
3 Pathologie des reins
3.1 Syndrome de la jonction pyélo-urétérale
3.2 Anomalies structurales des reins
4 Pathologie des uretères
   

4.1 Reflux
4.2 Uretères doubles
4.3 Mégauretère primitif obstructif
5 Pathologie du bas appareil urinaire
5.1 Valves de l'urèthre postérieur
5.2 Troubles vésico-sphinctériens

On regroupe sous ce terme d'uropathie l'ensemble des anomalies des reins et des voies excrétrices. Elles sont pour la plupart congénitales et figurent parmi les malformations les plus courantes de l'enfant. Elles comportent toutes le même risque d'atteinte définitive de la fonction rénale. Les circonstances de découverte communes les plus fréquentes sont le dépistage anténatal et l'infection urinaire. Seules les principales anomalies seront étudiées.
1 depistage anténatal des uropathies malformatives

La néphrogenèse commence chez l'embryon dès la 5ème semaine, et ne s'achève qu'en fin de gestation. La production d'urine commence à la 9ème semaine. Les embryopathies, de survenue précoce, s'accompagnent généralement de lésions rénales dysplasiques sévères et irréversibles, avec parfois d'autres malformations associées. Les malformations de survenue plus tardives sont en général isolées, et les possibilités de récupération sont bien meilleures.

Durant la grossesse, le rein fœtal a un rôle capital dans le maintien du volume du liquide amniotique, composé essentiellement d'urines fœtales. Toute insuffisance rénale risque d'entraîner un oligoamnios facilement repérable en échographie.

Sur le plan échographique, la vessie est visible dès la 12ème semaine d'aménorrhée, et les reins à partir de 15 semaines. Ils n'acquièrent leur échostructure caractéristique qu'à partir de 24 semaines. Les uretères normaux ne sont pas visibles.

Les signes d'appel des uropathies fœtales sont donc toutes les dilatations des voies excrétrices (uropathies obstructives ou reflux), et les anomalies de nombre, de taille et de structure des reins (agénésie, hypertrophie, dysplasie). Avant la naissance, il est essentiel de rechercher d'autres anomalies associées, un caryotype est parfois nécessaire. L'évaluation du pronostic repose sur les critères suivants : uni ou bilatéralité, quantité de liquide amniotique, échostructure rénale, et éventuellement dans quelques rares cas d'uropathies bilatérales, étude biochimique de l'urine fœtale prélevée par ponction.

Les possibilités d'actions anténatales se résument à la surveillance et à une éventuelle proposition d'interruption médicale de grossesse dans les cas les plus graves, décision toujours prise par un centre multidisciplinaire de diagnostic prénatal et de médecine fœtale. Les dérivations in utero n'ont pas d'efficacité prouvée. Beaucoup de petites dilatations rénales isolées régressent spontanément en fin de gestation.

Le diagnostic anténatal des uropathies permet surtout une prise en charge postnatale optimale. Il évite la survenue de complications infectieuses parfois dramatiques, grâce à la mise en route dès la naissance d'un traitement antibiotique préventif systématique. Ce traitement doit être maintenu au moins jusqu'à la réalisation de l'imagerie postnatale complémentaire indispensable.

A la naissance, l'examen physique recherche un gros rein, un globe vésical. Il faut évaluer le jet mictionnel. En cas de suspicion d'obstacle sous vésical (valvules de l'urèthre chez le garçon), un transfert rapide en milieu chirurgical pédiatrique doit être envisagé. Dans tous les autres cas, il faut faire un ECBU initial, une échographie avant la sortie de la maternité, et un bilan biologique de fonction rénale dans les formes bilatérales. Si la première échographie est normale, il faut toujours en refaire une à un mois. Si l'anomalie échographique anténatale est confirmée, l'enfant reste sous traitement anti-infectieux urinaire, et une cystographie rétrograde est faite à un mois. L'urographie intraveineuse n'a pas d'indication en période néonatale.

Les urgences urologiques de la période néonatale sont les valvules de l'urèthre postérieur et les uropathies bilatérales avec altération de la fonction rénale biologique. Les infections sévères de cette période ne doivent plus se voir.
2 L'infection urinaire

L'infection urinaire reste la circonstance de découverte habituelle de beaucoup d'uropathies, en particulier le reflux. C'est également une complication évolutive très fréquente. Il est fondamental de savoir quand la suspecter, comment l'affirmer et la traiter, et quels examens complémentaires réaliser. Un chapitre de ce polycopié y est consacré.
3 Pathologie des reins
3.1 Syndrome de la jonction pyélo-urétérale

Ce syndrome est la cause la plus fréquente des dilatations pyélo-calicielles. Il s'observe le plus souvent chez les garçons (65 %) et atteint plus fréquemment le côté gauche (60 %). Il peut être bilatéral.
La nature de l'obstacle de la jonction pyélo-urétérale est variable : sténose congénitale, absence de propagation du péristaltisme au niveau de la jonction, insertion non déclive de l'uretère, compression par un vaisseau polaire inférieur...
Actuellement la plupart de ces dilatations pyélo-calicielles sont mises en évidence lors des échographies fœtales. Chez l'enfant plus grand le syndrome de jonction peut être diagnostiqué à l'occasion de douleurs abdominales ou d'une hématurie, souvent à la suite d’un traumatisme mineur. L'infection urinaire est rare dans cette pathologie.

Le diagnostic repose essentiellement sur l'échographie qui montre la dilatation des calices et du bassinet, l'amincissement du parenchyme rénal et l'absence de visualisation de l'uretère. L'urographie intraveineuse est rarement indispensable pour affirmer le diagnostic, en montrant un retard de sécrétion, une dilatation des calices et du bassinet qui prennent un aspect en "boules" et le retard d'évacuation du bassinet avec absence d'opacification de l'uretère (Fig. 1). Ces examens doivent également préciser l'état de la voie urinaire controlatérale. Les examens scintigraphiques (DMSA et Mag3-lasilix) sont indispensables pour apprécier la valeur fonctionnelle du rein en comparaison avec le rein controlatéral.

Fig. 1 : Jonction pyélo-urétérale droite (UIV)

Le traitement du syndrome de la jonction pyélo-urétérale dépend de l'importance de l'obstacle et de son retentissement sur le rein. Cette appréciation peut être difficile, surtout en période néonatale. Si l'obstacle est peu serré, l'enfant est simplement surveillé et il n'est pas rare de voir des dilatations anténatales régresser complètement. En présence d'un obstacle serré, le traitement est chirurgical : résection de la jonction pyélo-urétérale sténosée et confection d'une anastomose fonctionnelle entre le bassinet et l'uretère. Le traitement doit toujours s'efforcer d'être conservateur. Seule la constatation d'un rein non fonctionnel à la scintigraphie peut faire discuter une néphrectomie.
3.2 Anomalies structurales des reins
3.2.1 Dysplasie multikystique

C'est une pathologie unilatérale : le rein est réduit à une grappe de kystes, sans parenchyme, avec un uretère atrétique (Fig. 2). La découverte est presque toujours anténatale. L'évolution spontanée se fait généralement vers l'involution des kystes, aucun traitement n'est nécessaire. Le rein controlatéral est normal, il n'y a pas de séquelles néphrologiques.

Fig. 2 : Dysplasie multikystique du rein
3.2.2 Polykystoses rénales

Il s'agit d'un groupe de maladies familiales où les lésions rénales sont toujours bilatérales. On distingue la polykystose autosomique dominante, rare chez l'enfant et parfois longtemps bien tolérée et la polykystose autosomique récessive qui débute toujours dans l'enfance, évoluant rapidement vers l'insuffisance rénale terminale.
4 Pathologie des uretères

4.1 Reflux

C'est la plus fréquente des uropathies de l'enfant. Le reflux se définit comme le passage rétrograde anormal de l'urine vésicale dans l'uretère. Physiologiquement, il existe un système antireflux au niveau de la jonction urétéro-vésicale, basé sur le trajet sous-muqueux de l'uretère et la musculature trigonale.

Selon la cause, on distingue les reflux primitifs, liés à une insuffisance du système anti-reflux physiologique, et les reflux secondaires soit à une malformation locale (duplicité, urétérocèle, diverticule), soit à un obstacle sous-vésical organique (valves uréthrales) ou enfin à un trouble vésico-sphinctérien fonctionnel (vessie neurologique, instabilité vésicale). Les reflux primitifs disparaissent fréquemment avec la croissance, par maturation de la jonction urétéro-vésicale.

Le reflux d'urines stériles n'a pas de conséquences pour les reins. Il y a cependant souvent des germes dans la vessie, en particulier chez la fille, et d'autre part, le reflux favorise la survenues d'infections urinaires, car il entraîne une stase, les urines qui remontent dans le haut appareil au moment de la miction n'étant pas éliminées. La remontée dans les reins d'urines infectées peut entraîner une pyélonéphrite aiguë qui risque de laisser des séquelles définitives (pyélonéphrite chronique, néphropathie de reflux)

Sur le plan épidémiologique, l'âge et le sexe sont importants : les garçons ont souvent des reflux importants, de découverte précoce, avant un an, alors qu'après un an, le reflux prédomine nettement chez la fille, dans des formes souvent moins importantes que le garçon. Globalement, la prévalence à la naissance est estimée à 0,5% des nouveau-nés. Chez les enfants explorés pour infection urinaire, elle peut atteindre 50%.
4.1.1 Clinique

L'infection urinaire et le diagnostic anténatal sont les circonstances de découverte habituelles. Les douleurs lombaires ascendantes ne se voient (rarement) que chez le grand enfant. Lors de l'interrogatoire, il faut toujours rechercher des anomalies de la continence ou des mictions pour ne pas ignorer un trouble vésico-sphinctérien fonctionnel, l'instabilité vésicale est très souvent associée au reflux.
4.1.2 Examens complémentaires

La cystographie rétrograde est l'examen clé. Elle seule permet d'affirmer le reflux et de le classifier (Fig. 3). Il faut attendre au moins un mois après une infection urinaire pour la réaliser. L'échographie est obligatoire, elle permet d'apprécier le retentissement rénal. L'urographie intraveineuse n'a plus guère d'indications, sauf si on suspecte un reflux secondaire à une duplicité. La scintigraphie rénale au DMSA est l'examen de référence pour apprécier l'existence ou non de séquelles rénales (Fig. 10).

Fig. 3 : Classification des reflux en 5 stades


Fig. 10 : Deux exemples de scintigraphie (Cystographie sus pubienne) au DMSA.
Hypofixation du pôle inférieur droit en haut, atrophie rénale droite globale en bas.
4.1.3 Evolution

Les reflux primitifs de bas grade (1 et 2) disparaissent spontanément avec la croissance dans les trois quarts des cas, contre seulement un quart des cas pour les reflux primitifs dilatants (grades 3 et plus). Les reflux secondaires ne régressent que très rarement sans intervention chirurgicale, sauf dans l'instabilité vésicale où le traitement médical du trouble fonctionnel fait souvent disparaître le reflux. Les lésions rénales liées au reflux sont définitives et peuvent parfois évoluer pour leur propre compte vers l'insuffisance rénale et/ou l'hypertension artérielle, même après disparition du reflux.
4.1.4 Traitement

Le traitement médical du reflux repose sur la prévention des infections urinaires. La prophylaxie anti-infectieuse fait appel à différents antibiotiques ou antiseptiques urinaires que l'on prescrit en continu, au très long cours, soit en monothérapie, soit en alternant régulièrement deux ou trois molécules. Une demi-dose en une seule prise quotidienne est suffisante en prévention. La surveillance évolutive repose sur des cystographies que l'on ne réalise jamais à moins de 12 à 18 mois d'intervalle.
Le traitement chirurgical consiste en une réimplantation urétéro-vésicale antireflux (intervention de Cohen). Certains reflux symptomatiques de bas grade chez des grands enfants peuvent être corrigés par voie endoscopique.
Les indications thérapeutiques dépendent essentiellement de l'âge, du grade du reflux, et de la tolérance clinique. Compte tenu des conséquences potentielles, tous les reflux doivent être traités. Le traitement initial est uniquement médical, il peut être poursuivi jusqu'à l'âge de cinq ans. Au-delà de cet âge, les petits reflux asymptomatiques peuvent être simplement surveillés. Les reflux de haut grade découverts après un an bénéficient souvent d'un geste chirurgical d'emblée, alors que s'ils sont découverts plus tôt, on attend en général 12 à 18 mois sous traitement médical avant de décider d'une intervention en cas de persistance. Les reflux de bas grade sont exceptionnellement opérés, en cas d'infections persistantes ou de mauvaise compliance au traitement médical.
4.2 Uretères doubles

Les deux possibilités de dédoublements des uretères sont représentées sur la figure 4. Seule la voie excrétrice est double, le rein lui-même est unique, constitué d'un pyélon supérieur et d'un pyélon inférieur. En cas de bifidité, il y a un seul méat urétéral dans la vessie, cette situation n'induit aucune pathologie spécifique, un reflux primitif habituel peut être associé, sa prise en charge est sans particularité.

Fig. 4 : Bifidité droite, duplicité gauche

Les duplicités induisent souvent des pathologies propres. Pour des raisons embryologiques, les uretères se croisent, celui du pyélon supérieur s'abouchant toujours plus bas que celui du pyélon inférieur (Fig. 4). Un des deux uretères a donc souvent un abouchement anormal. Lorsque c'est celui du pyélon supérieur qui s'abouche trop bas, la pathologie induite est de type obstructif (urétérocèle, abouchement ectopique) avec une dilatation polaire supérieure souvent importante, cette pathologie est donc habituellement de découverte anténatale (Fig. 5). Lorsque celui du pyélon inférieur est trop haut, cela entraîne un reflux dans ce pyélon inférieur (Fig. 6).
   

Fig. 5 : Urétérocèle sur duplicité
   
Fig. 6 : Reflux dans un pyélon inférieur de duplicité
(Cystographie rétrograde à gauche, UIV à droite)

Le bilan des duplicités repose sur l'échographie et la cystographie rétrograde. L'urographie intraveineuse est souvent utile. Les duplicités pathogènes nécessitent en règle un traitement chirurgical.

4.3 Mégauretère primitif obstructif

Le mégauretère primitif obstructif est défini par l'existence d'un obstacle congénital, en général fonctionnel, de la partie terminale, juxta-vésicale, de l'uretère. Cet obstacle entraîne une dilatation urétérale ou urétéro-rénale d'amont (Fig. 7 et . Le mégauretère primitif obstructif doit être différencié des dilatations urétérales parfois très importantes qui sont secondaires à un reflux, à une vessie neurologique, à des valves de l'urèthre, à une duplicité pathogène.

Fig. 7 : Mégauretère primitif obstructif congénital (aspect en échographie)

Fig. 8 : Mégauretère primitif obstructif congénital (vue per-opératoire)

Les mégauretères primitifs sont le plus souvent découverts lors des échographies anténatales. L'affirmation du diagnostic repose sur l'échographie. L'urographie intraveineuse est parfois utile. La cystographie rétrograde est systématique, car il peut y avoir un reflux associé.

Dans les formes à dépistage anténatal, l'évolution spontanée se fait souvent vers l'amélioration. Le risque infectieux est cependant important, même en l'absence de reflux associé. La prescription d'un traitement anti-infectieux urinaire est systématique dès la naissance. La surveillance est échographique. Les formes très obstructives ou qui ne s'améliorent pas conduisent à une intervention chirurgicale. Dans les formes découvertes plus tardivement à l'occasion d'une complication (infection urinaire ou lithiase) la chirurgie est la règle.
5 Pathologie du bas appareil urinaire
5.1 Valves de l'urèthre postérieur

Elles réalisent un obstacle sous-vésical d'installation très précoce pendant la vie embryonnaire induisant un retentissement d'amont parfois très important. Atteignant uniquement les enfants de sexe masculin, c'est potentiellement une des uropathies les plus graves. Ces valves sont des replis muqueux en nid de pigeon au niveau du veru montanum, elles empêchent l'écoulement normal des urines dans l'urèthre postérieur. Elles s'accompagnent d'une vessie de lutte, d'une dilatation urétéro-rénale bilatérale avec souvent un reflux massif. Le parenchyme rénal peut être aminci et dysplasique, la fonction rénale peut être altérée précocement et de façon importante.

Le diagnostic est presque toujours suspecté par les échographies fœtales. A un stade précoce, des critères de mauvais pronostic (dilatation majeure, oligoamnios, hyperéchogénicité rénale, biochimie défavorable des urines fœtales prélevées par ponction sous échographie) peuvent parfois amener à proposer une interruption médicale de grossesse.

Après la naissance, on observe en général un globe vésical et l'absence de mictions normales. On peut parfois palper deux gros reins. Il s'agit d'une urgence néonatale, imposant un transfert rapide en milieu spécialisé de chirurgie pédiatrique. Un traitement antibiotique préventif est instauré. Le diagnostic des valves est confirmé par une cystographie, que l'on réalise au mieux par ponction sus pubienne directe de la vessie (Fig. 9). Le traitement consiste en une section des valves par voie endoscopique. La fonction rénale doit être surveillée étroitement pendant de longues années. Les problèmes de continence, fréquents pendant l'enfance, s'arrangent généralement après la puberté.

Fig. 9 : Valvules de l’urèthre postérieur
5.2 Troubles vésico-sphinctériens
5.2.1 De cause neurologique

Le fonctionnement de la vessie et de son système sphinctérien est contrôlé par des centres réflexes médullaires eux-mêmes sous contrôle des fonctions supérieures. Toute altération des voies de conduction (en particuliers médullaires) peut être responsable de perturbations du fonctionnement vésico-sphinctérien, perturbations que l'on regroupe sous le nom de vessies neurologiques. Les lésions neurologiques peuvent être congénitales (spina bifida surtout) ou acquises (tumeurs, traumatismes).

La conséquence constante des vessies neurologiques est l'incontinence. Il y a schématiquement deux situations possibles : les insuffisances sphinctériennes avec écoulement permanent à vessie toujours vide, et les vessies rétentionnistes avec écoulement par regorgement. Les conséquences sociales sont identiques dans les deux cas, mais le haut appareil urinaire est beaucoup plus en danger dans le deuxième cas.

Le traitement des vessies neurologiques peut comporter des sondages évacuateurs plusieurs fois par jour (cathétérismes intermittents), éventuellement associés à différents types d’interventions visant à obtenir une vessie rétentionniste, bien compliante et de capacité suffisante. Les dérivations urinaires externes ne sont plus guère utilisées. La surveillance de l’état du haut appareil est fondamentale.
5.2.2 Troubles fonctionnels sans cause neurologique ou organique

Certains sont très rares comme la dyssynergie vésico-sphinctérienne, alors que d’autres comme l’instabilité (ou immaturité) vésicale sont très fréquents.

L’instabilité vésicale est liée à l’existence d’une vessie hyperréflective. Des contractions involontaires et automatiques du détrusor sont responsables de besoins impérieux et soudains que l’enfant tente de contenir en contractant sa musculature périnéale (sphincter strié). Ces impériosités mictionnelles sont souvent associées à des fuites urinaires. L’attitude de l’enfant accroupi, cuisses serrées, cherchant désespérément à se retenir, est très caractéristique. En dehors des fuites d’urines, les hautes pressions engendrées par les contractions vésicales peuvent à la longue entraîner l’apparition d’un authentique reflux secondaire, d’où l’importance de rechercher systématiquement une instabilité vésicale à l’interrogatoire de tout enfant atteint de reflux vésico-rénal. Les cystites à répétition sont fréquentes dans l’instabilité vésicale, elles s’auto-entretiennent mutuellement avec le trouble fonctionnel vésical, réalisant parfois un véritable cercle vicieux. Le traitement symptomatique de l’instabilité vésicale repose sur les anticholinergiques qui sont très efficaces (oxybutinine). La guérison spontanée est obtenue en quelques mois ou années avec la croissance.

L'énurésie (le pipi au lit) peut avoir plusieurs facteurs étiologiques intriqués. Il importe de s'assurer qu'il n'y a pas d'autres symptômes associés : impériosité mictionnelle, pollakiurie et fuites d'urines dans la journée qui pourraient orienter vers une immaturité vésicale. Dans la plupart des cas cependant l'origine de ce trouble reste mystérieuse. Un facteur psychologique est parfois incriminé en présence d'une énurésie secondaire (c'est à dire survenant alors que l'enfant avait été propre pendant plusieurs années) notamment si un événement perturbant peut être mis en évidence : drame familial, échec scolaire... Mais dans la plupart des cas l'origine de ce trouble peut être rattachée à l'association d'un sommeil très profond et d'une sécrétion excessive des urines pendant la nuit.
L'énurésie finit toujours par guérir, quelquefois seulement à un âge avancé. Le problème ne doit cependant pas être sous-estimé. Les traitements pharmacologiques agissant sur le comportement vésical ou sur le métabolisme de l'eau (Minirin) peuvent avoir une certaine efficacité, mais les "petits moyens" ne devront jamais être négligés : prise en considération du problème, calendrier nuit sèche - nuit humide, qualité du sommeil, miction en début de nuit et éventuellement recours à un dispositif réveillant l'enfant dès la première fuite.
Sténose hypertrophique du pylore
B. Frémond

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes
mis à jour le 10 mars 2000

1 Anatomie
2 Etiologie
3 Clinique
4 Examens complémentaires
   

5 Formes cliniques
6 Diagnostic différentiel
7 Bilan et traitement

C'est une affection fréquente, caractérisée par une hypertrophie sténosante du muscle pylorique, faisant obstacle à la vidange gastrique.

1 Anatomie

L'anatomie est au mieux étudiée sur une coupe longitudinale (Fig 1). L’épaississement musculaire atteint au moins 4 mm. Cet épaississement se continue de façon progressive avec la musculeuse gastrique et présente une transition nette du côté duodénal. La longueur de cette zone d’hypertrophie musculaire peut atteindre 3 à 4 cm, et la largeur 15 à 20 mm. L’aspect extérieur et la consistance font parler d’olive pylorique. A l’intérieur de ce long canal musculaire, la muqueuse est normale, plissée longitudinalement. En amont, l’estomac est souvent hyperkinétique.


Figure 1 : Sténose hypertrophique du pylore. Coupe longitudinale de l'olive.
2 Etiologie

Elle n’est pas connue : irritation muqueuse ? hypergastrinémie ? médicaments pendant la grossesse ? anomalies de l’innervation intrinsèque ? Il y a des facteurs génétiques : la sténose du pylore est plus fréquente chez le garçon que chez la fille (4 pour 1). Lorsqu’un des parents a été opéré d’une sténose du pylore, le risque est accru pour la descendance : 19% des garçons et 7% des filles sont atteints si la mère était atteinte, 5% des garçons et 2,5% des filles sont atteints si le père était atteint, alors que l’incidence globale est de 1 à 3 pour mille. Par ailleurs, les variations saisonnières, et la survenue plus fréquente chez un premier né sont en faveur de l’existence de facteurs environnementaux.

3 Clinique

Dans la forme typique, les symptômes débutent chez un nourrisson en parfaite santé, après un intervalle libre de 3 à 4 semaines, pouvant parfois atteindre 2 à 3 mois. Le tableau est fait de vomissements, minimes au début, puis devenant abondants, en jet, toujours blancs, faits de lait caillé, survenant souvent à distance des repas. L’état général est conservé au début, mais au bout de quelques jours apparaissent une cassure de la courbe de poids, une constipation, une oligurie, et enfin des signes de déshydratation.

L’examen clinique doit rechercher des ondulations péristaltiques à l’inspection à jour frisant de l’hypochondre gauche. La palpation de l’hypochondre droit permet très souvent de retrouver l’olive pylorique, à condition que l’enfant soit parfaitement calme. Cet examen clinique doit aussi apprécier l’état général et rechercher des signes de déshydratation.

4 Examens complémentaires

L’échographie est parfaitement fiable entre des mains entraînées. L’olive a un aspect en cocarde en coupe transversale. En coupe longitudinale, on voit bien l’hypertrophie musculaire et l’allongement du canal muqueux, hyperéchogène (Fig 2). L’épaisseur du muscle est de 4 mm au moins, et les dimensions de l’olive de 13 mm de diamètre et 19 mm de long au moins. La présence de liquide de stase intra-gastrique est très évocatrice.

Figure 2 : échographie d'une sténose du pylore.

Les indications du transit gastro-duodénal sont devenues très rares. On le réserve aux rares cas où l’échographie est douteuse. L’ingestion de baryte permet de mettre en évidence la stase et le retard à la vidange gastrique, ainsi que l’image directe de l’olive, avec son canal pylorique très fin et allongé, et son empreinte sur l’estomac et le duodénum (Fig 3a et 3b).

         

Figures 3a et 3b : TOGD d'une sténose du pylore.
Stase gastrique, peu de passages duodénaux, défilé pylorique très étroit.
5 Formes cliniques

L'association à un reflux gastro-oesophagien est fréquente, parfois avec hernie hiatale (syndrome de Roviralta). Dans ce cas, l’intervalle libre peut être très court ou manquer complètement, les vomissements peuvent parfois être striés de sang.

L’association avec un ictère à bilirubine libre est classique, il disparaît avec le traitement de la sténose du pylore.

La sténose hypertrophique du pylore est en règle isolée, les malformations associées sont très rares.

6 Diagnostic différentiel

La clinique et l’échographie sont en règle si typiques que le diagnostic de sténose hypertrophique du pylore est facile dans la grande majorité des cas. Il faut éliminer le reflux gastro-oesophagien, les erreurs diététiques, les intolérances alimentaires, les vomissements de cause infectieuse ou métabolique, le volvulus gastrique et les exceptionnelles dyskinésies antrales.
7 Bilan et traitement

Dès le diagnostic établi, l’enfant doit être hospitalisé en milieu chirurgical pour bilan, réanimation pré-opératoire et intervention.

Le bilan biologique doit rechercher les conséquences nutritionnelles et les perturbations hydroélectrolytiques liées aux vomissements : alcalose métabolique, hypochlorémie, hypokaliémie, déshydratation extra-cellulaire, baisse des facteurs de coagulation, hypoalbuminémie.

La période de réanimation pré-opératoire visant à corriger tous ces troubles est en général de 24 h, mais elle peut atteindre 48 à 72 h dans les cas les plus sévères. L’aspiration gastrique est nécessaire.

Le traitement est chirurgical , mené par une incision ombilicale qui ne laisse quasiment pas de cicatrice. Après extériorisation complète de l'olive (Fig 4), on réalise une pyloromyotomie extramuqueuse (section musculaire longitudinale, sans ouverture de la lumière digestive).

Figure 4 : aspect per-opératoire de l'olive pylorique.

La sonde gastrique est ôtée en fin d’intervention, et la perfusion après le réveil. L'alimentation est reprise progressivement 4 heures après, le régime normal est atteint dès le lendemain, autorisant la sortie 24 à 48 h après l’intervention. Quelques vomissements post-opératoires sont fréquents.

Les complications sont exceptionnelles. Une brèche muqueuse en per-opératoire doit être recherchée systématiquement, et immédiatement aveuglée par un point de suture. Une pyloromyotomie insuffisante entraîne la poursuite de la symptomatologie. Les problèmes de paroi (infection, éventration) sont prévenus par une bonne préparation pré-opératoire de la peau ombilicale.
Malformations viscérales graves du nouveau-né
B. Frémond

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes
mis à jour le 26 mars 1999

1 Fentes labio-palatines
2 Atrésie de l'oesophage
3 Hernie congénitale de coupole diaphragmatique
4 Omphalocèle et laparoschisis
   

5 Occlusions néonatales
5.1 Signes révélateurs
5.2 Principales étiologies
6 Malformations ano-rectales

Il s'agit d'un ensemble hétérogène de malformations graves qui ont comme points communs d'être peu fréquentes, d'être dépistées in utero ou immédiatement à la naissance, et de nécessiter une prise en charge rapide en milieu chirurgical, et pour certaines un long suivi ultérieur.
1 Fentes labio-palatines
Elles résultent d'une anomalie de fusion des bourgeons de la face. La fréquence est de 1 pour 1 000 naissances.

Il y a plusieurs formes anatomiques : dans la forme totale (Fig. 1), la fente intéresse la lèvre, le plancher nasal, le maxillaire supérieur (arcade dentaire et palais) et le voile du palais. Il existe des formes partielles, des formes bilatérales.

Une consultation spécialisée dans les 15 premiers jours de vie est indispensable pour définir l'attitude thérapeutique. En règle générale, les fentes labiales sont opérées avant 6 mois, et les fentes palatines avant 18 mois. Un long suivi est nécessaire pour éviter et traiter les séquelles orthodontiques, orthophoniques et esthétiques.


Fig. 1 : Fente labio-palatine droite totale
2 Atrésie de l'oesophage

L'atrésie de l'oesophage réalise une interruption de la continuité oesophagienne, le cul de sac inférieur étant le plus souvent fistulisé dans la trachée (Fig. 2), mais il existe plusieurs formes anatomiques. Les conséquences postnatales immédiates sont essentiellement respiratoires (fausses routes salivaires et inondation bronchique par reflux gastro-oeso-trachéal), l'impossibilité d'alimentation venant au second plan. La fréquence est de 1 pour 4 000 naissances.


Fig. 2 : Atrésie de l'oesophage
Représentation schématique

Le diagnostic est rarement suspecté à l'échographie anténatale. C'est en règle le passage d'une sonde oesophagienne en salle de travail qui permet de l'affirmer, la sonde butant à une dizaine de centimètres. Cette manoeuvre est systématique. Il faut toujours faire le test de la seringue, en auscultant la région épigastrique tout en injectant rapidement 10 ml d'air dans la sonde : si le bruit de l'air n'est pas perçu, la sonde n'est pas dans l'estomac.

Bien que cela ne doive plus se voir, le diagnostic peut être évoqué plus tardivement, devant une hypersalivation, un encombrement, voire une détresse respiratoire : là encore, c'est l'impossibilité du passage d'une sonde qui peut l'affirmer.

L'enfant doit être transféré immédiatement par le SAMU dans un service de chirurgie pédiatrique, pour une correction chirurgicale rapide. Le bilan préopératoire doit rechercher des malformations associées (30% des cas) qui conditionnent en grande partie le pronostic. En leur absence, et si le diagnostic est précoce, le pronostic est généralement bon.
3 Hernie congénitale de coupole diaphragmatique
Encore appelée hernie de Bochdalek, la hernie de coupole diaphragmatique, localisée le plus souvent gauche, permet le passage des viscères intra-abdominaux dans la cavité pleurale. La fréquence est d'environ 1 pour 3 000 naissances. Les viscères herniés compriment les deux poumons, ce qui entraîne une hypoplasie pulmonaire.

Le diagnostic est le plus souvent posé avant la naissance : l'échographie obstétricale permet aussi de rechercher des malformations associées, fréquentes, surtout cardiaques. Il faut faire un caryotype foetal. En l'absence de dépistage anténatal, le diagnostic est évoqué après la naissance devant une détresse respiratoire sévère immédiate ou d'installation très rapide. Une simple radio de face du thorax confirme le diagnostic en montrant des images hydro-aériques dans l'hémithorax (Fig. 3).


Fig. 3 : Hernie de coupole
Radio thoracique de face

Le traitement repose avant tout sur la réanimation en milieu spécialisé, l'idéal étant de pouvoir planifier la naissance et transférer au préalable l'enfant in utero dans la structure qui le prendra en charge, tout transfert postnatal étant délétère. Ce n'est qu'une fois la situation respiratoire et hémodynamique stabilisée qu'une chirurgie diaphragmatique réparatrice peut être entreprise. Le pronostic de cette malformation reste sévère.
4 L'omphalocèle et le lapaoschisis
Omphalocèle et laparoschisis sont des défects congénitaux de la paroi abdominale antérieure entraînant une éviscération.

Dans l'omphalocèle, le défect est large, médian, et les viscères sont recouverts et protégés par une fine membrane amniotique translucide. Le cordon ombilical s'implante sur cette membrane, au sommet de la masse éviscérée (Fig. 4). Les malformations associées sont très fréquentes, en particulier des anomalies du caryotype. La fréquence est de 1 pour 2 000 foetus.


Fig. 4 : Omphalocèle

Le diagnostic est le plus souvent anténatal : il importe de rechercher attentivement les malformations associées et de réaliser un caryotype. Une interruption médicale de grossesse est proposée en cas d'anomalies associées graves. En l'absence de telles anomalies, le pronostic est bon, la grossesse est menée à son terme normal, avec une probabilité de survie de 90%.

Dans le laparoschisis (Fig. 5), le défect est étroit, latéralisé à droite de l'implantation du cordon qui est normale. Les viscères sont directement au contact du liquide amniotique. Il peut y avoir des lésions intestinales liées à la macération amniotique ou à des conflits mécaniques au niveau de l'orifice pariétal. Les malformations associées sont exceptionnelles. La fréquence est de 1 pour 10 000 foetus.


Fig. 5 : Laparoschisis

Le diagnostic est là aussi le plus souvent anténatal. Une surveillance échographique très rapprochée est indispensable pour dépister une souffrance intestinale qui peut faire avancer le terme de la grossesse. Le pronostic est bon, le taux de survie est de 90%.

Dans les deux cas, le diagnostic anténatal autorise un accouchement par voie basse programmé dans un centre spécialisé, ce qui permet une chirurgie réparatrice immédiate dans de bonnes conditions.
5 Occlusions néonatales
L'occlusion néonatale est définie par tout arrêt ou absence du transit intestinal pendant le premier mois de vie, en raison d'un obstacle situé en aval du pylore. Il s'agit d'un syndrome aux aspects variés et aux causes malformatives multiples. La fréquence est de 1 pour 1 500 naissances, toutes causes confondues.
5.1 Signes révélateurs
- En anténatal : l'échographie obstétricale découvre des dilatations digestives et souvent un hydramnios.
- Après la naissance : le syndrome occlusif au complet associe des vomissements verts, bilieux, d'une grande valeur sémiologique, un météorisme abdominal, et des anomalies de l'évacuation du méconium.

Tout nouveau-né dont le tableau clinique évoque une occlusion doit être rapidement transféré en milieu spécialisé, tout retard pouvant avoir des conséquences redoutables. Le diagnostic de siège et de nature de l'obstacle repose essentiellement sur un examen clinique complet et sur la radiographie d'abdomen sans préparation (ASP), éventuellement sur un test de la sonde (cf. plus bas), une opacification digestive basse, une échographie.
5.2 Principales étiologies

- Atrésie et sténose duodénale : remarquables par la grande fréquence des malformations associées, surtout la trisomie 21. Le diagnostic est le plus souvent anténatal. En post natal, c'est un tableau d'occlusion très haute, fait de vomissements verts très précoces, sans météorisme. L'ASP en position verticale objective 2 niveaux hydroaériques, l'un gastrique, l'autre duodénal : c'est l'image pathognomonique en double bulle (Fig. 6).


Fig. 6 : Atrésie duodénale
ASP : Image en double bulle

- Malrotation intestinale ou mésentère commun : cette anomalie des accolements péritonéaux et de la disposition du tube digestif peut être responsable soit d'un obstacle duodénal par une bride péritonéale anormale comprimant le deuxième duodénum, soit d'accidents aigus gravissimes, à type de volvulus complet du grêle, nécessitant une intervention d'extrême urgence.

- Atrésie du grêle et du colon : interruption de la continuité intestinale, d'origine ischémique anténatale, avec nécrose aseptique, résorption de la zone intéressée, et formation de deux culs de sac cicatriciels. Le syndrome occlusif est typique, l'ASP montre plusieurs niveaux liquides étagés (Fig. 7). Le pronostic dépend essentiellement de la longueur du grêle restant.


Fig. 7 : Atrésie du grêle
Niveaux liquides sur l'ASP

- Iléus méconial : il s'observe à la naissance, chez des enfants atteints de mucoviscidose. C'est une obstruction de l'iléon terminal par du méconium pathologique, très visqueux.

- Maladie de Hirschsprung : elle est liée à une anomalie de l'innervation intrinsèque de la partie terminale de l'intestin, le plus souvent limitée au recto-sigmoïde, mais remontant parfois plus haut. Le segment atteint est dépourvu de cellules nerveuses ganglionnaires, il est apéristaltique, spasmé, et se comporte comme un obstacle fonctionnel. Le tableau est le plus souvent celui d'une occlusion néonatale, mais il existe des formes de révélation tardive chez l'enfant plus grand.
Le diagnostic repose sur une clinique évocatrice (météorisme très important, retard à l'élimination du méconium, vomissements bilieux. Le toucher rectal et/ou le passage d'une sonde rectale - test de la sonde - déclenchent souvent une émission de selles liquides et de gaz), sur l'ASP et le lavement baryté, sur l'absence de réflexe recto-anal inhibiteur en manométrie ano-rectale, et sur l'examen histologique d'une biopsie rectale.
Le traitement chirurgical consiste à réséquer toute la zone aganglionnaire, parfois après une phase de dérivation par colostomie.
5.3 En conclusion
Tout vomissement bilieux des premiers jours de vie doit être, a priori, considéré comme révélateur d'un problème chirurgical, et doit faire considérer très rapidement le transfert de l'enfant vers un service de chirurgie pédiatrique.
6 Malformations anorectales

Elles sont définies par l'absence d'un anus normal en place normale. Il faut préférer le terme de malformations ano-rectales à celui plus vague d'imperforation anale, qui englobe le même cadre. La fréquence est de 1 pour 5 000 naissances.
Il y a de nombreuses formes anatomiques en fonction du sexe, de la hauteur du cul de sac rectal par rapport au plancher pelvien, de l'existence ou non d'une fistule avec la peau ou les voies uro-génitales. Les malformations associées sont fréquentes, en particulier vertébrales ou uro-génitales.
C'est l'examen systématique du périnée à la naissance qui permet le diagnostic (Fig. .


Fig. 8 : Malformation anorectale chez un garçon
Absence d'anus à l'examen du périnée

L'existence chez le garçon d'une méconiurie traduit une fistule avec les voies urinaires. Une radiographie d'abdomen sans préparation de profil, tête en bas, permet de déterminer la hauteur du cul de sac rectal.
Dans tous les cas, l'enfant doit être transféré rapidement en milieu chirurgical pédiatrique dès la découverte de la malformation. Les formes les plus simples peuvent être opérées radicalement à la naissance, les autres nécessitent une colostomie provisoire, l'intervention radicale étant réalisée avant l'âge de trois mois.
Le pronostic dépend grandement de la forme anatomique. La constipation est fréquente dans toutes les formes, le risque d'incontinence est important dans les formes hautes.
7 Exstrophie vésicale

Il s'agit d'une malformation rare, environ 1 pour 20 000 naissances, plus fréquente chez le garçon. Elle se définit comme l'absence de la paroi antérieure de la vessie et de la paroi abdominale antérieure sous ombilicale.
La paroi vésicale postérieure est exposée à l'air sous la forme d'une plaque rougeâtre, bombante avec la poussée abdominale. Cette plaque se poursuit en haut et latéralement avec la peau. Vers le bas, l'urèthre est également largement ouvert. Le système sphinctérien et les organes génitaux sont très anormaux. Le diagnostic est évident à l'inspection (Fig. 9).


Fig. 9 : Exstrophie vésicale chez une fille

Une prise en charge immédiate à la naissance en chirurgie pédiatrique est indispensable. La correction chirurgicale est très complexe et nécessite plusieurs temps opératoires sur plusieurs années. Les risques majeurs de cette malformation sont l'incontinence urinaire dans les deux sexes et les séquelles au niveau de la verge chez le garçon.
Pathologie des organes génitaux externes
B. Frémond

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes
mis à jour le 10 mars 2000

1 Anomalies de siège de l'orifice urétral
1.1 Hypospadias
1.2 Epispadias
2 Phimosis - Paraphimosis - Adhérences prépuciales
   

3 Anomalies et malformations vulvaires
3.1 Coalescence des petites lèvres
3.2 Imperforation de l'hymen

Ce chapitre comporte diverses malformations. Certaines sont rares et graves, d'autres sont relativement fréquentes et plus bénignes et peuvent faire l'objet de consultations de la part des parents. Il importe de souligner qu'aussi bien chez le garçon que chez la fillette, l'examen des organes génitaux externes doit faire partie du bilan général de routine (notamment examens de santé obligatoires). Soulignons encore un fait : les malformations urogénitales externes sont beaucoup plus fréquentes chez le garçon que chez la fille.

1 Anomalies de siège de l'orifice urétral
1.1 Hypospadias

1.1.1 Définition

Localisation de l'orifice urétral à la face inférieure de la verge. Comme il s'agit d'un défaut de coalescence des replis génitaux pendant la vie foetale, le siège du méat est d'autant plus postérieur que le malformation est apparue plus tôt. C'est la plus fréquente des malformations de l'urètre du garçon. Environ 1 garçon sur 300, mais les formes mineures distales prédominent.

1.1.2 Clinique

La forme balanopréputiale est la plus fréquente. L'attention peut être attirée par la forme élargie du prépuce (dit en tablier de sapeur). Le méat est dans le sillon balanique à la face inférieure de la verge ; il se continue en avant par une fossette naviculaire plus ou moins profonde à la face ventrale du gland. Le méat est parfois sténosé, une coudure associée de la verge est possible.

L'hypospadias pénien ou péno-scrotal est défini par le siège de l'orifice méatique. Il y a souvent une coudure importante de la verge, dont la face ventrale est courte.

L'hypospadias périnéal encore appelé postérieur ou vulviforme pose plus généralement le problème d'une ambiguïté sexuelle. En effet, l'orifice est très postérieur, la verge est très coudée et les deux hémi-scrotums peuvent prêter à confusion si la gonade qui s'y trouve est très petite. Il n'y a donc pas là qu'un problème urologique.

Dans le cas où l'ambiguïté sexuelle pose le problème de la détermination du sexe, il faut envisager de faire des examens complémentaires :

    *
      sexe chromatinien (corpuscule de Barr),
    *
      sexe chromosomique,
    *
      génitographie, étude des gonades.

Le problème important est de prendre une orientation pour l'avenir de l'enfant en soulignant que le sexe d'élevage doit être déterminé dans les 3 premiers jours de vie, avant la déclaration à l'état civil.
1.1.3 Le traitement

Le traitement est conduit suivant quelques principes :

    *
      toute malposition urétrale doit faire contrôler l'intégrité de l'appareil urinaire par une échographie, sauf dans les formes mineures.
    *
      si l'émission de l'urine est trop difficile et le jet très filiforme, il est utile de faire précocément une méatostomie.
    *
      les interventions réparatrices sont exécutées entre 6 mois et 18 mois.

De nombreuses techniques peuvent être employées adaptées au type anatomique tenant compte de la position du méat et de la présence ou non d’une coudure.

1.2 Epispadias

Il n'a rien de commun avec l'hypospadias et il est très rare. C'est une fissure antérieure du bas appareil urinaire qui est retrouvée dans toute exstrophie vésicale mais peut exister à l'état isolé. Le problème essentiel est celui de l'incontinence très souvent associée.

2 Phimosis - Paraphimosis - Adhérences prépuciales

Le phimosis, au sens strict, est une sténose de l'anneau prépucial interdisant la rétraction du prépuce en arrière du gland. Il est en général secondaire à des phénomènes infectieux locaux récidivants, ou à une dermatose de type lichen, ou parfois à la cicatrisation d'excoriations cutanéo-muqueuses faites lors de manœuvres de décalottage forcées, trop précoces, et non entretenues par la famille. On englobe souvent à tort dans cette définition le prépuce physiologiquement étroit du petit garçon de moins de 5 ou 6 ans, chez lequel on ne devrait parler que de "prépuce non encore rétractable".

Les adhérences prépuciales existent chez tous les nouveau-nés entre le versant muqueux du prépuce et la muqueuse glandulaire.

Après la naissance, et dans un délai très variable suivant les enfants (de quelques mois à plusieurs années), le prépuce s'élargit progressivement et devient rétractable, tandis que les adhérences disparaissent. Les dernières adhérences ne disparaissent parfois qu'au moment de la puberté.

Dans l'immense majorité des cas, on peut donc s'abstenir de tout geste thérapeutique, mais un certain nombre de complications peuvent survenir :

- dans de rares cas de prépuces courts et très serrés, il peut exister une gêne à la miction avec un aspect d'enfouissement de la verge, un gonflement prépucial par accumulation d'urine sous le prépuce et un jet filiforme. Une prise en charge chirurgicale peut être nécessaire, même très précocement.

- l'infection du smegma (sécrétions sébacées et débris épithéliaux) accumulé entre le gland et le prépuce est responsable de balanites : le prépuce prend alors un aspect inflammatoire et oedématié avec issue de pus par l'anneau prépucial, brûlures mictionnelles, dysurie voire rétention. L'évolution vers un phimosis cicatriciel vrai est exceptionnelle.

- le paraphimosis est une complication mécanique liée à l'existence d'une sténose prépuciale relative : à la suite d'un décalottage, le gland ne peut plus être recouvert par le prépuce : le versant muqueux prépucial forme alors un bourrelet œdémateux très important à la base du gland, en aval du sillon de strangulation formé par l'anneau prépucial. Non traité l'évolution peut se faire vers la nécrose ischémique du prépuce.

Traitement

- Le simple prépuce non encore rétractable et les adhérences prépuciales non compliquées de balanites ne justifient aucun traitement avant l'âge de 6 ou 7 ans. Il faut simplement apprendre à l'enfant à tirer lui même sur son prépuce à partir de l'âge de 2 ou 3 ans, pour le dilater progressivement et parvenir finalement à le rétracter sans le traumatiser. Il faut prévenir les parents qu'une fois la rétraction complète obtenue, les manœuvres de décalottage doivent être poursuivies régulièrement pour éviter une récidive.

- L'existence d'une balanite nécessite d'abord un traitement médical local anti-infectieux et anti-inflammatoire. Dans un certain nombre de cas, les adhérences prépuciales responsables de cet accident se libèrent spontanément à l'occasion de cette infection et ne justifient pas de geste complémentaire.

- Si elles sont responsables de balanites à répétition, les adhérences prépuciales peuvent être libérées en consultation grâce à l'application au préalable d'une pommade anesthésique locale (EMLA). La libération est faite à l'aide d'un stylet mousse ; elle doit être totale jusque dans le sillon balano-prépucial et des soins locaux sont nécessaires pendant une dizaine de jours (solution désinfectante et pommade anti-inflammatoire et antibiotique). La récidive est fréquente si les décalottages réguliers ne sont pas poursuivis.

- A partir de l'âge de 6 ou 7 ans, si le prépuce n'est toujours pas rétractable malgré les tentatives de l'enfant, l'application locale biquotidienne d'un dermocorticoïde, associée à des tentatives de décalottage, est suffisante dans la très grande majorité des cas. En cas d'échec, un geste chirurgical de type plastie d'agrandissement est toujours possible. La circoncision dans ces circonstances est inutile.

- La survenue d'un paraphimosis représente une urgence : malgré l'importance de l'œdème, la réintégration du gland en amont de l'anneau prépucial est toujours possible, le plus souvent sous simple prémédication et inhalation d'Entonox (mélange protoxyde d'azote et oxygène). Un geste chirurgical en urgence ne doit jamais être effectué.

- Cas particulier : celui du phimosis avec lichen scléro-atrophique : il survient chez des enfants qui avaient auparavant un prépuce normal, rétractable. Outre un anneau prépucial fibreux et blanchâtre, la muqueuse glandulaire est anormalement épaisse, blanchâtre, sclérosée, avec parfois une sténose du méat. La cure chirurgicale du phimosis est presque toujours inévitable, sous la forme d'une circoncision, seul geste qui met à l'abri d'une récidive. Vu très précocement, une corticothérapie locale peut être efficace.
3 Anomalies et malformations vulvaires
3.1 Coalescence des petites lèvres

Affection assez courante, constituée par l'adhérence des bords libres des petites lèvres, laissant seulement un petit pertuis antéro-supérieur juxta clitoridien permettant l'évacuation des urines. Le méat urinaire est ainsi masqué par la coalescence. Elle est favorisée par une inflammation vulvaire (vulvite).
Cette affection est rare à la naissance et semble se constituer progressivement. L'examen clinique montre une coalescence évidente. La mère s'en aperçoit au cours de la toilette.
Le traitement est simple. Séparation des petites lèvres avec une sonde cannelée. Le risque de récidive est limité par l'application quotidienne d'une pommade à base de corps gras ou même d'oestrogènes durant 3 à 4 semaines.
3.2 Imperforation de l'hymen

Malformation relativement rare, mais qu'il faut savoir diagnostiquer pour éviter des troubles graves notamment au moment de la puberté.

3.2.1 Avant la puberté

Le diagnostic peut être fait au cours d'un examen systématique de la région vulvaire.
Chez le nourrisson et surtout chez le nouveau-né, en période de crise génitale, l'imperforation peut entraîner la rétention d'une importante quantité de sécrétions vaginales, c'est l'hydrocolpos. La palpation du ventre retrouve parfois une masse bien limitée. Le vestibule vulvaire est bombé. Une petite incision de l'hymen donne lieu à l'écoulement d'une leucorrhée visqueuse abondante.
Si le diagnostic est ignoré, la masse abdominale peut se développer et comprimer les organes voisins notamment les uretères. On pourrait la confondre avec une tumeur abdominale et recourir à une laparotomie regrettable.

3.2.2 A la puberté

L'imperforation entraîne un hématocolpos, avec douleurs abdomino-pelviennes cycliques. La membrane hymenéale apparaît bombée et une courte incision amène la guérison.

3.2.3 Outre ces anomalies vulvaires, il peut y avoir des malformations vulvaires plus importantes qui peuvent poser le problème d'une ambiguité sexuelle et qui vont donc exiger, non seulement un examen clinique, mais aussi des examens complémentaires et un bilan hormonal.
Pathologie des testicules et des bourses
B. Frémond

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes
mis à jour le 10 mars 2000

1 Torsion du pédicule spermatique
2 Orchiépididymite aiguë
3 Tumeurs testiculaires et paratesticulaires
   

4 Varicocèle
5 Ectopie testiculaire
1 Torsion du pédicule spermatique

Elle consiste en une torsion axiale du cordon spermatique pouvant survenir à l'intérieur de la vaginale testiculaire (forme intra-vaginale la plus fréquente) ou au-dessus de la vaginale (forme supra-vaginale, néo-natale).
Elle peut survenir à tout moment de l'enfance ou de l'adolescence, mais surtout avant 2 ans et au moment de la puberté.
Une forme mineure consiste en la torsion d'un résidu embryonnaire (hydatide séssile de Morgagni).
Le tableau clinique comporte une douleur testiculaire très vive, à début brutal, avec parfois irradiation abdomino-lombaire. La partie correspondante du scrotum est souvent rouge et oedémateuse. La palpation est presque impossible, le testicule étant souvent augmenté de volume, rétracté à la racine du scrotum.
L'absence de fièvre, de signe urinaire, permettent théoriquement d'éliminer une orchite ourlienne ou une orchiépididymite. Chez le nouveauné, la notion de douleur manque, ne laissant que la tuméfaction scrotale.
Devant un tel tableau, plutôt que de discuter d'autres diagnostics, l'exploration chirurgicale s'impose. Elle est impérative dans les plus brefs délais, même si le doute est permis avec une orchiépididymite. Le traitement est très urgent car la vitalité du testicule est compromise au bout de quelques heures (6 à 7 heures). Il suffit de supprimer la torsion et de fixer le testicule. Le testicule controlatéral est fixé systématiquement.
La torsion chez le nouveau-né est le plus souvent opérée à un stade où le testicule n'est plus récupérable.

2 L'orchiépididymite aiguë

Elle est très difficile à différencier d'un tableau de torsion d'où la règle absolue d'intervenir d'urgence dans tous les cas de syndrôme douloureux scrotal aigu pour ne pas passer à côté d'une torsion.
Elle peut aussi bien survenir chez le nourrisson que chez le grand enfant.
Grosse bourse inflammatoire aiguë d'emblée, souvent avec syndrôme infectieux général, fièvre à 38° - 39° et signes urinaires (dysurie, brulûres mictionnelles). On peut parfois sentir un gros épididyme coiffant un testicule normal. Ces signes ne sont pas toujours aussi caractéristiques. L'orchite, souvent bilatérale, est rare avant la puberté.

3 Tumeurs testiculaires et paratesticulaires

Elles sont rares, augmentation plus ou moins rapide et indolore d'une bourse. Ce gros testicule, ferme, indolore, régulier ou non, opaque à la transillumination est parfois recouvert d'un scrotum un peu rouge et chaud. Cordon parfois infiltré. Pas de hernie, mais il y a souvent une hydrocèle associée réactionnelle.
Ces tumeurs surviennent presque toujours avant deux ans. Les tumeurs habituelles sont les tératomes malins ou bénins, les sarcomes embryonnaires, les lymphomes et plus rarement les séminomes, ou les localisations d'hémopathies malignes. Le bilan comprend : échographie, radio pulmonaire, dosage d'alpha foeto-protéines. Les biopsies sont en règle contrindiquées. L'exérèse doit être carcinologique.

4 Le varicocèle

Il s'agit d'une dilatation variqueuse des veines spermatiques. Chez l'adolescent, toujours à gauche, il est lié à une insuffisance valvulaire ostiale de la veine spermatique. En cas de varicocèle, chez le jeune enfant, il faut toujours rechercher une tumeur rénale susjacente (néphroblastome).

5 Ectopie testiculaire

C'est un terme général regroupant toutes les situations où un testicule n'est pas en place dans la bourse.

Il faut éliminer d'emblée de ce cadre les testicules rétractiles (ou oscillants ou ascenseurs) qui sont des testicules normaux, en position scrotale normale à la naissance. A partir de 18 mois ou 2 ans, ils remontent par intermittence à l'orifice externe du canal inguinal en raison d'une l'hypertonie crémastérienne, mais ils sont facilement abaissables manuellement dans la bourse, et s'y maintiennent spontanément quand on les lâche. Ce phénomène est physiologique jusqu'à la puberté.

Embryologiquement, la gonade indifférenciée se développe à partir du 30ème jour dans la région lombaire. Elle se prolonge vers le bas par une colonne de mésenchyme qui formera le gubernaculum testis, qui sert de guide pour la migration testiculaire, sous l'influence de l'hormone anti-mullerienne et de l'axe hypothalamus-hypophyse-gonade. Le mécanisme de cette migration est intimement lié au canal péritonéo-vaginal. Toute anomalie hormonale ou du mésenchyme locale peut perturber cette migration.

Anatomiquement, on distingue les insuffisance de la migration testiculaire et les ectopies vraies. Dans le premier cas, la descente du testicule s'est arrêtée plus ou moins haut sur la ligne normale de migration, dans le second, le testicule a migré selon un trajet aberrant, vers la région crurale, ou périnéale, ou pubienne, sous la peau devant le canal inguinal (fréquent), voire du coté controlatéral. Le terme souvent employé de cryptorchidie (étymologiquement testicule caché) devrait être réservé aux seuls cas ou le testicule n'est pas palpable à l'examen clinique : une cryptorchidie peut donc correspondre en fait soit à une anorchidie (absence congénitale ou acquise de testicule), soit à un testicule haut situé, intra-abdominal, non accessible à l'examen clinique.

Fréquence. La prévalence est d'environ 0,8% après l'âge d'un an. Le coté droit est plus souvent atteint (60%). L'ectopie est bilatérale dans 10 à 20% des cas. Les antécédents familiaux sont fréquents. A la naissance, la prévalence est de 3 à 4%, beaucoup plus chez les prématurés. Il y a donc des possibilités de migration spontanée, raison pour laquelle il faut attendre 6 mois à un an pour affirmer un diagnostic définitif d'ectopie testiculaire.

Il existe des malformations associées. Les grands syndromes malformatifs comme le syndrome de prune belly, les déficits gonadotropes ou les ambiguïtés sexuelles sont rares. Ils imposent la réalisation d'examens complémentaires spécialisés (caryotype, chromatine sexuelle, bilan endocrinien) Les anomalies locorégionales sont par contre très fréquentes : association à une hernie inguinale ou surtout à un canal péritonéovaginal persistant dans plus de la moitié des cas, anomalies de l'épididyme ou du rete testis, hypospadias.

Cliniquement

1 - Interrogatoire

La présence antérieurement constatée des 2 testicules en place par la mère, oriente vers le diagnostic de testicules rétractiles.

2 - Examen

Le technique est très importante : il faut toujours se placer du coté que l'on examine, avec une main "scrotale" et une main "inguinale", enfant en décubitus dorsal, cuisses en légère flexion et abduction. Il faut préciser le siège et la taille du testicule, et jusqu'à quel point il peut être abaissé. S'il n'est pas palpable, il faut renouveler l'examen en position debout. S'il est abaissable sans traction, il s'agit d'un testicule rétractile qui ne nécessite aucun traitement. Il faut toujours rechercher des malformations associées.

Examens complémentaires

Il sont parfaitement inutiles dans la très grande majorité des cas d'ectopie testiculaire isolée, sans malformations associées. En cas de cryptorchidie bilatérale (les 2 testicules sont impalpables) constatée à la naissance, un dosage basal de testostérone suivi d'un nouveau dosage après stimulation par gonadotrophines chorioniques permettra de savoir s'il s'agit d'une anorchidie bilatérale ou d'une insuffisance très importante de la migration (testicules intra-abdominaux)

L'échographie n'a pas d'indication dans l'ectopie testiculaire, elle ne permet pas de voir les testicules intra-abdominaux, sa réalisation reflète généralement un examen physique hésitant ou trop hâtif.

Evolution

Les complications sont rares. Les testicules ectopiques sont exposés comme les autres aux traumatismes et aux torsions pédiculaires, il faut savoir y penser devant une douleur inguinale chez un garçon dont la bourse est vide. Le risque de développer une tumeur maligne sur un testicule ectopique est multiplié par 10, il s’agit surtout de séminomes, survenant à l’âge adulte. Le risque de stérilité ou d’hypofertilité est d’autant plus important que l’ectopie est bilatérale, que les testicules sont haut situés, et qu’il existe à l’intervention des anomalies de l’épididyme et/ou du rete testis. On cherche à prévenir au maximum ce risque par des interventions précoces, vers 18 mois. En effet, il a été démontré que des lésions histologiques du testicule (réduction ou absence de lignée germinale, fibrose péritubulaire) pouvaient apparaître dès les premiers mois de vie et s’aggraver ensuite progressivement.

Traitement

1 - Le traitement médical

Il repose sur des injections de gonadotrophines chorioniques. Les indications sont restreintes, les résultats médiocres. Ces injections ne sont pas exemptes de danger (à fortes doses). Elles ont acquis leur renommée sur les testicules rétractiles où elles sont inutiles.
Leur action sur les testicules incomplètement descendus, en allongeant un pédicule vasculaire trop court est douteuse. Elles sont sûrement inefficaces sur les erreurs de migration.
Un test thérapeutique aux gonadotrophines peut néanmoins être réalisé dans les formes peu importantes où le diagnostic est parfois hésitant avec une simple rétractilité. Il ne faut pas, en tout cas, dépasser la dose de 15 000 unités pour la totalité du traitement. Le schéma classique fait appel à 9 injections IM de 500 à 1500 UI chacune, à raison de 3 par semaine.

2 - Le traitement chirurgical

Il est réalisable en hospitalisation ambulatoire. L'âge idéal est 18 mois. L'intervention comporte l'ouverture du canal inguinal et la libération du cordon de toutes ses adhérences (en particulier sac herniaire). Le pédicule vasculaire permet le plus souvent l'abaissement et la fixation du testicule en bonne place.

Une coelioscopie première est indiquée si le testicule n’est pas accessible à la palpation. Si le testicule est de très petite taille, d'aspect dystrophique, il est préférable de l'enlever (ectopie unilatérale). S'il est de taille normale, on peut éventuellement abaisser en 2 temps (le premier temps est coelioscopique).
Hernie inguinale, hydrocèle et kyste du cordon chez l'enfant
B. Frémond

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes
mis à jour le 10 mars 2000

1 Anatomie
2 Epidémiologie
3 Clinique
   

4 Traitement
4.1 Les methodes
4.2 Les indications

Hernie inguinale, hydrocèle et kyste du cordon sont des malformations fréquentes de l'enfant, liées à une anomalie de la fermeture du canal péritonéovaginal.

1 Anatomie (Fig 1)

Le testicule se forme en région lombaire. Il traverse le canal inguinal au septième mois de grossesse pour atteindre la bourse. Il suit dans cette migration le canal péritonéovaginal (CPV), ce dernier s'oblitère ensuite pour former le ligament de Cloquet. Chez la fille, il existe un canal analogue, le canal de Nuck, qui s'oblitère également.

Parmi les reliquats du canal péritonéovaginal, on distingue :

   1. La hernie inguinale (fig. 2a) où seule la partie proximale du CPV est largement perméable, autorisant l'extériorisation d'une anse intestinale.
   2. La hernie inguino-scrotale (fig. 2b) où l'ensemble du CPV est largement perméable, le contenu herniaire pouvant descendre dans la bourse jusqu'au contact du testicule.
   3. L'hydrocèle, collection liquidienne de la cavité vaginale, englobant le testicule. C'est un défaut de fermeture de la partie distale du CPV. Elle est dite communicante (fig. 2c) lorsqu'il persiste une fine communication avec la cavité péritonéale, cas le plus fréquent chez l'enfant.
   4. Le kyste du cordon (fig. 2d) correspond à un défaut de fermeture de la partie moyenne du CPV. Comme l'hydrocèle, il est souvent communicant.

2 Epidémiologie

La prévalance de la hernie inguinale est de 3 à 4%. Elle est plus fréquente chez le prématuré que chez le nouveau-né à terme, chez le garçon que chez la fille, du coté droit que du coté gauche. Elle est parfois bilatérale (10% des cas), surtout chez le prématuré (50%).
3 Clinique

Chez le garçon, la hernie inguinale réalise une tuméfaction intermittente, extériorisée lors des cris ou des efforts. Cette tuméfaction est impulsive, non transilluminable, et elle s'étend depuis l'orifice inguinal vers la racine de la bourse, devant le pubis (fig.3). Dans la forme inguino-scrotale, fréquente chez le prématuré, les anses intestinales peuvent descendre jusque dans la bourse. La hernie est réductible, avec un gargouillement caractéristique. Il faut toujours vérifier l'autre coté (interrogatoire des parents), et examiner les testicules à la recherche d'une insuffisance de la migration testiculaire parfois associée.

Figure 3 : Hernie inguinale droite

Chez la fille avant l'âge de 3 mois, c'est fréquemment l'ovaire qui s'extériorise dans la hernie inguinale : on parle alors de "hernie de l'ovaire". Il s'agit d'une tuméfaction ovoïde, ferme, de 10 à 15 mm de grand axe, siégeant à la racine de la grande lèvre, devant le pubis ou devant l'orifice externe du canal inguinal. Cette tuméfaction est mobile et indolore, elle ne doit pas être prise pour une adénopathie, de localisation toujours plus externe. Il ne faut surtout pas tenter de réduire ces hernies en raison du risque important de léser l'ovaire.

Chez la fille plus grande, le contenu herniaire est toujours intestinal, et la sémiologie rejoint celle du garçon.

L'hydrocèle est une tuméfaction scrotale ovoïde permanente, englobant le testicule et laissant libre l'orifice inguinal superficiel (Fig 4 et 5). Elle peut donner une coloration un peu bleutée à la peau scrotale lorsqu'elle est volumineuse (Fig 6). Elle est transilluminable (Fig 7). Son volume est souvent variable dans le temps, ce qui prouve son caractère communicant. Il n'est pas toujours facile de palper le testicule au sein d'une hydrocèle dont la paroi est très tendue.

  

Figures 4 et 5 : Hydrocèle vaginale

  

  

Figures 6 et 7 : Volumineuse hydrocèle bilatérale. Noter la coloration bleutée du scrotum.
A droite, aspect en transillumination.

Le kyste du cordon réalise une tuméfaction inguinale ou de la partie haute de la bourse qui peut faire évoquer une hernie inguinale, mais cette tuméfaction est permanente, mobile, transilluminable, et elle laisse libre l'orifice inguinal superficiel (Fig 8 et 9). Il peut parfois y avoir une impression de pseudo-réduction du kyste lorsqu'on appuie dessus, mais en fait, il ne fait que s'engager superficiellement dans le canal inguinal, et ressort presque aussitôt. Cette tuméfaction n'englobe pas le testicule qui est toujours facilement palpable en dessous.

  

Figures 8 et 9 : Kyste du cordon, transillumination à droite

Le diagnostic différentiel repose uniquement sur la clinique. Il est parfois difficile d'être sûr du diagnostic lorsque seuls les parents ont vu la tuméfaction inguinale, d'où l'importance de l'interrogatoire. Chez l'enfant, il n'est pas possible par le seul examen physique d'affirmer ou d'infirmer l'existence d'une hernie inguinale lorsqu'elle n'est pas extériorisée. L'échographie n'est d'aucune aide, elle n'a pas indication dans la pathologie du canal péritonéovaginal de l'enfant.

La complication des hernies inguinales est l'étranglement. Il survient dans la majorité des cas dans les trois premiers mois de vie. La hernie devient douloureuse, tendue, dure, irréductible. Il y a fréquemment des vomissements si la situation dure quelques heures. Le diagnostic est facile lorsque la hernie était connue. Lorsque l'étranglement est révélateur, la négativité de la transillumination et l'engagement de la tuméfaction dans l'orifice inguinal superficiel permettent facilement d'éliminer une hydrocèle ou un kyste du cordon. Le risque de la hernie étranglée se situe à deux niveaux. L'incarcération de l'intestin entraîne une occlusion (Fig 10) et un risque de nécrose, et par ailleurs, il y a un risque majeur d'infarcissement du testicule.

Chez la fille, l'étranglement d'une hernie inguinale à contenu intestinal est exceptionnel, mais chez le nourrisson, l'ovaire extériorisé est à haut risque de torsion. La tuméfaction devient alors plus volumineuse, sensible ou douloureuse, et fixe.

  

Fig 10 : Radiographies d'abdomen sans préparation montrant des signes d'occlusion
du grêle chez un nourrisson ayant une hernie inguinale étranglée depuis 24 heures.
A gauche, ASP couché, à droite, ASP en position verticale.
4 Le traitement
4.1 Les méthodes

Le bandage herniaire est à récuser : il est inutile, mal toléré sur le plan cutané et peut même être délétère pour la vascularisation du testicule.

Le taxis consiste à réduire manuellement une hernie engouée ou étranglée. Cette manoeuvre se fait sur un enfant calme, après administration intra-rectale de 0,5 mg/kg de Valium®. Il ne faut pas appuyer sur la hernie, mais la presser latéralement pour réduire d'abord l'oedème et le contenu intestinal, l'anse incarcérée réintégrant ensuite la cavité péritonéale lorsqu'elle est vide.

La chirurgie est réalisée en général en hospitalisation ambulatoire, sauf en urgence ou chez le prématuré. Le geste est plus simple dans son principe que chez l'adulte, car il n'y a pas de réfection pariétale, sauf volumineuse hernie inguino-scrotale. Le sac herniaire péritonéal est simplement réséqué par une courte incision inguinale.
4.2 Les indications

Elles reposent sur quelques grands principes.

1 - Toute hernie inguinale diagnostiquée doit être opérée.

Ce principe est lié aux complications parfois gravissimes des étranglements herniaires, à mettre en balance avec la grande simplicité de la cure chirurgicale à froid d'une hernie inguinale. Devant un tel risque, la possibilité théorique de guérison spontanée des hernies inguinales dans les premiers mois de vie n'entre pas en ligne de compte, d'autant que c'est précisément à cet âge que le risque est maximum.

2 - Il n'y a pas d'âge minimum pour opérer une hernie inguinale.

La raison en est la même que pour le principe précédent, d'autant que le "risque anesthésique" ne dépend pas de l'âge et reste bien inférieur au risque de complication grave. Si la hernie est bien tolérée, l'intervention est programmée dans un délai de quelques jours à quelques semaines. S'il s'agit d'une hernie de l'ovaire, l'intervention doit être réalisée dans les 2 à 3 jours qui suivent, au maximum. Chez le prématuré hospitalisé en néonatologie, la hernie doit être corrigée juste avant la sortie à domicile.

3 - En cas d'étranglement, si la hernie a pu être réduite par taxis, l'enfant est gardé en observation jusqu'au lendemain, et l'intervention est prévue 3 à 6 jours plus tard au maximum, le temps que disparaisse l'oedème local.

4 - Le taxis est contre-indiqué :

    * En cas de hernie de l'ovaire avec suspicion de souffrance ovarienne.
    * En cas d'étranglement évoluant depuis plusieurs heures, avec signes nets d'occlusion.

Dans ces deux cas, la correction chirurgicale doit alors être réalisée en urgence, avec un risque très important pour la gonade dans les deux cas, et pour l'intestin dans le deuxième cas.

5 - Dans la très grande majorité des cas, il n'y a pas d'indication à opérer une hydrocèle ou un kyste du cordon, sauf persistance après l'âge de 4 ou 5 ans, et s'ils sont volumineux et/ou gênants. Ces deux pathologies ne comportent pas de risque évolutif, et guérissent souvent spontanément.
Invagination intestinale aiguë
B. Frémond

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes
mis à jour le 10 mars 2000

1 Anatomie
2 Physiopathologie
3 Etiologie
4 Epidémiologie
5 Clinique
6 Examens complémentaires
   

7 Formes cliniques
8 Traitement
8.1 Lavement thérapeutique
8.2 Traitement chirurgical
9 Conclusion

L’invagination intestinale est définie par la pénétration d’un segment intestinal dans le segment sous-jacent, par un mécanisme de retournement en doigt de gant. L’ensemble formé par le cylindre externe (invaginant), le cylindre interne (invaginé) et le ou les cylindres intermédiaires est connu sous le nom de boudin d’invagination.
1 Anatomie

Dans la forme la plus simple (Fig 1) la zone d’invagination est constituée de 3 cylindres. Le boudin ainsi formé peut à son tour pénétrer dans le segment d’aval et constituer ainsi une invagination à 5, voire même 7 cylindres. Les invaginations intestinales les plus fréquentes chez l’enfant surviennent au niveau du carrefour iléo-caecal où l’on distingue des formes iléo-coliques (Fig 2) et iléo-caeco-coliques (Fig 3). Il existe aussi des invaginations iléo-iléales ou colo-coliques.

Figure 1 : Représentation schématique d'une invagination intestinale aiguë simple, à trois cylindres. Noter l'attraction et la compression du méso.

 

Figures 2 et 3 : A gauche, invagination iléo-colique : l'appendice et la valvule de Bauhin, en noir, sont restés en place, l'invagination est dite transvalvulaire. A droite, invagination iléo- caeco- colique : l'appendice est invaginé, la valvule de Bauhin est au sommet du boudin.
2 Physiopathologie

Dès que l’invagination est "amorcée", le péristaltisme fait progresser le boudin vers l’aval, entraînant également le méso. Cette progression est d’ailleurs limitée par la longueur du méso et les accolements anatomiques. Dès le début de l’invagination s’installe une stase veineuse et lymphatique liée à la compression au niveau du collet de l’invagination. Cette stase entraîne un oedème qui va majorer la compression, aboutissant à une interruption du flux artériel et à l’extrême à une nécrose de la paroi intestinale. C’est la compression des nerfs végétatifs et la traction sur le méso qui entraînent les phénomènes douloureux paroxystiques de l’invagination, et c’est la stase veineuse du segment invaginé qui est responsable de la présence de sang dans la lumière digestive.
3 Etiologie

Il y a deux types d’invagination intestinale aiguë : l’invagination dite primitive du nourrisson et les invaginations secondaires.

Le mécanisme étiologique des invaginations primitives du nourrisson n’est probablement pas unique, mais la cause la plus communément admise est une hypertrophie des plaques de Peyer de la région iléo-caecale, et en particulier de l’iléon terminal. Cette hypertrophie d’origine probablement virale est associée à des adénopathies mésentériques locales. Ceci entraînerait un hyperpéristaltisme local qui, en butant sur l’obstacle lié à l’hyperplasie lymphoïde, conduirait à amorcer une invagination. L’invagination primitive du nourrisson se développe toujours au niveau de la région du carrefour iléo-caecal, ce qui s’explique bien par la particulière richesse de cette région en tissu lymphoïde. Ce tissu lymphoïde est plus important chez le garçon que chez la fille, ce qui explique la prédominance masculine de l’invagination. Enfin, la quantité de tissu lymphoïde au niveau du carrefour iléo-caecal est maximale au cours des premiers mois de vie et diminue ensuite progressivement, c’est la raison pour laquelle l’invagination primitive touche le nourrisson.

Les invaginations secondaires peuvent se voir à tout âge de la vie, et en tout point du tube digestif. Leurs causes sont multiples : polypes, tumeurs, diverticule de Meckel, duplication, purpura rhumatoïde. Il existe également des invaginations post-opératoires.
4 Epidémiologie

La prévalance de l’invagination primitive du nourrisson est estimée à 2/1000. Le sexe ratio est d’environ trois garçons pour deux filles. L’âge de survenue va de 2 mois à 2 ans, avec un pic entre 6 et 9 mois. Les invaginations secondaires sont beaucoup plus rares.
5 Clinique

Dans la forme typique du nourrisson, la symptomatologie est dominée par la survenue de crises douloureuses paroxystiques à répétition. Ces douleurs se traduisent par des cris et des pleurs inhabituels, de survenue brutale. Elles sont souvent accompagnées d’une pâleur importante. Les crises durent quelques minutes et cèdent spontanément, avant de recommencer un peu plus tard de façon identique. Ces crises s’accompagnent souvent de vomissements alimentaires et d’un refus du biberon. Cette succession de crises est tout à fait caractéristique et suffit pour faire évoquer le diagnostic. Il y a fréquemment émission d’une selle normale au début des douleurs, puis le transit cesse ensuite complètement. Il est fréquent de retrouver du sang dans la couche dès ce stade, sous forme de quelques stries sanglantes, parfois une rectorragie franche, mais cette dernière est généralement plus tardive.

L’interrogatoire et l’examen physique doivent s’attacher à retrouver des antécédents infectieux récents ou des signes généraux d’accompagnement à type de fièvre ou d’adynamie.

Dans plus de la moitié des cas d’invagination intestinale aiguë du nourrisson, on peut palper le boudin d’invagination qui réalise une masse mobile, ferme, ovalaire, située dans le flanc ou l’hypochondre droit, parfois plus en aval sur le cadre colique. Le toucher rectal est nécessaire pour rechercher un signe très important : la présence de sang dans la lumière digestive. Il permet rarement de sentir la tête du boudin d’invagination. Ce dernier peut exceptionnellement s'extérioriser spontanément à l'anus.

Le tableau clinique est souvent incomplet, ce qui impose de penser systématiquement à l’invagination intestinale aiguë devant des crises douloureuses à répétition chez un nourrisson.
6 Examens complémentaires

Le diagnostic de certitude repose sur l’échographie. Entre des mains entraînées, cet examen est très fiable, permettant d’infirmer ou d’affirmer l’invagination lorsque le boudin est vu, sous la forme d’une image en cocarde ou en sandwich, avec un centre échogène et une zone périphérique hypoéchogène (fig 4).

 

Figure 4 : Echographie d'une invagination intestinale aiguë iléo-colique du nourrisson. A gauche, image typique en cocarde, avec un centre échogène et une zone périphérique hypoéchogène, correspondant à une coupe transversale du boudin. A droite, image en sandwich du boudin en coupe longitudinale.

La radiographie d’abdomen sans préparation (ASP) peut donner des arguments en faveur de l’invagination lorsqu’elle montre la disparition de la clarté gazeuse du caecum dans la fosse iliaque droite, quelques dilatations aériques ou hydroaériques du grêle terminal et surtout l’image directe du boudin sous la forme d’une opacité mieux visible lorsqu’elle est cerclée par de l’air dans le côlon d’aval (fig 5). L'ASP permet en outre de vérifier l'absence de pneumopéritoine.

Le lavement baryté permet d’affirmer l’invagination, mais il a surtout à l’heure actuelle un intérêt thérapeutique. (cf traitement).

Figure 5 : Radiographie d'abdomen sans préparation d'une invagination intestinale aiguë iléo-colique du nourrisson. Image directe du boudin sous la forme d’une opacité cerclée d’air.

7 Formes cliniques

Les aspects cliniques de l’invagination intestinale aiguë du nourrisson sont nombreux. Ils sont liés aux différentes combinaisons de symptômes qui peuvent être observées, certains signes pouvant dominer le tableau. C’est ainsi qu’il existe des formes adynamiques, pouvant donner l’impression d’une maladie neurologique débutante. Il y a des formes où l’hémorragie est importante, des formes fébriles, voire même avec diarrhée, qui peuvent en imposer pour une gastro-entérite. Il existe également des formes très bien tolérées sur le plan clinique, sans signe d’occlusion, avec un début remontant parfois à plusieurs jours.

Les formes secondaires sont de diagnostic plus difficile, sauf lorsqu’il y a un contexte clinique général évocateur comme un purpura rhumatoïde. Bien souvent, le diagnostic d’invagination secondaire est suspecté par l’échographie et confirmé par l’intervention chirurgicale qui identifie la cause précise.

8 Traitement

Il existe 2 méthodes. L’invagination peut être réduite non chirurgicalement, en exerçant une contre-pression dans l’intestin d’aval, au moyen d'un lavement opaque rétrograde effectué sous contrôle radiologique, ou elle peut être réduite manuellement au prix d’une intervention chirurgicale.
8.1 Le lavement thérapeutique

est le plus souvent réalisé à la baryte et sous contrôle scopique. Il est formellement contre-indiqué dans les circonstances suivantes : altération importante de l’état général avec signes de choc et/ou état occlusif installé, existence d’un pneumopéritoine sur la radiographie d’abdomen sans préparation, ou d’un épanchement liquidien intra-péritonéal abondant, confirmé par l’échographie, ou enfin existence de signes péritonéaux manifestes ou d’une hémorragie très abondante.

Le lavement est réalisé en présence du chirurgien, sous sédation, à l’aide d’une canule obturante pour éviter les fuites. La pression de départ est de 60 à 80 cm d’eau, elle pourra être augmentée jusqu’à 120 cm au maximum. Un premier cliché doit être réalisé dès que la colonne de baryte bute sur la tête du boudin d’invagination. En moulant ce dernier, elle réalise des images en pince de homard ou en cocarde (fig 6).

Figure 6 : Lavement baryté au cours d'une invagination intestinale aiguë iléo-colique du nourrisson. Image typique en pince de homard.

La baryte sous pression refoule alors progressivement le boudin en réduisant l’invagination. Cette progression est suivie sous scopie, elle est parfois lente. Il faut savoir faire plusieurs tentatives en laissant le côlon se vidanger complètement, avant de le remplir de nouveau en augmentant un peu la pression, mais sans jamais dépasser 120 cm d’eau. Il y a souvent un arrêt plus ou moins prolongé de la progression de la baryte au niveau de la valvule de Bauhin, puis l’inondation franche, massive et très rapide de l’iléon sur une grande longueur signe la désinvagination complète (fig 7). Ceci s’accompagne d’une sédation immédiate des douleurs, le soulagement instantané de l’enfant est un excellent critère clinique de désinvagination.

Figure 7 : Lavement baryté au cours d'une invagination intestinale aiguë iléo-colique du nourrisson. Innondation rétrograde massive du grêle, signant la désinvagination.

Il existe d’autres techniques radiologiques de désinvagination que le lavement baryté, mais elles sont moins fréquemment employées. Il s’agit essentiellement du lavement à l’air sous contrôle scopique, ou du lavement à l’eau sous contrôle échographique.

Quelle que soit la technique employée, si la désinvagination a été obtenue, l’enfant doit être gardé en hospitalisation au moins jusqu’au lendemain, de façon à s’assurer de la reprise d’un transit et d’une alimentation normale et de l’absence de douleurs. Les parents doivent être prévenus d’un risque de récidive pouvant aller jusqu’à 10% après réduction hydrostatique. Avec une technique radiologique rigoureuse et en respectant scrupuleusement les contre-indications, le lavement permet de réduire 90% des invaginations intestinales aiguës primitives du nourrisson. Il n’y a plus à l’heure actuelle d’indication à une vérification chirurgicale systématique.
8.2 Le traitement chirurgical :

les indications formelles sont d’une part les contre-indications du lavement thérapeutique, et d’autre part les rares échecs de la réduction hydrostatique. D’autres indications sont possibles, demandant une discussion au cas par cas : ce sont essentiellement les récidives multiples et l’âge de survenue après 2 ans. Dans ces 2 cas, l’échographie et l’opacification ne permettent pas toujours d’être certain de l’absence de cause organique.

Sur le plan technique, la voie d’abord est adaptée à la position du boudin d’invagination palpé sous anesthésie général. Il s’agit en général d’une courte laparotomie horizontale en fosse iliaque droite. La réduction se fait par expression manuelle du boudin à travers la paroi intestinale. Lorsque la réduction manuelle est impossible, ce qui est fréquent lorsqu’on opère une invagination non réduite par un lavement effectué dans d’excellentes conditions techniques, il faut pratiquer une résection économe suivie d’une anastomose termino-terminale immédiate. Lorsque la réduction manuelle est possible, il faut s’assurer de l’absence de nécrose intestinale et réaliser une appendicectomie de principe. Dans les suites, une hospitalisation de quelques jours permet de vérifier la reprise du transit et d’une alimentation normale. Le risque de récidive après intervention chirurgicale est inférieur à 5%.

9 Conclusion

L’invagination intestinale aiguë du nourrisson doit rester une affection bénigne, d'où l'importance d’un diagnostic précoce.
Appendicites de l'enfant
P. Delmas

Service de chirurgie pédiatrique, CHU Côte de Nacre
14000 Caen
mis à jour le 8 mars 1999

1 Forme typique de l'enfant de plus de 4 ans
1.1 Clinique
1.2 Examens complémentaires
1.3 Diagnostic différentiel
2 Appendicite de l'enfant de moins de 3 ans
   

3 Formes anatomiques de l'appendicite
4 Traitement
5 Complications
5.1 Complications infectieuses
5.2 Complications occlusives
Les appendicites de l'enfant restent un problème de tous les jours pour les médecins et les chirurgiens. Rares au cours de la première année de la vie, elles peuvent se voir chez l'enfant de moins de 3 ans prenant souvent un aspect trompeur et soulevant de nombreux diagnostics différentiels. Le diagnostice doit être précoce pour éviter l'évolution vers la péritonite.
1 Forme typique de l'enfant de plus de 4 ans
1.1 Clinique
Elle se caractérise par :
- trois signes fonctionnels :

    * la douleur de la fosse iliaque droite,
    * les vomissements ou
    * un simple état nauséeux ;

      L'arrêt des matières et des gaz n'a pas de valeur sérieuse à la période précoce,

- par deux signes généraux :

    * la fièvre à 38° - 38°5
    * l'accélération du pouls.

- par deux signes physiques :

    * la douleur provoquée iliaque droite au point de Mac Burney,
    * la défense de la paroi abdominale à la palpation de la fosse iliaque droite, parfois remplacée par une contracture localisée faisant redouter une réaction péritonéale.

1.2 Examens complémentaires
1.2.1 La radiographie d'abdomen sans préparation peut montrer l'existence d'un coprolithe appendiculaire, un iléus réflexe sur la dernière anse grêle, un défaut de pneumatisation du caecum, un épanchement péritonéal.

1.2.2 La numération formule sanguine montre souvent une hyperleucocytose à polynucléaires égale ou supérieure à 10 000 ; parfois une leucopénie.

1.2.3 Les transaminases sont normales.

1.2.4 Pas d'infection urinaire.

Dans l'appendicite retro-coecale, la douleur est plus postérieure, au-dessus de la crête iliaque droite, voire lombaire droite, il existe un psoitis. L'appendicite pelvienne donne des signes atypiques : douleur sus-pubienne, signes d'irritation vésicale ou rectale.
Un tel tableau clinique impose une intervention chirurgicale.

1.3 Diagnostic différentiel se pose avec :

1.3.1 Une adénite mésentérique : on retrouve des antécédents de maladies respiratoires ou digestives, la douleur est mal localisée, la fièvre est élevée. Le diagnostic reste souvent porté à l'intervention.

1.3.2 Les infections des voies urinaires : toute douleur abdominale non étiquetée doit entraîner un examen cyto-bactériologique des urines, voire une urographie intra-veineuse.

1.3.3 Une pneumonie droite peut entraîner une défense abdominale, l'examen radiologique pulmonaire montrera une opacité franche lobaire qui évitera une intervention.

1.3.4 Un diverticule de Meckel peut stimuler une appendicite, sa recherche systématique per-opératoire s'impose.

1.3.5 Chez la fillette en période pré-pubertaire, il faut penser à une origine ovarienne des douleurs abdominales.

1.3.6 L'hépatite virale : le dosage des transaminases est utile dans certains syndromes douloureux de l'enfant.

1.3.7 Enfin, certaines maladies peuvent entraîner des douleurs abdominales : purpura rhumatoïde, gastro-entérites, tumeurs abdominales, épilepsie abdominale.
2 L'appendicite de l'enfant de moins de 3 ans
Elle est fréquente et grave, se caractérisant par un diagnostic tardif, l'enfant étant vu par le chirurgien au stade d'abcès ou de péritonite. Le début est trompeur ayant fait évoquer une gastro-entérite, une affection O.R.L. ou respiratoire avec, parfois, prescription d'antibiotiques. La fièvre est toujours présente, élevée à 39°, les vomissements sont abondants, la diarrhée est quasiconstante, l'enfant est fatigué, geignard, il a un faciès altéré d'infecté. L'abdomen est météorisé, il existe une défense localisée, voire même une contracture. L'examen sous anesthésie générale retrouve souvent un plastron appendiculaire. L'examen radiologique de cette occlusion fébrile montre souvent la coprolithe appendiculaire.
3 Formes anatomiques de l'appendicite
L'infection peut rester localisée à la lumière appendiculaire (appendicite aiguë) ; l'abcès appendicualaire est une péritonite localisée. Les péritonites par perforation appendiculaire peuvent être généralisées à toute la cavité péritonéale sans cloisonnement ou à foyers multiples, faites de collections suppurées cloisonnées dans la cavité péritonéale (méso-caelique, cul de sac de Douglas, sous-phrénique droit ou gauche,...).
4 Traitement
Le traitement est l'appendicectomie conduite par incision de Mac Burney dans la fosse iliaque droite. La difficulté opératoire n'est pas toujours parallèle à la gravité mais plutôt due aux positions anatomiques. La toilette péritonéale en cas d'abcès ou de péritonite peut nécessiter une laparotomie médiane, suivie de drainage. La précocité de l'intervention évite la perforation et la péritonite. La mortalité est devenue rare du fait des progrès de la réanimation.
5 Complications des appendicites et des appendicectomies
5.1 Les complications infectieuses sont les plus fréquentes :

5.1.1 Les péritonites localisées correspondent à un foyer infecté dans une partie de la cavité abdominale (abcès sous-phrénique, abcès de Douglas,...).

5.1.2 Le lâchage du moignon appendiculaire se manifeste vers le 5ème jour par une douleur brutale de la fosse iliaque droite, avec fièvre, défense localisée ; une réintervention d'urgence s'impose.

5.1.3 Le syndrome du 5ème jour : complication d'une appendicectomie sur appendice sain, se traduit le 5ème jour par une douleur brutale de la fosse iliaque droite, avec fièvre à 39°, défense localisée, iléus de carrefour. La réintervention chirurgicale d'urgence s'impose pour effectuer une toilette péritonéale et un drainage.

5.1.4 Les péritonites généralisées à foyers multiples, graves, correspondent à une appendicite insuffisamment drainée ou à un syndrome du 5ème jour négligé. Elles associent un syndrome infectieux sévère, un syndrome occlusif et péritonéal. Elles sont exposées à des complications septicémiques avec collapsus, défaillance cardiaque et rénale. Elles nécessitent un traitement chirurgical par laparotomie médiane sous couvert d'une réanimation intensive.

5.2 Les complications occlusives relativement fréquentes :

5.2.1 soit précoce : avec agglutination d'anses

5.2.2 soit tardive : après le premier mois, par occlusion sur bride.

L'appendicite est une affection fréquente de l'enfant, pouvant se manifester par un tableau trompeur, notamment avant trois ans. L'appendicectomie requiert une technique rigoureuse, avec toilette péritonéale et drainage de tous les foyers infectieux en cas de péritonite.

L'appendicectomie est une intervention fréquente et est habituellement considérée comme bénigne. En fait, si les complications postopératoires sont relativement rares, elles peuvent prendre des proportions inquiétantes au point de mettre, dans certains cas, le pronostic vital en jeu.
Luxation congénitale de la hanche
H. Bracq

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes,
2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
mis à jour le 9 avril 1999

1 Généralités
2 Examen clinique
2.1 Interrogatoire
2.2 Mobilité spontanée de l'enfant
2.3 Position foetale
   

2.4 Mobilité des hanches
2.5 Instabilité
3 Echographie
4 Radiographie
5 Traitement
1 Généralités
La luxation congénitale de la hanche est une pathologie relativement fréquente, elle est variable en fonction des régions et des pays. Les chiffres donnés varient entre 6 à 20 %°° naissances.

La luxation de hanche n'est pas une malformation : dans la très grande majorité des cas, elle est secondaire à des anomalies de positionnement de l'enfant en intra-utérin qui vont entraîner des excès de pression sur le fémur fléchi luxant la hanche en arrière du cotyle. C'est donc une pathologie acquise en fin de grossesse, (par exemple dans les présentations par le siège la fréquence d'une luxation est de 1/4). Il existe des familles où la luxation est fréquente.
2 Examen clinique
L'examen clinique représente la meilleure méthode de dépistage que ce soit en période néonatale ou dans les premiers mois de la vie.
2.1 L'interrogatoire recherche des signes de risques.
- en faveur d'éléments mécaniques : gros poids de l'enfant, grossesse gémellaire, présentation par le siège, anomalies posturales (pieds, torticolis), primiparité.
- en faveur d'éléments génétiques : antécédents chez les parents de problèmes de hanches, fille.
2.2 Puis on examine l'enfant en regardant sa mobilité spontanée.
Tout mouvement ou toute posture asymétrique doit être un point de départ pour une recherche attentive d'une pathologie de hanche, mais aussi asymétrie apparente de longueur des membres inférieurs, ou des plis sur la cuisse.
2.3 On essaye de reconstituer la position foetale.
La posture la plus luxante associe une hyperflexion de hanche à une rotation externe du fémur ou une hyperextension des genoux avec pieds sur les épaules (ex. position de siège décomplété).
2.4 Puis on mesure la mobilité des hanches.
- abduction des cuisses en décubitus dorsal. Facile dans les premiers degrés, à partir de 45°, il y a une petite résistance par élongation musculaire, mais on obtient facilement une abduction d'environ 80°. Lorsque l'abduction est trop limitée ou asymétrique, la hanche risque d'être pathologique.
- adduction de la hanche en décubitus ventral. La hanche limitée dans l'adduction par tension des fessiers est anatomiquement normale, mais la hanche opposée risque d'être pathologique par rétraction en miroir des adducteurs: c'est ce qu'on appelle le bassin asymétrique (ou oblique) congénital.
2.5 L'instabilité est le signe pathognomonique d'une hanche pathologique.
L'enfant doit être détendu, avec un bon relâchement musculaire, en lui donnant par exemple à boire. Une hanche normale est toujours stable.

- La méthode de LE DAMANY recherche un ressaut. L'enfant est à plat dos, les hanches fléchies et rapprochées. L'examinateur met ses mains sur les genoux de l'enfant, pouce sur la face interne des cuisses, autres doigts sur la région trochantérienne.
Dans un premier temps on pousse d'avant en arrière, vers la table, pour essayer de luxer la hanche en arrière : si la tête fémorale est dans le cotyle mais est instable par distension capsulaire et défaut du rebord fibro-cartilagineux (labrum) on ressent un ressaut de sortie.
Puis dans un deuxième temps, on met les membres inférieurs en abduction, hanches fléchies à 90°, avec pression d'arrière en avant sur la région trochantérienne : s'il y a ressaut, dit de rentrée, la tête fémorale réintègre le cotyle.

Le schéma suivant résume les possibilités :
 
Ressaut 1er temps
   
Ressaut 2ème temps
     
+
   
+
    Hanche instable simple
-
   
+
    Hanche luxée réductible
-
   
-
    Hanche normale (stable)
ou luxée irréductible
 
- La méthode de BARLOW recherche un piston qui existe toujours en cas de luxation. L'enfant est sur le dos et on examine une hanche puis l'autre. D'une main on tient l'extrémité proximale de la cuisse, de l'autre on tient le bassin entre pubis et ischion. On recherche par des mouvements de translation d'une main par rapport à l'autre, une instabilité entre les composants anatomiques qui se traduit par une sensation de piston, avec parfois ressaut.

Tout défaut de l'examen clinique doit faire demander un bilan d'imagerie.
3 Echographie
Elle permet d'avoir de bons renseignements sur l'état anatomique de la hanche. Il y a de nombreuses techniques, celle qui est de très loin la plus utilisée est la technique de Graf.

Les repères indispensables sont les suivants :
- ligne d'écho verticale correspondant à l'aile iliaque,
- interface muscles fessiers et capsule,
- métaphyse fémorale supérieure,
- fond du cotyle (écho pubien),
- position et forme du labrum.

La tête cartilagineuse est vide d'écho dans les 4 premiers mois de la vie, mais sa couverture doit au moins être de 50%.

Cet examen, statique mais aussi dynamique, est performant mais dépend de l'expérience du médecin qui le pratique.
4 Radiographie
La radiographie ne commence à avoir de l'intérêt que plus tard à partir du 3ème - 4ème mois de la vie. En effet, c'est à ce moment là qu'apparaissent les noyaux d'ossification fémoraux supérieurs.
Avant d'analyser la radio, il faut exiger des critères de normalité : symétrie des ailes iliaques, l'axe qui passe par le milieu du rachis sur le sacrum doit passer au milieu du pubis, enfin avoir une bonne superposition du noyau pubien et du noyau ischiatique au niveau du cotyle. Lorsque le cliché est de bonne qualité, on peut alors tracer une ligne horizontale qui passe par la partie basse de l'os iliaque au niveau du cartilage en Y, les têtes fémorales doivent être en dessous de cette ligne. On peut aussi, à partir de 3 - 4 mois, sans trop de difficulté retrouver le point externe du toit du cotyle, ce qui permet de faire un certain nombre de mesures pour savoir si cette hanche est normale ou non (oblicuité du toit du cotyle, absence de rupture du cintre cervico-obturateur).
5 Traitement
Plus tôt le diagnostic est posé, plus facile est le traitement qui permet dans la grande majorité des cas, une guérison parfaite de la hanche. Les principes en sont relativement simples, mais tout est cas d'espèce et on peut dire qu'il n'y a pas de protocole thérapeutique univoque.

- une hanche instable simple, est traitée en position de centrage de la hanche c'est-à-dire en abduction (coussins, langes amidonnés, etc...), et vérification par échographie du centrage. Deux mois d'abduction suffisent en général.

- une hanche luxée réductible, est réduite et maintenue en place par un harnais (type Pavlick) qui permet de laisser l'enfant dans la famille, c'est donc une méthode ambulatoire utilisable seulement dans les 3 premiers mois de la vie. Un point majeur doit être expliqué aux parents, toute douleur lors du traitement (c'est-à-dire lorsque l'enfant pleure, lorsqu'il dort mal) doit faire arrêter immédiatement le traitement. En effet, le risque de ce traitement est la nécrose de la tête fémorale (5 à 10% des cas). Ce traitement doit être confié à un orthopédiste.

- une hanche luxée irréductible ou luxée réductible vue après 3 mois est du ressort de l'orthopédiste pédiatre (nécéssité d'une hospitalisation pour traction, arthrographie, plâtre, appareillage, voire chirurgie).

Quelle que soit l'évolution il faudra évaluer à distance (au minimum à l'âge de 18 mois, l'âge idéal est 6 ans) l'état clinique et anatomique de toute hanche traitée.

Ne pas retenir trois idées fausses :
- le ressaut n'est retrouvé que dans les 48 premières heures de la vie,
- la radiographie en période néonatale permet le dépistage des luxations de hanche,
- il faut traiter tous les enfants.

Par contre :
- répéter les examens cliniques,
- intérêt de l'échographie à la fin du premier mois,
- et de la radiographie au 4ème mois dans les cas limites.
Le pied de l'enfant
H. Bracq

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes,
2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
mis à jour le 9 avril 1999

1 Rappel de définitions
2 Les pieds à la naissance
2.1 Les malpositions
2.2 Les malformations
   

3 Les pieds au moment de la marche
3.1 Le pied plat
3.2 Le pied creux
1 Rappel de définitions
Tout d'abord dans un plan frontal, on parle de valgus lorsque l'arrière pied s'écrase vers le dehors. A l'inverse, on parle de varus de l'arrière pied lorsque cet arrière pied se trouve dévié vers le dedans. Dans le même plan frontal, on parle de pronation et de supination de l'avant pied. La pronation correspond au valgus de l'arrière pied, la supination correspond au varus.

Dans le plan sagittal, on parle de flexion dorsale ou de talus ; ou au contraire de flexion plantaire ou d'équin en pathologie.

Enfin, dans le plan horizontal, on parle d'abduction lorsque l'avant du pied est dévié vers le dehors, on parlera aussi de rotation externe. A l'inverse, on parle d'adduction ou de rotation interne.
2 Les pieds à la naissance
Ce qui différencie les malpositions des malformations est la réductibilité des déformations.
2.1 Les malpositions
Elles sont très fréquentes, surtout représentées par le pied talus direct ou associé à un valgus et le métatarsus adductus.
Elles guérissent en quelques semaines et ne laissent, à priori, pas de séquelles.
2.2 Les malformations
2.2.1 Le pied bot varus équin
C'est une malformation qui touche un enfant sur 500. Le pied est déformé dans les trois plans de l'espace ; il y a un équin, un varus de l'arrière pied, une adduction de l'avant pied et une supination de l'avant pied. Il faut insister sur la notion d'irréductibilité. Il y a des pieds plus ou moins raides, mais on ne peut pas avec les doigts, les remettre en position normale. Le pied bot varus équin est malformatif, cela veut dire qu'il y a une cause que l'on doit toujours rechercher, souvent neurologique.

Les parents doivent être parfaitement bien informés que le pied ne sera jamais strictement normal car le traitement est difficile, extrêmement prolongé, fonction de la clinique et des rapports radiographiques des os du pied.
On doit rechercher à redonner une morphologie et une fonction les plus normales possible.

Les moyens que l'on a à notre disposition sont, dès les premiers jours après la naissance, l'installation d'attelles ou de plâtres associée à une rééducation quotidienne jusqu'à l'âge de la marche. La chirurgie est indiquée presqu'une fois sur deux, en général elle se fait vers l'âge de 9 - 11 mois. Enfin, il faudra surveiller ces enfants jusqu'à la fin de la croissance car le danger est d'avoir des déformations résiduelles qui peuvent entraîner des douleurs vers l'âge de 12 - 14 ans.
2.2.2 Le pied convexe congénital
Rare, il associe abduction et pronation du pied. Radiographiquement, il associe un équin postérieur à une luxation dorsale du scaphoïde tarsien.
3 Les pieds au moment de la marche
3.1 Le pied plat
Un problème qu'il faut dédramatiser.
Le pied plat est très souvent partie constituante d'un tableau clinique particulier. Ainsi, on retrouve dans 60 % des cas un genu valgum, dans 12 % un excès pondéral, dans 10 % des anomalies de la coordination motrice, enfin, dans 8 % notion familiale de pied plat.

Le pied plat associe un valgus de l'arrière pied en charge, une saillie interne du talus (astragale), une diminution ou une absence de la voûte plantaire, enfin un bord interne du pied souvent convexe. Lorsque l'enfant est en décubitus, le pied apparaît normal ; c'est ce que l'on appelle le pied plat valgus statique.

Dans 10 % des cas, on va trouver une cause : que ce soit une anomalie locale comme par exemple un triceps trop court ou une synostose. Il faudra rechercher aussi une cause générale : maladie neuromusculaire, hyperlaxité, etc...
Ces pieds plats peuvent devenir douloureux à l'adolescence.

Se pose la question du traitement : faut-il ou non prescrire des semelles orthopédiques ? Il n'y a aucune indication à des semelles orthopédiques pour les pieds statiques de l'enfant jusqu'à l'âge de 10 - 12 ans, cela a été parfaitement analysé dans des études prospectives randomisées. Par contre insister sur l'activité physique (danse, sauts, ...). La chirurgie est exceptionnelle.
3.2 Le pied creux
Est un piège parce que derrière l'anomalie orthopédique, se cache presque toujours une maladie neurologique. Il est rencontré essentiellement chez le grand enfant ou l'adolescent.

C'est l'inverse du pied plat : varus de l'arrière pied, voûte plantaire trop creuse ; avec une rétraction de l'aponévrose plantaire, coup de pied fort, trop épais, des orteils qui vont progressivement se mettre en griffe. Donc, toujours faire un examen neurologique recherchant une maladie de Charot-Marie, une maladie de Friedreich, etc...

Le traitement du pied creux est assez orthopédique, les semelles améliorent le confort. Avec un appui rétro-capital, on peut parfaitement diminuer l'importance des griffes des orteils. Quant à la chirurgie, elle peut se faire sur les tendons, sur les aponévroses rétractées ou sur les os, mais cette chirurgie doit toujours être discutée en fonction du tableau neurologique.
Troubles de la marche
H. Bracq

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes,
2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
mis à jour le 9 avril 1999

1 Dans le plan frontal
1.1 Le genu valgum
1.2 Le genu varum
2 Dans le plan sagittal
   

3 Dans le plan horizontal
3.1 Torsion tibiale interne
3.2 Torsion tibiale externe
3.3 Hyperantéversion fémorale
Il faut analyser les membres inférieurs dans les trois plans de l'espace.

Dans un plan frontal, on analyse essentiellement en pratique, le genu valgum (éxagération de l'angle fémoro-tibial) et le genu varum (fermeture de l'angle fémoro-tibial).

Dans un plan sagittal, il faut rechercher une excessive hyperextension d'une articulation (récurvatum) ou au contraire une limitation de l'extension (flexum).

Enfin, dans un plan horizontal, il faut aussi analyser les fréquentes anomalies de rotation fémorale et/ou tibiale.
1 Dans le plan frontal
1.1 Le genu valgum
Donne une démarche disgracieuse, l'enfant tombe et se cogne les genoux. Les membres inférieurs sont en "X". Une fille sur deux à l'âge de 4 ans a un genu valgum notable.
Il doit être analysé l'enfant étant debout, les deux genoux se touchent tout juste : les deux chevilles sont écartées, ce qui permet, à l'aide d'un centimètre, de mesurer l'espace inter malléolaire interne, la mesure peut être aussi faite en décubitus.
Un genu valgum habituel est symétrique ; par contre, un genu valgum asymétrique doit faire demander un bilan radiographique permettant de retrouver des séquelles d'un traumatisme passé inaperçu ou d'une fracture de jambe des années auparavant ; parfois un trouble de croissance, une tumeur, etc...

L'évolution naturelle d'un genu valgum de l'enfant, c'est-à-dire sans aucun traitement, est d'apparaître vers l'âge de 2 ans 1/2 - 3 ans, d'aller en augmentant vers l'âge de 4-5 ans puis ensuite de disparaître dans 95 % des cas.

Par contre, dans un faible nombre de cas, le genu valgum persiste et il faudra le traiter chirurgicalement vers l'âge de 10-12 ans lorsque l'écart inter malléolaire interne est égal ou supérieur à 8-10 cm. On fait une épiphysiodèse temporaire à l'aide d'une agrafe métallique. Il faut enlever les agrafes 4 à 8 mois plus tard. A priori, un genu valgum lorsqu'il est peu important ne donne pas de problème de type arthrosique.
1.2 Le genu varum
Genoux très écartés alors que les chevilles se touchent, membres inférieurs en "O". Le genu varum se mesure (en cm) entre la face interne des deux genoux au niveau du condyle interne. C'est une déformation essentiellement remarquée au moment de l'acquisition de la marche, assez souvent secondaire à une insuffisance de traitement par vitamine D. L'aspect en est souvent majoré par des troubles rotationnels dans le plan horizontal (cf paragraphes suivants).

Il ne faut pas hésiter à demander un bilan radiologique à la recherche d'une dystrophie osseuse, etc...

Le genu varum favorise l'arthrose. Il faut donc savoir proposer assez facilement des gestes chirurgicaux chez ces adolescents (épiphysiodèse externe, ostéotomie tibiale supérieure).
2 Dans le plan sagittal
De profil, deux anomalies surtout sont à rechercher :
- un flessum. Un flessum du genou est souvent associé à d'autres troubles : gonalgie, instabilité de rotule, équin du pied. Il faut analyser les amplitudes des mouvements de hanches, de genoux et de chevilles dans le plan sagittal (recherche d'un défaut d'extension de hanche, d'une limitation de flexion de la cheville).
- un équin : ce sont des enfants qui marchent sur la pointe des pieds vers l'âge de 2-3 ans, qui n'arrivent pas à fléchir correctement la cheville et qui usent leurs chaussures de façon asymétrique. S'il n'y a pas de rétraction du tendon d'Achille en général tout disparait, au contraire, si le tendon est trop court il y a risque de développer un pied plat valgus.
- le recurvatum est fréquent chez l'enfant de 3 - 5 ans par hyperlaxité articulaire : on retrouve souvent hyperlordose et pieds plats.

Les anomalies sagittales sont souvent secondaires à des affections neurologiques parfois méconnues, il faut taper les réflexes, regarder s'il y a ou non un signe de Babinski, apprécier une éventuelle spasticité, etc... C'est une cause très courante d'anomalie de la démarche.
3 Dans le plan horizontal
Trois tableaux sont fréquents et doivent être parfaitement connus :
3.1 La torsion tibiale interne
C'est un tableau qui touche essentiellement l'enfant au début de la marche. Il est amené par ses parents parcequ'il tombe.
Il faut le regarder marcher en observant les genoux : si ceux-ci sont bien dans l'axe de la marche et que les pieds tournent en dedans (adduction) il s'agit d'une endo-rotation du tibia. Il faut connaître les habitudes posturales de l'enfant lorsqu'il dort ou joue : presque toujours à plat ventre, les pieds en dedans, ou assis à genoux les pieds sous les fesses. Bien entendu, la morphologie du pied est normale. L'évolution de ce tableau de torsion tibiale interne isolée est en général tout à fait favorable. Tous les nourrissons ont une torsion tibiale interne. Dans 98 % des cas, tout se corrige spontanément dans les 2 à 4 premières années après l'acquisition de la marche. Aucune indication aux semelles orthopédiques ou aux chaussures spéciales.
3.2 La torsion tibiale externe (marche en canard)
Ce sont des enfants amenés en consultation non pas pour l'anomalie de torsion mais parcequ'ils usent les chaussures. Cette usure se faisant essentiellement sur le bord antérieur et interne du pied. Cette torsion tibiale externe s'accompagne très souvent d'un pseudo pied plat parce que, lorsque l'on corrige la torsion, la cheville se replace tout à fait normalement et la voûte plantaire réapparaît. Il faut donc bien dire aux parents que ces anomalies morphologiques vont persister. D'ailleurs, très souvent c'est un morphotype familial. Il n'y a aucun geste chirurgical à proposer sauf lorsqu'il y a une gêne fonctionnelle sévère.
3.3 L'hyperantéversion fémorale
C'est un tableau extrêmement fréquent. Il faut se rappeler que le fémur est tordu sur lui-même dans un plan horizontal entre le plan du col fémoral et celui des condyles fémoraux .

Chez l'enfant qui commence à marcher cet angle est de 40° environ, chez l'adulte il est de l'ordre de 15°, il va donc y avoir une dérotation fémorale pendant les 8 à 9 premières années de la vie.

Le tableau clinique est tout à fait caractéristique : si on regarde rapidement, on fait le diagnostic de genu varum mais en réalité les genoux ne sont pas de face et regardent en dedans. Lorsqu'on remet les genoux en face, on s'aperçoit qu'il n'y a plus de genu varum, par contre l'enfant est obligé de faire un effort de rotation externe de la hanche. Il faut reposer les questions sur les habitudes posturales de l'enfant lorsqu'il dort ou joue. La station assise préférentielle est en rotation interne de hanche avec genoux fléchis et les pieds a coté des fesses, c'est ce que l'on appelle la station assise en "W" ou que les anglo-saxons ont appelé "la position de télévision". Le problème de l'hyperantéversion fémorale est qu'elle donne des troubles fonctionnels avec des chutes lors de la course et également une usure asymétrique des chaussures, c'est le bord antérieur et externe qui est usé.

L'appréciation de l'antéversion du col du fémur se fait par un examen clinique simple : il suffit de mettre l'enfant à plat ventre sur la table d'examen en lui demandant de fléchir les genoux à 90°. La hanche est alors en extension et l'on apprécie les secteurs de rotation : la rotation interne de hanche est toujours majeure, aux environs de 80°; la rotation externe est limitée en général aux environs de 20 à 30°.

Il est important de pouvoir régulièrement surveiller ces enfants pour savoir s'il y a ou non une amélioration dans le temps. Cette dérotation se passe dans le 8 premières années de la vie.

Il n'y a donc pas de gestes chirurgicaux ou thérapeutiques à proposer dans ces premières années de la vie. Le seul conseil qu'on puisse donner, c'est d'empêcher l'enfant de s'asseoir en rotation interne , lui proposer la station assise en tailleur. Au delà de 8 ans, si les troubles fonctionnels persistent on peut demander un bilan par scanner (plan horizontal) avant de proposer une éventuelle chirurgie (si angle > 50°) avant qu'il y ait compensation naturelle en hyper-rotation tibiale externe.

En effet l'évolution se fait vers une amélioration de la rotation du pied lors de la marche (angle du pas qui d'interne devient normal) par rotation exagérée externe du tibia : en station debout les pieds sont parallèles, les genoux en dedans : le risque de cette déformation se situe au niveau du genou (sub-luxation rotulienne, conflit fémoro-patellaire, arthrose à distance).
Ostéochondrite primitive de la hanche
H. Bracq

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes,
2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
mis à jour le 9 avril 1999

1 Clinique
2 Radiologie
2.1 Radiographie face/profil
   

2.2 Phases évolutives
3 Traitement
Conclusion
Il s'agit d'une ostéonécrose idiopathique du noyau osseux épiphysaire fémoral supérieur, tandis que les cellules cartilagineuses périphériques restent vivantes permettant une reconstruction de la tête sur une période d'environ deux ans. Cette affection s'appelle aussi la maladie de Legg-Perthes-Calvé, ou coxa plana.

Cette pathologie touche essentiellement les garçons avec un âge de prédilection entre 4 et 8 ans. La clinique en est très stéréotypée.
1 Clinique
Ce sont des enfants qui présentent une boiterie douloureuse, dont l'intensité est variable et qui va disparaître spontanément en quelques jours puis, réapparaître 8-15 jours plus tard, sinon plus. C'est donc une boiterie à répétition. La douleur se situe soit au niveau de la face antérieure de la hanche, soit plus souvent et c'est un piège, se projette au niveau du genou.

Il y a une limitation de la mobilité de la hanche, essentiellement dans les secteurs de rotation.

C'est une boiterie douloureuse sans fièvre, sans altération de l'état général. Le bilan biologique est normal.

Elle est presque toujours unilatérale, mais l'atteinte bilatérale peut se voir dans 10 % des cas avec quelques mois d'intervalle entre l'atteinte du premier côté et l'atteinte du deuxième côté.
2 Radiologie
2.1 La radiographie
La radio de face et de profil des hanches est au début de la maladie parfois normale. Les troubles cliniques sont toujours en avance sur les signes radiographiques.
Si les parties molles sont épaissies, on suspecte un épanchement intra-articulaire qui sera confirmé par une échographie. La présence de liquide affirme une synovite aiguë transitoire (ou " rhume de hanche ") qui guérit sans séquelle avec repos, aspirine et parfois ponction si la douleur reste importante.
Si un enfant vient consulter pour une boiterie douloureuse avec une petite limitation à l'examen clinique et que la radiographie demandée est normale, il faut se méfier et redemander systématiquement une radio 2 ou 3 mois plus tard.
2.2 Phases évolutives
La nécrose va évoluer en plusieurs phases radiographiques touchant plus ou moins totalement l'épiphyse :

- phase de densification de la tête fémorale (durée 6 à 8 mois). Il faut analyser la taille de l'épiphyse par rapport à l'autre coté : elle est plus petite et plus dense. Les cellules cartilagineuses périphériques continuant de fonctionner et de fabriquer du matériel cartilagineux entrainent un pseudo élargissement de l'interligne articulaire.
Il faut toujours demander un profil de hanche, c'est sur le profil que l'on voit mieux les premiers signes radiographiques. L'un des signes le plus classique étant une image linéaire sous-chondrale, image "en coquille d'oeuf". Si on a des doutes diagnostiques ou si la radio n'est pas trop facile à interpréter, on peut demander une scintigraphie au Technétium marqué en précisant bien que l'on veut voir la vascularisation de l'éphiphyse : le diagnostic est affirmé sur un trou de fixation.

- phase de fragmentation de l'épiphyse. L' épiphyse va se morceler de façon plus ou moins importante traduisant la revascularisation de l'épiphyse. Certaines images traduisent un risque évolutif (écrasement du mur externe, géodes métaphysaires, excentration épiphysaire). C'est à ce stade que la tête fémorale est la plus fragile. Elle risque de s'écraser, de devenir plate. C'est donc à ce stade qu'il faut être prudent sur le plan thérapeutique.
Arthrographie, scanner ou IRM peuvent être nécessaires pour analyser au mieux la morphologie céphalique avant une éventuelle chirurgie.

- phase de reconstruction. La tête va se reformer, plus ou moins arrondie, en fonction des thérapeutiques qui auront été proposées.

Ces trois stades : densification, fragmentation et reconstruction s'étalent sur un temps moyen de 2 à 4 ans. L'enfant devra donc être surveillé de façon extrêmement précise pendant cette période.
3 Le traitement
Le traitement de l'ostéochondrite primitive de hanche est très complexe et tient compte de l'âge de l'enfant et de l'importance en volume de la nécrose.

- 1er cas de figure : enfant de 4-5 ans, qui ne pèse pas bien lourd et dont l'atteinte épiphysaire est modérée en volume (mur externe normal). Il faut le laisser au repos strict, donc au lit, tant qu'il a mal. Cela dure en général 15 jours à un mois. Lorsque la douleur a disparu, on peut le laisser marcher soit spontanément, c'est-à-dire qu'on lui donne complète liberté, soit on le laisse assis en fauteuil roulant si l'enfant est très dynamique jusqu'à la phase radiographique de reconstruction. Il faut faire une surveillance clinique et radiographique tous les trois mois. En général, pour ce type de tableau il y a guérison sans séquelle et sans encombre.

- 2ème cas de figure : enfant de 6 ans, en général assez enraidi sur le plan clinique. Il faudra donc le mettre en traction, au lit. Cette traction doit se faire tant que la hanche reste raide et douloureuse, ce qui demande en général 1 à 3 mois. Lorsque la hanche est redevenue indolore et bien mobile tout dépend de l'aspect radiographique : si l'atteinte de l'épiphyse est modérée, on remet l'enfant debout avec des attelles. Par contre, si l'atteinte épiphysaire est importante, il y aura besoin d'un geste chirurgical qui se fait au moment de la période de fragmentation (soit ostéotomie fémorale supérieure de varisation, soit ostéotomie du bassin - intervention de Salter).

- 3ème cas de figure : enfant déjà âgé, 8 ans et au-delà. Le traitement sera toujours chirurgical car la période de fin de croissance est proche et le remodelage de l'épiphyse sera obligatoirement insuffisant.

Le pronostic est donc totalement corrélé avec l'âge :
- pronostic sévère chez les enfants qui ont plus de 8 ans,
- très bon pronostic pour enfants qui ont de 4 à 5 ans.

Le devenir à long terme est fonction de la morphologie de l'épiphyse. Si l'épiphyse n'est pas sphérique, il y aura obligatoirement arthrose.

En conclusion :
C'est une pathologie qui est très angoissante pour les parents, car elle touche des enfants qui sont en pleine activité physique, qui suivent une scolarité et qu'il faut empêcher de marcher ou de courir. Ces enfants ont très souvent des problèmes psychologiques avec la famille car ils sont en conflit "d'interdiction permanente" d'activités physiques.
Epiphysiolyse fémorale supérieure
H. Bracq

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes,
2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
mis à jour le 9 avril 1999

1 Clinique
1.1 Forme aiguë
1.2 Forme chronique
2 Radiographie
   

3 Traitement
4 Evolution
4.1 Complications précoces
4.2 Complication tardives
1 Clinique
Glissement de la tête fémorale par rapport au col, c'est une pathologie de fin de croissance, vers l'âge de 11-15 ans. Il existe des facteurs mécaniques : enfants trop lourds, trop grands ou ayant des problèmes hormonaux (l'exemple typique est un garçon qui a un retard pubertaire, adiposogénital).

Le tableau peut se présenter de deux façons :
1.1 Une forme aiguë
L'enfant tombe et a un tableau de fracture du col du fémur. Il a mal, ne peut pas se relever, il est en rotation externe de membre inférieur. La radio qui est obligatoirement faite devant un tableau aussi inquiétant va montrer un déplacement du col par rapport à l'épiphyse. C'est très caractéristique, parce que se sont souvent des déplacements importants et le diagnostic ne fait aucune difficulté. Malheureusement, cette forme aiguë ne se trouve que dans à peine 20 % des cas.
1.2 La forme chronique
Ce sont des adolescents en période pubertaire qui boitent. C'est une boiterie douloureuse avec douleur au niveau de la hanche mais attention à la douleur projetée au genou. A l'examen, limitation de la rotation interne de la hanche et, dans les formes qui sont chroniques et qui évoluent sur plusieurs mois, il y a en plus une inégalité de longueur des membres inférieurs et une amyotrophie de fesse et de cuisse.
2 Radiographie
Le diagnostic est toujours radiographique : radiographie du bassin de face et des hanches de profil.

Sur la hanche de face, il y a plusieurs éléments à bien prendre en considération :
- la hauteur de l'épiphyse par rapport au côté opposé. Lorsqu'il y a une épiphysiolyse, la tête glisse en arrière et en bas par rapport au col, il y a donc une diminution de cette hauteur.
- la ligne de Klein, cette ligne est parallèle au bord supérieur du col et coupe une partie de l'éphiphyse. Dans une épiphysiolyse, cette ligne ne coupe pas l'épiphyse qui a donc glissé.
- Il faudra aussi rechercher sur ce cliché de face, une irrégularité ou des anomalies sous forme d'ostéoporose du col du fémur juste en dessous du cartilage de croissance. Ceci se voit dans les formes chroniques.

De profil on mesure la bascule de l'épiphyse (angle entre l'axe du col et la ligne basi-épiphysaire) ce qui permet une classification (stade 1 de 0 à 30°, stade 2 de 30 à 60°, stade 3 au-delà).
3 Traitement
Le traitement d'une épiphysiolyse fémorale supérieure, que ce soit une forme aiguë ou chronique, est toujours chirurgical et est une urgence. Il faut en effet obligatoirement fixer l'épiphyse par rapport au col par une synthèse soit par broche, soit par vis. Le vissage, est surtout fait lorsque les enfants ont pratiquement terminé leur croissance. La chirurgie est d'autant plus facile que la tête a peu glissé. Dans les stades 3 il faut une intervention de reposition de la tête sur le col avec un risque vasculaire important avec nécrose dans les mois qui suivent.
4 Evolution
Les complications de l'épiphysiolyse fémorale supérieure sont de plusieurs types :
4.1 Complications précoces
l'enraidissement (ou coxite laminaire) de l'articulation, souvent très sévère, avec sur le plan radiographique, disparition pratiquement totale de l'interligne articulaire.
L'évolution est une catastrophe car la hanche reste complètement enraidie et cela peut être une indication à une prothèse totale de hanche chez le jeune.

La nécrose de la tête. Elle est toujours secondaire à un geste chirurgical agressif. C'est donc redire la nécessité de faire le diagnostic de façon précoce. Plus l'épiphyse a basculé, plus elle est difficile à rattraper sur le plan chirurgical et plus il y a des risques de nécrose. La nécrose entraîne une arthrose précoce.
4.2 Complications tardives
L'arthrose de hanche est inéluctable dans les 10 à 20 ans qui suivent une épiphysiolyse de stade 3, très fréquente 20 à 40 ans après un stade 2, peu de risques d'arthrose dans les stades 1.
Il faut donc faire le diagnostic le plus vite possible et ne pas s'arréter à des diagnostics trop faciles (tendinite des adducteurs, douleurs de croissance, etc).
Infections osseuses chez l'enfant
H. Bracq

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes,
2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
mis à jour le 9 avril 1999
1 Ostéomyélite aiguë    

2 Ostéite
   

3 Arthrite
Il s'agit d'une pathologie qui n'a pas disparue. Il y a plusieurs tableaux qu'il faut parfaitement connaître.
1 Ostéomyélite aiguë
Il s'agit de l'infection d'une métaphyse, presque toujours d'un os long, par un microbe venu par voie hématogène. Ce microbe est dans 60% des cas un staphylocoque doré, mais fréquence du staphylocoque B et d'Haemophilus influenzae chez l'enfant de moins de 3 ans.

Le tableau clinique est presque toujours caractéristique. C'est un enfant de 6 à 12 ans qui brutalement présente une impotence absolue du membre atteint et qui s'associe à une fièvre brutale à 39-40°. A l'examen, la douleur est extrêmement intense, l'atteinte préférentielle est l'extrémité inférieure du fémur ou l'extrémité supérieure du tibia.

Le diagnostic est clinique, en effet les radios sont normales. Le germe doit être recherché par une hémoculture et une ponction systématique de la métaphyse atteinte à la recherche d'un abcès sous-périosté ou intra osseux. La scintigraphie au technétium, ou éventuellement une IRM peuvent être demandés en urgence dans les cas difficiles.

Le traitement doit être fait en urgence associant une immobilisation par un plâtre à des antibiotiques par voie intraveineuse. Si le traitement est mis en route en urgence, la guérison se fait en trois semaines.
Par contre, si le diagnostic est fait avec retard ou si le traitement est insuffisant, l'évolution va se faire vers une ostéomyélite chronique qui associe un tableau avec de la fièvre à 38°, le membre atteint est douloureux, rouge, chaud et parfois il existe un abcès. Sur le plan radiographique : atteinte de la métaphyse avec ostéolyse, épaississement ou décollement du périoste avec une ossification sous-périostée, apparition d'un séquestre.
Le traitement de ces formes qui deviennent subaiguës ou chroniques est complexe, six mois à un an de traitement médical, gestes chirurgicaux à répétition pour évacuer les abcès intra osseux ou sous-périostés, enlever les séquestres. Les séquelles sont importantes : fragilité ossseuse avec risque de fracture et troubles de consolidation, troubles de croissance en longueur ou avec déviation.
2 L'ostéite
Il s'agit d'une infection osseuse, presque toujours subaiguë, presque toujours aussi avec un staphylocoque doré, mais qui ne s'est jamais accompagnée de signes généraux : pas d'atteinte de l'état général, un léger fébricule. Les signes sont donc essentiellement locaux. L'ostéite entraîne une douleur, parfois peu importante. Lorsqu'elle atteint un membre inférieur, elle entraîne une boiterie et cela se traduit à l'examen clinique par une amyotrophie en regard du squelette intéressé.

Sur le plan biologique, il y a tous les signes d'une infection (NFS, VS, C.R.P) et la radiologie va montrer une ostéolyse en général uni ou polycyclique finement cerclée d'os dense (abcès de Brodie). Scintigraphie et IRM sont utiles dans les cas difficiles.

Le traitement est obligatoirement chirurgical. Il faut faire une trépanation osseuse pour décomprimer cette infection interne tout ceci sous couvert d'antibiotiques par voie intraveineuse au départ, puis par voie orale si tout va bien. La durée du traitement est au minimum de trois semaines. Si tout ne se normalise pas rapidement, les antibiotiques par voie orale sont nécessaires pendant plusieurs mois.
3 Arthrite
Il s'agit d'une infection avec présence de pus en intra-articulaire.

L'arthrite se traduit par une impotence, un gonflement de la région articulaire (si l'articulation est superficielle, par exemple le genou) et des douleurs.

Le traitement est urgent : ponction de l'articulation (pour confirmer le diagnostic et pour typer le germe en cause) et lavage de l'articulation associé à un traitement antibiotique (par voie IV 10 jours puis orale si l'évolution clinique et biologique se normalise rapidement) et une immobilisation.

Ce qui est spécifique au nourrisson, c'est l'ostéoarthrite. C'est en réalité d'abord une infection osseuse métaphysaire avec propagation du microbe vers l'articulation voisine. Les enfants qui sont dans des soins intensifs par exemple avec des multiples portes d'entrée de microbes potentiels représentent un terrain "idéal". Le meilleur signe de diagnostic de l'ostéoarthrite chez le nourrisson, est l'impotence ; il ne peut pas bouger un segment de membre. Il n'y a pas de fièvre, il peut y avoir un oedème au niveau de la région atteinte mais il s'agit souvent de l'articulation de la hanche et l'oedème est tardif.

Le traitement est le même que celui de l'ostéomyélite aiguë.

Par contre, les séquelles sont souvent très importantes. Cette infection survient chez un enfant très fragile avec des structures de croissance qui vont être détruites. Les séquelles vont aller du plus simple (plus grosse épiphyse du coté atteint par rapport au coté opposé), aux troubles orthopédiques plus sévères : inégalité de longueur des membres inférieurs, troubles de croissance des axes, destruction plus ou moins totale de l'articulation avec luxation de triatement très difficile.
Diagnostic d'une boiterie
H. Bracq

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes,
2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
mis à jour le 9 avril 1999

1 Définition - Clinique
2 Etiologies
   

2.1 Avant 3 ans
2.2 Entre 3 et 10 ans
2.3 Après 10 ans
1 Définition - Clinique

1 - Définie comme une asymétrie de la marche, la boiterie est un symptôme qu'il ne faut jamais négliger.

2 - Pour en connaître les causes, il faut :
- bien analyser (esquive de l'appui, appui anormal du pied, plongeon par insuffisance musculaire, douleur associée,...) en regardant (différence de longueur du pas), en écoutant ;
- faire un examen clinique complet des membres inférieurs : inégalité de longueur, atrophie ou hypertrophie musculaire, anomalies vasculaires (angiomes, ...), examen neurologique, mobilité articulaire (hanche, genou, pied), recherche de points douloureux : une gonalgie peut être secondaire à une anomalie de la hanche +++.

3 - Toujours demander une radiographie du bassin de face et debout.
2 Etiologies
En fonction arbitraire de l'âge, on peut signaler :
2.1 Avant 3 ans
surtout la luxation congénitale de la hanche,
mais aussi :
- inégalité de longueur des membres inférieurs, parfois évidente (congénitale, séquelle de fracture, d'ostéoarthrite ou ostéomyélite).
- affection neurologique (infirmité motrice d'origine cérébrale, poliomyélite, myéloméningocèle).
- affection musculaire (myopathie).
2.2 Entre 3 et 10 ans
En dehors des mêmes étiologies que précédemment, on pensera surtout à :
- l'ostéochondrite primitive de la hanche,
- la synovite transitoire de la hanche ("rhume de hanche"),
- les arthrites infectieuses ou inflammatoires,
- les tumeurs et dystrophies osseuses,
- les corps étrangers du pied, ongles incarnés, verrues, etc...
2.3 Après 10 ans
Il faudra surtout retenir :
- l'épiphysiolyse de la hanche,
- les dystrophies de croissance (pied, genou surtout),
- un spondylolisthésis, une malformation rachidienne,
- les pieds "contracturés", le plus souvent creux d'origine neurologique, ou plats par malformation.
- les lésions traumatiques.
Pathologie rachidienne
H. Bracq

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes,
2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
mis à jour le 9 avril 1999

1 Examen clinique
1.1 Examen général
1.2 Examen du rachis
   

2 Bilan radiographique
3 Conduite à tenir
4 Traitement
Incidence : La pathologie rachidienne chez l'enfant représente à peu près 4 à 5 % de la population étudiée.

1 C'est l'examen systématique du rachis qui permettra le dépistage.

En effet, les symptômes sont rares, qu'il s'agisse de douleurs, presque toujours montrées par les patients au niveau lombaire, ou qu'il s'agisse de raideurs.
1.1 Examen général
Il est tout à fait évident qu'il faut au minimum prendre la taille debout et le poids. L'idéal est en plus d'avoir la taille assise pour mesurer la croissance du rachis.
Dans cet examen général, il faut également apprécier la puberté (critères de TANNER : pilosité pubienne et axillaire, développement mammaire chez la fille, développement des organes génitaux chez le garçon). Lorsque l'on discutera d'un traitement éventuel, il faudra avoir un âge osseux (radiographie de la main et du poignet gauche).
1.2 Examen du rachis
Il va se faire dans les trois plans de l'espace :
1.2.1 Dans un plan frontal
Il faut au préalable être certain que le socle sacré soit parfaitement horizontal sinon on a une obliquité du bassin qui va entraîner obligatoirement une grande inflexion du rachis pour équilibrer le port de la tête. Cela s'appelle une attitude.

Cliniquement, on palpe la région postérieure recherchant les deux petites saillies osseuses qui correspondent aux épines postérosupérieures de l'iliaque. S'il y a obliquité, il faudra la corriger avant de continuer l'examen (en mettant par exemple un livre, une plaquette en bois sous le membre inférieur le plus court).

En conclusion, si on n'a pas d'autres problèmes rachidiens au décours de l'examen, on fait une ordonnance pour une talonnette de compensation qui doit être au demi-centimètre près chez l'enfant (si la différence de longueur est de 2 cm, il faut prescrire une talonnette de 1,5 cm).

De face, il faudra analyser l'équilibre horizontal de la ceinture scapulaire, la symétrie de la paroi thoracique antérieure puis la symétrie ou non des deux flancs par rapport au bassin. De dos, on apprécie la symétrie ou non de la pointe des omoplates qui peuvent être trop latéralisées, ou surélevées par rapport à l'autre. On apprécie là encore la symétrie des deux flancs et enfin, on va rechercher l'équilibre du tronc avec un fil à plomb. On va chercher à palper au niveau du cou l'épineuse de C7 qui est la plus proéminente. A partir de cette vertèbre vous laissez tomber un fil à plomb qui normalement doit passer au niveau du pli interfessier. Sinon on parle de déséquilibre et il faut noter la mesure en cm entre le pli interfessier d'une part et le fil à plomb d'autre part.
1.2.2 Dans le plan sagittal
Normalement il y a lordose cervicale, cyphose thoracique, lordose lombaire et cyphose sacrée.
Cliniquement cela se mesure par rapport au fil au plomb tangeant au sommet de la cyphose thoracique. Normalement cette cyphose thoracique est maximum en T7 et l'on peut mesurer alors des flèches antéropostérieures en C7 et en L2. La normale est de l'ordre de 3 cm.

Le profil est important à examiner en actif, en flexion du tronc. On peut, en se mettant de côté, analyser la souplesse ou la raideur du rachis, apprécier la tension des muscles ischio-jambiers qui est souvent augmentée chez les adolescents en pleine poussée de croissance.
1.2.3 Dans le plan horizontal
Il faut se mettre derrière le patient, lui demander de se pencher progressivement en flexion antérieure du tronc. Il faut regarder à chaque étage s'il y a ou non une symétrie costale par rapport aux épineuses. Cette asymétrie s'appelle une gibbosité. La mesure clinique de la gibbosité se fait en symétrie par rapport à l'axe rachidien.

L'examen clinique comprend enfin une analyse de l'appareil respiratoire, cardiaque et neurologique

 En conclusion de l'examen clinique, quatre tableaux sont fréquents :

    * attitude scoliotique,
    * scoliose structurale lorsqu'il existe une gibbosité persistant en décubitus,
    * cyphose lorsque les flèches sagittales dépassent 4 cm,
    * hyperlordose lombaire.

Dès qu'un diagnostic clinique a été posé et que l'on trouve des anomalies franches au cours de cet examen ou aux examens répétés, il faut savoir demander des examens radiographiques qui comporteront au minimum une radiographie du rachis de face debout et du rachis de profil debout.
2 Bilan radiographique
- Sur le cliché de face debout, il faut analyser vertèbre par vertèbre en regardant les plateaux, la projection des pédicules, la projection des épineuses, compter les côtes. Pour mesurer l'angle d'une scoliose, il faut prendre une ligne passant par le plateau vertébral supérieur de la vertèbre la plus inclinée par rapport à l'horizontale et une autre ligne passant par le plateau inférieur de la vertèbre inférieure la plus inclinée. Il faut aussi bien regarder la vertèbre qui est au sommet de la courbure. En effet, c'est elle qui est la plus déformée. En général, cette vertèbre est trapézoïdale. C'est à ce niveau que l'on voit au maximum la rotation vertébrale. La rotation s'apprécie sur la projection de l'épineuse par rapport au corps vertébral.

Sur ces radios, on peut aussi parfois découvrir des malformations. En général se sont des hémi-vertèbres qui, avec la croissance du rachis, vont déséquilibrer celui-ci.

Enfin, on apprécie l'ossification de l'aile iliaque (test de Risser). L'ossification commence par l'épine iliaque antéro-supérieure, puis va progressivement atteindre l'épine iliaque postéro-supérieure et c'est au cours de cette ossification que vont apparaître les règles chez la fille (Risser 2 en moyenne).

- Le cliché du rachis debout de profil permettra d'apprécier la cyphose thoracique qui est normalement de l'ordre de 40° + 8, la lordose lombaire qui est de l'ordre de 45° + 10. De profil, il faut regarder comment se présentent les corps vertébraux. Les plateaux sont normalement parallèles. Plateaux irréguliers, listels marginaux impactés en avant, cunéiformisation vertébrale sont caractéristiques de la maladie de Scheuermann ou dystrophie rachidienne de croissance et qui correspond à l'examen clinique d'une cyphose raide et douloureuse.

Enfin, de profil, il faut regarder la jonction lombo-sacrée. Il peut y avoir une rupture des isthmes qui peut être associée ou non à un glissement de la vertèbre en avant par rapport au sacrum. C'est ce que l'on appelle un spondylolisthésis.
3 Conduite à tenir
La conduite à tenir est résumée en trois points :
- revoir les patients 3 à 4 mois plus tard si on n'est pas certain du diagnostic,
- le traitement dépend de la cause de la pathologie (malformation, neuromusculaire, dystrophies osseuses, etc...),
- le traitement dépend de l'évolution. Toutes les déformations ne sont pas forcément évolutives. Plus de la moitié des scolioses n'évoluent pas. Il ne faut traiter que celles qui vont évoluer. Cette évolution dépend de l'âge de survenue, plus l'enfant est jeune, plus le risque évolutif est important.
4 Traitement
Il associe :
- rééducation (posturale et respiratoire), mais ce seul traitement ne peut empêcher une scoliose d'évoluer,
- contention par corset ( seulement nocturne ou parfois à plein temps en particulier avant les règles chez la fille) lorsque cela évolue (à partir d'une angulation de 20°pour une scoliose) et jusqu'à la fin de la croissance,
- chirurgie éventuellement dans les formes graves (à partir de 45°).
Fracture supra-condylienne du coude
H. Bracq

Clinique chirurgicale infantile, CHU de Rennes,
2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex
mis à jour le 9 avril 1999

1 Clinique
2 Radiographie
3 Traitement
3.1 Réduction
3.2 Contention
   

3.3 Durée d'immobilisation
4 Complications
4.1 Liées à la fracture
4.2 Liées au traitement
Survenant à un âge moyen de 6 ans, la fracture supra-condylienne du coude représente en pratique un coude traumatisé sur deux. Le diagnostic en est aisé, le traitement doit se faire en urgence avec une réduction parfaite pour éviter les séquelles.
1 Clinique
Après une chute, en général coude en extension, l'enfant se tient coude fléchi, avant-bras contre le corps soutenu par le membre supérieur opposé. La douleur est vive, le coude rapidement volumineux.

Trois gestes sont indispensables :
- apprécier le pouls,
- dépister une éventuelle paralysie dans le territoire du médian, ou cubital ou radial (atteinte motrice et/ou sensitive) ;
- vérifier l'état de la peau ;
avant de demander un bilan radiologique.
2 Radiographie
L'extrémité métaphysaire inférieure de l'humérus est constituée de deux colonnes séparées par une zone de faiblesse. L'épiphyse est plus ou moins ossifiée en fonction de l'âge de l'enfant. Si on a un doute sur l'interprétation des radios, demander des clichés du coude normal pour comparaison.

La fracture sera analysée sur une face et un profil : elle rompt les deux colonnes humérales et se situe au-dessus des zones de croissance. Le trait est irrégulier.

Les déplacements sont une bascule postérieure dans 97 % des cas, une rotation autour de l'axe diaphysaire, enfin angulation et translation sont plus ou moins importants.

Une classification en cinq stades permettra un choix thérapeutique :
- stade 1 :  non déplacée
- stade 2 : bascule postérieure isolée
- stade 3 : bascule + rotation + angulation avec contact entre les deux fragments
- stade 4 : plus de contact entre les fragments
- stade 5 : fracture diaphyso-métaphysaire (rare).
3 Traitement
C'est une urgence.
3.1 La réduction
Elle se fait orthopédiquement, sous anesthésie générale, avec traction, puis flexion du coude.
3.2 La contention
Elle dépend du stade radiographique et de la réduction.

    * Si la réduction parfaite et stade 1, 2 ou 3 : immobilisation coude fléchi, poignet maintenu près du cou (méthode de Blount),
    * Si réduction parfaite stade 4 ou 5 : immobilisation par broches per-cutanées (méthode de Judet, ou de Nancy) et plâtre.
    * Si réduction imparfaite ou jeune enfant : chirurgie sanglante nécessaire.

3.3 durée de l'immobilisation
4 semaines.
4 Complications
4.1 Liées à la fracture
- abolition du pouls dans 12 % des cas,
- paralysie dans 10 % des cas,
- fonction du stade (surtout 3 ou 4).
4.2 Liées au traitement
- raideur du coude : en général, disparaît en quelques mois. Il n'y a pas d'indication à la rééducation chez l'enfant, mais il faut prévenir les parents qu'une ossification musculaire (ostéome du brachial antérieur) peutmettre des années avant de disparaitre. La chirurgie (arthrolyse) ne se discute qu'à distance de l'accident (en moyenne deux ans).

- Syndrome de Volkman (rétraction ischémique de la loge de l'avant-bras) est évité par une bonne prise en charge initiale. Le dépistage se fait sur les troubles de coloration des doigts, les sensations de fourmillement dans les extrémités, la douleur à l'extension des doigts.

- Déviation axiale (surtout cubitus varus) : est secondaire à un traitement imparfait ou à un déplacement secondaire. La gêne est essentiellement morphologique plus que fonctionnelle. Une chirurgie secondaire est parfois nécessaire (ostéotomie humérale inférieure).
Examen clinique d'un enfant susceptible d'être atteint d'une cardiopathie
C. Almange

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 9 mars 1999

1 Examen en milieu non spécialisé
1.1 Interrogatoire
1.2 Examen clinique général
1.3 Examen cardio-vasculaire
2 Examens complémentaires
   

2.1 Radiographie thoracique
2.2 Electrocardiogramme
2.3 Echographie - Doppler
2.4 Cathéthérisme cardiaque
2.5 Autres examens complémentaires

Deux étapes :
1 Examen en milieu non spécialisé.
2 Examens complémentaires.
1 Examen en milieu non spécialisé
La première étape, la moins spectaculaire continue à faire appel "à des moyens aussi simples que l'oeil, la main, l'oreille du clinicien" (J. KACHANER).
1.1 L'interrogatoire fera préciser :
1.1.1 l'histoire de la maladie
1.1.2 les antécédents
- personnels : anomalies au cours de la gestation, prématurité, dysmaturité, détresse néonatale, développement dans la première année, antécédents rhumatismaux éventuels.
- familiaux : cardiopathies connues des parents ou des collatéraux, morts inexpliquées.
1.1.3 Les signes fonctionnels :
- dyspnée d'effort (repos, marche) ou permanente,
- cyanose avec ses circonstances d'apparition (âge, à l'effort, aux cris, permanente) et ses signes d'accompagnement éventuels (hippocratisme digital, accroupissement, céphalées, malaises),
- sueurs abondantes, en particulier lors des tétées chez le nourrisson,
- syncopes.
1.1.4 Le développement intellectuel et l'insertion scolaire
1.2 L'examen général étudiera :
1.2.1 Le développement staturo-pondéral.
1.2.2 La morphologie de l'enfant
qui permet, lorsqu'on découvre certaines associations malformatives, d'orienter le diagnostic :
- canal atrio-ventriculaire dans la trisomie 21,
- anomalies aortiques ou mitrales dans le syndrome de MARFAN,
- rétrécissement aortique ou coarctation dans le syndrome de TURNER,
- rétrécissement aortique supravalvulaire et faciès d'elfe.
1.2.3 l'existence de signes de mauvaise tolérance :
- dyspnée, cyanose, gros foie.
1.2.4 Les déformations thoraciques éventuelles :
- Certaines sont secondaires à la cardiopathie, en particulier le bombement de la partie supérieure du thorax avec rétraction sous-mammaire (thorax de Davies) se rencontre au cours des shunts G-D importants.
- D'autres, au contraire, sont primitives mais par leur retentissement sur le coeur peuvent égarer vers de faux diagnostics de cardiopathies (dos plat, pectus excavatum...).
1.2.5 L'état des appareils :
- respiratoire ; nerveux et sensoriel ; digestif ; une attention spéciale sera portée à l'état dentaire pour prévenir une endocardite bactérienne.
1.3 L'examen cardio-vasculaire
1.3.1 L'inspection et la palpation précordiales
qui préciseront l'emplacement du choc de la pointe et l'existence éventuelle d'un frémissement.
1.3.2 L'auscultation cardiaque qui précisera :
1.3.2.1 Le rythme cardiaque : rythme régulier ou irrégulier (l'arythmie respiratoire est fréquente chez l'enfant), fréquence lente ou rapide, sachant que la fréquence est fortement augmentée par la fièvre ou l'agitation et ralentie par une apnée. Les valeurs normales de la fréquence cardiaque, au repos sont :
- 1ère semaine : 130 à 140/mn
- à 2 ans : 110 à 120/mn
- à 5 ans : 70 à 100/mn
- après 5 ans : < à 100/mn

1.3.2.2 Les bruits normaux du coeur : l'étude du 2ème bruit est particulièrement importante :
- le dédoublement physiologique augmente à l'inspiration et diminue à l'expiration. Un dédoublement espacé et fixe est pathologique (CIA).
- le deuxième bruit est plus intense en cas d'hypertension artérielle, l'hypertension systémique augmentant la composante aortique et l'hypertension pulmonaire la composante pulmonaire.
- le deuxième bruit pulmonaire, au contraire, diminue ou disparaît dans la sténose orificielle pulmonaire et le deuxième bruit aortique diminue ou disparaît dans la sténose valvulaire aortique.

1.3.2.3 Les souffles dont on précisera :
- le temps, systolique (holo, proto, méso, ou télé-systolique) ou diastolique (holo, proto, méso ou télé-diastolique).
- la topographie : siège d'audibilité maximale et irradiations.
- le siège du souffle, parfois difficile à préciser, chez le nouveau-né, oriente au contraire beaucoup chez le grand enfant.

Ainsi à cet âge :
- un souffle systolique du 2è-3è EIC oriente vers une sténose pulmonaire, un souffle infundibulo-pulmonaire, une coarctation de l'aorte ;
- un souffle systolique du 3è-4è EIC oriente vers une CIA, une CIV, une cardiomyopathie ;
- un souffle systolique du 4è-5è EIC oriente vers une CIV, une insuffisance mitrale ou tricuspidienne ;
- le timbre ;
- l'intensité qui sera côtée de 1 à 6 :

    * 1/6 : souffle qui ne se perçoit qu'en faisant suspendre la respiration.
    * 2/6 : souffle d'intensité faible mais facilement entendu,
    * 3/6 : souffle d'intensité moyenne, non frémissant
    * 4/6 : intensité forte avec frémissement,
    * 5/6 : très intense avec frémissement,
    * 6/6 : entendu à distance de la paroi thoracique.

Il faut savoir que chez l'enfant on entend très fréquemment des souffles anorganiques, en particulier si l'enfant est anémié ou fébrile.

Les souffles anorganiques appelés souvent innocents, sont fréquents chez l'enfant ; l'apport de l'échographie est parfois indispensable pour opérer la distinction entre souffle organique et souffle innocent.

La situation varie suivant la localisation et le temps du souffle :
- les souffles diastoliques traduisent toujours une cardiopathie.
- les souffles continus anorganiques sont fréquents chez l'enfant :

    * d'origine veineuse,
    * situé à la base, dans la région sous claviculaire droite ; il est dû à une chute brutale de la colonne de sang jugulaire,
    * il est variable : accentué par l'exercice musculaire et la fièvre. Disparaissant par rotation de la tête et par pression des vaisseaux du cou, en décubitus dorsal.
    * ces gestes permettent de le distinguer des souffles continus organiques : canal artériel, fistule aorto-pulmonaire.

- le souffle systolique :
Les souffles holosystoliques sont toujours organiques. Par contre, les souffles systoliques partiels, ou mésosystoliques peuvent être anorganiques. Le domaine de ce souffle innocent a été bien délimité grâce aux examens complémentaires et est actuellement réduit :

    * aux souffles protosystoliques de sujets jeunes avec dos plat,
    * au syndrome hyperkinétique,
    * aux souffles de débit au cours de certaines affections générales.

1.3.3 la palpation des pouls et la prise de la T.A
1.3.3.1 Les pouls seront systématiquement palpés au niveau des artères humérales, carotides et fémorales. L'absence de tous les pouls se voit au cours d'un bas débit cardiaque (hypoplasie du coeur gauche par exemple). L'absence de pouls fémoraux, avec des pouls huméraux normaux, est caractéristique de la coarctation de l'aorte. Des pouls bondissant se rencontrent dans l'insuffisance aortique ou le canal artériel.

1.3.3.2 La T.A sera prise, chez un enfant couché, avec un matériel adapté : le manomètre sera de préférence un manomètre à mercure. Le brassard devra recouvrir les 2/3 supérieurs du bras : trop large il donne des chiffres bas, trop étroit, il donne des chiffres trop élevés.

Chez le nourrisson, la méthode auscultatoire peut être difficile à réaliser et l'on aura alors recours à la méthode du "flush" qui note le moment de la recoloration du membre rendu exsangue en-dessous du brassard.

La prise par effet Doppler est plus précise (Dynamap*)

Lorsqu'on suspecte une coarctation de l'aorte, il est important de mesurer la T.A. simultanément aux membres supérieurs et inférieurs en utilisant deux brassard montés en série et reliés à un même manomètre.

Les valeurs moyennes de la T.A. sont :
- à 2 ans : 9-5 mm Hg
- à 10 ans : 11-6 mm Hg
2 Les examens complémentaires
2.1 La radiographie thoracique est essentielle.
- Elle doit être de pénétration parfaite, de face stricte en inspiration, complétée au besoin d'incidences de profil ou oblique, d'un examen radioscopique ou d'un transit oesophagien. Elle apprécie :
- Le volume du coeur, que l'on précisera par la mesure du rapport cardiothoracique, normalement inférieur à O,55 ; on éliminera une fausse cardiomégalie liée à une déformation thoracique, un cliché pris en expiration.
- La forme du coeur et du pédicule vasculaire, la silhouette cardiaque normale présente deux autre particularités : visibilité fréquente du bord droit de l'oreillette gauche, avec arc moyen gauche franchement convexe.
- La vascularisation pulmonaire normale, augmentée ou diminuée. (poumons clairs).
- Les anomalies parenchymateuses pulmonaires ou pleurales éventuelles,
- Les anomalies osseures éventuelles : malformations vertébrocostales fréquentes dans les cardiopathies congénitales, présence d'encoches costales dans la coarctation de l'aorte.
2.2 L'électrocardiogramme
L'électrocardiogramme se modifie de la naissance à l'adolescence avec une morphologie spéciale du tracé pour chaque tranche d'âge de l'enfance.

De nombreux facteurs expliquent les caractères spécifiques de l'E.C.G de l'enfant :
- conditions très spéciales de la circulation foetale et des modifications hémodynamiques à la naissance (voir chapitre pathologie),
- rapport entre poids du coeur et poids du corps, plus élevé que chez l'adulte,
- position anatomique du coeur qui d'horizontale avec dextrorotation chez le nourrisson, part à la verticale avec dextro ou lévorotation chez le jeune enfant.

Aussi convient-il avant d'interpréter un électrocardiogramme chez l'enfant, de bien préciser l'âge de l'enfant voir même le jour et l'heure de la naissance dans les premières semaines de vie.
2.2.1 Pratique de l'E.C.G chez l'enfant
La technique d'enregistrement d'un tracé E.C.G n'offre guère de difficulté chez le grand enfant.

Chez le nourrisson il convient pour avoir un tracé lisible d'obtenir le calme :
- par des artifices tels que biberon, jouets,
- par l'enregistrement sur les genoux de la mère.

Par contre, tout sédatif doit être écarté.

L'emplacement des électrodes doit être fixé avec minutie en utilisant des électrodes petites (diamètre 1,5 cm), électrodes métalliques autocollantes, ou petites électrodes avec pâte à électrodes posée directement sur cette électrode.

La vitesse d'enregistrement est de 2,5 cm/s. L'étalonnage est normal : 1 cm égale 1 mV pour les dérivations standard et unipolaire (D1 D2 D3 - VR VL VF) réduit de moitié 1/2 cm égale 1 mV pour les dérivations thoraciques, compte tenu d'une amplitude importante de QRS (V4R, V3R, VE, V1 V2 V3 V4 V5 V6). Cet étalonnage figure en tête du tracé.
2.2.2 L'électrocardiogramme normal de l'enfant
Les chiffres normaux varient d'un enfant à l'autre, varient avec l'âge chez le même enfant. Il est cependant des valeurs maximales à ne pas dépasser.
2.2.2.1 Le rythme cardiaque
- La fréquence cardiaque, de 100 à 120 à la naissance, s'accélère à 140-160 chez le nourrisson, revenant chez le petit enfant à 100-110.
A noter, cependant la possibilité de tachycardie sinusale à 150-180 chez le nouveau né, tachycardie non pathologique par sa seule présence.
La bradychardie sinusale est rare. Le rythme descend rarement au dessous de 60 avant 12 ans, de 90 avant 2 ans.
- Une arythmie sinusale respiratoire est très fréquente chez l'enfant à partir de 3 ans.
- De même, les extra-systoles sont assez fréquentes chez l'enfant. Dans la grande majorité des cas, ces extra-systoles n'ont aucune valeur pathologique et ne nécessitent aucun traitement (voir pathologie).
2.2.2.2 Auriculogramme
Normalement, les ondes P sont positives en D1 D2, négatives ou diphasiques en D3. Les variations axiales de P sont faibles. Aussi, une onde P négative en D1, positive en D2 D3 VF, indique l'existence d'une inversion atriale (dextrocardie de règle). Toujours cependant, vérifier la position correcte des électrodes devant une onde P1 négative.
L'amplitude de P a également une importance : cette amplitude doit être inférieure à 3 mm en D2. Sa durée ne doit pas exéder 0,08 secondes.
2.2.2.3 L'intervalle P2 ou PR, calculé en D2, se modifie avec l'âge
     
Valeur minimale
   
Valeur maximale
0 à 6 mois
6 mois à 12 ans
12 à 16 ans     0,08 seconde
0,10 seconde
0,11 seconde     0,14 seconde
0,16 seconde
0,18 seconde

Cet intervalle varie avec la fréquence cardiaque :

    *
      rythme > 140/mn : PR < 0,14 seconde
    *
      rythme > 100/m : PR < 0,16 seconde
    *
      rythme > 80/mn : PR < 0,18 seconde

2.2.2.4 Le ventriculogramme
- Dépolarisation ventriculaire :
Les complexes ventriculaires sont :

    * positifs en D1 D2 VL et VF
    * négatifs en VR
    * variables en D3

En précordiales :

    * aspect RS en V1 V2
    * qRS en V4 V5 V6
    * aspect de transition RS en V3

Bien vérifier la position des électrodes précordiales.

- Repolarisation ventriculaire :

    * ondes T positives en D1 D2 VL VF : précordiales gauches
    * ondes T négatives en VR et V1, V2 : précordiales droites
    * ondes T variables en D3

Il convient de noter :
a) la fréquence d'image RSr' en précordiales D durant les premières semaines de la vie, la fréquence des crochetages de QRS en V1,
b) la possibilité, non pathologique de décalage du segment ST en-dessus ou en-dessous de la ligne isoélectrique dont l'amplitude ne dépasse pas 2 mn, décalage surtout fréquent au cours de la première semaine de la vie.
c) la fréquence des ondes T isoélectriques dans l'ensemble du plan frontal durant les premières semaines de la vie. Aussi faut-il bien connaître avant d'affirmer une surcharge ventriculaire droite ou gauche, les critères de ces surcharges (voir tableau et pathologie).
2.2.3 L'intérêt de l'E.C.G
Si l'E.C.G n'est plus l'examen paraclinique principal dans les affections cardiaques de l'enfant, il n'en reste pas moins qu'il :
- demeure irremplaçable pour l'étude des troubles du rythme que ce soit :

    * les tachycardies supraventriculaires (auriculaire ou jonctionnelles),
    * les tachycardies ventriculaires,
    * les bradycardies par défaillance de l'activité sinusale ou par bloc auriculo- ventriculaire (voir pathologie).

- demeure irremplaçable également pour la surveillance d'un traitement digitalique.
- donne les signes majeurs des troubles de position cardiaque,
- qu'il est très utile dans les anomalies dysmétaboliques : hyper ou hypokaliémie, (voir pathologie).
- qu'il peut être très évocateur d'un diagnostic précis de cardiopathie congénitale (atrésie tricuspidienne), ou du moins qu'il peut donner une orientation diagnostique dans de nombreuses cardiopathies congénitales ou acquises (voir pathologie).
Electrocardiogramme pathologique
Surcharges ventriculaires d'après ROWE, MEHRIZI et NADAS.
 
     
HVD
   
HVG
Nouveau-né
< 1 mois
   
QR en V1
RV1 > 28 mn
SV6 > 11 mn
TV1 positif au delà de 4 jours
   
AQRS < + 30
RV6 > 16 mn
SV1 > 21 mn
qV6 > 3 mn
Nourrisson
1 - 18 mois
   
AQRS > 110
TV1 positif
qR en V1
RV1 > 20 mn
   
AQRS < + 30
qV6 > 4 mn
RV6 > 20 mn
Enfant
> 18 mois
   
AQRS > + 100°
qR en V1
Troubles de repolarisation en V1
TV1 positif
RV1 > 15 mn
   
ASRS < 0°
qV6 > 3 mn
RV6 > 25 mn
Troubles de repolarisation en D1
VL V5 V6
2.3 Echographie - Doppler
Les explorations par ultra-sons ont complètement modifié l'exercice de la cardio pédiatrie par leur caractère anodin et répétable à merci, leur réalisation possible au lit du malade ou à la couveuse et leur précision diagnostique.

- l'échographie bidimensionnelle permet de réaliser des coupes du coeur dans différentes incidences (longitudinales ou transverses par voie parasternale ou sous costale, 4 cavités par voie apicale...) et d'étudier précisement l'architecture cardiaque. Les images en temps réel peuvent être enregistrées sur magnétoscope et peuvent être fixées sur papier.

- l'échographie unidimensionnelle dite TM (temps mouvement), permet de mesurer les cavités et vaisseaux, de calculer des indices de contractilité ventriculaire et d'analyser les mouvements des valves auriculo-venticulaires et signoïdes.

- le doppler pulsé ou continu, étudie les flux transvalvulaires normaux ou anormaux, les flux des shunts (doppler couleur ++). Des débits et des gradients transvalvulaires peuvent être calvulés et les fuites valvulaires sont quantifiées.

- l'écho-doppler permet aussi de :

    * déclarer normal un coeur suspect de cardiopathie,
    * diagnostiquer une cardiopathie congénitale et partant, d'élaborer l'attitude à avoir :
          o soit en rester là s'il n'y a pas de sanction thérapeutique possible (hypoplasie du coeur gauche), ou nécessaire (petite CIV, petite CIA, sténose pulmonaire ou aortique peu sévère).
          o soit porter une indication chirurgicale parfois sans avoir recours au cathéterisme.
          o soit porter une indication de cathétérisme cardiaque et choisir son moment si des renseignements complémentaires sont indispensables.

2.4 Cathétérisme cardiaque
Les indications sont maintenant guidées par l'échographie dont il s'avère parfois le complément indispensable avant un geste chirurgical : prise des pressions, mesure des oxymétries pour préciser les conditions hémodynamiques, cinéangiographie de préférence filmée en biplan (2 incidences simultanées) pour préciser les conditions anatomiques. Le cathétérisme droit par voie veineuse (ponction de la veine fémorale) permet souvent chez le nouveau-né et le nourrisson d'explorer les cavités gauches quand le foramen ovale est perméable. Le cathétérisme gauche par voie rétrograde (ponction de l'artère fémorale) comporte un risque artériel non négligeable chez le tout petit.
Ces examens nécessitent une prémédication, voire une anesthésie générale.
2.5 Autres examens complémentaires
- L'angiographie numérisée par voie veineuse périphérique (ou centrale) permet une bonne visualisation des vaisseaux (crosse de l'aorte, artères pulmonaires) avec de faibles quantité de produit de contraste.

- La résonance magnétique nucléaire donne également de bonnes images du pédicule artériel et parfois aussi de l'architecture intra-cardiaque, sans irradiation, mais elle nécessite une bonne prémédication car l'enfant ne doit pas bouger.

- Les techniques isotopiques sont peu utilisées chez l'enfant. La scintigraphie myocardique au Thallium peut être utile pour le diagnostic et la localisation des infarctus du myocarde (anomalie de naissance des coronaires, syndrome de Kawasaki).

- L'exploration électrophysiologique de potentiels électriques par voie endocavitaire ou eosophagienne permet d'étudier les troubles du rythme et de conduction et parfois de réduire un trouble du rythme (flutter auriculaire par exemple).

- L'enregistrement continu sur 24H de l'ECG par méthode de Holter (la bande magnétique étant lue de façon automatique par un lecteur) permet d'étudier également les troubles du rythme de façon non invasive.
Cardiopathies congénitales : épidémiologie
C. Almange

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 9 mars 1999

1 Incidence - Prévalence
1.1 A la naissance
1.2 Chez les enfants plus âgés
   

2 Etiologie
2.1 Facteur génétique : 10% des cardiopathies congénitales
2.2 Facteurs métagénétiques le plus souvent
1 Incidence - Prévalence
2 % des maladies cardiaques.

7 à 8 %0 des enfants naissent avec une cardiopathie congénitale.

En France, 5 000 cas par an dont 2 000 vont poser des problèmes d'urgence plus ou moins rapidement.

Les deux sexes sont également atteints mais certaines cardiopathies congénitales, telle la CIA, sont plus fréquentes chez la fille, certaines, telles la coarctation et la transposition des gros vaisseaux plus fréquentes chez le garçon.
La fréquence des différentes cardiopathies congénitales varie suivant l'âge.
1.1 A la naissance :
- CIV : 28 %
- Canal artériel : 11 %
- CIA : 10 %
- Coarctation aortique : 9 %
- Transposition des gros vaisseaux : 8 %
- Tétralogie de Fallot : 7 %
- Sténose pulmonaire : 6 %
- Sténose aortique : 4 %
- Autres malformations rares : 17 %
1.2 chez les enfants plus âgés
la distribution est différente en raison en particulier de la mortalité précoce de certaines malformations graves :
- CIV : 24 %
- Canal artériel : 15 %
- CIA : 12 %
- Sténose pulmonaire : 11 %
- Tétralogie de Fallot : 11 %
- Sténose aortique : 6,5 %
- Coarctation : 4,5 %
- Autres malformations rares : 16 %
2 Etiologie
2.1 10% des cardiopathies congénitales sont en rapport avec un facteur génétique.
2.1.1 Aberrations chromosomiques
- Autosomiques :

    * Trisomie 21 : 40 % ont une cardiopathie congénitale, le plus souvent canal atrioventriculaire,
    * Trisomie 18 (100 %), 13 (90 %), 22 (67 %)

- Gonosomiques

    * Syndrome de Turner : 33 % cardiopathies congénitales, le plus souvent coarctation.
    * Syndrome de Klinefelter : parfois cardiopathie congénitale (Tétralogie de Fallot).

2.1.2 Affections génotypiques à transmission héréditaire
- Maladie du tissu élastique : maladie de Marfan, pseudoxanthome élastique, maladie d'Elhlers-Danlos, maladie de Lobstein.
- Mucopolysaccharidoses (maladie de Hurler et de Hunter).
- Maladie musculaire et du système nerveux, dystrophie musculaire (maladie de Duchenne), maladie de Friedreich.
- Les phacomatoses ou dysplasies neuro-ectodermiques (sclérose tubéreuse de Bourneville, maladie de Recklinghausen, etc...).
- Les glycogénoses (type II : malade de Pompe).
2.1.3 Cardiopathie familiale
on retrouve une cardiopathie congénitale identique ou différente chez plusieurs membres d'une famille :
- Syndrome de Holt-Horam
- CIA avec PR long
2.2 Le plus souvent, on suspecte le rôle de facteurs métagénétiques
- Age des parents
- Facteurs infectieux (démontré pour la rubéole maternelle : 1,2 à 1,7 % des cardiopathies congénitales ; d'autres virus ont été incriminés : coxsakie B, hépatite, oreillons...).
- Facteurs toxiques : thalidomide, éthylisme maternel, anti convulsant, tranquilisants.
- Radiations ionisantes.
- Maladies maternelles : diabète, lupus érythémateux aigu disséminé.
- Altitude : l'anoxie chronique serait cause de persistance de canal artériel.

Dans 85% des cas, la cause précise de la cardiopathie reste inconnue.
Cardiopathies cyanogènes
C. Almange

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 9 mars 1999

1 Cardiopathies cyanogènes à poumons clairs
1.1 Tétralogie de Fallot
1.2 Trilogie de Fallot
1.3 Atrésie tricuspidienne
   

2 Cardiopathies cyanogènes à poumons foncés
2.1 Transpositions des gros vaisseaux
2.2 Shunt gauche-droit inversé
La cyanose, coloration bleue des téguments, a une valeur sémiologique considérable. Lorsqu'elle est discrète, c'est au niveau des extrémités, des lèvres, des pommettes, de la langue qu'on la recherchera.

La cyanose apparaît lorsque, en l'absence d'anémie, le taux d'hémoglobine réduite pour 100 ml de sang capillaire atteint au moins 5 gr. Elle n'est pas toujours d'origine cardiaque : en effet 3 grands mécanismes physiopathologiques peuvent expliquer la désaturation du sang :
- cardiaque,
- respiratoire avec mauvaise hématose pulmonaire,
- métabolique lors de certaines intoxications (méthémoglobinémie).

Les cyanoses d'origine cardiaque obéissent à 3 mécanismes :
- L'établissement d'un shunt D-G nécessite deux conditions :

    * une communication entre les circulations systémique et pulmonaire,
    * au niveau de cette communication, une pression supérieure dans la petite circulation à la pression de la grande circulation. Cette élévation de la pression dans la petite circulation est la conséquence d'un obstacle en aval. Cet obstacle peut ne pas exister à la naissance mais se constituer secondairement, ce qui explique pourquoi une cardiopathie initialement non cyanogène peut le devenir ensuite.

- Dans les transpositions des gros vaisseaux, la cyanose est due au contraire à l'absence de shunt (les deux circulations n'étant plus comme normalement "en série" mais presque totalement indépendantes). Dans ce cas l'hématose n'est pas possible d'où la désaturation du sang artériel.

- Plus rarement, la cyanose est secondaire au mélange des sangs dans une cavité unique (oreillette ou ventricule unique).

La cyanose peut s'accompagner de signes associés : hippocratisme digital, polyglobulie dangereuse si > 7.000.000 GR, > 20 g d'Hb, > 65 % d'Hb.

La radiographie pulmonaire permet de distinguer deux grands types de cardiopathies cyanogènes :
- cardiopathies cyanogènes à poumons clairs,
- cardiopathies cyanogènes à poumons foncés.
1 Cardiopathies cyanogènes à poumons clairs
Il s'agit de cyanose liée à un shunt D-G avec un obstacle au niveau du coeur droit ou de l'artère pulmonaire, d'où l'aspect clair des poumons peu vascularisés. L'exemple typique et de loin le plus couramment rencontré est la tétralogie de Fallot.
1.1 La tétralogie de Fallot (obstacle pulmonaire à septum ventriculaire ouvert)
Elle associe :
1.1.1 Anatomiquement :
- essentiellement une CIV haute de type infundibulaire et une sténose pulmonaire le plus souvent infundibulaire,
- s'y ajoute une dextro-position de l'aorte,
- une hypertrophie ventriculaire droite.

L'élément important pour le diagnostic et le traitement est l'aspect et la taille de l'arbre artériel pulmonaire permettant de distinguer :
- des formes favorables : tronc de l'artère pulmonaire et branches de bonne taille,
- des formes moyennes : hypoplasie de l'anneau et du tronc de l'artère pulmonaire mais branches de bonne taille,
- des formes mauvaises : atteinte des branches ++.
1.1.2 Cliniquement :
La cyanose est d'apparition plus ou moins précoce (le plus souvent au cours du 2ème trimestre de la vie, à l'occasion des cris d'abord, puis permanente). Après l'âge de la marche, on observe un accroupissement (squatting).
A l'auscultation, on note un souffle systolique d'éjection au 2è-3è E.I.C, d'intensité moyenne. Le 2è bruit pulmonaire est faible ou aboli.

1.1.3 La radiographie est caractéristique : volume cardiaque normal mais sur la radiographie de face la pointe est relevée et l'arc moyen concave, réalisant l'aspect "en sabot". Dans 20 % des cas, la crosse aortique passe à droite de la trachée. Les champs pulmonaires sont très clairs.

1.1.4 L'électrocardiogramme montre un axe de QRS à droite avec une surcharge ventriculaire droite (dite "de type égalité des pressions").

1.1.5 L'échocardiographie reconnaît facilement la malformation.
- visualisation des 2 ventricules, du défaut septal haut situé,
- visualisation de l'aorte à cheval sur le septum interventriculaire ; la voie artérielle pulmonaire en position normale est plus ou moins hypoplasique.

1.1.6 l'évolution est marquée par l'aggravation de la cyanose et de la polyglobulie qui lui est secondaire.
Des épisodes de dyspnée paroxystique, avec aggravation brutale de la cyanose et parfois syncope peuvent survenir, surtout chez le nourrisson. Ces accidents sont traités par les beta-bloquants, mais leur survenue imposent une solution chirurgicale rapide.
D'autres complications redoutables peuvent apparaître :
- abcès cérébral, dû au fait que le sang veineux court-circuite le filtre pulmonaire. Il faut toujours y penser devant un syndrome infectieux, a fortiori si des signes neurologiques sont associés.
- thrombose cérébrale particulièrement redoutée lorsque la polyglobulie est majeure.
- syndrome hémorragique, lié à une thrombopénie.
- endocardite d'Osler, enfin, comme dans toute cardiopathie congénitale.
1.1.7 Le traitement
Après une exploration hémodynamique et une angiocardiographie pratiquée soit lorsque la cardiopathie est mal tolérée, soit si elle est bien tolérée, après l'âge de deux ans pour préciser les conditions anatomiques avant l'acte chirurgical.

Chez le petit nourrisson dont la cardiopathie est mal tolérée, on peut être conduit à une intervention palliative provisoire : anastomose de Blablock-Taussig entre l'artère sous-clavière et l'artère pulmonaire. Mais dans toute la mesure du possible actuellement on tend à faire une correction complète dont le risque est faible après deux ans et dont les résultats fonctionnels sont bons. Donc :
- bonne tolérance : réparation complète entre 2 et 4 ans,
- mauvaise tolérance : (cyanose importante, malaises anoxiques) et forme favorable, réparation immédiate même chez le petit nourrisson.
- mauvaise tolérance et forme anatomique moyenne ou mauvaise : 1er temps anastomose palliative systémo-pulmonaire BLALOCK-TAUSSIG ou tube de Gore-tex entre l'aorte ou une de ses branches et une branche pulmonaire.
1.2 La trilogie de Fallot
Il s'agit d'une sténose pulmonaire à septum inter-ventriculaire intact. Elle associe :
1.2.1 Anatomiquement :
- une sténose orificielle pulmonaire.
- une CIA,
- une hypertrophie ventriculaire droite.
1.2.2 Cliniquement :
- une cyanose retardée (2-3 ans) et inconstante (en dehors de la forme du nouveau-né)
- un souffle systolique d'éjection au 2è E.I.C. avec un frémissement et abolition du B2 pulmonaire ou doublement espacé de B2 avec composante pulmonaire affaiblie.
1.2.3 La radiographie montre :
- un coeur de volume modérément augmenté dont la pointe est relevée, surtout une saillie de l'arc moyen en oeuf.
1.2.4 L'électrocardiogramme montre :
- un axe QRS très à droite.
- une hypertrophie ventriculaire et auriculaire droite.
1.2.5 A l'échographie sont visibles :
- l'hypertrophie des parois ventriculaires droites.
- l'anomalie de l'appareil valvulaire.
- le doppler permet de mesurer le gradient VD - AP.
1.3 L'atrésie tricuspidienne
- Cliniquement donne une cyanose intense ;

- La radiographie montre une grosse oreillette droite,

- L'ECG, une hypertrophie auriculaire droite et ventriculaire gauche et un axe gauche de QRS.

- L'échographie confirme le diagnostic et précise les anomalies associées : taille de la CIV, obstacle pulmonaire, position des gros vaisseaux.

Traitement : geste palliatif dans l'attente d'une dérivation oreillette droite - artère pulmonaire (type opération de Fontan).
2 Cardiopathies cyanogènes à poumons foncés
2.1 Les transpositions des gros vaisseaux
Ce sont des cardiopathies fréquentes à la naissance et la cause majeure des cyanoses néonatales d'originie cardiaque (cf. cardiopathies du nouveau-né).

Cependant des transpositions peuvent être vues plus tardivement :
2.1.1 Transposition avec CIV et RP :
- diagnostic par échographie puis par cathétérisme,
- traitement :

    * du nourrisson : anastomose systémo-pulmonaire
    * de l'enfant : opération de Rastelli (dérivation du sang du ventricule gauche vers l'aorte par la CIV + mise en place d'un tube entre le ventricule droit et l'artère pulmonaire) ou REV (Réparation endo-ventriculaire) (tunnelisation VG - CIV aorte et réimplantation de l'artère pulmonaire sur le VD).

2.1.2 Transposition avec RP sans CIV :
rare, problème thérapeutique difficile si sténose sévère.
2.2 Le shunt gauche-droit inversé
Une telle inversion peut se rencontrer dans l'évolution d'un canal artériel persistant, d'une CIA large, d'une CIV (complexe d'Eisenmenger).

La cyanose n'apparait que lorsque, par élévation des résistances artériolaires pulmonaires, les pressions droites deviennent supérieures aux pressions gauches.

On peut prévoir cette évolution lorsque le souffle diminue et que le 2ème bruit devient éclatant ; la radiographie montre une diminution de la vascularisation pulmonaire en périphérie alors qu'elle reste augmentée près des hiles.

La chirurgie correctrice devient alors impossible et seule une greffe coeur-poumons peut être discutée.
Cardiopathies non cyanogènes
C. Almange

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 9 mars 1999

1 Shunts Gauche-Droite
1.1 Physiopathologie
1.2 Communication inter-ventriculaire
1.3 Canal artériel persistant
1.4 Communication inter-auriculaire
1.5 Communication atrio-ventriculaire
   

2 Cardiopathies congénitales par obstacles sans shunt
2.1 Obstacle de la voie droite
2.2 Obstacle de la voie gauche
1 Les shunts Gauche-Droite
1.1 Physiopathologie
1.1.1 L'existence d'une communication entre la circulation pulmonaire et systémique entraîne un shunt dont l'importance dépend :
- de la taille et du nombre des communications,
- de la différence de pression entre les cavités et les vaisseaux qui communiquent anormalement.

En l'absence d'obstacle, sur la voie pulmonaire, la pression est plus faible dans la petite circulation et le shunt se fait de la gauche vers la droite.

1.1.2 A la naissance, les artérioles pulmonaires ont conservé leur structure foetale. Les résistances vasculaires pulmonaires sont élevées, avoisinant la résistance vasculaire systémique. Le shunt est minime : l'enfant va bien. Il n'y a pas de souffle ou un souffle discret. La radiographie pulmonaire montre une vascularisation normale ou peu augmentée.

1.1.3 Avec la maturation du lit vasculaire pulmonaire, les résistances vasculaires pulmonaires s'effondrent au cours du 1er mois. Le shunt s'accentue. S'il est important, le débit de la petite circulation devient plus du double du débit systémique. L'enfant peut alors avoir des manifestations fonctionnelles : polypnée, sueurs profuses au cours des tétées, mais il n'y a pas de cyanose. La croissance pondérale stagne. Surtout surviennent des pneumopathies à répétition très évocatrices d'un shunt G-D. A l'auscultation, on note un souffle intense dont le siège dépend de celui de la communication.
La radiographie pulmonaire montre une surcharge vasculaire, "pastilles" allant jusqu'à la périphérie des poumons.

1.1.4 Secondairement, mais parfois très rapidement, le shunt entraîne des altérations du lit vasculaire pulmonaire qui aboutissent à une augmentation des résistances vasculaires pulmonaires et des pressions pulmonaires.
Le shunt diminue alors et peut s'inverser.
Paradoxalement, les signes fonctionnels s'améliorent et le souffle diminue, mais le 2ème bruit pulmonaire devient éclatant.
La radiographie pulmonaire montre une vascularisation faible à la périphérie des poumons alors qu'elle reste forte près des hiles.
L'E.C.G. montre une hypertrophie ventriculaire droite.
Enfin, apparaît une cyanose lorsque le shunt s'inverse, en particulier au cours des cris et de la toux.
Cette évolution rend inutile et même dangereuse une intervention chirurgicale et il faut donc opérer ces enfants avant qu'elle ne se produise.

Le tableau suivant résume les quatre formes hémodynamiques des shunts gauche-droit, quelque soit la localisation anatomique du shunt.

Les localisations les plus fréquentes de shunt gauche-droit sont :
- la communication inter-ventriculaire : CIV
- la communication inter-auriculaire : CIA
- le canal artériel : CA
- le canal atrio-ventriculaire : CAV
1.2 Communication inter-ventriculaire (CIV)
C'est la plus fréquente des cardiophathies congénitales.
Sa traduction clinique dépend de la taille du defect septal.
1.2.1 Les petites CIV : maladie de Roger
(CIV hémodynamiquement type I, cf tableau).
1.2.1.1 Diagnostic
- les enfants sont asymptomatiques,
- gros souffle holosystolique 3 à 4/6 mésocardiaque irradiant en rayons de roue avec un B2 normal au foyer pulmonaire et pas de roulement de débit (parfois souffle moins intense, proto mésosystolique localisé à l'endapex).
- ECG et radio : normaux,
- l'échographie permet, si le trou n'est pas trop petit toutefois, de localiser la CIV dans le septum membraneux, infundibulaire, trabéculé ou d'admission. Parfois seul le doppler couleur permet de voir le shunt.
1.2.1.2 Conduite à tenir
- pas d'intervention chirurgicale,
- vie normale,
- prévention de l'Osler,
- surveillance annuelle car si un souffle d'insuffisance aortique apparait (par capotage d'une signoïde artoïque en particulier si la CIV est infundibulaire), il faut fermer la CIV avant que l'IA ne s'aggrave.
- 50 à 75 % des petites CIV évoluent vers la fermeture spontanée (le plus souvent avant l'âge de 2 ans).
1.2.2 Les CIV larges (type IIa ou IIb)
1.2.2.1 Diagnostic :
- elles peuvent être bien tolérées mais parfois vers le 3è mois de vie, apparaissent des signes d'insuffisance cardiaque (souvent à l'occasion d'une pneumopathie) et un retard pondéral.
- à l'inspection : thorax de Davies
- souffle holosystolique en rayons de roue avec éclat plus ou moins important du B2 au foyer pulmonaire et roulement diastolique de débit à la pointe,
- ECG : HVG ou hypertrophie biventriculaire,
- radio : cardiomégalie et hypervascularisation pulmonaire,
- l'échographie visualise la CIV, son siège, sa taille et montre la dilatation des cavités cardiaques. Le doppler permet d'estimer les pressions pulmonaires à partir de la vitesse du flux du shunt.
1.2.2.2 Conduite à tenir
1.2.2.2.1 Si les pressions pulmonaires sont peu élevées :
- si la tolérance clinique est bonne : surveillance clinique. Dans 30 % des cas, la CIV va diminuer de taille ( type I) mais elle peut aussi évoluer vers un type IIb. Vers l'âge de 18 mois si la CIV reste à bon débit, faire un cathérérisme cardiaque et la fermer sous circulation extra corporelle.
- si la tolérance est mauvaise malgré un traitement digitalo diurétique, fermeture de cette CIV après un cathétérisme cardiaque. (Le cerclage de l'artère pulmonaire n'est plus réalisé que chez le tout petit < 3 kg ou chez le nourrisson en cas de CIV multiples ou musculaires).
1.2.2.2.2 Si les pressions pulmonaires sont élevées :
même si la tolérance est bonne, ce qui arrive parfois, il faut faire un cathétérisme entre l'âge de 4 et 8 mois car l'HTAP conduit à la fermeture des CIV entre l'âge de 6 mois et 1 an. Si la tolérance est mauvaise, l'intervention est plus précoce.
Il ne faut pas se laisser abuser par une bonne tolérance car l'évolution peut se faire à bas bruit vers une HTAP fixée (type III), d'où l'importance et la nécessité de l'écho-doppler dans la surveillance des CIV larges.

1.2.3 Les CIV à poumons protégés par une sténose pulmonaire (type IV) sont habituellement bien tolérées. Si l'obstacle pulmonaire est serré, le shunt peut s'inverser avec cyanose. Elles doivent être opérées, souvent vers l'âge de 1 ou 2 ans.

 

SE RAPPELER :
- Qu'une CIV doit être auscultée 1 fois par an pour vérifier l'absence de souffle diastolique d'insuffisance aortique.
- Qu'une CIV large avec des pressions pulmonaires élevées, peut être tolérée et qu'un écho-doppler est indispensable pour guider la conduite à tenir.
- Qu'une CIV initialement mal tolérée peut devenir mieux tolérée dans 2 circonstances opposées : soit parcequ'elle se ferme, soit parcequ'elle évolue vers un type III.
- Qu'il faut toujours assurer la prévention de l'Osler.

1.3 Le canal artériel persistant
Le plus fréquent des shunts artériels caractérisés par un shunt gauche-droit plus une fuite diastolique.

D'autres sont moins fréquents, à envisager au diagnostic différentiel :
- la fistule aorto-pulmonaire : diagnostic facile à l'échographie,
- le tronc artériel commun : l'échographie oriente le diagnostic en montrant un seul gros vaisseau à cheval sur le septum interventriculaire.

Le canal artériel persistant peut se voir isolé ou dans le cadre d'un syndrome malformatif plus complexe, en particulier, d'une embryopathie rubéolique.
Chez le nourrisson, le souffle est seulement systolique, haut situé, sous la clavicule gauche. Ce n'est que plus tard qu'il pendra son caractère continu, "tunnellaire" très évocateur.
Les pouls sont amples, bondissants.
La radiographie montre un aspect normal (forme I), une hyper vascularisation pulmonaire : forme II.
L'électrocardiogramme montre une surcharge bi-ventriculaire (forme II)
La section du canal s'impose dès qu'il est découvert, car l'intervention est simple et même si la cardiopathie est bien tolérée, le risque d'une greffe bactérienne n'est pas négligeable.
Les tentatives de fermeture du canal artériel par voie vasculaire sont effectuées par certains. Les tentatives de fermeture par indometacine sont utilisées dans certaines formes de nouveau-né avec détresse respiratoire et insuffisance cardiaque.
1.4 La C.I.A
Est habituellement bien tolérée.
Le souffle peu intense siège au 3ème-4ème E.I.G. et irradie dans le dos. On note un dédoublement espacé et fixe du 2ème bruit.
L'électrocardiogramme montre un bloc de branche droit incomplet.
La radiographie montre des artères pulmonaires larges (et pulsatiles à l'amplificateur de brillance).
L'échographie permet :
- de voir la CIA,
- d'apprécier l'intégrité des valves mitrales,
- d'estimer l'importance du shunt par l'augmentation de volume du ventricule droit et par l'étude du rapport débit pulmonaire/débit systémique. Une petite CIA, sans retentissement ventriculaire droit, n'est pas opérée. La fermeture par prothèse introduite par voie percutanée commence à être réalisée.
1.5 Le C.A.V
Se rencontre surtout chez les trisomiques 21 :
- forme complète : CIA + CIV + IM + I tri.
- forme incomplète : ostium primum, IM+
Le souffle, maximum à l'apex a souvent une irradiation axillaire gauche traduisant une insuffisance mitrale.
L'électrocardiogramme montre un axe de QRS au zénith (-90°), un allongement du PR, un bloc de branche droit.
L'échographie affirme le diagnostic et apprécie l'importance des lésions des valves auriculo-ventriculaires.
Cette cardiopathie est souvent mal tolérée et de traitement chirurgical difficile.

Traitement : La tendance actuelle est d'éviter le cerclage pulmonaire des formes mal tolérées du nourrisson et d'envisager une réparation complète dès le très jeune âge. Les résultats sont souvent imparfaits : frèquence d'une insuffisance mitrale résiduelle.
2 Cardiopathies congénitales par obstacles sans shunt
2.1 Obstacle de la voie droite
2.1.1 La sténose d'une ou des deux artères pulmonaires

C'est une cardiopathie rare, de diagnostic angiocardiographique qui doit faire penser à la rubéole.
2.1.2 La sténose orificielle de l'artère pulmonaire

A une symptomatologie peu différente de la trilogie de Fallot mais sans cyanose :
- souffle systolique au foyer pulmonaire, frémissant avec diminution ou disparition du 2ème bruit,
- même aspect radiologique que la trilogie avec poumons peu vascularisés.
- électrocardiogramme : surcharge ventriculaire droite.
- l'échographie-doppler permet de mesurer le gradient de pression.
- Traitement : si le gradient de pression est supérieur à 50 MMHg: un cathétérisme cardiaque est fait pour réaliser une dilation au ballonnet. En cas d'échec, valvulotomie sous CEC .
2.2 Obstacle de la voie gauche
2.2.1 Les obstacles veineux et auriculaires gauches sont rares
2.2.1.1 La sténose isolée des veines pulmonaires donne un tableau d'hypertension pulmonaire primitive. Le diagnostic est porté au cathétérisme.

2.2.1.2 Le coeur triatrial (oreillette gauche avec deux chambres),

2.2.1.3 La myxome de l'oreillette gauche (50% des tumeurs du coeur),
2.2.1.4 Le rétrécissement mitral congénital.
Les trois dernières malformations sont diagnostiquées par l'échographie.

Ces obstacles veineux et auriculaires gauches comportent une indication chirurgicale.

2.2.2 Les obstacles ventriculaires ou artériels sont les plus fréquents.
2.2.2.1 Les myocardiopathies obstructives
Peuvent être rattachées à ce chapitre. Elles sont isolées ou familiales :
- le plus souvent localisées au ventricule gauche, rarement au ventricule droit, parfois aux deux,
- les signes fonctionnels sont intenses : dyspnée, angor, syncope, troubles du rythme,
- la radiographie montre un gros coeur, surtout le ventricule gauche,
- l'électrocardiogramme montre une surcharge ventriculaire, des signes d'ischémie, des images parfois importantes d'infarctus, des troubles du rythme,
- le diagnostic est aidé par l'échocardiographie,
- l'évolution se fait vers l'insuffisance cardiaque, mort subite.

Le traitement médical est basé sur les béta-bloquants ou inhibiteurs calciques, le traitement chirurgical est tenté dans les formes obstructives (voir chapitre myocardites).
2.2.2.2 Le rétrécissement aortique valvulaire
Est caractérisé :
- anatomiquement : le plus souvent une sténose en gicleur de l'orifice aortique ; parfois : sous orificiel ; parfois : sus orificiel (hypercalcémie primitive).
- cliniquement : les signes fonctionnels sont longtemps absents, puis surviennent des malaises à l'effort de mauvais pronostic,
- l'auscultation précise l'existence d'un souffle systolique frémissant au foyer aortique avec B2 aboli ou diminué,
- la radiographie montre une hypertrophie ventriculaire gauche,
- l'électrocardiogramme montre une surcharge ventriculaire gauche systolique.
- l'échocardiogramme est fondamental : il situe l'obstacle par rapport aux valves aortiques : orificiel, sous-valvulaire. Il juge de l'épaisseur du ventricule gauche en systole et le doppler permet de mesurer le gradient VG-aorte.

Le traitement : valvulotomie sous circulation extra-corporelle (ou dilatation par ballonet).
2.2.2.3 La coarctation de l'aorte
Représente 5% des cardiopathies congénitales.
Anatomie : dans la forme de l'enfant et de l'adolescent, il s'agit d'un rétrécissement court, isthmique, à canal artériel fermé sans autre malformation avec un système anastomotique contournant le rétrécissement entre l'artère sous-clavière et l'aorte sous-jacente (par mammaires internes, épigastriques, intercostales).
Les conséquences de ces lésions sont :
- qu'au-dessus du rétrécissement, les pouls sont bien perçus, la tension artérielle élevée, les oscillations normales ;
- qu'au-dessous du rétrécissement, les pouls sont faibles ou nuls, la tension artérielle diminuée ou nulle, les oscillations très diminuées.

Cliniquement, les signes fonctionnels sont longtemps absents. L'auscultation révèle un souffle systolique doux, haut situé à gauche, irradiant dans le dos.
La tension artérielle est élevée aux membres supérieurs, diminuée aux membres inférieurs. Le pouls très bien perçu aux membres supérieurs sont absents aux membres inférieurs. Les oscillations sont fortes aux membres supérieurs et très diminuées aux membres inférieurs.

La radiographie montre un volume du coeur normal, un aspect en cheminée du pédicule artériel, des érosions costales (après 10 ans).

L'échographie doppler :
- chez l'enfant : recherche une anomalie associée de la valve aortique ou mitrale, précise le degré de retentissement du ventricule gauche et apprécie le gradient isthmique.
- chez le nourrisson (voir coarctation à la période néo-natale).

L'angiocardiographie classique ou numérisée, ou encore la R.M.N, précisent le type anatomique.

L'évolution :
- non opéré : des accidents multiples sont possibles : neurologiques ; infectieux : Osler ; insuffisance cardiaque ; rupture aortique.
- opéré : la résection donne de bons résultats, l'intervention doit se pratiquer entre 2 et 5 ans.
Le diagnostic se pose avec les autres causes d'hypertension artérielle de l'enfant.
(Pour la forme précoce : voir chapitre Néonatologie).

TOUJOURS PENSER A PRENDRE LA TENSION ARTERIELLE CHEZ L'ENFANT
Insuffisance cardiaque de l'enfant (nourrisson)
C. Almange

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 10 mars 1999

1 Sémiologie clinique, radiologique, échographique
1.1 Définition
1.2 Physiologie
1.3 Signes cliniques
1.4 Examen radiologique, échocardiographie, biologie
2 Principales causes en rapport avec la physiologie
2.1 Anomalie de la fréquence cardiaque
   

2.2 Troubles de la précharge
2.3 Troubles de la post-charge
2.4 Troubles de la contractilité
3 Traitement
3.1 Traitement général
3.2 Traitement spécifique
3.3 Cas particuliers
1 Sémiologie clinique, radiologique, échographique
1.1 Définition
Insuffisance cardiaque : incapacité du coeur à assurer un débit sanguin suffisant aux besoins de l'organisme,à son oxygénation. Contrairement à l'adulte, l'insuffisance cardiaque du nourrisson est très rarement secondaire à une diminution de la valeur intrinsèque du myocarde mais est due le plus souvent à une cardiopathie congénitale. Le traitement est donc en règle chirurgical, mais après un temps médical permettant l'opération dans de bonnes conditions, et après appréciation des conditions circulatoires et de leur retentissement sur la fonction cardiaque.

L'échocardiograhie, technique non invasive est devenue indispensable dans ce bilan.
1.2 Physiologie : Fonction du ventricule gauche
1.2.1 Débit cardiaque
Importance de fréquence cardiaque (FC) tachycardie, bradycardie, de la quantité de sang éjecté à chaque systole par le ventricule gauche (VES).
Le débit cardiaque dépend de la valeur contractile du ventricule gauche (QC) : QC = FC x VES ; des conditions circulatoires en amont : la précharge ***, diminuée plus ou moins ; des conditions circulatoires en aval : post-charge agmentée, diminuée.
1.2.2 Oxygénation du myocarde
Dépend du débit coronaire. Trois facteurs :
- durée diastolique/minute,
- pression en amont,
- pression en aval.
1.3 Signes cliniques
Les principaux signes sont expliqués par :

1.3.1 L'accroissement des pressions de remplissage causant une stase veineuse en amont des ventricules, d'où :

- signes respiratoires avec engorgement pulmonaire, tachypnée, parfois détresse respiratoire. Cette gêne n'apparaît au début chez le nourrisson qu'aux repas (long, incomplet, avec pause) ; parfois refus des biberons, sueurs profuses, la courbe de poids stagne ;

- l'hépatomégalie, signe important pour le diagnostic et pour juger de l'efficacité du traitement. Une turgescence veineuse jugulaire peut être associée.

- les oedèmes périphériques, à rechercher chez le grand enfant ; sont rarement observés chez le nourrisson : une prise de poids chez ce dernier malgré les difficultés alimentaires signe une rétention hydrique.

1.3.2 La chute du débit cardiaque avec baisse de la perfusion rénale d'où :

- oligurie, rétension hydrosodée (cause également d'oedème)

Au point de vue cardiaque :
- tachycardie constante, sinusale, permanente (sauf trouble du rythme : cf),
- galop dans les insuffisances cardiaques non malformatives et les obstacles gauches,
- le collapsus (terminal ou inaugurant l'insuffisance cardiaque) peut être périphérique (extrémités froides, pâles), central (pouls petit, TA effondrée), à différencier d'un collapsus hypovolémique.
1.4 Examen radiologique, échocardiographique, biologie
La radiographie thoracique montre :
- la cardiomégalie : à apprécier par le rapport C/T qui est supérieur à 0,60 chez le nouveau-né, 0,55 chez le nourrisson, 0,50 chez l'enfant,
- l'aspect du coeur,
- la vascularisation pulmonaire.

L'électrocardiogramme montre :
- des signes de surcharge (auriculaire et ventriculaire),
- la possibilité de trouble du rythme, de la conduction,
- l'atteinte possible du myocarde et du péricarde.

La biologie apprécie le retentissement viscéral de l'insuffisance cardiaque :
- hépatique : (hypoglycémie, trouble de l'hémostase),
- rénale : important car il guide la thérapeutique ; on recherchera une insuffisance rénale (surveillance d'un traitement par DIGOXINE), un hyperaldostéronisme secondaire (indication de Spironolactone) ;
- ionique : recherche d'une acidose métabolique, troubles de la kaliémie.

L'échocardiographie est indispensable dans le bilan d'une insuffisance cardiaque de l'enfant. Pour le diagnostic : elle fournit l'image dynamique de la valeur contractile du coeur en permettant la mesure des différents diamètres cavitaires en systole et diastole, elle évalue le volume d'éjection systolique et l'index cardiaque. Elle précise le mécanisme de l'insuffisance cardiaque, important pour le traitement :
- défaut de contractilité avec dilatation ventriculaire, amincissement des parois,
- excès de contractilité avec ou sans hypertrophie concentrique ; asymétrie ou non des parois,
- contractilité normale mais restriction de l'expansion diastolique.

L'échocardiographie bidimensionnelle est devenue le premier temps de l'investigation étiologique parfois même suffisant au diagnostic.
2 Principales causes en rapport avec la physiologie
2.1 Anomalie de la fréquence cardiaque (+)
- tachycardie > 200 surtout tachycardie paroxystique, débit cardiaque défaillant, oxygénation précaire,
- bradycardie < 40 : pas de maintien du débit cardiaque : insuffisance cardiaque.
2.2 Troubles de la précharge (PrC) :
- augmentation de la PrC : cause la plus fréquente de l'insuffisance cardiaque du nourrisson (++++) : shunt gauche-droit, fuites auriculoventriculaire et aortique, insuffisance cardiaque d'origine extracardiaque ;
- diminution de la précharge : sténose des valves auriculo-ventriculaires, péricardites (constrictives, épanchements), myocardiopathie restrictive et en partie dans les MCO.
2.3 Troubles de la post-charge (PoC) :
- augmentation de la PoC (++) cardiopathies obstructives (RA, coarctation de l'aorte), hypertension artérielle.
- diminution de la PoC, vasodilatation artérielle, toxique, iatrogène.
2.4 Troubles de la contractilité proprement dite :
- rare chez le nourrisson,
- primitif : myocardiopathie génétique, métabolique,
- secondaire : ischémie myocardique, fibrose endocardique.

Nous consacrerons des chapitres spéciaux :
- aux myocardites,
- aux péricardites,
- aux troubles du rythme,
- à l'hypertension chez l'enfant.
3 Traitement
Le traitement ne peut être fait :
- qu'après l'évaluation de l'insuffisance cardiaque par la clinique, l'échographie, parfois par cathétérisme cardiaque,
- qu'après recherche de la cause de l'insuffisance cardiaque par l'échographie (sachant que chez le nourrisson les insuffisances cardiaques idiopathiques sont exceptionnelles),
- le vrai traitement est celui de la cause, donc le plus souvent chirurgical : le traitement médical permet seulement d'amener l'enfant en salle d'opération dans de bonnes conditions (âge, poids, état clinique).
3.1 Traitement général de l'insuffisance cardiaque
Les mesures extra-cardiaques visent à améliorer l'oxygénation du sang :
- correction de toute baisse du taux d'hémoglobine,
- correction de l'hypoxie pulmonaire : oxygène, voire ventilation artificielle, traitement de l'oedème pulmonaire,
- traitement des détresses respiratoires, des déperditions thermiques,
- maintenir un apport calorique suffisant quitte à réduire l'apport volumique par traitement diurétique,
- traitement des infections pulmonaires.
3.2 Traitement spécifique de l'insuffisance cardiaque
3.2.1 Les digitalines
DIGOXINE® - rappel toxicité, nécessité d'un traitement efficace.
- action rapide : 1/2 vie = 1,5 jours
- élimination rénale (d'où dose < si insuffisance rénale)

Présentation :
- ampoule injectable de 2 ml = 500 mcg, pédiatrique à 50 mcg
- comprimé 250 mcg DIGOXINEÒ
- solution 50 mcg/ml DIGOXINEÒ

Posologie : suivant le poids de l'enfant et l'état rénal (voir tableau)

Surveillance : Digoxinémie - valeur toxique 5ng/ml nourrisson, 3 ng/ml grands enfants.

Indications : trouble du rythme : tachycardie supra-ventriculaire, trouble par augmentation de la précharge.

Contre-indications : trouble du rythme : bradycardie, trouble du rythme ventriculaire, trouble du rythme supra-ventriculaire par surcharge digitalique, MCO, tétralogie de Fallot.

Surveillance du traitement : signes de surcharge,
- clinique : troubles digestifs, bradycardie ou arythmie,
- ECG : anomalie de conduciton auriculo-ventriculaire, trouble d'excitabilité ventriculaire ou auriculaire,
- biologique.

Posologie habituelle de la DIGOXINE ® per os en absence d'insuffisance rénale
 

Poids
(en kg)
   
Dose de charge
(en µg/kg)
   
Dose d'entretien
(en µg/kg/24h)
3 à 6
   
20
   
20
6 à 12
   
15
   
15
12 à 24
   
10
   
10
> à 24
   
7
   
7

- Administration intra-veineuse : 2/3 de la dose per os.
- Fractionnement des doses :

    * toutes les 8 heures en milieu hospitalier,
    * toutes les 12 heures à domicile.

- En cas d'insuffisance rénale : Clearance de la créatine :

    * entre 75 et 50 ml/mn : 2/3 de la dose,
    * entre 50 et 25 ml/mn : 1/2 de la dose,
    * entre 25 et 10 ml/mn : 1/4 de la dose.

- En cas de cardiopathies obstructives gauches sévères (coarctation aortique, rétrécissement aortique) 2/3 de la dose.
- Petit poids de naissance (< 2500 g) 2/3 de la dose habituelle.
3.2.2 Les diurétiques
Traitement ++ des insuffisances cardiaques par augmentation de la précharge.

FUROSEMIDE ou LASILIX®
- ampoule 2 ml = 20 mg,
- comprimé 40 mg et 20 mg,
- dose urgence injectable (IM ou IV) 2 mg/kg
- dose chronique : 2 mg/kg/24 heures 1 à 3 fois par semaine.

SPIRONOLACTONE : ALDACTONE® - nécessité de mise en route du traitement en milieu hospitalier, de contrôle de la tolérance ionique (Ca-K).
3.2.3 Vasodilatateurs
(peu utilisés en Pédiatrie) NEPRESSOL® ou surtout CAPTOPRIL (I.E.C.)
- réduction de la précharge ventriculaire,
- réduction de la postcharge ventriculaire,
- surtout utilisé en milieu de Réanimation (REGITINE ® , ISUPREL ® , DOPAMINE ®)
3.3 Cas particuliers
3.3.1 C.I.V
Cardiopathie congénitale la plus fréquente de l'enfant ; vu la fréquence de la fermeture spontanée : traitement médical permet de temporiser, mais en cas d'hypertension artérielle pulmonaire ne pas prolonger après un an.
3.3.2 Adiastolie par épanchement péricardique
Rare (sauf épanchement postpéricardotomie), ponction ou drainage chirurgical.
3.3.3 Pathologie du canal artériel du nouveau-né
(voir nouveau-né)

Canal artériel du prématuré (< 1400 g) : fréquence de non fermeture, ce shunt gauche-droit est mal supporté et aggrave un état respiratoire souvent précaire pour d'autres raisons. Induction de la fermeture par anti PROSTAGLANDINE (INDOCID) ; si contre-indiqué (insuffisance rénale, troubles digestifs, ictère) : ligature.

Insuffisance cardiaque du nouveau-né dans les anomalies obstructives ducto-dépendantes c'est à dire :
- coarctation de l'aorte,
- interruption de la crosse aortique.

L'insuffisance cardiaque est retardée tant que le canal artériel perméable permet la perfusion de l'hémicorps inférieur et de dériver une partie du débit en regard de la coarctation. Si fermeture : pression ++ dans le ventricule gauche, avec collapsus, acidose métabolique, mort. Pour attendre l'intervention levant l'obstacle, intérêt de maintenir le canal artériel ouvert par perfusion de PROSTAGLANDINE El.

A signaler également deux cardiopathies congénitales rarement décompensées chez le nouveau-né et ducto-dépendante, donc nécessitant perfusion de PROSTAGLANDINE : Tétralogie de Fallot avec atrésie pulmonaire, Triade de Fallot avec atrésie ou sténose majeure de l'orifice pulmonaire.
3.3.4 Myocardiopathie obstructive :
- du ventricule gauche,
- du ventricule droit (Tétralogie de Fallot avec obstacle infundibulaire.
Les myocardiopathies obstructives peuvent nécessiter un traitement par bétabloquant (AVLOCARDYL®) - traitement d'urgence des malaises de Fallot.
Les atteintes du myocarde (myocardiopathies)
C. Almange

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
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1 Type physiopathologique
1.1 Myocardiopathies hypertrophiques
1.2 Myocardiopathies congestives
   

1.3 Myocardiopathies restrictives (rares)
2 Enquête étiologique

Le tableau clinique est celui d'une insuffisance cardiaque aiguë, en apparence isolée, avec ou sans souffle systolique.

La radiographie montre un gros coeur.

L'électrocardiogramme montre une tachycardie avec troubles de repolarisation ventriculaire.

Nous verrons l'importance de l'échocardiogramme.

Devant un tableau de myocardiopathie, deux étapes successives :
- connaître le type physiopathologique de l'atteinte du myocarde,
- faire une enquête étiologique après l'étape précédente.
1 Type physiopathologique : intérêt de l'échocardiogramme
Les myocardiopathies peuvent être hypertrophiques (non obstructives ou obstructives), congestives ou restrictives : l'échocardiogramme permet de distinguer :
1.1 Myocardiopathies hypertrophiques :
- obstructives : l'échocardiogramme montre l'hypertrophie septale et les signes d'obstruction sous-aortique ; l'investigation endocavitaire n'est plus indispensable.

- non obstructives : en règle dépistées par l'échocardiogramme lors d'examens systématiques dans les familles atteintes de myocardiopathie.
1.2 Myocardiopathies congestives :
L'échocardiogramme montre :
- l'amincissement des parois,
- la dilatation énorme des cavités,
- l'hypokinésie,
- l'effondrement des indices de contractilité.
1.3 Myocardiopathies restrictives (rares) :
- Aspect d'adiastolie à l'échocardiogramme : oreillette dilatées, petit ventricule.
- Diagnostic différentiel avec la péricardite contrictive.
2 Enquête étiologique
Etude des antécédents : recherche d'une maladie génétique.

La clinique recherchera un obstacle organique ou fonctionnel retentissant sur le ventricule gauche : rétrécissement aortique, coarctation, hypertension artérielle.

L'électrocardiogramme peut montrer un aspect d'infarctus du myocarde. Nous avons vu cette possibilité chez le nouveau-né : ischémie myocardique transitoire (voir chapitre de néonatologie).
Penser à une naissance anormale de la coronaire gauche : l'aortographie sus-sigmoïdienne assurera le diagnostic.
La maladie de Kawasaki peut donner un tel aspect : maladie aiguë inflammatoire, d'étiologie inconnue, elle peut s'accompagner de lésions des artères coronaires (sténose, anévrisme).

Des examens paracliniques pourront aiguiller vers l'étiologie :
- test de la sueur : mucoviscidose,
- détection d'une hypothyroïdie : T3, T4, TSH,
- biopsie musculaire : surcharge glycogénique d'une maladie de Pompe ; surcharge lipidique d'un déficit en Carnitine,
- par élimination sera évoqué le diagnostic de myocardite infectieuse, contexte infectieux, épreuves sérologiques... aideront au diagnostic.

Sont devenues rares les myocardites rhumatismales (RAA), diphtérique, thyphique.
Par contre, les myocardites virales sont plus fréquentes souvent après un épisode ORL ou broncho-pulmonaire, parfois associées à des signes de pneumopathie.
Les examens sérologiques pourront détecter de nombreux virus, ECHO, grippe, sourtout virus Coxsackie. Le pronostic est variable ; parfois décès rapide ; d'autres fois évolution avec rechute ou guérison sans séquelle.

Le traitement est celui de l'insuffisance cardiaque avec, dans les formes graves, corticoïdes (de courte durée) sous antibiotique de couverture. Le traitement de l'insuffisance cardiaque doit être prolongé.

Si le bilan est négatif, on évoque une myocardiopathie primitive d'évolution variable, mais à pronostic lointain réservé.
Atteintes du péricarde
C. Almange

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1 Epanchements
1.1 Le syndrome péricardique
   

1.2 Variétés étiologiques
2 Péricardite constrictive (rare)
Mis à part les malformations qui sont rares (aplasie, diverticule, kyste pleuro-péricardique), deux mécanismes peuvent entraîner une adiastolie :
- les épanchements abondants par tamponnade,
- la péricardite constrictive (sclérose et/ou clacification).
1 Epanchements
Deux faits importants nouveaux :
- l'un diagnostique : l'intérêt de l'échocardiographie,
- l'autre étiologique : fréquence actuelle du syndrome post-péricardotomie.

Rareté actuelle des péricardites RAA et tuberculeuse, toujours penser à :
- une péricardite purulente chez le nourrisson,
- une péricardite primitive ou virale chez l'enfant,
- une péricardite des collagénoses ou de l'arthrite rhumathoïde.
1.1 Le syndrome péricardique
1.1.1 Peut-être discret
Evoluant à bas bruit, peu de signes fonctionnels, diagnostic sur radio, sur ECG et surtout échocardiogramme.
1.1.2 Le plus souvent parlant :
- signes généraux et fonctionnels :

    * chez le nourrisson : syndrome infectieux avec détresse respiratoire, polypnée, signes digestifs,
    * chez l'enfant plus grand : douleur, dyspnée, fièvre,

- signes cliniques : frottement péricardique, coeur assourdi, signes de tamponnade, stase veineuse : jugulaires saillantes, foie augmenté de volume, reflux hépato jugulaire , collapsus artériel : pouls petit, pouls paradoxal, chute de la tension artérielle.
- radiographie : volume cardique globalement augmenté, importance surtout d'ordre évolutif, variation du volume cardique aux RP successives. En ampli de brillance : diminution des battements.
- ECG : trouble de la repolarisation ventriculaire, microvoltage.
- Echocardiographie : irremplaçable :

    * signes qualitatifs et quantitatifs en TM et bi-dimensionnel : décollement, (= espace clair péricardique)
    * intérêt évolutif : pour diagnostic de rechute, intérêt pour juger de la tolérance hémodynamique.

1.2 Variétés étiologiques
1.2.1 Purulente :
signes infectieux : tableau de septico pyohémie associé au tableau cardiaque.
Traitement : antibiothérapie et drainage chirurgical.
1.2.2 Tuberculeuse :
surtout dans les 2 ans suivant une primo-infection, tableau parfois de polysérite, risque de méconnaître la localisation péricardique.
Traitement : antibiotiques spécifiques, surveillance à long terme par échocardiographie : risque de constriction.
1.2.3 La péricardite aiguë d'allure primitive
(péricardite aiguë idiopathique, péricardite bénigne, péricardite à rechute) :
- la plus fréquente donne un tableau clinique net,
- le diagnostic étiologique : le plus souvent d'origine virale (coxsackie, myxo-virus, mononucléose infectieuse).
Parfois aucune étiologie n'est retrouvée : l'hypothèse immunoallergique.

L'évolution est en règle bénigne. Mais des accidents évolutifs sont possibles :
- la tamponnade : dyspnée intense, distension des veines jugulaires, pression veineuse élevée,
- évolution vers la constriction ultérieure,
- surtout risque de récidive.
Le traitement comporte : repos, éviter la corticothérapie : risque de forme cortico-dépendante, utiliser les anti-inflammatoires non cortisoniques, aspirine, INDOMETACINE (INDOCID®).
1.2.4 Immunologie
Maladie de Système :
- péricardite du RAA : devenue rare, tableau parfois de pancardite,
- arthrite rhumatoïde (maladie de Still), pas d'atteinte des autres tuniques du coeur,
- collagénose : sclérodermie, lupus, périartérite noueuse.
1.2.5 Syndrome post-péricardotomie :
Dans le cadre d'un syndrome inflammatoire survenant dans 10 à 30 % des opérations sous C.E.C.
- diagnostic : échocardiographie,
- traitement favorable par anti-inflammatoire non corticoïde (risque de rechute), parfois tamponnade,
- pathogénie : mécanisme auto-immunologique, comme le syndrome de Dressler post-infarctus.
1.2.6 Autres épanchements :
Radique (surveillance échographique) ; urémique, des cardiopathies congénitales par obstacle à l'éjection du ventricule gauche ; hémopéricarde (trauma ; hémopathie), tumeur (tératome du péricarde).
2 Péricardite constrictive : rare
Les feuillets épaissis, symphysés, parfois calcifiés gênent le remplissage diastolique : adiastolie (intérêt de l'échographie).
Cause : tuberculose ; péricardite purulente, souvent cause inconnue, penser au syndrome de Mulibrey : syndrome malformatif associé avec nanisme.
Traitement : si constriction : décortication du péricarde.
Atteintes de l'endocarde
C. Almange

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 10 mars 1999

1 Cardites rhumatismales
1.1 Au cours d'une crise de R.A.A
1.2 En dehors de la crise de R.A.A
   

1.3 Diagnostic ultrasonique
1.4 Traitement
2 Endocardite d'Osler
1 Cardites rhumatismales
Le rhumatisme articulaire aigu est bien moins fréquent que naguère mais il n'a pas disparu et revêt souvent maintenant des aspects atypiques et trompeurs.
1.1 Au cours d'une crise de R.A.A.
- Manifestée par des signes cliniques (fièvre, douleurs articulaires, asthénie) et biologiques (syndrome inflammatoire : VS élevée, augmentation de la fibrinémie, des alpha-2 globulines, de la C réactive protéine et élévation des anticorps antistreptococciques : ALSO, antistreptokinases, antihyaluronidases).
- La surveilance attentive du coeur permettra de déceler les signes évocateurs d'une cardite.
1.1.1 A l'auscultation
- assourdissement des bruits du coeur,
- souffle systolique, de caractères variables et qui ne possède pas encore à ce moment la signification d'une lésion orificielle. Il traduit l'oedème de l'appareil valvulaire. Son évolution sera variable : il peut disparaître définitivement, il peut persister sans changement ou en se modifiant prendre les caractères typiques d'une insuffisance mitrale. Il peut enfin disparaître mais être remplacé quelques années plus tard par les signes d'un rétrécissement mitral ou aortique.
- souffle diastolique : plus rare ; il siège au 2ème E.I. ou au bord gauche du sternum. Il traduit toujours une insuffisance aortique organique.
- le bruit de galop traduit une atteinte myocardique,
- le frottement péricardique enfin affirme l'atteinte péricardique.
1.1.2 La radiograhie du thorax
Peut montrer l'augmentation du volume cardiaque, parfois très importante. Le meilleur argument pour faire la distinction entre myocardite et péricardite est la rapidité de la variation du volume en faveur de cette dernière et surtout l'échographie.
1.1.3 L'ECG
L'allongement du PR, très évocateur du R.A.A., n'est cependant pas forcément le témoin d'une atteinte myocardique. Par contre, les autres troubles de la conduction, certes plus rares, sont caractéristiques de l'atteinte du myocarde, en l'absence, bien sûr, de traitement digitalique. Les troubles de la repolarisation peuvent être liés soit à une péricardite, soit à une myocardite.

AU TOTAL : tous ces signes d'atteinte cardiaque doivent faire redouter la constitution de séquelles valvulaires car les trois tuniques du coeur sont habituellement touchées. De plus, l'absence complète de signes cardiaques au cours d'une crise de RAA ne permet pas d'affirmer l'absence de cardite et cela justifie la surveillance pendant plusieurs années pour dépister l'apparition de séquelles valvulaires. Il est important, d'autre part, de souligner la fréquence des récidives des cardites qui justifient la surveillance et traitement préventif prolongés.
1.2 En dehors de la crise de R.A.A.
La découverte d'une insuffisance ou d'un rétrécissement mitral, d'une insuffisance ou d'un rétrécissement aortique fait rechercher une étiologie rhumatismale à ces cardiopathies dont on sait qu'elles sont des séquelles fréquentes de R.A.A..
Sachant que le R.A.A ne se rencontre guère avant 3 ans, et qu'il faut plusieurs années pour constituer un rétrécissement, ce problème ne se pose pas avant 3 ou 4 ans pour les insuffisances mitrales ou aortiques et 6 ou 7 ans pour les rétrécissements.
L'interrogatoire pourra retrouver des signes évocateurs d'une crise rhumatismale. Parfois, on pourra trouver biologiquement un syndrome inflammatoire traduisant l'évolutivité persistante des lésions.
1.3 Diagnostic ultrasonique
Important surtout au stade séquellaire.
Pour l'IM et l'IA l'échocardiographie chiffre la dilatation des cavités, montre la contractilité du ventricule gauche. Intérêt donc pour la surveillance évolutive pour indiquer l'heure de l'intervention.
Pour le RM l'échocardiographie montre la mobilité de valves mitrales, l'état de l'appareil sous valvulaire.
1.4 Traitement
1.4.1 De la crise aiguë :
1.4.1.1 Traitement anti-inflammatoire
- corticoïdes, 2 mg/kg/j pendant 15 jours puis à doses dégressives jusqu'à un total de 8 semaines.
- on associera calcium, vitamine D, potassium et régime désodé.
1.4.1.2 Traitement anti-streptococcique
- pénicilline G, I.M., 1 000 000 U./j ou pénicilline V per os 2 000 000 U./j.
1.4.1.3 Repos strict au lit
Tant que persiste un syndrome inflammatoire.
1.4.1.4 Traitement tonicardiaque (DIGOXINE)
En cas de défaillance cardiaque ; mais ce traitement doit être prudent.
1.4.2 Prophylaxie des récidives
C'est l'élément essentiel du traitement.
On instituera jusqu'à la puberté et pendant 5 ans au moins, une thérapeutique par la Pénicilline :
- soit BENZATHINE-PENICILLINE (extencilline) 1 200 000 U en IM toutes les trois semaines,
- soit Pénicilline V, 500 000 U/j per os, si les injections sont mal tolérées, ou si la famille est particulièrement scrupuleuse.
En cas d'allergie à la pénicilline on utilise l'Erythromycine.
Toute angine, tout traitement dentaire ou ORL doit s'accompagner d'un renforcement de cette thérapeutique.
Ce n'est qu'en pensant au R.A.A. même lorsqu'il revêt un aspect atypique et en lui appliquant strictement le traitement curatif et préventif qu'on peut faire disparaître ou minimiser les redoutables séquelles cardiaques de la maladie de Bouillaud.
2 Endocardite d'Osler
Se voit à tout âge.
Diagnostic : y penser devant un syndrome fébrile chez un enfant atteint de cardiopathie congénitale ou acquise ; hémoculture ; échocardiographie : masses échogènes mobiles (végétations) ; intérêt de la prophylaxie (angines, soins dentaires, etc...).
Troubles du rythme
C. Almange

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 10 mars 1999

1 Spontanés
1.1 Période néonatale : tachycardies
   

1.2 Bloc auriculo-ventriculaire congénital
2 Post-opératoire
1 Spontanés
1.1 Surtout période néonatale : Tachycardies
- Supraventriculaires surtout évoluant rapidement vers l'IC,
Traitement par DIGOXINE ; si échec AMIODARONE
10 % : cardiopathies congénitales sous-jacentes - CIA, Ebstein, transposition corrigée, MCO.

- Ventriculaire, rarement.
Toute tachycardie ectopique = echo pour rechercher une myocardiopathie sous-jacente.
1.2 Bloc auriculo-ventriculaire congénital
- 30% cardiopathie congénitale associée (transposition corrigée des vaisseaux).
- Parfois secondaire à une maladie auto-immunologique de la mère (lupus, polyarthrite) = passage d'immun-complexes circulants transplacentaire.
- Etude systématique du sérum des mères.
- Bon pronostic.
- Mais parfois insuffisance cardiaque - syncope : dans ces cas PaceMaker quelque soit l'âge.
2 Post-opératoire
- BAV : mettre un stimulateur (CIV, CAV, Fallot, transposition corrigée).
- BB : peuvent se compléter cause de mort subite.
- Maladie de l'oreillette : alternance de tachycardie et de bradycardie :

    * accès tachycardique : DIGOXINE, AMIODARONE
    * accès de bradycardie : stimulateur,
    * cause : CIA, Senning ou Mustard, Blalock-Hanlon.

Hypertension artérielle de l'enfant
C. Almange

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 10 mars 1999

1 Symptomatologie
2 Etiologie
   

2.1 HTA transitoire
2.2 HTA permanente
L'HTA est rare chez l'enfant, mais elle doit être décelée le plus rapidement possible par la mesure systématique de l'HTA qui fait partie de l'examen de l'enfant comme celui de l'adulte. Quand on a découvert l'HTA, il faut s'acharner à en trouver la cause car l'hypertension de l'enfant est pratiquement toujours secondaire.
1 Symptomatologie
Elle est souvent peu évocatrice :
- céphalées : douleurs abdominales
- insuffisance cardiaque
- signes nerveux : coma, convulsions.

Techniques de mesure (cf examen clinique).
2 Etiologie
2.1 H.T.A transitoire
2.1.1 Causes rénales : Glomérulonéphrites aiguës, syndrome néphrotique.

2.1.2 Causes nerveuses : Paralysie respiratoire, tumeurs cérébrales, hématomes sous-duraux, HT intra-crânienne.

2.1.3 Intoxication : Saturnisme, hypervitaminose D, corticothérapie.
2.2 H.T.A permanente
2.2.1 Causes cardio-vasculaires : Coarctation de l'aorte : cf cardiopathies par obstacle sans shunt, périartérite noueuse.
2.2.2 Causes rénales :
- insuffisance rénale globale,
- néphropathie unilatérale :

    * pyélonéphrite unilatérale,
    * anomalie vasculaire rénale,
    * petit rein dysplasique unilatéral.

2.2.3 causes endocriniennes :
- hyperplasie surrénale congénitale,
- phéochromocytome, sympathoblastome.

2.2.4 l'HTA essentielle est fréquente : la plupart des hypertensions artérielles de l'adulte commencent dès l'adolescence.

AU TOTAL : les deux causes principales de l'HTA permanente à rechercher chez l'enfant sont : la coarctation de l'aorte et les néphropathies unilatérales.
Méningites purulentes du nourrisson et de l'enfant
S. Peudenier

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 27 février 1999

1 Diagnostic clinique
1.1 Chez l'enfant
1.2 Chez le nourrisson
2 Les examens complémentaires
2.1 Le fond d'oeil
2.2 La ponction lombaire
2.3 Autres examens complémentaires
2.4 Recherche d'une porte d'entrée
3 Germes en cause
4 Diagnostic différentiel
4.1 La méningite virale
4.2 Les encéphalites virales ou post infectieuses
   

4.3 La maladie de Lyme
4.4 La méningite tuberculeuse
4.5 L'hémorragie méningée
4.6 Processus expansif intracérébral
5 Evolution
5.1 Evolution favorable d'emblée
5.2 La méningite fulminante
5.3 Complications
6 Traitement
7 Prévention des infections à méningocoques
7.1 Conduite à tenir chez le malade
7.2 Conduite à tenir chez les sujets contacts

Les méningites bactériennes sont des affections fréquentes en pédiatrie. Elles touchent particulièrement l'enfant de moins de 5 ans. Malgré les antibiotiques, elles restent grevées d'une mortalité et d'une morbidité importante, surtout chez le petit nourrisson. L'amélioration des résultats repose sur 1) la précocité du diagnostic, 2) l'identification du germe en cause, 3) la mise en route rapide d'un traitement adapté.
1 Diagnostic clinique

Le diagnostic est d'autant plus délicat que l'enfant est plus jeune.
1.1 Chez l'enfant

Le syndrome méningé associe des céphalées intenses, diffuses, des rachialgies, des nausées ou des vomissements. La constipation est un signe classique mais tardif qu'il ne faut pas attendre pour évoquer le diagnostic. Le syndrome méningé est associé à une hyperthermie dépassant souvent 38°5 C et à une altération de l'état général.

A l'examen, l'enfant est hyperalgique, couché en chien de fusil, évitant le bruit et la lumière. La nuque est raide, douloureuse. Le signe de Kernig (l'enfant fléchit les genoux si on le fait asseoir sur le lit) est fréquemment retrouvé. Le signe de Brudzinski (la flexion passive de la nuque fait plier les genoux) est plus rare. Les troubles vasomoteurs tels qu'une alternance de pâleur et de rougeur du visage, une raie vasomotrice sont inconstants. Des signes pouvant orienter vers une étiologie particulière comme un purpura ou une otite sont systématiquement recherché lors de l'examen général de l'enfant.
1.2 Chez le nourrisson

Le tableau est polymorphe et donc trompeur. La méningite est facilement évoquée devant un accident neurologique aigu fébrile: convulsions fébriles, troubles de la conscience, parfois même hémiplégie ou paralysie oculo-motrice. Le diagnostic est plus difficile lorsque la symptomatologie digestive, la fièvre ou les troubles vaso-moteurs sont au premier plan. Les accès de cyanose, de pâleur, l'existence d'une raie méningitique sont des signes importants chez le nourrisson. L'état de l'enfant, bien que rarement spectaculaire, est différent de son état habituel. La somnolence , les cris ou les gémissements traduisent la céphalée et l'hyperesthésie cutanée. La raideur de la nuque est souvent remplacée par une hypotonie. La fontanelle est anormalement tendue y compris en dehors des cris et en position assise. L'examen général recherche, là aussi, des signes ORL ou cutanés associés.
2 Les examens complémentaires

C'est une urgence diagnostique. La ponction lombaire, en milieu hospitalier, s'impose devant toute suspicion de méningite.

2.1 L'examen préalable du fond d'œil n'est pas nécessaire sauf s'il existe un doute sur un processus expansif intracérébral avec hypertension intracranienne surtout chez l'enfant ayant une fontanelle fermée. Ce doute incitera d'ailleurs plus à pratiquer un scanner cranien qu'un fond d'œil.

2.2 La ponction lombaire ramène un liquide hypertendu, trouble ou franchement purulent qui sera rapidement acheminé au laboratoire.

    *
      Hypercytose importante : 102 à 103 cellules par mm3 avec une nette prédominance de polynucléaires altérés [normale < 5 cellules/mm3].
    *
      Hyperprotéinorachie > 1 g/l [normale <0,5 g/l]
    *
      Hypoglycorachie qui doit toujours être interprêtée en fonction de la glycémie prélevée au même moment (< 33% de la glycémie)
    *
      Taux de chlorures bas
    *
      L'analyse bactériologique permet de faire le diagnostic dans la majorité des cas, parfois dès l'examen direct mais le plus souvent après la culture. Un antibiogramme de la souche isolée est réalisé systématiquement afin de détecter une résistance due notamment à la secrétion de b-lactamases. La mise en évidence du germe peut être difficile à cause de sa fragilité (c'est le cas du méningocoque) mais un traitement antibiotique préalable n'est qu'exceptionellement la cause de la négativité de la culture. La détection des antigènes solubles dans le liquide céphalo-rachidien permet habituellement de confirmer la nature bactérienne de la méningite. La recherche d'antigènes solubles est possible pour le méningocoque A et C ( les résultats sont moins bons avec le groupe B), le pneumocoque, l'hémophilus influenzæ, le streptocoque B et le coli K1.

2.3 D'autres examens complémentaires sont effectués systématiquement :

    *
      Hémocultures prélevées au moment des pics fébriles et/ou des frissons. Elles peuvent permettre d'isoler le germe responsable de la méningite.
    *
      Hémogramme : hyperleucocytose à polynucléaires, plus rarement leucopénie, thrombopénie.
    *
      C réactive protéine élevée
    *
      Hémostase
    *
      Ionogramme sanguin pour évaluer l'importance d'un syndrome d'antidiurèse.

2.4 Recherche d'une porte d'entrée :

Examen et prélèvements bactériologiques ORL, éventuellement des radiographies des sinus et du thorax.
3 Germes en cause

La nature du germe causal peut être envisagée sur des arguments épidémiologiques : âge (Table 1), contexte épidémique,ou sur des arguments cliniques.

    *
      En faveur du méningocoque, plaident les signes cutanés : purpura non thrombopénique, pétéchial ou nécrotique, herpès naso-labial, la notion d'arthralgie et l'existence d'un contage.
    *
      La méningite à pneumocoque, survient parfois sur un terrain débilité : enfant splénectomisé, drépanocytaire homozygote ou immunodéprimé. Une porte d'entrée ORL, pulmonaire ou ostéo-méningée est souvent retrouvée. Un coma profond, des signes neurologiques initiaux sont fréquents.
    *
      La méningite à hémophilus est fréquemment accompagnée ou précédée d'otite, le début est souvent insidieux.
    *
      Les méningites à Listéria peuvent se rencontrer chez l'enfant en dehors de la période néo-natale. Elles associent des signes du tronc cérébral et un liquide céphalo-rachidien particulier : hyperlymphocytose, hyperprotéinorachie et hypoglycorachie.
    *
      L'isolement d'un germe inhabituel doit faire rechercher un foyer septique profond ou une brèche méningée.

Table 1 : Etiologie des méningites bactériennes en fonction de l'âge de l'enfant.
 
Nouveau-né
(£ 2 mois)
   
Enfant
(> 3mois)
- Entérobactéries à Gram négatif
(E. Coli est le plus fréquent)
- Streptocoque B
- Listéria monocytogenes
   
52 %

12 %
8 %
   
- Méningocoque
- Pneumocoque
- Haemophilus influenzae de type B (HI)

Les pourcentages respectifs concernant la fréquence des méningites à méningocoque, pneumocoque et HI chez l'enfant, sont en cours de détermination. Grâce au vaccin anti-hémophilus, ce germe a perdu la première place dans l'étiologie des méningites bactériennes à cette tranche d'âge.
4 Diagnostic différentiel
4.1 La méningite virale se présente souvent comme un tableau infectieux peu marqué et bien supporté cliniquement. La méningite ourlienne peut, cependant, donner lieu à des signes méningés sévères. Le liquide céphalo-rachidien est clair, l'hypercytose dépasse rarement 300 éléments par mm3 avec une prédominance de lymphocytes. La protéinorachie est normale ou modérément élevée (< 1g/l), la glycorachie et le taux de chlorures sont normaux. L'immunoélectrophorèse comparative du sang et du LCR montre une sécrétion intrathécale d'immunoglobulines.

4.2 Les encéphalites virales ou post infectieuses se distinguent par le contraste entre l'intensité des troubles de la conscience et l'aspect peu perturbé du liquide céphalo-rachidien (hyperlymphocytose modérée, proteinorachie normale ou peu augmentée, glycorahie normale)

4.3 La maladie de Lyme, chez l'enfant, se manifeste volontiers par une méningite lymphocytaire sans radiculalgies.

4.4 La méningite tuberculeuse, la méningite à cryptoccoque, à candida albicans et les autres méningites mycotiques sont rares. Elles surviennent sur un terrain débilité et l'analyse du liquide céphalo-rachidien permet là encore d'affirmer le diagnostic.

4.5 L'hémorragie méningée est à évoquer devant un syndrome méningé pas ou peu fébrile. L'aspect du liquide céphalo-rachidien affirme le diagnostic.

4.6 Un processus expansif intracérébral peut parfois être discuté à la période initiale mais le contexte et les signes de localisation neurologique sont habituellement évocateurs. Le scanner crânien ou l'échographie trans-fontanellaire sera fait au moindre doute avant la ponction lombaire.
5 Evolution

5.1 L'évolution sous traitement est, en règle générale, favorable lorsque le délai de prise en charge n'excède pas 24 heures. L'analyse des données des premières 48 heures permet de dégager des éléments de bon ou mauvais pronostic ( Table 2). La persistance d'une fièvre modérée sous traitement n'a pas de caractère péjoratif et n'empêche pas l'arrêt du traitement si le LCR à 48 heures est stérile. Une ponction lombaire est effectuée après 48h de traitement. Elle ne sera pas renouvelée à l'arrêt de celui-ci si l'évolution clinique est simple et la culture à 48h stérile. La normalisation de la CRP est un bon indice de guérison.

L'électroencéphalogramme et le scanner crânien ne sont à prévoir qu'en cas de complications neurologiques. Un audiogramme est programmé systématiquement 3 semaines après la guérison de la méningite à cause du risque de surdité post-méningitique (en dehors de la méningite à méningocoque).

Table 2 : Facteurs cliniques et biologiques de mauvais pronostic
dans la méningite bactérienne de l'enfant.
 

  Clinique
    - Retard au diagnostic et à la mise en route d'un traitement efficace +++.
- Jeune âge de l'enfant
- Terrain débilité (immuno déprimé, splénectomisé, drépanocytaire homozygote)
- Signes neurologiques (coma profond = G < 7), convulsions, déficit neurologique.
- Purpura fulminans
- Défaillance cardio-respiratoire
Biologie
    - Germe en cause : pneumocoque, listéria, BG-.
- Culture du LCR toujours positive après 48h de traitement
- > 107 CFU/ml de bactéries dans le LCR de départ (a)
- Glycorachie effondrée (< 0,1 g/l) (a)
a)Une relation significative entre la forte concentration initiale en germe, l'effondrement de la glycorachie dans le LCR et l'apparition d'une surdité et de séquelles neuroloqiques a été montré pour l'hémophilus influenzæ.

5.2 Parmi les formes graves d'emblée, il faut souligner la méningite fulminante qui touche essentiellement l'enfant de moins de 2 ans. Sa mortalité reste de 40% malgré les progrès de la réanimation. Elle est due au méningocoque dans 70% des cas. Elle se caractérise par la brutalité de son début, la rapidité de son évolution et les signes cutanés qui l'accompagnent. Typiquement, il s'agit d'un enfant jusque là en bonne santé qui présente brutalement une fièvre élevée et un facies très altéré. Les douleurs rachidiennes et les arthralgies sont inconstamment retrouvées. La dissociation qui existe entre la pauvreté des signes méningés et l'impression de gravité globale lorsqu'on voit l'enfant doit faire évoquer le diagnostic de méningococcémie. On doit alors rechercher le purpura cutané qui peut être pétéchial, écchymotique ou nécrotique. Les taches cutanées doivent être immédiatement entourées de crayon à bille pour objectiver l'apparition d'éléments nouveaux. La défaillance hémodynamique par choc toxi-infectieux est imminente. L'enfant doit être évacué le plus vite possible vers un hôpital doté d'un service de réanimation pédiatrique par le SAMU, le SMUR local ou le médecin lui-même si une équipe médicalisée n'est pas immédiatement disponible.
5.3 Complications

Malgré les progrès de la prise en charge médicale, le taux de séquelles neurologiques et sensorielles reste voisin de 20%, toutes formes confondues. Les complications peuvent survenir pendant la phase aiguë de la maladie mais aussi à distance de l'épisode infectieux.

1) Des troubles sévères de la conscience rencontrés essentiellement dans les méningites à pneumocoque.

2) Les convulsions

3) Les signes neurologiques focaux de la période aiguë peuvent traduire une nécrose corticale ou une thrombophlébite infectieuse. Lorsqu'ils apparaissent secondairement, ils doivent faire craindre un abcès cérébral, un empyème sous-dural ou un ramollissement cérébral aseptique.

4) L'œdème cérébral révélé par des signes précoces d'hypertension intracranienne est une complication rare mais redoutable qui peut provoquer le décès par engagement des lobes temporaux ou des amygdales cérébelleuses. Il peut être favorisé par un remplissage vasculaire excessif de liquide hypotonique.

5) Les collections liquidiennes péri-cérébrales touchent surtout le nourrisson de 6 à 12 mois. Elles sont habituellement asymptomatiques ou suspectées devant une reprise de la symptomatologie, une augmentation du périmètre crânien. Le diagnostic, dans les formes symptomatiques, est fait sur l'imagerie et sur la ponction sous-durale.

6) La ventriculite est une complication observée essentiellement chez le nouveau-né. Elle évolue vers le cloisonnement, l'hydrocéphalie.

7) Les complications sensorielles avec surtout l'atteinte de la VIIIème paire crânienne. Le risque de surdité est de 10 % chez l'enfant, il dépend du germe en cause et semble plus fréquent avec le pneumocoque. Le déficit est précoce dans le cours de la maladie et il ne semble pas favorisé par un retard à la mise en route du traitement. Une ataxie précoce mais souvent transitoire est parfois observée.

8) Des séquelles neuro-psychiques avec déficit intellectuel sont retrouvés chez 5 à15% des enfants. Ce risque augmente avec le jeune âge.

9) Enfin, le risque de récidive existe. Il doit faire rechercher une porte d'entrée ORL, une brèche ostéo-méningée d'origine traumatique ou malformative, surtout s'il s'agit du même germe qui est souvent le pneumocoque. Plusieurs récidives à germes différent doivent faire rechercher un déficit immunitaire.
6 Traitement

Le traitement doit être commencé dès la constatation d'un liquide céphalo-rachidien suspect. Il a pour objectifs (1) la lutte contre l'infection, (2) la prévention de l'œdème cérébral et (3) des convulsions.

La notion de barrière hémato-méningée impose l'utilisation de fortes doses d'antibiotiques par voie intra-veineuse pendant toute la durée du traitement. L'antibiothérapie intraveineuse est, initialement, à large spectre en attendant les résultats de la bactériologie. Son schéma varie en fonction de l'age de l'enfant et de la probabilité épidémiologique de rencontrer tel ou tel germe.

Chez l'enfant de moins de trois mois, on prescrit une bi-antibiothérapie associant ampicilline/aminoside ou céphalosporine de troisième génération (C3G)/aminoside. Une triple antibiothérapie ( ampicilline-C3G-aminoside) est même recommandée devant l'augmentation des souches d'entérocoques productrices de b -lactamases mais l'ampicilline reste nécessaire en raison de la fréquence du Listéria, résistant aux C3G, dans cette tranche d'âge.

Chez l'enfant de plus de 3 mois, l'usage des C3G en première intention se généralise devant le nombre de plus en plus important d'Hæmophilus secréteurs de b -lactamases (40 à 50 %). Le céfotaxime ( Claforan°) ou le ceftriaxone (Rocéphine°) sont indifféremment utilisés aux doses respectives de 200 mg/Kg/j en 4 injections intraveineuses. et 100 mg/Kg/j en 1 injection intraveineuse.

Une bi-antibiothérapie associant un aminoside aux C3G est préconisée dans le concensus de 1996 : nétilmicine (nétromicine°) 3mg/Kg/12h.

La fréquence des résistances du pneumocoque fait prescrire de la vancomycine à la dose de 60 mg/Kg/A4h en IV continu de première intention lorsqu'il existe des arguments cliniques (terrain, coma…) ou bactériologiques (CG + à l'examen direct).

En cas de suspicion de listéria, il faut ajouter l'amoxicilline (Clamoxyl : 50 mg/Kg/6h).

Après 48h (résultat des cultures), l'antibiothérapie peut être simplifiée. Dans les méningites à méningogoque, la C3G est remplacée par l'ampicilline ou l'amoxicilline à la dose de 200 mg/Kg/j en 4 injections intraveineuses, et dans les méningites à Listéria du nouveau-né une bi-antibiothérapie associant ampicilline/aminoside est conservée.

La durée du traitement intraveineux est fixé à 7 jours pour les méningites à méningocoque, 15 à 20 jours pour le listéria, 10 jours pour toutes les autres.

Les méningites bactériennes à pneumocoque sont traitées par claforan (300 mg/Kg/J si la CMI est inférieure à 1 mg/L, ou comprise entre 0,1 et 1 mg/l. Le vancomycine est poursuivi si la CMI est supérieure à 1 mg/l. Un relai antibiotique per os est en général prescrit, même si sa nécessité n'est pas clairement démontrée. Les méningites à Hæmophilus b -lactamase négatifs, à pneumocoque, à méningocoque sont traitées 10 jours per os par ampicilline ou amoxicilline à la dose de 100mg/Kg/j en 4 prises. Les méningites à Hæmophilus b -lactamase positif n'ont aucun traitement secondaire per os en l'absence de C3G active sur ce germe per os.

Une prévention systématique des convulsions par phénobarbital peut se discuter chez l'enfant de moins d'un an. Une dose de charge de 1,5 cg/Kg par voie intraveineuse est effectuée dès l'admission et un relai per os à la dose de 0,5cg/Kg/j débuté le lendemain jusqu'à la guérison clinique de la méningite.

Enfin un traitement par dexaméthasone est entrepris par voie intraveineuse (0,15 mg/Kg toutes les 6 h pendant 2 jours). Celui-ci empêche l'élévation dans le LCR, du TNFa et de l'interleukine 1, à la condition que la première injection est effectuée 10 minutes avant le début de l'antibiothérapie. Le traitement par dexaméthasone diminuerait le risque de surdité et de séquelles neurologiques post-méningitique, notamment dans le cadre de la méningite à hémophilus influenzae.
7 Prévention des infections à méningocoques

(cf. circulaire DGS/PEGE/1C du 5 février 1990)
7.1 Conduite à tenir chez le malade

    *
      le malade doit être hospitalisé en urgence dès la suspicion du diagnostic,
    *
      à l'hôpital, les examens offrant le maximum de chances d'isoler la bactérie et d'identifier le sérogroupe doivent être effectués : ponction lombaire, hémocultures, prélèvement au niveau du rhino-pharynx postérieur (si possible avant antibiothérapie), recherche d'antigènes solubles dans le LCR, le sang et les urines. En cas de décès avant la ponction lombaire, celle-ci doit être pratiquée en post-mortem pour affirmer le diagnostic et identifier le sérogroupe :
    *
      le sérogroupage de la souche doit être effectué sans exception dès l'isolement de la bactérie. La souche doit être systématiquement envoyée pour sérotypie au Centre national de référence du méningocoque (Dr Riou, Institut Pasteur, 25, rue du Docteur Roux, 75724 Paris Cédex 15. Tél. : 45/68/83/30),
    *
      le cas doit être déclaré par téléphone au médecin de la DDASS dès l'isolement du méningocoque. Le sérogroupe doit également être communiqué par téléphone au médecin de la DDASS dès son obtention. Le questionnaire de déclaration doit être soigneusement rempli et adressé à la DDASS juste avant la fin de l'hospitalisation (ou après le décès),
    *
      à la suite de l'antibiothérapie à but curatif, le malade doit bénéficier d'un traitement antibiotique prophylactique selon les mêmes modalités que pour les sujets contacts (voir ci-dessous). Il pourra réintégrer une collectivité scolaire dès la fin du traitement.

7.2 Conduite à tenir chez les sujets contacts du malade
7.2.1 Définition des sujets contacts

Les mesures de prophylaxie doivent être proposées aux sujets contacts définis de la façon suivante.

- En ville :

    *
      personnes vivants au domicile du malade ou ayant dormi dans la même pièce que le malade dans les 10 jours précédant l'hospitalisation,
    *
      personnes exposées aux sécrétions oropharyngées du malade dans les 10 jours précédant son hospitalisation ; camarades de jeux habituels du malade, "flirts" ou partenaires sexuels d'un cas adolescent ou adulte, sujets ayant partagé une soirée dansante avec le malade,
    *
      personnes ayant pratiqué des manoeuvres de réanimation impliquant un contact étroit avec les sécrétions oropharyngées du malade (bouche à bouche, intubation trachéale).

- Dans les pouponnières, crèches et établissements d'enseignement ou d'éducation publics ou privés.

    *
      Dans les établissements scolaires, l'arrêté du 3 mai 1989, précise que les mesures de prophylaxie sont prises à l'initiative de l'autorité sanitaire représentée par la DDASS. Dans les crèches et les pouponnières, les mesures de prophylaxie sont prises par la DDASS en liaison avec le médecin responsable de l'établissement. En pratique, les parents des enfants concernés par la prophylaxie seront destinataires d'une note recommandant une consultation médicale et rappelant les mesures à prendre pour leur enfant.
    *
      Pouponnières, crèches, écoles maternelles. Etant donné la promiscuité étroite existant dans ces établissements et l'âge des enfants, les mesures de prophylaxie seront proposées à la fois aux enfants et au personnel. Aucun nouvel arrivant ne sera admis avant la fin du traitement.
    *
      Ecoles primaires, collèges, lycées. On peut distinguer trois circonstances :
          o
            survenue d'un seul cas : la prophylaxie sera proposée exclusivement aux sujets ayant eu un contact fréquent avec le malade : camarades habituels de jeux ou d'étude, voisins immédiats habituels de réfectoire, au maximum à toute la classe,
          o
            survenue de plusieurs cas dans la même classe : la prophylaxie sera proposée à l'ensemble de la classe et ne devra pas être étendue au reste de l'établissement,
          o
            survenue d'autres cas dans l'établissement : lors de la survenue d'un deuxième cas dans une classe différente de celle du premier malade, les règles de prophylaxie ne seront pas étendues à l'ensemble de l'établissement et concerneront uniquement les élèves des 2 classes et les camarades habituels de jeux, d'étude ou les voisins immédiats habituels de réfectoire des malades.

Les mesures de prophylaxie ne seront proposées à l'ensemble de l'établissement que lorsque 3 cas ou plus surviennent dans cet établissement dans au moins 2 classes différentes, avec un intervalle maximal d'un mois entre le premier et le dernier cas.

    *
      Internats. Outre les sujets définis ci-dessus, les voisins de dortoir du malade seront concernés par des mesures prophylactiques.
    *
      Universités. Une prophylaxie sera proposée exclusivement aux camarades habituels du malade.
    *
      Dans les collectivités d'adultes : les règles de prophylaxie seront recommandées exclusivement en cas de survenue d'au moins un cas secondaire dans la collectivité et ne devront s'appliquer qu'aux sujets ayant des contacts fréquents avec l'un des cas.

7.2.2 Règles de prophylaxie dans l'entourage d'un cas

Les mesures prophylactiques sont d'autant plus efficaces qu'elles sont instituées rapidement. Elles ne présentent plus qu'un intérêt limité si elles sont prises plus de 8 jours après le diagnostic.
7.2.2.1 Chimioprophylaxie

Pour les sujets contacts définis ci-dessus, une chimioprophylaxie sera proposée selon le schéma suivant :

- Rifampicine pendant 2 jours à la dose suivante :

    *
      adulte : 600 mg deux fois par jour.
    *
      enfant de 1 mois à 12 ans : 10 mg/kg deux fois par jour.
    *
      enfant de moins de 1 mois : 5 mg/kg deux fois par jour.

Les contre-indications sont les suivantes : grossesse, maladie hépatique sévère, alcoolisme, porphyries, hypersensibilité à la Rifampicine.
Une précaution d'emploi concernant le port de lentilles de contact est à signaler en raison du risque de coloration définitive de ces lentilles.
Les effets secondaires sont mineurs : coloration orangée des urines et de la salive : interaction avec les contraceptifs oraux.

- En cas de contre-indication à la Rifampicine : Spiramycine pendant 5 jours à la dose suivante :

    *
      adulte : 3 millions d'UI deux fois par jour,
    *
      enfant : 75.000 UI/kg deux fois par jour.

7.2.2.2 Vaccination

Quand un méningocoque du groupe A ou C est isolé chez le malade, dès lors que le sérogroupe est connu, une vaccination sera proposée conjointement à la chimioprophylaxie, pour les sujets contacts :

    *
      âgés de 3 mois ou plus pour le méningocoque A,
    *
      âgé de 1 an ou plus pour le méningocoque C.

Il n'y a pas de contre-indication à cette mesure, y compris lors de la grossesse. La vaccination ne se substitue, en aucun cas, à la chimioprophylaxie dont elle relaie l'effet protecteur.
7.2.2.3 Information et surveillance médicale

Les sujets contacts et les sujets appartenant à la même collectivité que le malade devront être informés sur la maladie et les mesures à prendre. Une surveillance médicale des sujets contacts sera instituée pendant les 15 jours suivant l'application des mesures prophylactiques. Les sujets contacts et les sujets appartenant à la même collectivité que le malade devront consulter un médecin si des symptômes évocateurs apparaissent.
7.2.2.4 Mesures inutiles et à éviter

La désinfection rhinopharyngée, le prélèvement rhinopharyngé des sujets contacts sont inutiles. L'éviction scolaire ou l'isolement des sujets contacts ne sont pas recommandés. Etant donné la fragilité du méningocoque, la désinfection ou la fermeture d'un établissement, y compris scolaire, sont des mesures tout à fait inutiles et injustifiées.
L'extension des mesures prophylactiques à des populations plus larges que celles définies ci-dessus doit être évitée. Cette extension n'a pas de justification épidémiologiquement démontrée tout en représentant un coût pour la collectivité.
Ces recommandations ont reçu l'approbation du Conseil Supérieur d'Hygiène Publique de France, section "prophylaxie des maladies"
Epilepsies de l'enfant
S. Peudenier

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 27 février 1999

1 Sémiologie des crises d'épilepsie
1.1 Crises généralisées
1.2 Crises partielles
1.3 Cas particulier du nouveau-né
1.4 Diagnostic différentiel
2 Classification - Principaux types d'épilepsie
2.1 Classification internationale des épilepsies...
2.2 Quelques épilepsies particulières de l'enfant
   

3 Examens complémentaires
3.1 L'électro-encéphalogramme
3.2 Autres examens
4 Traitement
4.1 Principaux anti-épileptiques
4.2 Principes généraux de conduite de traitement
4.3 Traitement de l'état de mal épileptique

Une crise d'épilepsie correspond à une décharge brutale, hypersynchrone et rythmée de neurones hyperexcitables. La crise d'épilepsie est en général brève, durant de quelques secondes à quelques minutes. Son expression clinique dépend de l'origine et de la diffusion de la décharge neuronale. Les manifestations les plus fréquentes sont des troubles transitoires de la conscience et/ou des phénomènes moteurs tels que des secousses musculaires rythmiques désignées sous le nom de myoclonies, des spasmes toniques, des automatismes moteurs élaborés… Des troubles sensitifs, sensoriels, végétatifs, affectifs sont également possibles. Lorsque les phénomènes tonico-cloniques sont au premier plan, les crises sont désignées sous le nom de convulsions ou de crises convulsives.

Une maladie épileptique est une pathologie chronique due à la répétition des crises d'épilepsie. L'épilepsie est une maladie fréquente dont la prévalence chez l'enfant est estimée à 4 à 5 o/oo. Son incidence moyenne, dans la population générale, est de 20-70/100 00 par an. Elle est plus élevée chez l'enfant, atteignant 134/100 000 par an la première année de vie.

L'âge est un des facteurs déterminants dans la survenue, dans l'expression clinique, électrique et dans le pronostic de la maladie épileptique de l'enfant. La survenue de séquelles est plus fréquente chez l'enfant de moins de 2-3 ans que chez l'enfant plus agé. Aicardi propose ainsi de séparer 4 périodes :

1) De la naissance à 3 mois : la maladie épileptique, souvent secondaire à une pathologie neurologique, est de pronostic sévère.

2) De 3 mois à 3-4 ans : période marquée par la fréquence des crises convulsives occasionnelles (convulsions fébriles…). Les crises d'épilepsies répétées sont souvent dues à une pathologie neurologique organique sous-jacente. Certaines épilepsies sont particulières à cette tranche d'âge : syndrome de West, épilepsies myocloniques, syndrome de Lennox-Gastaud.

3) De 3-4 ans à 9-10 ans : période dominée par les épilepsies cryptogéniques. Des facteurs génétiques sont souvent retrouvés. Par contre, les malformations cérébrales et les maladies neurologiques évolutives sont rares. C'est à cette période que l'on rencontre des syndromes épileptiques bien définis comme l'épilepsie-absence, l'épilepsie rolandique bénigne…

4) De 9-10 ans jusqu'à 19-20 ans : période dominée par les épilepsies généralisées primaires. Les épilepsies partielles témoignent fréquemment d'une lésion cérébrale. C'est aussi pendant cette période que disparaissent les épilepsies transitoires de l'enfance comme l'épilepsie-absence, certaines épilepsies partielles bénignes.
1 Sémiologie des crises d'épilepsie
1.1 Crises généralisées
1.1.1 Crises généralisées tonico-cloniques (CGTC) ou Grand Mal

Chez le grand enfant, elles débutent brutalement par une perte de connaissance entraînant parfois une chute traumatique. Puis se succèdent une phase tonique de 10 à 20 secondes : le corps se raidit, blocage respiratoire avec cyanose, une phase clonique de 30 secondes à 2 minutes : secousses musculaires (clonies) rythmiques généralisées, symétriques avec parfois une morsure de langue, puis une phase de relachement musculaire avec fréquemment une perte d'urines, une respiration ample, bruyante, puis un sommeil post-critique de quelques minutes à 2 ou 3 heures. Après la crise, l'enfant peut revenir rapidement à son état normal ou souffrir de céphalées, de fatique anormale, de confusion mentale, de nausées. Il existe toujours une amnésie de la crise d'épilepsie.

Chez le nourrisson, le déroulement tonico-clonique de la crise n'est pas toujours évident. La phase clonique peut être très brève et la crise est décrite par les parents comme une brusque perte de connaissance suivie d'un enraidissement généralisée du corps ou même d'une hypotonie durant 1 à 2 minutes.
1.1.2 Les autres crises généralisées de l'enfant

Spasmes en flexion : brusque contraction en flexion de la tête, du tronc et des membres durant 1 à 15 secondes. QS Syndrome de West.

Crises atoniques ou atono-myocloniques : consistent en une chute brutale de la tête ou du corps en avant soit par une perte brutale du tonus, soit par une myoclonie massive. Ces phénomènes sont brefs, l'enfant se relève aussitôt. La chute est souvent traumatique, obligeant l'enfant au port d'un casque de protection.

Crises toniques : caractérisées par une hypertonie de l'axe corporel ou de tout le corps.

Absences : il s'agit d'une brève et brutale suspension de conscience. L'enfant arrête l'activité en cours, est comme figé, a le regard fixe et vague. L'épisode dure 5 à 10 seconde puis l'enfant reprend son activité comme si rien ne s'était passé. Il n'y a pas ou peu de phénomènes moteurs associés (clonies, perte passagère du tonus…) L'absence est caractéristique du Petit Mal (QS)

Myoclonies de topographie variable : paupières, membres….
1.2 Crises partielles

Les aspects cliniques sont très variables. Il faudra se méfier de toute manifestation clinique à début et fin brusque, se répétant toujours de la même façon chez un même enfant.

Parmi les manifestations les plus fréquentes, on retiend :

- les crises adversives : contraction tonique avec rotation latérale de la tête et du tronc, accompagnée d'une élévation du membre supérieur homolatéral survenant parfois en pleine conscience.Elles témoignent de l'activation de l'aire motrice supplémentaire.

- Les crises "Bravais Jacksoniennes" : débutent par des clonies localisées à la main puis propagation au reste du membre, à l'hémicorps et parfois généralisation secondaire.

- sensations épigastriques douloureuses ou désagréables, mauvais goût dans la bouche, mouvements de machonnement ou de déglutition, éructations, hypersalivation, automatismes gestuels, impressions de "déjà vu, déjà vécu", sensation "d'état de rêve", hallucinations visuelles, hallucinations auditives, peurs immotivées, manifestations végétatives de type pâleur ou rubéfactionv: toutes ces manifestations peuvent se rencontrer dans une épilepsie partielle. Elles surviennent généralement en pleine conscience et peuvent parfois être rapportées par le grand enfant. Cependant, il peut y avoir une amnésie de l'épisode due soit à la localisation de la crise d'épilepsie, soit à sa généralisation secondaire. Il est alors important d'interroger les témoins de la crise ou mieux encore de l'observer soi-même ce qui permet de faire un examen per-critique : interrogatoire du patient à la recherche de sensations inhabituelles, recherche d'hémianopsie, de déficit moteur, de troubles du langage… Chez le petit enfant, seuls l'interrogatoire des parents et la visualisation des crises (à l'aide de la vidéo par exemple) sont possibles. Le recueil de ces données cliniques aident au diagnostic topographique de l'origine de la crise.
1.3 Cas particulier du nouveau-né

L'expression clinique des crises convulsives du nouveau-né diffère beaucoup de celles de l'enfant plus grand. Les véritables crises généralisées tonico-cloniques n'existent pas à cet âge. Les manifestations épileptiques sont plus frustres :

    *
      secousses myocloniques parcellaires, erratiques de tout le corps sans ordre déterminé.
    *
      clonies ou spasmes toniques localisés à un hémicorps.
    *
      manifestations cliniques minimes : troubles respiratoires, secousses palpébrales, mydriase transitoire, mouvements nystagmiformes des globes oculaires.

1.4 Diagnostic différentiel
1.4.1 Chez le nouveau-né

Le diagnostic différentiel le plus fréquent est celui des trémulations. Ce sont des mouvements fins, rapides des extrémités, qui cessent lorsqu'on fléchit le membre ou lorsqu'on le maintiend. Il faut aussi éliminer les clonies du sommeil qui sont des mouvements cloniques d'un segment de membre uni ou bilatéral survenant exclusivement lors du sommeil, cessant dès que l'on réveille l'enfant, ne s'accompagnant d'aucune anomalie EEG concomittante. L'examen du nouveau-né est normal au réveil.
1.4.2 Chez le nourrisson :
- Le spasme du sanglot ne doit pas être confondu avec une crise d'épilepsie. Les circonstance de survenue sont particulières, constantes et doivent être soigneusement recherchées : le spasme survient souvent en présence des parents, à la suite d'une contrariété ou d'une colère. L'enfant pleure puis bloque sa respiration. L'apnée est suivie d'une cyanose péri-buccale puis, en fonction de la durée de l'apnée, survient une pâleur généralisée, une hypotonie, une perte de conscience et parfois même, quelques mouvements cloniques ou toniques des membres. La reprise respiratoire est constante ainsi que le retour rapide à une conscience normale. Ces accès sont impressionnants mais bénins.

- L' hypertonie vagale peut aussi provoquer une perte de connaissance à distinguer d'un malaise épileptique. Là encore, les circonstances de survenue sont particulières avec un phénomène douloureux déclenchant (choc, douleurs digestives…). La perte de connaissance est moins brutale que dans l'épilepsie. Elle s'accompagne d'une hypotonie, d'une pâleur extrême et parfois de sueurs.
1.4.3 Chez l'enfant

il faut éliminer :

    *
      la syncope vagale,
    *
      les tics qui sont des mouvements brusques, stéréotypés survenant en pleine conscience, généralement atténués par le stress, le mouvement volontaire,contrairement aux myoclonies dont il faut les distinguer.
    *
      La crise migraineuse surtout si elle s'accompagne de signes neurologiques ou sensoriels. En sa faveur, on retrouve des antécédents familiaux migraineux fréquents, les céphalées pulsatiles précédent le trouble neurologique, l'absence de perte de connaissance et la fréquence des signes digestifs associés.
    *
      Les clonies de l'endormissement (physiologiques).
    *
      Les terreurs nocturnes, les cauchemars.
    *
      L'hystérie : la sémiologie paroxystique est souvent très riche avec des pleurs, une agitation, une hyperventilation. Les crises surviennent souvent en présence de nombreux témoins, sont variables dans leur présentation chez un même individu. Enfin, le comportement antérieur de l'enfant et l'entourage familial permettent souvent de suspecter le diagnostic.

2 Classification - Principaux types d'épilepsie de l'enfant
2.1 Classification Internationale des épilepsies, des syndromes épileptiques et des désordres critiques apparentés,1989.
2.1.1 Epilepsies et syndromes épileptiques en relation avec une localisation (focaux, locaux, partiels)

2.1.1.1 Idiopathiques (âge-dépendants) :

    *
      Epilepsie bénigne de l'enfant à pointes centro-temporales
    *
      Epilepsie de l'enfance à paroxysmes occipitaux
    *
      Epilepsie primaire de la lecture

2.1.1.2 Symptomatiques :

    *
      Epilepsie partielle continue progressive de l'enfance (syndrome de Kojewnikow)
    *
      Syndromes caractérisés par des crises avec mode spécifique de provocation
    *
      Autres syndromes dépendants de la localisation ou de l'étiologie

2.1.1.3 Cryptogéniques
2.1.2 Epilepsies et syndromes épileptiques généralisés
2.1.2.1 Idiopathiques, liés à l'âge, avec par ordre chronologique :

    *
      Convulsions néonatales familiales bénignes
    *
      Convulsions néonatales bénignes
    *
      Epilepsie myoclonique bénigne du nourrisson
    *
      Epilepsie-absences de l'enfant
    *
      Epilepsie-absences de l'adolescent
    *
      Epilepsie myoclonique juvénile
    *
      Epilepsie avec crises grand mal du réveil
    *
      Autres épilepsies généralisées idiopathiques non définiées ci-dessus
    *
      Epilepsies avec crises caractérisées par des modes spécifiques de provocation (épilepsie photosensible)

2.1.2.2 Cryptogéniques ou symptomatiques avec par ordre chronologique :

    *
      Syndrome de West (spasmes infantiles)
    *
      Syndromes de Lennox-Gastaut
    *
      Epilepsie avec crises myoclono-astatiques
    *
      Epilepsie avec absences myocloniques

2.1.2.3 Symptomatiques
2.1.2.3.1 Sans étiologie spécifique

    *
      Encéphalopathie myoclonique précoce
    *
      Encéphalopathie épileptique précoce
    *
      Autres épilepsies généralisées symptomatiques non définies ci-dessus

2.1.2.3.2 Syndromes spécifiques
2.1.3 Epilepsies et syndromes épileptiques dont le caractère focal ou généralisé n'est pas déterminé
2.1.3.1 Avec association de crises généralisées et de crises partielles

    *
      Crises néonatales
    *
      Epilepsie myoclonique sévère de l'enfant
    *
      Epilepsie avec pointes ondes continues pendant le sommeil lent
    *
      Aphasie acquise épileptique (syndrome de Landau-Kleffner)
    *
      Autres épilepsies indéterminées non définies ci-dessus

2.1.3.2 Sans caractères généralisés ou focaux certains
2.1.4 Syndromes spéciaux
2.1.4.1 Crises en relation avec une situation :

    *
      Convulsions fébriles
    *
      Crises survenant dans un contexte métabolique aigu

2.1.4.2 Crises isolées ou état de mal isolé

Seules certains types d'épilepsie vont être abordés ici. Pour plus de renseignements, veuillez consulter Epilepsy octet Lancet, aout 1990, Epilepsy in Childhood par J. Aicardi.
2.2 Quelques épilepsies particulières à l'enfant

2.2.1 Le syndrome de West est une épilepsie grave et fréquente du nourrisson (début entre 4 et 7 mois). Il touche plus souvent le garçon (60% des cas). Il associe :

    *
      Des spasmes en flexion ou en extension, survenant par salves de 5 à 10 le plus souvent au réveil ou lors de l'endormissement. Des pleurs terminent fréquemment une salve de spasmes qui sont parfois confondus avec des coliques abdominales.
    *
      Une stagnation ou une régression psychomotrice.
    *
      Une hypsarythmie sur l'électroencéphalogramme (EEG) : ondes lentes diffuses, généralisées, asynchrones avec disparition de l'activité de base.

Le pronostic du syndrome de West est sévère avec un retard mental dans 70 à 80% des cas, des troubles du comportement dans 30% des cas et un épilepsie résiduelle dans 55 à 60 % des cas. Le pronostic est aggravé en cas de début précoce (< à 4 mois), de diagnostic et donc de traitement tardif, en cas de maladie neurologique associée. Le bilan étiologique recherche une malformation cérébrale, une sclérose tubéreuse de Bourneville (taches cutanées achromiques…), une fœtopathie infectieuse (CMV, toxoplasmose), des séquelles d'anoxie périnatale, des séquelles de méningite ou d'encéphalite, des anomalies du métabolisme (phénylcétonurie, hyperglycinémie sans cétose, maladie de Leigh) une anomalie chromosomique (trisomie 21). La réponse au traitement est médiocre. Celui-ci est basé sur la corticothérapie à fortes doses (Hydrocortisone 10 à 20 mg/Kg/j, éventuellement ACTH : 20 à 120 UI/j) avec un relai par le valproate de sodium seul ou en association aux benzodiazépines. Il existe maintenant d'autres alternatives au traitement par corticoïdes, notamment le vigabatrin (à la dose de 75 à 100 mg/Kg/j) qui est actuellement le traitement de choix du syndrome de West dans le cadre d'une maladie de Bourneville.

2.2.2 Le syndrome de Lennox-Gastaud est une épilepsie fréquente et sévère de l'enfant de 3 à 5 ans. Il peut faire suite à un syndrome de West. Il associe des crises atoniques ou atono-myocloniques, des crises toniques, un arrêt ou une régression psychomotrice, un EEG très perturbé avec une activité de base désorganisée et des salves de pointes-ondes. Le pronostic intellectuel est sombre. L'épilepsie est résistante au traitement médical. Le bilan étiologique, identique à celui effectué dans le syndrome de West, retrouve souvent une pathologie neurologique associée.

2.2.3 L'épilepsie absence-Petit mal représente environ 5 à 10 % des épilepsies de l'enfant. Elle débute vers 5-7 ans et disparait généralement à l'adolescence. La caractéristique clinique est l'absence qui se traduit sur l'EEG par des bouffées bilatérales, synchrones de pointes-ondes à 3 cycles/secondes à début et fin brutales. Ces absences sont favorisées par l'hyperpnée. Le pronostic est généralement bon : intellect préservé, bon contrôle des crises par le traitement médical qui utilise soit le valproate de sodium, soit l'éthosuccimide.

2.2.4 L'épilepsie à paroxysmes rolandiques représente 15 à 20 % des épilepsies de l'enfant de 3 à 13 ans ( en moyenne 10 ans). Des antécédents familiaux d'épilepsie sont fréquemment retrouvés. Les crises consistent en des phénomènes moteurs cloniques ou toniques de la face survenant en pleine conscience. La généralisation secondaire est possible. L'EEG montre des pointes ou des pointes-ondes centro-temporalesou rolandiques unifocales, survenant en bouffées. Le pronostic est excellent. Le traitement de choix est la carbamazépine, mais on peut ne pas traiter l'enfant si les crises sont rares, brèves et uniquement nocturnes.

2.2.5 L'épilepsie myoclonique juvénile est une épilepsie fréquente, bénigne de l'adolescent. Des antécédents familiaux d'épilepsie sont fréquemment retrouvés. Les myoclonies surviennent surtout au réveil. Elles sont favorisées par le manque de sommeil, la prise d'alcool. La stimulation lumineuse intermittente favorise la survenue de bouffées de pointes-ondes sur l'EEG. Le pronostic est bon : intellect normal, bonne réponse au traitement (valproate de sodium).

2.2.6 Crises d'épilepsie occasionnelles

Les étiologies varient en fonction de l'âge de l'enfant.

- Chez le nouveau-né :

    *
      hypoglycémie (< 0,25g/l ou < 1,1 mm/l)
    *
      hypocalcémie (< 70 mg/l ou <1,75 mmol/l)
    *
      méningite
    *
      Anoxie, hémorragie

- Chez le nourrisson

    *
      Convulsions hyperthermiques (QS)
    *
      Méningite et méningoencéphalite (herpès).
    *
      Troubles ioniques : hypoglycémie, hypocalcémie, hyponatrémie. rares en dehors de contexte pathologique particulier.
    *
      Intoxications
    *
      Hématome sous-dural

- Chez l'enfant : intoxications, poussée d'HTA. Les crises convulsives occasionnelles sont rares.
3 Examens complémentaires
3.1 L'électro-encéphalogramme (EEG)

L'EEG est fondamental pour le diagnostic et pour la caractérisation de la maladie épileptique. Il est également utile au suivi du patient épileptique.
3.1.1 Techniques d'examen :

Il est possible d'augmenter la sensibilité de l'enregistrement EEG par : la stimulation lumineuse intermittente (ex : épilepsie à paroxysmes rolandiques), l'hyperventilation (ex : Petit Mal), la somnolence et le sommeil chez le petit enfant. Un grand nombre d'électrodes est nécessaire pour affiner le diagnostic. Chez l'enfant, on utilise un montage adulte dès l'âge de 3 ans. L'enregistrement couplé vidéo-EEG est important dans certaines formes d'épilepsies notamment les crises partielles complexes. Il aide à la localisation de l'origine des crises. Enfin, la stéréo-électro-encéphalographie (enregistrement à partir d'électrodes intra-cérébrales implantées par voie neuro-chirurgicale) a des indications très limitées, discutées en milieu spécialisé.
3.1.2 Les limites.de l'examen :

Chez l'enfant, Il est fréquent de constater un EEG normal après une crise d'épilepsie clinique et à l'opposé, des anomalies EEG peuvent s'observer sans qu'il y ait eu de manifestation clinique critique.

Dans les deux cas, la clinique prévaut : on traite un malade faisant des crises d'épilepsie et non un EEG.
3.2 Autres examens complémentaires

Il n'y a pas de bilan "standard" de maladie épileptique. Les examens complémentaires varient selon le type d'épilepsie, définie sur des arguments cliniques et EEG. A titre d'exemples, le Petit mal-absence ne nécessite aucune exploration. Par contre, le syndrome de West est l'objet d'un bilan neurologique exaustif (cf paragraphe Syndrome de West). Cependant, il est habituel de faire un scanner crânien devant toute première crise d'épilepsie.
4 Traitement
4.1 Principaux anti-épileptiques :
Dénomination commune Internationale
   
Dose usuelle par 24 heures (mg/kg)
   
Nombre habituel de prise par /j
   
Demi-vie plasmatiques
(heures)
   
Taux
"thérapeutique"
(mg/ml)
   
Effets
secondaires
Phénobarbital
Valproate de Sodium    
2 - 5
20 - 40
   
1
2 - 3
   
50 - 140
30 - 60
   
15 - 30
50 - 100
    Hyperactivité
Nausées,
Prise de poids,
Tremblement,
Alopécie,
Hépatite
Carbamazépine    
15 - 35
   
2 - 3
   
30 - 60
   
4 - 10
    Ataxie, Diplopie,
Somnolence
Phénytoïne    
4 - 8
   
1 - 2
   
8 - 60
   
10 - 20
    Hyperplasie
ginvivale, Ataxie
Diplopie,
Nystagmus,
Hirsutisme
Ethosuccimide    
20 - 40
   
2
   
20 - 60
   
50 - 100
    Nausée, Anémie
Clonazépam    
0,1
   
2 - 3
   
24 - 48
   
NF
    Somnolence,
Ataxie
Vigabatrin    
40 - 100
   
2
   
5 - 8
   
NF
    Hyperactivité
NF: Non fait, soit parce que le dosage a peu d'intérêt (clonazépam), soit parce qu'il n'est pas de pratique courante (vigabatrin)

Le temps d'équilibration d'un traitement est atteint au terme de 5 demi-vies. Il est important de connaitre cette notion pour éviter de modifier trop rapidement un traitement, pour ne pas conclure prématurément à un échec du médicament utilisé.
4.2 Principes généraux de conduite de traitement anti-épileptique

4.2.1 La mise en route d'un traitement anti-épileptique se fait à doses progressivement croissantes, sauf pour le gardénal utilisé à pleine dose d'emblée.

4.2.2 La monothérapie est la règle. Elle est maintenue le plus longtemps possible.

4.2.3 Le suivi d'un traitement épileptique est clinique : disparition des crises, bonne tolérance du traitement.

Les dosages médicamenteux sont utiles (1) si les crises persistent ou réapparaissent, (2) s'il apparait des effets secondaires au traitement. Un contrôle régulier du bilan hépatique, de la NFS est nécessaire lors de la prise de certains anti-épileptiques comme le valproate de sodium, la carbamazépine…

Enfin, l'EEG aide à la surveillance de la maladie épileptique. Le rythme des examens est là encore guidé par l'activité clinique de la maladie.

4.2.4 Changement de traitement anti-épileptique

Pour remplacer un anti-épileptique, il faut faire la preuve de son inefficacité. Le traitement doit avoir été utilisé suffisamment longtemps et à doses suffisantes.

Le changement de traitement doit se faire comme suit: introduction du nouveau médicament à doses progressivement croissantes tout en maintenant le traitement précédent. Lorsque le nouvel anti-épileptique atteint un taux thérapeutique stable, le traitement initial peut être lentement diminué. Son arrêt se fait en quelques semaines.

4.2.5 Lorsque la décision d'arrêt d'un traitement anti-épileptique est prise (en général, après un minimum de deux ans sans crises), celui-ci est lentement diminué. On ne doit jamais arrêter brutalement un traitement anti-épileptique.
4.3 Traitement de l'état de mal épileptique

Définition de l'état de mal épileptique : crise d'épilepsie de durée supérieure à 30 minutes ou crises d'épilepsies itératives (sans reprise d'une conscience normale entre chaque crise) de durée supérieure à 30 minutes.

La prise en charge d'un enfant présentant un état de mal épileptique se fait en milieu hospitalier, dans un secteur de soins intensifs ou de réanimation.

On peut proposer le schéma thérapeutique suivant :

 
Traitement de première intention

RIVOTRIL en intraveineux continu à la seringue électrique
Dose de charge : 0,01 mg/Kg en 1 heure
Dose d'entretien : 0,05 à 0,1 mg/Kg/24 heures

Bilan d'efficacité

   1.
      Traitement efficace : mise en place d'un traitement anti-épileptique per os
   2.
      Traitement inefficace : les posologies peuvent être augmentées jusqu'à 0,2-0,3 mg/Kg/24h avant de passer à un autre traitement seul ou en association : traitement de deuxième intention

Traitement de deuxième intention

 

GARDENAL intra-veineux
(dose de charge en perfusion de 15 minutes)

    - Nouveau-né : 20 mg/Kg
    - Nourrisson : 15 mg/Kg
    - Enfant : 10 mg/Kg

   
OU
   

DILANTIN intra-veineux
(dose de charge en perfusion de 30 minutes)

    - Nouveau-né et nourrissons : 15 mg/Kg
    - Enfant : 10 mg/Kg

OU
DEPAKINE intra-veineux
Dose de charge en perfusion de 5 minutes : 15 à 30 mg/Kg
puis immédiatement en relai IV continu : 1 à 2 mg/Kg/jh(plutôt 2mg/Kg/h)

 
Bilan d'efficacité

    

    1. Traitement efficace: relai du traitement à doses d'entretien per os ou en intraveineux
    2. (en fonction de l'état de conscience) :

        *
          GARDENAL per os ou IV, relai à prendre à H 24 : 5 mg/Kg le soir chez le nourrisson, 3 mg/Kg le soir chez le grand enfant
        *
          DILANTIN IV : 5 mg/Kg/8h

    3. Traitement inefficace : Faire une demi-dose de charge supplémentaire avant de passer à un autre traitement.

    Si ECHEC ==> Discussion de l'anesthésie générale par Penthotal

Convulsions hyperthermiques
S. Peudenier

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 27 février 1999

1 Diagnostic clinique
2 Conduite à tenir
2.1 Examens complémentaires
2.2 Cas particuliers
   

3 Pronostic
4 Traitement
4.1 Traitement de la crise convulsive
4.2 Traitement préventif

C'est une pathologie fréquente puisqu'elle touche environ 5% des enfants de 1 à 4 ans. Il faut d'emblée individualiser la convulsion fébrile bénigne largement majoritaire de la convulsion hyperthermique complexe. La conduite à tenir, le bilan et le pronostic sont différents.
1 Diagnostic clinique

Le diagnostic repose sur la coexistence d'une crise convulsive et d'une fièvre élevée, souvent supérieure à 39°C, en dehors de toute infection du système nerveux central (méningite, méningo-encéphalite).
1.1 Convulsion hyperpyrétique simple : 90% des cas

Les caractéristiques cliniques de la convulsion sont :

1. Age de survenue : entre 9 mois et 5 ans
2. Durée brève (inférieure à 10 minutes)
3. Crise généralisée, absence de déficit moteur post-critique
4. Absence de pathologie neurologique sous jacente
1.2 Convulsion hyperpyrétique complexe : 10% des cas

Les signes de gravité sont :

1. Age de survenue : < à 9 mois ou > à 5 ans
2. Durée de la crise > à 15 minutes
3. Caractère focal de la crise, touchant un hémicorps ou accompagnée d'un déficit moteur post critique
4. Retard psychomoteur antérieur à la crise convulsive ou examen neurologique anormal
5. Antécédents familiaux d'épilepsie
2 Conduite à tenir

Toute première convulsion hyperpyrétique doit être hospitalisée chez le nourrisson de moins de 2 ans et en cas de crise complexe.
2.1 Examens complémentaires

Le seul examen indispensable est la ponction lombaire. Elle permet d'éliminer une infection du système nerveux central dont les signes sont trompeurs chez le petit nourrisson.

Les dosages de la glycémie et de la calcémie sont fréquemment réalisés mais non obligatoires si l'enfant a récupéré rapidement et s'il prend bien sa supplémentation en vitamine D.

Recherche et traitement du foyer infectieux.
2.2 Cas particuliers : convulsion hyperthermique compliquée, convulsions hyperthermiques simples récidivantes (>2).

Un bilan neurologique est effectué comprenant au minimum un EEG et un scanner cranien.

Ce bilan sera complété par un examen ophtalmologique, un bilan biologique sanguin et LCR, une IRM en fonction des éléments d'orientation clinique.
3 Pronostic

Le pronostic est bon dans les convulsions hyperthermiques simples. La récidive est possible mais elle n'a pas de gravité propre. Lorsqu'il y a récidive, elle a lieu dans les 6 mois suivant la première convulsion fébrile dans 50% des cas et dans les 2 ans dans 90% des cas.

Le pronostic est plus réservé dans les convulsions hyperthermiques complexes. Le risque de récurrence est plus élevé (il est évalué à 50% lorsque la première convulsion fébrile survient avant l'age de 1 an). Le risque d'épilepsie secondaire est également plus élevé, estimé à 2,8 à 3,5% selon les études.
4 Traitement
4.1 Traitement de la crise convulsive

Toute crise convulsive ne cédant pas spontanément en 10 minutes, doit être traitée par l'injection intra-rectale de valium à la dose de 0,5 mg/Kg (sans dépasser 10 mg/injection). Les parents et le personnel soignant doivent savoir utiliser le valium intra-rectal en cas de crise.

Si la crise persiste au bout de 10 minutes, une nouvelle injection de 0,5 mg/Kg peut être effectuée par le médecin. Au delà, si la crise persiste, il s'agit dun état de mal convulsif et le traiter comme tel (QS)

Des mesures de protection seront systématiquement associées: position latérale de sécurité, libération des voies aériennes supérieures.
4.2 Traitement préventif des convulsions hyperpyrétiques

Un traitement préventif des convulsions hyperpyrétiques est indiqué dans les convulsions hyperthermiques compliquées et discuté dans les convulsions hyperpyrétiques simples mais récidivantes. Au delà de la deuxième ou troisième crise convulsive fébrile, on peut être amené à traiter si les crises sont proches dans le temps ou mal tolérées par le milieu familial.

Deux attitudes thérapeutiques sont possibles :

Traitement quotidien pendant 1 à 2 ans utilisant soit le valproate de sodium (DEPAKINE R), soit le phénobarbital (GARDENALR ). La préférence va plutôt au valproate de sodium qui est mieux toléré cliniquement, notamment au niveau du comportement. Le valproate de sodium est utilisé à la posologie moyenne de 30 mg/ Kg/j en deux prises. Un bilan hépatique est nécessaire avant le début du traitement. La mise en route du traitement est progressive sur quelques jours.

Traitement préventif à la demande, en cas de fièvre, par du diazépam (VALIUMR) à la dose de 1 mg/Kg/j réparti en 3 prises (= 0,33 mg/Kg/8h). A cette posologie, le diazépam a un effet préventif mais peut être responsable d'une ataxie, d'une somnolence ou d'une hyperactivité paradoxale. De plus, la convulsion est souvent révélatrice de la fièvre réduisant à néant toute prévention de ce type.

Dans tous les cas, le traitement de l'hyperthermie s'impose: découvrir l'enfant, lui donner un bain 2°C en dessous de sa température corporelle, donner des antipyrétiques de façon systématique ( acide acétyl salicilique à la dose de 50 à 60 mg/Kg/j répartis en 4 à 6 prises, associé au paracétamol en cas d'efficacité insuffisante: 40 à 50 mg/Kg/j en 4 à 6 prises).

Conduite à tenir devant la constatation d'un retard psychomoteur et intellectuel
S. Peudenier

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 27 février 1999

1 Reconnaître et affirmer le retard psychomoteur
1.1 L'examen du nourrisson (0 à 3 ans)
1.2 L'examen du jeune enfant (3 à 6 ans)
1.3 Examen de l'enfant de 6 à 10 ans
   

2 Conduite à tenir
2.1 Le retard est-il certain ?
2.2 Le retard est-il homogène ?
2.3 Le retard est-il nouveau ?
3 Prise en charge de l'enfant et sa famille

Le retard des acquisitions psychomotrices est le handicap le moins bien reconnu par les médecins. Il ne pourra être mis en évidence que si le médecin a acquis, pour chaque âge, des repères précis de développement normal. Le dépistage d'anomalies du développement cérébral tôt dans la vie de l'enfant permet une prise en charge précoce de l'enfant et de sa famille.
 
1 Reconnaître et affirmer le retard psychomoteur

(QS cours de sémiologie sur le développement psychomoteur de l'enfant, réimprimé ci- dessous)

L'évaluation du développement demande une coopération parfaite de l'enfant. Il faut donc le laisser en sécurité, dans les bras de sa mère, et commencer l'examen par des jeux en réservant l'examen neurologique plus formel et l'examen général à une phase ultérieure de la consultation.
1.1 L'examen du nourrisson (0 à 3 ans)
1.1.1 Technique d'examen :

Il faut d'abord dialoguer avec les parents, les interroger sur les antécédents familiaux, sur le déroulement de la grossesse, sur les conditions de l'accouchement, les questionner sur les réalisations de l'enfant. En s'aidant du carnet de santé, les principales étapes du développement sont repérées dans le temps (par exemple, sourire-réponse à 2 mois, tenue assise sans appui à 9 mois, marche à 12 mois…). Pendant tout le temps de l'entretien, l'enfant est observé, puis le premier contact commence sous forme de jeu, alors que l'enfant est toujours habillé et "en sécurité" sur les genoux de sa mère. La pièce d'examen doit être calme, sans intervention extérieure pendant le temps de la consultation. L'examinateur utilise un petit matériel (cubes en bois, une pièce de monnaie, une bouteille contenant une pastille colorée, un imagier). Ce matériel, préparé à l'avance, est toujours le même pour que l'examinateur en ait l'habitude et puisse comparer les réactions des enfants. A partir de l'âge de 6 mois, l'examen commence par une phase de mise en confiance, par exemple en proposant à l'enfant un cube coloré posé devant lui, sur la main de l'examinateur. Lorsque le nourrisson a accepté de le prendre, de le manipuler, puis à partir de 8-10 mois d'établir un échange avec l'examinateur, l'évaluation peut commencer.

L'observation porte également sur : (1) comment l'enfant fixe-t-il ? suit-il du regard dans les deux directions ? Essaie-t-il d'attraper l'objet qu'on lui propose ? Le mouvement est-il libre, précis ? Utilise-t-il indifféremment la main droite et la main gauche ? (une latéralisation à cet âge est anormale et doit faire rechercher une anomalie). La saisie des petits objets se fait-elle par une pince doigt-paume, doigt-pouce ou pouce-index ? (2) Le contact avec le nourrisson est-il bon ? sourit-il, s'intéresse-t-il à ce qui l'entoure ou, au contraire, reste-t-il indifférent, passif ? Peut-on capter son attention de façon durable ou existe-t-il une hyperactivité ?. (3) Evaluation de l'audition: la réaction aux stimulis auditifs (voix, clochette, jeux sonores de Moatti) est repérée, chez le nouveau-né, par une modification de la succion, l'ouverture des yeux ou de la bouche, une brève immobilisation. Chez le nourrisson, la réaction au bruit est plus facile à repérer, une rotation de la tête vers la source sonore est observée à partir de l'âge de trois mois.
1.1.2 Les dates à retenir

Elles sont indiquées sur le test ci-joint, traduction du test de Denver. Les principales acquisitions de l'enfant y sont classées en quatre rubriques : motricité globale, motricité fine, langage et contact social. Le test de Denver est facile à utiliser chez le nourrisson puis chez l'enfant, jusqu'à 5-6 ans. Il permet une évaluation rapide (possible au cours d'une simple consultation) et sert ainsi au dépistage.

Dans la réalisation de chaque épreuve, il existe une variation individuelle normale, indiquée dans le tableau par la taille du rectangle. Le rectangle débute à l'âge auquel 25% de la population passe l'épreuve, le tiret correspond à l'âge ou 50% de la population passe l'épreuve, le début du grisé correspond à 75% de la population et la fin du rectangle à 90% de la population. Avant d'examiner l'enfant, il faut tirer un trait au niveau de son âge chronologique. Les épreuves proposées sont celles situées directement à gauche de ce trait, c'est à dire celles que réussissent 90% des enfants de son âge, puis des épreuves plus "difficiles", correspondant à son âge chronologique, sont proposées. Le test de Denver considère acquises les performances désignées par ®, rapportées par les parents au cours de l'interrogatoire. A la fin de l'évaluation, on peut déterminer si l'enfant a des acquisitions en rapport avec son âge chronologique ou si elles sont décalées et dans ce cas, chiffrer le retard.

Certains repères chronologiques sont importants à retenir :

    *  0 à 3 mois : sourire-réponse, suivi de l'objet dans les deux directions de l'espace, tenue de la tête, ouverture des mains.

    *  3 à 6 mois : intérêt pour les objets, rire, gazouillis, l'évolution du tonus axial et périphérique se poursuit selon un gradient céphalo-caudal.

    * 6 à 9 mois : le nourrisson porte les objets ou un gâteau à la bouche, manipule les cubes d'une main dans l'autre, dit des bisyllabismes (ba-ba, ta-ta, pa-pa …), tiend assis sans appui. Sur le plan comportemental, l'enfant quitte la période symbiotique ou il ne se distingue pas de ce qui l'entoure, pour entrer dans la période dyatique ou il se percoit comme distinct de l'environnement et notamment de sa mère. L'enfant est timide avec les inconnus, par exemple l'examinateur (notion d'angoisse de l'étranger), supporte mal la séparation avec sa mère.

    * 9 à 12 mois : évolution de la pince pour saisir les petits objets ou la pièce de monnaie (8-10 mois : pince pouce-doigt, 10-13 mois : pouce pouce-index), notion de permanence de l'objet (acquise vers 10 mois) : l'enfant va chercher l'objet caché sous un tissu ou dans la main de l'examinateur, l'enfant tient debout contre appui, s'assoit et se met debout seul. La compréhension verbale, plus encore que le angage, évoluent. L'enfant comprend certaines séquences reliées à une situation vécue ( au revoir, bravo, donne), dit "papa" "maman" de façon dirigée.

    * 12 à 18 mois : le langage apparait : d'abord sous la forme de mots séparés, "mot phrase" qui peut prendre plusieurs sens, par exemple "maman" peut désigner la personne mais aussi le sac, les chaussures… de maman.Les mots sont ensuite groupés deux à deux. Développement de l'autonomie dans certains gestes (boire au verre, utilisation de la cuillère…), sur l'acquisition de la marche. L'enfant découvre son corps : il aime regarder son image dans le miroir (stade du miroir de J. Lacan), peut montrer son nez, sa bouche… à la demande.

    * 18 mois à 2 ans : poursuite de l'acquisition de l'autonomie, suit des ordressimples, habilité accrue dans la réalisation de tour de cubes, comprend comment sortir la pastille de la bouteille en la retournant. Pour atteindre son but, il passe progressivement de la solution empirique à la solution réfléchie. C'est la fonction "sémiotique" qui associe quelque chose de concret à un symbole.

    * 2 à 3 ans : l'enfant est maintenant très autonome dans ses déplacements, se déhabille seul et commence à enfiler les vêtements. Acquisition de la propreté de jour. Commence à utiliser un crayon. Le langage s'enrichit, fait de courtes phrases, le "je" apparait vers 3 ans. La fonction sémiotique avec l'accès aux symboles se renforce. Cela se traduit par l'imitation différée dans le jeu avec les poupées, les voitures…, les jeux symboliques comme l'avion représenté par deux bouts de bois croisés.

1.1.3 Examen neurologique formel

Quelquesoit l'âge de l'enfant, il faut tester : (a) le maintien postural : tient-il sa tête, son tronc ? Résiste-t-il à une poussée latérale, à la pesanteur lors des manœuvres de suspension verticales ou latérales (prise de l'enfant dans la main de l'examinateur en position ventrale, sur le coté droit puis gauche, sur le dos) ? (b) Se retourne-t-il dans son lit, tient-il assis, debout ? (c) les membres sont-ils souples ou raides (il faut palper les tendons, les muscles au repos et lors de la mobilisation passive lente et rapide). (d) Quelle est l'évolution du périmètre crânien, y-a-t-il un souffle intracrânien, l'enfant réagit-il au bruit, à la lumière ? Les réflexes ostéo-tendineux sont-ils présents ? (e) Enfin, il ne faut pas oublier l'examen général, et en particulier la recherche d'une hépatomégalie, d'une splénomégalie (évoquant une maladie de surcharge), la recherche de taches cutanées (évoquant une phacomatose)
1.1.4 Cas particulier du grand prématuré

L'examen des réflexes archaïques est plus informatif chez le prématuré que chez l'enfant né à terme. Ils participent à l'évaluation du niveau de maturation de l'enfant.

Dans les premières semaines de vie, l'évaluation du grand prématuré doit tenir compte de l'immaturité cérébrale, et fait intervenir la notion d'âge corrigé, c'est à dire d'âge de l'enfant à partir du début de la grossesse.

Le "rattrapage" de développement avec les enfants nés à terme se fait le plus souvent entre le 3ème et le 6ème mois de vie. A la fin du deuxième semestre de vie, l'ancien prématuré doit accomplir les mêmes performances, aux mêmes dates, que l'enfant né à terme.
1.2 Examen du jeune enfant (3 à 6 ans)

C'est l'âge du dépistage des retards mentaux modérés et des troubles de la personnalité. Il est important de les repérer tôt dans la vie de l'enfant afin de conseiller les parents pour le début de la scolarité de l'enfant. Une intégration en maternelle est souvent possible. Par contre, il faut évaluer les capacités de l'enfant à entrer en primaire, parfois avec une aide adaptée, afin d'éviter les situations d'échecs, préjudiciables au développement de l'enfant.
1.2.1  Technique d'examen

L'examen de dépistage se fait, après mise en confiance de l'enfant. Il est très utile de demander à voir les réalisations faites à l'école maternelle. L'essentiel de l'évaluation repose sur le langage, le graphisme, l'autonomie dans les gestes de la vie courante.

Le comportement de l'enfant est observé pendant tout le temps de la consultation. Peut-il maintenir son attention ou, au contraire, passe-t-il sans arrêt d'une activité à l'autre. S'intéresse-t-il aux objets qu'on lui propose ou les jette-t-il immédiatement à terre ? Il est également important de se faire préciser sa capacité à construire un jeu seul ou avec les autres. A-t-il des jeux répétitifs (éteindre et allumer la lumière, tourner les robinets d'eau…) évocateurs de troubles de la personnalité.
1.2.2 Les dates à retenir

- Graphisme : de façon schématique, on peut retenir qu'un rond est réalisé vers 3 ans, une croix vers 3 ans 1/2, un carré sur démonstration vers 4 ans, un triangle vers 5 ans, un losange vers 6 ans (entrée en CP). Le dessin du bonhomme est également très utile: bonhomme tétard vers 3 ans 1/2-4 ans. Le bonhomme à 5 parties distinctes vers 4 ans-4 ans1/2, puis il s'enrichit de détails. Le profil apparait vers 6 ans. La latéralisation s'acquiert entre 3 ans1/2 et 4 ans1/2 pour la main et le pied.

- Langage : le langage devient riche et informatif à partir de 3 ans 1/2, les couleurs sont connues vers 4 ans, la sériation chronologique et en taille commence à être maitrisée entre 4 et 5 ans.

- Autonomie : l'enfant de déshabille vers 3 ans, s'habille seul vers 4 ans 1/2-5 ans, y compris les boutons. Le nœud de lacets est acquis vers 6-7 ans.

- Affectivité-Intelligence : c'est l'âge de la pensée pré-opératoire, caractérisée par (1) la curiosité, l'âge du Pourquoi ? qui traduit plus une recherche de règles et d'affirmations que d'explications. Tout à une raison d'être, même artificielle, le hasard n'existe pas (finalisme). (2) La pensée magique et l'animisme : chaque chose est vivante et douée d'intention bonne ou mauvaise. Parallèlement, se développe le sens moral par intériorisation des interdits parentaux , apparition du "surmoi". (3) L'intuition : "c'est comme çà", (4) l'égocentrisme : l'enfant n'est pas ouvert à la pensée des autres, les règles générales ne sont que les siennes propres.
1.3 Examen de l'enfant de 6-10 ans

L'évaluation de l'enfant plus agé est plus difficile et requiert souvent la réalisation de tests standardisés qui ne peuvent être pratiqués que par des examinateurs entrainés (test de WPPSI, WISC, Benton…)

Une première approche, très comparable à celle de l'enfant de 3 à 6 ans, peut être effectuée. Le recueil des informations apportées par les réalisations scolaires est ici très important. Le comportement de l'enfant est évalué lors de la consultation mais aussi à la maison (d'après les parents), à l'école (d'après ses professeurs). L'enfant est maintenant capable de raisonnements logiques, il s'ouvre à l'extérieur: c'est l'âge de raison. Sur le plan affectif, les conflits antérieurs s'apaisent: c'est la phase de latence.

L'examen clinique neurologique et somatique est proche de celui réalisé chez l'adulte.

2 Conduite à tenir lors de la constatation d'un retard de développement psychomoteur

Trois questions essentielles doivent être analysées devant la constatation d'un retard psycho-moteur.
2.1 Le retard est-il certain ?

 Soit le retard est majeur, et il est aisé de l'affirmer.

Soit le retard est modéré ou l'enfant très jeune. Il est alors nécessaire de revoir l'enfant un à deux mois plus tard avant de conclure qu'il existe un retard psycho-moteur. Après ce deuxième examen, le retard de l'enfant sera abordé et analysé avec ses parents.
2.2 Le retard est-il homogène ?

 Le plus souvent, l'enfant présente un retard homogène dans toutes les rubriques du test (motricité globale, motricité fine, langage, contact social).

 Parfois, il existe un retard hétérogène. L'enfant échoue exclusivement à certaines épreuves du test, par exemple : 

    * Un retard moteur isolé évoque une pathologie musculaire, du nerf périphérique, ou de la corne antérieure.
    * Un retard isolé de langage doit faire rechercher une surdité. Un audiogramme et, éventuellement une étude des potentiels évoqués auditifs, sont effectués si l'enfant n'a pas acquis le langage à l'âge de trois ans.
    * Une grande dispersion dans les acquis de l'enfant, souvent associée à des difficultés comportementales évoque un trouble de la personnalité.
    * Une mauvaise manipulation des objets, parfois associée à des mouvements anormaux des yeux doit faire rechercher un trouble grave de la vision

2.3 Le retard est-il nouveau ?

La réponse à cette question est difficiIe mais fondamentale car elle va guider le choix des examens complémentaires. Il faut pour y répondre un interrogatoire très précis des parents, en s'aidant des repères de développement notés sur le carnet de santé (les examens systématiques doivent être remplis avec objectivité et sans complaisance)
2.3.1 Un retard psychomoteur ancien avec des acquisitions lentes, régulières évoque une pathologie cérébrale fixée

C'est le tableau le plus souvent rencontré. L'interrogatoire recherche une pathologie de la grossesse (HTA, prise de toxiques, infection), une hypotrophie avec microcéphalie présents dès la naissance, une méningite ou méningo-encéphalite, un traumatisme crânien … dans les premiers mois ou années de vie. L'enfant présente habituellement un examen neurologique anormal dès la naissance ou dans les premiers mois de vie. Ensuite, les acquisitions sont régulières mais lentes avec un décalage par rapport à la normale qui, souvent, paraît s'accentuer dans le temps. En effet, il est plus aisé de répérer un déficit moteur ou un éveil insuffisant chez un enfant que chez un nourrisson de quelques mois.

Le bilan étiologique doit rechercher :

- fœtopathie : CMV, rubéole, toxoplasmose (agents infectants les plus fréquemment rencontrés).

Le VIH (virus de l'immunodéficience humaine) peut parfois se traduire neurologiquement dès la naissance mais il existe une évolutivité de la maladie avec des signes cliniques et biologiques qui s'enrichissent dans le temps.
En dehors de la vérification du statut sérologique maternel pendant la grossesse, les examens suivants seront effectués :

    * Electrophorèse des protides dans le sang et le LCR avec calcul de l'index Ig à la recherche d'une sécrétion intrathécale d'immunoglobulines.
    * Sérologies dans le sang et le LCR de l'enfant (CMV, rubéole, toxoplasmose)
    * Isolement direct du CMV dans les urines (possible jusqu'à l'âge de 2 ans)
    * Examen ophtalmologique avec fond d'œil et examen en lampe à fente à la recherche d'une choriorétinite, d'une cataracte.
    * Scanner crânien : recherche des signes évocateurs comme les calcifications intracraniennes.

 - Malformation cérébrale

    * Caryotype s'il existe un contexte polymalformatif (dysmorphie, atteinte d'autres organes).
    * Imagerie cérébrale: scanner cranien mais surtout imagerie par résonnance magnétique (IRM). Certaines malformations, comme les hétérotopies de la substance grise, les troubles de la gyration…, difficilement repérées sur le scanner cranien ont bénéficié de l'apport de l'IRM.
    * Examen ophtalmologique: les malformations oculaires sont fréquemment associées aux malformations cérébrales (syndrome d'Aicardi…)

- Ischémie/hémorragies péri-natales

    * Notion d'HTA, de prise de toxiques (tabac, alcool, médicaments…) pouvant être responsable de troubles de la vascularisation placentaire.
    * Souffrance fœtale aiguè, prématurité

En période aigüe, intérêt de l'échographie transfontanellaire qui visualise les hémorragies cérébrales, ventriculaires mais peut aussi dépister une leucomalacie périventriculaire.
A distance de la période néonatale, IRM cérébrale.
2.3.2 Un retard psychomoteur acquis évoque une pathologie neurologique évolutive

On retrouve alors la notion d'intervalle libre, période initiale de durée variable (quelques heures à plusieurs années), pendant lequel le développement psychomoteur de l'enfant est normal. Lorsque le retard psychomoteur apparait, il faut rechercher des signes neurologiques et généraux associés :

    * Epilepsie notamment de type myoclonique
    * Ataxie
    * Hypertonie périphérique
    * Signes cutanés (taches achromiques, taches café au lait …)
    * Dysmorphie faciale
    * Viscéromégalie
    * Réactions anormales au bruit, mouvements oculaires anormaux

+ quelque soit le tableau clinique, des antécédents familiaux identiques.

Le bilan étiologique est effectué en milieu hospitalier. Il recherche une maladie métabolique et/ou dégénérative du système nerveux central par (1) des dosages biologiques sanguins, urinaires et du liquide céphalo-rachidien, (2) des études électrophysiologiques (vitesses de conduction nerveuses, potentiels évoqués), (3) études morphologiques (examen de l'œil, radiographies du squelette, scanner cranien, IRM cérébrale), (4) des biopsies (nerf, muscle, peau, conjonctive…). Un prélèvement sanguin pour extraction de l'ADN est souvent fait dans les maladies neurologiques, notamment lorsqu'il existe des antécédents familiaux. Une étude en biologie moléculaire peut aider à la réalisation d'un diagnostic anténatal lorsque la maladie est localisée sur le génome.

Au terme de ce bilan, on peut soit porter un diagnostic précis et débuter une prise en charge adaptée, soit n'avoir aucune étiologie. Dans ce dernier cas, il faut savoir répéter les examens complémentaires dans le temps lorsqu'on est en présence d'une pathologie neurologique évolutive.
2.3.3 Pièges rencontrés

2.3.3.1 Il n'est pas toujours facile de distinguer une pathologie neurologique évolutive d'une pathologie neurologique fixée. Par exemple, une encéphalopathie fixée peut se compliquer d'une épilepsie et peut s'aggraver secondairement. Certaines pathologies évolutives ont un intervalle libre extrèmement bref, difficile à repérer. D'autres ont une période initiale non rigoureusement normale avant de développer le tableau clinique de la maladie.

2.3.3.2 troubles sensoriels : malvoyance, surdité

2.3.3.3 Troubles du comportement, troubles de l'organisation de la personnalité : les intrications avec le retard psychomoteur sont fréquentes.

2.3.3.4 Causes extra-neurologiques : hypothyroïdie, maladie cœliaque, carence affective précoce.
3 Prise en charge de l'enfant et sa famille

Quelque soit l'étiologie du retard psychomoteur, il est important d'en faire un diagnostic précoce. La préoccupation majeure est de favoriser au mieux les possibilités d'éducation, d'accès à une autonomie, en évitant les situations d'échecs.

Dès le plus jeune âge, il est possible de faire intervenir des soignants (kinésithérapeute, psychomotricien, psychologue) parfois dans le cadre de structures comme le CMPP (Centre médico-psycho-pédagogique) ou le SESAD (Service d'éducation et de soins à domicile). Ces enfants peuvent aller en crèche, en halte garderie même en cas de handicap sérieux, ce qui permet une ouverture vers l'extérieur mais aussi aux parents de se ménager un peu de temps qu'ils pourront se consacrer ou consacrer à la fratrie de l'enfant malade. La scolarisation en maternelle est souvent possible, parfois un primaire est envisagé avec des structures de soutien. Lorsque l'enfant ne peut pas poursuivre une scolarité en milieu normal, il faut l'orienter vers un IME (institut médico-éducatif), un EME (externat médico-pédagogique), un IMP (internat médico-pédagogique) ou un CAT (centre d'aide par le travail) en fonction de ses possibilités et de son âge. La décision d'orientation scolaire spécialisée doit se prendre suffisamment tôt pour éviter à l'enfant de se retrouver en situation d'échec répété.

Le médecin doit aussi assurer les soins médicaux courants, traiter la maladie lorsque cela est possible, traiter ses complications (infections bronchopulmonaires, problèmes nutritionnels). Il doit informer et faire les démarches en matière de droits sociaux (prise en charge à 100%, allocation d'éducation spéciale…).
Les hydrocéphalies de l'enfant
S. Peudenier, T. Dufour

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 2 mars 1999

1 Physiopathologie
2 Diagnostic
2.1 Hydrocéphalies anténatales
2.2 Hydrocéphalies du nouveau-né & nourrisson
2.3 Hydrocéphalies de l'enfant
2.4 Diagnostic différentiel
3 Principes du traitement
   

3.1 Neurochirurgical
3.2 Médical
4 Pronostic
4.1 Développement intellectuel
4.2 Séquelles motrices et sensorielles
4.3 Comitialité
5 Bibliographie
1 Physiopathologie
L'hydrocéphalie est une distension progressive des cavités ventriculaires, provoquée par une anomalie soit de la production du liquide cérébro-spinal (LCS), soit de sa circulation ou de sa résorption. Le LCS est fabriqué dès le 3ème mois de vie foetale essentiellement à partir des plexus choroïdes (richement vascularisés) situés dans les ventricules. Le LCS passe des ventricules latéraux dans le IIIème ventricule (V3) par les foramen interventriculaires puis du V3 vers le IVème ventricule (V4) par l'aqueduc du mésencéphale et enfin sort du système ventriculaire par les trous de Magendie et de Luschka. Il circule ensuite dans les espaces sous-arachnoïdiens péricérébraux et est résorbé au niveau des villosités arachnoïdiennes (granulations de Pacchioni) qui drainent le LCS vers le sinus longitudinal supérieur par l'intermédiaire des grosses veines de la surface cérébrale.

En dehors de toute situation pathologique la production de LCS chez le nourrisson est de 6 ml/h en moyenne alors que le volume total est de 40-60 ml. Chez le grand enfant la production est de 15 à 20 ml/h. La composition du LCS est celle d'un ultrafiltrat plasmatique dont la teneur en protéines (0,10 g/l) est légèrement inférieure à celle du LCS lombaire.

Le(s) mécanisme(s) de l'hydrocéphalie sont liés à une rupture de cet équilibre par :
- un excès de production par les plexus choroïdes, rare ; c'est le fait des exceptionnels papillomes des plexus choroïdes.
- un obstacle sur la circulation du LCS :

    * au niveau des foramen interventriculaires : hydrocéphalie uni ou bi-ventriculaire, il faudra penser à un processus expansif de cette région,
    * au niveau de l'aqueduc du mésencéphale : hydrocéphalie tri-ventriculaire,
    * au niveau des trous de Magendie et Luschka : hydrocéphalie tétra-ventriculaire.
    * au niveau des espaces sous-arachnoïdiens péricérébraux par feutrage secondaire aux arachnoïdites par ex. (tétra-ventriculaire)

- une modification de la résorption du LCS au niveau des granulations de Pacchioni, soit par immaturité des granulations, soit par hyperpression veineuse dans le sinus longitudinal supérieur (tétra-ventriculaire).
Dans certains cas aucune cause n'a pu être mise en évidence.
2 Diagnostic
L'aspect clinique et le pronostic dépendent essentiellement de l'âge. Lorsque les sutures du crâne sont perméables, la manifestation essentielle est une macrocrânie progressive. Lorsque le crâne est "fermé" chez l'enfant plus grand (en moyenne à partir de 20 mois) l'hydrocéphalie se traduit par le syndrome d'hypertension intra-crânienne.
2.1 Hydrocéphalies anténatales
Détectée par échographie dès la 16e semaine de gestation, elle peut être affirmée entre la 20e et la 22e semaine.
L'existence d'une dilatation ventriculaire foetale oblige à :

    * rechercher d'autres malformations associées (écho ± IRM foetale)
    * doser l'alphafoeto-protéine et l'acétylcholinestérase amniotiques pour détecter une myéloméningocèle,
    * faire l'étude du caryotype et l'enquête génétique familiale.

2.1.1 Etiologies
2.1.1.1 Malformatives

    * myéloméningocèle avec Chiari type II : engagement des tonsiles cérébelleuses dans le foramen magnum, déplacement du bulbe vers le bas.
    * sténose de l'aqueduc
    * malformation de Dandy-Walker,
    * anévrysme de la veine de Galien,
    * malformation de Chiari type I

2.1.1.2 Infectieuses

    * Toxoplasmose congénitale avec sténose inflammatoire de l'aqueduc
    * Infection à cytomégalovirus.

2.1.1.3 Anoxiques

    * Porencéphalie soufflante,
    * Hydranencéphalie.

2.1.1.4 Chromosomiques

    * trisomie 13 avec holopro-sencéphalie,
    * trisomie 18 avec Chiari +/- myéloméningocèle.

2.1.1.5 Génétiques

    * récessive liée à l' X : syndrome de Bickers et Adams ( avec sténose de l'aqueduc, pouces en adduction)
    * récessives autosomiques : souvent incompatibles avec la vie.

2.1.1.6 Tumeurs congénitales

    * les papillomes du plexus choroïde, les tératomes.

2.1.1.7 Inconnue ... encore trop fréquente.
2.1.2 Conduite à tenir
Le diagnostic d'hydrocéphalie foetale entraîne des décisions lourdes qui ne peuvent être systématisées mais doivent être discutées au cas par cas. Un conseil génétique multidisciplinaire est demandé. Les parents sont informés des conclusions et participent à la décision.

L'interruption de grossesse est proposée si l'hydrocéphalie est précoce, majeure et si elle est associée à d'autres anomalies (lésion du parenchyme cérébral, anomalie des autres viscères, myéloméningocèle, hydramnios, etc. ..). En cas de dilatation modérée il faut savoir rester attentiste, certaines hydrocéphalies se stabilisent pendant la grossesse voire même après la naissance, d'autres se décompenseront progressivement après la naissance et seront alors facilement accessibles au traitement chirurgical. Le traitement in utero par dérivation ventriculo-amniotique a été tenté. Les inconvénients et les échecs de cette méthode sont trop importants pour la retenir.
2.2 Hydrocéphalies du nouveau-né et du nourrisson
Typiquement c'est une macrocrânie évolutive. La mesure du périmètre crânien fait partie de l'examen systématique, le report sur une courbe permet de faire le diagnostic en constatant des mensurations supérieures à 3 DS ou bien un accroissement trop rapide avec franchissement successif des couloirs. Cliniquement, on retrouve un bombement de la fontanelle, une peau du cuir chevelu fine, tendue, avec une dilatation veineuse. On palpe un élargissement des sutures crâniennes. Dans l'hydrocéphalie déjà importante, vue tardivement, les yeux sont "en coucher de soleil" : il s'agit d'un abaissement des globes oculaires avec tendance à la rétraction des paupières supérieures traduisant une paralysie de l'élévation du regard. Cette symptomatologie entre dans le cadre du syndrome de Parinaud par compression de la partie haute du tronc cérébral par le V3 dilaté.
2.2.1 Examens complémentaires
On a vu l'intérêt du mètre ruban et de la courbe du périmètre crânien (peu cher, peu douloureux, facile et très fiable).

Si la fontanelle est perméable : échographie transfontanellaire. Examen indolore, pouvant être réalisé au lit du malade, facilement répété. Elle affirme l'hydrocéphalie, mesure les cavités ventriculaires, peut visualiser un processus expansif, une hémorragie, une malformation cérébrale. En cas d'anomalie cet examen sera systématiquement complété par des examens neuroradiologiques.

Scanner et/ou IRM : (1) affirment l'hydrocéphalie, (2) précisent sa topographie uni, bi, tri ou tétra-ventriculaire, (3) aide à l'appréciation du caractère aigu ou chronique et donc de l'urgence thérapeutique, (4) participe au diagnostic étiologique.

L'artériographie n'a que de très rares indications.

Le bilan morphologique pourra être complété par un examen ophtalmologique à la recherche de l'oedème papillaire (qui manque souvent), par un électroencéphalogramme montrant parfois des signes de souffrance corticale non spécifiques, éventuellement par des radiographies du crâne (impressions digitiformes, disjonction des sutures, amincissement du dorsum sellae, calcifications tumorales,...).
2.2.2 Etiologies
Les hémorragies péri-ventriculaires du prématuré : si le poids de naissance <1500 g, l'hémorragie survient dans 30 à 50% des cas. 25 % des survivants vont développer une hydrocéphalie dont le dépistage doit être précoce et systématique. Actuellement, parmi les hydrocéphalies acquises, les formes post-hémorragiques sont lourdes de séquelles neuro-psychologiques.

Les hémorragies méningées par rupture de malformation vasculaire ou traumatisme crânien,

Les méningites bactériennes (pneumocoque, hemophilus influenzae), les méningites tuberculeuses, les infections virales (entérovirus) .

Les malformations cérébrales : les anévrysme de la veine de Galien : souffle intracrânien. Le crâne s'ausculte aussi !) …

Les tumeurs comprimant ou envahissant les cavités ventriculaires et les voies d'écoulement (papillomes des plexus choroïdes, médulloblastomes du V4, épendymomes du V4, tératomes sus-tentoriels).

Sténose de l'acqueduc de Sylvius

Autres : l'achondroplasie, certaines mucopolysaccharidoses (maladie de Hurler).
2.3 Hydrocéphalies de l'enfant

2.3.1 L'hydrocéphalie acquise, d'origine tardive doit faire penser à un processus expansif.

Le tableau clinique est dominé par un syndrome d'hypertension intracrânienne : céphalées, vomissements, obnubilation, disjonction des sutures et stase papillaire. Il existe parfois un signe de Parinaud avec paralysie de la verticalité du regard vers le haut surtout nette dans les mouvements volontaires alors que la poursuite oculaire peut être épargnée (dissociation automatico-volontaire).

L'apparition d'une hydrocéphalie chez l'enfant doit faire rechercher :

    * une tumeur intra crânienne, il faudra s'acharner à la dépister à cet âge
    * l'arachnoïdite à la suite d'une hémorragie méningée, d'une méningite bactérienne ou tuberculeuse, exceptionnellement d'une méningite néoplasique.
    * une malformation de Chiari type I avec anomalie de la charnière occipito-rachidienne.
    * une tumeur médullaire cervicale par obstacle à l'écoulement du LCS au niveau du foramen magnum,
    * enfin, l'hypothèse d'une infection virale peut être envisagée notamment le virus ourlien chez l'homme.

2.3.2 Hydrocéphalie ancienne, d'évolution lente et à révélation tardive (hydrocéphalie négligée)
C'est une macrocrânie évidente, parfois supérieure à 5 DS au-dessus de la moyenne.
On note diversement associés :

    * Troubles moteurs : diplégie spastique souvent associée à une ataxie cérébelleuse.
    * Troubles endocriniens : obésité, hypogonadisme liés à l'étirement du plancher du V3
    * Troubles oculaires : diminution de l'acuité visuelle avec atrophie optique par compression du chiasma par le plancher du V3 dilaté.
    * Troubles intellectuels : difficultés scolaires, déficit intellectuel.est variable.

L'hydrocéphalie chronique jusque là négligée peut se décompenser brusquement et donner un tableau d'hypertension intracrânienne aiguë, véritable urgence neurochirurgicale.
Etiologies des hydrocéphalies selon l'âge
 
     
nouveau-né
   
nourrisson
   
enfant
malformations    
+++
   
++
   
+/-
infections, parasites    
++
   
++
   
+/-
hémorragies    
++
   
+
   
+/-
tumeurs    
+
   
+
   
+++
2.4 Diagnostic différentiel
2.4.1 Les autres causes de macrocrânies
Toute grosse tête n'est pas une hydrocéphalie. Il peut s'agir d'une augmentation du parenchyme cérébral (normal ou pathologique), d'un épanchement liquidien péri-cérébral

1 - l'hydrocéphalie externe : il s'agit d'un enfant de 6 mois environ présentant une macrocrânie qui remonte à la période néonatale. Le PC est souvent supérieur à + 3 DS et toujours supérieur à +2DS mais la courbe est parallèle à la courbe de croissance normale. Cette collection péricérébrale située dans les espaces sous-arachnoïdiens ne donne habituellement aucun autre trouble neurologique. Les ventricules peuvent être modérément dilatés. L'évolution se fait en général vers la résorption spontanée du liquide péricérébral au cours de la 3ème année. On invoque une immaturité des granulations de Pacchioni.

2 - collection sous durale

3 - malformations cérébrales : hydranencéphalie, mégalencéphalie et hémimégalen-céphalie, scaphocéphalie dans le cadre des craniosténoses.

4 - macrocrânie familiale

5 - macrocrânies évolutives de certaines maladies métaboliques : maladie de Tay-Sachs, maladie de Sandhoff, maladie de Canavan. Toutes très rares.

2.4.2 L'hypertension intracrânienne" bénigne" : pas de gros ventricules au scanner.
2.4.3 Les autres causes d'augmentation de la taille des ventricules
L'interprétation des résultats neuroradiologiques peut être difficile.

L'atrophie cérébrale provoque une dilatation ventriculaire par "manque de cerveau". Le diagnostic est facile lorsqu'il existe une microcéphalie associée ou lorsque les signes neurologiques d'atteinte centrale sont présents.

Dans l'agénésie du corps calleux, on observe souvent une augmentation importante du volume des carrefours ventriculaires et des cornes occipitales (colpocéphalie) alors que les cornes frontales sont réduites à de minces fentes et le IIIème ventricule est ascensionné.

Lorsque le diagnostic d'hydrocéphalie est posé l'enfant doit être transféré en milieu neurochirurgical.
3 Principes du traitement
Le traitement de l'hydrocéphalie est essentiellement neuro-chirurgical. Il doit être curatif et étiologique.
3.1 Neurochirurgical
On utilise plusieurs techniques découlant toutes du même principe : faire communiquer les cavités ventriculaires avec une autre cavité où va se résorber le LCS.
3.1.1 Indications
Toute hydrocéphalie évolutive doit être opérée dès que possible. En cas d'hydrocéphalie stabilisée, l'intervention chirurgicale peut être différée sous réserve d'une surveillance régulière clinique, biologique (examens endocrinologiques), et morphologique (examen de l'œil, scanner crânien ± IRM cérébrale). Chez le grand prématuré, un délai est souvent nécessaire avant de mettre en place une valve. On pourra alors discuter les ponctions ventriculaires répétées ou mieux, une dérivation ventriculaire externe.
3.1.2 Méthodes
La technique la plus utilisée est la dérivation ventriculo-péritonéale mais se discutent parfois les dérivations ventriculo-atriales(cardiaques) et les dérivations lombo-péritonéales entre les espaces sous-arachnoïdiens périmédullaires et le péritoine.

On glisse un fin tube en silicone au niveau du corps latéral ventriculaire (droit en général) qu'on raccorde à une valve puis un autre tube dont l'extrémité inférieure est mise en place dans la grande cavité péritonéale (ou l'oreillette droite). La valve est choisie en fonction du type d'hydrocéphalie. Certains systèmes disposent d'une pompe accessible à la pression manuelle sous le scalp permettant d'estimer le bon fonctionnement du système. En pratique, la valve fonctionne bien quand l'enfant va bien.

En cas de sténose de l'aqueduc du mésencéphale des cathétérismes de cet aqueduc par un drain faisant communiquer V3 et V4 ont été effectués avec de bons résultats. Lorsque la partie antérieure du V3 est très dilatée on peut, par voie endoscopique ou stéréotaxique, tenter une ventriculo-cisternostomie qui consiste à ouvrir le plancher du V3 et à le faire communiquer avec la citerne arachnoïdienne interpédonculaire. Cette technique élégante car ne laissant aucun système étranger en place, ne peut être utilisée que dans le cadre des sténoses de l'aqueduc du mésencéphale.
3.1.3 Résultats et complications
En général, les résultats sont bons : le contrôle de l'hydrocéphalie est obtenu, la taille des ventricules revient progressivement à la normale. Cependant 90% des enfants restent dépendants à vie de leur dérivation.

Un certain nombre de complications peuvent survenir :

1 - Les infections (notamment à staphylocoque) constituent la complication majeure mais heureusement l'incidence descend au-dessous de 1% (protocole chirurgical spécifique). En cas d'infection il faut faire l'ablation du matériel avec mise en place d'un drainage externe jusqu'à stérilisation complète du LCS avant remise en place d'un nouveau matériel. A noter qu'en cas de dérivation ventriculo-cardiaque une infection entraîne une septicémie avec parfois une glomérolunéphrite engageant le pronostic rénal.

2 - Une insuffisance de drainage par mauvais choix de la valve impose une révision chirurgicale. Récemment ont été mises au point des valves à débit régulé et des valves réglables par électroaimant transcutané permettant ainsi de modifier la pression d'ouverture sans "ouvrir" (elles sont un peu plus chères à l'achat...).

3 - Syndrome des ventricules fentes : complication rare se voyant chez les grands enfants. Ils présentent des épisodes répétés de céphalées, de somnolence, de vomissements et l'examen tomodensitométrique ou IRM met en évidence des ventricules collabés. Le traitement consiste en la mise en place d'une valve à pression d'ouverture plus élevée ou à débit régulé.

4 - Obstruction du cathéter ventriculaire par des franges de plexus choroïdes, des caillots sanguins ou le parenchyme cérébral lui-même. L'obstruction du drain intra-péritonéal est beaucoup plus rare. L'obstruction d'un drain entraîne la reprise du processus d'hydrocéphalie et la révision chirurgicale s'impose.

5 - Insuffisance de longueur du drain de drainage, solution de continuité : avec la croissance, le drain peut (1) sortir de la grande cavité péritonéale, (2) être soumis à une traction suffisamment, responsable d'un déboitement du drain. Une surveillance radiologique régulière (annuelle) de la position de l'extrémité inférieure du cathéter, du trajet de valve est nécessaire.

6 - parmi les autres complications signalons l'hématome sous-dural par hyperdrainage, l'ascite péritonéale par non résorption du LCS plus fréquente chez le tout petit et les migrations de cathéter.
3.2 Traitement médical
L'acétazolamide (Diamox), inhibiteur de l'anhydrase carbonique, a la propriété de réduire la production de LCS. Ce traitement peut être tenté à la dose de 40 à 50 mg/Kg lorsque l'intervention chirurgicale n'est pas jugée opportune notamment dans les hydrocéphalies très lentement évolutives.
4 Pronostic
Le pronostic dépend de l'étiologie, de la rapidité du diagnostic et de la mise en route du traitement.
4.1 Développement intellectuel
Environ 2/3 des enfants, toutes étiologies confondues, ont un QI >70. Parmi eux 41% ont un QI normal avec néanmoins des difficultés neuropsychologiques et d'apprentissage fréquentes.

La distension cérébrale progressive de l'hydrocéphalie conduit à des lésions myélinique et axonale de la substance blanche définitives et à des désordres circulatoires du cortex cérébral. Il est donc impératif d'intervenir dès que possible pour éviter leur constitution ou leur aggravation.

En cas d'hydrocéphalie foetale le pronostic intellectuel est en général beaucoup plus sévère en raison de l'atrophie cérébrale provoquée par une longue distension ou du fait de lésions associées.
4.2 Séquelles motrices et sensorielles
Un syndrome spastique des membres inférieurs est observé dans 20 % des cas. Il peut être associé à un déficit intellectuel, une surdité, une amblyopie.
4.3 Comitialité
La mise en place d'un drain ventriculaire est un foyer irritatif potentiel. l'incidence de l'épilepsie augmente avec le nombre d'interventions (6% pour une, 26% pour trois).
5 Bibliographie
Neuropédiatrie (G. LYON et Ph. EVRARD), Masson éd. 1987

Neurologie pédiatrique (M. ARTHUIS, N. PINSARD et G. PONSO_), Flammarion Médecine Sciences 1991;

First Consensus Conference on Pediatric Neurosurgery (M. CHOUX, C. DI ROCCO), Assise, Italy 1992.
Hypotonie du jeune enfant
S. Odent, S. Peudenier

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 2 mars 1999

1 Reconnaître une hypotonie pathologique
2 L'examen clinique
3 L'interrogatoire
4 Cas particulier : hypotonies de révélation néonatale
   

5 Les examens complémentaires
6 Les orientations étiologiques
7 Démarche diagnostique devant une hypotonie

Un bon tonus musculaire est la toile de fond indispensable de toute activité posturale et motrice, qu'elle soit spontanée ou intentionnelle.

Sous le terme de tonus, se trouvent des réalités aussi différentes que l'état de l'outil musculo-tendineux conditionnant l'élasticité du muscle ou l'activité neuromusculaire de base ou le réflexe myopathique d'étirement. Pour TARDIEU, le terme de tonus pourrait définir les contractions musculaires permanentes qui existent dans l'état de repos, avant toute stimulation et notamment avant toute mobilisation passive.

Nous envisagerons seulement les hypotonies importantes, étendues et durables du jeune enfant. Pour affirmer leur caractère pathologique, il est nécessaire de connaître les étapes de l'évolution du développement du tonus selon l'âge réel du très jeune enfant (cf. développement psychomoteur) : il s'agira souvent de retard de maturation plus que d'hypotonie pathologique. Dans ce cas, ne pas méconnaître deux diagnostics justifiant un traitement :
- le rachitisme,
- l'hypothyroïdie (ce serait un enfant ayant échappé au dépistage en période néo-natale).
1 Reconnaître une hypotonie pathologique
Ceci est très facile : elle se voit aussi bien qu'elle se palpe.
- Attitude de l'enfant.
- Comportement avec réduction de l'initiative motrice et gesticulaire souvent pauvre.
- Analyse des trois composantes cliniques du tonus exploré au repos :

    * consistance des masses musculaires,
    * extensibilité (amplitude maximum de l'ouverture ou de la fermeture de l'angle que forment les deux segments d'une articulation),
    * passivité (degré de résistance du muscle à son étirement en fonction de l'ampleur et de la vitesse du déplacement segmentaire, imposées en situation de relâchement musculaire complet).

Deux éléments sont essentiels pour orienter le diagnostic étiologique :

1 - L'existence ou non d'une impotence motrice majeure :

    * retard des activités posturales,
    * recherche de l'efficience de la force musculaire disponible lors des réponses à des stimulations désagréables (chatouillement avec une brosse à dent), ou des sollicitations déclenchant normalement une activité intentionnelle (jouet familier présenté par la mère).

2 - L'existence ou non d'une insuffisance des aptitudes intellectuelles :

    * ne pas se fier aux apparences. Le comportement anormalement passif est trompeur ; les mauvaises performances motrices pénalisent les enfants lors des tests de niveau de développement habituels, elles limitent leur possibilité d'apprentissage ;
    * observer les réactions d'éveil et d'intérêt dans certaines situations favorisant un contact relationnel.

2 L'examen clinique
Il appréciera :
- la répartition topographique de l'hypotonie,
- les réflexes ostéo-tendineux et idio-musculaires,
- la trophicité musculaire,
- l'existence éventuelle de fasciculations, plus rarement d'une réaction myotonique et d'une fatigabilité anormale,
- les difficultés d'alimentation,
- la faiblesse des muscles intervenant dans la respiration et la toux,
- les limitations du jeu articulaire (rétraction par perte de l'élasticité musculaire) et les déformations favorisées par les déséquilibres articulaires.
3 L'interrogatoire aura précisé :
- l'allure évolutive de l'hypotonie,
- l'existence de cas semblables dans la famille, ou d'une consanguinité,
- la période de la vie de l'enfant où la prise de conscience d'un problème moteur est apparue aux yeux des parents.
4 Cas particulier : les hypotonies de révélation néonatale
Mis à part les hypotonies d'origine nerveuse centrale, elles peuvent révéler une maladie neuro-musculaire.
- Dès la période anténatale, on peut observer : un hydramnios, une diminution des mouvements actifs foetaux, une arthrogrypose.
- En période néonatale : une détresse respiratoire, des rétractions musculaires tendineuses, une amimie, des oedèmes, des troubles de déglutition. A la radiographie pulmonaire, des côtes grêles, des coupoles diaphragmatiques surélevées.
Aucun de ces signes n'est spécifique d'une maladie. La biopsie musculaire est l'examen clef du diagnostic étiologique. Le conseil génétique est difficile, variant avec l'étiologie.
5 Les examens complémentaires
5.1 Les clichés pris avec des rayons mous, apprécieront l'importance de l'amyotrophie contrastant avec un pannicule adipeux cutané épais.

5.2 Les enzymes sériques d'origine musculaire (surtout créatine phosphokinase) seront recherchés : très élevés ils sont en faveur d'une myopathie (normale x 10), peu élevés, ils peuvent se voir dans tout processus amyotrophique.

5.3 Les examens électriques seront pratiqués :
- l'étude électromyographique, difficile chez le jeune nourrisson ; tracé de type neurogène périphérique ou myogène.
- la vitesse de conduction nerveuse est éventuellement très abaissée dans certaines neuropathies.

5.4 La biopsie musculaire est l'examen clef. Un fragment musculaire de bonne taille, bien orienté, est étudié en microscopie optique avec analyse immunohistochimique et en microscopie électronique. Un fragment musculaire doit être prélevé pour congélation immédiate dans l'azote liquide et stockage à - 80°C. Une analyse ultérieure, notamment en biologie moléculaire pourra être effectuée.
6 Les orientations étiologiques
Selon la nature du trouble on peut distinguer :

- L'atteinte neurogène :

    * amyotrophie spinale infantile (maladie de Werdnig-Hoffmann) la plus fréquent,
    * polyneuropathie,
    * myélomalacie de cause obstétricale.

- L'atteinte myogène :

    * myopathie congénitale,
    * dystrophie myotonique de Steinert.

Ces deux premiers groupes entraînent une impotence motrice.

- L'atteinte centrale :

    * cérébrale,
    * cérébelleuse, élective

- L'hyponie congénitale dite bénigne avec important retard du développement du tonus.
6.1 Il existe une impotence motrice
6.1.1 Atteinte neurogène périphérique
6.1.1.1 L'amyotrophie spinale infantile (ASI)
C'est une affection génétique transmise sur le mode autosomique récessif. Les lésions dégénératives de la corne antérieure prédominent dans la mœlle cervicale et lombaire. Le gène est localisé sur le chromosome 5 depuis 1990 et identifié en CR5 q13 depuis 1995 (Cell 1995, 80: 155-165)

L'hypotonie est massive, généralisée, symétrique, les paralysies sont flasques, également symétriques, à prédominance proximale, nuque, ceinture pelvienne et scapulaire, laissant persister quelques mouvements des extrémités. Il importe d'apprécier la dynamique respiratoire ; l'atteinte porte sur les intercostaux aspirés à l'inspiration. L'activité du diaphragme est longtemps conservée. Le cri est faible. La toux est misérable. La déglutition n'est atteinte que tardivement.

L'amyotrophie est constante mais souvent masquée par l'adiposité. Les réflexes ostéo-tendineux sont abolis. Il faut apprécier l'existence éventuelle de rétractions tendineuses. Pendant cet examen on aura remarqué que la mimique est relativement conservée (elle le sera longemps). On aura aussi pu remarquer des fibrillations de la langue avec ou sans atrophie.

L'intellect, apprécié par le comportement de l'enfant, des tests non moteurs, est normal.

L'évolution est toujours redoutable mais varie dans sa gravité en fonction de la forme clinique d'ASI.

    * ASI de type I ou maladie de Wernig-Hoffmann : c'est la forme la plus grave, aboutissant le plus souvent au décès de l'enfant au cours de la première année de vie. Le capital neurologique existant à la naissance se détériore rapidement. Au bout de quelques mois, il existe une hypotonie majeure, une mobilité restreinte à quelques mouvements fins des extrémités (l'enfant ne peut soulever les racines des membres, ne tiend pas sa tête). Cette atteinte motrice grave contraste avec un regard vif, un éveil normal. La mort est souvent secondaire à une surinfection pulmonaire avec détresse respiratoire.

    * ASI de type II. Le début est plus tardif, la maladie est détectée par le retard de position assise, voire à la marche. La plupart de ces cas évoluent cependant vers la mort. Toutefois quelques enfants survivent. (Il semble que le processus dégénératif de la corne antérieure s'arrête au bout de quelques années et permet une stabilisation. Des phénomènes de suppléance pourraient même donner l'impression d'une amélioration). Ces enfants restent néanmoins de grands infirmes moteurs, avec des retractions tendineuses, des déformations osseuses secondaires.

    * ASI de type III ou maladie de Kukelberg-Welander. Les premières étapes du développement psychomoteur sont normales : la marche est acquise sans retard. Les difficultés motrices apparaissent au cours de la deuxième décade. Elles s'aggravent progressivement et la perte de la marche survient généralement au cours de la troisième décade.

Les examens nécessaires au diagnostic sont :

    * L'électromyogramme qui montre un tracé neurogène.
    * La biopsie neuro-musculaire : le muscle a un aspect d'atrophie neurogène fasciculaire, évocatrice du diagnostic. Le nerf sensitif est normal.
    * La biologie moléculaire est maintenant réalisée de première intention. En effet, depuis la localisation génique de la maladie, il est possible d'affirmer le diagnostic à partir d'un simple prélèvement sanguin. Les résultats sont assez longs à obtenir (environ 3 mois). Aussi, il est encore justifié de faire une biopsie neuro-musculaire lorsque le risque vital est en jeu à court terme, ou s'il existe un doute diagnostique.

Le traitement de la maladie est symptomatique : kinésithérapie avec prévention des rétractions tendineuses, corrections orthopédiques, prévention et traitement des infections respiratoires. Il n'y a pas, actuellement de traitement spécifique.

Il existe maintenant la possibilité de faire un diagnostic anténatal par la biologie moléculaire à partir d'une biopsie de trophoblaste réalisée à 11 semaines d'aménorrhée. Cela n'est possible qu'à la condition d'avoir pu prélever et conserver du sang ou du muscle du sujet atteint dans la famille.
6.1.2 Atteinte myogène
6.1.2.1 La dystrophie musculaire congénitale type Duchenne de Boulogne
Affection génétique transmise sur le mode récessif lié au sexe (localisé au Xp 21), c'est la plus fréquente des affections du muscle qui touche un garçon sur 2500. Le début se situe entre l'âge de 18 mois et 3 ans mais peut atteindre l'enfant très jeune ; la faiblesse musculaire est le signe majeur, gêne la marche et s'extériorise par la difficulté à se relever ; l'hypotonie toujours présente passe souvent au second plan. Un déficit intellectuel modéré est fréquemment associé.

Le diagnostic est confirmé par l'élévation importante des enzymes musculaire, l'aspect myogène de l'électromyogramme et les résultats de la biopsie musculaire. Celle-ci montre une irrégularité du calibre des fibres musculaires associés à des signes dystrophiques ; la présence de fibres musculaires nécrosées, parfois en cours de phagocytose par des macrophages ; l'augmentation de l'intersticium. L'analyse immunohistochimique de la dystrophine est négative. L'absence de la protéine musculaire "dystrophine" est un argument majeur en faveur d'une dystrophie musculaire de type Duchenne de Boulogne.

La myopathie de Becker est la forme plus tardive de la maladie. Elle résulte de l'altération du même gène.

L'analyse en biologie moléculaire met en évidence une délétion dans 60% des cas. Le diagnostic anténatal est possible lorsque la famille est informative.

6.1.2.2 Les autres myopathies congénitales, depuis une vingtaine d'années, ont été individualisées grâce à l'apport de la microscopie électronique et de l'histoenzymologie, des myopathies congénitales d'évolution bénigne ou plus exactement d'évolution non progressive.

Il ne convient pas d'exagérer pour l'instant l'importance quantitative de ces faits qui restent une pathologie d'exception. Cependant, avec les progrès de la technique histologique, il est possible que ces cas se multiplient.

Ces formes ont en commun la constatation de l'hypotonie dès la naissance, parfois modérée, parfois considérable.

Dans la plupart des formes, les taux sériques des enzymes musculaires, aldolase et créatine phosphokinase sont normaux. L'électromyogramme peut montrer des signes d'atteinte myogène mais très inconstamment.

En raison du faible nombre de cas observés, le mode de transmission génétique n'est pas toujours connu avec précision.

En fait, c'est l'histologie qui différencie les différentes formes. Citons parmi ces affections :

    * maladie de Steinert néonatale (dystrophie myotonique, dominante autosomique, mais seule la mère peut transmettre la forme néonatale,
    * la myopathie à axe central (central core disease),
    * la myopathie à bâtonnets (nemaline myopathy),
    * la myopathie centro-nucléaire ou myotubulaire (récessive liée à l'X),
    * les myopathies mitochondriales,
    * l'hypoplasie des fibres musculaires de type 1.

L'évolution est variable avec souvent une stabilisation voire une amélioration après un cap difficile lors de la période néonatale.

6.1.2.3 Les autres atteintes musculaires, sont en général d'un diagnostic plus facile par le contexte clinique.

Parmi les glycogénoses c'est le déficit en alphaglucosidase lysosomiale (maladie de POMPE) qui donne les hypotonies généralisées les plus marquées. Il s'y associe une cardiomégalie, une macroglossie.

Les myasthénies sont en réalité des maladies de la jonction neuromusculaire. On distingue deux groupes de faits : un état myasthénique transitoire chez le nouveau-né de mère myasthénique, et la myasthénie héréditaire qui peut se manifester dès la naissance par une hypotonie globale encore que le plus souvent les signes soient localisés à la face. Le diagnostic repose sur le test à la prostigmine ou au tensilon.
6.2 Absence de paralysie mais éveil insuffisant de l'intelligence et du développement socio-affectif
Les atteintes cérébrales post-anoxiques ou post-hémorragiques, l'anamnèse anté ou périnatale l'expliquent, l'utilisation des groupes musculaires concourant à la même fonction est perturbée, le développement du périmètre crânien est souvent insuffisant. Dans ces cas, l'hypotonie n'est pas évolutive et n'est souvent qu'une étape vers une autre forme d'IMC : une ataxie ou une dystonie.
6.3 L'hypotonie est le fait d'un retard plus ou moins important et durable du développement du tonus,
s'accompagnant donc d'un retard des acquisitions posturales. La gracilité musculaire est parfois nette ; il n'y a cependant pas de problème de déglutition ou respiratoire ou l'évolution vers des rétractions. Ce chapitre est en voie de remaniement à la suite des procédés modernes d'investigation.

Ce survol du problème des hypotonies majeures et globales du jeune enfant pose le problème du diagnostic étiologique parfois difficile, du pronostic variable selon la cause et du conseil génétique.
7 Démarche diagnostique devant une hypotonie du nouveau-né et du nourrisson
Au cours de l'interrogatoire et de l'examen clinique, sont investigués les items suivants :

(1) TONUS
(2) MOTRICITE
(3) VIGILANCE ET FONCTIONS SUPERIEURES : l'EEG et le scanner crânien peuvent être utiles.
(4) CONTEXTE : familial, fœtal, périnatal, signes extra-neurologiques associés.

Dans le tableau suivant, les principaux groupes étiologiques sont analysés en fonction des données cliniques pré-citées.
 
Etiologie
   
Force musculaire
   
Vigilance
   
Fonctions supérieures
   
Risque sur les fonctions vitales
Pathologie neuromusculaire    
î
   
N
   
N
   
+
Encéphalopathies aiguës périnatales    
î
   
î
   
î
   
++
Encéphalopathies congénitales    
N
   
+ N
   
î
   
+
Pathologie aiguë    
î
   
N ou altération transitoire
   
N ou altération transitoire
   
++
Trouble isolé du tonus    
+ N
   
N
   
N
   
-
 

Au terme de cette analyse, une réponse doit être apportée à la question : l'hypotonie est-elle d'origine centrale ou périphérique? Toute la démarche diagnostique ultérieure est conditionnée par la réponse à cette question :

    * Soit il s'agit d'une pathologie centrale et le raisonnement est le même que dans le retard psychomoteur (QS).
    * Soit il s'agit d'une pathologie périphérique et nous allons tenter de préciser la méthode la plus efficace pour aboutir à un diagnostic précis, notamment en période néonatale (période de complexité redoutable).

L'examen clinique et le contexte (oligoamnios, diminution des mouvements actifs fœtaux…) ne permettent pas de différencier un tableau "myogène", d'un tableau "neurogène" au cours de la période néonatale.
L'électromyogramme est rarement informatif pendant cette période, car de réalisation et d'interprètation difficiles.
Les enzymes musculaires ne sont augmentées qu'en cas de nécrose musculaire. Or les myopathies néonatales de révélation précoces sont rarement très nécrosantes. De plus, la proximité de l'accouchement perturbe l'analyse des enzymes musculaires.

En pratique, LE SEUL EXAMEN INFORMATIF, DONC INDISPENSABLE EST LA BIOPSIE NEURO-MUSCULAIRE. Elle doit comporter une analyse en microscopie optique avec immunohistochimie, une analyse en microscopie électronique. Un fragment supplémentaire de muscle ± de nerf doit être prélevé et congelé à -80°C. En effet, une analyse ultérieure soit en microscopie, soit en biologie moléculaire est alors possible, à la lumière des avancées scientifiques dans le domaine des maladies neuro-musculaires. Si l'enfant est vivant, cela évite une deuxième biopsie, s'il est décédé, c'est souvent le seul moyen d'accéder à un diagnostic anténatal lorsque celui-ci devient possible.
Anémies du nourrisson et du grand enfant
E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 6 mars 2000

Objectifs
1 Anémies microcytaires : carences martiales
1.1 Prévalence de l'anémie nutritionnelle
1.2 Rappel sur le métabolisme du fer
1.3 Etiologies
1.4 Diagnostic de la forme typique
   

1.5 Formes cliniques
1.6 Diagnostic différentiel
1.7 Traitement des carences martiales
2 Anémies hémolytiques
2.1 Anémies hémolytiques constitutionnelles
2.2 Anémies hémolytiques acquises
Objectifs
1. Interpréter une numération formule sanguine et un myélogramme en fonction de l'âge.

2. Décrire la conduite de l'examen clinique chez un nourrisson pâle.

3. Enumérer les facteurs favorisant la survenue d'une anémie ferriprive du nourrisson.

4. Enumérer et interpréter les examens de laboratoire nécessaires pour confirmer une anémie par carence martiale.

5. Rédiger l'ordonnance du traitement d'une anémie ferriprive chez un nourrisson.

6. Enumérer les signes cliniques et biologiques d'hémolyse.

7. Citer les causes d'anémie hémolytique acquise chez l'enfant.

8. Donner les signes cliniques et biologiques de la maladie de Minkowski-Chauffard et sa thérapeutique.

9. Donner les éléments anamnestiques, cliniques et biologiques de l'hémoglobinose S.

10. Donner les éléments anamnestiques, cliniques et biologiques de la thalassémie.

L'anémie se définit par une diminution de la masse des globules rouges ou de la concentration de l'hémoglobine circulante par rapport aux valeurs correspondant à l'âge de l'enfant. Elle se définit pour des valeurs inférieures à -2DS. Ainsi, 2,5% d'enfants sains sont considérés avoir une anémie modérée.
L'anémie peut être découverte soit à l'occasion d'une numération systématique, soit en raison de symptômes liés à l'anémie : pâleur de la peau et des muqueuses, asthénie, polypnée, tachycardie, céphalées, vertiges, bourdonnements d'oreilles, souffle systolique anorganique, troubles de la conscience.

La démarche diagnostique repose sur les éléments suivants :
- interrogatoire et données cliniques : antécédents de l'enfant (prématurité, gémellité, cas familiaux, conditions d'alimentation, notions de récidive), l'ethnie, le début brutal ou progressif, des signes cliniques associés (ictère sans décoloration des selles ni urines foncées, splénomégalie, hépatomégalie, adénopathies, signes hémorragiques, douleurs articulaires ou osseuses, couleur des urines).
- données biologiques : des examens simples permettent d'orienter le diagnostic : chiffre des globules rouges avec taux d'Hb, d'Ht, VGM, TGMHb, numération des réticulocytes, mesure de la bilirubinémie, sidérémie avec mesure de la capacité totale de fixation de la transferrine et coèfficient de saturation, numération des leucocytes et des plaquettes.

 
1 Anémies microcytaires

Elles sont dominées par les carences martiales.
Les carences martiales

Elles réalisent des anémies hypochromes hyposidérémiques. On distingue :

    *
      les carences d'apport,
    *
      les carences par hémorragie.

La carence en fer est fréquente et souvent nutritionnelle surtout entre 6 mois et 2 ans. Sa découverte dans la seconde enfance impose de rechercher une hémorragie.
Le diagnostic est en règle facile. Il est le plus souvent évoqué devant une anémie microcytaire découverte lors d'un examen systématique, en raison de la bonne tolérance clinique.
Le traitement martial per or est efficace. Il doit être donné suffisamment longtemps pour restaurer les réserves. A cela s'ajoute bien sûr le traitement d'une éventuelle hémorragie. Nous insistons sur la nécessité d'une alimentation diversifiée.
1.1 Prévalence de l'anémie nutritionnelle

La carence en fer constitue, selon l'O.M.S, le trouble nutritionnel le plus répandu dans le monde, environ 15% de la population mondiale. Les femmes en âge de procréer, notamment les femmes enceintes et les enfants, surtout en période de croissance rapide (les deux premières années et au cours de l'adolescence) sont les groupes à plus haut risque de carence martiale. Peu d'études ont évalué avec précision le statut du fer des enfants avec les nouveaux indicateurs biochimiques qui permettent un diagnostic précis de la carence en fer depuis le stade de la déplétion des réserves jusqu'à celui de l'anémie ferriprive.

Une étude publiée en 1989, effectuée en France entre Décembre 1985 et Mai 1986, a montré que la carence en fer avec des indicateurs biochimiques fiables apparaît donc largement répandue dans une population présumée saine.
Pour les enfants nés de parents français métropolitains, 29% à 10 mois, 13% à 2 ans et 7% à 4 ans ont des signes biochimiques évidents de carence en fer.
Pour les enfants nés de parents immigrés, les prévalences sont respectivement de 50%; de 44% et de 15%. Il existe une anémie par carence martiale chez respectivement 8%, 3% et 0,3% des enfants nés de parents français métropolitains ; chez 23%, 24% et 4% nés de parents immigrés. Ainsi donc la carence en fer et l'anémie ferriprive sont plus répandues chez les enfants nés de parents immigrés.
Les enfants de 10 mois ainsi que ceux nés de parents immigrés constituent un groupe à risque.

Dans le monde, la prévalence de l'anémie est élevée :

    *
      Bangladesch (82%) pour les enfants de moins de 4 ans,
    *
      Indonésie : entre 6 mois et 6 ans, elle est de 37;8% à 3% des enfants bien nourris mais à niveau socio-économique faible et elle varie de 85% à 100% lorsque les enfants sont dénutris,
    *
      Philippines : elle est de 45% chez les enfant de moins de 9 ans,
    *
      Argentine : elle est de 30%.
    *
      Etats-Unis, le déficit en fer constitue encore un problème chez les enfants de 3 ans où la prévalence de l'anémie (hémoglobine inférieure à 11g pour 100) varie de 7% à 14% parmi les enfants blancs et de 1% à 39% parmi les noirs. 

Au total : il n'est pas facile d'évaluer avec précision la prévalence de l'anémie en fer, d'une part parce qu'il n'y a pas eu de grandes études dans les pays où les moyens techniques le permettent, et que, d'autre part, dans les pays où la prévalence est la plus élevée, les moyens biologiques sont plus rudimentaires. Toutefois, on peu conclure que la prévalence est élevée et en particulier dans les pays en voie de développement. Plusieurs facteurs peuvent être intriqués sur lesquels nous reviendrons (schéma 1).

1.2 Rappel sur le métabolisme du fer
1.2.1 Répartition du fer dans l'organisme

Les composés contenant du fer se groupent en deux catégories :

    *
      le fer servant aux fonctions enzymatiques et métaboliques,
    *
      le fer de stockage et de transport.

Chez l'enfant, le fer se répartit comme suit :

    *
      fer hémoglobinique : 75%,
    *
      fer de stockage (ferritine + hémosidérine) : 20%,
    *
      myoglobine : 4%,
    *
      enzymes + transferrine : 1%.

Chez le nouveau-né normal la quantité totale de fer est de 75 mg/kg. Chez le prématuré elle est de 70 mg/kg. Après l'âge de 6 mois, elle est de 50 mg/kg. La teneur en fer est proportionnelle au poids du corps et à la masse hémoglobinique (la ligature précode du cordon peut diminuer le capital en fer de 15% à 30%).

La plus grande partie du fer est contenue dans l'hémoglobine. C'est un atome actif des groupes prosthétiques héminiques de nombreux enzymes.

Dans le plasma, la transferrine (sidérophyline) transporte le fer des sites d'absorption et de stockage vers la moëlle érythropoïétique. A l'état normal, elle n'est jamais saturée. Son taux augmente quand la sidérémie diminue. Le taux normal du fer sérique est de 12,5 à 25 µmol/l.

Le fer de réserve se trouve sous forme de ferritine et d'hémosidérine. Le fer de la ferritine est facilement échangeable avec la transferrine. Elle peut être dosée et son taux est proportionnel aux réserves. L'hémosidérine est une autre forme de stockage du fer. Le stockage a lieu dans le foie, dans les cellules du système réticuloendothélial et dans les précurseurs érythrocytaires de la moëlle. A la naissance, le taux de ferritine est élevé, 100 à 200 ng/ml. A l'âge de 15 ans, le taux est de 30 ng/ml. En moyenne, 1 ng/ml de ferritine sérique correspond à 10 mg de fer de réserve sous forme de ferritine.
1.2.2 Absorption du fer

Elle dépend de la quantité et de la forme de fer présent dans les aliments, des interactions avec les autres composants alimentaires et de la régulation de l'absorption au niveau de la muqueuse.
Elle se fait au niveau du duodénum et la partie haute de l'iléon ; elle est proportionnelle aux besoins. Une augmentation de l'érythropoïèse (anémie hémolytique chronique, érythropoïèse inefficace) ou une baisse des réserves de fer favorisant l'absorption intestinale. Le fer héminique de la viande est mieux absorbé que le fer végétal ou le fer ferritinique du foie et du poisson.
La viande animale a un effet facilitant de l'absorption du fer par un mécanisme inconnu. Il existe une excellente biodisponibilité du fer du lait maternel (45 à 75%) comparée à celle du lait de vache (10%).
La vitamine C augmente l'absorption et d'autres facteurs la diminuent (thé, son, phytates et argile).
1.2.3 Besoins en fer

Les besoins en fer sont importants lors de la croissance et en particulier les deux premières années et lors de l'adolescence.

La perte de fer est faible, en moyenne 1mg/jour chez l'adulte et 20µg/kg/j chez l'enfant. Lors de l'installation des règles, les pertes sont nettement majorées.

Le capital martial d'un nouveau-né est voisin de 250 mg de la naissance à 4 mois et de 500 mg à l'âge d'un an soit une augmentation de 250 mg en 8 mois soit environ 1 mg/j.

Entre 6 mois et 10 ans, les besoins sont de l'ordre de 1 mg de fer absorbé par jour, ce qui suppose un apport alimentaire moyen de fer de 10 mg/jour, compte-tenu d'une absorption de 10%.

Tableau I : Estimated requirements of absorbed iron for boys (mg/days)
AGE
   
0-6 months
   
6-12 months
   
1-2 years
   
2-8 years
Requirements for growth(a)    
0,25
   
0,53
   
0,29
   
0,23
Iron Losses(b)    
0,24
   
0,37
   
0,46
   
0,56
Total requirements    
0,49
   
0,90
   
0,75
   
0,79

a) Calculated from dat by Smith and Rios (9)
(b) Estimated at 0,04 mg/kg from 0-2 years and 0,03 mg/kg from 2-8 years;
d'après A. STEKEL (in 1)
1.3 Etiologies
1.3.1 Besoins physiologiques augmentés :
- la prématurité : la prévention doit être systématique
- périodes de croissance rapide : deux premières années et période pubertaire.
1.3.2 Carences d'apport et diminution de l'assimilation :
- régime pauvre en fer : erreurs de régimes. La supplémentation des laits en fer est nécessaire. Toutefois, il semble y avoir un déplacement de l'anémie ferriprive de la première année vers la deuxième ou troisième année.
- malabsorption : syndrome coeliaque, chirurgie gastrique, pica, entéropathie au lait de vache.
1.3.3 Les hémorragies :
Il s'agit souvent d'hémorragies chroniques, 2 ml de sang éliminent 1 mg de fer.

- hémorragies survenant chez le foetus avant la naissance, pendant l'accouchement ou en période néonatale,
- oesophagite, maladie chronique de l'intestin, ulcère, polypes, angiomes,
- parasitoses intestinales : ankylostomes, shistosomes,
- facteurs de saignement : médicaments, troubles chroniques de l'hémostase, varices oesophagiennes, épistaxis et hématuries récidivantes, règles abondantes,
- iatrogènes : prélèvements itératifs, en particulier chez les petits enfants.
 
Au total : lorsqu'une carence d'apport peut être éliminée, il faut absolument rechercher une hémorragie. Il faut tout d'abord rechercher un saignement digestif. La recherche de sang dans les selles n'est pas un examen très pertinent. Aussi, il ne faut pas hésiter à faire une fibroscopie digestive, une colonoscopie ou une rectoscopie.
1.4  Diagnostic de la forme typique des carences martiales du nourrisson
On est amené à découvrir une carence martiale soit lors d'un examen biologique systématique, soit devant des manifestations cliniques d'intensité variable.
1.4.1 L'interrogatoire
Précise les antécédents concernant le déroulement de la grossesse, l'état à la naissance et les conditions de vie et d'alimentation.
1.4.2 Les signes cliniques

Ces signes cliniques dépendant de l'importance et de la durée de la carence :
- la pâleur est un signe habituel, isolée dans les formes modérées ou associée à d'autres symptômes dans les formes plus graves.
- altération de l'état général : asthénie, anorexie, tristesse, apathie ou irritabilité, perte de poids,
- tachycardie, souffle systolique, lipothymies, vertiges, dyspnée d'effort en cas d'anémie sévère,
- fièvre liée à des infections traînantes et répétées, notamment pulmonaires et ORL,
- troubles gastro-intestinaux en rapport avec une entéropathie exsudative et des défauts de sécrétion des enzymes digestifs,
- hépatomégalie et splénomégalie : modérées et inconstantes,
- ongles fins et cassants : atrophie des papilles de la langue ; inflammations des gencives, de l'anus et du vagin. Ceci est exceptionnel chez l'enfant et souvent le fait de polycarences en vitamines ou oligoéléments, d'apport ou d'absorption.
1.4.3 Les signes biologiques

Pour affirmer le diagnostic, il faut tenir compte des variations des paramètres érythrocytaires en fonction de l'âge (tableaux II et III)

Tableau II : Valeurs normales de la numération des globules rouges en fonction de l'âge.
(d'après référence 3)
     
Nouveau-né
   
3 mois
   
1 an
   
3-6 ans
   
10-12 ans
Globule rouges (millions/mm3)    
5,2 + 1
   
4 + 0,8
   
4,4 + 0,8
   
4,8 + 0,7
   
4,7 + 0,7
Hémoglobine (g/100 ml)    
17,2 + 2,5
   
11,5 + 1,5
   
12 + 1
   
13 + 1
   
13 + 1,5
Hématocrite (%)    
54 + 8
   
38 + 6
   
39 + 6
   
40 + 4
   
41 + 4
VGM (m3)    
102 +10
   
96 + 5
   
78 + 8
   
81 + 8
   
84 + 7
TCMH (Picogrammes)    
33 + 4
   
29 + 5
   
27 + 4
   
27 + 3
   
27 + 3
CCMH (%)    
33 + 2
   
33 + 2
   
33 + 2
   
33 + 2
   
33 + 2
 

Tableau  III : Valeurs normales et pathologiques de la ferritine et du fer sérique
(d'après référence 3)
     
Normale
6 mois - 2 ans
   
Carence
prélatente
   
Carence
latente
   
Carence
manifeste
Ferritine (ng/ml)    
30
   
20
   
10
   
< 10
Capacité totale de la fixation de la sidérophiline (g/100 ml)    
330 + 70
   
360
   
390
   
410
Saturation de la sidérophiline (%)    
35 + 15
   
30
   
< 15
   
< 10
Fer sérique (g/100 ml)    
95 + 30
   
95
   
< 60
   
< 40
Globules rouges    
normaux
   
normaux
   
normaux
   
microcytose puis anémie

 

· Hémogramme : il s'agit d'une anémie microcytaire et hypochrome. Le taux des érythrocytes est normal ou diminué. Les éléments caractéristiques sont : une diminution de l'hémoglobine inférieure à 11 g/dl, une diminution de la teneur globulaire moyenne en hémoglobine inférieure à 24 pg avant 2 ans et à 25 ensuite, un volume globulaire inférieur à 70 fl avant 1 an et inférieur à 74 fl ensuite. La concentration en hémoglobine a peu d'intérêt. Sur lames, les érythrocytes ont une taille réduite à centre pâle avec un mince anneau d'hémoglobine (annulocyte). Par ailleurs, les leucocytes sont normaux, les plaquettes un peu augmentées. Les réticulocytes sont normaux ou légèrement élevés.

· Diminution du fer sérique : la sidérémie est basse, inférieure à 10 µmol/l. La capacité totale de fixation de la transferrine est augmentée et le coefficient de saturation est diminué parallèlement au fer sérique.

· Ferritine sérique : la ferritine est une protéine qui reflète l'état des stocks tissulaires en fer. Sa diminution est le témoin le plus précoce d'une carence martiale et son taux normal entre 6 mois et 2 ans, est de l'ordre de 30 ng/ml. Une ferritine inférieure à 12 µgrammes/l (ou ng/ml) indique une déplétion du stock de fer. Ceci étant, lors des syndromes inflammatoires, il peut y avoir une élévation de la ferritine pouvant persister plusieurs semaines après la période symptomatique et il en est de même avec les atteintes hépatiques.
Aussi, lors des syndromes des maladies inflammatoires, lorsque la ferritine est inférieure à 50 µgrammes/l, on peut craindre un déficit en fer.

· Dosages de la protoporphyrine érythrocytaire. Il y a une accumulation de la protoporphyrine dans les globules rouges lorsqu'il y a insuffisamment de fer pour former l'hème. Il existe des accumulations de protoporphyrine lors des intoxications par le plomb et lors des déficits en fer. La limite supérieure de la protoporphyrine érythrocytaire est d'environ 3 µgrammes/g d'hémoglobine.

Aussi, ces examens biologiques permettront de classer les étapes d'un déficit en fer :
- Première étape : diminution de la ferritine seule qui correspond à une diminution des réserves. Une coloration d'un étalement médullaire pourrait montrer une telle déplétion. Les sidéroblastes sont diminués.
- Seconde étape : diminution du transport du fer. Cette étape est transitoire, caractérisées par une diminution du fer sérique et une augmentation de la capacité de fixation du fer.
- Troisième étape : diminution de la production d'hémoglobine avec élévation de la protoporphyrine érythrocytaire et apparition d'une anémie et d'une microcytose.
1.5 Formes cliniques
1.5.1 Carences martiales du nourrisson.
1.5.1.1 Formes frustes
Très fréquentes. L'anémie est modérée et parfois seule l'hyposidérémie est notée.
1.5.1.2 Cardiopathies congénitales cyanogènes
En raison d'une augmentation de l'hémoglobinosynthèse, une supplémentation martiale est justifiée.
1.5.1.3 Syndrome de Von Jaksch Luzet
Ce syndrome correspond non seulement à une carence martiale sévère mais à une polycarence en vitamines et en oligoéléments. Le tableau associe tous les signes de carence martiale et de rachitisme. Le bilan biologique montre un effondrement du fer sérique, une myélémie et une moëlle pauvre. Ce syndrome est le résultat de trois phénomènes : hyperhémolyse corpusculaire, une insuffisance médullaire, une érythropoïèse hépatosplénique de compensation.
1.5.1.4 Anémie hypochrome associée à une hypocupréinie.
1.5.2 Carences martiales de la deuxième enfance
- Après l'âge de 3 ans : la carence martiale est exceptionnelle. Cela survient dans les cas de carence martiale du 1er âge non traités ou d'une anorexie. Dans les autres cas, il faut toujours rechercher une hémorragie.
- Période pré et pubertaire : outre les causes précédentes, il faut penser à l'augmentation des besoins chez les filles.
1.6 Diagnostic différentiel
Le diagnostic se pose essentiellement avec des anémies microcytaires et hypochromes. Le diagnostic positif d'une carence martiale est en règle, facile, en tenant compte de l'interrogatoire avec en particulier les antécédents obstétricaux, les conditions d'alimentation, l'examen clinique et le tableau biologique.
1.6.1 Les anémies inflammatoires

Il existe une mauvaise réutilisation du fer à partir des globules rouges sénescents et une baisse de l'absorption du fer. De plus, l'utilisation d'anti-inflammatoires peut favoriser les saignements occultes. Il s'agit le plus souvent d'une infection chronique avec syndrome inflammatoires (augmentation de la vitesse de sédimentation, du fibrinogène et des a 2 globulines et de la CRP), et plus rarement, d'une inflammation aiguë
Le déficit en fer et l'inflammation se caractérisent en commun par une anémie moyenne, un fer sérique bas, une élévation de la protoporphyrine érythrocytaire et un volume globulaire modérément abaissé. Deux tests de laboratoire peuvent donner des résultats divergents. Dans l'inflammation chronique, la sidérophiline est souvent diminuée et la ferritine normale ou élevée-; dans les carences en fer, la sidérophiline est augmentée et la ferritine est diminuée. Nous rappelons qu'une ferritine sérique inférieure à 25-30µgrammes/l, chez les patients anémiques avec une arthrite rhumatoïde, une maladie rénales ou des maladies hépatiques, suggère une carence en fer.
1.6.2 Thalassémie mineure
A côté du déficit en fer, la thalassémie mineure est la cause la plus fréquente des anémies modérées avec microcytose. Dans ce cas, le volume globulaire est généralement très abaissé. Le diagnostic est fait par l'électrophorèse de l'hémoglobine qui révèle une élévation de l'hémoglobine A2. L'électrophorèse ne doit être faite que lorsque le taux de fer sérique est normal. L'a thalassémie peut être suspectée et le diagnostic sera fait par une étude de la synthèse des chaînes.
1.6.3 Intoxications au plomb
1.6.4 Déficit nutritionnel combiné
Les combinaisons bien documentées comprennent soit un déficit protéinocalorique, soit un déficit en folates. Chacun de ces déficits peut être responsable d'anémie et compliquer le diagnostic de carence martiale.
1.7 Traitement des carences martiales
1.7.1 Traitement préventif

- durant la grossesse, la mère doit avoir un apport de fer suffisant,
- ne pas ligaturer trop tôt le cordon,
- recommander l'allaitement maternel,
- supplémenter les nouveau-nés à risque à partir du 2ème mois et pendant 3 mois, 2mg/kg/jour, de fer élément. Ceci étant, le Comité de Nutrition de l'Académie Américaine de Pédiatrie recommande des doses complémentaires de fer en cours de la première année de vie (commencer à 4 mois pour les enfants à terme et à 2 mois pour les prématurés et enfants à risque) avec une posologie qui ne devrait pas dépasser 1 mg/kg/j. pour les enfants à terme et 2mg/kg/j. pour les pré-termes, sans dépasser 15 mg/j.
- diversifier précocement l'alimentation avec des légumes variés et de la viande. Nous rappelons que la biodisponibilité du fer varie considérablement selon les aliments et leur préparation, et selon l'importance chimique au niveau de l'intestin. Il existe deux compartiments en terme d'absorption ; les pools ferriques héminique et non héminique. Le fer héminique présent dans l'hémoglobine et la myoglobine est bien absorbée et relativement peu touchée par la compostion des aliments. Par contre, le fer non héminique présent dans les légumes, les céréales et quelques aliments d'origine animale est mal absorbé et nettement influencé par des substances facilitatrices ou inhibitrices,
- utiliser des laits, des farines et des céréales enrichies en fer,
- éviter les pertes excessives de fer : traiter les maladies parasitaires, hémorragies lors d'une gastro-entérite.
1.7.2 Traitement curatif
1.7.2.1 Les produits utilisés :
La voie parentérale (I.M ou I.V) est à proscrire en raison du risque de choc pouvant être mortel. La voie orale est la voie habituelle et on peut utiliser différents sels de fer (Gluconate, Fumarate, Ascorbate, sulfate,...).
1.7.2.2 La conduite du traitement :

    * Prescription de fer per os

- Traitement d'attaque : 5 à 10 mg/kg/j. de fer élément en 2 à 3 prises à distance des repas (vérifier la proportion de fer métal contenue dans la spécialité prescrite). Les selles sont colorées en noir. En cas de posologie élevée, des signes d'intolérance peuvent apparaître (vomissements, diarrhée, constipation). Ce traitement est en règle poursuivi pendant 2 mois.
- Traitement de consolidation : il est recommandé de faire un relais (3 à 5 mg/kg/j. de fer élément) pendant 2 à 3 mois pour reconstituer le stock de fer.

    * Transfusion sanguine réservée aux anémies sévères (hémoglobine < à 5g/dl).

1.7.2.3 Evolution ou traitement
- amélioration clinique avec reprise de l'appétit, recoloration cutanée et meilleur caractère,
- crise réticulocytaire entre 5è et 10è jour puis remontée de l'hémoglobine.
- la ferritine permet d'évaluer la reconstitution du stock martial.
Un échec du traitement est presque toujours lié à une mauvaise compliance thérapeutique ou un traitement insuffisant.
1.7.3 Traitement d'une étiologie
2 Anémies hémolytiques
2.1 Anémies hémolytiques constitutionnelles
Les anémies hémolytiques constitutionnelles :

    * sont des maladies héréditaires qui se manifestent plus ou moins tôt chez l'enfant,
    * sont dues à une obstruction des globules rouges par un mécanisme corpusculaire génétiquement déterminé,
    * ont des manifestations communes à côté de leur spécificité : une anémie, un ictère et souvent une splénomégalie,
    * se subdivisent en trois groupes selon l'anomalie responsable : la membrane, l'hémoglobine et les enzymes érythrocytaires.

2.1.1 Anomalie de la membrane (maladie de Minkowski-Chauffard)
La maladie de Minkowski-Chauffard ou sphérocytose héréditaire est la plus fréquente des anomalies constitutionnelles de la membrane du globule rouge dans les pays d'Europe du Nord.
C'est une maladie héréditaire à transmission autosomique dominante dans au moins 75 % des cas (déficit en spectrine b ou en protéine 3), à transmission autosomique récessive (déficit en spectrine a ou en protéine 4.2) ou liée à une mutation dans quelques cas.
2.1.1.1 Diagnostic positif de la forme typique
2.1.1.1.1 Clinique

Les manifestations initiales peuvent apparaître de la naissance à l'âge adulte mais elles surviennent préférentiellement durant l'enfance. Elles sont dominées par l'anémie, l'ictère, et la splénomégalie. Le tableau est cependant variable :

    *
      les enfants sont parfois asymptomatiques
    *
      troubles de l'état général : épisodes de fatigue, irritabilité, pâleur au moment des crises de déglobulisation. Celles-ci sont souvent favorisées par une surinfection virale.
    *
      l'ictère : en règle peu intense, il s'accentue lors des épisodes de déglobulisation.
    *
      la splénomégalie : modérée, sans corrélation entre sa taille et la sévérité de l'hémolyse.

2.1.1.1.2 Examens biologiques

- anémie normocytaire modérée ou sévère à l'occasion des épisodes de déglobulisation. Le taux d'hémoglobine est parfois normal (anémie compensée).
- sphérocytose
- les réticulocytes sont toujours augmentés, quel que soit le taux d'hémoglobine
- la résistance osmotique aux solutions hypotoniques est diminuée mais ce test n'est pas pathognomonique de la maladie.
- l'étude de l'autohémolyse spontanée in vitro à 37° (test de Dacie) montre une augmentation de la destruction spontanée des hématies ; l'autohémolyse est prévenue par l'addition de glucose,
- le myélogramme montrerait une hyerplasie érythroblastique
- la bilirubine indirecte est augmentée de façon variable, l'haptoglobine est diminuée. Le fer sérique est normal ;
- l'étude isotopique des hématies montre une diminution de la 1/2 vie (10 à 15 jours) avec une sequestration splénique. Cet examen est rarement fait pour le diagnostic mais parfois avant la splénectomie.
2.1.1.1.3 Le diagnostic repose sur :

- la notion d'une anémie hémolytique avec sphéracytose,
- les antécédents familiaux,
- la diminution de la résistante osmotique aux solutions hypotoniques
- absence d'anomalies des autres examens : électrophorèse de l'hémoglobine, enzymes érythrocytaires, coombs négatif.
2.1.1.2 Formes cliniques
2.1.1.2.1 A révélation néonatale
Un ictère hémolytique néonatal avec un test de Coombs négatif est évocateur. Il peut nécessiter une photothérapie ou une transfusion d'échange. Le diagnostic, souvent difficile en période néonatale, est réalisé à partir de 6 mois. Le diagnostic différentiel se pose avec l'incompatibilité ABO. foetomaternelle dans les groupes sanguins. Ces formes à révélation précoce ne sont pas plus sévères après la période néonatale.
2.1.1.2.2 Formes graves
Une faible proportion des enfants (< 5 %) ont une forme grave. Les épisodes de déglobulisation fréquents et importants nécessitent des transfusions. La répétition des transfusions peut être une indication à faire une splénectomie.
2.1.1.2.3 Formes modérées
Ces formes sont souvent asymptomatiques et découvertes devant une splénomégalie modérée ou une lithiase biliaire durant l'enfance ou à l'âge adulte.
2.1.1.2.4 Formes selon l'évolution

- crises de déglobulisation : accès d'hémolyse avec ictère et douleur abdominale à l'occasion d'un épisode infectieux. Ces accidents sont habituels, de fréquence variable et souvent modérés. Toutefois, une déglobulisation importante peut nécessiter une transfusion.
- crises aplasiques : moins fréquentes mais plus graves. Ce sont des crises d'érythroblastopénie transitoires souvent dûes au parvovirus B19. Le tableau est celui d'une anémie non régénérative pendant quelques jours.
- lithiase vésiculaire : se rencontre surtout chez l'adolescent et l'adulte mais est possible chez l'enfant. Elle est la conséquence de l'hémolyse chronique.
2.1.1.3 Diagnostic différentiel

- Le diagnostic positif est en règle facile : notion familiale, fragilité osmotique des érythrocytes. Il peut être plus difficile dans certaines situations : période prénatale, crises aplasiques, et formes modérées.
- Le diagnostic différentiel se pose avec les autres anomalies membranaires dont l'elliptocytose hériditaire.
2.1.1.4 Conduite à tenir

- transfusion en cas de déglobulisation sévère ou de crises aplasiques
- splénectomie : elle est indiquée chez la plupart des enfants âgés de plus de 6 ans, après avoir effectué une vaccination contre le pneumocoque. L'indication est exceptionnelle avant l'âge de 6 ans et discutée dans les formes bien tolérées découvertes tardivement. Après splénectomie, l'enfant va très bien. Il reçoit une antibioprophylaxie par la pénicilline jusqu'à l'âge de 10 ans mais il reste prédisposé aux septicémies.
2.1.2 Anomalies de l'hémoglobine
2.1.2.1 Les thalassémies
Les thalassémies sont des anémies héréditaires. Elles se caractérisent par une diminution ou une absence de synthèse des chaines a (a thalassémies) ou des chaines b (b thalassémies) de l'hémoglonine. Les autres chaines sont normales. Elles se transmettent selon un mode autosomique récessif. Le diagnostic anténatal est possible.
2.1.2.1.1 Les thalassémies b
Elle est particulièrement fréquente dans le bassin méditerranéen.
2.1.2.1.1.1 Forme homozygote (maladie de Cooley)
La maladie est habituellement diagnostiquée entre 6 mois et 2 ans quand l'anémie physiologique du nouveau-né ne se répare pas.

Signes cliniques :

- Pâleur : constante souvent associée à un ictère conjonctival
- Hépatosplénomaglie : modérée chez les sujets jeunes, elle peut devenir volumineuse et gênante chez les enfants mal transfusés.
- le faciès est particulier en raison de l'hyperplasie érythropoïétique : élargissement des os malaires, hypertélorisme, aplatissement de la base du nez, protrusion du rebord du maxillaire supérieur et de la lèvre supérieure. Ces anomalies sont réduites voire absentes chez les enfants bien transfusés.
- retard staturo-pondéral : parfois dès les premiers mois de vie.

Signes radiologiques :
Ils peuvent être présents dès les 6 premiers mois de vie mais surtout à partir d'un an. Comme les anomalies morphologiques, ils sont réduits ou absents si le taux d'hémoglobine est maintenu près de la normale.

- élargissement de la voute du crâne avec des striations (aspect en poil de brosse)
- ostéoporose et aspect aréolaire de l'os
- amincissement des corticales
- le scanner a été utilisé pour évaluer la surcharge en fer de divers organes.

Les signes biologiques :

- anémie hypochrome et microcytaire, constante et importante. Le taux d'hémoglobine varie entre 50 et 90 g/l et le volume globulaire moyen est inférieur à 60 fl.
- les réticulocytes sont modérément augmentés, 2 à 6 %, ce qui témoigne d'une érythropoïèse inefficace en raison de la précipitation de chaines a dans les érythroblastes.
- le myélogramme : la moelle est très riche avec hyperplasie érythroïde.
- la bilirubine est augmentée
- le fer sérique et la ferritine sont élevés
- l'électrophorèse de l'hémoglobine permet le diagnostic avec la présence constante d'un pourcentage élevé d'HbF : HbF = 20 à 100 %, HbA2 = 2 à 7 %, HbA1 = parfois présent.

Evolution :
Les complications sont liées à l'hypoxie chronique et à la surcharge en fer. Avec un support transfusionnel bien conduit, les décès de la première décennie sont rares. La surcharge en fer est responsable de complications : retard pubertaire, retard de croissance, insuffisance thyroïdienne et surrénalienne, atteinte hépatique et insuffisance cardiaque.

Traitement :

- Transfusions régulières pour maintenir un taux d'Hb > 10 g/dl avec une chélation du fer par Deferoxamine.
- splénectomie en cas de splénomégalie massive avec hypersplénisme.
- transplantation médullaire allogénique est le seul traitement efficace.
2.1.2.1.1.2 Thalassémie intermédiaire
Les manifestations cliniques se situent entre la thalassémie majeure et le trait thalassémique.

Données génétiques :
Il s'agit d'un groupe hétérogène avec divers déterminismes génétiques :
- b thalassémie homozygote : expression résiduelle du gêne b
- d b thalassémie
- b thalassémie hétérozygote.

Diagnostic et évolution :

Ce sont les signes d'une maladie de Cooley atténuée. L'asthénie, la splénomégalie et les anomalies morphologiques sont moins importantes.
Le taux d'hémoglobine se maintient entre 70 et 90 g/l et souvent au dessus de 10 g/l.
Le diagnostic repose sur l'électrophorèse de l'hémoglobine : HbF = 20 à 100 %, HbA2 = 1 à 7 %, HbA1 = 0 à 80 % selon le génotype.
Le pronostic est bien meilleur que dans la forme majeure. Cette forme est compatible avec une croissance et un développement normaux. Une surcharge en fer est possible.

Traitement :

- si le patient maintient son taux d'hémoglobine à au moins 70 g/l, il n'est pas transfusé.
- un support transfusionnel est parfois nécessaire à l'âge adulte.
- la splénectomie est indiquée si la splénomégalie est volumineuse avec un hypersplénisme.
2.1.2.1.1.3 Thalassémie mineure (trait thalassémique)
Cette forme est présente chez les hétérozygotes.

Diagnostic positif :
- Elles sont généralement asymptomatiques. Parfois ces enfants sont pâles, se plaignent de fatigabilité avec une rate légèrement palpable.
- Il existe une pseudo-polyglobulie associée à une discrète anémie hypochrome et microcytaire. On peut noter sur le frottis une anisocytose et des cellules cibles. Le fer sérique est normal. L'électrophorèse montre une augmentation de l'hémoglobine A2, 4 à 8 % (N < 3,5 %).

Evolution :
Cette forme est bien tolérée et souvent découverte fortuitement lors d'une numération faite lors d'un bilan systématique.

Diagnostic différentiel :
Il faut d'abord éliminer la carence en fer par un dosage du fer sérique et de la sidérophiline. La microcytose est souvent plus importante dans la thalassémie.
Une fois éliminée une carence en fer, on effectue une électrophorèse de l'hémoglobine. Il faut se rappeler qu'une carence en fer sous-estime le taux d'HbA2.
2.1.2.1.2 Les thalassémies a
Elles se rencontrent surtout en Extrême-Orient. Les a thalassémies s'expriment selon 4 formes cliniques, selon le nombre de gènes défectueux ou absents. Ces gènes sont portés par le chromosome 16.

- Porteurs silencieux

- Trait a thalassémique

- Anasarque foetoplacentaire de Bart
Il s'agit d'un anasarque foetoplacentaire identique à celui de la maladie rhésus. L'enfant est prématuré et souvent mort-né. La mort est constante. Il existe une anémie sévère. N'ayant pas de chaine a, le sang contient Hb Bart (g 4), HbH (b4) et un peu d'Hb Portland (Z2g2).

- Hémoglobine H
Le tableau clinique évoque une maladie de Cooley atténuée. A la naissance, c'est une anémie très hypochrome.
L'hémoglobine varie de 70 à 100 g/l avec des épisodes de déglobulisation possibles. Le taux d'HbH varie de 3 à 30 % selon les cas. Cette hémoglobine a une forte affinité pour l'oxygène et n'a pas d'effet Bohr, donc peu fonctionnelle.
Ces patients ont une vie normale avec quelques précautions.
2.1.2.2 La Drépanocytose
La drépanocytose est une hémoglobinopathie très fréquente dans certains pays, en particulier l'Afrique sub-saharienne et ses migrants. C'est une anomalie de structure de l'hémoglobine, lié à un changement du 6ème acide aminé de la chaine b : acide glutamique par de la valine. Cette hémoglobine se polymérise lors de l'hypoxie, ce qui entraine des microthromboses.

C'est une maladie héréditaire à transmission autosomique récessive.
2.1.2.2.1 Forme homozygote
2.1.2.2.1.1 Signes cliniques
Les nouveau-nés ne sont pas anémiques à cause de l'effet protecteur de l'HbF. Les premiers signes apparaissent vers le deuxième ou troisième trimestre. Les manifestations sont variables. Certains sont asymptomatiques tandis que d'autres sont accablés d'épisodes douloureux.

Signes d'anémie hémolytique :
- pâleur avec subictère.
- splénomégalie : constante et modérée jusque l'âge de 5 ans. Elle involue par la suite.
- hépatomégalie, souvent importante.

Crises drépanocytaires :
- crises douloureuses vaso-occlusives : Elles sont aiguës, douloureuses, dues à une falciformation intravasculaire responsable d'un infarctus tissulaire. Les douleurs osseuses sont fréquentes, en particulier les mains et les pieds avant l'âge de 5 ans. Les crises douloureuses ostéo-articulaires peuvent s'accompagner de fièvre et simuler une ostéomyélite ou un rhumatisme articulaire aigu. Les douleurs thoraciques et abdominales, des accidents vasculaires, neurologiques sont classiques.
- crises de séquestration splénique : séquestration massive d'hématies dans la rate responsable d'une anémie sévère avant l'autosplénectomie, parfois responsable de mort.
- crises d'érythroblastopénie, souvent favorisées par des infections bactériennes ou virales.

Lésions viscérales et osseuses :
Lors de l'évolution, tous les viscères peuvent être touchés par des microthromboses.

L'infection :
C'est une cause habituelle de mort. Les germes le plus souvent en cause sont : pneumocoque, l'hémophilus influenzae, les salmonelles et le mycoplasme. Les ostéomyélites, les septicémies, les méningites sont habituelles.
2.1.2.2.1.2 Signes biologiques
Biologie standard :
- anémie constante avec une hémoglobine entre 60 et 80 g/l, généralement bien tolérée,
- bilirubinémie élevée,
- réticulocytes élevés : 20 à 30 %,
- présence d'hématies falciformes sur lame. Cette déformation peut être majorée en privant les hématies d'oxygène (test de Emmel).

Electrophorèse de l'hémoglobine :
- HbS > 50 % avec présence d'un taux variable d'HbA2 et d'HbF.
2.1.2.2.1.3 Traitement
Il existe un pic de mortalité entre 1 et 3 ans causé par l'infection. Avec une prise en charge précoce, la probabilité de survie à l'âge de 20 ans est de 85 %.
- surveillance régulière : fréquence des complications, prise en charge familiale et scolaire.
- vaccination contre le pneumocoque, l'hémophilus et l'hépatite B
- prophylaxie par la pénicilline
- traiter les crises douloureuses : hydratation et analgésiques
- transfusion : crise de déglobulisation ou de séquestration, préparation à une chirurgie.
- L'hydréa est utilisé dans les formes particulièrement sévères.
2.1.2.2.1.4 Diagnostic anténatal
Il est possible sur sang foetal en mesurant la synthèse de globine ou mieux par amniocentèse et biopsie de trophoblastes pour obtenir l'ADN.
2.1.2.2.2 Forme hétérozygote
L'enfant atteint d'une forme hétérozygote présente rarement des signes cliniques. Des accidents paroxystiques modérés peuvent toutefois survenir tels que des douleurs abdominales lors des hypoxies : avion mal pressurisé, anesthésie générale, plongée sous-marine.
L'anémie est inconstante. Le diagnostic repose sur le test de falciformation et surtout sur l'électrophorèse de l'Hb avec un taux HbS < 50 %.
La drépanocytose hétérozygote ne nécessite aucun traitement.
2.1.3 Déficits enzymatiques
2.1.3.1 Deficit en G 6 PD
Le G 6 PD intervient dans la voie des pentoses. La majorité des enfants porteurs de ce déficit n'ont pas d'anémie. Elle est déclenchée par un agent extérieur. Le gène codant par la G6PD (Gd) est étroitement lié à ceux qui codent pour le facteur VIII et les pigments de la rétine. Le déficit en G6PD est dû à des anomalies de structure plutôt qu'à une diminution du nombre des molécules normales. C'est une maladie héréditaire à transmission récessive liée au sexe.
2.1.3.1.1 Facteurs déclenchant l'hémolyse
La sensibilité des sujets est variable vis à vis des agents hémolysants.
- médicaments,
- aliments : fèves,
- infections virales, acidose diabétique.
2.1.3.1.2 Signes cliniques

En période néonatale, le déficit peut se révéler par une jaunisse qui débute vers les 2ème ou 3ème jours de vie ; la jaunisse est plus importante que ne le laisserait supposer l'anémie. Les formes modérées ne nécessitent pas de traitement ; une photothérapie est indiquée dans les formes intermédiaires et une transfusion d'échange dans les formes graves car l'hyperbilirubinémie néonatale peut entraîner des séquelles neurologiques.
Un enfant avec un déficit en G6PD est cliniquement et hématologiquement normal la plupart du temps. Quelques heures après la prise d'un agent déclenchant (médicaments, fèves), survient une crise brutale d'hémolyse avec fièvre, céphalées, douleurs abdominales et lombaires, hémoglubinurie (urines de couleur rouge sombre, coca cola ou porto). Puis l'ictère devient évident avec une splénomégalie modérée.
La variante B(-) de type méditerrannéen est plus bruyante que le type A(-) du sujet noir.
2.1.3.1.3 Le diagnostic

- au moment des crises, la déglobulisation est souvent sévère et les réticulocytes sont augmentés. Entre les crises, le taux des érythrocytes est normal,
- génétique : transmission récessive liée au sexe,
- le diagnostic repose sur la mise en évidence du déficit en G6PD. La réticulocytose augmente l'activité enzymatique de sorte qu'il faut en tenir compte dans l'interprétation des résultats. Chez les hétérozygotes, le taux de G6PD est intermédiaire entre un taux normal et un déficit comple.
2.1.3.1.4 Le traitement

- transfusion lors de la déglobulisation sévère et parfois transfusion d'échange en période néonatale.
En dehors des crises, l'enfant va bien.
- Le traitement est surtout préventif : exclusion des fèves, ne pas prendre certains médicaments dont la liste est remise au porteur du déficit.
2.1.3.2 Déficits en pyruvate kinase et autres désordres de la glycolyse

Ces déficits sont rares, de transmission autosomique récessive ou dominante.
Dans la forme homozygote, ils se manifestent par une anémie hémolytique chronique. Le diagnostic repose sur la mise en évidence de l'anémie hémolytique et l'absence ou une diminution importante de l'activité enzymatique.
Des transfusions sont souvent nécessaires en raison de l'hémolyse. La splénectomie est indiquée en cas de splénomégalie avec hypersclémisme.

En conclusion, l'orientation vers une anémie hémolytique constitutionnelle est souvent facile en raison du caractère ethnique, familial, l'absence de maladie associée et la négativité du test de Coombs. Trois examens permettent le diagnostic : étude de la résistance osmotique des érythrocytes aux solutions hypotoniques, élecrophorèse de l'hémoglobine, mesure des activités enzymatiques et en particulier la G6PD chez les garçons.
2.2 Anémies hémolytiques acquises
L'hémolyse est de type extracorpusculaire. Deux types d'hémolyse peuvent survenir :

    * hémolyse intravasculaire : pâleur intense, polypnée, tachycardie, fièvre, douleurs diffuses, urines rouges ou noires. L'anémie est sévère.
    * hémolyse extravasculaire : pâleur, subictère, splénomégalie, bilirubine élevée.

2.2.1 Anémies hémolytiques immunologiques
2.2.1.1 Accidents transfusionnels
Ces accidents rares peuvent survenir en cas d'erreurs transfusionnelles ou chez les polytransfusés. Les transfusions de sang total avec un anticorps immuns (donneurs dangereux) pourraient être dangereuses.
2.2.1.2 Anémie par incompatibilité foetomaternelle
Il s'agit d'alloanticorps.
2.2.1.3 Anticorps immunoallergiques
Le médicament joue le rôle d'antigène. Ces étiologies sont exceptionnelles chez l'enfant. Le test de Coombs peut être transitoirement positif. Les médicaments incriminés : antibiotiques de type pénicilline, PAS, sulfamides, antihistaminiques, chlorpromazine, quinine.
2.2.1.4 Anémies hémolytiques auto-immunes
2.2.1.4.1 Clinique
C'est la survenue d'un tableau d'anémie aiguë brutale : pâleur, asthénie, fièvre, ictère, parfois splénomégalie et hémoglobinurie. Ce tableau peut être isolé ou associé à des signes infectieux.
2.2.1.4.2 Biologie
- anémie hémolytique.
- test de Coombs direct : positif (C, IgG ou IgM).
2.2.1.4.3 Recherche d'une étiologie
- infection O.R.L. : la recherche virale est souvent négative.
- mycoplasme pneumo : pneumopathie (agglutines froides).
- divers agents viraux.
- idiopathique.
2.2.1.4.4 Traitement
- transfusions souvent répétées.
- exsanguino-transfusion, plasmaphérèse, immunoglobines intra-veineuses en cas d'anémie grave.
- corticoïdes : 2 mg/kg/j.
2.2.1.4.5 Evolution
- aiguës transitoires guérissant en 2 à 3 mois.
- chroniques : le test de Coombs reste positif et l'hémolyse persiste. La splénectomie peut être induée.
2.2.2 Anémies hémolytiques non immunologiques
2.2.2.1 Anémies hémolytiques et parasitaires
Les septicémies, bactériennes ou parasitaires peuvent être en cause. La recherche de parasites intraérythrocytaire (goutte épaisse) permet facilement le diagnostic d'accès palustre.
2.2.2.2 Anémies hémolytiques toxiques
En dehors des substances nocives rapportées dans les déficits en G 6 PD ou lors d'hémolyses par anticorps immunoallergiques, il faut citer : tétrachlorure de carbone, venins de serpent et champignons, eau distillée en I.V.
2.2.2.3 Syndrome hémolytique et urémique
Ce syndrome survient quelques jours après une gastroentérite fébrile associant une anémie hémolytique et une insuffisance rénale. Le traitement est uniquement symptomatique : transfusion, diurétiques ou dialyse. L'évolution dépend de la récupération de la fonction rénale, le risque étant l'insuffisance rénale chronique.
2.2.2.4 Anémies hémolytiques des prothèses cardiaques
2.2.2.5 Maladie de Marchiafava - Micheli
C'est l'hémoglobinurie nocturne paroxystique. Le diagnostic repose sur le test de Ham et Dacie mettant en évidence l'augmentation de l'hémolyse en milieu acide.
Maladie hémorragique du nouveau-né
E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 6 mars 2000

1 Rappel de la situation hémostatique du nouveau-né
2 Diagnostic positif
2.1 Signes cliniques : manifestations hémorragiques
2.2 Signes biologiques
3 Traitement
3.1 Traitement préventif
   

3.2 Traitement curatif
4 Diagnostic différentiel
4.1 Autres déficits en facteurs vitamine K dépendants
4.2 Thrombopénies
4.3 Déficits congénitaux
Conclusion
Objectifs
1. Citer les caractéristiques hémostatiques du nouveau-né.

2. Décrire les signes cliniques et biologiques de la maladie hémorragique du nouveau-né.

3. Rédiger les principes du traitement préventif et curatif d'une maladie hémorragique du nouveau-né.

4. Citer d'autres causes de syndrome hémorragique du nouveau-né.

Elle correspond à une exagération des modifications transitoires et physiologiques de la coagulation.
1 Rappel de la situation hémostatique du nouveau-né (cf. séméiologie)

L'hémostase du nouveau-né dépend de l'âge gestationnel et post-natal des enfants. Les prélèvements sont souvent plus difficiles nécessitant des microtechniques. Les protéines de la coagulation ne traversent pas la barrière placentaire ; elles apparaissent à la 10ème semaine d'âge gestationnel et augmentent progressivement selon l'âge gestationnel.

1. Les taux des facteurs vitamine K dépendants et synthétisés par le foie (II, VII, IX et X) sont diminués chez le nouveau-né normal à terme (35% + 10) et davantage chez le prématuré. Ces facteurs du complexe prothrombinique remontent à partir de J5 et atteignent les taux des adultes entre 3 et 6 mois. Ce déficit est dû à l'immaturité hépatique et une hypovitaminose K;

2. Certains facteurs sont normaux : facteurs V, VII, Willebrand (vWF), WIII et fibrinogène.

3. Le taux des plaquettes est normal. L'agrégation dépend de l'activateur. Toutefois, la rétraction du caillot dépendant des plaquettes est normale.
2 Diagnostic positif de la maladie hémorragique du nouveau-né
2.1 Signes cliniques : manifestations hémorragiques
L'examen clinique apprécie le lieu, le siège, la date de survenue et le caractère isolé ou non de l'hémorragie.
2.1.1 Les formes classiques
Les signes hémorragiques apparaissent entre les 2è et 5è jours.
2.1.1.1 Les hémorragies digestives :
De beaucoup les plus fréquentes : méléna plus ou moins abondant, survenant généralement les 2ème et 3ème jours de vie. Il existe probablement de nombreuses formes occultes non diagnostiquées.
L'hématémèse est également fréquente et très souvent le début de la maladie est marqué par un vomissement qui teinte l'oreiller et inquiète beaucoup la mère. Il doit être différencié du sang dégluti d'origine maternelle.
2.1.1.2 Les hémorragies ombilicales
Elles apparaissent au 2ème jour. Il s'agit souvent d'un suintement continu difficile à arrêter.
2.1.1.3 Les hémorragies cutanées
Elles sont plus rares : ecchymoses ou hématomes.
2.1.1.4 Le céphalhématome
Il peut être une manifestation de la maladie hémorragique. Rappelons qu'il se différencie de la bosse séro-sanguine par le fait qu'il occupe le territoire d'un os de la voûte crânienne et ne chevauche pas les sutures. Rappelons également qu'il s'associe souvent à des lésions hémorragiques intra-crâniennes.
2.1.1.5 Les hémorragies intra-crâniennes
Hémorragies méningées, hématomes sous-duraux qui peuvent avoir des conséquences ultérieures. Il existe souvent dans ce cas des hémorragies rétiniennes.
2.1.1.6 L'hématome du cuir chevelu
Il constitue une forme particulière qu'il ne faut pas méconnaître, car cet hématome peut retirer un tiers du volume sanguin et créer un état d'anémie aiguë. On le diagnostique par l'aspect épaissi du cuir chevelu dans sa totalité.
2.1.2 Forme précoce
Il s'agit souvent d'une hémorragie sévère survenant les 24 premières heures et souvent secondaire à une prise médicamenteuse de la mère (antivitamine K, anti-convulsivants, rifampicine, INH)
2.1.3 Forme tardive
Elle survient au-delà de la première semaine chez des enfants nourris au sein. Ces formes sont souvent associées à une maladie sous-jacente : diarrhée chronique, maladie coeliaque.
2.2 Signes biologiques
Ils se traduisent par :

    * une baisse importante du T.P.
    * un effondrement des facteurs vitamine K-dépendants : II, VII, IX et X. Le facteur V est normal.
    * dosage des formes décarboxylées des facteurs vitamine K dépendants (PIVKA).

3 Traitement
3.1 Traitement préventif
Il faut donner systématiquement à tous les nouveau-nés, le premier jour de la vie, de la vitamine K, à la dose de 1 à 2 mg/kg. En fait, on propose 1 mg en I.M ou 5 mg per os en une prise. Pendant l’allaitement maternel, il est conseillé de prescrire 1 mg de vit K per os par semaine.
3.2 Traitement curatif
Il consiste à :
- compenser l'anémie liée à l'hémorragie avec des transfusions de culot dont la quantité est fonction de l'importance de l'hémorragie et variable selon le degré de l'anémie jugée par le taux d'hémoglobine. Ceci est rare.
- restaurer l'hémostase :

    * vitamine K1 en intraveineux lent ou en sous-cutané : 10 à 20 mg.
    * plasma frais (20 à 30 ml/kg) congelé,
    * facteur IX.

4 Diagnostic différentiel
4.1 Autres déficits en facteurs vitamine K dépendants
Liés soit à une carence vitaminique, soit à une insuffisance hépatique.
4.1.1 L'avitaminose K
Elle peut se voir lorsque la mère est traitée par des antivitamines K. La maladie survient précocement dès le 1er ou le 2ème jour
4.1.2 L'ictère cholestatique du nouveau-né
Dans ce cas, existent des carences par mal-absorption et le déficit peut être corrigé par la vitamine K intra-veineuse.
4.1.3 L'insuffisance hépato-cellulaire
Le déficit des facteurs vitamine K dépendants n'est pas corrigé par l'injection intra-veineuse de vitamine K et le facteur V est diminué.
4.2 Thrombopénies
Les thrombopénies peuvent être isolées ou associées à d'autres anomalies de l'hémostase.
4.2.1 Isolées
Les manifestations hémorragiques se traduisant par un purpura, prédominant au niveau du tronc, il peut être associé à une hémorragie viscérale. Quatre étiologies sont plus fréquentes :

1. Infections : soit une foetopathie, soit une infection néonatale. Il existe généralement une hépatosplénomégalie ;

2. Immunologiques : l'examen clinique de l'enfant normal ; les manifestations hémorragiques sont souvent précoces, mais deux mécanismes sont possibles :

    * auto-anticorps antiplaquettes maternels transmis. Le taux des plaquettes de la mère est normal ou diminué. La thrombopénie néonatale peut survenir dès la naissance ou au cours de la première semaine.
    * allo-immunisation anti-plaquettes : le taux des plaquettes de la mère est normal.

3. Associée à des malformations congénitales :

    * rubéole (origine centrale) ;
    * aplasie radiale (aplasie améga-caryocytaire) ;
    * hémangiome géant (consommation locale de plaquettes).

4. Toxiques : médicaments donnés à la mère : la quinine et les diurétiques thiazidiques. A noter que l'acide acétylsalycilique (AspirineÒ ) ne donne pas de thrombopénie, mais il a une action anti-agrégante ; risque immunoallergique de l'aspirine.
4.2.2 Thrombopénie associée à d'autres facteurs déficitaires
1. Syndrome de coagulation intravasculaire disséminée : il se produit une consommation de facteurs de l'hémostase. La C.I.V.D. entraîne une hémorragie et des thromboses artériolocapillaires responsables d'anoxie. Les circonstances de survenue sont diverses : anoxie néonatale, collapsus, hypothermie, infections, détresse vitale. Le syndrome hémorragique est important : purpura, saignement aux points de piqûre, saignement nasal, larges ecchymoses. Le tableau biologique précoce associe : thrombopénie, chute des facteurs V, VIII et XIII, chute du fibrinogène, augmentation des produits de dégradation de la fibrine.

2. Insuffisance hépato-cellulaire sévère : il existe une atteinte successive des facteurs VII, II, V et I;
4.3 Déficits congénitaux
4.3.1 Déficit en fibrinogène ou en facteur XIII
Hémorragie ombilicale à la chute du cordon ; transmission selon le mode autosomique récessif.
4.3.2 Maladie de Glanzmann
C'est une thrombopathie constitutionnelle avec plaquettes en nombre normal mais le temps de saignement est très allongé. Elle se transmet selon le mode autosomique récessif.
4.3.3 Hémophilie
Elle s'exprime rarement en période néonatale, sauf en cas d'aggravation particulière (circoncision, ponction fémorale). Elle a une transmission récessive liée au sexe (cf. cours hémophilie).
Conclusion
Il faut penser en premier à la maladie hémorragique mais il ne faut pas oublier la possibilité de maladies plus rares et pour cela :

1. Rechercher les antécédents familiaux de déficits constitutionnels et au besoin, dresser un arbre généalogique,

2. Etudier les antécédents maternels pour rechercher d'une part une prise médicamenteuse, car certaines drogues interfèrent avec les mécanismes de coagulation (acide acétylsalicylique, prométhazine, anticoagulants dicoumariniques, anticonvulsivants barbituriques); d'autre part, des antécédents pathologiques (signes infectieux pendant la grossesse), antécédents de thrombopénie, splénectomie) ;

3. Préciser l'histoire du nouveau-né : les circonstances de l'accouchement seront soigneusement précisées : traumatisme obstétrical, anoxie prolongée. On précisera également si le nouveau-né a reçu de la vitamine K, la maladie hémorragique survenant rarement chez les enfants ayant une prophylaxie correcte dès la naissance.
Hémophilie
E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 6 mars 2000

1 Incidence de l'hémophilie
2 Hérédité de l'hémophilie
3 Manifestations de l'hémophilie
3.1 Clinique
3.2 Biologie
4 Diagnostic différentiel
4.1 Maladie de Willebrand
4.2 Anticoagulants anti-facteurs VIII ou anti IX
   

4.3 Déficit en facteur XI
5 Traitement
5.1 Traitement préventif
5.2 Traitement curatif
6 Devenir
6.1 Evolution
6.2 Problèmes médico-sociaux
7 Diagnostic anténatal
Objectifs
1. Donner l'incidence de l'hémophilie et préciser son mode de transmission.

2. Diagnostic biologique de l'hémophilie.

3. Décrire les principales manifestations de l'hémophilie.

4. Décrire le traitement d'une hémarthrose aiguë du genou chez un enfant hémophile n'ayant pas d'anticorps circulants.

5. Rédiger les conseils à donner aux parents d'un enfant hémophile pour sa surveillance et son éducation.

6. Conduite à tenir devant une hémorragie : musculaire, articulaire, cérébrale, cutanée et sous-cutanée.

C'est une maladie hémorragique héréditaire à transmission récessive liée au sexe. Il en existe deux variétés, soit un déficit en facteur VIII, soit un déficit en facteur IX.
Les possibilités thérapeutiques substitutives actuelles leur laissent espérer une vie subnormale.
1 Incidence de l'hémophilie
L'incidence est de l'ordre de 1/5 000 garçons. En France, il y aurait 4 à 5000 hémophiles, 40 à 50 naissent chaque année.
Elle se répartit ainsi : hémophilie A (déficit en VIII) = 80 % et hémophilie B (déficit en IX) = 20%.
2 Hérédité de l'hémophilie
C'est une maladie à transmission récessive liée au chromosome X. En dehors des cas de mutations -toujours possibles- ces enfants naissent le plus souvent d'un homme normal (XY) avec une femme conductrice (Xh X). Cette figure illustre la transmission  :
   
X
   
Y
Xh
   
XXh
   
YXh
X
   
XX
   
XY
    soit :

    * 25% de femmes conductrices
    * 25% de femmes normales
    * 25% de garçons hémophiles
    * 25% de garçons normaux

Remarques :
- dans les 3/4 des cas, on retrouve des antécédents familiaux,
- il existe deux types de conductrices :

    * les conductrices obligatoires sont "les filles d'un hémophile, les soeurs d'hémophiles qui ont un fils hémophile, les mères des deux ou plus de deux enfants hémophiles patents"
    * les conductrices possibles sont "les filles d'une conductrice obligatoire ou les soeurs d'un hémophile". Le risque génétique entre les deux est différent.

- les associations d'hémophiles paraissent favoriser la survenue de véritables hémophilies féminines (nées de père hémophile et d'une mère vectrice).
3 Manifestations de l'hémophilie
3.1 Clinique
La symptomatologie est identique dans les deux formes ; elle dépend de la sévérité du déficit.
3.1.1 Circonstances de découverte
1- parfois lors d'un examen systématique dans le cadre d'une enquête familiale ou avant une intervention chirurgicale.
2 - le plus souvent, il s'agit de manifestations hémorragiques :

    * rares en période néonatale (risque d'hémorragie cérébrale).
    * parfois avant 1 an. ; le diagnostic est évoqué lors d'une circoncision rituelle très hémorragique, un volumineux céphalhématome, des hématomes récidivants ou au point d'injection des vaccinations, une plaie hémorragique.
    * elles apparaissent surtout au moment de la marche où les hématomes et les hémarthroses deviennent de plus en plus fréquents++.

3.1.2 Les manifestations hémorragiques de la forme typique
Les saignements sont surtout profonds, articulaires et musculaires.
3.1.2.1 Les hémarthroses
3.1.2.1.1 hémarthroses aiguës
La première hémarthrose survient souvent après un traumatisme minime mais ultérieurement, elles surviennent spontanément, au moins en apparence. Les genoux, les coudes et les chevilles sont les plus souvent touchés. L'hémarthrose constituée se traduit par :
- la douleur : vive, permanente, exacerbée par la mobilisation et par la palpation. Elle est calmée en quelques heures par la perfusion de fraction anti-hémophilique à dose suffisante.
- le gonflement articulaire est visible et doit être mesuré au mètre ruban en prenant soigneusement les repères,
- l'augmentation de la chaleur locale,
- la limitation des mouvements est liée à l'épanchement intraarticulaire. Le flexum doit être mesuré au rapporteur pour suivre l'évolution.
3.1.2.1.2 arthropathie chronique
Elle est fréquente et secondaire à la récidive des hémorragies intra-articulaires.
Elle se traduit par une limitation et une déformation de l'articulation ainsi que par une diminution de la force musculaire. C'est une complication très invalidante à long terme. Le traitement précoce des hémarthroses réduit ce risque.
3.1.2.2 Les hématomes
Un traumatisme est habituel ; la douleur est généralement le signe révélateur : on essaie d'apprécier la tuméfaction et l'état de tension.
3.1.2.2.1 Les hématomes intramusculaires
Leur gravité tient à l'importance de la gaine du muscle. Ainsi les hémorragies dans les muscles à grande gaine (cuisse, fessier, abdominaux superficiels) peuvent entraîner des anémies graves chez le petit enfant. Dans les muscles à petite gaine (face antérieure de l'avant-bras, paume de la main et mollet), les hémorragies entraînent des compressions vasculo-nerveuses (syndrome de Volkman).
L'hématome de psoas est fréquent et le diagnostic difficile avant la phase d'état. Au début, il s'agit d'une douleur modérée au niveau du pli inguinal avec une flexion de la hanche en rotation interne. L'extension est impossible. Une échographie en urgence peut objectiver l'hématome. La complication à redouter est la compression du nerf crural.
Les hématomes rétropéritonéaux sont rares, de diagnostic difficile avec une douleur abdominale mal définie. Une échographie ou un scanner peuvent montrer l'hématome.
3.1.2.2.2 Manifestations hémorragiques diverses
Elles sont fréquentes. Les hématomes du plancher de la bouche ou du cou peuvent entraîner une asphyxie ; hématurie, hémorragie digestive, peau, langue,...
3.1.2.3 Les autres manifestations hémorragiques graves
Elles sont moins fréquentes et souvent post-traumatiques. Elles concernent les viscères profonds et les hémorragies intra-cérébrales. Ces dernières doivent être évoquées après un traumatisme même minime++.
3.1.3 Dans les formes atténuées
Les hémorragies sont minimes ou absentes.
3.2 Biologie
Les facteurs VIII et IX interviennent dans l'élaboration de la prothrombinase par la vie endogène.
Le diagnostic est essentiellement biologique et repose sur des tests simples :
- éléments négatifs : numération des plaquettes, temps de saignement et temps de Quick sont normaux
- éléments positifs :

    * allongement du temps de céphaline-Kaolin qui est souvent double ou triple du témoin.
    * l'activité des facteurs coagulants VIII ou IX est effondrée.

Ce dosage permet de définir la sévérité :

    * taux de facteur < 1% H. majeure
    * taux de facteur 1 à 5 % H. modérée
    * taux de facteur 5 à 25 % H. atténuée
    * taux de facteur 25 à 50 % H. frustre.

4 Diagnostic différentiel
On discute le diagnostic avec TQ normal et TCK allongé.
4.1 Maladie de Willebrand
- transmission autosomique dominante
- manifestations moins sévères que dans l'hémophilie
- diagnostic :

    * TS allongé,
    * plaquettes normales,
    * TCK allongé,
    * VIII antigène ou cofacteur de la ristocétine : diminué.

4.2 Anticoagulants anti-facteurs VIII ou anti IX
Surtout au cours des maladies de système (ex. le lupus) ou après des perfusions de facteurs anti-hémophiliaires. Ils se caractérisent par un allongement du TCK.
4.3 Déficit en facteur XI
Exceptionnel.
5 Traitement
5.1 Traitement préventif
5.1.1 Etablir une carte d'affiliation
A l'association des hémophiles où seront consignés toutes les transfusions de produits sanguins et les incidents.
5.1.2 Etablir des règles de conduite :
- toutes les vaccinations sont possibles. Le vaccin contre l'hépatite B est recommandé très précocement,
- interdire des intramusculaires,
- se méfier des médicaments ayant une action sur l'hémostase : aspirine, anti-inflammatoire,
- bien comprimer après une ponction veineuse,
- bonne hygiène dentaire.
5.1.3 Enquête familiale
Pour dépister d'autres hémophiles et les conductrices.
5.1.4 Aborder la possibilité du diagnostic anténatal
Lors du conseil génétique.
5.2 Traitement curatif
Avant toute investigation éventuelle, il faut perfuser du concentré anti-hémophilique le plus rapidement possible et s'assurer de l'absence d'inhibiteurs.
5.2.1 Produits actuellement utilisés (mars 1991)
5.2.1.1 En l'absence d'anticoagulants
- concentré de facteur VIII très haute pureté. En théorie, la perfusion d'1 UI/kg de poids augmente le taux circulant de 2 %,
- concentré de facteur IX très haute pureté. Une UI/kg augmente le taux sanguin de 1% en moyenne. Le nombre d'unités est indiqué sur l'étiquette. La vitesse de perfusion est environ de 2 ml par minute.
5.2.1.2 En présence d'un anticoagulant
- concentrés prothrombiniques activés : Autoplex, F.E.I.B.A.
- concentrés prothrombiniques partiellement activés : C.P.P.A, facteur VII activé (ACSET).
- fractions d'origine porcine : HYATE C (VIII porcins à conserver à -20°C).
5.2.2 Principes généraux de traitement
5.2.2.1 En cas de saignement peu important :
Comprimer pendant 10 minutes avec thrombase au mèchage d'une narine avec une mèche résorbable.
5.2.2.2 En cas de saignement plus important :
Perfusion de facteurs à la posologie moyenne de 20U/kg en absence d'anticoagulants qui peut être renouvelée au bout de 12 heures selon la gravité.

5.2.3 Cas particuliers
5.2.3.1 Hémarthroses
- Hémarthroses avant l'apparition de signes cliniques objectifs : 10 à 20 U/kg (souvent par l'hémophile lui-même),
-Hémarthroses constituées : 20 U/kg. Immobilisation 24 à 48 heures.
- Hémarthroses récidivantes : traitement prophylactique : 20 U/kg tous les deux jours pour le facteur VIII et tous les trois jours pour le facteur IX durant 1 à 3 mois. A côté du traitement substitutif, une synoviorthèse pourra être envisagée. Le diagnostic différentiel se pose avec les fractures, les arthrites septiques et les lésions méniscales.
5.2.3.2 Les hématomes
- superficiels : simple compression,
- profonds : perfuser immédiatement :

    * perfusion : 30 U/Kg 3 fois par jour durant 3 jours puis 20 UI/kg 2 fois/j durant deux jours, 1 fois/j. jusqu'à la guérison. Immobilisation jusqu'à disparition des signes, électrothérapie et corticoïdes.

5.2.3.3 Traumatismes crâniens
Il est parfois difficile d'apprécier la gravité.
- Traumatisme important : perfusion immédiate de 50 Ul/kg suivie de 25U/kg toutes les 8 à 12 heures, puis faire une scanner pour rechercher un hématome. La durée du traitement dépendra de l'existence ou non de lésions.
- Traumatisme minime : 30 Ul/kg.
Si la ponction lombaire est nécessaire, elle doit être précédée d'une perfusion de 30Ul/kg répétée 12 heures après.
5.2.3.4 Chirurgie
Toute chirurgie est possible mais en centre spécialisé pouvant assurer un support en facteurs et en suivi hématologique : maintenir un taux de 40 % au moment de l'intervention et la semaine suivante.
5.2.3.5 Autres hémorragies
5.2.3.6 En cas de présence d'un anticoagulant
On peut discuter soit :

    * saturer l'anticoagulant
    * utiliser des concentrés prothrombiques activés

La dose moyenne est de 100 Ul/kg pouvant être répétées 6 heures plus tard. Pour éviter les malaises, ne pas dépasser 2 ml/minute pour l'Autoplex et 2 U/kg minue pour le FEIBA.
5.2.4 Surveillance du traitement
Au cours d'un traitement prolongé, il faut surveiller avant une injection :

    * TCK,
    * dosage du VIII et du IX,
    * rechercher un anticoagualant au début du traitement puis au bout de 8 à 15 jours. Des transfusions inefficaces font craindre l'apparition d'un anticoagulant.

5.2.5 Complications du traitement
5.2.5.1 Infectieuses :
- hépatites transfusionnelles (autres que l'hépatite B si correctement vacciné),
- SIDA : ne doit plus se voir depuis 1985 avec le contrôle et la préparation des produits sanguins.
5.2.5.2 Immunologiques :
- hémolyses chez des sujets A, B ou A B recevant de fortes doses de concentrés contenant des Anti A ou des Anti B. Il faut dans ce cas préférer les concentrés isogroupes.
- apparition d'un anticoagulant circulant dirigé contre le facteur manquant ++.

    * le rechercher toutes les 5 à 10 perfusions pendant les 100 premières perfusions, ou après tout traitement prolongé ;
    * fréquence de survenue : 6 %,
    * au-delà de la 50è transfusion, le risque d'apparition est minime car il existe des faibles et des forts répondeurs ;
    * l'existence d'un anticoagulant pose de difficiles problèmes thérapeutiques qui doivent être résolus en Centre Spécialisé. C'est l'une des indications de l'Autoplex.

6 Devenir
6.1 Evolution
- L'espérance de vie est pratiquement identique à celle du reste de la population depuis l'utilisation des traitements substitutifs.
- Le problème est surtout fonctionnel, lié aux séquelles articulaires.
Un problème difficile et onéreux est le traitement chirurgical d'un sujet ayant un inhibiteur.
6.2 Problèmes médico-sociaux
6.2.1 Si les conditions familiales le permettent
L'enfant et les parents sont éduqués. Le traitement se fait à domicile. Ils disposent à la maison de produits anti-hémophiliques.
6.2.2 Si les conditions familiales ne le permettent pas
L'enfant peut être pris en charge dans des centres spécialisés permettant aussi une scolarité.
7 Diagnostic anténatal
Le diagnostic anténatal est possible. Il ne se justifie bien entendu que dans les formes sévères et que si les familles ont décidé d'interrompre la grossesse en cas d'enfant atteint.

Il est possible dans les formes familiales :
- soit, jusqu'à un passé tout récent, par diagnostic de sexe chromosomique par amniocentèse à la 17è semaine et en cas de foetus mâle, dosage du facteur VIII (ou IX) par ponction du cordon sous échographie.
- soit, tout récemment, par biopsie de trophoblaste qui permet, à 10 semaines, à la fois le caryotype foetal et, par biologie moléculaire, si la famille est informative, un diagnostic d'enfant indemne ou atteint.
Purpuras
E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 6 mars 2000
Purpuras

1 Diagnostic positif et conduite à tenir
1.1 Anamnèse
1.2 Données de l'examen
1.3 Apprécier la gravité ++
2 Diagnostic différentiel
3 Diagnostic étiologique
3.1 Purpuras vasculaires
3.2 Purpuras thrombocytopathiques
3.3 Purpuras thrombocytopéniques
   
PTI

1 Diagnostic positif
1.1 Signes cliniques
1.2 Examen biologique
2 Diagnostic différentiel
2.1 Eliminer les purpuras vasculaires
2.2 Eliminer les purpuras thrombopathiques
2.3 Eliminer les autres causes de thrombopénie
3 Evolution et traitement
3.1 Evolution des 2 premiers mois
3.2 Evolution à long terme
Objectifs
1. Décrire les éléments cliniques et biologiques permettant le diagnostic du purpura thrombopénique, du purpura vasculaire.

2. Décrire les signes cliniques et biologiques ainsi que l'évolution du purpura rhumatoïde (éléments de surveillance, complications).

3. Enumérer les examens hématologiques indispensables et les épreuves isotopiques permettant d'expliquer le mécanisme central ou périphérique d'une thrombopénie.

4. Enumérer les causes des purpuras thrombopéniques acquis.

5. Décrire la conduite à tenir devant un purpura aigu thrombopénique idiopathique.

6. Enumérer les signes cliniques et biologiques permettant le diagnostic du syndrome hémolytique et urémique.

Le purpura est une extravasation du sang hors des vaisseaux dans les couches superficielles de la peau et des muqueuses. Il ne s'efface pas à la vitropression ni a l'étirement de la peau. Il apparaît spontanément ou pour un traumatisme minime et il évolue par les divers stades de la biligénèse locale.
1 Diagnostic positif et conduite à tenir
Le diagnostic positif repose sur la définition sémiologique. On distingue trois formes de purpura :

    * pétéchies : petites taches hémorragiques de 1 à 4 mm de diamètre.,
    * ecchymoses : nappes hémorragiques aux contours mal limités,
    * vibices : stries linéaires aux plis de flexion.

La conduite à tenir est déterminée à partir des éléments suivants :
1.1 Anamnèse
- antécédents hémorragiques personnels ou familiaux,
- circonstances d'apparition, prise de médicaments.
1.2 Données de l'examen
1.2.1  Clinique
- purpura isolé ou associé à d'autres manifestations hémorragiques : épistaxis, gingivorragies, hémorragies digestives, urinaires, cérébroméningées,...
- autres symptômes : fièvre, adénopathies, hépatosplénomégalies, arthrites ou arthralgies...
1.2.2 Examens complémentaires d'orientation
- hémogramme avec numération des plaquettes,
- hémostase (TQ, TCK, temps de thrombine et dosage de la fibrine),
- éventuellement, temps de saignement et étude de la fonction plaquettaire.
 
Ainsi, on aura des purpuras avec :
- taux de plaquettes normal : purpuras vasculaires ou thrombopathiques,
- taux de plaquettes diminué : purpuras thrombocytopéniques.
1.3 Apprécier la gravité ++
- Un purpura avec fièvre doit faire craindre une septicémie, notamment à méningocoques et nécessiter un traitement d'urgence.
- Taux de plaquettes : une thrombopénie inférieure à 50 000/mm3, peut être responsable d'une hémorragie grave. Le risque hémorragique est d'autant plus important que la thrombopénie est sévère et qu'elle est d'origine centrale.
- Signes cliniques hémorragiques : en l'absence d'un traumatisme, un purpura modéré ne se complique pas d'hémorragie grave.
2 Diagnostic différentiel
Le purpura se distingue des lésions suivantes :

    * angiomes : tumeurs vasculaires,
    * taches rubis : angiomes nodulaires, rouge rubis, légèrement saillants. Ils persistent à la vitropression,
    * angiomes stellaires, point rouge central d'où partent des ramifications capillaires,
    * télangiectasies : dilatations pulsatiles anormales et permanentes des petits vaisseaux et des muqueuses. L'exemple est représenté par la maladie de Rendu-Osler. C'est une maladie héréditaire à transmission autosomique récessive.

3 Diagnostic étiologique
Il existe trois groupes étiologiques :
1 - le purpura vasculaire,
2 - le purpura thrombocytopathique,
3 - le purpura thrombocytopénique,
au sein duquel nous individualiserons :
4 - le purpura thrombopénique idiopathique (PTI).
3.1 Purpuras vasculaires
3.1.1 Purpuras infectieux
Les septicémies à méningocoques, streptocoques (endocardite d'Osler), staphylocoques, à candida et diverses infections virales peuvent être en cause.

Le modèle est représenté par le purpura méningococcique où l'on peut schématiser deux tableaux :
- dans la forme aiguë, le purpura est pétéchial, un peu nécrotique, dispersé sur toutes les parties du corps sans autres signes hémorragiques. L'existence d'une fièvre et d'un syndrome méningé évoque facilement le diagnostic. Une nuque souple et une P.L normale ne doivent pas faire éliminer la possibilité d'une méningococcémie.
- dans la forme suraiguë, l'éruption purpurique est représentée par de grandes ecchymoses violacées, à contours imprécis et d'extension rapide (purpura fulminans de Hénoch).
3.1.2 Oedème aigu hémorragique du nourrisson (OAHN)
L'OAHN touche le nourrisson entre 5 et 24 mois. Il survient habituellement l'hiver, deux semaines après un facteur déclenchant : infection des voies aériennes supérieures, vaccination ou prise médicamenteuse. L'étiologie est inconnue, sans doute une vascularite immunoallergique.
3.1.2.1 Tableau clinique
Il est impressionnant par la symptomatologie cutanée mais rassurant par l'état général conservé. Il associe :
- une fièvre inaugurale à 38° - 40°,
- des oedèmes douloureux, inflammatoires, souvent bilatéraux et siègeant principalement sur le dos des mains et des pieds, les oreilles et le visage. D'autres localisations sont possibles.
- purpura polymorphe : papule érythémateuse et oedémateuse d'extension centrifuge réalisant des éléments en cocardes avec un centre purpurique qui n'est jamais bulleux (diagnostic différentiel avec l'érythème polymorphe). Elles apparaissent par poussées. A côté des lésions en cocarde, il existe des lésions pétéchiales et nécrotiques.
3.1.2.2 Tableau biologique
- hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles,
- augmentation de la VS et de la CRP,
- le taux de plaquette est normal.
3.1.2.3 Evolution
Elle est simple sans complications en 10 à 15 jours. Plusieurs poussées d'oedèmes et de lésions cutanées sont possibles mais la guérison est sans séquelles.
3.1.2.4 Diagnostic différentiel
Purpura fulminans, syndrome de Kawasaki, érythème polymorphe, syndrome de Sylverman.
3.1.3 Purpura rhumatoïde (Schönlein-Henoch)
3.1.3.1 Clinique
Ce syndrome apparaît à tout âge, mais surtout chez l'enfant. Le début peut être précédé d'un épisode "grippal" ou survenir spontanément :
- le purpura est remarquable (100%)

    * maculaire, maculopapuleux et parfois nécrotique,
    * symétrique : membres inférieurs mais aussi membres supérieurs, avant-bras et coudes, fesses. Le visage et le thorax sont en règle respectés.
    * évolue par poussées, déclenchées ou exagérées par l'orthostatisme,
    * des éruptions urticariennes sont possibles.

- les douleurs articulaires (80%)

    * intéressent toutes les articulations mais surtout les chevilles, les genoux et les poignets.
    * soit simples arthralgies, soit arthrites mobiles et fugaces,
    * guérissent sans séquelles.

- troubles digestifs variables (60%)

    * douleurs abdominales modérées ou violentes à type de coliques avec vomissements, pouvant être responsables d'une intolérance alimentaire,
    * hémorragies intestinales, hématomes de parois,
    * rarement : invagination intestinale, perforation ou occlusion.

- manifestations rénales (30%)

    * survenant généralement au cours du premier mois d'évolution,
    * soit hématurie ou glomérulonéphrite, soit plus rarement un syndrome néphrotique. La biopsie rénale montre des dépôts mélangiaux d'IGA en immunofluorescence.

3.1.3.2 Examens complémentaires
L'hémogramme et l'exploration de l'hémostase sont normaux. La V.S est normale ou modérément accélérée. Il n'y a pas d'examen spécifique de la maladie ++.
3.1.3.3 Evolution
Le traitement est symptomatique avec repos au lit au moment des poussées importantes. Deux complications sont redoutées :
- troubles digestifs sévères : ils s'accompagnent de douleurs vives et d'une dénutrition importante. La corticothérapie a 1mg/kg/jour pendant une semaine s'avère en général efficace en cas d'intolérance alimentaire grave.
- l'atteinte rénale conditionne le pronostic à long terme avec un risque d'insuffisance rénale définitif. Au cours des trois premiers mois, il est prudent de rechercher et de surveiller une protéinurie et une hématurie. L'existence d'une insuffisance rénale, d'une hypertension artérielle, d'un syndrome néphrotique (protéinurie supérieure à 5cg/kg/j) justifie une biopsie rénale. Cette néphropathie se caractérise par des dépôts d'IgA dans le mésangium. Une prolifération épithéliale importante ainsi qu'une infiltration interstitielle justifie un traitement médical pour essayer de stopper l'évolution des lésions. Une simple protéinurie et/ou hématurie ne constituent pas une indication de biopsie rénale d'emblée.
3.1.4 Purpuras médicamenteux
Les médicaments les plus souvent incriminés sont : aspirine, antibiotiques, sulfamides, iode, barbituriques, phénothiazines, anticoagulants oraux.
3.1.5 Néonatal
Dans certaines conditions obstétricales (présentation de siège, circulaire du cordon, hypertension veineuse), on note un purpura pétéchial ou en plages ecchymotiques localisé. Il est prudent de s'assurer d'un taux normal de plaquettes.
3.1.6 Purpuras dysglobulinémiques
3.1.6.1 Clinique
- purpura souvent inaugural, au niveau des membres inférieurs, symétriques. Il évolue par poussées de durée variable, parfois nécrotique, laissant souvent place à une dermite ocre.
- autres symptômes parfois associés : arthralgies, syndrome de Raynaud.
3.1.6.2 Biologie
- V.S très augmentée dans les 2/3 des cas,
- hypergammaglobulinémie.
3.1.6.3 Evolution
Elle dépend de l'étiologie. Il faut rechercher une maladie de système, telle un lupus.
3.1.7 Autres causes
- traumatiques : piqûres par des insectes, des parasites ou des objets pointus.
- scorbut, cirrhose.
3.2  Purpuras thrombocytopathiques
Les thrombocytopathies sont des maladies plaquettaires liées à une anomalie qualitative des plaquettes. Le nombre des plaquettes est normal. Elles peuvent être constitutionnelles et héréditaires ou acquises.
3.2.1 Thrombocytopathies constitutionnelles
La mieux connue est la thrombasthénie de Glanzmann.
3.2.1.1 Clinique
Purpura chronique débutant dans la petite enfance. les hémorragies sont surtout muqueuses : épistaxis, gingivorragies, hémorragies digestives, ménométrorragies.
3.2.1.2 Biologie
- numération plaquettaire normale,
- allongement du temps de saignement,
- défaut d'agrégation des plaquettes.
3.2.1.3 Evolution
Il faut toujours se méfier d'une hémorragie grave. Les transfusions de plaquettes sont efficaces. Lorsque l'enfant devient plus âgé, les hémorragies s'atténuent. Un traitement hormonal est souvent nécessaire lors de la puberté chez les filles.
3.2.2 Thrombocytopathies acquises
1 - médicaments : aspirine, anti-inflammatoires, antihistaminiques, antibiotiques et anticoagulants ;
2 - au cours de certaines maladies, syndromes myéloprolifératifs, états pré leucémiques, maladie de Waldenström, insuffisance rénale chronique.
3.3 Purpuras thrombocytopéniques
Se définissent par un taux de plaquettes inférieur à 150 000/mm3.
Le myélogramme est un examen indispensable à la recherche de l'existence ou non de mégacaryocytes.
3.3.1 Thrombocytopénies par trouble de la production médullaire
Elles se caractérisent par une diminution du nombre des mégacaryocytes.
3.3.1.1 Troubles congénitaux héréditaires
Le purpura apparaît dans la période néonatale ou au cours des premières années. Il s'agit de maladies rares.
3.3.1.2 Troubles acquis
- leucémies et aplasies médullaires : la thrombopénie est souvent associée à une atteinte des autres lignées,
- toxicité électives de la lignée mégacaryocytaire après prise de diurétiques thiazidiques.
3.3.2 Thrombocytopénies par destruction excessive
Les caractéristiques de ces thrombopénies sont :

    * thrombopénie inférieure à 150 000/mm3,
    * myélogramme riche contenant de nombreux mégacaryocytes, sans anomalie des autres lignées.
    * durée de vie des plaquettes diminuée,
    * elles sont acquises.

3.3.2.1 Origine infectieuse
Une thrombocytopénie peut s'observer au cours de nombreuses infections virales, microbiennes ou mycosiques :
- les infections les plus courantes sont la rubéole, la rougeole, la varicelle, la mononucléose infectieuse, le cytomégalovirus et le VIH. Le purpura apparaît généralement dans la semaine qui suit l'épisode viral et il disparaît rapidement. Un purpura thrombopénique peut être un mode de découverte d'une infection par le VIH. La thrombopénie est inférieure à 50 000/mm3.
- les infections microbiennes graves sont parfois en cause, notamment en période néonatale. Le traitement est surtout celui de l'infection.
- les infections mycosiques : fièvre, malade immunodéprimé.
3.3.2.2 Origine médicamenteuse immuno-allergique
Ce mécanisme implique une sensibilisation préalable de l'organisme, c'est-à-dire une première prise médicamenteuse plusieurs jours ou semaines auparavant ;
- le purpura et les hémorragies apparaissent dans les heures qui suivent la prise du médicament. La thrombopénie peut être extrême avec un risque hémorragique ;
- les principaux médicaments : analgésiques (Aspirine, anti-inflammatoires), antibiotiques (Pénicilline, Sulfamides), anticonvulsivants et sédatifs (Sédormid, barbituriques, hydantoïnes, Carbamazépine, Valproate de sodium) et la Quinine et Quinidine.
3.3.2.3 Thrombocytopénie par coagulation intravasculaire
La diminution des plaquettes s'explique par un processus thrombotique des petits vaisseaux :
- soit consommation intravasculaire disséminée. La thrombopénie est associée à une chute des autres facteurs de la coagulation. Elle survient dans un contexte de choc, de septicémie ou de leucémie promyélocytaire ;
- soit consommation intravasculaire localisée, avec trois groupes étiologiques :

    * chez le nouveau-né, il faut penser à un angiome géant du foie ;
    * le syndrome hémolytique et urémique d'étiologie inconnue survient surtout chez l'enfant de moins de 3 ans. Le tableau clinique est marqué par une phase prodromique (fièvre, diarrhée, rhino-pharyngite, vomissements) suivie en 4 à 5 jours d'une phase d'état : pâleur importante, oligo ou anurie. Le tableau biologique objective une anémie hémolytique avec des schizocytes, une thrombopénie et souvent une hyperleucocytose ainsi qu'une insuffisance rénale (le test de Coombs direct est en règle négatif). Cette affection justifie une hospitalisation. Le pronostic dépend de l'atteinte rénale où il existe des lésions de microangiopathie thrombotique. Le traitement initial est symptomatique : diurétiques, hypotenseurs et éventuellement, une dialyse. L'évolution se fait dans 1/4 des cas vers une insuffisance rénale terminale justifiant une épuration extrarénale.
    * le syndrome thrombotique thrombocytopénique (syndrome de Moskowitz) se rencontre surtout chez le grand enfant ou l'adulte.

3.3.2.4 Thrombocytopénies néonatales immunes
Les thrombopénies néonatales immunes sont dues à l'existence d'anticorps de type IgG chez la mère durant la grossesse et dirigés contre les antigènes plaquettaires. Ces anticorps transmis de la mère à l'enfant peuvent franchir la barrière placentaire à partir de la 14ème semaine de gestation. On distingue deux situations  : les allo immunisations et les thrombopénies auto-immunes :

    * Thrombopénies allo-immunes : dues à une immunisation maternelle contre les antigènes spécifiques des plaquettes, présents chez le foetus et que la mère ne possède pas. L'immunisation est favorisée par certains groupes HLA.

      La thrombopénie foetale peut exister tôt, dès la 20ème semaine de gestation. Classiquement, elle est découverte dès la naissance ou les deux premiers jours de vie par un purpura. Toutefois, le risque d'une hémorragie grave, en particulier cérébrale, existe dès l'accouchement et durant toute la phase de thrombopénie. Le diagnostic repose sur une thrombopénie chez l'enfant, un taux normal de plaquettes maternelles et la mise en évidence d'anticorps sériques maternels dirigés contre les antigène foetaux.
    * En cas de grossesse à risques, on propose un diagnostic anténatal par ponction de sang foetal au cordon. En fin de grossesse, si le taux des plaquettes est inférieur à 100 x 109/l, on propose une césarienne. De toute façon, la surveillance doit être rigoureuse la première semaine de vie. Un traitement par immunoglobulines s'impose si le taux de plaquettes est < 50 x 109/l. Thrombopénies auto-immunes. Elle est due à l'existence d'une thrombopénie auto-immune chez la mère. Le taux des plaquettes maternelles est en règle diminué mais ne permet pas de prévoir le taux du nouveau-né. Le grossesse de la mère se déroule habituellement bien et l'affection est parfois découverte en raison de la thrombopénie du nourrisson. Chez le nouveau-né, le purpura apparaît au bout de quelques heures ou la première semaine. Comme précédemment le taux plaquettaire anténatal par ponction de sang foetal est possible et fiable. Un accouchement par voie basse est autorisé si le taux est > à 100 x 109 /l. Le nouveau-né est étroitement surveillé et traité par immunoglobulines I.V si le taux plaquettaire est < 50.109/l.

Les thrombopénies néonatales non immunes sont exceptionnelles.
3.3.2.5 - Thrombocytopénies au cours de diverses affections
lupus, anémie hémolytique auto-immune, hypersplénisme, hémolyse avec incompatibilité foeto-maternelle sévère, après transfusions importantes.
3.3.2.6 Thrombocytopénies familiales ou au cours de déficits immunitaires
Elles sont exceptionnelles.
3.3.2.7 Purpura thrombopénique idiopathique

Ce diagnostic est envisagé quand aucune cause n'est retrouvée (cf ci-après) ++.

 
Purpura thrombopénique idiopathique
(PTI)

 

Ce purpura lié à une hyperdestruction des plaquettes d'origine immunologique, d'où parfois l'appellation de purpura thrombocytopénique auto-immun.
1 Diagnostic positif
1.1 Signes cliniques
Il s'agit le plus souvent d'un jeune enfant de 2 à 10 ans ou l'adulte jeune. Le début est brutal par un purpura pétéchial et ecchymotique, principalement cutané et parfois muqueux. Il peut s'associer des épistaxis et des hémorragies viscérales : buccales, hématuries, hémorragies digestives ou cérébroméningées. La présence de bulles hémorragiques endobuccales est un facteur de gravité. L'état général est excellent. L'examen clinique est par ailleurs normal, une splénomagalie modérée est rare. Il survient soit spontanément soit au décours d'une infection d'allure virale ou après vaccination (ex. ROR).
1.2 Examen biologique
1.2.1 Numération formule sanguine (NFS) et plaquettes
Il existe une thrombopénie isolée, souvent inférieure à 50 000/mm3
Il peut y avoir une anémie en cas d'hémorragie.
1.2.2 Le myélogramme++
- riche, avec intégrité des lignées rouges et blanches,
- contient de nombreux mégacaryocytes.

Le diagnostic du PTI est souvent évident de sorte que certains ne font pas de myélogramme systématiquement, mais il est obligatoire en cas de corticothérapie.
1.2.3 Test de la coagulation
- inutiles pour le diagnostic,
- anomalies de l'hémostase primaire : fragilité capillaire, allongement du T.S., irrétraction du caillot,
- les temps de Quick, de céphaline-kaolin et dosage du fibrinogène sont normaux.
1.2.4 Enquête immunologique
à la recherche d'anticorps fixés sur les plaquettes : test de Dixon, Coombs plaquettaire. Cet examen est difficile et nécessite une quantité importante de sang. Aussi, il est en règle difficile de le faire chez l'enfant.
1.2.5 Enquête étiologique
anticorps antinucléaires, anti EBV, anti CMV, anti HIV et anti hépatite B.
2 Diagnostic différentiel
2.1 Eliminer les purpuras vasculaires
Dans ce cas, le taux des plaquettes est normal.
2.2 Eliminer les purpuras thrombopathiques
Le taux des plaquettes est normal mais le T.S est allongé.
2.3 Eliminer les autres causes de thrombopénie
2.3.1 centrale
le myélogramme montre l'absence de mégacaryocytes,
2.3.2 périphérique
le diagnostic repose sur l'élimination des étiologies précédemment rapportées. Ce diagnostic est facile avec l'anamnèse et un examen clinique normal.
3 Evolution et traitement
3.1 Evolution des deux premiers mois
La gravité de la maladie est liée à l'importance des signes clinique hémorragiques et au taux de plaquettes (inférieur à 30 000/mm3). Il n'y a pas d'hémorragie grave en absence de purpura. Les risques hémorragiques surviennent surtout au début de la maladie.
3.1.1 Forme commune purpurique
On envisage un traitement lorsque le taux de plaquettes est inférieur à 30.109/l ou s'il existe un purpura important. Au-dessus, on se contente d'une simple surveillance avec parfois une rémission spontanée. Dans la plupart des cas, on propose une corticothérapie à la posologie de 2 à 4 mg/kg/j pendant une semaine avec un arrêt en une semaine quelque soit l'évolution. Si les signes hémorragiques paraissent menaçants, certains proposent les immunoglobulines à haute dose (1g/kg/j durant 2 jours) car elles sont plus rapidement efficaces. L'évolution est jugée sur le taux de plaquettes et l'existence ou non de signes hémorragiques. Il faut arrêter le sport, les activités violentes et contre-indiquer les intramusculaires.
3.1.2 Formes graves avec hémorragie autre que le purpura
- les transfusions de plaquettes sont transitoirement efficaces et n'ont qu'un intérêt ponctuel lors d'une hémorragie viscérale grave.
- les plasmaphérèses : difficiles chez l'enfant,
- les gammaglobulines standards à fortes doses (1g/kg/j durant 2 jours) doivent être préférées aux autres traitements.
Dans ces deux formes, l'évolution immédiate est schématiquement la suivante :
# soit remontée rapide des plaquettes et normalisation en une semaine. En cas de remontée franche et de normalisation, le taux reste habituellement normal à l'arrêt du traitement.
# soit remontée partielle ou lentement subnormale. On peut assister à une rechute à l'arrêt du traitement.
# soit échec complet. Cela est rare.
3.2 Evolution à long terme
3.2.1 En cas de rémission complète
L'évolution est en règle favorable. Des rechutes transitoires peuvent survenir lors d'un épisode viral. Les vaccinations peuvent être réalisées un an après la rémission complète.
3.2.2 En l'absence de rémission complète
on surveille régulièrement l'enfant et on parle de thrombopénie chronique après 6 mois d'évolution.

    * si le taux des plaquettes est supérieur à 30.109/l, le risque hémorragique est très faible. L'abstention thérapeutique est de règle. Très souvent, après plusieurs mois ou années les plaquettes augmentent progressivement et peuvent se normaliser. Il n'y a pas d'indication à faire une splénectomie ;

    * si le taux des plaquettes est inférieur à 30.109/l, une surveillance étroite s'impose. En l'absence de signes hémorragiques, l'abstention thérapeutique est de règle. En présence de signes hémorragiques (ex. purpura important,...), la splénectomie est indiquée. Certains la réalisent après une durée de vie des plaquettes qui est généralement inférieure à deux jours. avec une séquestration splénique exclusive.

3.2.3 Risque d'anticorps anti plaquettes
chez les nouveaux-nés de mères qui ont des antécédents de PTI. Il faut prévenir les filles de ce risque sans les inquiéter. Quelque soit le taux des plaquettes maternelles, le nouveau-né peut avoir une thrombopénie dès la naissance ou au cours de la première semaine par passage transplacentaire d'auto-anticorps transmis.
Diagnostic d'une adénopathie périphérique
C. Bergeron - E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 4 mars 2000

1 Diagnostic positif
2 Diagnostic différentiel
3 Diagnostic étiologique
   

3.1 Adénopathies généralisées
3.2 Adénopathies localisées
4 Conclusion et attitudes pratiques
 Objectifs

1. Décrire la conduite de l'examen clinique chez un enfant présentant une adénopathie.

2. Décrire les caractères, l'évolution et le traitement d'une adénite à aiguë germe banal, d'une adénopathie tuberculeuse, d'une adénopathie secondaire à une maladie des griffes du chat.

3. Citer les causes des adénopathies inflammatoires généralisées.

4. Donner les éléments cliniques et paracliniques permettant de rattacher une adénopathie à une mononucléose infectieuse, à une toxoplasmose.

5. Décrire la conduite à tenir devant une adénopathie localisée et non inflammatoire

La découverte d'adénopathies superficielles, isolées ou multiples, est fréquente chez l'enfant et, il convient de rappeler que c'est entre 4 et 8 ans que le développement du système lymphatique est maximum. Alors que les ganglions ne sont en règle non palpables à la naissance, ils vont subir une augmentation de taille constante jusqu'à la puberté, puis régresser progressivement. Les ganglions cervicaux, axillaires et inguinaux sont plus facilement palpables chez l'enfant que chez l'adulte, sans revêtir obligatoirement un caractère pathologique. Si le plus souvent les adénopathies représentent une réponse transitoire à une infection locale ou générale, elles peuvent être le témoin d'une affection sévère à ne pas méconnaître, justifiant la ponction et la biopsie ganglionnaires. Toute corticothérapie aveugle doit être proscrite.
1 Diagnostic positif

Si une adénopathie peut être le motif d'une consultation médicale, très souvent il s'agit d'une découverte fortuite lors d'un examen systématique des aires ganglionnaires. La démarche diagnostique sera toujours la même : caractère de l'adénopathie, examen du territoire drainé par cette adénopathie et examen somatique général.

- Les caractères de l'adénopathie :
Il faudra tout d'abord apprécier le siège (cervical, axillaire, inguinal), mais également les autres aires ganglionnaires en se rappelant que des ganglions pré-auriculaires, épitrochléens, sus-claviculaires, poplités sont toujours pathologiques. Il faudra également apprécier le nombre d'adénopathies, leur appartenance à une même chaîne ou à des chaînes ganglionnaires différentes. La taille est très importante, avec des mesures précises permettant des comparaisons aux différents examens. La notion d'adénopathies bilatérales et symétriques est importante à souligner. La consistance du ganglion est également à décrire : dur ou tendant à se ramollir, adhérent ou non au plan profond, présence ou non d'une périadénite. Il faut rechercher par une palpation plus franche, l'existence ou non d'adénopathies profondes.

- L'examen du territoire drainé par l'adénopathie recherche ou non la présence d'une lésion récente ou ancienne, s'étant infectée ou non. Le territoire drainé peut être cutané, mais également buccopharyngé et ORL quand il s'agit d'une adénopathie cervicale.

- L'examen somatique précise l'état général (fièvre, asthénie, anorexie et amaigrissement) et recherche la présence d'une hépatosplénomégalie. Bien entendu, l'interrogatoire a précisé le mode de survenue et la date de début de cette ou ces adénopathies.

- Certains examens complémentaires enfin, permettent de complèter le bilan : une radiographie permet parfois de déceler une extension des adénopathies, en particulier au niveau du médiastin. L'échographie abdominale permet chez l'enfant, de rechercher des adénopathies profondes, en particulier de la région coeliaqe. L'examen tomodensitométrique semble moins performant du fait de l'absence de graisse chez l'enfant. Enfin, la lymphographie dans certains cas permet de révéler et de préciser des adénopathies iliaques et lomboaortiques.
2 Diagnostic différentiel

Au niveau cervical, il est facile d'éliminer les tumeurs superficielles sous cutanées : kystes sébacés, lipomes, pseudo-tumeurs inflammatoires à corps étranger. Dans la région latérale du cou, les tumeurs embryonnaires ou kystes épidermoïdes peuvent poser de difficiles problèmes diagnostiques. Elles sont faciles à reconnaître quand elles s'accompagnent d'une fistule congénitale du cou, mais le plus souvent, elles sont isolées et se présentent comme des kystes à contenu plus ou moins liquidien. Ce sont des reliquats embryonnaires de la 2ème fente branchiale. Les autres tumeurs sont rares, s'agissant soit d'un neurinome (maladie de Recklinghausen) ou de tumeurs vasculaires ou de lymphangiomes kystiques. Dans la région cervicale médiane, il faut écarter le kyste du tractus thyréo-glosse (tumeur arrondie, lisse, élastique) et les hypertrophies thyroïdiennes quelqu'en soit la nature. Enfin, dans la région sus- hyoïdienne latérale, il faut éliminer les intumescences ou les tumeurs des glandes salivaires, les kystes dermoïdes du plancher de la bouche.

Au niveau des aires inguinales, on écarte facilement un abcès chaud ou un érysipèle, mais également un fibrome, un lipome, ou une hernie.
3 Diagnostic étiologique
Nous séparerons les étiologies en adénopathies généralisées ou adénopathies localisées.
3.1 Adénopathies généralisées

Elles sont caractérisées par une augmentation de volume des ganglions dans plusieurs territoires non contigus pouvant parfois être associées à une hépatosplénomégalie.
3.1.1 Infections virales

    * Mononucléose infectieuse : les adénopathies sont un signe majeur et précoce de l'infection quand elles sont fermes, mobiles, sensibles au palper et presque toujours diffuses, mais prédominantes aux régions cervicales. Leur volume est parfois très important, mais ces adénopathies n'évoluent jamais vers la suppuration. Elles disparaissent assez lentement en plusieurs semaines. Le diagnostic est facilement posé si les autres symptômes sont présents : splénomégalie, angine, fièvre... et dans les formes pauci-symptomatiques, le diagnostic s'aidera de la formule sanguine avec les grands lymphocytes à cytoblasme bleuté, du MNI test, de la réaction de Paul-Bunnell-Davidsohn qui est positive à partir du 7ème jour et surtout d'une sérologie positive vis-à-vis du virus d'Epstein-Barr.

    * Maladies des inclusions cytomégaliques : le tableau peut évoquer une mononucléose, mais les adénopathies sont plus modérées et les lymphocytes hyperbasophiles moins nombreux. Les adénopathies sont un peu plus fréquentes dans les formes de survenue précoce chez le nourrisson de moins d'un an.

    * Rubéole : les adénopathies sont précoces, présentes à la période d'invasion et s'observant dans tous les territoires, mais certains sièges sont plus caractéristiques : région cervicale postérieure, rétro-auriculaire et occipitale à chercher dans la racine du cuir chevelu. Il s'agit de petits ganglions de la taille d'une noisette, sensibles à la pression. La confirmation se fait par la sérologie.

    * Rougeole : les ganglions périphériques sont de petit volume, présents dès la période d'invasion s'associant au catarrhe oculo-nasal et aux signes de Köplik. Des adénopathies intra-abdominales plus volumineuses peuvent simuler parfois des tableaux appendiculaires.

    * Autres viroses : varicelle, adénovirus sont parfois responsables d'adénopathies de petit volume dissiminé.

    * Virus de l'immuno-déficience humaine (VIH) : les adénopathies peuvent faire partie du tableau de l'infection à VIH chez l'enfant. Du fait de l'immunodéficience, les adénopathies peuvent être en rapport avec une surinfection bactérienne, virale ou parasitaire. La présence de ces adénopathies qui sont bien souvent non inflammatoires, volumineuses, nombreuses, cervicales, classe l'enfant en P2 (infection symptomatique) sous classe A (découverte non spécifique). Il faut actuellement savoir y penser, devant des parents éventuellement sujets à risque, ou chez un enfant ayant été transfusé.

3.1.2 Infections parasitaires ou mycosiques

    * Toxoplasmose acquise : les adénopathies constituent un symptôme présent dans 60 à 80 % des formes à expression clinique. Elles sont généralement diffuses bien que l'atteinte des divers territoires se fasse progressivement et successivement. Les chaînes lymphatiques le plus souvent intéressées sont celles de la nuque, de la région sous maxillaire, de la jugulaire. De volume modéré, ces ganglions sont fermes, mobiles, peu ou pas douloureux, ils ne suppurent jamais et persistent plusieurs mois. Le diagnostic repose sur la sérologie avec un taux élevé d'anticorps anti-toxoplasmes de nature IgM. Le parasite en cause est toxoplasma gondii.

    * Leishmaniose viscérale (Kala-Azar) : elle est plus fréquente sur le pourtour du bassin méditerranéen, et touche le plus souvent des enfants âgés de 2 à 3 ans. La forme typique associe un syndrôme général : fièvre, pâleur, et un syndorme splénohépatoganglionnaire. Les adénopathies sont fermes, mobiles, indolores, il peut exister des adénopathies profondes, médiastinales notamment qui n'auront aucune traduction fonctionnelle, mais seront de découverte radiographique. Le diagnostic est porté devant la mise en évidence des leishamies dans les cellules réticulo-histiocytaires (myélogramme).

    * Trypanosomiase : les adénopathies intéressent surtout les chaînes cervicales et sous claviculaires et plus rarement les chaînes axillaires ou inguinales. Les adénopathies sont modérément hypertrophiées, mobiles, indolores, élastiques. Elles ne suppurent jamais.

3.1.3 Adénopathies réactionnelles à une prise médicamenteuse
Les manifestations apparaissent après une exposition médicamenteuse brève, 4 mois au plus, mais parfois quelques jours seulement, et en particulier pour les hydantoïnes, la carbamazépine, ou le primidone. Certains antibiotiques comme l'amoxicilline ou la pénicilline peuvent également donner une hyperplasie ganglionnaire, simulant parfois à l'histologie un lymphome, faisant alors parler de "pseudo-lymphome". Les adénopathies apparaissent d'abord au niveau des aires cervicales et s'étendent ensuite pour envahir toutes les aires ganglionniares. Elles sont habituellement fermes, indolores, sans périadénite. Ceci permet de souligner l'importance de l'interrogatoire à la recherche d'une prise médicamenteuse. Ces adénopathies peuvent également s'accompagner de fièvre, d'éruptions morbilleuses, d'une hépatosplénomégalie et d'une éosinophilie, faisant évoquer alors une réaction d'hypersensibilité.
3.1.4 Adénopathies au cours des maladies auto-immunes et des proliférations bénignes

L'anémie hémolytique auto-immune peut quelquefois être associée à de volumineuses adénopathies régressant spontanément avec les rémissions de l'anémie. Il faut chez ces patients rechercher systématiquement un déficit immunitaire sous-jacent.
Au cours du lupus érythémateux disséminé, les adénopathies sont plus fréquentes chez l'enfant que chez l'adulte, mais restent souvent modérées et rarement au premier plan d'un tableau clinique riche et polymorphe.
Les polyarthrites rhumatoïdes où les adénopathies sont avant tout le fait de formes systémiques.
La sarcoïdose : les adénopathies périphériques surviennent dans 30% des cas et siègent dans n'importe quel territoire. Les ganglions sont peu volumineux, indolores, durs et ne suppurent pas.
Le syndrome d'activation du macrophage : maladie rare, mais qu'il faut savoir évoquer devant une poussée d'adénopathies disséminées associées à une splénomégalie chez un enfant pouvant présenter une altération importante de l'état général, de la fièvre, des anomalies de numération. Cette activation s'accompagne d'une hypofibrinémie et d'une hépatophagie retrouvées au myélogramme.
3.1.5 Adénopathies au cours des hémopathies malignes

    * Les leucémies aiguës : les adénopathies s'observent dans 75 % des leucémies aigües lymphoblastiques de l'enfant et leur évolution est assez parallèle à celle de l'hépatosplénomégalie. Elles sont diffuses, symétriques, fermes, indolores. Très volumineuses, tumorales elles représentent un élément de mauvais pronostic. La ponction au moindre doute, montre un envahissement massif par des lymphoblastes. Le diagnostic est confirmé par le myélogramme. Les adénopathies sont moins fréquentes dans les leucémies aigües myéloblastiques et monoblastiques et absentes dans les formes promyélocytaires. Par contre, ces adénopathies peuvent se trouver dans les leucémies myélomonocytaires chroniques du petit enfant.

    * Le lymphome malin hodgkinien : c'est une maladie qui touche le jeune adolescent entre 10 et 14 ans. Parfois, polyadénopathies fébriles avec splénomégalie et prurit, mais le plus souvent la maladie est révélée sous la forme d'une adénopathie localisée ou apparemment localisée dans la région cervicale basse ou sus-claviculaire. Le ganglion hodgkinien est ferme, augmentant de volume pouvant réaliser des masses tumorales importantes et qui peuvent parfois régresser spontanément et ré-évoluer ultérieurement. Le diagnostic repose sur la ponction et la biopsie.

    * Les lymphomes non hodgkiniens : les adénopathies révèlent la maladie et ont la particularité d'augmenter extrêmement rapidement de volume. Ces adénopathies quand elles sont profondes sont rapidement compressives. La présence d'une adénopathie cervicale suspecte doit faire pratiquer une radiographie pulmonaire à la recherche d'un envahissement médiastinal en particulier antérieur. De la même façon, le diagnostic ici repose sur la ponction et la biopsie. Les lymphomes malins non hodgkiniens touchent des enfants entre 7 et 10 ans.

    * Les métastases ganglionnaires : elles donnent classiquement des adénopathies très dures, mobiles, parfois volumineuses. Ces adénopathies doivent faire évoquer chez le tout petit enfant, le neuroblastome et chez l'enfant un peu plus grand le cancer du corps thyroïde, ou un carcinome indifférencié du nasopharynx chez l'enfant entre 10 et 20 ans.

3.1.6 Adénopathies des maladies de surcharge et de l'histiocytose X

Dans les formes disséminées de l'histiocytose X chez le petit enfant, les adénopathies sont particulièrement fréquentes, généralisées, de volume modéré avec hépatosplénomégalie, éruption cutanée et lésions osseuses. C'est l'ensemble de tous ces signes qui font évoquer le diagnostic qui sera confirmé sur les prélèvements ganglionnaires et en particulier la microscopie électronique et les marqueurs immunologiques. Enfin, les adénopathies existent dans certaines maladies de surcharge (maladie de Gaucher, maladie de Niemann-Pick). Elles sont très modérées à côté de l'énorme splénomaglie. Le diagnostic est fait devant la découverte de cellules de surcharge retrouves dans la moëlle hématopoïétique.
3.2 Adénopathies localisées

Il s'agit le plus souvent d'une étiologie infectieuse. Toutefois une adénopathie isolée peut être révélatrice d'un lymphome ou être une métastase d'un cancer.
3.2.1 Adénopathies cervicales

    * Les adénopathies microbiennes à germes banals, accompagnent une infection souvent rhinopharyngée ou sont en apparence primitives. Ces adénopathies sont sensibles, noyées dans une périadénite modérée et recouverte d'une peau normale. L'évolution se fait vers un adénophlegmon dont la ponction retire un liquide riche en polynucléaires ou un pus franc, dont la culture permet l'identification du germe et guide ainsi l'antibiothérapie. Il est bien entendu essentiel de rechercher la porte d'entrée dans le territoire de cette adénopathie : cutané, dentaire, bucco-pharyngé.

    * Les adénopathies tuberculeuses : l'adénopathie constitue en général une masse importante, visible sur les téguments, peu ou pas douloureuse, ferme au début et entourée de ganglions plus petits. La ponction peut être blanche au début, ou ramener ultérieurement du pus qui sur milieu de Lowenstein permettra la mise en évidence du bacille en cause, de Koch pour ce qui est de la tuberculose, mais également parfois des micobactéries atypiques (bovis...). Ces étiologies restent parfaitement d'actualité encore en 1990. Les mycobactéries atypiques seront recherchées en particulier sur un terrain immunodéficient.

    * Adénopathie maligne : soit ganglionnaire (maladie de Hodgkin ou un lymphome malin non hodgkinien non localisé), soit une métastase d'un cancer loco-régional (thyroïde, sphère ORL).

    * Le syndrome de Kawasaki : vascularite qui associe des atteintes cutanées muqueuses, mais également la présence d'adénopathies cervicales. L'ensemble de la clinique permet d'évoquer le diagnostic.

    * La maladie des griffes du chat : elle est liée à l'inoculation d'une chlamydia par la griffure de chat, mais également de chien, et entraîne une adénopathie satellite du territoire inoculé et révélatrice sous l'aspect de l'augmentation de volume d'un seul ganglion ou de plusieurs ganglions du même groupe. Il faut rechercher cette notion de griffure et pratiquer une sérologie. Au moindre doute : ponction du ganglion ou biopsie.

3.2.2 Adénopathies occipitales
Il faut systématiquement rechercher une cause locale au niveau des cheveux, pédiculose, teigne, impétigo-dermato-sébum.
3.2.3 Adénopathies pré-auriculaires
Nombre d'infections chroniques des yeux ou des paupières s'accompagnent d'augmentation de volume de ces ganglions, réalisant un syndrome occulo-ganglionnaire. Toutes les conjonctivites virales peuvent s'accompagner d'une adénopathie pré-auriculaire.
3.2.4 Adénopathies axillaire
Une infection de la main ou des doigts représente la cause la plus fréquente des adénopathies de ce siège. La vaccination par le BCG, surtout effectuée par voie intradermique, entraîne fréquemment une adénite inflammatoire qui peut évoluer vers la suppuration. Enfin, la mladie des griffes du chat peut être évoquée et recherchée en cas de notion de griffure.
3.2.5 Adénopathies inguinales
Les adénopathies inguinales sont secondaires le plus souvent à une infection bactérienne des membres inférieurs. Chez le nourrisson les dermatoses fessières, pubiennes, la maladie de Leiner-Moussous s'accompagnent d'adénopathies inguinales bilatérales. Les tumeurs osseuses, musculaires, des membres inférieurs ou de la région comportent parfois un ganglion inguinal. Il faudra dans cette région écarter un kyste du cordon chez le garçon et une hernie de l'ovaire chez la petite fille, petite masse de la taille d'une fève située au-dessus du pli inguinal.
4 Conclusion et attitudes pratiques

Lorsque l'on est confronté à une adénopathie chez l'enfant, le problème est de savoir si ce ganglion est pathologique, et faut-il le ponctionner ou le biopsier ? Toutes les maladies infectieuses de l'enfant, ou presque, entrainent une majoration des adénopathies. Le plus souvent ces ganglions ne dépassent pas un centimètre de diamètre et l'état de l'enfant est satisfaisant. Une numération, une V.S normales et une ou deux sérologies permettront de rassurer la famille.

La conduite à tenir devant une adénopathie dépend de la taille, le siège, l'évolutivité, son caractère isolé ou non, une inflammation et une zone ramollie.

1. Une adénopathie isolée :
- une adénopathie inférieure ou égale à 1 cm de diamètre justifie une simple surveillance,
- une adénopathie supérieure à 1 cm :

    * si douloureuse, inflammatoire, rénitente : ponction ramenant souvent du pus. Mettre en culture, antibiotique + anti-inflammatoires.
    * si indolore : selon la taille on peut faire une ponction montrant soit une adénite d'aspect inflammatoire, soit des cellules malignes. Une étude cytologique ne doit pas retarder une biopsie si le ganglion augmente. Schématiquement, une adénopathie isolée supérieure à 3 cm doit être biopsiée d'emblée, en demandant des appositions.

2. Adénopathies généralisées : une N.F.S permet souvent d'orienter.
Déficits immunitaires de l'enfant
V. Gandemer

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 6 mars 2000

1 Développement du système immunitaire
1.1 Immunité non spécifique
1.2 Etude de l'immunité spécifique
2 Déroulement de la réponse immunitaire
3 Explorations de l'immunité
3.1 Etude de l'immunité non spécifique
   

3.2 Etude de l'immunité spécifique
4 Déficits immunitaires
4.1 Définition
4.2 Circonstances cliniques de découverte
4.3 Déficits immunitaires primitifs
4.4 Déficits immunitaires acquis - Classification
Objectifs
1 - Démarche diagnostique vis-à-vis d'un déficit immunitaire primitif :

    * signes cliniques d'appel,
    * bilan biologique.

2 - Classification des déficits immunitaires congénitaux primitifs.

3 - Classification des déficits immunitaires acquis.

Les leucocytes sont responsables de l'immunité. Aussi une leucopénie sévère, une absence de leucocytes ou une anomalie fonctionnelle de ces cellules entraînent des déficits immunitaires. Les déficits peuvent être constitutionnels ou acquis.

Quelle qu'en soit la cause, les infections répétées dominent le tableau. Elles peuvent paraître banales initialement mais leur récidive à l'arrêt des antibiotiques, leur évolution anormalement traînante ou leur aggravation doivent alerter. Il s'agit souvent d'infections ORL, pulmonaires, digestives ou cutanées. D'autres localisations sont possibles de même qu'une atteinte septicémique.

La nature de l'agent pathogène varie selon l'anomalie immunitaire. Schématiquement : les neutropénies ou les anomalies fonctionnelles des granulocytes se compliquent d'infections bactériennes ou fongiques, les anomalies de l'immunité humorale par des infections bactériennes et les anomalies de l'immunité cellulaire par des infections opportunistes (virus, parasites, champignons).
1 Développement du système immunitaire
1.1 L'immunité non spécifique
Elle est représentée par le système granulo-monocytaire et le complément.

- les granulocytes sont à la naissance en nombre augmenté (supérieurs à 10000/mm3). Leur fonction de bactéricidie est satisfaisante. Toutefois elle est diminuée lors d'un épisode de surinfection. Il a été décrit des diminutions de la chimiotaxie et l'opsonisation de ces cellules.

- Les monocytes et macrophages du nouveau-né ont acquis toutes les fonctions à l'exception d'une diminution de la sécrétion des prostaglandines E2.

- Le complément sérique (CH 50) est diminué de moitié, mais le taux rejoint celui de l'adulte dans les premières semaines de la vie.
1.2 Etude de l'immunité spécifique
L'immunité spécifique est représentée par les lymphocytes. On connaît mal les stades de différenciation des cellules souches pluripotentielles en lymphocytes contrairement à ce qu'on connaît avec les autres lignées cellules. Ces cellules lymphoïdes immatures donnent issue à deux voies distinctes soit des lymphocytes pré-T capables de migrer dans le thymus et des lymphocytes pré-B migrant dans un compartiment périphérique équivalent de la bourse de FABRICIUS que l'on retrouve chez les oiseaux.
1.2.1 Les lymphocytes T
Au cours de la vie foetale, les cellules pré-T migrent très tôt (10-12ème semaine) dans le thymus qui est composé essentiellement de cellules épithéliales provenant des 3è et 4è poches branchiales pharyngées. Sous l'action d'hormone thymique (thymuline) sécrétée par les cellules épithéliales, il se produit une maturation des thymocytes dont on commence à voir les premières fonctions d'immunité cellulaire vers la 10-12ème semaine. Il se produit une maturation progressive et ces lymphocytes T migrent en périphérie dans les zones thymodépendantes de la rate et des ganglions puis circulent. Dans le sang d'un foetus de 20-22 semaines, on peut détecter les lymphocytes T suppresseurs et facilitants (CD8-CD4). La numération de ces lymphocytes peut donc permettre un diagnostic anténatal à la 20-22ème semaine.
1.2.2 Les lymphocytes B

Les lymphocytes pré-B sont détectables par la présence de chaînes immunoglobulines dans leur cytoplasme. Puis, ces lymphocytes portent à leur surface des IgM et en faible nombre des récepteurs pour le fragment Fc des IgG que l'on retrouve dans le foie foetal vers la 9ème semaine et la moelle osseuse à partir de la 12-13ème semaine. Ces lymphocytes continuent leur maturation caractérisée par l'apparition de nouvelles classes d'Ig membranaires, IgD puis IgG, puis IgA et IgE, présence des récepteurs Fc et récepteurs pour le C3 et enfin par l'expression membranaire des antigènes de classe II du système HLA. Ils sont détectés vers la 12ème semaine dans le foie foetal, puis dans la moelle osseuse et dans les organes lymphoïdes périphériques burso-dépendants vers la 14-15ème semaine. Dans le sang, les lymphocytes B sont en nombre comparable à ceux de l'adulte vers la 18ème semaine. Dans le sang du foetus, il est possible de faire un diagnostic anténatal à la 20-22ème semaine, en effectuant une numération des lymphocytes B.

Ces lymphocytes B se transforment en plasmocytes sous l'effet d'une stimulation antigénique afin de produire les autres anticorps. Cette stimulation des lymphocytes B peut être effectuée uniquement par des antigènes dépendant de lymphocytes B ou faire intervenir des lymphocytes T dans le cas des antigènes dit thymodépendants. C'est là l'exemple de la coopération cellulaire entre les lymphocytes B et les lymphocytes T.

Au cours de la vie foetale, la stimulation des lymphocytes B en plasmocytes est possible et paraît précoce puisqu'une production d'IgM a été remarquée dès la 12ème semaine. Les productions d'IgG et d'IgA sont plus tardives. Avant le 5ème mois de gestation, il se produit un transfert placentaire des IgG de la mère à l'enfant et ce transfert est beaucoup plus marqué durant le dernier mois. Ceci explique l'hypogammaglobulinémie du prématuré. Par ailleurs, à la naissance un nouveau-né normal n'a que des IgG maternelles (s'il n'y a pas eu de stimulation antigénique). Ces immunoglobulines vont diminuer progressivement après la naissance pour disparaître entre 3 et 6 mois. Entre temps le nouveau-né aura une production progressive de ces propres immunoglobulines dont les valeurs sont inférieures à celles de l'adulte. Avant d'interpréter un taux d'immunoglobulines chez l'enfant, il faut se référer aux courbes de référence pour l'âge. Les anticorps de classe IgA et IgM présents dans le lait de mère surtout en début de lactation jouent un rôle important dans les infections dues aux diverses bactéries, notamment les entérobactéries. A titre d'exemple, les lymphocytes B issus des plaques de PEYER sensibilisés aux antigènes intestinaux migrent vers la glande mammaire durant la lactation et produisent des anticorps spécifiques vis-à-vis des bactéries présentes chez la mère et qui ont donc le plus de chance d'ensemencer l'intestin du nouveau-né.

Evolution du taux sérique des immunoglobulines chez le foetus et le nouveau-né (d'après I. Roitt).
 
2 Déroulemenr de la réponse immunitaire

On décrit quatre étapes successives dans la réponse immunitaire quelle soit cellulaire ou humorale.
La phase première est dite d'induction ou de reconnaissance. La CPA (cellules présentant l'antigène) présente selon un mode de communication complexe, l'épitope à "son" récepteur lymphocytaire. Parallèlement, la CPA secrète une immuno hormone (IL 1) capable de favoriser l'activité du lymphocyte.
La phase deux est dite de prolifération clonale. Dans cette phase, l'antigène déclenche la multiplication des cellules spécifiques ainsi que la sécrétion de lymphokines aux fonctions multiples (dans la réponse cellulaire) et la synthèse d'immunoglobulines (dans la réponse humorale).
La phase trois est dénommée effectrice. C'est au cours de cette phase - réaction d'élimination - que s'effectue la réaction des anticorps (réponse humorale) ou des cellules (réponse cellulaire) spécifiques avec l'antigène, et en général l'élimination de ce dernier ; réaction désignée sous le nom d'inflammatoire pouvant être aiguë ou chronique.
La phase quatre, qui peut artificiellement être rattachée aux trois précédentes, correspond à la génération de lymphocytes B ou T mémoires, dont la propriété est de recirculer dans l'attente d'une seconde ou d'une énième rencontre avec l'antigène. En fait ces cellules mémoires, sont des cellules qui s'ajoutent en grand nombre aux cellules préprogrammées dans la reconnaissance a priori de l'antigène. Leur plus grand nombre et peut-être le programme de fonctionnement plus élaboré de ces cellules, expliquent la nature de la réponse secondaire ou anamnestique beaucoup plus rapide et quantitativement plus performante que la réponse primaire. Ces cellules mémoires et la présence d'anticorps résiduels, expliquent notamment pourquoi un germe infectieux qui pénètre dans un organisme connu de lui, parce qu'il l'a immunisé antérieurement, sera immédiatement neutralisé, ce qui aura un double effet bénéfique pour l'hôte : absence d'infection et restimulation du système de défense.
3 Explorations de l'immunité
3.1 Etude de l'immunité non spécifique
- Numération des polynucléaires : on parle de granulopénie lorsqu'il existe moins de 1000 granulocytes/mm3.
- Etude des fonctions des polynucléaires lorsque leur nombre est normal ou augmenté : chimiotactisme, phagocytose et étude de la fonction bactéricide (chimioluminescence).
- Dosage du complément CH50.
3.2 Etude de l'immunité spécifique (responsable de la mémoire immunitaire)
3.2.1 Etude de l'immunité cellulaire
Cette immunité est représentée par les lymphocytes T et les cellules NK.
- Numération des lymphocytes totaux d'après la numération sanguine. Taux des lymphocytes T : 75 %.
- Exploration de ces lymphocytes T. L'examen simple est la réaction d'hypersensibilité retardée, représentée par la cuti à la tuberculine lorsque le malade a eu le B.C.G. On peut aussi étudier la fonction des lymphocytes T en les stimulant par différents mitogènes ou antigènes.
3.2.2 Explorations de l'immunité humorale
Cette immunité est représentée par les lymphocytes B.
- Numération des lymphocytes B (25 % des lymphocytes).
- Dosage pondéral des immunoglobulines : IgD, IgM, IgG, IgA et IgE.
- Dosage des anticorps après vaccinations et de groupes sanguins.
4 Déficits immunitaires
4.1 Définition

Toute situation du système immunitaire fragilisant l'organisme de façon passagère ou durable et favorisant la survenue d'infections graves. Il s'agit donc de syndromes dus à une anomalie de l'une ou l'autre des lignées cellulaires impliquées (lymphocytes T, B, PN, macro) dans la réponse immune. Ils peuvent être acquis ou congénitaux.
4.2 Circonstances cliniques de découverte

On peut être amené à rechercher un déficit immunitaire dans les circonstances suivantes :

    *
      Notion d'un déficit connu ou suspecté dans la famille ou la fratrie. Lorsque le déficit est bien caractérisé, le diagnostic anténatal est souvent possible.
    *
      Les signes évocateurs sont dominés par l'infection et les troubles digestifs. L'infection est localisée ou généralisée, à répétition, de type bactérien, viral, mycosique ou parasitaire. Les troubles digestifs sont dominés par la diarrhée chronique sévère, précoce, rebelle aux traitements classiques et/ou par une cassure de la courbe de poids.
    *
      Signes apparemment non évocateurs : eczéma et thrombopénie du nouveau-né, hypocalcémie et cardiopathies congénitales, manifestations auto-immunes ou d'hypersensibilité (arthrite, cytopénie, glomérulonéphrite), allergies et accidents médicamenteux.
    *
      Dissémination d'un vaccin vivant comme le BCG ("Bécégite") ou le virus polio oral.

4.3 Déficits immunitaires primitifs
4.3.1 Déficits de l’immunité non spécifique (10 % des déficits immunitaires héréditaires)
4.3.1.1 Anomalies fonctionnelles des granulocytes

La granulomatose septique chronique familiale à transmission récessive liée au sexe (ou encore autosomique récessive) est l'exemple typique. La phagocytose est normale mais le métabolisme oxydatif est nul. Les femmes sont vectrices et généralement asymptomatiques. Les infections apparaissent souvent au cours de la première année, siégeant au niveau de la peau, des ganglions, de la sphère ORL ou systémiques. Il s'agit d'infections bactériennes (en particulier de staphylocoque) ou fongiques (candida et aspergillus). Cette affection évolue avec formation de granulome dans les différents viscères. Il existe une hyperleucocytose avec augmentation des immunoglobulines. Le diagnostic repose sur le test de réduction du nitrobleu de tétrazolium et sur le test de chémiluminescence. Le traitement repose sur une antibiothérapie adaptée des surinfections. Certains proposent une antibiothérapie systématique.
Le pronostic est habituellement défavorable. Le diagnostic anténatal est possible.

Il existe d'autres anomalies qualitatives des phagocytes touchant le chimiotactisme et non la bactéricidie (syndrome de Buckley, syndrome de Chediak Higashi, syndrome du leucocyte paresseux) ou encore l'adhérence leucocytaire (LAD ou déficit d'adhésion leucocytaire).
4.3.1.2 Agranulocytose (déficit quantitatif)
4.3.1.3 Déficits du complément
Ils sont surtout responsables de manifestations auto-immunes. Les déficits en C3, C5, C6, C7 et même C8 sont néanmoins responsables d'infections bactériennes graves et sévères en particulier de méningites.
4.3.2 Déficits de l'immunité humorale (70 % des déficits immunitaires héréditaires dont la majorité sont des déficits en IgA)

Agammaglobulinémie liée au sexe (Bruton)
Les infections de la sphère ORL, pulmonaires, digestives surviennent après le 6ème mois. Cette affection se transmet selon un mode récessif lié au sexe. Le diagnostic repose sur l'absence de lymphocytes B et d'immunoglobulines sériques. Le traitement substitutif apporte des immunoglobulines intraveineuses à la dose de 400 mg/kg afin de maintenir un taux résiduel d'IgG > 7-8 g/l (soit tous les 15 à 21 jours). L'évolution se fait vers la dilatation des bronches et l'insuffisance respiratoire chronique. Le traitement des surinfections bronchiques et la kinésithérapie respiratoire sont essentiels. Le diagnostic anténatal est possible (gène btk).

Déficits dissociés de l'immunité humorale
Déficit en IgM sérique, déficit en IgA. Ce dernier déficit est fréquent (1/700) mais les manifestations ne sont pas univoques : infections ORL et bronchiques, allergies diverses, maladies auto-immunes (lupus, intolérance au gluten ...). Le déficit en IgG et IgA avec hyper IgM est en fait une maladie T puisqu’il s’agit d’un défaut d’expression par les lymphocytes T d’une molécule (ligand de CD40) jouant un rôle fondamental dans le phénomène de " switch " ou de commutation isotypique. Sa transmission est liée à l’X ou autosomique récessive et le tableau clinique associe des infections bactériennes trop fréquentes, une neutropénie parfois et une susceptibilité aux agents opportunistes.

Hypogammaglobulinémie transitoire de la première enfance
Il s'agit de nourrissons présentant des infections ORL ou bronchiques après le 6ème mois de vie alors que les IgG maternelles ont disparu. Le taux des immunoglobulines est diminué mais le taux des lymphocytes B est normal. Les perfusions d'immunoglobulines sont nécessaires au cours d'infections.

Hypogammaglobulinémie à expression variable
Ce groupe est très hétérogène, caractérisé par une hypogammaglobulinémie avec présence de lymphocytes B. Le tableau est variable d'un malade à l'autre, dominé par des infections bactériennes et des manifestations inflammatoires chroniques (du tube digestif, infiltrats pulmonaires, polyadénopathie, hépatomégalie). Il est vraisemblable qu'un déficit cellulaire soit sous-jacent.
4.3.3 Déficits touchant principalement les lymphocytes T (20 % des déficits immunitaires héréditaires)
4.3.3.1 Déficits de l'immunité cellulaire
- L'exemple typique est représenté par le syndrome de Di George : embryopathie liée à une anomalie de développement des 3ème et 4ème arcs branchiaux. La forme typique se révèle en période néonatale par une hypocalcémie sévère parfois responsable de convulsions et une cardiopathie. Il existe une aplasie thymique avec une absence de lymphocytes T.

- Déficits " fonctionnels " T : il s’agit de maladies rares à révélation plus tardive , riche en manifestations auto-immunes.

- Défaut d’expression des molécules de classe II d’histocompatibilité : se révèle vers 2 à 3 ans par une diarrhée chronique et une infection virale du groupe herpès.
4.3.3.2 Déficits immunitaires mixtes affectant l'immunité humorale et cellulaire
- Déficits combinés sévères (DICS) : les manifestations infectieuses, surtout de nature opportunistes, surviennent à partir du 2è ou 3ème mois : ORL, pulmonaires, digestives avec hypotrophie et cassure de la courbe staturo-pondérale. Il n'existe pas de lymphocytes T (parfois présence de lymphocytes T d'origine maternelle) ; les lymphocytes B sont parfois présents. Le taux des immunoglobulines G est ininterprétable au cours du premier mois de la vie. Seule la transplantation médullaire permet la guérison dans 75 % des cas. Le diagnostic anténatal est possible.
4.3.3.3 Déficits immunitaires mixtes associés à d'autres anomalies
Ataxie-télangiectasie à transmission AR (gène ATM identifié en juin 1995 en 11q22.23), syndrome de Wiscott-Aldrich lié à l’X (gène identifié en août 1994), candidose chronique cutanéo-muqueuse.
4.4 Déficits immunitaires acquis - Classification
Ils constituent la cause la plus fréquente des déficits immunitaires.
4.4.1 Hypoprotidémie et malnutrition
Les causes rencontrées sont : défauts d'apport de protides, fuites protidiques (syndrome néphrotique, entéropathies exsudatives, eczéma souvent sévère).
4.4.2 Déficits en oligo-éléments (zinc, fer)
4.4.3 Insuffisance rénale
4.4.4 Causes médicamenteuses

- Tous les médicaments responsables de leucopénie sont responsables de déficits immunitaires. Le risque infectieux est d'autant plus sévère que la leucopénie est importante et prolongée. Par définition, on parle de neutropénie si < 1000 granulocytes/mm3 et de lymphopénie si < 800 à 1000/mm3.

- Chimiothérapie antinéoplasique : la leucopénie est due à la toxicité médullaire de la plupart de ces médicaments et est habituellement associée à une anémie et à une thrombopénie. Les cures de chimiothérapie sont reportées lorsque le taux des leucocytes est inférieur à 2000/mm3. La survenue d'une fièvre chez un enfant traité par chimiothérapie fait craindre une infection et impose une numération formule sanguine afin de connaître le taux des leucocytes. Une granulopénie et/ou une lymphopénie nécessitent une prise en charge urgente (ATB IV).

- Les immunosuppresseurs ont souvent une toxicité médullaire globale ou parfois plus élective sur les lymphocytes (cyclophosphamide). Un tel traitement justifie une surveillance régulière des leucocytes et fait craindre des infections bactériennes mais aussi virales et à germes opportunistes. Les corticoïdes, dont le mode d'action immunosuppressive est mal connu, se compliquent rarement d'infection en absence de déficit immunitaire par ailleurs.

- Médicaments responsables de neutropénie.
4.4.5 Splénectomie

l'absence de rate expose à des infections bactériennes parfois dramatiques. Ceci est dû à un déficit de l'opsonisation. Les germes les plus souvent rencontrés sont : streptocoque pneumoniae, méningocoque, hémophilus influenzae, salmonelles. La vaccination contre le pneumoque et une antibiothérapie par la pénicilline constituent des mesures préventives. Cette situation se rencontre après splénectomie chirurgicale ou en cas de rate non fonctionnelle (ex:au cours de la drépanocytose).

4.4.6 Maladie de Hodgkin

Le déficit se rencontre surtout dans les formes évoluées, III ou IV ; il y a négativation des tests cutanés.

4.4.7 Les infections virales

Les embryofoetopathies dues au virus de la rubéole ou au cytomégalovirus s'accompagnaient d'anomalies immunologiques mais il ne s'agissait pas de déficits immunitaires importants. Par ailleurs, certaines maladies virales, telle la rougeole, dépriment transitoirement l'immunité cellulaire avec négativation des tests cutanés.
En fait, seul le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) peut induire un déficit immunitaire majeur et prolongé (cf. chapitre correspondant).
L'infection à VIH de l'enfant
V. Gandemer

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 6 mars 2000

1 Définition de la maladie
2 Epidémiologie
3 Transmission materno-foetale
3.1 Mécanismes
3.2 Facteurs de risque
3.3 Prévention
3.4 Résultats
4 Détermination du statut virologique de l'enfant
4.1 A la maternité
   

4.2 Suivi ultérieur
5 Manifestations cliniques
5.1 Forme rapidement évolutive
5.2 Forme lentement évolutive
6 Stratégies thérapeutiques
6.1 Antirétrovirales
6.2 Vis-à-vis des autres infections
6.3 Autres
7 Références
Objectifs
1 - La contamination par le VIH de l'enfant : épidémiologie, modes de transmission et facteurs de risque.

2 - Formes cliniques du SIDA chez l'enfant.

3 - Principe du diagnostic et du suivi biologique de l'enfant VIH +.

4 - Principes du traitement et surveillance.

1 Définition de la maladie

La définition actuelle de l'infection VIH de l'enfant, retenue en 1987 et révisée en 1994, par le Centre pour le contrôle des maladies (C.D.C) d'Atlanta tient compte des difficultés du diagnostic chez le nourrisson et de l'évolution de la maladie avec des formes asymptomatiques et symptomatiques. L'infection à VIH s'étend d'enfants apparemment en bonne santé à des enfants diversement atteints ; la forme la plus sévère correspond au syndrome d'immunodéficience acquise (SIDA). La classe E souligne la prudence actuelle qui s'impose avant d'affirmer l'infection chez un nourrisson de moins de 15 mois, en l'absence d'une preuve virale, en raison de la persistance prolongée des anticorps transmis. Le système de classification adopté pour les enfants de moins de 13 ans est divisé en 4 catégories, mutuellement exclusives selon 3 critères : le statut sérologique, le statut clinique et le statut immunologique.
 
Catégories immunologiques
   
Catégories cliniques
N
   
A
   
B
   
C
Sans preuve d'immunodépression (CD4 + >25%)
   
N1
   
A1
   
B1
   
C1
Immunodépression modérée  (15 % <CD4 + <24%)
   
N2
   
A2
   
B2
   
C2
Immunodépression sévère (CD4 + <14%)
   
N3
   
A3
   
B3
   
C3
 
Préfixe E : statut VIH indéterminé.

Catégorie N : asymptomatique.

Catégorie A : symptomatologie mineure (au moins 2 signes et aucun de B et C).
Adénopathies, HSM, dermatite, parotidite, infections ORL ou respiratoires récidivantes ou persistantes...

Catégorie B : symptomatologie modérée.
Fièvre > 1 mois, diarrhée, LIP, troubles hématologiques, infections bactériennes sévères, toxoplasmose, zona, herpès, candidose > 2 mois...

Catégorie C : SIDA.
Infections sévères récidivantes, cachexie, encéphalopathie, Kaposi, lymphome, pneumocystose, toxoplasmose cérébrale...

Un enfant âgé de moins de 18 mois (séropositif connu ou né de mère séropositive) sera déclaré infecté par le VIH, s’il a 2 résultats positifs à 2 prélèvements différents pour au moins l’un des examens suivants : culture virale, PCR, Antigénémie P24.
Pour un enfant de plus de 18 mois, des sérologies positives en ELISA confirmées en Western Blot (ou répondant aux critères ci-dessus) permettent de poser le diagnostic d’infection à VIH.
2 Epidémiologie
La prévalence de l'infection au virus de l'immunodéficience humaine (VIH) chez les enfants est actuellement étroitement liée à la séroprévalence du VIH chez les femmes enceintes. La prévalence du SIDA est relativement faible en Bretagne avec 306,3 cas cumulés/million d’habitants la plaçant au 13ème rang /26 départements en 1998 (min =194 en Nord Pas de Calais ; max = 2029 en Ille de France). Depuis le dépistage systématique des donneurs de sang et le traitement des fractions anti-hémophiliques, la transmission materno-foetale du VIH constitue le mode de contamination quasi exclusif des enfants infectés.5

Chaque année en France, 1000 à 2000 femmes atteintes d’infection par le VIH débutent une grossesse (par ex 0,5 % des femmes qui accouchent en région PACA ou Ille de France sont séropositives). Environ 75% d’entre elles décident de poursuivre leur grossesse soit environ 500 à 600 grossesses par an. 40 % de ces femmes sont d’origine africaine. Ces mères ont pour 50 % d’entre elles plus de 500/mm3 CD4, pour 35 % entre 200/mm3 et 500/mm3 CD4 et 15 % ont des CD4 au dessous de 200/mm3. Près de 85 % sont représentées par des mères contaminées par voie hétérosexuelle. Seules 12 % d’entre elles sont à l’heure actuelle des usagées de drogue intraveineuse. Le mode de contamination est pour les autres d’origine transfusionnelle ou indéterminée (<5%).6

Le nombre cumulatif d’enfants infectés est de l’ordre de 10.000 en Europe, 20.000 aux Etats-Unis mais plus de 500.000 en Afrique sub-saharienne. Seuls les cas de SIDA font l’objet d’une déclaration obligatoire. Pourtant il existe une sous déclaration, particulièrement nette, en pédiatrie.10 723cas cumulés de SIDA pédiatriques ont été recensés en France au 1er juillet 1998 soit 1,5 % du total des cas de SIDA en France. Parmi ces cas, 62,3 % sont connus comme étant décédés. Entre le 1-07-1997 et le 30-06-98, 3 nouveaux cas de SIDA ont été diagnostiqués chez des enfants (£ 14 ans) soit 0,2 % des nouveaux cas français contre 13 en 1997 (Figure 1).

Figure 1 : Evolution des cas de SIDA pédiatriques par année

 
3 Transmission materno-foetale
3.1 Mécanismes
Les différents mécanismes de transmission (la transmission virale n’étant pas la même selon le moment où le virus est transmis) ne sont pas élucidés à ce jour.15 Plusieurs hypothèses coexistent faisant intervenir soit  le virus libre soit le virus associé aux cellules soit une infection du placenta. Le rôle des anticorps neutralisants maternels et des cellules T cytotoxiques présentes chez la mère est aussi à préciser. 15

La contamination peut se faire précocement (2ème trimestre de grossesse) in utero. Mais elle survient dans 2/3 des cas en fin de 3ème trimestre de grossesse et en perpartum du fait des échanges maternofoetaux et du contact avec les sécrétions cervico-vaginales de la mère (Figure 2). 15 La contamination (5 à 14% selon les études) peut survenir aussi lors de l'allaitement maternel, qui est donc formellement contre-indiqué dès lors qu’une alimentation artificielle est accessible et réalisable dans de bonnes conditions.2, 8, 9

Figure 2 : Estimation de la proportion d’enfants infectés par semaine avant l’accouchement

3.2 Facteurs de risques
La taux de transmission maternofoetale du VIH, en France, se situait autour de 18 % avant la généralisation du traitement par zidovudine chez les femmes enceintes.4
En fait le risque de transmission dépend de facteurs maternels, ‚ viraux, ainsi que ƒ d’événements obstétricaux. 11
Au sein de la cohorte française, le mode de contamination de la mère, son origine géographique ou la toxicomanie ne semblent pas influencer le risque de transmission. Les éléments décrits comme associés à une transmission accrue comprennent :

    l’existence de signes cliniques maternels (appartenance au groupe C du CDC ou SIDA), un déficit immunitaire important, une charge virale élevée (transmission x 2 si >10000 copies/ml), une antigénémie p24 positive, un âge maternel > 35 ans,
    ‚ l’absence d’anticorps neutralisants, des souches virales à réplication rapide,
    ƒ des infections associées (maladies sexuellement transmissibles ou virus tels cytomégalovirus, hépatites, herpès virus), la prématurité, l’infection placentaire, la rupture prématurée des membranes de plus de 4 heures ou des conditions d’accouchement sanglantes.

Par ailleurs, la réalisation d’une épisiotomie ou de manoeuvres instrumentales pendant l’accouchement n’augmentent pas le risque de transmission maternofoetale (TMF).
Malgré des résultats longtemps discordants, une méta-analyse rétrospective publiée en avril 1999 renforce les études d’observation suggérant que les césariennes réalisées avant le travail diminuent la transmission maternofoetale du VIH.16 Une étude européenne prospective sur 408 patientes infectées par le VIH ( 60% prenaient un traitement antirétroviral) suggère que la césarienne programmée est une composante l égitime en obstétrique pour les femmes enceintesVIH (TMF=10,2% si VB et 3,5% si césarienne). Sur les 119 qui prenaient à la fois un traitement antirétroviral et ont eu une césarienne programmée, 1 seule adonné naissance à un enfant infecté ce qui représente une TMF < 1%.17
3.3 Prévention
La prévention de la transmission maternofoetale du VIH débute par le dépistage de l’infection à VIH chez les femmes et nécessite un suivi multidisciplinaire (infectiologues, virologues, obstétriciens, pédiatres, services psychosociaux). Le test de dépistage doit être proposé en début de grossesse par tous les médecins depuis 1993. Ce test est accepté par 98% des femmes, qui pour beaucoup d’entre elles, en ont déjà réalisé auparavant. Les résultats de l’essai thérapeutique franco-américain ACTG-076/ANRS-024, en février 1994, ont montré l’efficacité de la zidovudine (ZDV) administrée en fin de grossesse et sa très bonne tolérance tant chez la mère que chez l’enfant.7 Cet essai comparait deux groupes de femmes séropositives dont le traitement à partir du 2ème trimestre de grossesse était randomisé : placebo ou ZDV. Le taux de transmission maternofoetale dans le groupe ZDV fut de 8,2 % et celui dans le groupe placebo de 25,5 %, conduisant rapidement à l’extension de ce traitement à toutes les femmes enceintes séropositives. Cet essai a marqué un tournant crucial dans la prise en charge obstétricale des femmes séropositives car jusque-là les autres possibilités d’intervention (lavages vaginaux à l’aide de virucides au moment de l’accouchement ou bains antiseptiques chez le nouveau-né) avaient échoué.
3.4 Résultats

Au sein de la cohorte française Mères-Enfants, en1998, le taux de transmission a été chez les femmes traitées de 5 ± 2 % et de 14 ± 6% chez les femmes non traitées (Tableau 1).12 Il s’agit de moyennes qui dépendent des facteurs de risque énoncés ci-dessus. Le mécanisme d’action de la ZDV n’est pas encore totalement élucidé dans ce modèle de transmission maternofoetale : la diminution de la charge virale circulante est, semble-t-il, modérée (- 0,35 log/ml) évoquant un effet préventif chez le foetus et d’autre part il n’existe pas de seuil de charge virale au dessous duquel il n’existe pas de risque de transmission. 1, 13
Un renforcement du traitement antirétroviral associant la Lamivudine à la ZDV est proposé depuis l’automne 1996 afin de diminuer la charge virale plus nettement soit le schéma thérapeutique suivant 14 :

    ZDV dès 14 semaines d’aménorrhée (SA) = 100 mg x 5 /j per os
    ensuite dès le début du travail = 2 mg/kg/IV en bolus sur 1 heure, puis 1 mg/kg/h jusqu'à l’accouchement
    poursuite du traitement oral maternel jusqu'à 3 jours après l’accouchement et relais chez le nouveau-né dans les 12 heures qui suivent la naissance = 2 mg/kg x 4 /j per os pendant 6 semaines. Ce traitement est bien toléré par le foetus et n’occasionne habituellement qu’une anémie modérée résolutive en 3 mois.12

    ‚ En association depuis fin 96 (essai ANRS 075) avec la lamivudine (3TC)à partir de 32 SA = 150 mg x 2 /j per os
    poursuite du traitement oral maternel jusqu'à 3 jours après l’accouchement et relais chez le nouveau-né dans les 12 heures qui suivent la naissance = 2 mg/kg x 2 /j per os pendant 6 semaines.

La pratique de la césarienne prophylactique vers 38 SA (avant toute mise en travail) peut encore diminuer la TMF à moins de 1%.

Tableau 1 : Transmission maternofoetale (TMF) dans la cohorte française

% de TMF
   

sous ZDV
   

sous ZDV +3TC
   

en absence de traitement

En moyenne
   

5 ± 2
   

2,6
   

14± 6

mode d’accouchement

voie basse
césarienne programmée
   

 

6
0,8
   

 

?
?
     

Cette stratégie prophylactique a néanmoins ses limites. La césarienne tout d’abord comporte des risques pour la mère (x 6 mortalité et x 4 morbidité /femmes VIH négatives). La plus grande difficulté provient des risques d’effets indésirables liés à la prise d’un médicament pour la mère et l’enfant. La tendance est de concentrer la prophylaxie sur le 3ème trimestre afin de diminuer ces risques mais lorsque les femmes ont une indication personnelle à être traitées les obstétriciens privilégient la santé de la mère et la traitent en priorité : le traitement de référence est alors une tri ou quadrithérapie. Cette attitude expose l’enfant à des effets secondaires : syndrome malformatif, problème de développement, pathologie mitochondriale, troubles métaboliques ou hématologiques ... Les premières " retombées " de cette attitude ont été révélées en février 1999 avec la survenue de 2 encéphalopathies mitochondriales sur 200 femmes traitées en France par ZDV+3TC (1 cas sur 5000 à 20000 dans la population générale !). Aucun cas n’était survenu avec la ZDV utilisée isolément. D’autres cas dans le monde ont depuis été recensés avec diverses associations thérapeutiques. Un suivi minimum des 12 à 18 mois de tous les enfants de mère traitée est donc nécessaire pour mettre en évidence ces troubles, et ceci même si l’enfant n’est pas contaminé. D’autres essais ont été réalisés avec antiprotéase (Ritonavir) en phase I mais ont montré des toxicités métaboliques en particulier. Un essai est en cours avec un traitement bref pendant l’accouchement utilisant la Névirapine. Ce type de traitement, s’il expose moins le foetus, fait courir à la mère le risque de résistance secondaire à cette inhibiteur non nucléosidique de la réverse transcriptase.

En conclusion et à ce jour, la prévention de la TMF du VIH comprend chez la femme sans indication urgente de traitement personnel, la pratique de la césarienne prophylactique et la ZDV maintenant seule (coef ci-dessus). Pour les femmes ayant une indication formelle de traitement, la stratégie est à décider au cas par cas...

NB : Zalcitabine (ddc) et Efavirenz tératogènes chez l’animal.
4 Détermination du statut virologique de l'enfant
4.1 A la maternité
La prise en charge du nouveau-né débute à la maternité. Outre la bithérapie dont il bénéficie, il va être l’objet de divers examens à visée diagnostique, pronostique ou prédictive. L’ensemble de ces examens sera intégralement remboursé tant que la séronégativité ne sera pas établie.
4.1.1 Diagnostic et pronostic

Les nouveaux-nés de mères VIH positives possèdent des anticorps IgG transmis passivement et qui peuvent persister au-delà de 15 mois. La recherche d'IgM n'est pas fiable. Un diagnostic précoce de certitude repose ainsi sur la mise en évidence du virus au moyen de techniques de diagnostic direct chez le nouveau-né et se fait par culture virale sur lymphocytes ou mise en évidence de l’ADN viral par PCR (Tableau 2).3 De 35 à 50 % à la naissance, la sensibilité de ces tests atteint 75 à 90 % à 1 mois et près de 100 % à 3 mois. La pratique de ces tests est justifié en période néonatale malgré leur sensibilité médiocre car le potentiel évolutif et le risque d’encéphalopathie d’un enfant dont la culture/PCR-ADN VIH est positive dès la naissance est plus élevé que chez celui dont l’isolement viral ne sera possible qu’après quelques semaines de vie. Ceci est encore plus net lorsqu’une antigénémie p24 peut être détectée dès la naissance (risque x 3). En revanche, chez l'enfant plus grand, le diagnostic sera indirect comme chez l'adulte, et mettra en évidence les anticorps sériques dirigés contre les divers constituants du VIH par méthode Elisa ou Western Blot.

Tableau 2 : Méthodes de diagnostic précoce de l’infection par le VIH
Naissance     Contrôle sérologie Elisa et Western Blot
Culture virale et/ou PCR-ADN VIH
Antigénémie p24
1 mois     Culture virale et/ou PCR-ADN VIH
3 mois     Culture virale et/ou PCR-ADN VIH
12/18 mois     Sérologie VIH Elisa
4.1.2 Tolérance
Une numération formule sanguine et un bilan hépatique (transaminases et bilirubine) seront pratiqués afin de dépister les effets secondaires liés au traitement antirétroviral .
4.1.3 Coinfections
Une éventuelle transmission de la mère à l’enfant d’autres micro-organismes tels cytomégalovirus, toxoplasme, virus des hépatites B (HBV)et C doit être évaluée. Une sérovaccination anti HBV sera réalisée en fonction du statut maternel vis à vis de l’HBV.
4.2 Suivi ultérieur

Tous les enfants sont revus à 1 mois de vie en consultation par un pédiatre référent. En effet les résultats des tests de diagnostic direct réalisés à la naissance sont alors disponible (délai =28 jours pour les co-cultures). Deux situations sont alors possible : ou culture et PCR sont positives ou elles sont négatives.

Dans le cas où ces tests sont d’emblée positifs (Figure 3), l’enfant a un grand risque d’appartenir à une forme rapidement évolutive qui se caractérise par des symptômes d’infection virale (adénopathies, hépatomégalie, splénomégalie), des complications infectieuses car ces enfants sont en règle très immunodéprimés et par des manifestations neurologiques liées au VIH (encéphalopathie) (cf. paragraphe 5). Le traitement antirétroviral sera alors poursuivi voire renforcé et une prophylaxie vis à vis du pneumocystis carinii sera entreprise si elle n’avait pas été déjà mise en place.

Figure 3 : Conduite à tenir si diagnostic direct de la naissance positif

‚ Dans le cas où ces tests sont négatifs, ils seront répétés à 1 et 3 mois de vie (Figure 4). Le traitement antirétroviral pourra être arrêté lors de la première consultation car l’enfant a toutes les chances, s’il s’avère finalement contaminé, d’appartenir à une forme lentement évolutive (charge virale faible ou indécelable et taux de CD4 normal). Si la PCR ou la co-culture sont finalement positives, une reprise du traitement sera discutée en fonction de la charge virale. Le suivi sera de toutes façons prolongé pour tous ; la déclaration de non-infection pour un enfant né de mère séropositive, nécessite une sérologie VIH négative (soit 2 Elisa <18 mois ou 1 Elisa >18 mois) sans autre preuve biologique d’infection (détection directe du virus négative) ni critère clinique définissant le SIDA.

Figure 4 : Conduite à tenir si diagnostic direct de la naissance négatif

Le suivi doit être mensuel durant la première année de vie compte tenu de la rapidité évolutive de la maladie de certains enfants, puis pourra être tri- ou quadrimestriel par la suite si l’état de l’enfant le permet.

L’évaluation clinique visera à dépister une infection intercurrente, à rechercher les signes d’une encéphalopathie débutante ou d’autres dysfonctions d’organe (rein, myocarde notamment) et à apprécier l’état nutritionnel.

Comme chez l’adulte, le suivi biologique à visée pronostique repose sur l’évaluation du statut immunitaire (numération formule sanguine et plaquettes, nombre de lymphocytes CD4 circulants) et sur la quantification de la réplication virale. Les examens biochimiques et en particulier les transaminases et les enzymes pancréatiques seront réalisés régulièrement en fonction du contexte et des thérapeutiques instituées.

Une radiographie de thorax, un examen ophtalmologique, une analyse d’urines ou encore une échocardiographie ou un test tuberculinique seront réalisés une fois par an.

La vaccination par le BCG est contre-indiquée en raison des risques de bécégite localisée ou diffuse lors de l'installation du déficit immunitaire. Les vaccinations antipoliomyélitiques par vaccin inactivé, antidiphtérique, antitétanique et anticoqueluche antihémophilus influenzae type B et antihépatite B sont sans danger et doivent être faites normalement. Le vaccin ROR (souche atténuée) peut être proposé chez les enfants asymptomatiques mais il est déconseillé chez les enfants présentant un déficit immunitaire sévère.
5 Manifestations cliniques
Il existe deux formes au profil évolutif très différent :
5.1 Forme rapidement évolutive

Elle touche 20 à 30 % des nouveau-nés de mère séropositive. Les premiers symptomes se manifestent chez ces enfants entre 1 et 6 mois. Il s'agit d'adénopathies, de splénomégalie, d'hépatomégalie, de complications infectieuses (pneumopathies, diarrhées, candidoses pharyngées...) voire d'une encéphalopathie à VIH. Le décès survient en règle avant 5 ans car ces enfants sont d'emblée très immunodéprimés.
L'encéphalopathie à VIH survient essentiellement dans cette forme évolutive et est caractérisée par :
La fièvre
E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 19 avril 1999

Objectifs
1 Fièvre aiguë chez l'enfant
1.1 Caractères en fonction de l'âge
1.2 Signes d'accompagnement
1.3 Conséquences et principaux signes
   

1.4 L'hyperthermie majeure
1.5 Traitement de la fièvre
2 Fièvre prolongée
2.1 Définition et diagnostic
2.2 Etiologie
Objectifs
Fièvre aiguë chez l'enfant
1. Décrire les principaux types de courbe thermique que l'on peut observer chez le nouveau-né, le nourrisson et l'enfant.

2. Citer les signes d'accompagnement à rechercher par l'interrogatoire et l'examen clinique devant une hyperthermie.

3. Citer les risques majeurs de l'hyperthermie chez le nourrisson.

4. Décrire le tableau de l'hyperthermie majeure, en connaître le mode de survenue et les risques.

5. Décrire les explications à donner aux parents concernant les mesures physiques permettant de lutter contre l'hyperthermie chez un nourrisson.

6. Prescrire une ou deux médications fébrifuges ainsi qu'une thérapeutique préventive des convulsions au cours de l'hyperthermie.
Fièvre prolongée
1. Définir une fièvre prolongée.

2. Décrire l'interrogatoire des parents devant une fièvre prolongée de l'enfant.

3. Citer les examens complémentaires minimum à demander en cas de fièvre prolongée.

4. Définir la thermopathomimie et en donner les moyens de diagnostic.

5. Enumérer les principales causes de fièvre prolongée chez le nourrisson et en donner les principaux signes cliniques et biologiques qui en permettent le diagnostic.

1 La fièvre aiguë chez l'enfant
Symptôme très fréquent chez le nourrisson et l'enfant, la fièvre exige une double démarche : diagnostique impérativement guidée par un examen clinique (et O.R.L) complet qui orientera éventuellement les investigations complémentaires (biologiques et/ou radiologiques), thérapeutique, parfois urgente, car le symptôme fièvre peut avoir des conséquences graves chez le nourrisson. Il n'existe pas de parallélisme obligatoire entre l'importance de la fièvre et la gravité de l'affection causale, notamment en période néonatale. Si son étiologie la plus fréquente demeure l'infection, grave ou bénigne, bactérienne ou virale, la fièvre n'est pas toujours d'origine infectieuse : il est aussi en pédiatrie des fièvre métaboliques, inflammatoires ou néoplasiques.
1.1 Caractères en fonction de l'âge
- Chez le nouveau-né, la fièvre peut faire défaut dans les infections graves au cours desquelles on peut observer au contraire une hypothermie.
- Chez le nourrisson, l'hyperthermie peut constituer un risque neurologique et vital, quelle que soit son étiologie (Cf A - IV).
- Mieux supportée par l'enfant, elle pourra affecter différentes types : accès brefs ou fièvre prolongée épousant des allures variables : simple fébricule, fièvre en plateau, oscillante, ondulante, intermittente, rémittente, palustre ou pseudopalustre, désarticulée, voire hectique.

Outre son niveau, sa durée et son allure, on en précisera le mode d'installation (brutal ou progressif) et sa tolérance.
1.2 Signes d'accompagnement
Ils seront pris en considération : frissons traduisant des décharges bactériémiques ou une suppuration profonde, douleurs (rachialgies ou myalgies), sueurs, altération de l'état général, amaigrissement, asthénie,...
La symptomatologie fonctionnelle pourra orienter vers une localisation : dysphagie, toux et/ou dyspnée, troubles digestifs, arthralgies, syndrome méningé, signes fonctionnels urinaires,...
L'examen complet, appareil par appareil, devra s'attacher à rechercher les signes d'une localisation infectieuse (O.R.L notamment).
1.3 Conséquences et principaux signes
La gravité de l'hyperthermie réside dans le risque de voir survenir, surtout chez le nourrisson, deux complications : la déshydratation et/ou les convulsions.
1.3.1 La déshydration
Elle peut survenir en dehors de toute perte par vomissements et/ou diarrhée. On estime la perte d'eau liée à l'hyperthermie de l'ordre de 80 ml/m²/degré au-dessus de 37°. Cette perte sera souvent aggravée par un défaut d'hydradation (manque d'apport, refus de boire). Le plus souvent, les troubles digestifs associés aggravent rapidement cette déshydratation.
1.3.2 Les convulsions hyperthermiques (6 à 7% des enfants)
La brutalité du décalage thermique en est responsable chez les nourrissons prédisposés ; elle réclame un traitement symptomatique d'urgence et ultérieurement une thérapeutique préventive (cf. convulsions hyperthermiques).
1.4 L'hyperthermie majeure
Elle réalise un tableau gravissime survenant surtout chez un nourrisson de moins de six mois, aussi bien en hiver qu'en été. A l'occasion d'une infection banale (rhinopharyngite,...), le nourrisson est retrouvé, le plus souvent le matin, en état de mal convulsif, inconscient ; sa température atteint 41° voire 42°. L'état de collapsus est attesté par une chute de la tension artérielle, une abolition des pouls périphériques, une lenteur à la recoloration des extrémités, une oligurie,. Un syndrome hémorragique, traduisant une C.I.V.D et/ou une atteinte hépatique, peut compliquer ce tableau. Malgré la mise en oeuvre de moyens de réanimation, l'issue fatale est à redouter, précédée par un syndrome de décérébration ; la survie n'est le plus souvent observée qu'au prix de lourdes séquelles neurologiques.
C'est dire l'importance des mesures préventives visant à éviter ces hyperthermies chez le nourrisson et la nécessité de réduire au maximum la durée de toute hyperthermie à cet âge.
1.5 Traitement de la fièvre
La fièvre réclame donc, chez le nourrisson, un traitement symptomatique indépendant de la thérapeutique de l'affection causale.
1.5.1 Mesure d'hygiène et moyens physiques :
- déshabillage : enfant dévêtu et si possible dans une pièce qui ne dépasse pas 20°C.
- bain tiède à une température initiale inférieure à 2°C à celle de la température de l'enfant. Les cheveux de l'enfant doivent être mouillés.
- hydratation suffisante : apport supplémentaire de boissons, en particulier nocturne.
1.5.2 Traitement médicamenteux :
- l'aspirine : 60 à 80 mg/kg/j en 4 à 6 prises. La voie orale est préférable. Le traitement continu est nécessaire pour éviter les poussées hyperthermiques. L'absorption par voie rectale est incomplète (posologie de 20/mg/kg toutes les 8 heures). L'indication de la voie parentérale est celle de l'urgence et de la sévérité (10 à 20 mg/kg, 3 à 4 fois par jour).

- le paracétamol : 60 mg/kg/j en 4 prises. La voie orale est préférable, mais la voie rectale est possible. La voie injectable (Prodafalgan®), peut être administrée à des posologies de 60 mg/kg/j en 4 prises, ce qui correspond à une posologie quotidienne de 30 mg/kg/j de paracétamol.

La toxicité respective de ces deux produits est encore discutée. L'aspirine a été incriminée comme l'un des facteurs susceptibles d'induire un syndrome de Reye et les risques du paracétamol ont été sous-estimés. Il faut se méfier des automédications. L'association d'aspirine et de paracétamol en prescription simultanée ou alternée est largement réalisée mais en fait discutable.

- le Diazépam (Valium®) : 0,5 mg/kg en intra-rectal lors d'une convulsion fébrile.
2 La fièvre prolongée
2.1 Définitions et diagnostic
Définie par la constatation d'une température centrale supérieure à 37°5 le matin et/ou 37°8 le soir (dans les conditions basales de repos), évoluant depuis au moins une semaine, la fièvre prolongée chez l'enfant exige :

- un interrogatoire très rigoureux : mode de prise de température (par les parents ou non), type de fièvre, régime alimentaire s'il s'agit d'un nourrisson, retentissement sur l'état général, symptomatologie fonctionnelle d'accompagnement, contage possible dans l'entourage, traitements éventuellement institués, vaccination BCG et état de l'allergie tuberculinique...

- un examen clinique complet et minutieux comportant obligatoirement un examen O.R.L et un toucher rectal.

- des examens complémentaires minimum : VS, hémogramme, culot urinaire, radiographie du thorax, réactions tuberculiniques, et d'autres guidés par la clinique (hémoculture, tests inflammatoires, séro-diagnostics,...).

A ce stade, il faudra se poser deux questions :
- La fièvre est-elle authentique ? C'est-à-dire éliminer une thermopathomimie : exclusivement observée chez l'enfant d'âge scolaire, plus souvent fille que garçon, en s'aidant du contrôle des prises thermiques, du caractère normal des examens complémentaires et en sachant qu'un tel diagnostic débouchera le plus souvent sur une investigation et/ou une prise en charge psychothérapique.
- La fièvre est-elle organique ?

    * l'exercice musculaire peut être responsable de fièvre par augmentation de la thermogenèse (nécessité de prendre la température dans les conditions de repos).
    * la thermolyse est parfois débordée (chauffage excessif) ou congénitalement déficiente (dysplasie anhidrotique),
    * enfin, il est des fièvres iatrogènes (pénicilline, anticomitiaux,...).

2.2 Etiologie
La démarche étiologique d'une fièvre prolongée se pose différemment selon qu'il s'agit :
2.2.1 d'un nourrisson
2.2.1.1 L'infection
est de loin la cause la plus fréquente : respiratoire, virale ou bactérienne : rhinopharyngite, adénoïdite compliquée ou non d'otite moyenne voire d'antrite. Toute fièvre inexpliquée du nourrisson implique la recherche d'une infection urinaire (cf. cours). Plus rarement, il s'agira d'une primo infection tuberculeuse ou d'une fièvre typhoïde.
2.2.1.2 Les fièvres métaboliques
Elles ne sont pas exceptionnelles à cet âge : déshydratation au cours d'une gastro-entérite (virale ou bactérienne), d'un coup de chaleur, d'une mucoviscidose, d'un exceptionnel diabète insipide. Mais aussi fièvre du lait sec, observée avec le lait concentré sucré ou les laits en poudre, lorsque la concentration est excessive : la simple correction de la ration hydrique entraîne la normalisation de la température. Fièvre carentielle : l'hyperthermie fait partie du tableau du scorbut infantile et à un moindre degré de la carence martiale. Enfin, l'hypervitaminose D au cours de laquelle s'associent anorexie, soif et vomissements.
2.2.1.3 Les fièvres d'origine neurologique
Elles sont relativement rares chez le nourrisson : dérèglement thermique chez certains encéphalopathes ou chez des nourrissons porteurs de malformations cérébrales. En fait, c'est surtout l'hématome sous-dural chronique qu'il faut savoir évoquer (cf. cours) ; le diagnostic sera étayé par l'augmentation de volume du crâne, l'hémorragie au fond d'oeil, la ponction à l'angle externe de la fontanelle et/ou l'examen scanographique.
2.2.1.4 Le syndrome de Kawasaki
D'étiologie inconnue, mais très proche du tableau de périartérite noueuse du nourrisson, associe une hyperthermie prolongée, un exanthème avec glossite et chéilite, une adénomégalie : son pronostic est conditionné par le risque de complications cardiovasculaires (anévrismes coronariens et mort subite).
2.2.2 Chez l'enfant
L'éventail étiologique est beaucoup plus vaste et toujours dominé par :
2.2.2.1 l'infection
Malgré la régression de l'endémie bacillaire, toujours penser à une primo-infection tuberculeuse (contage - radios poumons - intradermoréaction). Les infections O.R.L demeurent fréquentes à cet âge et les sinusites surtout maxillaires doivent être systématiquement recherchées (radiographie). Les pneumopathies, bactériennes ou virales, peuvent être muettes ou pauvres dans leur symptomatologie fonctionnelle et physique : nécessité d'un cliché pulmonaire. La typhoïde (du retour de vacances...), la brucellose (rare chez l'enfant) : suspectées sur des arguments cliniques, trouveront leur confirmation, suivant le stade évolutif, dans les hémocultures et/ou le séro-diagnostic. Le R.A.A (voir cours) est une infection inflammatoire (VS, fibrinémie, tests inflammatoires) post-streptococcique (ASL) susceptible d'entraîner des complications cardiaques (auscultation - ECG) nécessitant un traitement curatif (Prednisone + Pénicilline) suivi d'une prophylaxie des rechutes (EXTENCILLINE ou ORACILLINE). L'endocardite dont le diagnostic repose sur les hémocultures chez un enfant porteur d'une cardiopathie congénitale ou d'une valvulopathie rhumatismale. L'abcès cérébral, succédant à une infection ORL ou favorisé par une cardiopathie congénitale cyanogène, dont le diagnostic repose sur la clinique, les signes biologiques, le fond d'oeil, l'E.E.G et l'examen scanographique cérébral.

Parmi les infections virales, les plus courantes, responsables de fièvre prolongée chez l'enfant, on pensera à l'hépatite (surtout à virus A), le diagnostic est facile s'il existe un ictère et/ou une cholalurie ; les formes anictériques étant dépistées par l'élévation du taux des transaminases. La mononucléose infectieuse, due au virus d'Epstein-Barr, associe à la fièvre, dans sa forme habituelle, une angine avec polyadénopathie et splénomégalie ; le diagnostic évoqué par la formule sanguine (syndrome mononucléosique) repose sur la M.N.I test et la réaction de Paul-Bunnel et Davidsohn. La maladie des inclusions cytomégaliques, le plus souvent asymptomatique, peut déterminer un syndrome fébrile avec infection respiratoire haute et polyadénopathie également responsable d'un syndrome mononucléosique ; le sérodiagnostic en fera la preuve.
2.2.2.2 Les parasitoses
Responsables de fièvre prolongée chez l'enfant : la toxoplasmose acquise peut déterminer une polyadénopathie fébrile avec asthénie et parfois exanthème ; l'atteinte biologique hépatique est fréquente, le syndrome mononucléosique inconstant ; la sérologie en assure le diagnostic. Le paludisme (cf. C-V) sera suspecté de parti pris chez tout sujet fébricitant, venant d'une zone impaludée (voyage, migrant,...) et on demandera une recherche de l'hématozoaire (frottis sanguin ou goutte épaisse). La distomatose hépatique, le syndrome de Viscéral larva migrans (toxocarose) seront évoqués sur la constatation d'une hyperéosinophilie et confirmé par l'immunodiagnostic parasitaire correspondant. Le Kala-Azar (leishmaniose viscérale) associe chez un nourrisson ou un jeune enfant ayant séjourné en zone d'endémie (sud de la France, pourtour du bassin méditerranéen, Portugal.), une altération fébrile de l'état général avec importante splénomégalie et hépato-adénomégalie ; anémie, leucopénie, thrombopénie, hyperprotidémie et hypergammaglobulinémie. La certitude diagnostique est apportée par la mise en évidence des leishmanies au myélogramme ; des anticorps peuvent être recherchés par méthode immunologique. En l'absence de diagnostic et de traitement (Glucantime ; Lomidine) l'évolution est constamment mortelle en quelques mois.
2.2.2.3 Les affections malignes
- la leucose aiguë lymphoblastique peut évoluer initialement sous le masque d'une fièvre isolée sans modification importante de l'hémogramme ; il est donc important de rechercher des manifestations osseuses (cliniques et/ou radiologiques), une pâleur, une splénomégalie et/ou une intumescence ganglionnaire même modérée ; au moindre doute, toujours demander un myéologramme qu'il faut parfois répéter.

- Plus rare chez l'enfant, la maladie d'Hodgkin associe une fièvre au long cours, des adénopathies superficielles et profondes, médiastinales. Le diagnostic repose, comme pour les lymphomes non hodgkiniens, sur l'examen anatomopathologique d'un ganglion périphérique.

- Les tumeurs malignes peuvent être responsables de fièvre prolongée. Après l'âge d'un an, le neuroblastome est métastasique dans la moitié des cas et se révèle souvent par une fièvre et une altération de l'état général.
2.2.2.4 Les collagénoses
Constamment fébriles, elles sont d'inégale fréquence chez l'enfant :

- Le L.E.A.D. est rare, associant une altération fébrile de l'état général, un syndrome polyarticulaire et des signes cutanés ainsi que des localisations viscérales diverses, rénales notamment, qui règlent le pronostic. On recherchera les cellules L.E., les anticorps antinucléaires, anti-DNA...

- La périartérite noueuse, affection aux masques multiples, d'observation peu fréquente en pédiatrie, associe également une altération fébrile de l'état général et des atteintes viscérales (nerveuses, cardiovasculaires, rénales) ; l'importante accélération de la VS, une hyperleucocytose avec polynucléose majeure, hypergammablobulinémie orienteront le diagnostic qui ne pourra être affirmé que par la découverte de lésions de nécrose fibrinoïde au niveau des artérioles à la biopsie musculo-cutanée. Rappelons les similitudes existant entre la forme du nourrisson et le syndrome de Kawasaki.

- La dermatomyosite de l'enfant, modérément et inconstamment fébrile, associe surtout un syndrome cutanéo-muqueux et des signes musculaires très évocateurs du diagnostic qui trouvera sa confirmation dans les signes électromyographiques et les données de la biopsie musculocutanée.

- moins exceptionnels, les rhumatismes chroniques de l'enfant peuvent débuter par un tableau fébrile important et réaliser une forme clinique très systémique (maladie de STILL) associant à l'hyperthermie prolongée et à l'atteinte articulaire, une hépatosplénomégalie, des adénopathies, parfois des rashs. L'atteinte cardiaque est possible ; le diagnostic repose sur la positivité des tests inflammatoires et immunologiques ; le recours à la ponction articulaire et/ou à la biopsie synoviale peut être requis dans les formes de diagnostic difficile.

- Le syndrome de WISSLER-FANCONI se caractérise par des poussées fébriles élevées et intermittentes, généralement bien supportées chez un enfant de 2 à 10 ans, associées à des rashs cutanés et à des manifestations articulaires fugaces (arthralgies), une splénomégalie et des adénomégalies peuvent se voir. Les poussées fébriles s'accompagnent d'accélération de la VS et d'hyperleucocytose importante. L'évolution se fait par poussées, parfois marquée par l'apparition ultérieure d'un rhumatisme chronique.
Hématuries de l'enfant
S. Taque, E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 7 mars 2000

1 Introduction
2 Diagnostic positif
3 Diagnostic différentiel
3.1 Pigmentation non hématurique
3.2 Contamination des urines
4 Diagnostic étiologique : les éléments du diagnostic
4.1 Interrogatoire
   

4.2 Examen clinique
4.3 Examens paracliniques
5 Diagnostic étiologique : les causes
5.1 Causes infectieuses
5.2 Causes urologiques
5.3 Causes glomérulaires
5.4 Autres causes
Objectifs
1. Définition et éléments du diagnostic d'une hématurie.

2. Etiologies des hématuries.

1 Introduction
Symptôme très fréquent chez l'enfant pouvant être présent dans de nombreuses maladies et même en être le mode de révélation. Le diagnostic étiologique oblige donc à passer en revue une grande partie de la pathologie uronéphrologique. Cependant l'anamnèse, le tableau clinique et quelques examens simples permettent le plus souvent d'orienter l'enquête étiologique.
2 Diagnostic positif
L'hématurie peut être :

    * microscopique ; dépistée par une bandelette réactive et confirmée par le compte de GR/mm3 (> 10 GR/mm3) ou par le compte d'addis plus précis, exprimant un débit (> 20 GR/s).
    * macroscopique lorsqu'elle est assez importante (environ 10 000 GR/s).

3 Diagnostic différentiel
3.1 Pigmentation non hématurique
L'urine rouge peut être due à des pigments (bilirubine, porphyrie), ou à l'ingestion d'aliments (betteraves rouges, mûres) ou de médicaments (Rifampicine,...).
3.2 Contamination des urines par le sang d'origine génitale
Règles chez la femme, décalottage chez le petit garçon.
4 Diagnostic étiologique  : les éléments du diagnostic
4.1 Interrogatoire
- antécédents personnels et familiaux : origine ethnique et géographique, lithiase, surdité, maladie rénale, traitement en cours, maladie hématologique,...
- caractère de l'hématurie :

    * aspect des urines : caillots (cause urologique) ou "bouillon sale" (cause glomérulaire),
    * caractère de l'hématurie : initiale (urétrale), terminale (vésicale), ou totale (parenchyme rénal)
    * facteur déclenchant (traumatisme, effort, infection, fièvre, médicament).

4.2 Examen clinique
Il comprend en particulier : la prise de la tension artérielle, oedèmes, palpation des reins, aspect des organes génitaux, souffle cardiaque, lésions cutanées, oedèmes.
4.3 Examens paracliniques orientés par les données cliniques
- Bilan urinaire :

    * bandelette réactive urinaire,
    * compte d’Addis. En l’absence de globules rouges visibles pour une urine positive pour l’hème à la bandelette, il peut s’agir d’une hémoglobinurie ou d’une myoglobinurie. Une leucocyturie évoque un processus inflammatoire ou infectieux.
    * étude morphologique des hématies au microscope en contraste de phase sur un échantillon d'urines fraîches pouvant orienter vers une cause glomérulaire (hématies crénelées, irrégulières) ou urologique (hématies régulières),
    * protéinurie de 24 h,
    * calciurie de 24 h ou rapport Ca/créatinine urinaire sur une miction.

- Bilan sanguin :

    * urée et créatinine, ionogramme sanguin, NFS avec plaquettes.
    * complément sérique (CH50, C3, C4).

- Imagerie :

    * échographie rénale + scanner.
    * ASP et UIV.
    * biopsie rénale.

Ces examens permettent le plus souvent d'orienter le diagnostic vers l'une des causes suivantes.
5 Diagnostic étiologique : les causes
5.1 Causes infectieuses
Infection urinaire, cause fréquente à évoquer à tout âge, reconnue par l'uroculture.
5.2 Causes urologiques
5.2.1 Hypercalciurie
Les signes d'appel peuvent être ceux d'une lithiase (coliques néphrétiques), d'une infection urinaire ou des signes moins évocateurs telles que des douleurs abodminales ou une hématurie macroscopique ou microscopique. Les radiographies et en particulier l'échographie peut retrouver d'emblée une lithiase ou une néphrocalcinose.Le diagnostic repose sur lamesure de la calciurie (N < 0,125 mmol ou 5 mg/kg/24h) ou du rapport Ca/créatinine sur une miction (N < 0,7 si Ca et créatinine sont exprimés en mmol/l). Les étiologies sont classées selon la calciuurie, soit normale, soit augmentée.
5.2.2 Uropathies
Elles peuvent être de découverte anténatale lors des échographies systématiques ou se révèler par une infection urinaire ou une hématurie. On citera : reflux vésico-urétéral, sténose de la jonction pyélo-urétérale ou urétéro-vésicale, méga-uretère, valves de l'urètre postérieur
5.2.3 Polykystoses rénales
5.2.4 Tumeur rénale ou vésicale
L'hématurie est retrouvée dans 20 % des néphroblastomes. L'échographie permet le diagnostic.
5.2.5 Une thrombose des veines rénales
Un tableau de "gros rein-hématurique" chez un nouveau-né ou un nourrisson dans un contexte d'accouchement difficile, de déshydratation grave ou compliquant un syndrome néphrotique.
5.2.6 Autre causes
Traumatisme, corps étranger, polype. Intérêt de la cystoscopie.
5.3 Causes glomérulaires
Toutes les glomérulopathies peuvent donner des hématuries micro ou macroscopiques parfois inaugurales (se reporter aux questions spécifiques pour le détail de chacune). Un protéinurie est souvent associée.
5.3.1 Les infections
GN streptococcique, endocardite, néphrite de shunt, hépatite.
5.3.2 Syndromes néphrotiques impurs
5.3.3 Néphropathies à IgA
Purpura rhumatoïde, maladie de Berger ++.
5.3.4 Syndrome hémolytique et urémique chez le nourrisson
Caractérisé par l'association d'une anémie hémolytique aiguë, d'une insuffisance rénale aiguë et d'une thrombopénie.
5.3.5 Néphropathies hématuriques familiales

Ce sont des maladies héréditaires plus souvent dominantes que récessives. L'hématurie est souvent au premier plan de la scène clinique. Il en existe plusieurs types : syndrome d'Alport :

    *
      néphropathie hématurique associée à une surdité de perception bilatérale d'évolution progressive, débutant entre 6 et 10 ans. L'évolution se fait vers l'insuffisance rénale terminale entre 15 et 35 ans.
    *
      une néphropathie hématurique familiale identique au syndrome d'Alport mais sans surdité.
    *
      la néphropathie hématurique familiale bénigne de bon pronostic (pas d'évolution vers l'insuffisance rénale chronique).

5.4 Autres causes
5.4.1 Causes médicamenteuses

Les médicaments peuvent être à l'origine d'hématurie par 2 mécanismes :

    *
      néphrite tubulo-interstitielle aiguë immunoallergique, ex : méthilcilline et autres pénicillines, céphalosporines, rifampicine, sulfamides, anti-inflammatoires non stéroïdiens.
    *
      cystite hémorragique : irradiation, chimiothérapie (EndoxanÒ , HoloxanÒ ).

5.4.2 Maladies hémorragiques
Les traitements anticoagulants et les maladies hémorragiques constitutionnelles peuvent être responsables d'hématuries.
5.4.3 Drépanocytose homozygote
Est une cause classique d'hématurie de mécanisme variable : microinfarctus de la corticale, nécrose papillaire ou atteinte glomérulaire de pathogénie mal connue.
5.4.4 Bilharziose urinaire
Enfant venant d'un pays d'endémie.
5.4.5 hématurie déclenchée par un effort physique intense.
5.4.6 Idiopathique
10 à 15 % d'hématuries restent encore inexpliquées après une enquête étiologique approfondie.
Protéinuries chroniques de l'enfant
S. Taque, E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 7 mars 2000

1 Introduction
2 Diagnostic positif
3 Diagnostic différentiel
4 Diagnostic étiologique : les éléments du diagnostic
4.1 Interrogatoire
4.2 Examen clinique
   

4.3 Examens biologiques
5 Diagnostic étiologique : les causes
5.1 Protéinuries permanentes accompagnées
5.2 Protéinuries permanentes isolées
5.3 Protéinurie intermittente orthostatique
Objectifs
1. Proposer un plan d'exploration clinique et para-clinique devant une protéinurie isolée chez l'enfant.

2. Etiologies des protéinuries.

3. Diagnostic et caractères de la protéinurie intermittente (orthostatique).

La protéinurie est un signe de grande valeur en pratique pédiatrique parce que très facile à objectiver et pouvant conduire au diagnostic et au traitement précoce d'affections rénales ou urologiques. Mais, une protéinurie n'est pas toujours pathologique. Il faut donc, avant d'entreprendre des explorations complexes, coûteuses et pénibles, résoudre par un protocole simple, mais précis, ce premier problème : la protéinurie est-elle pathologique ?
1 Introduction
Une protéinurie accompagne la plupart des situations pathologiques rénales, elle peut résulter de trois mécanismes :

    * augmentation de la perméabilité glomérulaire aux protéines plasmatiques normales. La protéinurie peut être alors soit sélective (protéines de faible poids moléculaire) soit non sélective (indépendante de leur poids moléculaire).
    * diminution de la réabsorption tubulaire des protéines légères (qui normalement filtrent à travers le glomérule et sont totalement réabsorbées par le tubule) ;
    * passage transglomérulaire de protéines plasmatiques anormales, exceptionnel chez l'enfant (ex : protéinurie de Bence Jones dans le myélome chez l'adulte).

Il existe une protéinurie physiologique (< 100 mg/m²/24 h). Par définition, la protéinurie devient pathologique au-delà.
2 Diagnostic positif
- Parfois à l'occasion d'un symptôme attirant l'attention sur le rein (oedèmes, HTA, hématurie, infection urinaire).
- Ou plus souvent à l'occasion d'un examen systématique : dépistage par une bandelette réactive trempée dans les urines type Albustix : examen qualitatif permettant de détecter une protéinurie supérieure à 0,20 g/l.
La protéinurie doit être confirmée par un dosage quantitatif sur les urines de 24h.

    * protéinurie normale : < 100 mg/m2/24h
    * protéinurie importante : > 50 mg/kg/24h

3 Diagnostic différentiel
- Eliminer les faux positifs des examens à la bandelette (confirmation indispensable par un dosage sur les urines de 24 h) : urines trop alcalines avec pH > 7,5, trop concentrées ou contenant des désinfectants (ammonium quaternaire, chlorhexidine)
- Eliminer les contaminations par du sang ou du pus : règles, vulvite, balanite, hématurie importante,
- Eliminer les protéinuries transitoires aiguës au cours d'un effort, d'une fièvre importante, d'une déshydratation.
4 Diagnostic étiologique : les éléments du diagnostic
4.1 Interrogatoire
Rechercher les antécédents familiaux (néphropathie, protéinurie, surdité) ou personnels (rénaux, infections urinaires, infection O.R.L ou cutanée récente).
4.2 Examen clinique
Préciser en particulier : la tension artérielle, les oedèmes, le volume de reins, la croissance staturopondérale, le jet urinaire et l'aspect des urines.
4.3 Examens biologiques (surtout)
- Sang : ionogramme sanguin, urée, créatinine, protéines totales, albuminémie
- Urines :

    * bandelette multi réactive : sang, glucose, leucocytes, nitrite,...
    * protéinurie de 24h (éventuellement en position couchée et debout)
    * compte d'addis,
    * uroculture (si bandelette réactive +)

et, selon l'orientation :
- immunoélectrophorèse des protéines urinaires. L’immunoélectrophorèse des protéines urinaires permet de préciser le caractère de la protéinurie : glomérulaire, tubulaire ou mixte.
- dosage de complément sérique (CH50, C3, C4),
- échographie rénale et éventuellement U.I.V.
5 Diagnostic étiologique : les causes
5.1 Les protéinuries permanentes accompagnées
5.1.1 Protéinurie + hématurie
L’association d’une protéinurie et d’une hématurie oriente vers une atteinte glomérulaire. Il peut s’agir :

    * d’un syndrome néphritique : ex GN aiguë,
    * d’un syndrome néphrotique, impur.

5.1.2 Protéinurie + anomalies des fonctions tubulaires
La protéinurie est de caractère tubulaire. Ces anomalies tubulaires peuvent être suspectées sur la notion d'une : glycosurie (diabète glucosé rénal), hypokaliémie (diabète potassique), hypophosphorémie (diabète phosphoré) ou une acidose.
Elle supposent une étude plus complète des fonctions tubulaires et une recherche étiologique particulière.
5.1.3 Protéinurie + infection urinaire
L'association d'une protéinurie et d'une infection urinaire traduit une souffrance rénale et donc une pyélonéphrite véritable.
La protéinurie serait plutôt de type tubulaire.
5.2 Les protéinuries permanentes isolées
Le diagnostic sera alors guidé par l'immunoélectrophorèse des urines, par l'échographie rénale et l'U.I.V.
Ces examens permettent de distinguer trois situations :

    * anomalie rénale ou urinaire à l'écho ou l'U.I.V. : polykystose rénale, hypoplasie rénale, malformations des voies urinaires, lithiase,...
    * protéinurie tubulaire isolée : il existe une forme protéinurique pure de tubulopathie qui persiste toute la vie mais reste de bon pronostic.
    * tous les examens sont normaux : la protéinurie glomérulaire ou mixte est isolée. L'évolution est difficile à prévoir : en pratique surveillance régulière et P.B.R en cas d'aggravation ou de persistance au delà d'un an.

5.3 Protéinurie intermittente orthostatique
5.3.1 Etiologie

Elle est fréquente : environ 1/5è des enfants, dans les deux sexes, surtout entre 6 et 15 ans (ne se voit pas chez le nourrisson). Souvent le morphotype particulier : sujets maigres, longilignes.
5.3.2 Caractères de la protéinurie orthostatique :
-  isolée (++) car certaines néphropathies peuvent donner des protéinuries à composante orthostatique.
- strictement orthostatique : pour le mettre en évidence recueillir les urines selon un protocole précis : 2H après le coucher, faire uriner l'enfant en position couchée et jeter les urines. Recueillir les urines de la nuit le lendemain matin avant le lever. Recueillir également un échantillon d'urine de la journée (position debout).
La protéinurie est en général peu importante < 1g/m2/24h mais peut atteindre une forte concentration dans les urines du jour.
L'immunoélectrophorèse montre un tracé de protéinurie physiologique sur les urines de nuit et non sélective sur les urines de jour. Cette protéinurie peut être toujours présente en orthostatisme ou parfois occasionnelle.
- le pronostic est excellent, la protéinurie disparaît dans un délai variant de quelques mois à plusieurs années (en règle avant l'âge de 25 ans). L'enfant doit mener une vie normale sans restriction diététique ou d'activité physique. Toutes les vaccinations sont possibles.
Syndromes néphrotiques de l'enfant
S. Taque, E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 20 avril 1999

1 Introduction
2 Physiopathologie
3 Etude symptomatique
3.1 Eléments du syndrome néphrotique
   

3.2 Complications
4 Formes anatomo-cliniques et étiologiques
4.1 La néphrose lipoïdique
4.2 Autres syndromes néphrotiques
Objectifs
 1. Décrire les signes cliniques et les critères biologiques du syndrôme néphrotique de l'enfant.

2. Caractères de la néphrose lipoïdique.

3. Schéma thérapeutique et évolution de la néphrose lipoïdique

4. Indications de la biopsie rénale.

1 Introduction
Les syndromes néphrotiques constituent un groupement de signes et de symptômes qui expriment toujours une maladie des glomérules rénaux mais dont la nature et la cause sont variables.
La définition est essentiellement biologique :

    * protéinurie importante > 50 mg/kg/j ou 40mg/m2/h
    * hypoprotéinémie < 60 g/l
    * hypoalbuminémie < 30 g/l

2 Physiopathologie
La fuite massive des protéines dans les urines entraîne une hypoprotéinémie qui aura pour conséquences :

    * une diminution de la pression oncotique du plasma responsable d'une hypovolémie, des oedèmes et d'un hyperaldostéronisme secondaire,
    * une augmentation de la synthèse hépatique des protéines et des lipoprotéines,
    * et dans les formes prolongées, des complications de la fuite protéique et des substances liées à ces protéines (dénutrition, sensibilité aux infections, anémie,...)

3 Etude symptomatique
3.1 Les éléments du syndrome néphrotique
3.1.1 Les éléments cliniques
Le début est le plus souvent brusque avec :
- Symptomes oedémateux

    * des oedèmes périphériques
    * possibilités d'épanchement pleural, ascite, hydrocèle rentrant dans le cadre d'un anasarque.
    * parfois le syndrome oedémateux est absent et la découverte se fait lors d'un examen systématique.

- Tension artérielle

    * Le plus souvent normale, voire abaissée, en rapport avec une hypovolémie importante. Parfois HTA.

3.1.2 Les éléments biologiques
3.1.2.1 Protéinurie
Est quantitativement importante, obligatoirement supérieure à 50 mg/kg/24h. Elle peut atteindre des taux très élevés de l'ordre de 10 ou même 20g/24H. ou 40mg/m2/h.
L'immuno-électrophorèse montre que cette protéinurie est faite surtout d'albumine et de sidérophyline.

    * si ces deux éléments sont seuls présents, la protéinurie est dite "sélective".
    * si ces deux éléments sont associés à des globulines de poids moléculaire plus élevé, la protéinurie est dite "non sélective" et fait craindre des lésions d'hyalinose segmentaire et focale.

3.1.2.2 Hématurie
Il existe une hématurie microscopique dans 15 à 20% des cas.
L'hématurie macroscopique est très rare, elle fait craindre une thrombose des veines renales.
3.1.2.3 Syndrome humoral
La proteinurie massive entraîne :
- une hypoprotidémie <50g/l
- une hypoalbuminémie <30g/l
- à l'électrophrorèse des protides :

    * hypogammaglobulinémie
    * hypo ou alfa globulinémie

- augmentation du taux de cholestérol (VLDL, LDL et HDL) et des triglycérides, parfois de façon considérable.
3.1.2.4 Troubles ioniques
- natrémie normale ou diminuée :

    * du fait de l'hyperlipidémie.
    * du fait de l'inflation hydrique avec hémodilution

- calcium ionisé normal mais calcium total abaissé.
3.1.2.5 Fonction rénale
Le plus souvent normale, sauf en cas d'hypovolémie majeure où il y a possibilité d'insuffisance rénale fonctionnelle.
3.1.2.6 Facteurs de coagulation
- diminution des facteurs IX, XII et d'antithrombine III
- augmentation des facteurs, V, VII, VIII ,von Willebrand, X et du fibrinogène
- baisse des protéines C et S.
3.1.3 Classification du syndrome néphrotique
- La néphrose lipoïdique ou syndrome néphrotique pur et primitif se définit par : absence d'hématurie, absence d'hypertension artérielle et absence d'insuffisance rénale (sauf insuffisance rénale fonctionnelle transitoire). La protéinurie est sélective.

- Le syndrome néphrotique est impur si l'un ou plusieurs des éléments ci-dessus sont présents (hématurie, hypertension et insuffisance rénale). La protéinurie est alors non sélective.
3.2 Les complications
3.2.1 Les thrombses vasculaires
- Thrombses veineuses :

    * veines périphériques
    * veines rénales.

- Parfois thromboses artérielles favorisées par la diminution de l'antithrombine III, l'hyperfibrinémie et le déficit fonctionnel en protéines C et S.
3.2.2 Collapsus cardio-vasculaire
Au début des poussées, surtout lorsque la débacle urinaire obtenue par les diurétiques est trop brutale. Ce collapsus est dû à une hypovolémie très marquée.
3.2.3 Infections
- cutanées, pulmonaires, péritonéales, ,
- le plus souvent à pneumocoque et à streptocoque mais aussi virales :

    * favorisées par l'hypo-gamma-globulinémie.
    * aggravées par les traitements immunosupprésseurs.

3.2.4 Syndromes carentiels
- dénutrition par fuite protidique,
- ostéoporose,
- anémie hypochrome (fuite de la transferrine),
- hypothyroïdie par fuite des protéines porteuses,
Ces complications apparaissent lors de syndromes néphrotiques importants ou prolongés et entrainent une cassure de la croissance staturopondérale
4 Formes anatomo-cliniques et étiologiques
4.1 La néphrose lipoïdique
Environ 80 % des cas de néphrose.
4.1.1 Histopathologie
3 aspects possibles :
- "lésions glomérulaires minimes" le plus souvent (plus de 3/4 des cas) :

    * en microscope optique, glomérules pratiquement normaux,
    * en microscope électronique, fusion des pieds de podocytes,
    * en immunofluorescence, pas de dépôts ou petits dépôts d'IgM.

- lésions de "hyalinose segmentaire et focale"

    * dépôts d'aspect hyalin sous l'endothélium des parois capillaires, dans certaines anses seulement et dans certains glomérules seulement.
    * l'immunofluorescence montre surtout des dépôts d'IgM et de complément.

- Plus rarement, prolifération mésangiale modérée isolée.
4.1.2 Circonstances étiologiques
- Tous les âges sont concernés, mais le pic de fréquence se situe entre 3 et 8 ans.
- Le garçon est atteint plus fréquemment que la fille.
- Il y a souvent un petit syndrome infectieux dans les jours qui précèdent l'éclosion de la maladie.
- Il existe parfois un contexte allergique, personnel ou familial.
4.1.3 Symptomatologie
- La symptomatologie clinique est souvent évidente, avec un syndrome oedémateux rapidement constitué.
- La symptomatologie biologique est complète et pure.
4.1.4 Evolution et traitement
L'évolution dépend de la réponse à la corticothérapie. Dans la majorité des cas, la néphrose est corticosensible. Les rechutes sont fréquentes soit après arrêt du traitement soit lors de la baisse de la corticothérapie, définissant l'état de corticodépendance.

L'évolution à long terme est favorable, même si la maladie évolue sur de nombreuses années, de 5 à 15 ans.
Tant que la néphrose est corticosensible, le risque d'insuffisance rénale est presque nul. (10% des enfants sont corticorésistants)
4.1.4.1 Traitement symptomatique
- Régime alimentaire riche en protéines, bien que ceci n'ait pas d'effet sur le niveau d'albuminémie.
- Restriction sodée pour limiter l'importance des oedèmes
- Diurétiques si oedèmes importants : avec prudence !, et associés à une perfusion d'albumine pour une meilleure efficacité (mettre directement le Furosémide dans le flacon d'albumine).
- Pas d'immobilisation et anticoagulant si hypoalbuminémie inférieure à16g/l.
- Supplémentation en vitamine D et en calcium.
- Antibiothérapie si infection.
4.1.4.2 Traitement étiologique
- Corticothérapie : C'est le traitement de fond. Il doit être institué d'emblée.

    * PREDNISONE 60 mg/m2/j sans dépasser 80 mg/j pendant 4 semaines ; en une à deux prises.

    * Si le syndrome néphrotique est inchangé ou qu'il persiste une proténurie : METHYLPREDNISOLONE 1g/1.73m2 : 3 injections à 48h d'intervalle.

    * Le patient est dit corticosensible si la protéïnurie disparait. Puis : PREDNISONE 60mg/m2 un jour sur deux pendant 8 semaines puis diminution de 15mg/m2 tous les quinze jours.(Traitement de 4 mois et demi).
          o Si rechutes espacées ( 75% des cas), reprise du même schéma.
          o Si corticodépendance, le traitement de base est la corticothérapie discontinue prolongée.
    * LEVAMISOLE : L'adjonction de LEVAMISOLE peut espacer la fréquence des rechutes.

      Effet secondaire: neutropénie.

- Immunosuppresseurs

    * Si la maladie n'est pas maitrisée par la corticothérapie.
    * S'il existe plus de deux rechutes par an, on peut utiliser :
          o Les agents alkylants par exemple l'ENDOXAN (cyclophosphamide). On observe des effets secondaires, principalement une insuffisance gonadique.
          o Ciclosporine A.

            Elle diminue la production de lymphokine par les lymphocytes T activés.
            Elle permet le maintien en rémission de 75 à 90% des cas.
            Mais en général les enfants corticodépendants sont également ciclosporine-dépendants.

4.1.5 Ponction biopsie rénale
- Si syndrome néphrotique avant l'âge d'un an.
- Si syndrome néphrotique corticorésistant.
- Si mise sous immuno suppresseurs.
4.2 Autres syndromes néphrotiques
Ces syndromes néphrotiques justifient la biopsie rénale.
4.2.1 Les syndromes néphrotiques secondaires
Il s'agit de syndromes néphrotiques impurs avec hématurie, HTA et insuffisance rénale. On les rencontre au cours de maladies générales (LEAD), glomérulonéphrites chroniques, purpura rhumatoïde,...
4.2.2 Les syndromes néphrotiques infantiles
Un syndrome néphrotique est dit infantile s'il apparaît dans la première année de vie, et il est qualifié de congénital s'il est présent dès la naissance. Dans ces deux cas, il y a fréquemment une notion familiale et le pronostic est nettement péjoratif car la corticorésistance est fréquente.
La plupart des formes histologiques peuvent être rencontrées, mais il y a deux maladies précises et particulières à cet âge de la vie.
4.2.2.1 Le syndrome néphrotique congénital de type finlandais
C'est une maladie familiale récessive autosomique, surtout fréquente en Finlande mais non exceptionnelle ailleurs.
Elle comporte des lésions presque spécifiques de dilatation microkystique des tubules rénaux.
Elle existe dès la vie foetale et s'exprime, dès ce moment, par une hypotrophie foetale, une hypertrophie du placenta et une augmentation de l'alpha- foeto-protéine du liquide amniotique.
L'évolution est très grave et insensible à tous les traitements. Elle évolue vers l'insuffisance rénale avant 3 ans, ayant préalablement déterminé des troubles digestifs importants, des complications nutritionnelles et infectieuses.
C'est une indication de transplantation rénale.
4.2.2.2 La sclérose mésangiale diffuse
- Caractère familial possible mais non constant.
- Lésions de rétraction fibreuse du floculus sans prolifération cellulaire.
- Débute soit dès la naissance, soit au cours des premiers mois.
- Note hématurique fréquente.
- Evolution grave vers l'insuffisance rénale terminale avant 3 ans.
Syndrome hémolytique et urémique
S. Taque, E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 20 avril 1999
Objectifs
1. Décrire le tableau clinique du syndrome hémolytique et urémique.

2. Décrire son traitement et son évolution.

Le syndrome hémolytique et urémique est la cause la plus fréquente des insuffisances rénales aiguës du nourrisson.

Après des prodromes, le plus souvent à type de diarrhée et vomissements, s'installe brutalement le tableau clinique caractéristique associant : une anémie hémolytique avec hématies fragmentées (schizocytes), une insuffisance rénale aiguë d'intensité variable, une thrombopénie.

Des convulsions et une hypertension artérielle se rencontrent dans 20 % des cas et aggravent le pronostic.

L'évolution se fait dans 3/4 des cas vers la guérison. Des séquelles sont possibles, surtout chez le grand enfant, à type d'hypertension artérielle résiduelle et d'insuffisance rénale chronique.

Le traitement reste essentiellement symptomatique : lutte précoce contre l'insuffisance rénale aiguë (dialyse péritonéale aiguë) ; correction de l'hypertension artérielle ; correction prudente de l'anémie.
Syndrome néphritique aigu
S. Taque, E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 20 avril 1999

1 Syndrome néphritique aigu
2 Modalités évolutives du syndrome néphritique apparemment isolé
2.1 Formes à début aigu curable
2.2 Formes à début aigu d'évolution chronique
2.3 Formes à début aigu avec insuffisance rénale
   

3 Syndrome néphritique secondaire à une maladie générale
4 Traitement
4.1 Syndrome néphritique aigu à début aigu curable
4.2 Traitement anti-infectieux
4.3 Traitement des autres formes étiologiques
Objectifs
1. Citer les signes cliniques caractéristiques de la glomérulonéprite aiguë de l'enfant.

2. Décrire les trois modalités évocatrices du syndrome néphritique apparemment isolé.

3. Exposer les principes de la surveillance du traitement d'une glomérulonéphrite post-streptococcique de l'enfant.

Quelle que soit l'évolution, le type histologique, le pronostic, les néphropathies glomérulaires ont un tableau clinique assez stéréotypé appelé syndrome néphritique aigu.
1 Syndrome néphritique aigu
Il associe :
- une protéinurie non sélective, inférieure à 50 mg/kg/j, parfois plus abondante, entraînant alors l'apparition d'un syndrome néphrotique ;

- une hématurie souvent macroscopique donnant aux urines une couleur "bouillon sale", ou microscopique objectivée à la bandelette ou l'examen du sédiment urinaire. Il existe des cylindres hématiques traduisant l'origine glomérulaire de l'hématurie ;

- une oligurie avec oedèmes, les oedèmes sont en général modérés, il s'agit parfois d'une simple prise de poids ;

- une hypertension artérielle. Elle peut révéler la maladie par des manifestations bruyantes à type de convulsions. La sévérité de l'hypertension n'est pas corrélée avec la sévérité de l'atteinte rénale ;

- une insuffisance rénale inconstante, de degré variable, elle est objectivée par la baisse de la filtration glomérulaire.

Devant ce syndrome néphritique, il faut rechercher une infection, O.R.L., cutanée, profonde (cathéter, valve), chercher des signes de maladie générale (purpura rhumatoïde, lupus, P.A.N.) faire un dosage de la fraction C3 du complément. Au terme de ce bilan, le syndrome néphritique peut être soit apparemment isolé, soit secondaire à une maladie générale.
2 Modalités évolutives du syndrome néphritique apparemment isolé
Trois possibilités évolutives :
2.1 Formes à début aigu curable
La plus fréquente.
Le tableau correspond à celui de la glomérulonéphrite aiguë post-streptococcique ; d'autres germes peuvent cependant être en cause.
L'hypertension artérielle, l'oligo-anurie, l'insuffisance rénale, sont transitoires.
S'il existait un syndrome néphrotique, celui-ci disparait en moins de 15 jours. La fraction C3 du complément abaissée au début de la maladie se normalise en 8 semaines. C'est un critère biologique de surveillance.
Le pronostic est excellent, la biopsie est inutile, elle objectiverait une prolifération endocapillaire pure.
2.2 Formes à début aigu d'évolution chronique
Il existe trois possibilités évolutives distinctes :

    * L'hypertension artérielle, le syndrome néphrotique, l'insuffisance modérée, persistent plus de quatre semaines.
    * Le complément C3 reste bas après 8 semaines.
    * L'hématurie et/ou la protéinurie sont toujours persistantes un an après le début.

Ces trois possibilités doivent faire envisager une ponction biopsie rénale. Le pronostic en effet est plus réservé et fonction de l'histologie, soit glomérulonéphrite endo et extracapillaire de type I et II, soit glomérulonéphrite membranoproliférative, soit néphropathie glomérulaire à dépôt mésengiaux d'IgA (maladie de BERGER).
2.3 Formes à début aigu avec insuffisance rénale rapidement progressive
- L'insuffisance rénale et l'oligo-anurie sont sévères, elles persistent plus de 5 jours.
- Le syndrome néphrotique est intense ou alors apparaît secondairement.

Dans ces deux cas le pronostic est mauvais et impose rapidement une ponction biopsie rénale qui objectivera une glomérulonéphrite endo et extracapillaire type III (glomérulonéphrite maligne). L'évolution vers l'insuffisance rénale terminale est le fait de la majorité des cas.
3 Syndrome néphritique secondaire à une maladie générale
Chez l'enfant, il s'agit essentiellement d'un purpura rhumatoïde, rarement d'un lupus, d'une périartérite noueuse.
4 Traitement
4.1 Syndrome néphritique à début aigu curable
Le traitement est essentiellement symptomatique : lutte contre la rétention hydrosodée par régime sans sel et éventuellemnt diurétique. Lutte contre l'hypertension.
4.2 Traitement anti-infectieux
Lorsqu'une infection causale a été diagnostiquée, celle-ci doit être traitée (éviction du foyer dentaire par exemple). Un traitement antibiotique de 10 jours est suffisant dans la glomérulonéphrite aiguë post-streptococcique (Pénicilline orale).

4.3 Le traitement des autres formes étiologiques du syndrome néphritique reste encore hypothétique : il fait appel aux immunosuppresseurs, avec corticoïdes et aux échanges plasmatiques.
Insuffisance rénale chronique de l'enfant
S. Taque, E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 20 avril 1999
Objectifs
1. Citer les manifestations cliniques de l'insuffisance rénale classique.

Environ deux enfants par million d'habitant et par an arrivent en insuffisance rénale terminale (I.R.T.).
Ce stade peut être atteint en quelques mois voire quelques semaines en cas de néphropathies glomérulaires ou vasculaires ; à l'inverse c'est souvent après des années d'évolution que certaines uropathies malformatives graves et les hypoplasies rénales aboutissent à l'I.R.T.
Il est important de reconnaitre avant ce stade terminal les enfants en insuffisance rénale chronique (I.R.C.).
Les manifestations chroniques peuvent être latentes, mais le plus souvent elles entraînent des symptômes imposant systématiquement la mesure de la filtration glomérulaire.
L'anorexie, des vomissements, un syndrome polyuro-polydypsique sont fréquemment rencontrés.
Très évocateurs sont les troubles de la croissance avec ralentissement progressif de la vitesse de croissance staturale, il en est de même des pseudo retards pubertaires en rapport avec le retard de maturation osseuse.
Le traitement de l'I.R.C. est graduel, car fonction du degré d'atteinte de la filtration glomérulaire :

    *  Clearance < à 40 ml/mn/1,73 m2

      Prévention de l'ostéodystrophie rénale par la lutte contre l'hyperphosphorémie et l'hypocalcémie.

    * Clearance < 20 ml/mn/1,73 m2, s'y ajoute :

      1 - Régime de restriciton protidique et potassique,
      2 - Restriction sodée en cas d'HTA

    * Clearance < 8 ml/mn/1,73 m2, s'y ajoute :

      Mise sur un programme d'hémodialyse transplantation.

TRES IMPORTANT : l'existence d'une I.R.C. nécessite une particulière prudence dans l'emploi des médicaments à élimination rénale et impose une posologie adaptée au degré de filtration glomérulaire.
Biologie rénale
S. Taque, E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 20 avril 1999

1 Mesure de la filtration glomérulaire
1.1 Clearance de la créatinine
1.2 Créatinémie
   

2 Etude du pouvoir de concentration rénale
3 Evaluation des fonctions tubulaires
Objectifs
1. Citer les deux examens permettant d'évaluer la fonction rénale chez l'enfant ; en donner les résultats.

En pratique courante deux examens ont un intérêt capital dans l'évaluation de la fonction rénale chez l'enfant :
1 Mesure de la filtration glomérulaire
1.1 La clearance de la créatinine
Elle est la technique la plus employée. Elle doit être interprétée en valeur corrigée (ml/mn/1,73 m2). Valeurs normales en ml/mn/1,73 m2 en fonction de l'âge :

    * nouveau-né : 40
    * 12 mois : 90
    * 24 mois et au delà : 120

On peut utiliser un calcul approché de la clearance :
C ml/mn x 1,73 m2 = 40 x taille (cm) / cp exprimé en mol/l.
 
1.2  Créatinémie
En fait le recueil d'urine est parfois difficile chez l'enfant et la filtration glomérulaire peut être appréciée par la seule créatinémie.
Valeurs normales en micro-mol/l en fonction de l'âge :

    * de deux semaines à 4 ans : 20 à 50
    * de 4 ans - 10 ans : 20 à 70
    * de 10 ans - 12 ans : 30 à 70

2 Etude du pouvoir de concentration rénale
La technique la plus aisée est le test au D.D.A.V.P (MINIRIN).
Les urines sont recueillies toutes les heures pendant 5 heures, après administration nasale de D.D.A.V.P., leur osmolarité est mesurée.
Le pouvoir de concentration normal est de :

    * 700 mosm/kg avant 3 mois,
    * 1000 mosm/kg après 12 Mois.

Indications : la mesure du pouvoir de concentration est un élément essentiel de surveillance des uropathies et des tubulopathies, le pouvoir de concentration est perturbé bien avant l'atteinte de la filtration glomérulaire.
3 Evaluation des fonctions tubulaires
Tant proximales que distales : difficile et d'indication plus rare (mesure du taux de réabsorption des phosphates, mesure du pouvoir d'acidification des urines, etc...)
Infections urinaires de l'enfant
S. Taque, E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 22 avril 1999

1 Introduction
2 Etiopathogénie
2.1 Fréquence, âge, sexe
2.2 Germes responsables
2.3 Pathogénie
3 Diagnostic positif
3.1 Signes d'appel
3.2 Examen clinique
   

3.3 Examens biologiques
4 Diagnostic étiologique
4.1 Explorations
4.2 Résultats du bilan urologique
5 Traitement
5.1 Principes et buts
5.2 Indications
Objectifs
1. Citer les normes de bactériurie par ml, leucocyturie par ml, hématies et leucocytes par minute et de diurèse selon l'âge.

2. Citer les signes devant faire rechercher une infection urinaire chez le nourrisson et l'enfant plus grand.

3. Citer les examens complémentaires à faire lors d'une infection urinaire chez l'enfant.

4. Exposer les conditions de validité et la technique de recueil d'urines chez le nourrisson en vue d'un examen cytobactériologique.

5. Exposer les principes du traitement d'une infection urinaire à germes banaux.

6. Citer les principaux symptômes et signes physiques qui doivent faire rechercher une uropathie obstructive.

1 Introduction
Les infections urinaires englobent un large spectre de syndromes cliniques qui ont en commun une culture positive des urines.
- Une infection est dite basse si elle se limite à la vessie.
- Une infection est dite haute (pyélonéphrite) si elle intéresse le rein, les cavités pyélocalicielles et/ou l'uretère.
2 Etiopathogénie
2.1 Fréquence, âge, sexe
L'infection urinaire est une affection fréquente (5 à 10 % des admissions dans les services de pédiatrie générale). Alors qu'elle est retrouvée plus souvent chez le garçon en période néonatale, la prédominance féminine devient très nette après l'âge de 1 an.
2.2 Germes responsables
- L'Escherichia Coli est en cause dans 80 à 90 % des premières infections urinaires.
- Le Streptocoque D (entérocoques) est retrouvé dans 5 à 10 % des cas.
- Le Protéus se voit plus volontiers chez le garçon et peut favoriser la formation de lithiase coralliforme.
- La Klebsiella est surtout rencontrée chez le nouveau-né.
- Le pyocyanique est un germe de surinfection en particulier hospitalier et survient souvent en cas d'uropathie sévère multi-opérée.
- Le staphylocoque atteint surtout les adolescents.
- Certains virus (adénovirus) peuvent être responsables de cystite hématurique.
2.3 Pathogénie
La contamination se fait par voie ascendante à partir de la flore fécale. La contamination par voie hématogène est exceptionnelle sauf chez le nouveau- né où l'infection urinaire serait souvent une localisation secondaire d'une septicémie ou d'une bactériemie.
2.3.1 Facteurs favorisants liés à la bactérie
Les pili ou fimbriae sont des filaments situés à la surface des bactéries et possédant des récepteurs spécifiques aux cellules uroépithéliales. L'attachement à l'urothélium facilite leur multiplication dans les urines et la progression de l'infection.
2.3.2 Facteurs favorisants propres à l'hôte
- Tout ce qui favorise la stase des urines, favorise l'infection : uropathie malformative, reflux vésico-urétéral, vessie neurologique, immaturité vésicale, constipation.
- Les facteurs de défense immunitaire de l'hôte conditionnent sa réponse à l'infection.
3 Diagnostic positif
3.1 Les signes d'appel
Ils sont variables selon l'âge.
3.1.1 chez le nouveau-né et le nourrisson
Il n'existe aucun signe spécifique. Il faut savoir évoquer le diagnostic et faire une uroculture devant des signes parfois trompeurs :

    * fièvre variable (parfois très élevée pouvant entraîner une convulsion inaugurable, mais souvent modérée ou totalement absente), septicémie surtout avant l'âge de 2 mois, mauvaise prise de poids ou cassure de la courbe pondérale, troubles digestifs (vomissements, diarrhées, anorexie),
    * mauvais état général (teint d'infecté),
    * ictère persistant.

3.1.2 Chez l'enfant plus grand
Le tableau peut être plus évocateur :

    * une fièvre élevée avec frissons, sueurs, des douleurs lombaires ou abdominales orientent vers une infection haute ;
    * signes de cystite : dysurie, pollakiurie, brûlures mictionnelles, énurésie secondaire ;
    * hématurie macro ou plus souvent microscopique.

3.2 L'examen clinique :
- doit toujours vérifier l'aspect des organes génitaux externes, en particulier rechercher un phimosis chez le garçon ;
- la palpation des fosses lombaires peut être douloureuse ;
- l'hypertension est rare ;
- un test de dépistage doit être réalisé par une bandelette réactive urinaire recherchant la présence de nitrites, de leucocytes et de sang. A condition de vérifier au moins ces 3 paramètres avec des bandelettes non périmées, il existe très peu de faux négatifs (< 2 %). En revanche les faux positifs sont fréquents justifiant la pratique systématique d'une uroculture en cas de positivité de l'un des paramètres.
3.3 Les examens biologiques
3.3.1 L'examen cyto-bactériologique des urines (ECBU)
Les conditions de recueil doivent être irréprochables ; on recueille les urines au milieu du jet après une désinfection soigneuse :

    * Chez le grand enfant avec une solution d'héxomédine alcoolique à 70% ; puis rinçage à l'eau stérile. Le rinçage après désinfection évite la présence d'antiseptique dans les urines.

    * Chez le petit enfant, on a recours à la poche. Après désinfection soigneuse et rincage, la poche est posée mais ne doit être laissée en place que 30 minutes du fait des risques de contamination importants. Le recueil est parfois difficile. Le prélèvement par sondage n'est pas recommandé. La ponction suspubienne, très peu pratiquée en France, est réservée après plusieurs prélèvements douteux.

Transfert des urines : Il ne doit pas excéder une heure. Elles peuvent être gardée 24 heures maximum à + 4°.

Examen microscopique :

    * une leucocyturie ³ 105/ml est considérée comme pathologique.
    * une bactériurie ³ 105cfu/ml à l'examen direct est pathologique.
    * Il existe des bactéries isolées asymptomatiques chez 5% des filles.

Culture : Elle nous donne la numération des germes, les résultats sont obtenus en 24 heures. Les bacilles gram négatif sont dominants.
3.3.2 Examens d'orientation topographique
3.3.2.1 Signes évocateurs de pyéloméphrite aiguë
- fièvre élevée à 39/40°,
- frissons, sueurs,
- AEG,
- douleurs abdominales,
- biologie :

    * hyperleucocytose avec polynucléose,
    * syndrome inflammatoire : CRP>20mg/l, fibrine >4g/l, augmentation de la procalcitonine,
    * protéinurie possible.

3.3.2.2 Signes évocateurs d'infection urinaire basse type cystite aiguë
- dysurie, pollakiurie, brûlures mictionnelles,
- absence de fièvre,
- biologie : pas d'hyperleucocytose, pas de symptôme inflamatoire.
4 Diagnostic étiologique
4.1 Les explorations
Une première infection urinaire haute justifie la recherche d'un facteur favorisant, en particulier une uropathie par une échographie et une cystographie.
4.1.1 L'échographie
Examen peu invasif, elle permet d'apprécier :
- la taille et l'échogénicité des reins parfois augmentées en cas de pyélonéphrite aiguë,
- l'épaisseur du parenchyme et le degré de différenciation corticomédullaire parfois diminuée en cas de cicatrice rénale témoin d'une pyélonéphrite chronique.
- la taille des cavités pyélocalicielles et de l'uretère modifiée en cas d'uropathie malformative.
Cependant elle ne permet pas d'affirmer un reflux vésico-urétéral.
4.1.2 La cystographie rétrograde
est donc indispensable pour visualiser un obstacle sous-vésical. Compte-tenu du caractère plus traumatisant, du risque septique, et de l'existence de signes inflammatoires en période aiguë, elle est réalisée de façon différée après avoir vérifié la stérilité des urines et sous couvert d'un traitement anti-infectieux.
4.1.3 L'I.U.V
ne sera pratiquée qu'en cas d'anomalie de l'un ou des deux examens précédents.
4.1.4 Les autres examens ne sont pas de pratique courante :
- le scanner est intéressant si l'on suspecte un abcès ou en cas de rein muet à l'UIV.
- la scintigraphie rénale au DMSA apprécie la valeur fonctionnelle rénale séparée. C'est l'examen le plus précis pour détecter des cicatrices rénales à distance de l'épisode aigu.
- la scintigraphie au DTPA peut être intéressante pour mettre en évidence un obstacle pyélo-urétéral ou uretero-vésical.
- la cystographie isotopique est considérée par certains comme un bon examen pour mettre en évidence un reflux intermittent ,
- la cystomanométrie est rarement indispensable au diagnostic d'immaturité vésicale ou de vessie neurologique.
4.2 Résultats du bilan urologique
Des informations complémentaires sont rapportées dans le chapitre des uropathies malformatives.
4.2.1 Le reflux vésico-urétéral primitif
Cest l'uropathie la plus fréquente de l'enfant. Il existe 4 stades (I, II, III, IV). Les stades I et II régressent le plus souvent spontanément. Les stades III et IV peuvent nécessiter une intervention chirurgicale s'ils persistent au delà de l'âge de deux ans et s'ils ont été responsables de plusieurs pyélonéphrites aiguës sous traitement antiseptique.
4.2.2 Autres uropathies
- syndrome de la jonction pyélo-urétérale,
- megauretère refluant,
- duplication uretérale avec reflux et/ou urétérocèle,
- valves de l'urèthre postérieure,
- immaturité vésicale,
4.2.3 Beaucoup plus rarement il peut s'agir :
- d'une polykystose rénale dominante ou récessive,
- d'une lithiase rénale,
- d'une vessie neurologique.
5 Traitement
5.1 Principe et buts
- stériliser les urines et le parenchyme rénal, pour éviter l'apparition des cicatrices rénales (pyélonéphrite chronique) et de ses complications :

    * HTA,
    * insuffisance rénale.

- choisir des antibiotiques :

    * bonne diffusion dans le tissu rénal,
    * bonne vitesse de bactéricidie,
    * adapté aux germes les plus courants et à l'antibiogramme.

5.2 Les indications
5.2.1 Les infections urinaires basses
- Recherche des causes favorisantes : instabilité vésicale (urgences mictionnelles, culotte mouillée dans la journée et énurésie nocturne), constipation, boissons insuffisantes, mauvaise hygiène périnéale, oxyurose.

- Antimicrobiens utilisés :

    * acide nalidixique : NEGRAM 30 à 60mg/kg/j, sauf chez le jeune nourisson
    * nitrofurantoïne: FURADANTINE 3 à 5mg/kg/j
    * cotrimoxazole + triméthoprime : BACTRIM, respectivement 6mg/kg/j et 30mg/kg/j.
    * nitroxoline : NIBIOL; 50 à 100mg/kg/j

Lorsque ces molécules ne peuvent pas être utilisées, les b -lactamines orales sont prescrites :

    * Amoxicilline 100mg/kg/j en 3 prises.
    * Amoxicilline + acide clavulinique : 100 mg/kg/j en 3 prises.
    * Céphalosporine de deuxième génération.

Tous les antimicrobiens sont utilisés en monothérapie. La durée du traitement est discutée, en général de 7 jours. Pas de traitements minute en pédiatrie. Pas de fluoroquinolones chez les moins de 15 ans.
5.2.2 Pyélopnéphrite aiguë

Conférence de consensus de 1990 :

    *
      CEPHALOSPORINE de 3è génération, type CEFOTAXIME : 100 mg/kg/j en 3 prises IVL/1heure.
    *
      AMINOSIDE type NETILMICINE : 6 mg/kg/j en 3 prises IVV/1 heure.

Facteurs de risque :

    * uropathie connue.
    * syndrome septique très sévère.
    * mauvaise compliance au traitement.

Le Traitement doit être adapté à l'antibiogramme :

    * Initial : il ne doit pas être inférieur à 10 jours et doit être poursuivi jusqu'à la réalisation de la cystographie (au bout de 2 à 3 semaines). L'efficacité est vérifiée par un ECBC à 48 heures.

    * Après la cystographie, si la cystographie est normale, les antibiotiques sont arrêtés 24 heures après l'examen. En cas d'uropathie, un traitement préventif des infections est réalisé pendant 18 à 24 mois par antiseptiques urinaires à un tiers de dose.

Le traitement des pyélonéphrites est susceptible d'évoluer mais il faut retenir 2 notions :

    *
      Nécessité d'un traitement efficace et suffisamment prolongé. Ne pas banaliser.
    *
      Nécessité de rechercher une uropathie et s'assurer de la stérilité des urines.

 Références : Archives de Pédiatrie, 1998, 5, supplément 3.
Le cancer de l'enfant
C. Bergeron

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 6 mars 2000

1 Epidémiologie des cancers de l'enfant
1.1 Fréquence
1.2 Etiologie
2 Conduite à tenir
2.1 Clinique
2.2 Examens radiologiques
2.3 Examens biologiques
2.4 Examens anatomopathologiques
2.5 Bilan d'extension de la maladie
3 Possibilités thérapeutiques
3.1 La chirurgie
   

3.2 La radiothérapie
3.3 La chimiothérapie
4 Etude des cas particuliers
4.1 Leucémies aiguës
4.2 Tumeurs cérébrales
4.3 Tumeurs abdominales
5 Les problèmes humains
5.1 Diagnostic et premier traitement
5.2 La rémission
5.3 Les rechutes et la mort
5.4 La guérison et l'avenir
Objectifs
1. Enumérer les facteurs favorisants de l'oncogénèse.

2. Enumérer les tumeurs les plus fréquentes chez l'enfant.

3. Enumérer avec quelques notions succinctes les possibilités thérapeutiques pour le cancer de l'enfant.

4. Méthodes d'irradiation et complications de l'irradiation particulières à l'enfant.

5. Complications générales de la chimiothérapie (en dehors de la toxicité propre de chaque drogue).

6. .Décrire les circonstances amenant à envisager le diagnostic de leucémie aiguë chez l'enfant.

7. Citer les examens permettant de faire le diagnostic d'une leucémie aiguë et d'en définir les éléments de gravité.

8. Principes du traitement et surveillance d'une leucémie aiguë de l'enfant.

9. Tumeurs de la fosse postérieure de l'enfant.

10. Méthodes, diagnostic d'une tumeur abdominale de l'enfant.

11. Diagnostic d'un néphroblastome.

12. Diagnostic d'un neuroblastome développé à partir d'une médullosurrénale.

13. Enumérer, en les résumant, les problèmes psychologiques que l'on peut rencontrer au cours du traitement d'un cancer.

Le cancer existe chez les enfants de sorte que beaucoup de médecins seront amenés à en évoquer le diagnostic et à en surveiller le traitement.
Il faut combattre l'idée encore trop souvent répandue du caractère inéluctable des cancers chez les enfants puisque les deux tiers d'entre eux guérissent. La mise en route d'un traitement nécessite une prise en charge par une équipe pluridisciplinaire pour adapter au mieux le traitement afin d'obtenir non seulement la guérison mais aussi une bonne qualité de vie par la suite.

- Nous donnerons des notions générales qui méritent d'être connues car elles s'appliquent à tous les cancers.
- Nous citerons des exemples de cancers les plus fréquents.
1 Epidémiologie des cancers de l'enfant
Les cancers de l'enfant de moins de 15 ans représentent 1 % de l'ensemble des cancers. A partir de 3 ans, c'est la deuxième cause de mortalité après les accidents.
1.1 La fréquence
- L'incidence annuelle moyenne est de 13 pour 100 000 enfants de moins de 15 ans.
- La répartition des principales tumeurs est la suivante :

    * leucémies et lymphomes : 45 %,
    * tumeurs cérébrales : 20 %,
    * neuroblastomes : 8 %,
    * tumeurs des tissus mous : 8 %,
    * néphroblastomes : 7 %,
    * rétinoblastomes : 3 %.

- On note que 40% des cancers se développent avant 4 ans et sont généralement embryonnaires dans cette tranche d'âge.
- En fonction du sexe, le rapport M/F est de 1,2/1.
- L'influence de la race est démontrée. Les variations de fréquence selon l'ethnie et la géographie permettent d'évoquer le rôle protecteur de la race vis-à-vis de certains cancers ou la responsabilité d'agents environnants.
1.2 Etiologie
1.2.1 Rôle des facteurs génétiques
Beaucoup de recherches sont actuellement consacrées à ce sujet.
1.2.1.1 Cancers héréditaires transmis selon le mode autosomique dominant

Le cancer est la manifestation essentielle du gène mutant : rétinoblastome. Dans 40 % des cas, cette tumeur est héréditaire et généralement bilatérale, se révélant dans la première année. 60 % des rétinoblastomes ne sont pas héréditaires et sont unilatéraux. La découverte d'un rétinoblastome unilatéral impose de surveiller l'autre oeil et d'examiner régulièrement les autres membres de la fratrie. Il faut y penser devant la survenue d'un strabisme ou d'un reflet blanchâtre à travers la pupille.
Il peut s'agir d'un désordre systémique avec des anomalies de développement et des cancers multiples. A tire d'exemple, nous citons la noevomatose basocellulaire : noevi cutanés, dyskératose palmoplantaire, fibromes, lipomes, anomalies du faciès...
1.2.1.2 Syndromes prénéoplasiques héréditaires

Ils prédisposent inconstamment à une tumeur bénigne ou maligne, unique ou multiple.
- Les phacomatoses (transmission autosomique dominante) : maladie de Recklinghausen, sclérose tubéreuse de Bourneville.
- Les génodermatoses. Nous citerons le xéroderma pigmentosum qui est une affection autosomique récessive. Les lésions cutanées déclenchées par l'exposition aux U.V. évoluent vers l'apparition d'épithéliomas spino ou baso-cellulaires.
- Les syndromes avec instabilité chromosomique représentés par la maladie de Fanconi, l'ataxie télangiectasie et la maladie de Bloom.
- Déficits immunitaires congénitaux ou acquis. Il existe une prédominance des leucémies et des lymphomes, principalement avec des déficits de l'immunité cellulaire. Ceci se confirme avec le SIDA
1.2.1.3 Aberrations chromosomiques constitutionnelles
- Chez les sujets atteints de trisomie 21 libre, le risque de leucémie aiguë est multiplié par 15 à 20.
- Délétions chromosomiques : pertes d'anti-oncogènes
1.2.1.4 Cancers et autres malformations

- Aniridie congénitale. L'incidence de cette anomalie est de 1,8 pour 100 000 naissances et de 1,1% chez les sujets atteints de néphroblastome. L'existence d'une aniridie impose une recherche systématique de néphroblastome dans les cinq premières années de la vie au moyen d'une UIV et/ou une échographie rénale tous les ans.
- Asymétrie de croissance,
- Chyptorchidie : l'incidence des tumeurs germinales est multipliée par 40.
1.2.1.5 Etude des jumeaux
L'atteinte de jumeaux monozygotes plaide en faveur du rôle de facteurs génétiques.
1.2.1.6 Susceptibilité familiale
"familles à cancer", syndrome de Li-Fraumeni
1.2.2 Rôle de l'environnement
Le rôle des agents exogènes paraît très mince en cancérologie infantile.
1.2.2.1 Rôle des agents physiques

- les radiations ionisantes : après irradiation prénatale, le risque de leucémie est lié à la dose reçue. En cas d'irradiation postnatale, on connaît le risque élevé de leucémies après irradiations atomiques, le risque de cancer de la thyroïde après une irradiation du cou, les sarcomes secondaires en zone irradiée.
- les rayons ultraviolets : on a déjà vu leur rôle dans la survenue de cancers cutanés lors de prédisposition génotypique (Xéroderma pigmentosum).
1.2.2.2 Rôle des agents chimiques

- rôle carcinogène du di-éthylstibestrol : indépendamment du moment d'exposition du foetus et de la dose reçue, 50 % des filles exposées in utéro ont un risque de cancer vaginal.
- la diphényl-hydantoïne est responsable de syndromes lymphoprolifératifs bénins ou malins.
- augmentation de la fréquence des cancers chez les malades traités par immunosuppresseurs.
1.2.2.3 Rôle des virus

- Le virus d'Eptein-Barr est associé dans plus de 90 % des cas aux lymphomes de Burkitt africains, ainsi qu'aux carcinomes indifférenciés de naso-pharynx dont on connaît la grande fréquence chez les sujets du pourtour méditerranéen et du sud-est asiatique.
- Le virus de l'hépatite B est associé à l'hépatocarcinome dont la prévention par la vaccination semble prometteuse.
2 Conduite à tenir
2.1 Clinique

L'examen clinique des tumeurs dépend de leur taille et de leur localisation.
- La palpation est possible dans les tumeurs périphériques (membres, cou) même petites ou devant des tumeurs profondes déjà volumineuses (abdomen, pelvis)
- La douleur est un symptôme retrouvé dans les tumeurs osseuses ou celles comprimant les racines nerveuses, ou proliférant dans la boîte crânienne. Rappelons que le petit enfant n'exprime pas sa douleur mais diminuera son activité (jeux, sourire, langage) pour la combattre. Les tumeurs des tissus mous ne sont pas douloureuses.
- Une symptomatologie révélant une compression (axe trachéobronchique, axe vasculaire, axe digestif, axe nerveux) par la tumeur peut être au premier plan.

Devant chaque cas, il faut faire un choix entre les examens les plus performants et éviter des examens inutiles ou dangereux.
2.2 Examens radiologiques
2.2.1 Examens sans préparation
Radiographies pulmonaires, abdomen sans préparation, squelette osseux.
2.2.2 L'échographie
C'est actuellement un examen essentiel qui doit être prescrit au moindre doute et qui apporte au diagnostic le siège exact de la tumeur et ses rapports avec les autres organes, ses dimensions, sa nature liquidienne ou non. Certaines tumeurs malignes nécrosées peuvent avoir des zones liquidiennes. Si l'échographie est indispensable pour une tumeur abdominale ou pelvienne, elle a sa place aussi pour les tumeurs des tissus mous des membres et du cou.
2.2.3 Urographie intraveineuse
Cet examen, indispensable avant le scanner pour toutes tumeurs abdominales, est actuellement supplanté par l'angioscanner avec clichés standards de face et de profil en fin d'examen, ce qui permet de visualiser l'appareil excréteur urinaire ou complet.
2.2.4 Tomodensitométrie
Cet examen est indispensable devant la plupart des tumeurs. Toutefois, il n'est pas plus performant qu'une échographie devant une tumeur abdominale.
2.2.5 I.R.M

Cet examen précise bien l'extension des tumeurs. Il est actuellement très utile dans les tumeurs cérébrales et osseuses. Mais, ses indications s'élargissent dans les autres tumeurs.
2.2.6 Les examens isotopiques
- La scintigraphie osseuse permet d'apprécier le volume d'os atteint et de dépister une métastase. Des techniques actuelles permettent de quantifier la radioactivité et donc d'apprécier l'évolutivité sous traitement. Cet examen remplace souvent des radiographies du squelette : une hyperfixation ne correspond pas obligatoirement à une lésion maligne.

- La scintigraphie à la métaiodobenzylguanidine (MIBG) : elle est spécifique des tumeurs sympathiques et carcinoïdes. Cet examen est indispensable dans le diagnostic et la surveillance des neuroblastomes.

- La scintigraphie thyroïdienne peut préciser le caractère chaud ou froid d'un nodule.
2.3 Examens biologiques

Certains examens sont faits couramment : numération formule sanguine, ionogramme sanguin, bilan hépatique. La vitesse de sédimentation a peu de valeur en dehors de la maladie de Hodgkin ou du neuroblastome.

D'autres examens sont très utiles à la recherche d'une sécrétion tumorale spécifique permettant de faire le diagnostic et de suivre l'évolution. Toute élévation correspond à une prolifération tumorale :

    *
      métabolites des catécholamines : neuroblastomes,
    *
      alpha foetoprotéine : tératomes et hépatoblastomes,
    *
      gonadotrophines : choriocarcinome,
    *
      thyrocalcitonine : épithéliomas médullaires de la thyroïde.
    *
      acide urique très élevé (> 1000) : évocateur de lymphome de Barkitt,
    *
      LDH très élevées : évocateur d'une prolifération maligne,

2.4 Examens anatomopathologiques
2.4.1 La cytologie est un examen simple : ponction d'un ganglion, d'une masse, myélogramme.

2.4.2 L'histologie est obtenue à partir d'une simple biopsie ou d'une exérèse de la tumeur.
2.5 Bilan d'extension de la maladie
L'extension est l'un des facteurs du pronostic de la maladie et est déterminante dans le choix du traitement. Les stades d'extension sont soit cliniques après les investigations diagnostiques, soit pathologiques après chirurgie et étude histologique.
3 Possibilités thérapeutiques
Chez l'enfant, nous disposons des mêmes moyens thérapeutiques que chez l'adulte mais avec des combinaisons différentes. La chimiothérapie tient une large place car il s'agit souvent de tumeurs embryonnaires ayant une grande sensibilité aux antimitotiques.
3.1 La chirurgie
3.1.1 Possibilités
3.1.1.1 Biopsie
Elle doit être de bonne qualité et faite à ciel ouvert, avec une incision aussi discrète que possible.
3.1.1.2 L'exérèse
- biopsie exérèse : elle est indiquée en cas d'une petite tumeur
- l'exérèse : dans la majorité des tumeurs, l'exérèse est le meilleur traitement local, mais son indication n'est pas toujours d'emblée possible. Elle peut être complète ou partielle mais ne doit jamais être délabrante ni mutilante. L'exérèse n'est jamais indiquée dans les lymphomes quel que soit leur localisation.
3.1.2 Indications
La chirurgie est possible à divers stades de la maladie : tumeur primitive, vérification d'un résidu tumoral (lymphome, rhabdomyosarcome), récidives locales, métastases, etc...
3.2 La radiothérapie
3.2.1 Méthodes d'irradiation
3.2.1.1 Irradiation externe
on dispose du Cobalt 60, du Bétatron et des accélérateurs linéaires. Les champs et la dosimétrie doivent être précis. Durant l'irradiation, l'enfant est mis en confiance, pour rester immobilisé. Chez le petit, on peut être amené à faire une prémédication voire une courte anesthésie.
3.2.1.2 Irradiation interne
elle permet une irradiation tumorale précise épargnant davantage les tissus sains. On utilise actuellement des fils d'iridium.
3.2.2 Les indications
A l'exception d'une irradiation corporelle totale dans la préparation à une transplantation médullaire en allogreffe, la radiothérapie est un traitement local. Elle est rarement utilisée seule mais le plus souvent associée à la chirurgie ou à la chimiothérapie. Elle est réalisée après la chirurgie dans un champ qui correspond au lieu de la tumeur primitive avec une marge de sécurité. Elle complète un traitement par chimiothérapie ou par chirurgie. Elle peut être antalgique sur des métastases.
3.2.3 Surveillance et incidents de la radiothérapie
L'irradiation peut être réalisée sans hospitalisation mais certains incidents sont possibles (réactions cutanées, pancytopénie, syndrome coeliaque).
3.2.4 Séquelles particulières de l'irradiation chez l'enfant
Ces séquelles devraient nous rendre prudent dans les indications et les champs d'irradiation.
3.2.4.1 Les os
- modifications des textures de l'os. L'os a un aspect moucheté avec des zones d'hypercalcification, d'ostéoporose (lésions de radionécrose) donnant un os fragile difficile à consolider en cas de fracture.
- ralentissement de la croissance due à l'irradiation des cartilages fertiles :

    * au niveau de la colonne vertébrale, les scolioses sont importantes si l'irradiation n'est pas symétrique ; sinon, elle est modérée mais favorisée par les radiolésions des muscles adjacents. La cyphose est plus fréquente. Ces lésions peuvent s'aggraver à la puberté et nécessiter une kinésithérapie et des mesures orthopédiques.
    * os longs : le raccourcissement est inesthétique aux membres supérieurs et très gênants aux membres inférieurs.

3.2.4.2 Parties molles
Les scléroses et les atrophies favorisent les séquelles orthopédiques.
3.2.4.3 Systèmes nerveux
Des radionécroses cérébrales et des séquelles neuropsychiques peuvent survenir après des irradiations de 50 à 55 gys. Les conséquences de l'irradiation sont graves avant l'âge de 4 ans.
3.2.4.4 Glandes endocrines
- l'hypophyse : des insuffisances hypophysaires sont classiques après 30 gys. On constate une cassure de la courbe de taille et on trouve une absence de somathormone. Ces enfants peuvent bénéficier d'un traitement par l'hormone de croissance.
- la thyroïde : il s'agit souvent d'insuffisance thyroïdienne biologique avec un taux de TSH augmenté. Cela survient après une irradiation du cou.
- les gonades :

    * Au niveau de l'ovaire, une dose de 10 à 12 gys entraîne une castration. C'est pourquoi, lorsqu'on prévoit une irradiation abdominale, il est sage de transposer l'ovaire en le plaçant en dehors du champ d'irradiation.
    * Au niveau du testicule, une irradiation permet une puberté mais l'azoospermie est définitive.

3.2.4.5 D'autres séquelles peuvent se rencontrer
comme chez les adultes, spécifiquement liées à l'organe : oeil, poumons, coeur, intestin, foie, reins. Des cancers secondaires sur les zones irradiées sont possibles.
3.3 La chimiothérapie
La chimiothérapie a bouleversé le traitement des cancers de l'enfant. Son efficacité dépend de la pénétration des drogues dans la cellule et elle est limitée par la tolérance des tissus sains.
3.3.1 Administration des drogues
De nombreux produits sont utilisés et leur manipulation n'est pas toujours aisée. Les posologies sont diminuées d'un tiers de dose chez l'enfant de moins de un an.
Les chimiothérapies avec une drogue unique sont moins efficaces que les polychimiothérapies. La chimiothérapie est indiquée :
# dans les formes cliniquement métastatiques,
# dans les métastases dites infracliniques,
# sur la tumeur primitive, permettant une régression avant la chirurgie. L'exemple typique est le néphroblastome. Le lymphome se traite essentiellement par chimiothérapie.
# leucémie.
3.3.2 Les complications
La toxicité des drogues nécessite une surveillance médicale constante et avertie. Nous n'envisageons pas les toxicités propres à chaque drogue.
3.3.2.1 Complications hématologiques
- anomalies de la numération sanguine : leucopénie, anémie, thrombopénie. Actuellement, dans certains cas, la prescription de facteurs de croissance hématopoïétique (G-CSF, GM-CSF) permet de faire passer un cap aigu de neutropénie sévère avec infection. Ces facteurs n'ont pas d'action sur le taux de plaquettes.
- une numération est indispensable avant chaque cure.
3.3.2.2 Alopécie
Elle régresse à l'arrêt du traitement.
3.3.2.3 Troubles digestifs
- vomissements et nausées accompagnent de nombreuses chimiothérapies. De nouveaux antiémétiques sont actuellement efficaces.
- l'anorexie dans les 8 à 10 jours après la cure.
- ulcérations buccales.
3.3.2.4 Complications locales
Elles sont dues à la causticité des drogues.
3.3.2.5 Complications allergiques
3.3.2.6 Erreurs de dosage thérapeutique
Dès que l'erreur est connue ou suspectée, l'enfant doit être mis en secteur hospitalier. La prévention de ces erreurs ne peut être faite que par une prescription claire du médecin et l'injection de la drogue par une infirmière bien avertie.
3.3.2.7 Complications infectieuses
Leur fréquence augmente avec l'intensité des chimiothérapies. Elles sont liées à l'immunosuppression :
# infections bactériennes en cas de neutropénies,
# infections parasitaires, fongiques ou virales en cas de lymphopénie prolongées (pneumocystis carinii, levures, virus (MU, EBU,....)
# infections virales : certaines maladies virales communes de l'enfant (varicelle, zona, rougeole) peuvent être gravissimes pour l'enfant immuno-déprimé par la chimiothérapie. Il faut prévenir les parents et en cas de contage, s'ils ne sont pas vaccinés, il faut débuter le Zovirax I.V. précocement aux premiers éléments zona-varicelle, ou faire des gammaglobulines standards dès la notion de contage de la rougeole.
3.3.2.8 L'immunosuppression
Elle favorise l'infection et contre-indique les vaccinations par virus ou germes vivants. Une vaccination par anatoxines ou virus tués nécessite un contrôle sérologique. Il ne faut pas oublier de vérifier les vaccinations et au besoin, les faire 6 mois après l'arrêt définitif de la chimiothérapie.
4 Etude des cas particuliers
4.1 Leucémies aiguës
4.1.1 Définition
Il s'agit d'un envahissement médullaire par des cellules malignes dites blastes. Les lignées normales ont disparu.
4.1.2 Diagnostic positif
4.1.2.1 Tableau clinique
Il peut être plus ou moins complet et d'installation variable.
# soit des signes d'insuffisance médullaire qualitative : pâleur, asthénie, fièvre, infection, signes hémorragiques.
# soit des signes de prolifération tumorale : adénopathie, hépatomégalie, splénomégalie, localisation testiculaire et méningée, douleur osseuse. Les douleurs osseuses sont fréquentes réalisant un tableau pseudorhumatismal qu'il ne faut pas confondre avec un rhumatisme articulaire aigu.
4.1.2.2 Tableau biologique
- numération formule sanguine : l'anémie et la thrombopénie sont quasi contantes. Le taux des leucocytes est variable : normal avec inversion de la formule, diminué ou augmenté. Il faut apprécier le nombre de blastes circulants.

- le myélogramme est l'examen indispensable. Il est très riche, envahi avec plus de 90 % de blastes. La forme lymphoblastique est la plus fréquente chez l'enfant (80% des cas). Les autres sont de type myéloblastique ou monoblastique.

- d'autres examens permettront de mieux préciser le type de leucémies (cytochimie, marqueurs immunologiques, caryotype, oncogènes) et de rechercher des signes de gravité pouvant compliquer le traitement (troubles de l'hémostase, métaboliques).
4.1.3 Traitement des leucémies aiguës
La découverte d'une leucémie aiguë impose d'hospitaliser l'enfant, de bien définir le schéma thérapeutique selon la gravité établie à partir des paramètres cités, d'expliquer le traitement aux parents et à l'enfant. Les malades sont traités selon des protocoles et la surveillance réalisée entre le médecin de famille et le centre de traitement.
4.1.3.1 Traitement d'induction

Son but est de détruire les cellules malignes pour obtenir une rémission complète. On parle de rémission complète avec un examen clinique normal, une NFS normale et un myélogramme riche, bien équilibré sans cellule blastique maligne.
Ce traitement initial, toujours commencé dans un service de Pédiatrie spécialisé, varie selon les formes. Les leucémies sans critère de gravité reçoivent une chimiothérapie peu aplasiante. Par contre, les leucémies aiguës avec critères de gravité (leucémies aiguës lymphoblastiques dites graves et les leucémies aiguës non lymphoblastiques) sont traitées avec des chimiothérapies lourdes responsables d'aplasies prolongées nécessitant un environnement "protégé". Les leucémies promyélocytaires se compliquent à la phase initiale d'une CIVD.
La prophylaxie neuroméningée débute précocément avec des chimiothérapies intra rachidiennes et parfois ultérieurement une irradiation de l'encéphale (18 gys) car les drogues faites par voie générale diffusent peu dans le système nerveux central.
4.1.3.2 Traitement au long cours

Une fois l'enfant en rémission complète, on effectue un traitement d'entretien et des réinductions avec les drogues qui ont permis d'obtenir la rémission complète. Les réinductions s'effectuent en hôpital de jour.

Plusieurs problèmes vont se poser durant ce traitement :
- adaptation du traitement d'entretien. Ce traitement d'entretien est réalisé sous la surveillance du médecin traitant. Les injections sont faites par une infirmière à domicile. Avant chaque injection, on effectue une numération formule sanguine (NFS). Ainsi, la cure peut être faite si l'enfant va bien et que la NFS est bonne ; par contre, elle est reportée si l'enfant a un épisode infectieux intercurrent ou s'il existe un cytopénie.

- survenue d'un épisode fébrile. La survenue d'un épisode fébrile nécessite un examen clinique complet et une NFS. Si la NFS est normale, il faut avoir le même comportement qu'avec un autre enfant. Si la NFS est anormale, il existe deux possibilités :

    *
      soit une neutropénie, isolée ou associée à une atteinte des autres lignées. Dans ce cas, il faut se méfier d'une infection bactérienne et ne pas hésiter à mettre l'enfant sous antibiotiques même s'il n'existe pas de foyer. En fonction de la nature de la chimiothérapie, il est possible de prévoir la durée de la cytopénie.
    *
      soit une lymphopénie : dans ce cas, il faut craindre une immunosuppression importante et évoquer une surinfection virale, mycosique ou parasitaire. Sur ces terrains, les pneumopathies ou les encéphalites peuvent entraîner la mort.

- transfusion de plaquettes si taux inférieur à 20 000 mm3.

- dépister une rechute. L'enfant en rémission risque une rechute notamment durant les cinq premières années et il faut un recul important avant de parler de guérison.

    *
      il peut s'agir d'une rechute médullaire dépistée devant des symptômes décrits à la phase initiale ou à l'occasion d'un myélogramme fait devant une anomalie de la NFS;
    *
      il peut s'agir d'une rechute localisée, méningée ou testiculaire. La rechute méningée est diagnostiquée à la ponction lombaire faite devant toute céphalée ou signe neurologique telle une paralysie des nerfs crâniens. Parfois, c'est une prise de poids importante qui dépiste une atteinte neuroméningée. La rechute testiculaire est caractérisée par une augmentation du volume, indolore d'un testicule.

- l'espérance de vie. Une fois en rémission, les enfants retournent à l'école. Il faut craindre la rougeole et la varicelle. Les parents nous préviennent s'il existe une épidémie à l'école ou dans l'entourage. Le traitement est arrêté ou bout de 3 ou 4 ans. les résultats globaux donnent 65 % d'espoir de guérison.
4.1.3.3 La greffe médullaire
L'allogreffe médullaire allogénique représente un nouvel espoir mais nécessite une parfaite identité HLA entre le donneur et le receveur.
4.2 Tumeurs cérébrales

Le diagnostic repose d'abord sur la symptomatologie clinique variant avec chaque localisation. L'examen tomodensitométrique crânien doit être effectué dès le moindre doute. L'IRM précise la topographie tumorale.
4.2.1 Tumeurs de la fosse postérieure
4.2.1.1 Tumeurs du cervelet et du IVème ventricule

- les signes cliniques : l'hypertension intracrânienne est le signe dominant : céphalées, vomissements, obnubilations. Chez le nourrisson, l'augmentation du périmètre crânien est le premier symptôme. Les signes neurologiques sont plus discrets : torticolis permanent, syndrome cérébelleux.
- la chirurgie : elle suit le diagnostic en urgence. L'exérèse doit être aussi complète que possible mais les risques opératoires sont de l'ordre de 10%. En cas d'astrocytome, si l'exérèse est totale, on ne fait aucun traitement complémentaire ; sinon, on effectue une irradiation. Les médulloblastomes nécessitent toujours une irradiation post-opératoire. Le taux de guérison est de 40 %. Des séquelles sont possibles : déficits neurologiques, troubles endocriniens, retards intellectuels.
4.2.1.2 Les tumeurs du tronc cérébral
Il s'agit de gliomes infiltrants.
- clinique : les signes neurologiques dominent, marqués par une paralysie des nerfs crâniens. L'atteinte des voies longues avec des troubles sensitifs et moteurs est d'importance variable.
- traitement : la radiothérapie reste le seul traitement mais est très décevante. La survie est de 15 %.
4.2.2 Les tumeurs sus-tentorielles
4.2.2.1 Tumeurs de la ligne médiane
Elles comprennent les gliomes des voies optiques et du plancher du IIIème ventricule, les tumeurs de la région pinéale et les crâniopharyngiomes.
4.2.2.2 Tumeurs des noyaux gris centraux
4.2.2.3 Tumeurs des hémisphères
Les crises convulsives sont fréquentes, souvent partielles.
4.3 Tumeurs abdominales
Une tumeur abdominale peut être bénigne ou maligne. Les tumeurs malignes sont dominées par le néphroblastome et le neuroblastome.
4.3.1 Conduite à tenir
4.3.1.1 Symptômes
Le plus souvent, il s'agit de la découverte d'une tumeur par les parents ou par le médecin lors d'un examen systématique. Il faut en préciser la forme, le siège, la consistance. La palpation est complétée d'un toucher rectal. Ces tumeurs sont fragiles et doivent être palpées le moins possible. La notion de "gros ventre" rapportée par la maman doit être prise au sérieux et ne pas être mise sur le compte d'une "hypotonie des grands droits". Une échographie abdominale permet de faire des diagnostics précoces et très souvent rassurer la maman.
4.3.1.2 Biologie
Il faut doser systématiquement l'alpha-foetoprotéine sérique, les catécholamines urinaires et des hormones si certains symptômes orientent vers une tumeur sécrétante des glandes endocrines.
4.3.1.3 Examens d'imagerie
- ASP face et profil,
- échographie précisant la taille et le siège de la tumeur,
- UIV avec des clichés de face et de profil,
- le scanner abdominal n'apporte pas plus de renseignements que l'échographie. Par contre, l'IRM précise bien les caractères et l'extension de la tumeur.

Au terme de ces examens simples, on peut conclure à une tumeur intra ou rétropéritonéale et dans ce dernier cas à un néphroblastome ou à un neuroblastome. Rappelons qu'une tumeur intrapéritonéale est bien souvent le fait d'un lymphome qui atteint plus souvent le garçon (3 garçons pour 1 fille) entre 6 et 10 ans. Ces lymphomes sont de type B et la chimiothérapie permet 90% de guérison tous stades confondus.
4.3.2 Tumeurs rétropéritonéales
4.3.2.1 Le néphroblastome (tumeur de Wilms)

- Signes cliniques : la tumeur cliniquement évidente est quasi constante, donnant le contact lombaire. L'hématurie existe dans 20 % des cas. Certaines malformations sont significativement associées au néphroblastome : l'aniridie, une hémi-hypertrophie corporelle, une viscéromégalie.

- Radiologie : l'ASP montre une opacité tumorale et rarement des calcifications. L'échographie et le scanner précisent le siège rénal de la tumeur et sa taille et recherchent un envahissement de la veine cave inférieure. L'UIV ou les clichés standards de face et de profil après angio scanner montrent des déformations et une désorganisation pyélocalicielle. Dans 10 % des cas, le rein est muet.

- Le diagnostic différentiel se pose avec le neuroblastome, le kyste multiloculaire et l'épithélioma à cellules claires du rein.

- Bilan d'extension tumorale : il comprend une radiographie pulmonaire de face et de profil à la recherche de métastases. La mise en évidence de métastases hépatiques est plus difficile.

- Le traitement comporte toujours une chimiothérapie pré-opératoire puis une néphrectomie suivie d'une chimiothérapie post-opératoire avec ou sans irradiation selon l'extension locorégionale. L'existence d'une atteinte ganglionnaire histologique est péjorative.

- Surveillance : le risque majeur est la survenue de métastases pulmonaires dépistées par des radiographies systématiques toutes les six semaines la première année, tous les trois mois la deuxième année et la troisième année, puis tous les six mois les deux années suivantes. On surveille également par échographie le rein controlatéral. La survie globale est de 80 %.
4.3.2.2 Le neuroblastome rétropéritonéal

Les neuroblastomes sont des tumeurs sympathiques provenant des cellules de la crête neurale formant les ganglions sympathiques et la médullosurrénale. Elle peuvent siéger à tous les étages. Elles ont tendance à former des prolongements dans les trous de conjugaison vers le canal rachidien et se révéler par une compression médullaire. Leurs localisations les plus fréquentes sont : la gouttière thoracique latéro-vertébrale, la médullosurrénale et les chaînes sympathiques et lombaires. Après l'âge de 1 an, le neuroblastome est métastatique d'emblée dans 50 % des cas.

Nous n'étudierons ici que le neuroblastome rétro-péritonéal développé aux dépens de la médullosurrénale.
- Clinique : il est découvert soit devant une tumeur abdominale de volume variable, dure et bosselée, aux limites imprécises, soit devant une compression médullaire. Les formes métastatiques après l'âge d'un an se révèlent par une fièvre prolongée, des algies diffuses avec un syndrome inflammatoire.

- Radiologie : l'ASP montre des calcifications poudreuses dans la moitié des cas. A l'UIV, le rein est refoulé vers lebas, les calices prenant une situation horizontale. L'échographie et le scanner précisent aussi le siège extra-rénal de la tumeur et ses dimensions.

- Biologie : il existe une augmentation de l'élimination urinaire des cathécholamines, des HVA et VMA et de la dopamine dans 95 % des cas.

- Scintigraphie à la MIGB : elle montre une fixation de la tumeur ou des métastases. Cet examen est très sensible et spécifique.

- Bilan d'extension : la diffusion métastatique est fréquente après l'âge d'un an. Le bilan comporte myélogrammes, biopsies osseuses, échographie et scintigraphie à la MIBG. Avant traitement une biopsie permettra de rechercher en biologie moléculaire une amplification de l'oncogène N-myc.

- Le traitement : dans les formes peu évoluées, on effectue d'abord une exérèse chirurgicale suivie de chimiothérapie. Dans les formes inopérables d'emblée, ou métastatiques, on commence par une chimiothérapie, puis une exérèse suivie d'une chimiothérapie avec ou sans irradiation. Pour les formes métastatiques chez les enfants de plus d'un an, on propose un conditionnement lourd avec autogreffe de moëlle.

- Résultats : la survie globale est faible. Les facteurs de bon pronostic sont les formes localisées, extirpables et le jeune âge de l'enfant. En effet, les enfants âgés de moins d'un an, même avec une tumeur disséminée, ont un bon pronostic s'il n'existe pas d'amplification de l'oncogène N-myc.
5 Les problèmes humains
Les problèmes humains concernent l'équipe soignante, les parents et l'enfant. Ceci est lié à la notion de cancer, souvent vécue comme une fatalité, l'agression thérapeutique subie par l'enfant, les perturbations familiales entraînées et le risque parfois imprévisible d'une rechute. Ceci nécessite une confiance permanente entre l'enfant, ses parents et l'équipe soignante.
5.1 Diagnostic et premier traitement

Lorsque le diagnostic de cancer est certain, on l'annonce aux parents en adaptant les explications à leur niveau de compréhension. Le traitement est expliqué ainsi que les complications qui peuvent survenir, de sorte qu'ils ne seront pas surpris de ce qui pourra arriver. Il est souvent nécessaire de répéter plusieurs fois les mêmes explications. De même, il faut prévenir l'enfant de la gravité de sa maladie, avec des mots adaptés à l'âge sans forcément rentrer dans les détails : toujours donner un élément de réponse aux questions posées par l'enfant, toujours expliquer le traitement.
5.2 La rémission

Les parents ressentent un énorme soulagement au point, parfois, de ne plus penser à la gravité de la maladie. C'est dire la nécessité d'une bonne confiance pour poursuivre le traitement qui très souvent rendra l'enfant malade. Le rôle du médecin est de favoriser la réinsertion de l'enfant à l'école. Le petit enfant accepte bien son traitement mais chez le grand enfant, près de l'adolescence, la chimiothérapie entraîne souvent une révolte. La fin du traitement est souvent une étape difficile à franchir entre la joie d'échapper aux désagréments du traitement et la peur de voir disparaître cette protection.
5.3 Les rechutes et la mort

Lorsqu'il n'y a plus de possibilités thérapeutiques, on prévient les parents dont l'attitude est variable, certains souhaitent un soulagement de l'enfant, d'autres demandant des nouveautés thérapeutiques. Le rôle du médecin sera d'éviter à l'enfant des traitements douloureux et inutiles et de savoir prendre en charge l'enfant jusqu'à sa mort ; soit à l'hôpital, soit au domicile. Il ne faut pas hésiter à prescrire des antalgiques majeurs (morphines). Il ne faut pas laisser seul un enfant qui va mourir. Après la mort, la plupart des parents surmontent cette épreuve mais le couple est souvent perturbé. Les frères et soeurs assument cela très mal. Déjà durant la maladie, ils se sont sentis un peu délaissés et après la mort, ils ont le sentiment d'avoir tout perdu.
5.4 La guérison et l'avenir

Un enfant sur deux guérit du cancer. Il faudra un jour lui annoncer la nature de sa maladie. Dans certains cas, il le savait déjà et dans d'autres, il s'en doutait. Les séquelles physiques sont très variables quand il y en a : amputations, séquelles de la radiothérapie entraînant une modification de l'image corporelle. Les séquelles gonadiques sont mal vécues, notamment la stérilité, c'est pourquoi il importe non seulement de guérir les enfants mais de leur apporter une qualité de vie en supprimant les séquelles qui rappellent toujours le cancer.
Pour beaucoup, une vie normale sociale, professionnelle et familiale est possible. L'insertion professionnelle se fera d'autant mieux que leur scolarité aura été bonne.
Rhumatisme articulaire aigu
(maladie de Bouillaud)
E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 7 mars 2000

Objectifs
1 Pathogénie
2 Forme articulaire aiguë habituelle de l'enfant
2.1 Syndrome articulaire
2.2 Syndrome général
3 Fomes cliniques
3.1 Formes selon l'âge
3.2 Formes articulaires
3.3 Formes cardiaques
3.4 Formes cutanées
   

3.5 La chorée
3.6 Autres formes cliniques
4 Examens complémentaires
4.1 Signes inflammatoires non spécifiques
4.2 Recherche d'infection streptococcique
5 Diagnostic différentiel
6 Evolution et pronostic
7 Traitement
7.1 Traitement curatif de la crise
7.2 Traitement prophylactique
Objectifs
1. Décrire les signes cliniques de la polyarthrite du R.A.A.

2. Décrire les manifestations cardiaques du R.A.A. (cf. aussi cardiologie).

3. Enumérer et décrire les manifestations de la maladie inflammatoire post- streptococcique (MIPS).

4. Indiquer et interpréter les examens de laboratoire à pratiquer lors d'une MIPS.

5. Rédiger le traitement d'une crise de R.A.A.

6. Indiquer les principes de la prophylaxie du R.A.A. et préciser leurs modalités d'application.

Le rhumatisme articulaire aigu (R.A.A.) est une maladie inflammatoire secondaire à une infection à streptocoques bêta-hémolytiques du groupe A. La gravité de la maladie est liée aux localisations cardiaques. Beaucoup plus rare qu'autrefois dans les pays développés, il reste fréquent dans les départements et territoires d’Outre-Mer et dans les pays en voie de développement. Sa gravité est liée aux complications cardiaques.
1 Pathogénie
Le R.A.A. est une affection auto-immune et on considère que les principales cibles, articulaires et cardiaques, résultent d’une analogie de structure entre le streptocoque b-hémolytique du groupe A et ces tissus. Le type de la protéine M du streptocoque joue un rôle important dans le déterminisme des réactions.
2 Forme polyarticulaire aiguë habituelle de l'enfant
Elle survient 1 à 3 semaines après une angine, une pharyngite, une scarlatine non ou mal traitée. Le début est progressif (état sub-fébrile, douleurs erratiques), ou brutal (frissons, fièvre, troubles digestifs). Le tableau associe un syndrome articulaire et un syndrome général.
2.1 Syndrome articulaire
L'atteinte articulaire est inflammatoire : tuméfaction rouge et chaude, douleur à maximum péri-articulaire au niveau des régions d'insertion ligamentaire et tendineuse permettant théoriquement une mobilisation passive. Elle siège avant tout sur les grosses articulations des membres, genoux, tibio-tarsiennes, coudes et poignets. Cette arthrite rhumatismale est remarquable par ses caractères évolutifs :

    * la mobilité capricieuse et irrégulière (plusieurs articulations sont touchées en même temps, l'une se libérant tandis qu'une autre est touchée et chaque atteinte dure 3 à 8 jours).
    * La guérison sans séquelle et la remarquable action des salicylés.

2.2 Syndrome général
La fièvre est constante, élevée (supérieure à 39°), irrégulière avec des crochets contemporains de chaque poussée articulaire. Sa persistance est un bon signe d'une résolution imparfaite de la maladie. Elle s'accompagne d'une pâleur, de sueurs aigrelettes et de troubles digestifs faits de vomissements et de douleurs abdominales. L'examen complet recherchera une atteinte cardiaque, des signes cutanés et des mouvements choréiques. Les examens paracliniques montrent un syndrome inflammatoire et une infection streptococcique récente. L'évolution après traitement, est en règle générale, favorable.
3 Formes cliniques
3.1 Formes selon l'âge
L'incidence du R.A.A. est liée à l'épidémiologie des infections streptococciques de la sphère O.R.L. Le R.A.A. survient généralement entre 5 et 10 ans avec un pic à 6-8 ans. Il est exceptionnel en-dessous de 3 ans.
3.2 Formes articulaires
Elles comprennent deux groupes : les formes frustres et les formes atypiques par leur localisation.
Les formes frustres se caractérisent par la discrétion de l'atteinte et par le petit nombre d'articulations touchées (mono ou oligo-articulaires). Les formes atypiques par leur localisation concernent les doigts et le rachis (torticolis, rhumatisme cervicosciatique de Nobécourt). Ces formes ont un grand intérêt car elles exposent aux mêmes complications cardiaques.
3.3 Formes cardiaques ( cf. également cardiologie)
La cardite rhumatismale est un critère majeur. Elle règle le pronostic de la maladie, soit dans l'immédiat par l'atteinte isolée ou simultanée des tuniques du coeur, soit à l'avenir du fait de séquelles définitives graves. Elle survient classiquement vers le 6ème- 15ème jour de la crise mais c'est variable, pouvant survenir d'emblée ou vers la 3ème-4ème semaine.

La cardite s'installe le plus souvent à bas bruit et son diagnostic repose sur la surveillance répétée du coeur de tout rhumatisant : auscultations biquotidiennes, radiographies et E.C.G et surtout échographies. Pour des raisons de commodité, nous décrirons successivement l'atteinte de chaque tunique :

- la péricardite : il s'agit d'une péricardite "sèche" ou d'un épanchement modéré. Le tableau clinique associe des douleurs précordiales et un frottement péricardiaque. Sur la radiographie du thorax, le volume du coeur est modérément augmenté. L'E.C.G. montre un mivrovoltage et des troubles de la repolarisation. L’échographie apprécie l’importance du liquide.
- l'endocardite se traduit par un assourdissement des bruits du coeur et l'apparition de souffles. Un souffle diastolique signe pratiquement l'insuffisance aortique ; un souffle systolique, toujours difficile à interpréter, évoque une insuffisance mitrale. Intérêt de l’échographie.
- la myocardite peut se traduire par une tachycardie, un assourdissement global des bruits, un galop présystolique ou signes d'asystolie. Le plus souvent, la myocardite se traduit par des signes électriques : troubles de la conduction auriculo-ventriculaire, anomalies des complexes ventriculaires et troubles du rythme. Dans les formes graves, toutes les tuniques peuvent être atteintes simultanément ou successivement.
3.4 Formes cutanées : érythèmes et nodosités sous cutanées
- Les érythèmes se rencontrent dans 10 à 15 % des cas. L'érythème marginé en plaques discoïdes de Besnier est fait de macules rosées, arrondies ou ovulaires, de 1 à 3 cm de diamètre, de coloration plus pâle au centre, siégeant sur le tronc et la racine des membres. L'érythème annulaire de Loëhndorf est constitué d'anneaux rosés entourant un centre de peau saine. Un érythème noueux est rare.
- Les nodosités sous-cutanées d'Aschoff doivent être recherchées méthodiquement : éléments sous-cutanés, fermes, de 0,1 à 1 cm de diamètre, n'adhérant pas et siégeant à la face d'extension des coudes, des genoux et des poignets, sur la région occipitale et au niveau des apophyses épineuses dorsolombaires.
3.5 La chorée
Elle est le plus souvent isolée, sans signes cliniques associés et sans syndrome inflammatoire. L'intervalle entre la chorée et les autres manifestations qui précèdent ou qui suivent, varie de 2 mois à plusieurs années. Elle survient généralement chez les filles dans la période de la pré-puberté. Le début est insidieux : troubles de caractère, diminution du rendement intellectuel et maladresse. Il précède la survenue de mouvements choréiques.
3.6 Autres formes cliniques
Elles sont rares : pleurésie, pneumopathie rhumatismale, syndrome abdominal pseudochirurgical et albuminurie.
4 Examens complémentaires
Ils portent sur la recherche de signes d'inflammation et de signes spécifiques d'atteinte strecptococcique.
4.1 Signes inflammatoires non spécifiques
La vitesse de sédimentation est accélérée. La CRP, la fibrine et les gammaglobulines sont élevées. L'hémogramme montre une anémie modérée et une hyperleucocytose (10 à 15 000 GB) avec polynucléose neutrophile.
4.2 Recherche d'infection streptococcique
L’existence d’une infection streptococcique récente a une grande valeur :

    * notion d’angine ou pharyngite récente.
    * le prélèvement pharyngé est rarement positif au stade rhumatismal.
    * élévation des anticorps antistreptococciques : ASLO et antistreptodornases. L'interprétation est délicate sur un seul résultat.

5 Diagnostic différentiel
Il n'existe pas de signe clinique ni biologique pathognomonique de la maladie. Jones a proposé un certain nombre de critères, les uns majeurs (cardite, polyarthrite, nodules sous-cutanés, érythème marginé et chorée) et les autres mineurs (fièvre, arthralgies, antécédent de R.A.A., augmentation de la vitesse de sédimentation). Pour affirmer le diagnostic, Jones a proposé deux critères majeurs ou un critère majeur et deux mineurs, plus des arguments en faveur d’une infection à streptocoque récente.
Le diagnostic différentiel est envisagé avec celui de l'arthrite chronique juvénile (cf. cours suivant). Au moindre doute et avant toute corticothérapie, il faut pratiquer un myélogramme.
6 Evolution et pronostic
Le pronostic est lié à la survenue et la persistance d'une atteinte cardiaque. Dans l'immédiat, la cardite est rarement sévère au point d'entraîner la mort, mais au contraire, elle évolue favorablement sous corticothéraphie. La péricardite guérit sans séquelles, la myocardite régresse mais l'endocardite est plus capricieuse. Les souffles diastoliques sont en règle, définitifs ; les souffles systoliques disparaissent dans un bon nombre de cas mais il est hasardeux d'affirmer l'intégrité du coeur avant plusieurs années. L'évolution ultérieure est dominée par la possibilité de rechutes qui ne devraient plus se voir grâce à un traitement prophylactique au long cours bien conduit et par la possibilité d'endocardite d'Osler à cause des séquelles valvulaires.
Les manifestations choréiques disparaissent en quelques semaines ou mois, mais des troubles psychologiques ont été rapportés.
Les rechutes sont fréquentes si un traitement prophylactique n'est pas fait. Le risque d'atteinte rhumatismale suivant une infection streptococcique est 10 fois plus élevé chez les patients qui ont eu une première poussée de R.A.A. que dans la population générale.
7 Traitement
Il doit être curatif et préventif.
7.1 Traitement curatif de la crise
Il associe le repos au lit, une antibiothérapie et des anti-inflammatoires.

- Le repos au lit est indispensable et le lever est autorisé progressivement à partir de 3 semaines. En cas d'atteinte cardiaque, il est strict et maintenu pendant 3 mois.
- Les antibiotiques : la Pénicilline est le meilleur antibiotique contre le streptocoque. Elle est donnée à forte dose les 10 premiers jours en intra-veineux, à la dose de 1 à 2 millions U/24 heures. Elle est poursuivie ensuite pour empêcher les rechutes et les récidives.
- Les anti-inflammatoires : la corticothérapie est prescrite à la posologie de 2 à 2,5 mg/kg/24 heures pendant 4 semaines : si l'examen clinique et la vitesse de sédimentation sont redevenus normaux depuis au moins une semaine, la posologie est lentement diminuée ; cette diminution s'étale sur 2 semaines. Pour diminuer le risque de rebond à l'arrêt de la corticothérapie, on propose un relai à l'Aspirine (5cg/kg/jour) commencé deux semaines avant et poursuivi deux semaines après l'arrêt de la corticothérapie. A ce stade du traitement, la surveillance ne doit pas être relachée pour dépister une nouvelle poussée éventuelle.
- A côté de ce traitement de toutes les formes, on peut être amené à traiter une éventuelle défaillance cardiaque initiale.
7.2 Traitement prophylactique

- Prophylaxie anti-microbienne continue pour éviter les rechutes (en raison de l’absence d’immunité entre les différentes souches rhumatogènes). Elle consiste en l'administration continue de Pénicilline Retard (Extencilline), toutes les 2 ou 3 semaines en IM (600 000 U chez l'enfant et 1 200 000 U chez l'adolescent). Elle peut être remplacée par des prises orales quotidiennes de Pénicilline V (Oracilline) à condition d'être assuré de la prise régulière. Ce traitement doit être poursuivi au moins pendant 5 ans et de toute façon couvrir la période pubertaire. Il est recommandé de traiter les adultes jeunes particulièrement exposés : service militaire, enseignants. L'antibiothérapie sera renforcée lors de toute infection de la sphère O.R.L. ou des voies respiratoires. La nécessité de prolonger le traitement pendant plusieurs années explique la nécessité de respecter certains critères pour le diagnostic. La décision dans les cas douteux peut être difficile. En cas d'intolérance vraie à la Pénicilline, on aura recours à un macrolide.
- Eradication des foyers infectieux streptococciques. Cette éradication comporte l'amygdalectomie si les amygdales sont infectées ou en cas d'angines fréquentes, les soins dentaires et le traitement des sinusites. Après une amygdalectomie, il peut être difficile de reconnaître une infection streptococcique de la gorge. En cas de persistance de streptocoque hémolytique dans la gorge, il faut rechercher dans l'entourage.
- La prévention de la première attaque constitue en fait la véritable prophylaxie du R.A.A. Elle consiste à traiter systématiquement toutes les angines et les pharyngites de l'enfant de plus de 3 ans par la Pénicilline orale (Oracilline) pendant 10 jours. Certains recommandent de pratiquer des examens systématiques du rhume pharyngé dans l'entourage de tout enfant atteint de R.A.A., à la recherche de streptocoque et le traitement préventif (famille, classe), systématique des porteurs.

Bibliographie : L. DAVID, Arch. Ped., 1998, 5, 681-6.
Arthrite chronique juvénile
E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 7 mars 2000

Objectifs
1 Classification
2 Formes cliniques
   

2.1 Formes oligoarticulaires (50% des cas)
2.2 Formes polyarticulaires (30% des cas)
2.3 Formes systémiques (20% des cas)
Objectifs
1. Citer les trois formes cliniques de l'arthrite chronique juvénile (ACJ).

2. Décrire les signes cliniques et biologiques ainsi que l'évolution de la maladie de Still.

3. Décrire l'évolution des signes radiologiques au niveau de la main d'un enfant atteint d'ACJ.

4. Décrire et interpréter les résultats des examens biologiques dans l'ACJ.

5. Enumérer les signes extra-articulaires dans les ACJ.

6. Rédiger le traitement à la phase initiale de la maladie.

7. Enumérer les avantages et les inconvénients des différents anti-inflammatoires dans le traitement de l'ACJ.

8. Justifier l'intérêt et expliquer les modalités d'application de la rééducation dans cette maladie.

L'arthrite chronique juvénile (ACJ) est la première cause des rhumatismes de l'enfant. Elle correspond à un groupe de maladies caractérisées par une atteitne articulaire inflammatoire isolée ou associée à des manifestations extra-articulaires. L'étiologie est inconnue. L'incidence, plus fréquente dans les pays nordiques, est estimée à 10 pour 100 000 enfants de moins de 16 ans. L'ACJ est un ensemble pathologique complexe dont le diagnostic est souvent difficile et la prise en charge multidisciplinaire.
1 Classification
La classification tient compte de divers éléments : l'âge inférieur à 16 ans, l'atteinte articulaire durant au moins trois mois. Il existe 3 formes cliniques selon le mode de début : oligoarticulaires, polyarticulaires et maladies systémiques.
2 Formes cliniques
2.1 Les formes oligoarticulaires (50 % des cas)
2.1.1 Clinique
Elles se caractérisent par une atteinte de 4 articulations au maximum : souvent symétriques, peu douloureuses et touchant surtout les grosses articulations (chevilles, genoux, poignets). L'articulation gonflée est non ou peu inflammatoire, peu douloureuse, avec présence d'un épanchement liquidien facile à reconnaître. Il s'agit souvent d'une monoarthrite initiale touchant les genoux dans 75 % des cas au cours des 6 premiers mois.
Le reste de l'examen clinique général est normal et l'enfant est apyrétique. Par principe, il faut rechercher des signes d'atteintes oculaires soit par la clinique (larmoiements, rougeur, gênes visuelles), ou par un examen ophtalmologique à la recherche d'une uvéite avec un effet Tyndall.
2.1.2 Examens complémentaires

Parmi les examens complémentaires, on retient : un hémogramme normal, une VS normale ou modérément accélérée. La recherche des facteurs rhumatoïdes est négative. Par contre, il existe des anticorps antinucléaires dans 30 à 50% des cas ; mais il n'y a pas d'anticorps anti-ADN ni anti-antigène soluble. La ponction articulaire ramène un liquide riche en protéines et en cellules avec un panachage de lymphocytes et de polynucléaires non altérés, sans germe. En cas de doute, on peut être amené à faire une biopsie, non par arthrotomie mais sous arthroscopie, montrant un aspect inflammatoire proliférant non spécifique.

Les signes radiologiques peuvent montrer une infiltration des parties molles ; des troubles de croissance localisés sont possibles avec une accélération et soudure prématurée du cartilage de conjugaison.

On distingue plusieurs sous groupes :
- révélations précoces avant 5 ans (type I). Ces formes se rencontrent surtout chez la fille avant l'âge de 5 ans, avec présence d'anticorps antinucléaires et un risque évolutif d'iridocyclite qu'il faut systématiquement rechercher. Les anticorps anti-histone s'associent volontiers à l'atteinte oculaire. Elles sont peu inflammatoires. On retrouve plus fréquemment le groupage HLA DR4 et DR8.
- révélations tardives (type II). Elles touchent surtout les garçons après l'âge de 10 ans. L'atteinte articulaire siège souvent aux membres inférieurs (orteils en saucisse), associée à des polyenthésopathies (douleurs plantaires, talalgies, tendinite d'insertion). Le gène HLA-B27 est souvent retrouvé. Il pourrait s'agir des premières manifestations des spondylarthropathies.
- autres groupes : non classés dans les groupes précédents, elles évoluent plus fréquemment vers les formes polyarticulaires.
2.1.3 Diagnostic différentiel
- L'infection : devant une monoarthrite, il faut évoquer systématiquement l'arthrite purulente. La ponction ou la biopsie permettront le diagnostic. La tuberculose, bien que rare, doit être évoquée. Le liquide de ponction et le prélèvement de synoviale seront systématiquement ensemencés.
- L'hémarthrose, l'anomalie d'un ménisque, corps étranger.
- Tumeurs osseuses.
- En cas d'atteinte de la hanche, il faut évoquer la synovite aiguë transitoire, l'ostéochondrite ou l'épiphysiolyse.
2.1.4 Traitement
Il repose sur :
2.1.4.1 Les médicaments anti-inflammatoires
Par voie générale, les corticoïdes ne sont pas utilisés. On utilise le plus souvent l'Aspirine à la dose de 80mg/kg/jour en 4 à 6 prises. L'Ibuprofène (20 à 30mg/kg/jour) ou le Diclofénac (2 à 3mg/kg/jour) ou Naproxen à la posologie de 5mg/kg/jour. Ces médicaments sont surtout utiles sur la douleur. En cas de persistance d'un épanchement dans une grosse articulation, la ponction évacuatrice de l'articulation avec injection d'héxatrione de triamcinolone permet dans pratiquement tous les cas un assèchement. Une anesthésie générale peut être nécessaire selon l'âge et l'articulation.
Le traitement d'une atteinte oculaire sera essentiellement local avec une surveillance ophtalmologique : collyres cortisoniques et atropiniques.
2.1.4.2 La kinésithérapie est fondamentale, évitant des attitudes vicieuses
2.2 Les formes poly-articulaires (30 % des cas)
2.2.1 Tableau clinique et biologique
L'âge de début est variable avec une prédominance féminine.
- Les signes articulaires se caractérisent par l'atteinte de plus de 4 articulations. Toutes les articulations peuvent être touchées, généralement à type d'arthrite, de façon symétrique.
- Les signes extra-articulaires sont pauvres. La fièvre peut être présente mais ne décrit pas de grandes oscillations. Le syndrome inflammatoire est variable.
2.2.2 Formes de la maladie
- Formes avec présence de facteurs rhumatoïdes : Elles surviennent surtout chez les filles après l'âge de 10 ans et se manifestent par une polyarthrite symétrique des extrémités puis des grosses articulations. Il semble s'agir d'un début précoce de polyarthrite rhumatoïde de l'adulte. Le pronostic est souvent sévère avec séquelles articulaires (déformation et ankylose). Le traitement de fond se discute précocement.
- Formes sans facteurs rhumatoïdes : on distingue 3 groupes : avec présence d'anticorps anti-nucléaires avec des critères de spondylarthropathie, avec ou sans synovite.
2.2.3 Diagnostic différentiel
Nous évoquerons essentiellement : le rhumatisme articulaire aigu, les arthrites réactionnelles, le lupus systémique, affections hématologiques (leucémies, drépanocytose homozygote).
2.2.4 Traitement
2.2.4.1 Les médicaments
Le traitement a pour but d'agir sur la douleur et l'inflammation.
A la phase initiale, on utilise des AINS. L'aspirine est peu utilisée. Les corticoïdes sont réservés aux formes très inflammatoires et invalidantes.
Les traitement de fond sont indiqués après l'échec des AINS après plusieurs mois d'évolution, à l'exception des formes avec présence de facteurs rhumatoïdes
2.2.4.2 La rééducation
Elle doit être effectuée dès qu'une atteinte articulaire persiste et entraine une tendance aux attitudes vicieuses. Elle est indiquée à tout moment de la maladie même en période de poussée, à condition de ne pas dépasser le seuil de la douleur.
2.3 Formes systémiques (20 % des cas)
Elle s'observe surtout entre 1 et 4 ans.
2.3.1 Tableau clinique
2.3.1.1 Les signes extra-articulaires
- La fièvre est caractéristique de cette forme en décrivant de grandes oscillations entre 37 et 39° au cours de la journée. Au moment de l'acmé thermique, l'enfant est abattu, douloureux, frissonnant. Il reprend un entrain normal dès la chute de la fièvre.
- Des signes cutanés sont présents dans 90 % des cas à type d'érythèmes localisés fugaces ou temporaires des pics fébriles, d'allure pseudomorbiliforme.
- D'autres symptômes peuvent être notés : splénomégalie, adénopathies, et polysérite (péricardite, pleurésie, ascite). La péricardite est présente échographiquement dans 30% des cas.
2.3.1.2 Les signes articulaires
Ils s'observent dans la plupart des cas mais généralement, ils surviennent secondairement, d'abord à type d'arthralgies puis des authentiques arthrites. Leur recherche peut être difficile. Toutes les articulations peuvent être touchées. L'atteinte du rachis cervical se manifeste par un torticolis.
2.3.1.3 Les signes biologiques

Il s'agit d'un grand syndrome inflammatoire avec V.S. accélérée, augmentation de la CRP et de la fibrine ainsi qu'une hyperleucocytose pouvant atteindre 50 000/mm3. Une hypergammaglobulinémie peut être notée. La recherche d'anticorps anti-nucléaires et la sérologie rhumatoïde sont négatives. Le complément est souvent augmenté.
2.3.1.4 Les signes radiologiques

L'imagerie permet de suivre l'évolution et des clichés standards sont en règle suffisants. Les 4 stades de Steinbrocker peuvent être observés au niveau du carpe et du tarse. Il est inutile de répéter systématiquement les examens.
2.3.2 Le diagnostic
Il se pose surtout devant une fièvre inexpliquée. Il s'agit d'un tableau inflammatoire pseudo infectieux avec enquête bactériologique négative.
- présence d'une infection. Il faudra répéter les examens.
- maladie de Kawasaki (cf cours suivant).
- une hémopathie maligne ou un sympathoblastome métastatique.
- maladie sérique (ex-médicamenteuse).
2.3.3 L'évolution
Cette maladie peut se prolonger sur plusieurs années. Au bout de 10 ans, 50 % des enfants sont guéris (30 % n'ont pas de séquelles, 10 % ont des séquelles mineures et 10 % des séquelles sévères) et 50 % sont encore évolutifs systémiques ou polyarticulaires.
Outre les séquelles articulaires dont la prise en charge doit toujours être précoce, des complications sont possibles : amylose, iatrogènes (ostéopénie, retard de croissance).
2.3.4 Le traitement
2.3.4.1 Les médicaments
- Aspirine : ce traitement doit être institué en milieu hospitalier afin d'adapter la posologie. La posologie est de 100 mg/kg/jour, répartie en 6 prises. L'efficacité se juge sur les signes cliniques et le taux de la salicylémie mesurée 2 heures après l'ingestion du médicament ; les taux efficaces sont de 150 à 200 mg/l. Il faut être vigilant et se méfier d'une intoxication médicamenteuse : épistaxis, acouphènes, hépatite cytolytique.
- Les corticoïdes : ils sont utilisés d'emblée en cas de polysérite ou en cas d'échec des salicylés.
- Immunosuppresseurs.
2.3.4.2 La rééducation
Comme dans les cas précédents, elle doit être précoce et régulièrement suivie. Les signes généraux finissent par disparaitre mais les signes articulaires peuvent progresser.

En conclusion : le traitement de l'arthrite chronique juvénile est parfois difficile sur le plan psychologique. Il faut bien prévenir les parents des risques de rechute. La prise en charge doit être multidisciplinaire avec un médecin référent du traitement. Les objectifs thérapeutiques sont : soulager la douleur, contrôler le traitement de fond, prévenir les déformations et les ankyloses, optimiser le confort de vie.

Bibliographie = A.M. Prieur. Rhumatologie Pédiatrique. Médecine-Sciences. Flammarion 1999 pages 119-138
Maladie de Kawasaki
(Syndrome adénocutanéomuqueux)
E. Le Gall

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 7 mars 2000

1 Signes cliniques
1.1 Signes majeurs
1.2 Autres manifestations
2 Diagnostic
2.1 Diagnostic positif
2.2 Diagnostic différentiel
3 Etiologie
   

4 Prise en charge
4.1 Médicaments
4.2 Surveillance
5 Evolution
5.1 Immédiate
5.2 A long terme
6 Pronostic
Objectifs
1. Aspects cliniques de la maladie de Kawasaki.

Le syndrome de Kawasaki a été décrit en 1967 au Japon par Kawasaki sous le nom de syndrome adénocutanéomuqueux. C'est une vascularite fébrile multisystémique dont l'étiologie est inconnue. Elle touche essentiellement l'enfant et le pronostic est essentiellement cardiovasculaire (anévrysme des coronaires). Le diagnostic doit être précoce en raison de l'efficacité des immunoglobulines intraveineuses.
1 Signes cliniques
1.1 Signes majeurs
1.1.1 Fièvre
Rénitente, inexpliquée. Elle dure en moyenne 10 jours en l'absence de traitement.
1.1.2 Conjonctivite
Elle survient la première semaine. La conjonctivite bulbaire est plus importante que la conjonctivite palpébrale. Il n'existe pas d'ulcération de la cornée, ce qui la différencie du syndrome de Stevens-Johnson.
1.1.3 Exanthème polymorphe
Il peut prendre divers aspects : scarlatiforme, multiforme, maculeux, papuleux. Il n'est jamais vésiculeux, ni bulleux. Il varie en caractère selon les endroits du corps. Il accompagne généralement la fièvre.
1.1.4 Enanthème (lésions de la bouche)
- lèvres sèches, rouges, avec une évolution vers la fissuration,
- langue framboisée,
- érythème diffus de la muqueuse oropharyngée.
1.1.5 Lésions des extrémités
- érythème de la paume des mains et de la plante des pieds de façon diffuse,
- oedème induré des mains et des pieds, douloureux,
- desquamation du bout des doigts, durant 1 à 2 semaines.
1.1.6 Adénopathies
- dans la moitié des cas,
- surtout cervicales, parfois unilatérales,
- disparaissent après l'épisode fébrile.
1.2 Autres manifestations
Elles traduisent le caractère systémique de l'affection.
- infection O.R.L.
- arthrite (25% des cas) : elle peut apparaître la première semaine de la maladie impliquant les petites et les grosses articulations. L'arthrocentèse durant cette phase ramène un liquide épais, d'aspect purulent contenant de nombreux leucocytes et sans germe. Lorsque l'arthrite survient au-delà de 10 jours, elle concerne surtout les grosses articulations.
- troubles digestifs (douleurs, diarrhée sévère et vomissements) et parfois ictère.
- atteinte neurologique avec méningite aseptique, uvéite.
- atteinte cardiaque dans 25 % des cas ++. Il s'agit le plus souvent : d'une péricardite, d'une myocardiopathie transitoire avec insuffisance cardiaque et arythmie, d'anévrysmes coronaires ou d'autres artères de survenue parfois précoce. Des infarctus du myocarde sont décrits dans 2 % des cas. A la phase initiale, les enfants doivent être hospitalisés. La surveillance cardiaque est échographique.
2 Diagnostic
2.1 Diagnostic positif
- Il repose essentiellement sur les données cliniques : 5 des 6 critères majeurs sont demandés pour affirmer ce diagnostic. Ce syndrome survient surtout chez le petit enfant : 50 % ont moins de 2 ans et 80 % moins de 4 ans. Il est rare après 12 ans. Toutefois, ce diagnostic peut être évoqué si des critères manquent alors qu'il existe un syndrome inflammatoire et une élévation des plaquettes après une semaine ou un anévrysme des coronaires à l'échographie. En fait, il faut évoquer le diagnostic devant une fièvre qui dure plus de 5 jours sans étiologie infectieuse.

- Absence de signes biologiques spécifiques : hyperleucocytose à neutrophiles, augmentation de la V.S. et de la C.R.P., élévation des plaquettes au bout d'une semaine et pouvant le rester 3 mois. Le syndrome de Kawasaki peut pratiquement être exclu si le taux des plaquettes et la V.S. sont normales après une semaine.
2.2 Diagnostic différentiel
- devant la fièvre : maladie de Still
- devant l'éruption : érythème polymorphe (absence de lésons muqueuses), scarlatine, rougeole, mononucléose infectieuse, maladie sérique (allergie type III), oedème aigu hémorragique.
3 Etiologie
C'est une maladie de l'enfant surtout de moins de 5 ans qui touche plus souvent les garçons que les filles. Elle est fréquente au Japon et en Corée (40 à 150 cas / 100.000 enfants de moins de 5 ans) tandis que chez les Caucasiens, hors du Japon, l'incidence est de 6 à 10 / 100.000 enfants de moins de 5 ans. Une étude anglaise l'estime à 1,5. A partir de cette donnée, on peut estimer que pour la Bretagne, l'incidence est de 6 cas par an.
L'étiologie reste inconnue. Une cause infectieuse est supposée en raison au début, du tableau clinique. On peut supposer que l'agent infectieux est immunisant car il y a peu de manifestations après l'âge de 12 ans et qu'il existe des formes asymptomatiques.
4 Prise en charge
Ceci concerne les malades dont le diagnostic est certain ou supposé.
4.1 Les médicaments
- Gammaglobulines I.V. : Le schéma de perfusion est variable mais la dose recommandée est de 1g/kg/j durant 2 jours ou 2g/kg en une fois.
- Aspirine : 60 à 100 mg/kg/jour jusqu'à la disparition de la fièvre ou au maximum à J14 (action anti inflammatoire) puis de 5 à 10 mg/kg/jour (action anti aggrégante) jusqu'à la normalisation des plaquettes et de la V.S., soit environ 3 mois.
- traitement d'une thrombose coronaire ou d'une insuffisance cardiaque.
4.2 Surveillance
Les patients doivent être hospitalisés pour recevoir leurs gammaglobulines et être surveillés au moins jusqu'à la chute de la fièvre, en particulier à la recherche d'une complication cardiaque. Les anomalies coronaires sont surtout détectées 3 à 4 semaines après le début.
5 Evolution
5.1 Immédiate
Elle est triphasique :

    * phase aiguë fébrile qui dure 8 à 15 jours en l'absence de traitement.
    * phase subaiguë entre 2 et 3 semaines, marquée par la thrombocytose et la desquamation. Il y a risque d'arthrite et d'atteinte cardiaque.
    * convalescence précoce, 3 à 4 semaines, risque de mort brutale par thrombose coronaire.

5.2 A long terme
- Absence d'anomalie des coronaires : arrêt des salicylés au-delà de 3 mois.
- Anévrysmes des coronaires de petite taille ou transitoires :
# Maintien de l'aspirine à la dose de 3 à 5 mg/kg une fois par jour jusqu'à disparition de l'anévrysme et peut-être toujours.
# Surveillance cardiaque annuelle.
- Anévrysme géant supérieur à 8 mm :
# Traitement indéfini par l'aspirine à la dose de 3 à 5 mg/kg une fois par jour.
# Certains proposent des anticoagulants durant 2 ans.
# Surveillance cardiaque rigoureuse.
6 Pronostic
Le risque de cette maladie est essentiellement lié à une atteinte cardiaque. Cette atteinte peut apparaître tôt après le début de la maladie ou des années plus tard.

20 % des malades non traités développent un anévrysme des coronaires entre 7 jours et 6 semaines après le début. Ce risque est abaissé à 3 % si les gammaglobulines sont données dans les 10 jours, mais il est un peu plus élevé chez l'enfant de moins d'un an.

Les patients avec un anévrysme des coronaires sont à risque d'infarctus du myocarde, de mort brutale et d'ischémie myocardique pendant au moins 5 ans. 2/3 des anévrysmes présents à 8 semaines ont régressé au bout d'un an. Les patients à anévrysme géant sont à haut risque de développer une sténose avec ischémie myocardique.

Les rechutes sont rares.

 

Bibliographie : The Journal of Rheumatology - 1990 17 : suppl. 24 1 - 18.
Spondylarthropathies
S. Jean

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 26 avril 1999

1 Classification
1.1 Spondylarthrite ankylosante
1.2 Rhumatisme psoriasique
1.3 Arthrites réactionnelles
1.4 Entérocolopathies cryptogénétiques (Crohn, RCH)
2 Diagnostic positif
2.1 Critères diagnostiques d'Amor
   

2.2 Bilan paraclinique
3 Prise en charge thérapeutique
3.1 Traitement de première intention
3.2 Traitement de fond
3.3 Kinésithérapie +++
3.4 Antibiotiques ?
3.5 Uvéite aiguë
Objectifs
1. Principales caractéristiques des spondylarthropathies

Définition

Concept regroupant les manifestations articulaires observées au cours de :
# spondylarthrite ankylosante,
# rhumatisme psoriasique,
# arthrites réactionnelles,
# maladie de Crohn et RCH.
Caractéristiques :

- Présentation clinique particulière :
# atteinte articulaire,
# atteinte des enthèses (zones d'insertion des ligaments et des tendons de l'os)
- Terrain génétique particulier :
# association au HLA B27 avec une fréquence variable,
# antécédents familiaux.
1 Classification
1.1 Spondylarthrite ankylosante
C'est l'exemple classique des spondylarthropathies.
1.1.1 Particularités
Chez l'enfant, l'atteinte axiale est rare (sacro-iliite, signes rachidiens). L'atteinte articulaire, surtout périphérique, est souvent au premier plan, mono ou pauci-articulaire. Elle touche préférentiellement les membres inférieurs.
1.1.2 Clinique
Garçon (60 à 90%)
Age moyen de début : 10 - 11 ans.
L'atteinte est asymétrique ; l'orteil en saucisse et les talalgies sont évocacrices.
1.1.3 Evolution
Par poussées, impotence fonctionnelle dans 1/3 des cas.
- Atteinte rachidienne : inconstante, tardive (délai de 1 à 12 ans pour l'atteinte sacro-iliaque)
- Atteintes viscérales : cardiaque (IAo) : exceptionnelle, uvéite : aiguë => patente dans 19 à 27%
1.1.4 Biologie
Syndrome inflammatoire, pas d'anticorps anti-nucléaires, pas de facteurs rhumatoïdes, HLA B27 + dans 80 à à 90% des cas.
Liquide synovial inflammatoire, stérile :
# globules blancs > 1500/mm3
# pas de germe en direct et en culture :
- sur milieu standard,
- sur milieu de Löwenstein
1.1.5 Radiologie
- Rachis : syndesmophites : spicule osseux de direction verticale naissant au-dessus de l'angle de la vertèbre
- Sacro-iliite
Seuls sont fiables chez l'enfant l'aspect de condensation avec pincement et irrégularité des berges iliaques.
1.1.6 Scintigraphie osseuse
- Tenir compte de l'âge,
- Hyperfixation relative des sacro-iliaques par rapport au sacrum (mesure quantitative).
1.2 Rhumatisme psoriasique
5 % des sujets atteints de psoriasis cutané auront une atteinte articulaire caractérisée par :

    * atteinte des IPD (50 %),
    * sans AAN,
    * sans facteurs rhumatoïdes,
    * s'associant à une atteinte des sacro-iliaques (30 %) => HLA B27,
    * filles, 9-10 ans.

1.3 Arthrites réactionnelles
1.3.1 Définition
Atteintes articulaires non suppuratives : infection digestive ou urogénitale, pas de germe dans l'articulation, terrain HLA B27 (75 - 80 %)
1.3.2 Clinique
- Oligo-polyarthrite,
- Enthésopathies,
- Signes cutanés : énanthème buccal, érythème maculaire, érythème noueux
- Signes oculaires : conjonctivite,
- Notion : d'infection digestive +++ ou génitale, avec de la fièvre.
1.3.3 Evolution
- Immédiate : arthrites fixes, poussés additives, 2 à 3 mois (=> 1 an), pas de séquelles articulaires.
- A long terme : risque d'évolution vers une spondylarthrite ankylosante, surtout si HLA B27, mais aussi polyarthrite, uvéite.
1.3.4 Etiologies
- Infection digestives +++ : Yersinia, Shigelle, Klebsielle, Salmonelle, Brucelle Campylobacter jejuni.
- Infections génitales : Chlamydia trachomatis, Ureaplasma urealytica, Gonocoque
- Possiblement : Mycoplasme pneumoniae
1.4 Entérocolopathies cryptogénétiques (Crohn, RCH)
1.4.1 RCH
- 10 % RCH : oligoarthrite asymétrique, contemporaine d'une poussée digestive, quelques semaines => mois
- Sacro-iliite
- HLA B27 + dans 60 % des cas.
1.4.2 Crohn
idem
2 Diagnostic positif
2.1 Critères diagnostiques d'Amor
Ils définissent des caractères cliniques communs :
 
     
Points
1
    Douleurs nocturnes lombaires ou dorsales et/ou raideur matinale lombaire ou dorsale    
1
2
    Oligoarthrite asymétrique    
2
3
    Douleurs fessières    
2
4
    Doigt ou orteil en saucisse    
2
5
    Talalgie ou tout autre enthésopathie    
2
6
    Uvéite antérieure aiguë    
2
7
    Urétrite non gonococcique ou cervicite moins d'un mois avant le début de l'arthrite    
1
8
    Diarrhée moins d'un mois avant le début de l'arthrite    
1
9
    Antécédents personnels :
- de psoriasis
- d'entérocolopathie chronique
- de balanite    
2
10
    HLA B 27 +    
2
11
    Antécédents familiaux :
- de spondylarthrite ankylosante
- de syndrome de Reiter
- d'uvéite    
2
12
    Sacro-iliite : seuls sont fiables chez l'enfant l'aspect de condensation avec pincement et irrégularité des berges iliaques    
3
13
    Amélioration en 48 heures des douleurs sous traitement par AINS et/ou rechute rapide (48 H) des douleurs leur arrêt.    
2

Le malade sera déclaré comme ayant une spondylarthropathie si la somme des points est égale ou supérieure à 16.
2.2 Bilan paraclinique
- Sérologies d'arthrite réactionnelle :
# Yersinia, Shigelle, Klebsielle, Campylobacteur jéjuni, Salmonelle, Brucelle
# Chlamydia trachomatis, mycoplasmes génitaux (pulmonaires).
- HLA B 27
- Radios sacro-iliaques si douleurs fessières
- Scintigraphie osseuse avec mesure quantitative au niveau des sacro-iliaques si, et seulement si le diagnostic de spondylarthropathie doit impérativement être posé.
- Bilan inflammatoire : V.S , CRP
- Eliminer d'autres diagnostics : facteurs rhumatoïdes, anticorps anti-nucléaires, sérologie de Lyme, ASLO, ASD, ASK.
3 Prise en charge thérapeutique
3.1 Traitement de première intention
- AINS : 1ère intention
# Aspirine : 70 - 80 mg/kg/j
# Diclofenac (VoltarèneÒ , XenidÒ) : 3 mg/kg/j
# Naproxène (NaprosyneÒ , ApranaxÒ) : 10 mg/kg/j
# Acide niflunimique (NiflurilÒ) : 20 - 30 mg/kg/j
# Ketoprofène (ProfenidÒ) ; 2,5 - 3 mg/kg/j
- Corticoïdes : peu efficaces dans ce type de rhumatisme
- Antalgiques : Paracétamol
- Gestes locaux : infiltration de corticoïdes (Hexatrione) si arthrite persistante (> 3 mois)
3.2 Traitement de fond
En cas de polyarthrite persistante (> 6 mois) : (cf A.C.J.) :
# Salazopyrine +++
# Sels d'or
3.3 Kinésithérapie+++
- Correction des attitudes vicieuses (flessum du genou)
- Entretien de la souplesse rachidienne en cas d'atteinte axiale
3.4 Antibiotiques ?
Seulement dans :
# arthrites réactionnelles
# d'origine urogénitale
3.5 Uvéite aiguë
Traitement d'urgence. Les traitements locaux suffisent le plus souvent.
Conduite à tenir devant une monoarthrite de l'enfant
L. de Parscau

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hopital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 26 avril 1999

Introduction
1 Diagnostic positif
1.1 Signes d'appel
1.2 Examen clinique
2 Diagnostic différentiel
2.1 Douleurs osseuses ou ostéocartilagineuses
2.2 Douleurs des parties molles
2.3 Douleurs neurologiques
   

2.4 "Douleurs de croissance"
2.5 Douleurs musculo-squelettiques psychogènes
3 Diagnostic étiologique : les éléments du diagnostic
3.1 Données cliniques
3.2 Examens complémentaires
4 Diagnostic étiologique : les causes
4.1 Chez le nourrisson
4.2 Dans la 2ème enfance
Introduction
La démarche diagnostique devant une monoarthrite chez l'enfant peut être délicate en raison de la difficulté à faire la différence entre une atteinte articulaire para-articulaire et en raison de la multiplicité des étiologies. Cette démarche va donc comporter deux temps :

    * la reconnaissance de l'origine articulaire en éliminant les autres causes possibles,
    * la recherche de la cause qui sera fonction de quelques éléments essentiels : l'âge, le sexe, le caractère aigu ou chronique de la monoarthrite, et les signes associés.

1 Diagnostic positif
1.1 Signes d'appel
1.1.1 chez le nourrisson
Les signes d'appel d'une atteinte osseuse ou articulaire sont particulièrement difficiles à cet âge :
# cris anormaux accrus par la mobilisation
# asymétrie de la gesticulation spontanée,
# pseudoparalysie d'un ou plusieurs membres.
L'étiologie infectieuse prédominant à cet âge, c'est la recherche systématique d'une arthrite devant tout syndrome infectieux qui permettra de la reconnaître.
1.1.2 Chez l'enfant
1.1.2.1 Arthralgies
Des arthralgies simples peuvent être difficiles à reconnaître surtout chez le jeune enfant. La douleur peut être "projetée" ; ainsi une atteinte du genou se traduit parfois par une douleur de hanche et inversement.
1.1.2.2 Arthrite
La localisation de signes inflammatoires à une articulation est un bon argument en faveur de l'origine articulaire mais une inflammation péri articulaire peut être difficile à distinguer.
1.1.2.3 La boiterie est un motif de consultation fréquent
D'autres signes d'appel sont possibles en fonction de l'étiologie.
1.2 Examen clinique
L'examen clinique va essayer de confirmer l'origine articulaire des douleurs en recherchant :

    * un épanchement articulaire,
    * des signes inflammatoires (oedème péri-articulaire, augmentation de la chaleur locale, rougeur)

Ces signes seront d'autant plus faciles à retrouver que l'articulation est superficielle (genou en particulier). Au contraire, une arthrite de hanche est beaucoup moins facile à affirmer cliniquement.

    * une diminution de la mobilité active et passive de ou des articulations concernées.

Les examens complémentaires, en particulier des radiographies comparatives des articulations concernées et une échographie peuvent mettre en évidence un élargissement de l'interligne articulaire. Ces examens complémentaires auront aussi et surtout un intérêt pour rechercher la cause (cf. diagnostic étiologique).
2 Diagnostic différentiel
2.1 Douleurs osseuses ou ostéocartilagineuses
Ces douleurs sont souvent difficiles à différencier des douleurs articulaires.
Il est donc prudent de rechercher systématiquement l'une des causes possibles. Le plus souvent le contexte, les signes associés et l'examen attentif des radiographies permettent de les reconnaître.
- traumatiques : le traumatisme a pu passer inaperçu, d'où l'intérêt des radiographies à regarder très attentivement car les signes peuvent être discrets. Inversement la fréquence des traumatismes chez l'enfant ne doit pas faire méconnaître une autre cause.
- tumorale : bénigne ou maligne, primitive ou secondaire reconnue sur la radiographie.
On peut rattacher à ce cadre la leucémie aiguë dont les douleurs osseuses représentent un signe d'appel fréquent. Toute douleur ostéo-articulaire inexpliquée justifie une NFP.
- infectieuse (ostéomyélite). Chez le nouveau-né et le nourrisson, une ostéomyélite aiguë de l'extrémité supérieure du fémur ou de l'humérus s'accompagne d'une arthrite de hanche ou de l'épaule du fait de la situation intra-articulaire de la métaphyse à cet âge.
- ostéochondrites dont les localisations les plus fréquentes sont la hanche, les vertèbres et la tubérosité tibiale antérieure.
- épiphysiolyse fémorale supérieure.
2.2 Douleurs des parties molles
Les douleurs musculaires sont rarement localisées à une seule articulation. En revanche une cellulite infectieuse ou une piqûre d'insecte proches d'une articulation peuvent simuler une arthrite.
2.3 Douleurs neurologiques
Dans le cadre d'un syndrome radiculaire, d'une polynévrite...
2.4 "Douleurs de croissance"
Bien que fréquentes (13 % des garçon, 18 % des filles) doivent rester un diagnostic d'élimination. Ces douleurs intermittentes d'origine musculaire ou péri-articulaire, plutôt qu'articulaire intéressent le plus souvent les membres inférieurs. Elles peuvent survenir la nuit comme le jour. Elles ne s'accompagnent d'aucun signe objectif clinique, biologique ou radiologique. Le diagnostic de bénignité ne peut être retenu qu'après plusieurs mois d'observation.
2.5 Douleurs musculo-squelettiques psychogènes
Probablement fréquentes, surtout à l'adolescence, elles ont une sémiologie incohérente.
3 Diagnostic étiologique : les éléments du diagnostic
3.1 Données cliniques
Elles dépendent de chaque étiologie mais quatre éléments seront au centre de la discussion étiologique :
# l'âge de l'enfant,
# le sexe,
# l'ancienneté et le mode de début des douleurs,
# les signes associés en particulier un syndrome infectieux et d'autres atteintes viscérales.
3.2 Examens complémentaires
Ils sont indispensables dans la majorité de cas et seront demandés de façon "hiérarchique" (du plus simple au plus agressif) en fonction de l'orientation.
3.2.1 Examens biologiques
- VS, CRP, NFP, fibrinogène, TCA
- hémocultures en cas de fièvre,
- examens sérologiques ou immunologiques selon l'orientation :
# anticorps anti-nucléaires,
# IDR à la tuberculine,
# recherche des causes d'arthrites réactionnelles :
- ASL, ASK
- coproculture,
- sérologies des entérobactéries, maladie de Lyme, Chlamydia, virus,...
- frottis urétral,
- HLA B27.
3.2.2 Examens radiologiques et isotopiques
- radiographies osseuses avec clichés comparatifs,
- échographies de l'articulation concernée (épanchement ?) pour les articulations (hanches).
- scanner et scintigraphie osseuse peuvent être utiles en cas de doute sur une atteinte articulaire ou para-articulaire.
3.2.3 Examen oculaire à la lampe à fente
3.2.4 Ponction articulaire et biopsie synoviale sous-arthroscopie
4 Diagnostic étiologique : les causes
4.1 Chez le nourrisson
4.1.1 L'ostéo-arthrite septique
Doit rester la principale préoccupation car elle nécessite un traitement très rapide.
4.1.2 Les autres causes sont plus rares
- décollement épiphysaire surtout chez le nouveau-né parfois difficile à reconnaître au niveau des épiphyses non ossifiées.
- une arthrite chronique juvénile ; elle peut débuter dans la première année mais devient plus fréquente après 18 mois.
4.2 Dans la 2ème enfance
En cas d'atteinte mono-articulaire, selon le caractère plutôt aigu ou chronique des étiologies à discuter peuvent être individualisées en deux groupes en sachant que certaines monoarthrites subaiguës peuvent être rattachées à l'un ou l'autre groupe.
4.2.1 Mono-arthrite aiguë
4.2.1.1 Une mono-arthrite septique :
C'est la première cause à éliminer car elle débouche sur un traitement antibiotique et une immobilisation dont la mise en route doit être très rapide.
Le syndrome infectieux clinique et biologique associé est souvent évocateur. La ponction ramène un liquide louche, inflammatoire dont la mise en culture permet habituellement d'isoler un germe. En cas de traitement antibiotique intempestif avant tout prélèvement bactériologique, il sera très difficile de faire la différence entre arthrite septique décapitée et une autre cause.
4.2.1.2 L'hydarthrose et l'hémarthrose traumatiques
Elles seront suspectées sur la notion de traumatisme. La ponction ramène un liquide de type mécanique non inflammatoire. Mais un traumatisme peut être l'occasion de révéler une autre cause. Une hémarthrose fera rechercher une maladie hémorragique (hémophilie chez le garçon).
4.2.1.3 La synovite aiguë transitoire de la hanche (ou "rhume de hanche")
Fréquente entre 3 et 8 ans, elle se traduit par une douleur de la hanche ou de la cuisse et une boiterie brutale et récente. Les mouvements de l'articulation coxo-fémorale sont souvent limités. La fièvre et le syndrome inflammatoire biologique sont modérés ou absents. La radiographie de hanche face et profil est normale. L'échographie note parfois un épanchement modéré. L'évolution est le plus souvent favorable avec le simple repos.
Il faut cependant systématiquement contrôler la radiographie après un à deux mois d'évolution car une ostéochondrite peut débuter par la même scène clinique.
4.2.2 Monoarthrite subaiguë ou chronique
Beaucoup de rhumatismes inflammatoires chroniques peuvent débuter par une monoarthrite mais les causes prédominantes sont les arthrites réactionnelles et l'arthrite chronique juvénile dans sa forme monoarticulaire.
4.2.2.1 Les arthrites réactionnelles
Les arthrites réactionnelles sont des arthropathies inflammatoires aseptiques secondaires à une infection siégeant à distance des articulations. Il s'agit de rhumatismes post-infectieux dont le plus anciennement connu est le rhumatisme articulaire aigu.

Le rhumatisme articulaire aigu
Autrefois au centre de la discussion diagnostique des polyarthrites, le RAA a considérablement diminué en fréquence dans les pays développés. Il faut cependant connaître l'existence de formes monoarticulaires et continuer à considérer ce diagnostic du fait des conséquences thérapeutiques immédiates qui en découlent, en particulier chez les enfants immigrés où la fréquence est plus grande. Quoiqu'il en soit, deux critères l'éliminent pratiquement à coup sûr : l'âge inférieur à 3 ans et l'absence de syndrome inflammatoire (VS < 40 mn).

Les autres arthrites réactionnelles peuvent se rapprocher du cadre nosologique précédent : ce sont des monoarthrites ou des oligoarthrites survenant au décours d'une infection souvent digestive ou respiratoire après un délai variable de quelques jours à 3 semaines, ou après une prise médicamenteuse. Elles sont plus fréquentes chez le garçon et s'observent à tout âge.

Etiologie :
- Bactéries :

    * les germes les plus fréquemment en cause sont des entérobactéries (Shigella, Salmonella, Yersinia, Campylobacter). D'autres peuvent être en cause (Chlamydia Trachomatis, maladie de Lyme,...).
    * Des arthrites réactionnelles peuvent être observées au décours de méningites à méningocoques ou H. influenzae. Elles doivent être distinguées des arthrites septiques plus précoces. Les méningites à pneumocoques donnent essentiellement des arthrites septiques.

- Virus : on peut rapprocher de ce cadre les arthrites virales (hépatite B, rubéole, MNI, adénovirus, varicelle, oreillons, parvovirus, CMV,...). La pathogénie reste obscure ; la part infectieuse directe ou post-infectieuse reste discutée.
- Médicaments : maladie sérique.

Clinique :
- Les signes articulaires peuvent être initialement limités à une seule articulation ou être d'emblée pauci- ou polyarticulaires.
- Signes extra-articulaires :
# oculaires : conjonctivite bilatérale, parfois associée à un iritis ou une kératite,
# cutanés : érythème noueux le plus souvent.
# uréthrite : dysurie, pyurie.

L'association uréthrite, conjonctivite et arthrite caractérise le syndrome de Flessinger Leroy Reiter.
- Les signes généraux sont le plus souvent modérés (fièvre).

Signes biologiques et paracliniques :
- Le syndrome inflammatoire est non spécifique,
- L'Ag HLA B27 est retrouvé dans 80 % des cas.
- La ponction articulaire montre un liquide stérile, de type inflammatoire :
# cellules > 2000/mm3 (formule mixte) et protéines > 41 g/l.
L'évolution est habituellement favorable en quelques semaines à quelques mois sous traitement anti-inflammatoire. Il existe cependant un risque de rechute ou d'évolution vers une spondylarthrite ankylosante.
4.2.2.2 Arthrite chronique juvénile dans la forme monoarticulaire
Classification :
Elle s'intègre dans les formes oligoarticulaires de l'ACJ. Elle concerne surtout la fille de moins de 5 ans.

Signes cliniques :
- Les signes cliniques articulaires sont au premier plan. Dans la grande majorité des cas, l'atteinte articulaire est limitée à une articulation, le plus souvent à un genou ou une cheville. Le début est insidieux associant une hydarthrose et une diminution de la mobilité articulaire. La douleur est souvent absente ou discrète. L'atteinte oligo-articulaire peut être présente d'emblée ou succéder à une atteinte mono-articulaire. Les signes radiologiques sont tardifs.
Les signes généraux sont absents.
- Une atteinte oculaire (uvérite antérieure = iridocyclite) peut précéder, accompagner ou apparaître plusieurs années après l'atteinte articulaire, même en rémission.

Signes biologiques et paracliniques :
- Le syndrome inflammatoire est absent ou très modéré.
- Les ACAN sont présents dans 30% des cas. Ils n'ont aucune spécificité (ni anti-DNA, ni anti-antigène soluble).
- La ponction articulaire faite dans les formes monoarticulaires montre un liquide stérile, de type inflammatoire : cellules > 2000/mm3 avec une majorité de polynucléaires et protéines > 40 g/l.
- La biopsie synoviale :

    * indiquée en cas de doute devant une forme monoarticulaire,
    * réalisée sous arthroscopie et jamais par arthrotomie,
    * montre des lésions évocatrices mais non spécifiques avec en particulier :
          o hypertrophie des franges,
          o infiltration lymphoplasmocytaire.

Evolution :
- Signes articulaires :
L'évolution articulaire peut se faire selon 3 modalités après un nombre variable de poussées :
# extinction avec séquelles nulles ou mineures dans 50 % des cas,
# inflammation persistante dans 25 % des cas,
# évolution vers une forme polyarthrite dans 25 % des cas.
C'est la forme dont l'évolution articulaire est la plus favorable.

- Signes extra-articulaires = iridocyclite
Elle complique 30 % des formes oligo-articulaires et même 50 % des formes avec ACAN.
Le début est presque toujours latent et doit donc être dépisté par un examen oculaire à la lampe à fente tous les mois puis tous les 6 mois.
Les complications de cette iridocyclite en font toute la gravité :
# production des synéchies postérieures avec risque de glaucome
# précipité dans le cristallin conduisant à une cataracte,
# kératite par dépôts calcaires.
Toutes ces complications peuvent conduire à la cécité en l'absence de traitement efficace.
4.2.2.3 Rhumatismes chroniques associés à l'Ag HLA B27
- Certaines affections rhumatologiques associées à la présence de l'antigène HLA B27 sont bien définies comme la spondylarthrite ankylosante, le rhumatisme psoriasique ou les polyarthrites des colo-entéropathies inflammatoires.
- D'autres au contraire n'entrent pas dans un cadre précis et sont donc discutées dans le cadre des arthrites chroniques juvéniles. Leur individualisation est justifiée par certains caractères propres.

Etiologie :
- prédominance chez le garçon (70 % des cas)
- âge : autour de 10 ans,
- pathologie familiale associée au HLA B 27 dans 50 % des cas.

Signes cliniques :
- signes articulaires :
# au début : forme mono ou parfois oligo-articulaire d'arthrite chronique,
# plus rarement forme polyarticulaire d'emblée.
- enthésopathies (pathologie des tendons et insertions musculaires) :
# présentes dans 50 % des cas,
# douleurs plantaires, talalgies, douleurs aux points d'insertion des tendons.
Signes paracliniques :
- Ag HLA B 27 présent,
- l'histologie synoviale montre un aspect évocateur dans 75 % des cas,
- les radiographies sont souvent normales.

Evolution :
Ces formes peuvent parfois être rattachées secondairement à une spondylarthrite ankylosante, un psoriasis ou une entéropathie inflammatoire dont les manifestations articulaires ont été une forme de début.
Mais seule une surveillance prospective de ces rhumatismes chroniques HLA B 27 permettra de mieux connaître leur évolution.
4.2.2.4 Les collagénoses
Peuvent rarement débuter par une atteinte monoarticulaire. En l'absence d'autre atteinte viscérale, le dosage des ACAN spécifiques sera déterminant pour le diagnostic.
4.2.2.5 Les arthrites à corps étrangers végétaux
Sont dues à une réaction inflammatoire non septique secondaire à une piqûre intra-articulaire par une épine végétale (prunelier, palmes, accacia,...). Le tableau clinique simule une forme mono-articulaire d'arthrite chronique juvénile. Seul l'examen en lumière polarisée du liquide synovial permet de reconnaître les corps étrangers végétaux.
4.2.2.6 D'autres causes :
- les tumeurs synoviales, la synovite villo-nodulaires sont plus rares et nécessiteront une biopsie synoviale pour être reconnues,
- l'arthrite tuberculeuse est devenue exceptionnelle, mais il faut la suspecter en cas de positivité anormale de l'IDR et mettre en culture le liquide articulaire pour rechercher le BK.
L'appareillage en pédiatrie
B. Pialoux

Service de Rééducation Fonctionnelle Enfants - Pontchaillou, CHU de Rennes
mis à jour le 27 avril 1999

1 La réglementation
1.1 Titre I : appareils et matériels de traitement et articles pour pansements
1.2 Titre II : orthèses et prothèses externes
1.3 Titre III : prothèse interne inerte ou active
   

1.4 Titre IV : véhicules pour handicapés physiques
2 Indications de l'appareillage
2.1 Pathologie organique
2.2 Pathologie fonctionnelle
3 Principes de surveillance
Objectifs
1. Connaissance de la réglementation : définition, classement, circuits de prescription, remboursement.

2. Description des situations de pathologie organique ou fonctionnelle devant donner lieu à prescription :
# pathologie organique : orthopédique, traumatologique, rhumatologique, viscérale.
# pathologie fonctionnelle : alitement, troubles de la déambulation, dysfonction membres supérieurs, troubles de la communication.
3. Les principes de la surveillance médicale d'un appareillage, complications, adaptations, et efficacité.

1 La réglementation
Le tarif interministériel des prestations sanitaires (T.I.P.S.), réunit la réglementation, le cahier des charges et la tarification de tous les matériels médicaux remboursés, partiellement ou totalement, par la Sécurité Sociale : des compresses stériles jusqu'aux respirateurs.
L'appareillage se retrouve dans ce tarif sous plusieurs titres :
1.1 Titre I : appareils et matériels de traitement et articles pour pansements
- chapitre I : matériels et appareils médicaux mis à disposition des assurés pour traitement à domicile (chaise percée, matelas, déambulateur, cannes, oxygénothérapie, aérosols, ...)
- chapitre II : matériels et appareils de contention et de maintien (bandes de matériaux divers, mousse)
- chapitre III : matériels et appareils pour traitements divers (aiguilles, casques, débit-mètre de pointe, postiche, sonde, stylo injecteur...).
- chapitre IV : articles pour pansements.
Tous ces appareils et matériels sont pris en charge comme un médicament sur prescription et vignette ou facture. Il n'y a pas besoin de demande d'entente préalable sauf si c'est spécifiquement précisé dans le tarif. Le forfait de remboursement convenu dans le TIPS, avec ou sans ticket modérateur.
1.2 Titre II : Orthèses et prothèses externes
Comprend 8 chapitres : orthèse, optique médicale, appareil électronique de surdité, prothèse externe non orthopédique, prothèse occulaire et faciale, podo-orthèse, orthoprothèse, accessoires de prothèse et d'orthopédie délivrés par les centres d'appareillage.

Trois cas particuliers :
- Orthèses (petit appareillage) (PA). Comprend les bandages xxxx, les orthèses plantaires, les orthèses élastiques de contention des membres, les ceintures médico-chirurgicales. L'entente préalable est nécessaire pour la plupart des articles. Le remboursement se fait selon un forfait TIPS avec ticket modérateur. Obligation de passer par des fournisseurs agréés CRAM (Caisse Régionale d'Assurance Maladie).
- Optique médicale : il n'y a pas nécessité d'entente préalable. La prise en charge se fait sur prescription et vignette ou facture, selon un forfait TIPS avec ticket modérateur.

Cependant l'entente préalable est exigée pour les bénéficiaires de moins de 16 ans ou bien en cas de verres teintés, de lentilles cornéennes, de matériel pour amblyopie.
- Appareils de surdité : si le bénéficiaire à moins de 16 ans, il existe un forfait unique de remboursement (environ 1300 francs), ou un forfait variable pour quelques appareils sur liste.

Possibilité d'un double appareillage après entente préalable.
En cas de bénéficaire de plus de 16 ans, le forfait est unique (dans les 750 francs).
Podo-orthèse : pas d'entente préalable nécessaire. Remboursement sur forfait.

Grand appareillage (GA) : compremant les ortho-prothèse des membres et du tronc, les chaussures orthopédiques, les prothèses occulaires : nécessité de demande d'entente préalable (c'est-à-dire prescription médicale, plus devis), prise en charge à 100% (exonération du ticket modérateur), sauf dans le cadre des chaussures, des prothèses occulaires, règlement possible en tiers payant.
L'entente préalable est précédée ou non d'un examen médical de l'enfant au centre départemental d'appareillage selon que la prescription ait été faite d'un médecin non spécialiste en l'appareillage ou un médecin spécialisé (médecin de rééducation fonctionnelle, rhumatologue, chirurgien orthopédique).
1.3 Titre III : prothèse interne inerte ou active
1.4 Titre IV : véhicules pour handicapés physiques
Le remboursement se fait selon un forfait après demande d'entente préalable.

En dehors de ces différents appareils et matériaux que l'on retrouve dans le TIPS, il existe des aides techniques et d'adaptation de l'environnement (ATE).
Les aides techniques sont des objets amovibles, indépendants du corps n'ayant que des rapports intermittents avec lui, utilisés de façon temporaire et visant à supprimer une capacité ou un risque pathogène. La prescription est faite sur simple ordonnance. Les remboursements sont rares.

L'inscription aux TIPS :
Elle n'est possible qu'à la demande du fabricant qui doit déposer un dossier extrêmement complet, avec notamment un certain nombre d'expérimentations. Lorsque le matériel est inscrit sur le tarif inter-ministériel, il lui est fixé un prix de remboursement. Ce dernier est figé s'il n'y a pas de modification de l'appareil. En cas de transformation et d'amélioration de l'appareillage, le fabricant peut déposer un nouveau dossier ou faire un dépassement de prix qui ne sera pas pris en charge par la Sécurité Sociale.
Ces difficultés expliquent qu'un certain nombre de fabricants ne demandent pas l'inscription de leur matériel afin de pouvoir le faire évoluer plus facilement.
Ceci explique aussi les dépassements parfois très importants, notamment pour les fauteuils roulants.
Lorsque les familles ont des difficultés financières, elles peuvent faire une demande de prise en charge extra-légale auprès de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie, pour se faire rembourser ces dépassements.
2 Indications de l'appareillage
2.1 Pathologie organique
- Pieds bots : attelles de Denis Brown (PA) constituées de deux plaquettes articulées entre-elles ce qui permet de corriger le pied bot dans l'espace. Les pieds sont habituellement collés à ces attelles par de l'élastoplast.

- Métatarsus varus : chaussons articulés avec correction de l'avant pied dans un plan de l'espace (PA), le plus tôt possible, jusqu'à correction complète (un à plusieurs mois). Puis chaussures thérapeutiques anti-métatarsus avec bord interne rectiligne ou convexe (PA)

- Pieds plats : semelles orthopédiques simples (PA), si pieds plats 2ème degré avec déformation de chaussures. Semelles sous forme de coquille talonnière, si pieds plats 3ème degré (souvent neurologique).

- Dysplasie de hanche : coussin d'abduction (PA) préciser l'écart entre les genoux. A utiliser en cas de hanches instables dépistées à la naissance pendant 1 à 3 mois. Harnais de Pawlick (PA) pour hanches instables découvertes après l'âge d'un mois jusqu'à 6 mois, à conserver pendant 3 à 6 mois.

- Scoliose structurale : il existe trois types de corset (GA) selon l'âge de l'enfant et la localisation de la scoliose : corset de Milwaukee remontant jusqu'au cou, corset monovalve sous axillaire (Cheneau) et corset court (Boston) type lombostat.
Ces corsets sont à conserver jusqu'à la fin de l'adolescence de façon continue ou à temps partiel.

- Cyphose : les corsets (GA) sont assez semblables aux corsets des scolioses et remontant plus ou moins haut selon le sommet de la cyphose et l'âge du sujet.
Dans certaines cyphoses dystrophiques légères, un système de dresse-dos formé de sangles s'insérant sur une plaque dorsale (DLM 70) peut être prescrit (GA).

- Spondylolisthésis : corset d'immobilisation (GA) par produits thermo-plastiques remontant à la pointe des omoplates. Ces corsets sont faits sur moulage du sujet.

- Entorses : en cas d'entorses bénignes de cheville : chevillères élastiques ou dynamiques plus ou moins renforcées (PA). En cas d'entorse du genou : attelles de genoux articulées à articulation polycentrique avec butée réglable de limitation et de flexion et d'extension (PA).

- Arthropathies rhumatismales : orthèses statiques souples ou rigides sur mesure (PA) ou sur moulage (actes côtés en K).

- Flexum de membres : orthèses avec ou sans articulation, sur moulage (GA) ou sur mesure (PA), avec parfois rappel élastique (chevilles).

- Paralysie : steppage du pied : releveur à l'intérieur de la chaussure, sous forme d'une pièce en plastique ou bien avec un rappel latéral en acier (PA).

- Amputation : (GA)

    *  Membres supérieurs : la prothèse sera d'abord esthétique (enfant de moins de 18 mois), ne permettant pas une préhension inter-digitale et donnant à l'enfant une longueur normale de membres à intégrer corticalement. Puis la prothèse sera fonctionnelle avec animation des doigts par un mécanisme mécanique (câble) ou électrique (déclenchement par détection EMG de la commande sur un muscle du moignon).

    *  Membres inférieurs : prothèse esthétique d'abord sans articulation de genou (en dessous de 18 mois), puis fonctionnelle (après l'âge de 18 mois). De gros progrès ont été faits ces dernières années rendant l'infirmité quasi invisible.

- Escarres : coussins anti-escarres (AT) (remboursés) en peau de mouton, d'efficacité modérée mais réelle ; en mousse peu efficace ; en gel ou gel plus mousse : produits lourds mais efficaces. En alvéole gonflée d'air, flotte air : très efficace et léger.

- Brûlures et oedèmes (PA). Bas compressifs sur mesure pour les brûlures ; bas compressifs sur taille standard pour les oedèmes.
2.2 Pathologies fonctionnelles
- L'enfant alité : peuvent lui être utiles :

    * Lits médicalisés avec dossiers relevables et potences : remboursé.
    * Table de lit : remboursée.
    * Pistolet pour uriner et verre avec bec de canard : remboursés.(fig. 14)
    * Matelas anti-escarres : nombreux modèles, les meilleurs étant les matelas gaufriers en mousse : remboursés.
    * Tapis anti-dérapant pour pouvoir déposer des objets sur un plan incliné : non remboursé.

- Aides à la marche :

    * Fauteuil roulant mécanique ou électrique, c'est l'affaire de spécialistes : Médecin de rééducation fonctionnelle, Ergothérapeute, Kinésithérapeute. En effet, il existe de multiples fauteuils, tenant compte des caractéristiques de l'enfant et de son handicap.
    * Sont variables : taille du fauteuil, emplacement des roues, types de bandage, amovibilité des reposes-pieds et des accoudoirs, poids, possibilité de pliage, reposes-têtes, motorisation... et la couleur... et le prix plus ou moins remboursé. Les fauteuils roulants comme de nombreux matériels peuvent être loués ce qui est intéressant sur quelques semaines seulement.
    * Poussettes : type canne, grande taille (Buggy-Major), non remboursées.
    * Type classique pour IMC : remboursée.
    * Baby-trott médicalisé (flèche de Gayot) : non remboursée. (Fig. 18)
    * Déambulateur avec roue avant (Rollator) pour les marcheurs débutants : remboursé.
    * Canne simple ou avec appui palmaire et antibrachial associé (cannes anglaises) monopode ou tripode. (Fig. 20)
    * Tricycle adapté.
    * Adapter l'environnement : mettre les tables et les lits à niveau, rendre les jeux facilement préhensibles, faire des plans inclinés.

- Position assise :

    * Coquilles moulées ou sous moulage (GA) avec ou sans appui-tête ; adaptées sur support fixe ou à roulettes. (Fig.. 16)
    * Coquilles de bain et pour toilette W-C : non remboursées.
    * Système de verticalisation : plan incliné, standing bar avec appui pré-tibial et sacro-fessier (remboursé) (Fig. 17)

- Membres supérieurs :

    * Adaptation des manches des couverts et des crayons
    * Prescription de machine à écrire et différents moyens informatiques.

- Difficultés de communication :

De nombreux matériels informatiques ou électroniques permettent maintenant d'améliorer les troubles de communication.
Ils sont, bien entendu, prescrits que par des Services spécialisés.

- Aide à l'incontinence :

    * Couches jetables : plus rarement, étuis péniens pour les garçons.

3 Principes de surveillance
Un appareillage près du corps (orthèse) doit être le plus proche possible du corps, sans entraîner d'excorations, ni de douleur.

Son adaptation nécessite une confrontation (au besoin plusieurs fois) entre Médecin prescripteur et appareilleurs. L'appareil est changé ou adapté en fonction de la croissance de l'enfant, environ une à deux fois par an.

L'efficacité de l'appareillage doit être prouvée avant de le renouveler. Ceci par des examens cliniques comparatifs successifs de l'enfant ; par l'interrogatoire des parents, par l'appréciation de l'utilisation réelle de l'appareil.


La Protection Maternelle et Infantile
J. Morellec, M. Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 2 mars 2000

1 Les objectifs de la PMI
1.1 Abaisser le taux de mortalité
1.2 Diminuer la morbidité
1.3 Favoriser un développement harmonieux de l'enfant
   

2 Historique
3 Mesures actuelles
4 Structure
Objectifs

1. Enumérer les objectifs de la P.M.I.

2. Donner le schéma de l'organisation de la P.M.I. en France aux différents échelons : national, régional et départemental.

3. Décrire le service unifié de l'enfance.

4. Enumérer les objectifs de l'examen prénuptial.

5. Rédiger le certificat médical en vue du mariage.

6. Définir avortement, prématurité, hypotrophie, mortinatalité, embryopathie, foetopathie, mortalité périnatale, mortalité infantile (cf. cours situation sanitaire et néonatologie).

7. Donner le pourcentage de naissances prématurées (cf. néonatologie) et des naissances d'enfants de petit poids.

8. Indiquer le nombre et la date des examens prénataux obligatoires.

9. Donner les chiffres habituels (inférieurs et supérieurs) de la prise de poids pendant la grossesse.

10. Donner les chiffres d'alarme de la pression artérielle au cours de la grossesse.

11. Indiquer la signification d'une grossesse à risque, d'une grossesse pathologique.

12. Indiquer les principales rubriques du coefficient de risque d'accouchement prématuré et d'accouchement pathologique.

13. Décrire les objectifs de la préparation à l'accouchement et les modalités de son application.

14. Enumérer les droits ouverts par la déclaration de grossesse.

15. Donner la période de congé de maternité et sa répartition par rapport à l'accouchement.

16. Indiquer les mesures de lutte existant contre la stérilité.

17. Donner deux garanties exigées par le CECOS.

18. Donner la principale indication actuelle du caryotype sur liquide amniotique et en indiquer la raison.

19. Enumérer les signes d'appel conduisant à une recherche d'anomalies chromosomiques.

20. Donner la définition de la Planification familiale.

21. Décrire les dispositions réglementaires en France, la Planification familiale.

22. Décrire les avantages et les inconvénients des différentes méthodes contraceptives.

23. Donner la date limite légale en France de l'IVG.

24. Donner le nombre et la date des examens obligatoires au cours des six premières années de vie.

25. Indiquer les deux grands objectifs de la loi de 1970 rendant obligatoire la production de trois certificats médicaux au cours des deux premières années de vie.

26. Décrire les grandes subdivisions des certificats médicaux de santé.

27. Décrire le circuit du certificat médical et les précautions prises pour éviter tout usage abusif.

28. Indiquer les avantages du carnet de santé.

29. Décrire la technique de l'examen systématique aux différents âges notamment au neuvième et vingt quatrième mois (cf. cours nouveau-né, développement psychomoteur, ophtalmologie, audition...) (tome sémiologie).

30. Enumérer les avantages de l'examen à l'entrée à l'école maternelle.

A consulter :

ROUSSEY M., BETREMIEUX P., PEUDENIER S. - Les examens systématiques. Editions techniques - Encycl. Méd. Chir. (Paris, France), Pédiatrie, 4-002-B-10, 1994, 16p.

Le groupe mère-enfant-constitue dans tous les pays une population "à risque" par sa mortalité élevée, par sa morbidité particulière, par l'impact des mesures préventives (vaccination, éducation sanitaire et nutritionnelle).
Les conditions sanitaires et sociales de ce groupe se sont transformées ces dernières années dans les pays industrialisés (réduction de la mortalité maternelle et chez l'enfant, modification de la morbidité avec disparition des maladies de carence et le meilleur contrôle des maladies infectieuses) obligeant à définir de nouveaux objectifs : réduction de la mortalité périnatale, lutte contre la prématurité, prévention et dépistage précoce des handicaps et inadaptations... Cette évolution favorable des conditions sanitaires est liée tant aux transformations socio-économiques qu'aux progrès médico-techniques.
Le sigle "P.M.I" est un terme ambigu, comme celui de "santé publique" puisque, d'une part il définit un service public départemental, d'autre part il recouvre des activités qui, en fait, intéressent tous les médecins et de nombreux personnels de santé. Il s'adresse aux futurs parents, parents et enfants de moins de six ans. Les enfants plus âgés bénéficiant du suivi du Service de Promotion de la Santé en faveur des Elèves (ex : service de Santé Scolaire).
1 Les objectifs de la Protection Maternelle et Infantile

1.1 Abaisser le taux de mortalité

1.1.1 Mortalité maternelle (mortalité due à la grossesse, l'accouchement et les suites de couches)

Ce taux autrefois de 7 pour 1000 femmes enceintes est aujourd'hui de 0,3 pour 1000, ce qui représente encore pour 750 000 grossesses, 225 morts par an.

1.1.2 Mortalité infantile (cf. situation sanitaire et sociale des enfants)

Son taux s'est considérablement abaissé de 120%° en 1920 à 5,1%° en 1995. On sait que cette baisse porte essentiellement sur la mortalité post-néonatale (28 jours à 365 jours) qui était dûe à des causes exogènes, c'est-à-dire aux maladies nutritionnelles et infectieuses. Celles-ci ont pu être enrayées par de meilleures conditions de vie, une meilleure connaissance des problèmes par les parents (éducation sanitaire), les antibiotiques et les vaccinations. Actuellement, le problème est celui de la mortalité néonatale (0-27 jours) qui relève de causes dites endogènes :

    *
      prématurité qu'il faut désormais séparer en prématurité spontanée et prématurité induite,
    *
      hypotrophie, c'est-à-dire les enfants de trop petit poids de naissance pour leur âge gestationnel,
    *
      malformations congénitales,
    *
      mauvais déroulement de l'accouchement.

Les causes de la mortalité néo-natale précoce (0-6jours) étant souvent les mêmes que celles entrainant la mort in utéro au cours du dernier trimestre de la grossesse (mortalité foetale tardive ou mortinatalité), il est commode de regrouper les deux et d'étudier la mortalité périnatale. Cette mortalité périnatale était en 1970 de 24%° mais grâce aux mesures prises par le gouvernement, en particulier le Programme Finalisé Périnatalité, qui a fait suite à une enquête de rationalisation des choix budgétaires (R.C.B), cette mortalité est tombée à 13%° en 1980 pour atteindre 7,4%° en 1995.
     

1960
   

1970
   

1980
   

1990
   

1995

Mortinatalité (%°)
   

17,0
   

13,3
   

8,6
   

5,9
   

5,3

Mortalité Néonatale (%°)
   

14,3
   

10,1
   

4,4
   

3,6
   

2,9

Mortalité Périnatale (%°)
   

31,3
   

23,4
   

13,0
   

9,5
   

7,4

Le programme finalisé périnatalité se justifiait par le fait que la mortalité, à cette époque de la vie, est la plus élevée et que la majorité des infirmités conduisant à des handicaps surviennent autour de la naissance.
Pour réduire cette morbidité et cette mortalité; sept mesures ont été retenues :

    *
      vaccination contre la rubéole,
    *
      renforcement de la surveillance prénatale,
    *
      amélioration des conditions d'accouchement,
    *
      réanimation du nouveau-né en salle de travail,
    *
      création de centres de réanimation intensive,
    *
      formation du personnel
    *
      études et recherches.

Cette étude est souvent prise comme exemple de planification car elle comportait un objectif mesurable : la mortalité périnatale, dont le taux devait tomber de 24 à 18%°. Cet objectif a été atteint et même dépassé. On doit cependant tempérer l'enthousiasme en constatant que cette baisse avait commencé avant l'application du programme et est liée en partie au recul de la date du décès : grâce aux progrès de la néonatalogie, la mort est retardée au delà de la première semaine et même au-delà du premier mois. Malgré ces réserves les résultats sont spectaculaires.
Néanmoins, depuis quelques années, le taux de mortalité périnatale stagne ; un nouveau plan périnatalité a donc été relancé en 1994.
D'autres mesures sociales prises en dehors de ce programme spécifique ont d'ailleurs pu intervenir :

    *
      loi sur la contraception et l'avortement diminuant les grossesses non désirées,
    *
      mise au repos anticipé,
    *
      utilisation de travailleuses familiales pour aider les mères à domicile,
    *
      recrutement de sage-femme P.M.I,
    *
      campagnes d'éducation anti-tabac, anti-alcool,
    *
      centres maternels pour mères en difficultés.

Il serait également intéressant d'étudier les avortements, c'est-à-dire les pertes d'enfants entre la contraception et la 27è semaine d'aménorrhée (date légale de viabilité en droit français),. Malheureusement, si les interruptions volontaires de grossesse sont actuellement mieux enregistrées, on connait mal le nombre et les causes des avortements spontanés.

1.1.3 Mortalité chez les enfants de plus d'un an

Le taux à cet âge est très faible, inférieur à 1%° (0,6 - 0,8).
Les causes de mort à cet âge sont essentiellement liées aux accidents et aux intoxications ce qui peut être prévenu par une bonne éducation sanitaire à laquelle les médecins doivent participer.

1.2 Diminuer la morbidité

Ceci veut dire en premier chef, prévenir certaines maladies en appliquant un programme de vaccination approprié aux besoins de la population française : vaccination par le BCG dès les premiers mois de vie, vaccination contre la rougeole, la rubéole, les oreillons, l'haemophilus influenzae et l'hépatite B viennent ainsi complèter le dispositif obligatoire avant 18 mois. Cela veut dire également limiter les conséquences de la maladie et, en particulier actuellement, dépister les infirmités sensorielles, visuelles et auditives et les infirmités motrices, le plus tôt possible pour essayer de les corriger et permettre ainsi à l'enfant de poursuivre un développement psychomoteur et mental aussi normal que possible ou du moins de limiter au maximum le handicap. Plus difficiles seront les corrections des retards mentaux et enfin, il ne faut pas oublier les inadaptations sociales et les troubles du comportement devenus un des problèmes importants dans la surveillance de la santé des enfants.

1.3 Favoriser un développement harmonieux de l'enfant

Ceci impose une bonne connaissance du développement normal, somatique et intellectuel ainsi que des facteurs médicaux, nutrionnels, affectifs, sociaux qui l'influent. Des examens périodiques systématiques permettent de suivre cette évolution.

Ainsi conçue, la protection des mères et des enfants déborde le cadre sanitaire et fait intervenir, à côté du médecin, des spécialistes d'autres disciplines : sage-femme, puéricultrice, infirmière, psychologues, sociologues, assistantes sociales, éducateurs et même économistes pour les mesures sociales et financières.
Dans le cadre sanitaire lui-même, le médecin généraliste voire le pédiatre devront souvent recourir à des spécialistes en particulier ORL et ophtalmologiste.
Jusqu'à ces dernières années, les activités de P.M.I ont été centrées sur les premiers mois de la vie. Actuellement l'évolution de la situation sanitaire et sociale invite à faire porter l'effort d'une part sur la surveillance de la grossesse pour diminuer les accidents périnatals, d'autre part sur le dépistage précoce des infirmités et inadaptations et enfin chez l'enfant plus grand, sur la prévention des accidents et des difficultés scolaires et la prise en charge des problèmes de l'adolescence (délinquance, toxicomanie, sexualité,...)
2 Historique

Au cours des années, toute une série de mesures privées ou publiques avaient été prises, visant à protéger les enfants : création de "gouttes de lait", Fondation de l'ordre de Saint Vincent de Paul, loi Roussel de 1874 qui instituait les statistiques de mortalité infantile, l'inspection médicale des enfants en garde et la surveillances des nourrissons : loi Bérard de 1920 instituant l'enseignement de la puériculture dans les écoles des filles. En 1936, un texte de loi était préparé mais non discuté du fait de la guerre.
L'idée d'une médecine pour les écoliers date de la Convention (1792) mais la première réalisation ne vint que 80 ans plus tard à Paris et ce n'est qu'en 1945 que PMI et médecine scolaire furent véritablement structurées. Il fallut attendre novembre 1945 pour que, à l'occasion de problèmes démographiques importants, parut l'ordonnance sur la PMI avec le code de la Famille, prévoyant une action conjuguée des médecins et des assistantes sociales, définissant les principales activités de la PMI : certificat prénuptial, visites prénatales, surveillance de l'enfant, éducation des mères, créant le carnet de santé de l'enfant. Simultanément était organisée la médecine scolaire.
En 1962, la Protection Maternelle et Infantile recevait une structure départementale relevant de la Direction Départementale de l'Action Sanitaire et Sociale (DDASS).
Depuis, de nombreuses modifications ont été apportées à l'ordonnance de 1945 (par exemple : augmentation des visites prénatales qui passent de 3 à 4 puis récemment à 7). Mais la plus importante est sans doute la loi de Juillet 1970 relative aux certificats de santé de l'enfant. Nous insisterons plus loin sur l'importance de ces certificats.
Enfin, la possibilité de maitriser la fécondité a conduit à promulguer récemment les lois sur la planification familiale, l'avortement, l'aide publique aux banques de sperme. Dans le même temps, un effort était fait pour favoriser la lutte contre la stérilité.
En 1980, le gouvernement devant la baisse inquiétante de la démographie, prenait de nouvelles mesures pour favoriser la naissance du troisième enfant et il réaffirmait en 1986 la priorité donnée à la politique familiale.
En 1983, une circulaire ministérielle rappelait les missions et activités du service départemental de PMI rattaché au Conseil Général par les lois de décentralisation.
En 1989, promulgation de la loi relative à la protection et à la promotion de la santé de la famille et de l'enfance et adaptant la législation sanitaire et sociale aux transferts de compétence en matière d'aide sociale et de santé. Sur la même période le service de Santé Scolaire intégrait progressivement l'Education Nationale et devenait : Service de Promotion de la Santé en Faveur des Elèves.

Ce bref historique montre l'aspect évolutif de cette organisation qui doit bien évidemment se poursuivre.
3 Mesures actuelles

La loi du 18 décembre 1989 rappelle que l'Etat, les Collectivités territoriales et les organismes de Sécurité Sociale participent à la protection et à la promotion de la santé maternelle et infantile qui comprend notamment :

1. des mesures de prévention médicales, psychologiques, sociales et d'éducation pour la santé en faveur des futurs parents et des enfants.

2. des actions de prévention et de dépistage des handicaps des enfants de moins de six ans ainsi que de conseil aux familles pour la prise en charge de ces handicaps.

3. La surveillance et le contrôle des établissements et service d'accueil des enfants de moins de 6 ans ainsi que des assistantes maternelles.
Les services et consultations de santé maternelle et infantile, les activités de protection de la santé maternelle et infantile à domicile, la formation et l'agrément des assistantes maternelles relèvent de la compétence du département qui en assume l'organisation et le financement sous certaines réserves.
Les compétences dévolues au département sont exercées sous l'autorité du Président du Conseil Général par le service départemental de Protection Maternelle et Infantile. Celui-ci doit en outre, participer aux actions de prévention des mauvais traitements et de prise en charge des mineurs maltraités.
4 Structure

A l'échelon central du Ministère, existe sous l'autorité du Directeur Général de la Santé, une sous-direction de maternité, de la Petite Enfance et des Actions spécifiques de Santé. Cette sous-direction est composée de 3 bureaux : maternité, enfant de 0 à 6 ans, actions spécifiques de santé. Par ailleurs, interviennent différents autres ministères dont celui de la solidarité, de la condition féminine.... L'Académie de Médecine, l'INSERM, le Comité d'Education sanitaire, le Conseil Supérieur d'Hygiène (section maternité et section enfance) peuvent émettre des avis consultatifs.
A l'échelon de la Région, le Préfet de Région est assisté du Directeur Régional des Affaires Sanitaires et Sociales (DRASS) et d'un médecin Inspecteur Régional. Il gère un service régional :

    *
      planification (équipement hospitalier, professions médicales et paramédicales),
    *
      législation sociale (contrôle des caisses de sécurité sociale et allocations familiales),
    *
      contrôle de gestion (budget des centres hospitaliers).

A l'échelon du département, il existe dorénavant deux directions départementales des Affaires Sanitaires et Sociales, l'une Etat, l'autre départementale à laquelle sont rattachés la PMI, l'Action Sociale et l'Aide Sociale à l'Enfance.
A l'échelon central du département existe le plus souvent désormais une sous-direction enfance-famille réunissant PMI - Actions de Santé - Action Sociale et Aide sociale à l'Enfance. Les missions de ces services sont multiples :

1. Pour la Protection Maternelle et Infantile :

    *
      informer, conseiller dans les domaines de la planification des naissances, de la maternité, de l'enfance,
    *
      préparer et aider à la naissance dans les conditions les plus favorables à la santé de la mère et de l'enfant,
    *
      promouvoir le développement global de l'enfant de 0 à 6 ans,
    *
      améliorer les conditions d'accueil des jeunes enfants dans leurs différents milieux de vie.

Bien qu'ayant une dimension Santé Publique, ce service développe des actions privilégiées en faveur des familles les plus vulnérables et des enfants en danger.

2. Pour l'Action Sociale
Il s'agit dans ce cadre "d'aider les personnes en difficulté à retrouver ou à développper leur autonomie de vie et notamment en favorisant une évolution des situations personnelles et familiales permettant une plus grande prise de conscience ainsi qu'une meilleure harmonie dans la famille".

3. Pour l'Aide Sociale à l'Enfance
L'Aide Sociale à l'Enfance est une action sociale en faveur de l'Enfance et de la Famille. Le service a pour mission essentielle d'aider les familles en difficulté dans leurs devoirs d'entretien, de garde, de surveillance et d'éducation de leurs enfants. L'aide sociale ne s'adresse pas à l'ensemble de la population mais aux familles qui ont des difficultés matérielles ou éducatives aigues avec leurs enfants et aux jeunes dont les difficultés sociales risquent de comprometttre l'équilibre.
Pour protéger l'enfant, l'action de l'Aide Sociale à l'Enfance se développe dans quatre directions :

    *
      apporter le soutien nécessaire aux familles afin d'éviter si possible le placement de l'enfant,
    *
      trouver la solution la mieux adaptée lorsque le placement devient inévitable,
    *
      tout mettre en oeuvre pour restaurer la cellule familiale lorsque les enfants ont été amenés à vivre une séparation temporaire avec leurs parents,
    *
      enfin, quand l'enfant est déclaré adoptable, l'aide sociale participe à la recherche d'une famille d'adoption

4. Pour les Actions de Santé
Vaccinations, lutte contre les maladies sexuellement transmissibles et la tuberculose, prévention des cancers.
Sur le terrain, le département est divisé en circonscriptions d'action sociale, elles-mêmes redécoupées en secteurs (en théorie un secteur pour 8000 habitants).
Le médecin responsable du service départemental de PMI, en concertation avec différents conseillers techniques organise les activités sur le département. Celles-ci sont effectuées par :

    *
      des médecins titulaires, contractuels ou vacataires, doivent être titulaires d'un D.E.S de Pédiatrie, Gynécologie-Obstétrique ou Santé publique).
    *
      des puéricultrices,
    *
      des sages femmes,
    *
      des infirmières,
    *
      des assistantes sociales,
    *
      des auxiliaires de puériculture.

Les professionels regroupés en équipe au sein des circonscriptions y exercent diverses activités : visites à domicile, consultations infantiles, bilan de santé en écoles maternelles, agrément et suivi des assistantes maternelles, éducation pour la santé, accompagnement des structures d'accueil,...
L'équipe de PMI informée de chaque grossesse peut proposer la visite d'une assistante sociale de secteur. Cette proposition d'action à domicile ne concerne dans la réalisé qu'un nombre peu important de femmes enceintes requérant une attention particulière. Toutefois, des visites à domicile peuvent également être effectuées à la demande des intéressées.
Les sage-femmes PMI, quant à elles n'interviennent qu'à la demande du médecin, d'un service spécialisé, d'un travailleur social, voire de la femme elle-même.
De même, après la naissance, une puéricultrice pourra rendre visite à la mère et à son enfant dès la sortie de la maternité. Là encore il s'agit d'une activité orientée prioritairement en faveur des familles estimées les plus vulnérables. La puéricultrice assure près de la mère un rôle éducatif (hygiène, alimentation, sorties, jeux) mais de par sa compétence, elle apporte aussi une aide technique et un soutien psychologique en particulier lors de la naissance d'un enfant malformé ou présentant des risques graves.

La décentralisation en confiant la responsabilité de la Protection de la Santé Maternelle et Infantile (PSMI) au département a modifié des textes souvent anciens et périmés qui en régissent le fonctionnement. Dans le nouveau texte de loi, il est précisé que, lors de la visite médicale prénuptiale il convient de rechercher des "affections génétiques", que le carnet de santé maternité est obligatoire, que les déclarations de grossesse et de naissance seront obligatoirement envoyées à la DAS; des modalités nouvelles de financement avec une participation plus grande des caisses de Sécurité Sociale sont envisagées.
De la même manière, il est également prévu que le service départemental de PMI établisse une liaison avec le service de Promotion de la Santé en faveur des Elèves.
Ces mesures marquent une réelle volonté de faire évoluer ce système encore perfectible.
Les activités de protection maternelle et infantile
J. Morellec, M. Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 2 mars 2000

1 Protection des futurs parents
1.1 L'examen prénuptial
1.2 Les examens prénatals
1.3 L'accouchement
1.4 L'examen post-natal
1.5 Les consultations de lutte contre la stérilité
1.6 Les CECOS - Centres d'insémination artificielle
1.7 Les consultations de génétique
   

1.8 Le diagnostic prénatal
1.9 Contraception et planification familiale - IVG
2 Protection des enfants
2.1 Le nouveau-né
2.2 Le carnet de santé
2.3 Les examens systématiques
2.4 Les certificats de santé
Les examens des 9ème et 24ème mois

La Protection Maternelle et Infantile regroupe un ensemble de mesures médio-sociales destinées à assurer par des actions préventives continues la protection des femmes enceintes, des mères et des enfants jusqu'à lâge de l'obligation scolaire. Le but poursuivi n'est pas seulement de lutter contre la maladie mais aussi de réaliser une véritable promotion de la santé considérée globalement dans la rencontre d'un individu avec un environnement physique, social et psycho-affectif qui peut lui être nuisible ou au contraire favoriser son épanouissement.
Un ensemble d'examens systématiques entre la naissance et 6 ans a pour objectif la protection de l'enfant mais les progrès scientifiques et en particulier de la génétique, font que certains troubles chez l'enfant peuvent être prévenus pendant la grossesse et même avant la conception. Nous envisagerons ces différents examens dans leur ordre chronologique, en rappelant que ces activités concernent chaque année 750 000 femmes enceintes et 4 500 000 enfants de 0 à 6 ans.

1 Protection des futurs parents
1.1 L'examen prénuptial

Cet examen est obligatoire. Le mariage ne peut être célébré que si chacun des futurs époux produit un certificat médical de moins de deux mois attestant qu'il a été examiné en vue du mariage.
Le médecin ne peut délivrer le certificat prénuptial qu'au vu du résultat pour les femmes âgées de moins de 50 ans :

    *
      des examens sérologiques de la rubéole et de la toxoplasmose qui sont obligatoirement effectués en l'absence de documents écrits permettant de considérer l'immunité acquise,
    *
      du groupe sanguin A, B, O rhésus standard complèté par une recherche d'anticorps irréguliers si le groupe sanguin ouvre une possibilité d'immunisation et dans les cas où existe un risque d'allo-immunisation par suite d'une transfusion antérieure.

Le médecin communique à la personne examinée ses constatations ainsi que les résultats des examens complèmentaires effectués. Dans les cas graves, il doit faire cette communication par écrit. Lorsque les antécédents ou l'examen le nécessitent, il oriente vers une consultation spécialisée ou un dépistage particulier. L'absence d'anticorps contre la rubéole chez la jeune fille invite à la vacciner avec les précautions habituelles (absence de grossesse et mise sous contraceptifs pendant 3 mois). L'absence d'anticorps contre la toxoplasmose impose de refaire l'examen en particulier en cas de grossesse.
Enfin, le médecin commente la brochure d'information remise aux futurs conjoints "Vous allez vous marier,... faites le point sur votre santé". Cette brochure rappelle les examens prédédemment décrits et insiste sur :

    *
      l'examen génital périodique et le dépistage des cancers de l'utérus,
    *
      l'auto-examen régulier des seins,
    *
      la nécessité de rechercher des maladies familiales et la possibilité d'avoir recours à des consultations spécialisées de génétique,
    *
      la possibilité d'utiliser une méthode contraceptive pour choisir le moment de sa grossesse.

Il est dommage que ne soit pas indiquée l'utilité de dresser un arbre généalogique aidant à repérer les maladies familiales. Dans l'avenir on peut penser qu'un caryotype sera fait systématiquement (un projet de loi en discussion insiste sur la nécessité de rechercher les maladies familiales héréditaires).
La survenue d'une grossesse hors mariage, lors d'une union libre ou d'un mariage tardif (30% des femmes sont enceintes au moment du mariage) limite la portée de cet examen préventif.
Les frais de l'examen sont intégralement pris en charge par la Sécurité Sociale.

1.2 Les examens prénatals

Les examens médicaux obligatoires des femmes enceintes sont au nombre de sept pour une grossesse évoluant jusqu'à son terme. Le premier examen médical doit avoir lieu avant la fin du troisième mois de grossesse. Les autres examens ont une périodicité mensuelle à partir du 4è mois et jusqu'à l'accouchement.

Chaque examen doit comporter un examen clinique, une recherche de l'albuminurie et de la glycosurie. De plus, sont effectués :
- lors du premier examen prénatal

    *
      en cas de première grossesse une détermination des groupes sanguins (A, B, O, phénotypes rhésus complet et Kell) si la patiente ne possède pas de carte de groupe sanguin complète.
    *
      dans tous les cas, les dépistages de la syphilis, de la rubéole et de la toxoplasmose en l'absence de résultats écrits permettant de considérer l'immunité comme acquise, ainsi que la recherche d'anticorps irréguliers à l'exclusion des anticorps dirigés contre les antigènes A et B ; si la recherche est positive, l'identification et le titrage des anticorps sont obligatoires.

- au cours du 4è examen prénatal (6è mois de grossesse), un dépistage de l'antigène HBs, une numération globulaire et chez les femmes à rhésus négatif ou précédemment tranfusées, la recherche d'anticorps irréguliers, à l'exclusion des anticorps dirigés contre les antigènes A et B; si la recherche est positive, l'identification et le titrage des anticorps sont obligatoires.
- au cours du 6è ou du 7è examen prénatal, une deuxième détermination du groupe sanguin A, B, O, rhésus standard si nécessaire.
- au cours des 6è et 7è examens prénatals chez les femmes à rhésus négatif ou précédemment transfusées, la recherche d'anticorps irréguliers à l'exclusion des anticorps dirigés conte les antigènes A et B ; si la recherche est positive, l'identification et le titrage des anticorps sont obligatoires.

En outre, la sérologie toxoplasmique sera répétée chaque mois à partir du deuxième examen prénatal si l'immunité n'est pas acquise.

Le premier examen est un examen obstétrical et général comportant un interrogatoire complet sur les antécédents familiaux, les maladies passées ou évolutives, les conditions des grossesses antérieures. L'examen médical et gynécologique minutieux et complet recherche les conditions pathologiques éventuelles. On ne manquera pas de noter le poids, la taille et de prendre la tension artérielle. Ces investigations cliniques seront complètées par les examens biologiques.

Le CARNET DE SANTE MEDICAL MATERNITE, dûment complèté est alors remis à la mère par le médecin, ce dernier conservant la fiche dupliquée ; le carnet est délivré gratuitement, sur simple demande, par le Service Départemental de PMI. Il constitue un outil de liaison intéressant entre le médecin, souvent généraliste, qui porte le diagnostic et effectue certains examens, l'équipe obstétricale qui prend ensuite la femme en charge et éventuellement l'équipe pédiatrique appelée à surveiller l'enfant.

La déclaration de grossesse faite, avant la fin du troisième mois aux Services de Prestations Sociales (Sécurité Sociale) ouvre des droits à la femme enceinte. Un carnet de surveillance maternité, administratif, lui est délivré par la Sécurité Sociale. Il permettra un remboursement intégral des examens obligatoires. La production pour chacun des examens précités, d'une attestation mentionnant la date de l'examen à l'organisme (CAF, MSA,...) dont relève l'allocataire, permettra le remboursement de l'Allocation Jeune Enfant (AJE), le non respect des délais de passation d'examen entraînant cependant une suppression partielle de cette prestation.

Sans aborder dans le détail ces consultations prénatales, il convient d'insister sur quelques points car il s' agit avant tout de suivre l'évolution d'une grossesse et d'en rechercher tous les signes cliniques révélateurs d'une complication possible :

1. la prise de poids qui, en quarante semaines, doit être de huit à douze kilos (fonction de la taille de la mère). Cette prise de poids n'est pas régulière d'où l'intérêt d'établir une courbe. Toute déviation en plus ou moins doit attirer l'attention et dans certains cas déclencher des investigations.

2. la prise de la tension artérielle : chiffres de 14 max - 9 min doivent alerter.

3. l'examen des urines : il ne faut pas se contenter du diagnostic vague de "traces d'albumine". Les urines doivent être prélevées correctement et un dosage quantitatif de l'albumine effectué éventuellement

4. tout état fébrile doit faire rechercher une cause : examen clinique, examen des urines, hémoculture et entrainer un traitement énergique par antibiotiques. S'il s'agit d'une listériose, un traitement par cures discontinues sera mis en place jusqu'à l'accouchement (cf : infections du nouveau-né).

5. il existe des grossesses pathologiques (femmes ayant une cardiopathie, une néphropathie, un diabète, des convulsions, une malformation utérine, ayant été césarisées, ayant présenté des incompatibilités rhésus graves,...). Toutes ces grossesses doivent être suivies dans des centres équipés, créés dans chaque département, en général au CHR.
A côté des grossesses à risque indiscutablement pathologiques, il existe :

6. des grossesses à risque : femmes jeunes (moins de 20 ans) ou âgées (plus de 38 ans), grossesses nombreuses et/ou rapprochées, antécédents d'avortement, de prématurité, conditions de vie fatigantes (travail, déplacements, travail lourd à la maison), mauvaises conditions socio-économiques (migrantes, femmes de manoeuvres, d'ouvriers agricoles, niveau d'études faible, femme isolée, insalubrité du logement).

Tous ces facteurs ont été codifiés par Papiernick dans un coefficient de risque d'accouchement prématuré ou C.R.A.P. Partant de ce score, J. Dubois a mis au point un coefficient de risque d'accouchement pathologique plus évolutif, établi dès la première visite et complèté en notant les évènements survenant ensuite au cours de la grossesse (cf. cours obstétrique).
Un C.R.A.P entre 5 et 10 nécessite une surveillance renforcée, entre 10 et 15, il s'agit en fait d'une grossesse pathologique, au delà de 15, l'accouchement prématuré est presque certain. Le taux de prématurité est ainsi passé de 8 % à moins de 4 % en Ille-et-Vilaine.

Les examens périnatals, en dehors du premier, vont donc surtout être obstétricaux. Le dernier examen établira le pronostic de l'accouchement et de ce fait devrait être pratiqué par l'obstétricien.
Comme nous l'avons vu précédemment, la déclaration de grossesse ouvre certains droits :

   1.
      remboursement intégral des examens obligatoires,
   2.
      congé de maternité minimal de 8 semaines mais la femme enceinte a droit à un repos de six semaines avant la date présumée de son accouchement et dix semaines après. Cette période peut être prolongée en cas de troisième grossesse et plus, naissance multiple, grossesse pathologique,...
      Pendant ce repos, la femme salariée perçoit une indemnité égale à environ 90 % de son salaire de base.
   3.
      préparation à l'accouchement :
      La femme peut bénéficier à partir du 6è mois de grossesse de huit séances de préparation à l'accouchement, données individuellement ou en groupe. Leur but est d'informer la femme sur le déroulement de l'accouchement et sur les méthodes qui peuvent l'aider à le préparer et à le vivre dans les meilleures conditions . A partir du 7è mois, elles vont permettre, grâce à un travail corporel et psychologique, à la femme de participer plus pleinement et plus sereinement à son accouchement.
      Les huit séances de préparation à l'accouchement sont remboursées par la Sécurité Sociale.
   4.
      Allocation jeune enfant
      Elle est versée chaque mois à partir du 4è mois de grossesse jusqu'au 3è mois de l'enfant sans conditions de ressources des parents. Elle peut être prolongée jusqu'aux trois ans de l'enfant si les conditions de ressources sont inférieures aux limites fixées. Pour pouvoir en bénéficier, il faudra :

          o
            respecter les délais de déclaration de grossesse et de passation des 7 examens obligatoires,
          o
            soumettre l'enfant aux examens des huit jours, du 9è et du 24è mois.

En conclusion, bien que le terme de Protection Maternelle et Infantile sous-entende, la protection de la mère, il existe très peu de consultations publiques gratuites pour les femmes enceintes, malgré un récent décret du 6 août 1992 les rendant obligatoires. S'il n'est pas nécessaire de les développer de manière importante, leur mise en place favoriserait cependant la prise en charge de populations en difficultés d'où leur intérêt.
Par ailleurs, le rôle des sages-femmes pourrait être largement développé, en particulier pour tout ce qui concerne l'éducation et la préparation à l'accouchement. Les sages-femmes PMI, quant à elles, en assurant le suivi à domicile des femmes qui leur sont signalées participent à une réelle prévention des risques liés à la grossesse. Leurs interventions facilitent la mise au repos des femmes à leur foyer et limitent bien souvent des hospitalisations plus ou moins bien acceptées. Elles pourraient également renforcer leurs actions en faveur des femmes peu ou mal suivies.
C'est par l'application de tous ces moyens complémentaires les uns des autres que l'on parviendra à réduire les problèmes de mortalité et morbidité périnatales.

1.3 L'accouchement

Les accouchements ont lieu actuellement pour plus de 98 % en maternité publique ou privée. Un décret de 1974 précise les garanties souhaitables de technicité que doivent présenter ces établissements pour la sécurité de la mère et de l'enfant. En particulier, toutes les maternités doivent posséder un service de chirurgie susceptible d'effectuer une césarienne en urgence et une salle de réanimation pour le nouveau-né.
1.4 L'examen post-natal

Un examen post-natal doit être obligatoirement effectué dans les huit semaines qui suivent l'accouchement. Il est à la fois clinique et gynécologique. C'est lors de cet examen que seront faites les investigations pour le choix éventuel d'une contraception.

1.5 Les consultations de lutte contre la stérilité

En France, 40 000 couples n'ont pas d'enfant du fait de la stérilité d'un des conjoints (1/3 des cas masculins, 1/3 hypofertilité du couple). Or, certaines sont curables mais les investigations et les traitements sont coûteux. La loi du 12 Juillet 1978 pose le principe d'une prise en charge intégrale de ces frais après accord du médecin conseil de la Sécurité Sociale.

1.6 Les CECOS - Centres d'insémination artificielle

Une meilleure connaissance de la physiologie de la reproduction et la possibilité de conserver du sperme par congélation, ont fait progresser la pratique de l'insémination artificielle. Cette méthode pose de nombreux problèmes, philosophiques, notamment et doit présenter toutes les garanties médicales (génétique) et d'anonymat du donneur. Il existe 20 Centres d'Etudes et de Conservation du Sperme humain (CECOS) en France. Les frais sont pris en charge par la Sécurité Sociale.
1.7 Les consultations de génétique

(voir cours Génétique, Professeur B. LE MAREC)

1.8 Le diagnostic prénatal

(voir cours Diagnostic prénatal, Professeur B. LE MAREC)

1.9 Contraception et planification familiale - IVG
1.9.1 Structures et personnes pouvant aider le médecin praticien en matière de planification familiale

- "La planification familiale (P.F) est l'ensemble des mesures techniques qui permettent aux couples ou aux individus de choisir, en fonction de leurs possibilités et de leurs désirs, le nombre d'enfants qu'ils auront, le moment de leur naissance, l'intervalle entre deux naissances" (MANCIAUX -DESCHAMPS)

- Les structures auprès desquelles le praticien peut s'adresser sont :

    *
      le conseil supérieur de l'information sexuelle de la régulation des naissances et de l'éducation familiale, créé en 1973 (information et réflexion),
    *
      les centres de planification et d'éducation familiales (information et contraception) environ 400 en France;
    *
      les établissements d'information, de consultation et de conseil familial (information et éducation)
    *
      les services de PMI et de la DAS,
    *
      les associations privées : Comité National d'Education pour la Santé, Mouvement Français pour le Planning Familial, Choisir, etc...

1.9.2 Dispositions règlementaires en France concernant la planification familiale

La loi Neuwrith (1967) a été modificée par de nombreux décrets. Actuellement, outre la création des structures précitées, les mesures sont les suivantes :

    *
      toute propagande anti-nataliste et toute publicité sur les contraceptifs sont interdites sauf dans les publications réservées aux médecins et aux pharmaciens. Ce dernier point a été annulé en 1987, le préservatif étant considéré comme un des éléments majeurs de la lutte contre le SIDA,
    *
      tout nouveau produit doit faire la preuve de son innocuité, de sa tolérance et de son efficacité, ainsi que l'absence d'effets tératologiques,
    *
      les mineures désirant garder le secret et les personnes ne bénéficiant pas de prestations maladies peuvent recevoir les produits contraceptifs gratuitement des centres de planification et d'éducation familiales,
    *
      le médecin a le devoir d'informer le public sur les possibilités de Planification, notamment à l'occasion de l'examen prénuptial ; il est le seul à pouvoir poser un dispositif intra-utérin.
    *
      l'aide aux mères en difficulté peut permettre d'éviter certaines situations d'abandon ou d'avortement.

En fait, l'accès à la P.F. reste inégal, lié aux conditions de vie, (milieu socio-économique), au contexte culturel (migrantes) et à l'âge (jeunes) Le nombre des IVG (180 000 par an) montre les limites de la contraception en France.
1.9.3 L'interruption volontaire de grossesse (IVG) et l'interruption thérapeutique de grossesse (ITG)

- La loi Veil de 1975 a été reconduite sans grande modification dans la loi de 1979 qui prévoit que :

    *
      l'avortement doit rester la solution ultime, d'où la nécesité de renforcer l'information et l'éducation sur la contraception,
    *
      la responsabilité totale de la décision revient à la femme, mais tout médecin ou auxiliaire médical peut refuser de pratiquer l'IVG (clause de conscience),
    *
      l'IVG doit avoir lieu avant la fin de la 10ème semaine de grossesse (12è semaine d'aménorrhée) et doit être pratiquée par un médecin dans un établissement hospitalier public ou privé dont le nombre d'IVG ne représente pas plus du quart des actes réalisés chaque année.
    *
      trois entretiens préalables sont obligatoires afin d'éclaircir la décision de la mère; une première consultation médicale pendant laquelle est remis un dossier guide (qui explique les droits et les aides aux mères de familles) ; un entretien social dans un centre de planification et d'éducation familiales ou dans un service social agréé, enfin, une seconde consultation médicale (au minimum une semaine après la première) pour confirmer la décision,
    *
      pour les mineures, l'autorisation parentale est requise ; pour les femmes étrangères, il y a obligation de trois mois de résidence,
    *
      l'acte est pris en charge depuis 1983 par l'assurance maladie ou l'aide médicale comme tout acte thérapeutique ; la tarification est soumise à un plafond, tant pour le public que pour le privé,
    *
      on estime à 180 000 annuellement le nombre des IVG en France.

- Enfin, l'avortement pour motif thérapeutique est possible au-delà de la 10ème semaine, s'il y a danger grave pour la mère ou risque important de maladie sévère ou incurable du foetus. Il est décidé par deux médecins (dont un hospitalier et un expert). Le plus souvent, l'ITG est pratiquée pour une malformation, une anomalie chromosomique,; une maladie durable ou acquise (rubéole, toxoplasmose) ou des causes sociales (viol, inceste,...).
2 Protection des enfants
2.1 Le nouveau-né

Toute naissance d'enfant doit être déclarée, dans les trois jours, à la mairie du lieu de naissance.
Cette déclaration est obligatoire et ne peut être faite que par un membre de la famille ou par la maternité. Le service Etat Civil de la mairie informe dans les 48 heures le service départemental de PMI de cette naissance et remet à la famille le carnet de santé de l'enfant. Un bulletin de naissance est transmis à l'INSEE et à la mairie de résidence.

Discussion
Tout enfant mort avant la déclaration à l'Etat Civil, peut, dans un but de simplification administrative être déclaré comme mort-né ayant respiré. Ceci fausse l'établissement du taux de mortalité infantile, qui est établi à partir du nombre de morts sur le nombre d'enfants nés vivants et oblige l'INSEE à effectuer des correctifs.
Pendant son séjour à la maternité, le nouveau-né est surveillé par le personnel de la maternité, incluant obligatoirement un pédiatre. Un certificat médical est établi au cours des huit premiers jours de l'enfant.
Actuellement, le forfait maternité rembourse les frais d'accouchement et de séjour de la mère et de l'enfant. Si celui-ci est hospitalisé en service spécialisé, il bénéficie de soins gratuits, la prise en charge de tous les frais d'hospitalisation étant intégrale pour les enfants au cours du premier mois de vie. Il n'en reste pas moins qu'il serait intéressant d'individualiser l'enfant normal pendant son séjour à la maternité.

2.2 Le carnet de santé

C'est un livret individuel remis aux parents à la naissance de l'enfant par le service Etat Civil de la commune où a lieu la naissance. C'est un remarquable outil de liaison. Il doit être présenté lors de chaque consultation médicale préventive et curative pour que le médecin puisse prendre connaissance des renseignements qu'il contient et y consigner à son tour ses remarques. Il peut tenir lieu de carnet de vaccination.
Strictement confidentiel, il est la propriété de son titulaire ou de ses parents ; nul ne peut en exiger la communication.

Le carnet de santé comporte, en résumé les renseignements suivants :

    *
      la composition de la famille et ses antécédents,
    *
      les renseignements sur la période prénatale (résumé),
    *
      les renseignements sur la naissance et l'examen néonatal,
    *
      la surveillance médicale de la naissance à 6 ans avec les courbes de poids, de taille et de périmètre crânien et des sous-rubriques concernant le développement psychomoteur, la prescription de vitamines et les observations; le double des examens obligatoires faits aux 9è et 24è mois,
    *
      les vaccinations; comme dit plus haut, ce carnet peut servir de certificat de vaccinations à condition que les rubriques soient datées et signées par le médecin,
    *
      un chapitre concerne la surveillance de l'enfant de 6 à 20 ans et des pages blanches sont prévues pour la période adulte,
    *
      un tableau est prévu pour les examens radiologiques,
    *
      une fiche récapitulative permet de regrouper les maladies épidémiques et contagieuses ainsi que des renseignements importants en cas d'urgence : groupe sanguin, maladies chroniques, allergies, traitements de longue durée,
    *
      enfin, le rabat de la couverture contient les trois certificats de santé obligatoires et les enveloppes "T" permettant leur envoi.

2.3 Les examens systématiques (cf cours semiologie)

L'enfant va bénéficier au cours des six premières années de 20 examens obligatoires :

    *
      9 au cours de la première année : un dans les huit premiers jours puis un au cours des 1e, 2e, 3e, 4e, 5è, 6è, 9è et 12è mois
    *
      trois au cours de la 2è année se situant respectivement au cours des 16è, 20è et 24è mois;
    *
      un examen semestriel pour les quatre années suivantes .

Les examens médicaux préventifs peuvent se faire soit en cabinet médical privé soit en consultation PMI. Ils sont gratuits ou remboursés en totalité.

En centre de PMI, les consultations sont assurées par une équipe (pédiatre, puéricultrice ou infimière, auxiliaire de puériculture) ce qui facilite l'approche médico-sociale des difficultés rencontrées par les familles. Lieux d'examen, d'écoute et de conseil, ces consultations répondent à des normes fixées par la règlementation. Chaque enfant qui est accueilli dispose d'un dossier personnel où seront notées non seulement les constatations de l'examen physique et sensoriel, les étapes du développement psychomoteur et intellectuel mais également les vaccinations ainsi que les conditons de vie et antécédents de l'enfant.

Les examens préventifs ne sont pas des simples pesées mais doivent comporter un examen soigneux du nourrisson déshabillé, une évaluation de la croissance staturo-pondérale, de l'éveil psychomoteur de l'enfant, des conseils diététiques et hygiéniques. Les vaccinations obligatoires seront pratiquées selon le calendrier prévu par la loi et la prescription systématique de vitamine D pour la prévention du rachitisme et de fluor pour prévenir les caries, sera faite. On insistera tout particulièrement :

    *
      sur la surveillance de l'éveil psychomoteur de l'enfant (test de Brunet Lézine ou de Denver),
    *
      sur le dépistage de certaines maladies subaigues, latentes telles diarrhées, infections urinaires, rachitisme, anémie ferriprive,
    *
      sur le dépistage des anomalies sensorielles :
          o
            auditives au moyen des jouets sonores de Moatti ou par la méthode de la voie chuchotée chez le jeune enfant et, après quatre ans, par l'audivérificateur,
          o
            visuelles en utilisant au 24è mois l'optotype de Pigassou et chez l'enfant plus âgé le stycar-vision test (cf. cours sur l'examen de l'audition et de la vision),
    *
      ainsi que sur l'examen bucco-dentaire au cours duquel on notera dents cariées ou absentes. Cet examen permettra très tôt de rappeler la nécessité :
          o
            de prise régulière de fluorure de sodium,
          o
            d'une bonne hygiène alimentaire (pas de sucre entre les repas),
          o
            d'un brossage des dents après les repas à partir de 4 ans.

Si l'ensemble du corps médical participe à cette Médecine Préventive, il faut quand même préciser qu'en consultation PMI, le médecin ne prescrit en principe que des vitamines et du fluor. Les liaisons du service PMI avec le secteur libéral ou hospitalier se sont certes améliorées au cours de ces dernières années mais elles devraient encore se renforcer dans l'intérêt des familles.
2.4 Les certificats de santé

La loi du 15 Juillet 1970 et son décret d'application du 2 mars 1973 prévoient la délivrance de certificats médicaux obligatoires à l'occasion des examens préventifs effectués, au cours des huit premiers jours, au 9è mois et au 24è mois.
2.4.1 Raison et intérêt de cette organisation

L'ordonnance de 1945 organisant la PMI rendait déjà obligatoire les examens médicaux au cours des six premières années de vie : un tous les mois pendant la première année, un tous les deux mois au cours de la deuxième année et un tous les six mois ensuite.
Ces examens, remboursés en totalité, n'étaient obligatoires qu'en théorie, leur non observation n'entraînant aucune sanction.
Des enquêtes faites dans différents départements ont montré que l'assiduité à ces examens était bonne jusqu'à neuf mois (90% des enfants) mais tombait à 15% et même moins, à deux ans.
Ceci indiquait que les 24 examens prévus étaient probablement inutiles pour un enfant dont le développement est normal et leur nombre a été réduit à 20.
D'autre part, on pouvait regretter que déjà 10% des enfants à un an ne soient pas sérieusement vus et qu'un tout petit nombre seulement soit examiné à 24 mois.
La loi de 1970 vise à remédier à cet inconvénient en créant l'obligation réelle d'un examen à des âges clefs : au 8ème jour de vie, aux 9ème et 24ème mois.
Simultanément, les progrès réalisés dans la protection de l'enfant amènent à modifier les objectifs de la surveillance et à envisager un dépistage plus précoce des handicaps sensoriels, moteurs, psychologiques et même sociaux.
En effet, il y a quelques années, c'était à la fin de la première année d'école primaire qu'on repérait, souvent parmi les derniers de la classe, les enfants en difficultés (à l'âge de 7 ans).
L'examen d'entrée à l'école élémentaire entre 5 et 6 ans a déjà constitué un progrès et le développement de l'école maternelle a permis la mise en place d'un nouvel examen à l'âge de 3 ou 4 ans. On pouvait espérer faire encore mieux en examinant soigneusement les enfants de 9 à 24 mois d'où l'intérêt de la loi de 1970.
Le dépistage et la correction, si possible, très précoce, d'une infirmité rétablira une relation normale de l'enfant avec le monde extérieur et une reprise de son développement psychomoteur et intellectuel à une période capitale pour son avenir.
Il a donc fallu mettre au point des techniques d'examen, les appliquer à tous les enfants et, pour les enfants présentant des anomalies, créer les services spécialisés nécessaires. Cette évolution de la politique de l'enfance se poursuit encore de nos jours.
Pour préciser la question en demeurant encore dans les généralités, il convient d'indiquer que l'intérêt des certificats de santé est double : collective et individuelle.
- d'une part, il s'agit pour le Ministère de la Santé, d'obtenir une connaissance épidémiologique des problèmes de l'enfant à l'échelon national, lui permettant d'assurer une planification des équipements et des personnels adaptés aux besoins exacts de notre population. Pour cela, des renseignements anonymes suffisent et seraient plus précis si limités à un échantillon d'enfants ;
- d'autre part, ces certificats permettant un dépistage précoce des affections invalidantes et des inadaptations, doivent conduire à un traitement aussi efficace que possible des troubles. Le processus doit donc toucher tous les enfants et à l'échelon local, les renseignements doivent être personnalisés pour permettre de surveiller plus attentivement certains enfants.

2.4.2 Organisation du système

L'allocation au jeune enfant décrite précédemment remplace les différentes primes accordées autrefois pour l'enfant. L'allocation est versée mensuellement sans conditions de ressources jusqu'au 3ème mois de l'enfant. Au-delà du 3ème mois, elle varie en fonction des revenus de la famille. Cette allocation peut être diminuée ou supprimée si les certificats médicaux ne sont pas envoyés.

Les trois certificats sont inclus dans le carnet de santé remis aux parents à la naissance. Chaque certificat comprend deux feuillets : le premier feuillet, médical, est divisé en deux parties égales comprenant, l'une des renseignements d'identification et l'autre des renseignements médicaux. La réponse est donnée soit en clair, soit en entourant le numéro de la rubrique suspectée ou confirmée.

La partie médicale de chaque certificat comporte un certain nombre de renseignements médicaux :

    *
      sur le premier : les antécédents, la grossesse, l'accouchement, les premiers jours de vie,
    *
      sur le deuxième et le troisième : le développement somatique, psychomoteur et intellectuel de l'enfant, les vaccinations dont il a bénéficié, la pathologie qu'il a présentée ou qu'il présente;

Le deuxième feuillet est en fait une carte-lettre contenant uniquement les renseignements administratifs, dont le remplissage se fait par duplication de la partie d'identification du premier feuillet. Ces deux feuillets adhèrent l'un à l'autre et ne doivent être détachés qu'après avoir été remplis.

La carte-lettre est remise à la famille qui devra l'envoyer, dans les plus brefs délais, à l'organisme qui lui verse ses prestations familiales (Caisse d'Allocations Familiales). Cette carte-lettre reçue en temps voulu permet le versement de l'AJE). Le médecin doit donc veiller à bien informer les familles des délais à respecter pour éviter des contentieux. Le feuillet médical est adressé par le médecin examinateur au médecin chef du service de PMI au moyen d'une enveloppe T (envoi gratuit) inclue elle aussi, dans le carnet.
Si le médecin, après son examen juge nécessaire de faire pratiquer des examens complémentaires, ceux-ci pourront être remboursés à 100% par les caisses de sécurité sociale à condition de faire une demande préalable. La liste des examens autorisés est limitative. Ils seront utilisés pour renforcer la prévention et parfaire le dépistage. Pour effectuer ces examens, le médecin remplira les feuilles 9-A, 24-A, et 6-A du carnet de maternité pour les examens autorisés et pour faire une demande d'entente préalable les feuilles 9-B, 24-B et 6-B.
Le médecin peut également adresser l'enfant à un Centre d'Action Médico-Sociale Précoce (CAMSP). Ces établissements ont été créés en 1976 et ont pour but de confirmer l'existence d'un trouble, de faire le bilan de la situation et de mettre en route une thérapeutique.

Le devenir des certificats de santé
Les fiches médicales du certificat de santé sont regroupées au service départemental de la PMI où elles sont exploitées.
L'enregistrement automatisé permet d'obtenir aisément des données statistiques sur de nombreux points : enfants transférés de la maternité à un service spécialisé (10%), cause de ces transferts, avenir des enfants, établissement de courbes standard de poids, taille, périmètre crânien aux différents âges, état des vaccinations, etc... La connaissance de ces résultats est naturellement essentielle pour mener une politique de santé de l'enfance et en contrôler l'efficacité.
Les certificats de santé sont par ailleurs vus par les médecins de PMI de secteur qui, s'ils le jugent nécessaire, contactent les médecins traitants, interviennent eux-mêmes ou font intervenir les autres professionnels du service : assistantes sociales, puéricultrices. Le rôle du médecin de PMI est un rôle de médecin de Santé Publique qui consiste à s'assuer que tout enfant de son secteur présentant une anomalie est bien suivi.
Ajoutons que les renseignements tirés du premier certificat pourraient permettre, dans certains cas, de mieux surveiller la grossesse suivante. Ce système, essayé dans plusieurs départements n'est pas diffusé.

Si le premier certificat est rempli par un pédiatre en maternité, ceux du 9è et 24è mois le sont surtout par des médecins en secteur libéral qui participent ainsi activement à la médecine préventive.
Dans ce système de prévention concernant le domaine social et médical, il est indipensable qu'un travail en équipe s'instaure, que chacun prenne ses responsabilités en connaissant bien le rôle complémentaire du voisin.
Au niveau collectif, si certaines données sont fiables (poids, taille, ...), d'autres, concernant en particulier la pathologie et dépendant des médecins, manquent encore de rigueur mais il en est de même de la plupart des enregistrements épidémiologiques (certificats de décès, déclaration de maladies obligatoires,...).
Au niveau individuel, ce système améliore le fonctionnement du service de PMI dans les départements où il a été appliqué correctement et certaines enquêtes ont montré que les enfants en avaient tiré bénéfice (dysplasie de hanche en Ille-et-Vilaine).

Discussion
Ce système est onéreux mais, l'instauration de ces certificats est probablement l'évènement le plus important survenu en Santé Publique en France depuis le début du siècle. Il crée les bases d'une bonne information statistique indispensable à l'établissement d'une politique de santé. D'autre part, il doit augmenter l'efficacité de la surveillance des jeunes enfants.
Il s'agit d'un certificat médical dont le médecin prend la responsabilité en le signant. La partie médicale est confidentielle. Le secret professionnel est respecté car les renseignemnts suivent un circuit médical.
C'est un travail supplémentaire demandé au médecin mais la possibilité de remplir par duplication la partie médicale du certificat et la page correspondante du carnet de santé vise à simplifier les écritures (supprimé dans la nouvelle version du carnet).
Les programmes d'exploitation nécessiteront au médecin encore de longues études, mais dès à présent, on peut penser que se trouvent règlés des problèmes envisagés par ailleurs, comme ceux, d'un fichier de vaccinations ou d'un fichier d'enfants handicapés.
Des mesures très strictes ont été prises pour éviter éventuellement tout usage abusif de ce fichier : les certificats sont détruits au bout de 1 ou 2 ans; les bandes informatiques sont conservées dans des coffre-forts blindés, seul le médecin de PMI peut autoriser leur utilisation ; elles sont banalisées (rendues anonymes) au bout de 6 ans. Aucun fichier médical ne fait l'objet de telles précautions.
Les examens des 9ème et 24ème mois

Les 20 examens systématiques dont bénéficient gratuitement tous les enfants français au cours des six premières années de vie sont naturellement tous importants.
Il nous semble cependant nécessaire d'insister sur les examens du 9ème et du 24ème mois qui donnent lieu à l'établissement d'un certificat médical obligatoire. Ce certificat n'a de valeur que si l'examen est correctement effectué.
Nous ne reprendrons pas l'examen du nouveau-né déjà vu (cf. nouveau-né).

a) Chaque examen durant les cinq premières années de vie devrait se faire en présence des parents : c'est le plus souvent la mère qui est présente bien que le nombre de pères assistant à la consultation soit en augmentation.
L'entretien avec les parents est toujours très important :

    *
      pour juger de la situation familiale dans laquelle vit l'enfant,
    *
      pour donner les conseils nécessaires aux parents (éducation sanitaire).

b) Le point de départ est l'examen du carnet de santé de l'enfant qui, bien tenu, donne rapidement des renseignements précis sur :

    *
      antécédents de l'enfant : antécédents familiaux, grossesse, accouchement, croissance, courbes de poids, taille, P.C., développement psychomoteur et intellectuel, vaccinations, régime : vitamine D, Fluor.
    *
      la famille, les conditions socio-économiques, le mode de vie,...

c) Le carnet de santé est un bon moyen de commencer l'entretien avec la mère. Bien tenu, il permet de la féliciter. Manquant ou incomplet, il peut être la traduction d'un manque d'intérêt, souvent inconscient, qui invite à explorer les relations parents-enfants. Par exemple, on s'enquérira des raisons qui font que l'enfant n'est pas vacciné : ignorance, insouscience, plus rarement opposition aux vaccinations. On demande ensuite aux parents s'ils ont quelque chose à demander au sujet de l'enfant et pour les aider, on demande s'il mange bien, s'il dort bien.

L'examen ensuite, bien que variable suivant l'âge de l'enfant, sera systématique et explorera toujours :

    *
      le développement somatique : poids, taille (ou longueur couché), périmètre crânien dont les mesures viendront actualiser les courbes,
    *
      le développement psychomoteur et intellectuel,
    *
      l'état de vue, de l'audition, de la dentition,
    *
      l'alimentation.

Au cours des cinq premiers mois de la vie, on appréciera :

    *
      la tenue de la tête (1 à 2 mois),
    *
      l'apparition du sourire-réponse (2 mois),
    *
      la disparition des réflexes archaïques (3 à 5 mois),
    *
      l'évolution du tonus : de l'hypertonie des membres vers l'hypotonie,
    *
      le développement des fonctions visuelles permet l'analyse la plus fine, on notera successivement : fixation, puis convergence, poursuite oculaire, enfin synergie des mouvements de la tête et des yeux.

A six mois : l'examen ne donne pas lieu à certificat mais est important car :

    *
      l'enfant doit avoir une alimentation diversifiée,
    *
      les premières vaccinations (DTCoq, BCG, Poliomyélite, Hib Hépatite B) sont terminées ou en cours,
    *
      la tenue de la tête est ferme et l'enfant la tourne aisément vers la source d'un bruit produit à l'horizontal,
    *
      il se tient assis avec appui et debout supporte une partie de son corps,
    *
      sur le ventre, il soulève la tête et les épaules. Il est capable de se retourner,
    *
      la coordination entre les mains se développe et il commence à passer un objet d'une main à l'autre. Il est capable de prendre un cube sur la table,
    *
      il sourit au miroir et commence à reconnaître les visages familiaux et étrangers.

Tout signe anormal doit faire l'objet d'une examen plus approfondi au besoin par un spécialiste. Ainsi en est-il d'un strabisme, d'une position anormale des mains et des pieds, d'une asymétrie du tonus,...
Certains cas : anxiété de la mère, réponses pauvres aux personnes ou aux objets, absence ou rareté du sourire, absence d'intérêt aux jouets,... doivent éveiller l'attention, faire étudier le milieu dans lequel l'enfant vit et conduisent à revoir l'enfant un mois plus tard, sans attendre l'âge de 9 mois.
Naturellement, s'il s'agit d'un prématuré, il faut tenir compte non de l'âge légal chronologique, mais de son âge biologique, donc se baser sur l'âge corrigé.

L'EXAMEN DU NEUVIEME MOIS
Il donne lieu à la rédaction d'un certificat médical obligatoire. Il a lieu entre 8 et 9 mois mais est aussi autorisé au cours du 10ème mois où il est d'ailleurs plus facilement interprétable.
L'entretien se déroule comme précédemment et toujours la lecture du carnet de santé fournit des renseignements précieux. De la même façon, les courbes de poids, longueur couché et périmètre crânien seront mises à jour.
A cet âge l'enfant se tient assis sans soutien et tient debout avec appui. Depuis l'âge de 5 à 6 mois, il a pris l'habitude de manipuler les objets et cette capacité s'affirme (développement de la préhension du bord cubital vers le bord radial, de la paume vers l'extrémité des doigts pour aboutir à la préhension fine entre pouce et index). Ce test nécessite une bonne vision. D'ailleurs, il suit des yeux les objets qui tombent du sol. Il localise mieux les sons (qui viennent du bas et peu après du haut). Il émet quelques syllabes qu'il répète (ba, ba ma, ma,...).
A 12 mois, l'enfant est capable de prendre la pastille entre le pouce et l'index et de la remettre dans le flacon ; ceci traduit une bonne vision, une bonne préhension fine et un bon développement intellectuel.

L'EXAMEN DU 24ème MOIS
L'enfant est devenu indépendant, il marche, il peut monter un escalier. Cette indépendance se manifeste par le désir de faire des choses lui-même et d'imiter quelques actions domestiques. Le langage se développe et va lui permettre d'exprimer ses propres idées et de communiquer avec son entourage.
L'examen se déroulera comme les précédents ; pendant l'entretien avec la mère (ou le père), l'enfant étant assis face à une table sur laquelle se trouvent des jouets : tasse, couvert, voiture, chaise, avion,...
A cet âge, on s'enquéra de :

    *
      l'âge de la marche : depuis quand marche-t'il ?
    *
      du développement de langage : associe-t'il des mots ? Il est toujours difficile de savoir combien l'enfant possède de mots. S'il ne parle pas, on demande à la mère si l'enfant comprend ce qui lui est dit ou bien obéit aux ordres qui lui sont donnés ; s'il répond lorsqu'on l'appelle d'une pièce voisine.
    *
      de la propreté : est-il propre, le jour, la nuit ?
    *
      de l'alimentation : essaye-t'il de manger seul, prend-il la tasse et boit-il à la tasse sans renverser son contenu ?
    *
      de sa participation à son habillage et à son déshabillage (dépend beaucoup de l'attitude de la mère),
    *
      de la façon dont il joue avec ses jouets.

A cet âge, l'enfant s'asseoit, s'accroupit, se relève, marche. On apprécie :

    *
      la vision (difficulté encore d'apprécier l'acuité visuelle : jouets miniaturisés),
    *
      l'audition (voix chuchotée par exemple),
    *
      le langage, il est capable de faire de courtes phrases.

L'enfant doit être capable d'identifier 4 parties de son corps (mains, nez, yeux, bouche, pieds). Il est capable de construire une tour de 6 à 7 cubes ou par imitation d'associer des cubes pour faire un pont, un train. Il peut imiter un trait vertical et peut identifier 2 ou 3 objets usuels. En cas de doute, revoir l'enfant un ou deux mois plus tard et en cas d'anomalie certaine ou très probable, demander l'avis d'un spécialiste.

L'examen au cours de la 4ème année
Il est pratiqué à l'école maternelle et bénéficie ainsi des facilités de l'école : possibilité d'avoir l'avis des enseignants, de suivre l'enfant. A cet âge, on peut obtenir une certaine collaboration de l'enfant, ce qui augmente la fiabilité des tests. C'est actuellement la période la meilleure pour dépister les infirmités sensorielles moyennes et éviter les handicaps qu'elles peuvent entraîner. Il est le plus souvent effectué par le médecin de PMI, mais parfois par le médecin scolaire (cf. séméiologie).

L'examen au cours de la 6ème année
Il est pratiqué avant l'entrée à l'école élémentaire par le médecin du Service de Promotion de la Santé en faveur des Elèves.
Erreurs innées du métabolisme
B. Le Marec

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 2 mars 2000

1 La phénylcétonurie (P.C.U.)
1.1 C'est la première connue...
1.2 Cliniquement
1.3 Les formes cliniques ou variants
1.4 Dépistage
1.5 Traitement
1.6 Résultats
   

1.7 Diagnostic anténatal
2 Hypothyroïdie
3 Dépistage d'autres maladies
3.1 Hyperplasie congénitale des surrénales
3.2 Mucoviscidose
3.3 Drépanocytose
Conclusion

Objectifs

Phénylcétonurie

1. Décrire le mécanisme des erreurs innées du métabolisme et ses conséquences.

2. Donner l'incidence de la P.C.U.

3. Décrire le mécanisme de la P.C.U. et ses conséquences.

4. Décrire les caractères de l'encéphalopathie de la P.C.U.

5. Donner et interpréter les différents taux de phénylalaninémie.

6. Décrire le processus du dépistage (circuit du carton, suite à donner, ...).

7. Indiquer les principes du traitement de la P.C.U.

8. Donner les résultats du traitement de la P.C.U.

9. Décrire le problème des mères phénylcétonuriques.

Hypothyroïdie

10. Donner l'incidence de l'hypothyroïdie.

11. Décrire le principe du dépistage de l'hypothyroïdie (T4 - TSH) et interpréter différents taux.

12. Donner les différentes formes de l'hypothyroïdie et leur pourcentage.

13. Conduite à tenir devant un taux de TSH supérieur à 100 micro-unités par ml.

14. Indiquer le traitement de l'hypothyroïdie et la surveillance à exercer.

Dépistage d'autres maladies

Ces deux affections déterminent des arriérations mentales graves si elles ne sont pas dépistées et traitées précocement.
En France, le dépistage de ces deux maladies se fait simultanément et de façon systématique chez tous les nouveau-nés.
De 1972 à 1997, 1.500 cas de phénylcétonurie, 4.000 cas d'hypothyroïdie (depuis 1978), 230 hyperplasies congénitales des surrénales (depuis 1995), ont été dépistés et pris en charge en France.
1 La phénylcétonurie (P.C.U.)

(voir aussi chapitre Génétique)

1.1 C'est la première connue et le type même des erreurs innées du métabolisme

L'encéphalopathie est le signe majeur commun de ces erreurs innées du métabolisme. Elle survient tôt en période néonatale mais avec un intervalle libre, chez un enfant sans antécédents personnels (grossesse et accouchement normaux).
Ces maladies sont en effet héréditaires ; liées à un déficit enzymatique, elles ont une hérédité récessive autosomique ; les deux parents sont hétérozygotes et le risque à chaque grossesse d'avoir un enfant atteint est de 25 %. L'incidence est d'environ 1/16.000 naissances, ce qui correspond à environ 1 hétérozygote sur 60 dans la population générale.

La phénylalanine (PA) est un acide aminé indispensable présent dans la plupart des protéines animales et en particulier le lait. Sous l'action de la phénylalanine hydroxylase fabriquée dans le foie, la PA va donner la Tyrosine qui, elle-même se transforme en thyroxine, adrénaline et mélanine.

Le déficit en PA hydroxylase entraîne donc une accumulation de la PA et une diminution des métabolites normaux. Cependant, l'apport de tyrosine alimentaire est suffisant pour que la thyrosine ne soit pas diminuée dans la PCU. Une voie parallèle d'élimination urinaire se crée ; la PA sera éliminée sous forme d'acide phénylpyruvique. Il est facilement mis en évidence (coloration verte lorsqu'on ajoute du perchlorure de fer à l'urine), ce qui fut à l'origine de la découverte de la maladie par FOLLING en 1934 qui de ce fait appela la maladie "idiotie phénylpyruvique". Mais l'acide phénylpyruvique n'apparaît que lorsque le taux de PA dans le sang atteint 15 mg pour 100 ml ; le test est donc trop tardif et abandonné au profit du dosage direct de la phénylalaninémie. Par tradition la maladie continue cependant a être appelée Phénylcétonurie (P.C.U.).

1.2 Cliniquement

Le signe majeur est l'apparition d'une encéphalopathie et le plus souvent "d'encéphalopathie nue", c'est-à-dire sans aucun signe d'accompagnement et en particulier, de dysmorphie. Mais la maladie peut débuter par des signes neurologiques aigus, des convulsions. Dans certains cas, les manifestations sont plus banales : vomissements, anorexie, somnolences, troubles cutanés. Enfin, dans certains cas la maladie se révèle chez un enfant plus âgé par des troubles neurologiques et du comportement.
Actuellement, le dépistage néonatal systématique permet le diagnostic avant toute symptomatologie.

1.3 Les formes cliniques ou variants

On sait maintenant que le trouble métabolique de la PA peut relever soit d'une anomalie de l'enzyme : la phénylalanine hydroxylase (PAH), soit d'une anomalie du système cofactoriel des bioptérines.
La PAH est un enzyme hépatique, fabriqué suivant un programme génétique très précis. Une mutation du gène de structure va entraîner la formation d'une protéine à activité réduite ou nulle.
Dans la forme classique, l'activité résiduelle est nulle mais il existe des "variants" avec une activité de 3 à 6 % (forme modérée) ou de 1 à 3 % (forme atypique).
Lorsque le système cofactoriel est en cause, l'activité de la PAH est normale et il peut s'agir d'un déficit complet de synthèse des bioptérines : c'est l'hyperphénylalaninémie maligne dans laquelle le régime pauvre en PA n'empêche pas l'encéphalopathie.

1.4 Dépistage

La recherche de l'acide phénylpyruvique dans les urines est un test facile mais trop tardif, actuellement abandonné. Le dépistage se fait donc en mesurant le taux de PA dans le sang. Celui-ci est prélevé sur un carton de papier buvard spécial.
Ce carton comprend une partie centrale d'identification de la maternité de naissance, de l'enfant (date de naissance, date de prélèvement), de la famille (adresse) et à chaque extrémité, deux parties détachables de la taille d'un ticket de métro sur lesquels sont imprimés quatre cercles.
Le sang prélevé par piqûre au talon doit imprégner complètement, recto et verso, au moins 3 des cercles de chaque ticket.
Ce carton est ensuite adressé par la poste dans une enveloppe "libre-réponse" à l'Association régionale agréée. Pour la Bretagne : Centre de Dépistage Néonatal, Institut de la Mère et de l'Enfant - Annexe Pédiatrie, Hôpital Sud - Rennes.
Les parties détachables sont adressées avec un numéro d'ordre, au laboratoire qui effectue les dosages.

Pendant longtemps, le dépistage a été effectué par le Test de Guthrie, méthode semi-quantitative (il consistait à mesurer la levée d'une inhibition de culture de bacille subtil par la phénylalanine).
Il est maintenant remplacé par la fluorimétrie, plus coûteux mais plus préçis, même si, de façon impropre, on parle parfois de "Guthrie" pour nommer le test de dépistage de la PCU.

La fluorimétrie est une méthode quantitative. Après éluat du disque du papier buvard, le dosage peut être pratiqué même sous antibiotiques. Un résultat de 10 mg/ml traduit l'existence d'une hyperphénylalaninémie mais tout résultat atteignant ou dépassant 4 mg/ml est considéré comme suspect et oblige à pratiquer un nouvel examen sans délai. Or, l'enfant est sorti de la maternité et il faut alerter les parents, le médecin traitant et le service de P.M.I., pour faire le plus rapidement possible un nouveau prélèvement et un nouveau dosage, au besoin après administration de vitamine C (coenzyme) qui, lorsque l'augmentation est liée à l'immaturité, facilite le retour à une réponse normale. Si le taux de PA demeure élevé, l'enfant doit être dirigé vers un centre spécialisé où des examens complémentaires : chromatographie des acides aminés avec dosages comparatifs de la PA et de la tyrosine, seront faits, et si la P.C.U. est confirmée, l'enfant sera mis au régime le plus rapidement possible.

La question a été soulevée de savoir à partir de combien de jours et à quel taux de phénylalaninémie il était possible de distinguer les enfants atteints de P.C.U., des sujets normaux. Ceci dépend de l'âge de l'enfant, du taux retenu, de l'alimentation : le lait de femme contient moins de phénylalanine (240 à 570 mg/l) que le lait de vache (1.500 à 2.200 mg/l).

Des enquêtes effectuées, il ressort que dans la P.C.U., le taux augmente régulièrement de la naissance au 14è jour. En retenant la barre de 4 mg de phénylalanine pour 100 ml de sang, le risque de faux-négatifs est de 0,04 au 5è jour et de 0,003 % au 6è.

Organisation :
Le dépistage a d'abord été une initiative privée (Société des Eaux d'Evian) et a débuté en 1967 dans quelques départements français. En 1972, la création de l'Association Française pour le Dépistage et la Prévention des Maladies Métaboliques et des Handicaps de l'Enfant a permis d'étendre ce dépistage à l'ensemble des départements français et aux D.O.M.-T.O.M. et de lui assurer plus de rigueur.

L'association est en fait une fédération d'associations régionales responsables du dépistage et du suivi des enfants atteints de P.C.U. L'association a reçu l'appui du Ministère de la Santé et surtout une aide financière de la Caisse Nationale d'Assurance Maladie des Travailleurs Salariés (CNAMTS). Une convention a été signée dans laquelle la CNAMTS rembourse à l'Association un prix forfaitaire par test effectué. En contrepartie, la CNAMTS et le Ministère de la Santé s'assurent que la couverture de la population est bonne, contrôlent la qualité des examens pratiqués dans chaque laboratoire et, enfin, le suivi des enfants qui doivent être vus, une fois par an, par les psychologues pour vérifier que l'évolution reste satisfaisante.

La prise en charge des produits diététiques et, plus tard des aliments diététiques, est entièrement gratuite pour les familles qui les reçoivent directement de la Pharmacie Centrale des Hôpitaux de Paris.

1.5 Traitement

Le traitement est uniquement diététique et nécessite un apport restreint de phénylalanine dans un régime strictement établi, (la PA est un acide aminé indispensable).
On peut utiliser des hydrolysats de protéines naturels dont la PA a été extraite en grande partie. Le type en est le LOFENALAC (100 gr = 80 mg de PA), puis viennent l'ALBUMAID, le P.K.U. Diet 40, le CYMOGRAM et le MINAFEN.
On peut utiliser les mélanges d'acides aminés sans PA comme l'AMINOGRAM.

L'acceptation de ces poudres est facile au cours des six premiers mois. Par la suite, elles peuvent être associées à des aliments naturels et à des produits diététiques hypoprotidiques qui évitent la monotonie, cause d'anorexie et de chapardage (Rite Diet, Maïzena, pain, gaufrettes, pâtes hypoprotidiques). Mais l'apport d'une quantité suffisante de protides accompagnés d'une quantité limitée de PA restera toujours un problème car l'acceptabilité de ces produits diététiques, surtout chez les plus grands, dont le goût est diversifié, n'est pas toujours bonne, et ceci malgré des tentatives de présentations plus agréables pour l'enfant : MAXAMAID ressemblant à du jus d'orange ou, solide, ressemblant à des barres de chocolat.
C'est pourquoi l'aide d'une diététicienne, en contact direct avec la famille, est de la plus grande importance.

Le calcul du régime doit tenir compte de la tolérance de l'enfant et la quantité de PA du régime, établie pour maintenir un taux de phénylalaninémie compris entre 2 et 10 mg pour 100 ml.

La durée du traitement varie selon les auteurs de 6 à 12 ans. Cette alimentation spécialisée coûte cher mais, les produits indispensables sont remboursés selon un processus très précis.

Les enfants atteints de P.C.U. doivent être régulièrement suivis et leur développement mental et intellectuel surveillé par des examens psychologiques pratiqués à intervalles réguliers.

1.6 Les résultats

Ils sont bons. Un traitement bien suivi évite l'arriération mentale et, débuté précocement, permet un développement mental et intellectuel normal. Toutefois les résultats scolaires, qu'on commence à connaître, sont moins bons et il existe fréquemment des troubles d'apprentissage du langage, une imprécision motrice, des tremblements.

Enfin, les progrès réalisés dans le dépistage et le traitement précoce font que les filles atteintes de P.C.U., ayant une intelligence normale, atteignent la puberté, vont se marier et, ayant une fécondité normale, vont avoir des enfants. Mais deux enquêtes (KOMROWER d'une part, LENKE et LEVY d'autre part), ont montré qu'au cours de ces grossesses, il y avait beaucoup d'avortements (20 à 25 %), un retard mental (72 à 75 %) et des malformations diverses (microcéphalie 65 %, retard de croissance 36 %, malformations cardiaques 12 %).
Le nombre de femmes dans ce cas augmentant, on risque de se retrouver devant un nombre de nouveau-nés de mères phénylcétonuriques égal au nombre de nouveau-nés dépistés. C'est dire l'importance des recherches entreprises pour prévenir cette nouvelle pathologie.

Ceci pose donc le problème d'un traitement des femmes phénylcétonuriques désirant avoir un enfant : un régime pauvre en PA débutant dès avant la conception est actuellement conseillé, il est indispensable pendant la grossesse pourque l'enfant ne soit pas microcéphale. Il doit naturellement maintenir des apports caloriques normaux et des apports protidiques ; là encore se posent des problèmes d'acceptabilité du régime.

1.7 Le diagnostic anténatal

Il est maintenant possible grâce aux progrès des méthodes de biologie moléculaire, car le gène a été cloné. Mais il pose un problème d'éthique : le diagnostic prénatal, devant conduire à proposer éventuellement l'interruption de grossesse, est-il légitime pour une maladie traitable ?
2 L'hypothyroïdie

Le dépistage de l'insuffisance thyroïdienne, autre cause d'arriération mentale, est étroitement lié à celui de l'hyperphénylalaninémie. Il s'effectue également chez le nouveau-né après 72 heures de vie par un prélèvement de trois gouttes de sang après piqûre au talon et déposées sur le même papier buvard que celui utilisé pour la P.C.U. L'organisation d'ensemble est calquée sur celle de la P.C.U. et le centre régional doit contrôler la couverture de la population et surtout le suivi des enfants.

L'incidence de la maladie est plus élevée que celle de la P.C.U. : 1 cas pour 4.000 naissances (soit 200 cas par an en France).
Rappelons que la glande thyroïde apparaît dès la deuxième semaine de vie embryonnaire, au niveau de la langue. Elle migre ensuite pour atteindre sa position définitive à la base du cou. Dans certains cas, cette migration est incomplète et la glande en position ectopique ne peut se développer convenablement.
Glande endocrine, la thyroïde va sécréter un certain nombre d'hormones dont la plus importante est la Thyroxine, hormone qui joue un rôle important sur la croissance et le développement intellectuel et mental. L'insuffisance de sécrétion entraîne donc un nanisme et un retard mental. Ceci est évitable si un traitement substitutif est entrepris tôt, d'où l'intérêt du dépistage néonatal. La sécrétion d'hormones thyroïdiennes (T3 - T4) est sous la dépendance d'une hormone hypophysaire : la thyréostimuline (TSH).

Dès 1973, le dépistage de l'hypothyroïdie a été réalisé au Canada par DUSSAULT. Les progrès réalisés dans les dosages radio-immunologiques ont rendu possible le dosage de la T4 et de la TSH sur des doses minimes de sang permettant ainsi la généralisation du processus. Dans l'hypothyroïdie, on constate une baisse de la T4 et une élévation de la TSH ; mais la baisse de la T4 est parfois modérée et donc d'interprétation délicate alors que l'augmentation de la TSH est toujours importante. L'idéal est donc de doser les deux, mais pour des raisons économiques, on a retenu le dosage unique de la TSH. Dans l'enquête de ROCCHICIOLI, l'incidence de l'hypothyroïdie dépistée par test TSH n'est que de 1/9.600 en utilisant la T4 comme seul marqueur et de 1/3.000 en utilisant conjointement la T4 et la TSH. La TSH semble donc la plus fiable et on limite ainsi au maximum les faux négatifs. Toutefois, il faut savoir qu'on ne peut dépister alors les insuffisances hypotalamohypophysaires, mais elles sont rares (1/60.000) et sont les moins graves pour le cerveau.

La barre de normalité fixée à 50 micro-unités par ml a été, pour plus de sûreté, abaissée à 30 micro-unités par ml. Une TSH comprise entre 30 et 40 micro-unités par ml demande un contrôle rapide sur un deuxième prélèvement papier. Si le taux est supérieur à 80 micro-unités par ml, il faut immédiatement préciser le diagnostic par des dosages hormonaux et une gammagraphie de la thyroïde ; ces examens sont généralement effectués dans les C.H.R. On sait alors qu'il s'agit d'une ectopie, d'une athyréose, d'un trouble congénital de l'hormonogénèse ou d'une hyperthyrostimulinémie transitoire. Dans ce dernier cas, la TSH est comprise entre 40 et 200 micro-unités par ml mais les T3 et T4 sont normales et la glande en place, l'évolution se fait vers la régression en quelques semaines. Récemment, CZERNICHOW a montré l'existence d'hypertyrotropinémies (TSH > 40 micro-unités) chez des enfants normaux faisant penser que le dosage immunologique de la TSH dose non seulement la TSH mais un "matériel TSH". Cette forme ne nécessite pas de traitement.

Les statistiques de l'Association Française, sont les suivantes :

Fréquence de l'hypothyroïdie en France métropolitaine selon l'étiologie
(de 1978 à 1993 inclus)
N = 11.425.792
     

Ensemble des hypothyroïdies dépistées
   

Estimation en excluant les non classés
Nombre
   
%
   
Fréquence
   
%
   
Fréquence

Ectopie
   

1.401
   

47,7
   

1 p. 8.156
   

51,8
   

1 p. 7.519

Athyréose
   

781
   

26,6
   

1 p. 14.630
   

28,9
   

1 p. 13.488

Glande en place normale
   

524
   

17,8
   

1 p. 21.805
   

19,3
   

1 p. 20.104

Non classée
   

299
   

7,9
   

1 p. 49.894
           

TOTAL
   

2.935
         

1 p. 3.893
           

FARRIAUX a colligé récemment 35 cas de faux-négatifs (1/300.000), ce qui est faible. 18 fois l'erreur aurait pu être évitée (prélèvements non faits ou égarés, erreurs techniques de laboratoire) mais les autres relevaient d'un dysfonctionnement thyroïdien apparu secondairement (6 ectopies, 2 athyréoses, 5 glandes en place, 3 hypothyroïdies hypotalamohypophysaires).

Traitement et évolution
On sait que les hormones maternelles ne traversent pas la barrière placentaire. Or, elles jouent un rôle essentiel dans le développement du cerveau dès la vie foetale. Chez l'homme, il semble que la période critique s'étende aux premières semaines de vie du nouveau-né et que les lésions soient réversibles si le traitement est entrepris tôt. Avant le dépistage systématique, le diagnostic n'était le plus souvent porté qu'entre 3 et 6 mois et le début tardif du traitement explique la médiocrité des résultats obtenus. Mc Paul reprenant les données de la littérature, a d'ailleurs trouvé que le Q.I. était inférieur à 75 dans 11 % des cas si le traitement est entrepris avant les six premières semaines de vie et de 38 % après cette date.

Le traitement est substitutif et pendant longtemps l'extrait thyroïdien a été utilisé. Toutefois, il semble préférable d'utiliser la L-Thyroxine (solution à 5 micro-g/goutte) à la dose d'une goutte/kg.
La surveillance des enfants doit comporter un contrôle biologique (la TSH peut rester élevée plusieurs semaines mais la T4 doit s'élever rapidement), un contrôle de la croissance avec détermination de l'âge osseux et une surveillance du développement psychomoteur (Brunet-Lézine jusqu'à 3 ans ou Denver Test jusqu'à 6 ans).
Le recul est encore insuffisant pour apprécier les résultats à moyen et à long terme mais quelques études donnent des résultats encourageants. Une difficulté est d'avoir un bon instrument de mesure. La détermination du Q.I. même analysé dans ses différentes composantes, n'est peut être pas suffisante comme ceci a été démontré pour la PCU. D'autre part, une telle étude comporte la comparaison à un groupe normal témoin, qu'il est souvent difficile de constituer et de suivre.
3 Dépistage d'autres maladies
3.1 Hyperplasie congénitale des surrénales

Depuis 1995, le dépistage de l’hyperplasie congénitale des surrénales est devenu systématique, par dosage radio immunologique de la 17 hydroxyprogestérone sur le même papier buvard que pour les autes dépistages. Fait à 3 jours de vie, cela permet d’en faire le diagnostic très tôt, avant le syndrome de perte de sel qui survient habituellement vers 2-3 semaines de vie.
Le nombre important de formes infra cliniques, justifie ce diagnostic systématique. Ainsi, depuis 1995, 230 bébés ont été dépistés et traités en France.
3.2 Mucoviscidose

Le dépistage de la mucoviscidose fait toujours l'objet d'évaluations. Pourtant certaines régions (en particulier la Bretagne) le font systématiquement, convaincues du bien fondé de cette conduite pour trois raisons :

    *
      la fréquence particulière en Bretagne,
    *
      l'intérêt génétique du dépistage : si on dépiste un cas en période néonatale, la famille demandera sûrement un diagnostic anténatal à la grossesse suivante, et ainsi sera évitée la naissance d'un deuxième enfant atteint, conduite qu'ils n'auraient peut-être pas adoptée si la maladie s'était déclarée plus tardivement, leur laissant, dans l'intervalle, le temps d'une autre grossesse,
    *
      l'espoir d'arriver à des enfants en meilleur état de santé par la mise en place d'un traitement plus précoce ; les avantages à court terme sont démontrés, notamment sur le plan nutritionnel ; les avantages à long terme restent encore à démontrer.

3.3 Drépanocytose

Le dépistage de la dépranocytose est également effectué dans certaines régions (Ile de France, PACA), en raison d’une population migrante et méditerranéenne importante.
C’est la trypsine immunoréactive qui sert de marqueur, couplée avec la biologie moléculaire en cas d’élévation (recherche des principales mutations du gène), avec l’accord écrit préalable des parents.

Conclusion

D’autres dépistages pourraient éventuellement s’ajouter dans l’avenir, mais pour envisager un dépistage systématique, il faut posséder un test de dépistage fiable, sensible (repérant le maximum de sujets atteints) et spécifique (évitant les faux-positifs), un traitement possible, enfin tenir compte de l'incidence de la maladie.

La leucinose (1/100.000 à 200.000), les galactosémies (1/50.000 à 150.000), l'homocystinurie (1/300.000) ne répondent pas aux critères retenus.
Pour l'histidinémie (1/10.000 à 1/20.000), le dépistage et le traitement douteux.
La dystrophie musculaire de Duchenne pourrait également être dépistée par le dosage de la créatine kinase sur éluat de sang. Ceci serait intéressant dans les familles où il y a des sujets atteints.
De même, on a discuté du dépistage de l'hypercholestérolémie familiale également dans les familles atteintes.
Vaccinations
M. Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 3 mars 2000

1 Les types de vaccins
2 Mode d'administration du vaccin
2.1 Siège de l'injection
2.2 Répétition des injections
2.3 Association des vaccins
3 Contre-indication des vaccinations
4 Calendrier vaccinal
5 Différentes vaccinations
5.1 Vaccinations contre la tuberculose
5.2 Vaccinations contre la diphtérie
   

5.3 Vaccinations contre le tétanos
5.4 Vaccinations contre la polyomyélite
5.5 Vaccinations contre la coqueluche
5.6 Vaccinations contre l'Haemophilus influenzae de type b
5.7 Vaccinations contre la rougeole
5.8 Vaccinations contre la rubéole
5.9 Vaccinations contre les oreillons
5.10 Vaccinations contre l'hépatite B
5.11 Autres vaccinations
5.12 Vaccinations spéciales pour voyager dans certains pays

Objectifs

1. Enumérer les principales catégories d'antigènes utilisés par les vaccinations.

2. Décrire le calendrier des vaccinations obligatoires et recommandées en France (y compris les rappels) ; et pour chacune d'elle, indiquer l'intérêt, décrire la technique, les résultats, les incidents.

3. Décrire les contre-indications des vaccinations.

4. Décrire une méthode de vaccination par BCG et le mode de surveillance de l'efficacité de cette vaccination.

5. Enumérer les vaccins vivants et leurs contre-indications communes.

6. Décrire la vaccination contre l'hépatite B.
Introduction

Le vaccin est un dérivé non pathogène d'un agent microbien ou viral qui, introduit dans l'organisme, induit une résistance spécifique contre cet agent pathogène grâce à l'acquisition d'une immunité cellulaire, humorale ou mixte. Les principaux antigènes sont les anatoxines (toxines modifiées) et les agents soit tués, soit vivants et atténués. En épidémiologie, on estime que les risques de transmission de la maladie dans la collectivité sont faibles quand 70 % de la population est correctement vaccinée. Un vaccin idéal doit être stable, avoir un prix de revient bas, produire une résistance efficace contre une maladie aussi longtemps que possible avec un minimum d'effets secondaires.

Les vaccinations ont bénéficié des progrès récents fondamentaux de l'immunologie et des progrès techniques réalisés dans la fabrication des vaccins : isolement d'antigènes purifiés, adjonction d'immuno-stimulants, amélioration de la stabilité des vaccins, association vaccinale. Le génie génétique, c'est-à- dire les recombinaisons au niveau du génome, sont maintenant possibles. Dans la production d'un vaccin recombinant, les techniques de clonage du gène sont utilisées pour exprimer un antigène capable d'induire une réponse immunitaire protectrice. Le clonage du gène et son transfert dans une cellule hôte font que l'agent pathogène n'est plus nécessaire pour assurer la production du vaccin, c'est-à-dire que celui-ci ne comporte pas de produits viraux ou bactériens toxiques ou sensibilisants.
1. Les types de vaccins

Schématiquement, on dispose de deux types de vaccins :
- les vaccins bactériens :

    *
      vivants atténués : BCG
    *
      tués : coqueluche, typhoïde, choléra.
    *
      anatoxines : diphtérie, tétanos.
    *
      polysaccarides : méningocoque, pneumocoque, typhoïde, hémophilus.

- les vacccins viraux :

    *
      vivants atténués : polio buccal, rougeole, oreillons, rubéole, varicelle, fièvre jaune.
    *
      inactivés complets : grippe, polio injectable, rage, hépatite A.
    *
      inactivés à fraction antigénique : hépatite B
    *
      recombinant : hépatite B

Les vaccins vivants crééent une infection inapparente avec apparition d'anticorps neutralisants. Une seule vaccination suffit mais parfois des revaccinations sont nécessaires (BCG si le test tuberculinique se négative).
Les vaccins tués stimulent les cellules immunitaires qui réagissent en fabriquant des anticorps spécifiques. Cette réaction nécessite plusieurs injections ; la première sensibilise les cellules immunitaires, la deuxième va permettre une montée des anticorps assurant une protection. Très souvent, une troisième injection est nécessaire pour élever le taux d'anticorps et consolider l'immunisation acquise. Après quelques mois, le taux d'anticorps diminue et il est nécessaire de pratiquer une injection de rappel qui, stimulant des cellules déjà immunisées, va réaliser un bond immunitaire. Des rappels seront ensuite nécessaires pour maintenir le taux d'anticorps à un niveau efficace, généralement tous les 5 ou tous les 10 ans.
Pour certains vaccins (vaccins adsorbés), des adjuvants (hydroxyde de phosphate d'alumine, phosphate de calcium) permettent une résorption plus lente et plus prolongée de l'antigène de sorte qu'il détermine une plus forte montée d'anticorps. Ils peuvent être responsables d'une réaction locale tardive sous forme de nodules indurés pendant plusieurs mois. Les vaccins adsorbés utilisés en routine sont les vaccinations diphtérie, tétanos, polio, coqueluche, haemophilus influenzae (DTCPâ et Tétracoqâ - PentHibestâ et Pentacoqâ, Infamix Polio H.3â).

2 Mode d'administration du vaccin
2.1 Siège de l'injection

En dehors des vaccinations par ingestion, limitée actuellement au vaccin polio, la plupart des vaccins se font en injection sous-cutanée ou intramusculaire, parfois intradermique (BCG). Il n'y a pas de région prédestinée et on recherche une zone non douloureuse : région sus-scapulaire ou deltoïdienne. Le BCG peut encore se faire par scarification ou multipunctures.

2.2 Répétition des injections

La répétition des injections est indispensable pour certains vaccins (coqueluche, polio) ou les anatoxines (diphtérie, tétanos). En règle générale, il faut faire trois injections à un mois d'intervalle, puis un rappel au bout de un an et tous les cinq ans. En fait, ces délais ne doivent pas constituer un carcan rigide. En pratique, un intervalle optimal de 3 mois peut être admis entre la première et la deuxième injection, de 6 mois entre la 2ème et la 3ème injection et de 2 ans entre la 3ème et l'injection de rappel. Le Conseil Supérieur d'Hygiène précise même que, lorsqu'un retard est intervenu dans la réalisation des vaccinations, il suffit de reprendre le programme au stade où il a été interrompu et de compléter la vaccination en réalisant le nombre d'injections requis en fonction de l'âge.

2.3 Association des vaccins

Les associations facilitent l'application en évitant la répétition des actes.
On distingue :

    *
      la vaccination combinée où les vaccins sont mélangés dans la même seringue et sont inoculés en un seul point de l'organisme (DTCPÒ , TetracoqÒ , Hibest, PentHibestâ , Pentacoqâ , ROR VaxÒ , Infamix PolioÒ , Infamix Polio-H.3â .
    *
      les vaccinations simultanées où les vaccins sont administrés en des points différents de l'organisme ou par des voies différentes (Pentacoqâ et Hépatite Bâ par exemple). Certaines associations sont déconseillées comme DT-TAB + Polio ou Choléra + Fièvre jaune.

3 Contre-indication des vaccinations

Elles se sont raréfiées avec la purification des antigènes vaccinaux. Il est normal de surseoir temporairement une vaccination lorsque l'enfant est en incubation, au cours ou au décours immédiat d'une maladie infectieuse.

D'une façon générale, les vaccins vivants sont totalement contre-indiqués en cas de déficit immunitaire surtout cellulaire, qu'il s'agisse d'un déficit immunitaire constitutionnel ou acquis (hémopathie, néoplasie, traitement par immunosuppresseurs et/ou corticoïdes, HIV symptomatique).

Les néphropathies ne sont plus considérées comme des contre-indications systématiques : une protéinurie isolée même chronique ne constitue pas une contre- indication ; un syndrome néphrotique pur et primitif ne doit pas être vacciné en poussée et, il est de règle d'attendre au moins un an après la disparition de la protéinurie ; seul le TAB est franchement contre-indiqué chez un enfant atteint de néphropathie, et de toute façon le TAB est remplacé par un vaccin polysaccharidique Typhim Viâ .
Le diabète n'est pas une contre-indication à la vaccination et là aussi seul le TAB ne peut être effectué.

L'administration de gammaglobulines peut arrêter la multiplication du virus vaccinal vivant atténué et donc diminuer son activité. Il faut par conséquent attendre au moins six semaines après l'injection de gammaglobulines pour utiliser un vaccin vivant atténué. De même, si une injection de gammaglobulines est effectuée moins de deux semaines après une injection d'un vaccin vivant, il faut revacciner au bout de trois mois ; si l'intervalle est supérieur à 14 jours, il n'est pas nécessaire de revacciner.
Les gammaglobulines ne semblent pas altérer la réponse vaccinale après immunisation par vaccin tué.

Les enfants allergiques doivent être vaccinés mais la vaccination doit être effectuée en dehors de toute poussée évolutive de leur maladie allergique et il faut respecter les délais avec d'éventuels traitements par immunoglobulines mais aussi par corticoïdes. Certains vaccins sont cultivés sur oeuf de poule (ROR, grippe, fièvre jaune) et doivent être utilisés avec prudence chez les allergiques aux protéines de l'oeuf.
En cas d'allergie, il est préférable de tester la sensibilité avec une solution de vaccin 0,5 ml dilué au dixième dans du sérum physiologique et administré par voie sous-cutanée. Une deuxième épreuve doit être effectuée 10 jours plus tard en utilisant 0,15 ml de la solution non diluée. 10 jours plus tard la première injection peut être débutée. Ceci concernera le ROR et le Tétracoq.
Le TAB est également contre-indiqué chez l'allergique.

Les convulsions, les encéphalopathies, sont des contre-indications à la vaccination anticoquelucheuse (utilisant le vaccin coqueluche entier).
4 Calendrier vaccinal

Quatre vaccinations sont obligatoires : le BCG, la vaccination antitétanique, antipoliomyélite et antidiphtérique.
Dès le 1er mois     B.C.G.     La vaccination BCG précoce est réservée aux enfants vivant dans un milieu à risques.
La vaccination par le BCG doit être pratiquée avant l'entrée en collectivité incluant la garde par une assistante maternelle. L'épreuve tuberculinique doit être pratiquée 3 à 12 mois plus tard.
A partir de 2 mois    

Diphtérie, Tétanos, Coqueluche, Polio,
Haemophilus influenzae b,
Hépatite B

1ère injection
   

Le vaccin polio injectable est recommandé, surtout pour les primo-vaccinations, en réservant le vaccin polio oral pour des situations épidémiques ou en rappel.

 

3 mois    

Diphtérie, Tétanos, Coqueluche, Polio,
Haemophilus influenzae b,
Hépatite B

2ème injection
4 mois    

Diphtérie, Tétanos, Coqueluche, Polio,
Haemophilus influenzae b,
Hépatite B

3ème injection
A partir de 12 mois    

Rougeole, Oreillons, Rubéole

1ère dose
    La vaccination associée rougeole-oreillons-rubéole est recommandée de façon indiscriminée pour les garçons et les filles.
La vaccination contre la rougeole doit être pratiquée plus tôt, à partir de 9 mois pour les enfants vivant en collectivité, suivie d'une revaccination 6 mois plus tard en association avec les oreillons et la rubéole. En cas de menace d'épidémie dans une collectivité d'enfants, on peut vacciner tous les sujets supposés réceptifs, de plus de 9 mois. La vaccination immédiate peut être efficace si elle est faite moins de 3 jours après le contact.
16-18 mois    

Diphtérie, Tétanos, Coqueluche, Polio,
Haemophilus influenzae b,
(1er rappel)
Hépatite B (4ème injection)

 
    Lors du 1er rappel on peut, si nécessaire, faire en un site d'injection séparé, la vaccination associée rougeole-oreillons-rubéole.
Avant 6 ans    

B.C.G.

Rougeole, Oreillons, Rubéole

2ème dose
    La vaccination par le B.C.G. doit être pratiquée pour l'entrée en collectivité.
L'épreuve tuberculinique doit être pratiquée 3 à 12 mois plus tard.
6 ans    

Diphtérie, Tétanos, Polio (2ème rappel)
Rougeole, Oreillons, Rubéole
    La vaccination associée rougeole-oreillons-rubéole est recommandée chez les enfants n'ayant pas été encore vaccinés. L'entrée à l'école est une bonne occasion de vacciner éventuellement le même jour que pour dipthérie, tétanos, polio et/ou B.C.G.
11-13 ans    

Diphtérie, Tétanos, Polio (3ème rappel)
Rougeole, Oreillons, Rubéole

Hépatite B

B.C.G.
    Pour tous les enfants, garçons et filles, non vaccinés et n'ayant pas eu la maladie, en primo-vaccination.
Soit 1 injection de rappel si la vaccination complète a été pratiquée dans l'enfance ; soit un schéma complet (en 3 ou 4 injections).
Les sujets aux tests tuberculiniques négatifs, vérifiés par IDR, seront vaccinés ou revaccinés (1).
16-18 ans    

Diphtérie, Tétanos, Polio (4ème rappel)
Rubéole pour les jeunes femmes non vaccinées

Epreuve tuberculinique suivie du B.C.G. en cas de négativité
    La vaccination contre la rubéole est recommandée, par exemple lors d'une visite de contraception ou prénuptiale ; la sérologie préalableet post-vaccinale n'est pas utile. Il est nécessaire de s'assurer de l'absence d'une grossesse débutante (1er mois) et d'éviter toute grossesse dans les 2 mois suivant la vaccination, en raison d'un risque tératogène théorique.
Si la sérologie prénatale est négative ou inconnue, la vaccination devra être pratiquée immédiatement après l'accouchement, avant la sortie de la maternité.
18-70 ans    

Tétanos, Polio
Hépatite B

Rubéole
    Tous les 10 ans
Tous les 5ans (uniquement en cas de situation à risque ou à risque d'exposition).
Pour les femmes non vaccinées jusqu'à 45 ans.
A partir de 70 ans     Tétanos, Polio
Vaccination grippale      
(1) Après 2 vaccinations par le B.C.G. réalisées par voie intra-dermique, les sujets qui ont une intradermoréaction à la tuberculine négative sont considérés comme ayant satisfait aux obligations vaccinales.
Lorsqu'un retard est intervenu dans la réalisation du calendrier indiqué, il n'est pas nécessaire de recommencer tout le programme des vaccinations imposant des injections répétées. Il suffit de reprendre ce programme au stade où il a été interrompu et de compléter la vaccination en réalisant le nombre d'injections requis en fonction de l'âge.
5 Différentes vaccinations
5.1 Vaccinations contre la tuberculose (obligatoire avant l'âge de 6 ans)
5.1.1 Les vaccins

Le BCG est constitué de bacilles bovins vivants atténués (souche de Calmette et Guérin). Il se présente :

    *
      soit frais sous forme d'une suspension de bacilles à utiliser rapidement car le bacille meurt. Il est également sensible à la lumière et à la chaleur ;
    *
      soit sous forme déssèchée, se conservant alors plusieurs mois à + 4° mais devant être utilisée dans les 24 heures de sa mise en suspension.

5.1.2 Administration du vaccin

5.1.2.1 scarification cutanée

Le Les scarifications sont faites au moyen d'un vaccinostyle à travers II ou III gouttes de BCG déposées sur la peau suffisamment plane pour que l'émulsion vaccinale ne se répande pas. Les scarifications doivent permettre la pénétration du vaccin dans le derme sans pénétration dans le tissu cellulaire sous-cutané.
La longueur totale des scarifications est de 1 cm par année d'âge ; les traits de 1 à 2 cm ne doivent pas se chevaucher. Deux à trois semaines après la vaccination, il se forme au niveau des traits de scarification des bourrelets rougeâtres plus ou moins saillants qui s'effacent habituellement en 1 à 3 mois.

5.1.2.2 Vaccination par piqûres multiples

On utilise la pénétration du vaccin à l'aide d'une bague en matière plastique hérissée de pointes.

5.1.2.3 Vaccination intradermique : la plus précise.

L'injection doit être strictement intradermique, le plus souvent à la face postérieure du bras. Il faut proportionner la dose à l'âge de l'enfant.
Au bout de 2 à 4 semaines apparaît un nodule induré rouge qui va disparaître en 1 à 2 mois ; parfois survient un petit suintement ou une ulcération. Si celle-ci persiste, traiter localement par solution d'isoniazide.

5.1.3 Contrôle de l'allergie post-vaccinale

Ce contrôle doit être effectué de 3 à 12 mois après la vaccination puis tous les 5 ans. Il s'effectue au moyen de réactions cutanées à la tuberculine. La réaction consiste à faire pénétrer un antigène spécifique, la tuberculine purifée DPP 0,1 ml à 10 UI.

5.1.3.1 Réactions transcutanées

La cutiréaction (Von Pirquet) :
Elle consiste à pratiquer une scarification de 1 cm de long et dont la profondeur est telle qu'apparait une légère sérosité, à travers une goutte de tuberculine préalablement déposée; une scarification témoin est faite à distance. La réaction se lit au bout de 48 heures à 72 heures. On considère que la réaction est positive si l'induration est supérieure à 3 mm. Elle est facile à pratiquer et à lire à l'avant-bras.

La bague tuberculinique :
La tuberculine est placée dans le chaton d'une bague en plastique hérissée de pointes. Son application est facile mais elle présente les mêmes inconvénients que la cutiréaction : imprécision de la dose injectée, difficultés de mesurer l'allergie.

L'intradermoréaction :
C'est la seule réaction admise par les organisations internationales car on connaît la quantité injectée et on peut mesurer facilement le degré d'allergie.
On injecte en intradermique 1/10 de ml de la solution choisie (en général, pour commencer 1/10 ml IP 48 correspondant à 10 unités). La lecture se fait 3 à 4 jours plus tard.
La réaction est dite positive si on note, indépendamment de la rougeur, une induration dont le diamètre doit être supérieur à 6 mm. Un diamètre inférieur ne constitue qu'une réaction douteuse à refaire avec au besoin 50 unités. Par contre, la réaction peut atteindre 20 ou 30 mm traduisant alors une allergie très forte.

5.1.3.2 Les réactions percutanées (timbre tuberculinique) peu fiables sont abandonnées.

En résumé, la bague est pratique pour déterminer l'existence ou non d'une allergie tuberculinique mais ne permet pas d'en mesurer l'intensité.
De plus, en cas de réaction douteuse ou négative, il faut effectuer une intradermoréaction.

5.1.4 Efficacité de la vaccination

Le BCG assure une protection correcte de 80% des sujets vaccinés les 10 premières années ; elle est encore de 65% 10 à 15 ans plus tard. D'un point de vue épidémiologique, le BCG a un effet négligeable sur la transmission de la maladie mais il a surtout un intérêt de protection individuelle. S'il n'empêche pas toujours la tuberculose, celle-ci est moins grave chez le sujet vacciné. Le BCG prévient surtout les tuberculoses évolutives (méningite, miliaire).
Le type de programme BCG doit être en accord avec la situation épidémiologique de la tuberculose propre à chaque pays. En France, actuellement, il reste obligatoire avant l'âge de 6 ans. Il est également obligatoire pour l'entrée en collectivité (crêche, école maternelle, assistante maternelle).
Le comité technique des vaccinations recommande actuellement de pratiquer cette vaccination dès le 1er mois, surtout pour les enfants vivant dans un milieu à risques.

5.1.5 Complications

Elles sont en règle mineures. Une réaction locale avec induration et suppuration minime peut apparaître dans les 15 jours et durer plusieurs mois.
Une adénite peut apparaître 1 à 3 mois après la vaccination. Il s'agit d'abord d'une adénopathie ferme et indolore siégeant dans le territoire de drainage. Le plus souvent le ganglion disparaît. Rarement il augmente de volume et se collecte.
Par ailleurs, il n'existe pas de complication générale (Bécégite) s'il n'existe pas de déficit immunitaire. Vaccin vivant, le BCG est contre-indiqué si l'enfant est contaminé par le VIH.
5.2 Vaccination contre la diphtérie (obligatoire avant l'âge de 18 mois)

L'anatoxine diphtérique est un vaccin efficace et bien toléré. La séroconversion est comprise entre 96 et 100 %. La protection suffisante contre la diphtérie n'est acquise qu'après la troisième injection. Elle est toujours associée à l'anatoxine tétanique et souvent aux vaccins anticoquelucheux, antipoliomyélitique et antihémophilus b.
Il n'existe que quelques rares cas annuels de diphtérie en France. Cela s'explique sans doute par le fait que 10 ans après le dernier rappel, les taux d'anticorps ne sont plus protecteurs ; de ce fait l'adulte, qui ne présente pas de diphtérie clinique, peut être néanmoins porteur sain et contaminer les exceptionnels enfants non vaccinés.
Le vaccin doit être effectué dès le premier semestre de la vie car la diphtérie est une maladie du jeune enfant.
La tolérance vaccinale est excellente ; les réactions générales (fièvre, réactions allergiques) restent exceptionnelles.

5.3 Vaccination contre le tétanos (obligatoire avant l'âge de 18 mois)

Il n'existe aucune immunité naturelle contre le tétanos. L'anatoxine tétanique est un vaccin inoffensif, d'une efficacité quasi absolue. La persistance de cas de tétanos en France est surtout liée à l'absence de l'entretien de l'immunité par les injections de rappel, qui doit être effectué tous les 5 ans chez l'enfant et tous les 10 ans après l'âge de 20 ans.
Un sujet correctement vacciné n'a pas besoin de sérum antitétanique en cas de blessure, un rappel d'anatoxine suffit et est plus efficace.
L'injection simultanée de sérum et d'anatoxine est possible chez un sujet non vacciné à condition que l'injection de sérum et du vaccin se fasse en territoires différents. Bien appliquée, en particulier dans les populations exposées (jardiniers) et chez les sujets âgés, elle éviterait 300 cas de tétanos souvent mortels par an.
Effectué seul, le vaccin antitétanique est le mieux supporté de tous les vaccins.
5.4 Vaccination contre la polyomyélite (obligatoire)

Deux types de vaccins : inactivé (Salk, Lépine) administré par voie sous- cutanée, ou vivant atténué (Sabin) administré par voie orale, contenant les trois types de virus responsables de la poliomyélite, sont disponibles.

L'un comme l'autre apporte une excellente protection contre la maladie, comme en témoigne la disparition complète de la poliomyélite dans les pays ayant adopté une politique vaccinale exclusive soit par le vaccin tué (pays scandinaves), soit par le vaccin atténué (Etats-Unis).

Sur le plan immunologique, le vaccin atténué oral a l'avantage de faire apparaître les anticorps neutralisants plus rapidement, 10 jours après la première prise et surtout de faire apparaîre des IgA secrétoires, qui permettent d'éviter le portage virus polio sauvage dans l'intestin. Mais, si aucune complication n'est attribuée au vaccin inactivé, le vaccin oral a été rendu responsable d'authentiques poliomyélites paralysantes, non seulement chez des immunodéprimés, mais aussi chez des enfants sains, heureusement exceptionnellement (1 cas pour 8,7 millions de doses distribuées).

Compte-tenu de ces données, la meilleure stratégie dans un pays industrialisé comme la France est l'utilisation du vaccin inactivé injectable de haute antigénicité en primo vaccination et en rappel. Le vaccin vivant atténué oral est alors réservé pour des situations épidémiques.

5.5 Vaccination contre la coqueluche

Depuis 1998, il existe 2 types de vaccins contre la coqueluche :

5.5.1 D'une part, le vaccin anticoqueluche obtenu à partir de bacilles de Bordet-Gengou inactivé par l'aldéhyde (vaccin cellulaire). Il pose deux types de problèmes :
- son efficacité sérologique et clinique variable selon les fabriquants : une séroconversion efficace est parfois obtenue après la troisième injection que chez 50% des enfants et après le premier rappel que chez 80% ; la durée de séroconversion est de 5 ans. Ce n'est pas le cas du vaccin français Pasteur-Mérieux MSD qui a une séroconversion de plus de 90%. La vaccination a prouvé son efficacité car des épidémies de coqueluche avec plusieurs décès ont été observées dans les pays qui avaient décidé l'arrêt de la vaccination (Suède, Angleterre, Japon). La gravité de la coqueluche réside surtout dans le risque chez le petit nourrisson de survenue du syndrome de coqueluche maligne. La coqueluche reste une maladie lourde de conséquences et le maintien de la vaccination systématique est donc indispensable.
- sa tolérance n'est pas toujours bonne :

    *
      une réaction inflammatoire locale se voit dans 50 à 60% des cas avec nodules plus ou moins douloureux ;
    *
      une poussée fébrile à 38-39° peut durer 48 heures, une hyperthermie supérieure à 39° se verrait dans 6% des cas avec risque de convulsions fébriles dans 1 sur 1750 à 1 sur 6000 cas suivant les études ;
    *
      des états de choc peuvent survenir 6 à 10 heures après la vaccination, plus volontiers chez les enfants de parents allertiques survenant entre 1 sur 10 000 à 20 000 cas ;
    *
      le syndrome du cri persistant touche les enfants de 3 à 6 mois, 6 à 10 heures environ après l'injection, son incidence est évaluée entre 0,5 à 6 pour 10 000 vaccinations ;
    *
      des accidents neurologiques peuvent se voir de façon exceptionnelle avec encéphalopathie aiguë (état de mal convulsif, troubles de la conscience et hyperthermie). Leur fréquence est difficile à évaluer du fait d'associations fortuites possibles entre vaccinations et encéphalopathies aiguës d'autre origine. Elles varient selon les études de 1 pour 10 000 à 1 pour 1 000 000 de doses.

Le risque d'induction de convulsions et d'encéphalopathies post-vaccinales est notamment plus élevé chez les enfants ayant un antécédent de troubles neurologiques, raison pour laquelle le vaccin est contre-indiqué chez les enfants ayant une encéphalopathie évolutive, convulsivante ou non ou des antécédents de convulsions ou de lésions cérébrales.
La vaccination est également contre-indiquée chez les enfants ayant présenté une forte réaction (convulsions, hyperthermie supérieure à 40, choc) dans les 48 heures après une injection antérieure de vaccin anticoqueluche.
Le vaccin est injectable et effectué en association avec diphtérie, tétanos, polio et haemophilus.

5.5.2 D'autre part, un nouveau vaccin constitué d'extraits antigéniques bactériens (vaccin acellulaire) est maintentant disponible dans plusieurs pays (Japon, Etats-Unis), dont la France. Il a une bonne efficacité sérologique et clinique et surtout une meilleure tolérance. Il est réservé pour le moment pour le 1er rappel à 16-18 mois et pour le 2ème rappel entre 11 et 13 ans. En effet, la séroprotection diminue progressivement et il est nécessaire de relancer l'immunité vis-à-vis de la coqueluche chez les préadolescents, moins protégés et devenant contaminateurs pour les enfants plus jeunes, où la coqueluche est plus grave. Ce vaccin également associé aux valences Diphtérie, Tétanos, Polio et Haemophlus influenzae b = Infanzix PolioÒ , Infanzix Polio HibÒ, Tetravac-acellulaireÒ, PentavacÒ.
5.6 Vaccination contre l'Hemophilus influenzae de type b (Hib)

La vaccination contre l'hémophilus influenzae de type b existe depuis plusieurs années dans certains pays soit sous forme polysaccharidique PRP, soit plus récemment sous forme de couplage de polyoside capsulaire PRP à une protéine porteuse.
La vaccination est commercialisée en France depuis 1992 : ActHibÒ ou HibestÒ . Elle protège contre les infections à hémophilus influenzae de sérotype b, c'est- à-dire celles qui sont responsables des méningites, des épiglottites et les formes invasives de la maladie. Avant l'âge de 6 mois, 3 injections sont nécessaires à 2, 3 et 4 mois en même temps que le DTC-Polio, puis rappel à 18 mois ; entre 6 et 12 mois, 2 injections à 1 mois d'intervalle suivies d'un rappel à 18 mois ; chez les enfants de 1 à 5 ans, 1 seule injection. Le vaccin est le plus souvent réalisé avec le DTCP dans la même seringue (PentHibestÒ , PentacoqÒ , InfanzixÒ , Polio HibÒ , PentavacÒ ). La méningite à Hemophilus influenzae b a quasiment disparu dans tous les pays où la vaccination systématique a été introduite.
5.7 Vaccination contre la rougeole

Considérée comme une maladie bénigne, la rougeole est cependant potentiellement grave, source d'encéphalite post-infectieuse dans 1 cas sur 1000 à 2000 et de panencéphalite sclérosante subaigüe dans 9,7 cas par million de rougeole.
Le vaccin antirougeoleux est un vaccin vivant atténué. Les seuls vaccins utilisés dans le monde sont des vaccins hyperatténués dérivant pour la plupart de la souche EDMONSTON B.
La souche SCHWARTZ est commercialisée en France depuis 1968 sous le nom de RouvaxÒ . Elle est également utilisée en association avec la rubéole et les oreillons (ROR VaxÒ ) depuis 1986.
La séronconversion est de 95 % chez les enfants de plus d'un an. Avant l'âge d'un an, la présence d'anticorps maternels inhibent la vaccination : en pratique, la vaccination est conseillée après 12 mois. Elle peut cependant être effectuée plus tôt à des communautés à haut risque (crêches, Afrique). Dans ce cas, un rappel doit être effectué au cours de la 2ème année.

Actuellement, la France détient le triste record européen du nombre de cas de rougeole, dont des centaines d'encéphalites et de 10 à 30 décès annuels. Dans tous les pays où la vaccination est appliquée systématiquement, la morbidité rougeoleuse a été réduite de plus de 99 %. En cas d'épidémie dans une collectivité, la vaccination s'est avérée prophylactique lorsqu'elle est effectuée dans les 72 heures suivant le contage.

Une deuxième injection est dorénavant conseillée à 6 ans, en raison d'un risque potentiel de survenue d'épidémies de rougeole chez les adolescents et adultes en cas de vaccination unique au cours de la 2ème année de vie, ces épidémies se développant à la faveur de la couverture vaccinale insuffisante et de l'absence de séroconversion dans 5% des cas.
La tolérance : on observe une réaction fébrile dans 10 à 15 % des cas, entre le 5ème et le 12ème jour. Un éruption morbiliforme peut l'accompagner durant 24 à 48 heures. Compte-tenu de la réaction fébrile et de l'âge de l'enfant, des convulsions de type hyperpyrétique peuvent survenir entre le 7ème et le 10è jour, d'évolution bénigne. Des complications plus graves (encéphalite, purpura thrombopénique, radiculonévrite) sont exceptionnelles.
Les bénéfices de la vaccination antirougeoleuse sont de loin très supérieurs à ces risques.

5.8 Vaccination contre la rubéole

Il s'agit d'un vaccin virus vivant atténué ; en France, la souche PLOTKIN est utilisée seule (RudivaxÒ) ou en association (ROR VaxÒ , Rudi RouvaxÒ). Le but de la vaccination est d'une part de protéger les futures mères de l'infection rubéolique au cours d'une grossesse, d'autre part d'interrompre la transmission dans le réservoir de virus représenté par les nourrissons des deux sexes.
La séroconversion est de 99 %. L'immunité se maintient longtemps, au moins 20 ans de recul pour l'instant. Chez l'enfant la réaction vaccinale est quasi nulle alors que les adultes ont des réactions, notamment des arthralgies qui demeurent rares. De rares purpuras thrombopéniques, toujours résolutifs, ont été décrits.

La grossesse constitue la seule contre-indication car le virus même atténué peut traverser la barrière placentaire. Ceci doit donc être évité bien qu'on n'ait pas pu démontrer que le vaccin ait une action tératogène. Il est recommandé de vacciner garçons et filles au cours de la 2ème année avec le vaccin ROR VaxÒ.Une deuxième injection est maintenant faite à 6 ans avec le vaccin rougeole. Enfin, il est recommandé de vacciner les femmes séronégatives à condition d'être sous contraception 1 mois avant, 2 mois après la vaccination.
5.9 Vaccination contre les oreillons

Il s'agit d'un vaccin vivant atténué (souche Jeryl Lynn) injecté en une seule fois que l'on peut faire chez tous les enfants de 12-15 mois avec Rougeole et Rubéole (vaccin ROR VaxÒ). Une deuxième injection est dorénavant préconisée à 6 ans avec Rougeole et Rubéole.
Les oreillons peuvent être responsables de méningites et de méningoencéphalites estimés à 3 pour 1000 cas, mais aussi de surdité, d'orchite et de myélite.
La séronconversion est de 97 %. La morbidité ourlienne a été réduite de 98 % aux Etats-Unis après l'introduction de la vaccination. La tolérance du vaccin est bonne. Une réaction fébrile se voit dans 4 % des cas ainsi qu'une tuméfaction parotidienne 15 à 20 jours après la vaccination dans 1 à 2 % des cas.
5.10 Vaccination contre l'hépatite B

La vaccination contre l'hépatite B est maintenant effectuée grâce à des des vaccins obtenus par technique de recombinaison génétique (Genhevac BÒ , Engerix BÒ 10µg, Engerix 20 µg, HB Vaxâ 5µg et HB Vax 10µg).
Depuis 1995, la vaccination est incluse dans le calendrier vaccinal pour tous les nourrissons aux mêmes âges que le vaccin pentavalent D.T.C.P.Hib en deux sites séparés, c'est-à-dire trois injections intramusculaires à 1 mois d'intervalle avec rappel un an plus tard, puis tous les cinq ans.
Il est logique de rattraper cette vaccination pour tous les enfants et notamment les adolescents. Dans ce cas, deux injections suffisent à un mois d'intervalle, plus une troisième 5 à 12 mois après la seconde. En fait, ce schéma à 3 injections peut être appliqué également chez le nourrisson. En l'absence de situation à risque, il n'est plus nécessaire d'effectuer de rappel si la primo-vaccination a été faite avant l'âge de 25 ans. Si cette dernière a été faite après l'âge de 25 ans, le rappel est nécessaire pour les groupes à risque si le taux d'Anticorps anti Hbs est < à 10 mU/ml.
Chez le nouveau-né de mère porteuse de l'Antigène Hbs, le schéma suivant doit être impérativement respecté : 1ère injection à la naissance, 2ème à 1 mois, 3ème à 6 mois.
Un schéma particulier incluant 3 doses rapprochées et une 4ème dose 1 an plus tard peut être proposé lorsqu'une immunité doit être rapidement acquise (étudiants des filières médicales et paramédicales non vaccinés, départ immunant pour un séjour prolongé en zone de moyenne ou de forte endémie).
5.11 Autres vaccinations

5.11.1 Vaccination contre la grippe à partir de virus tués se fait en une seule injection d'un vaccin adapté à la souche de l'épidémie en cours. La durée de l'immunité est courte n'excédant pas plusieurs mois obligeant ainsi à une injection annuelle tous les automnes. Il est recommandé chez les enfants présentant une cardiopathie ou une affection pulmonaire chronique (mucoviscidose)..

5.11.2 La vaccination contre le pneumocoque est un vaccin polysaccharidique qui n'est indiqué chez l'enfant que dans des groupes à haut risque : sujets splénectémisés, drépanocytaires, syndrome néphrotique, chimiothérapie immunosuppressive.

5.11.3 Vaccication contre l'hépatite A

Elle est possible en France (Havrixâ 360 et VAQTA 25â pour les enfants de moins de 15 ans, Havrix 440â et Avaximâ pour les adultes en France depuis fin 1992. Ses indications sont à préciser chez l'enfant (collectivités, voyage en zone d'endémie). 1 injection en primovaccination avec 1 rappel à 6 à 18 mois plus tard. Il peut être complété avec le vaccin hépatite B : Twinrix â

5.11.4 Vaccination contre la varicelle

Il s'agit d'un vaccin à virus vivant atténué qui existe au Japon depuis 1970 et commercialisé en France depuis 1993. Les résultats sont satisfaisants mais il n'est destiné qu'aux enfants exposés au risque des formes graves de la maladie : patients leucémiques ou cancéreux, sujets en contact avec des enfants immunodéprimés.
5.12 Vaccinations spéciales pour voyager dans certains pays
5.12.1 Vaccination contre le choléra

Les vaccins sont préparés à partir de vibrions cholériques tués. La vaccination est administrée par voie sous-cutanée, en deux injections séparées de 1 à 4 semaines. Les doses sont de 0,5 ml pour la première vaccination et de 1 ml pour la deuxième au-dessus de 5 ans. Entre 6 mois et 5 ans, les doses sont réduites de moitié. La vaccination est bien supportée. L'immunité dure en moyenne 6 mois.
5.12.2 Vaccination contre la fièvre jaune

La vaccination antiamarile s'effectue à base de virus vivants. Elle est contre-indiquée chez l'enfant de moins de 1 an. Elle ne comporte qu'une seule injection. On observe une réaction précoce du 4ème au 7ème jour faite d'un état fébrile pseudogrippal et une réaction tardive du 12ème au 20ème jour révélant une sémiologie nerveuse. L'immunité dure de 6 à 10 ans.

5.12.3 Vaccination contre le méningocoque

Les vaccins polysaccharidiques actuellement disponibles protègent contre les infections méningococciques A et C et non contre les B et de ce fait ne sont pas adaptés à la France. Par contre, ils peuvent être conseillés pour les enfants se rendant dans les pays d'endémie méningococcique (Afrique, Amérique du Sud).

5.12.4 La vaccination antitypho-paratyphique n'est proposée qu'aux enfants de plus de 2 ans partant en zone d'endémie.

Le TAB qui était une suspension de bacilles typhiques, paratyphiques A et B et qui n'était pas bien utilisé n'est plus commercialisé. Il est remplacé par le vaccin TYPHIM ViÒ qui utilise l'antigène Vi polysaccharidique de la capsule de Salmonella typhi. Sa tolérance est bonne avec une fièvre supérieure à 38° rare et sans effets secondaires majeures. La séroconversion chez les sujets de plus de 5 ans est de l'ordre de 95 à 100 %. Une seule injection par voie sous-cutanée ou intramusculaire suffit.

Carences affectives précoces
C. Néguin-Rambeau

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 29 février 2000
1 Définitions
2 Réactions à la séparation
3 Retentissements de la carence maternelle    

3.1 Processus affectés par la carence
3.2 Facteurs influants sur l'étendue du dommage causé par une séparation
4 Mesures préventives
Objectifs

1. Décrire les situations pouvant conduire à une carence affective.

2. Définir la carence affective larvée.

3. Décrire les phases de Robertson.

4. Décrire les processus affectés par la carence affective.

5. Décrire l'hospitalisme.

6. Enumérer les facteurs influants sur l'étendue des conséquences d'une carence affective prolongée.

7. Donner les mesures préventives permettant de diminuer le traumatisme de l'hospitalisation.

La relation entre l'enfant et sa mère, ou un substitut maternel stable, joue un rôle primordial pour le développement général de l'enfant.
La privation prolongée de soins maternels chez le tout jeune enfant peut avoir des effets graves et de grande portée sur son caractère, et par conséquent sur tout son avenir.
1 Définitions

Il peut y avoir carence maternelle caractérisée dans diverses situations qui sont les suivantes :

    *
      lorsqu'un nourisson ou un jeune enfant est séparé de sa mère, ou de son substitut maternel permanent, pour être placé dans une institution où il reçoit des soins maternels insuffisants ;
    *
      lorsqu'un jeune enfant subit une série de séparations d'avec sa mère, ou d'avec les substituts maternels auxquels il est attaché ;
    *
      lorsqu'un nourrisson ou un jeune enfant reçoit de sa propre mère, ou du substitut maternel permanent, des soins nettement insuffisants sans que le maternage d'autres personnes vienne compenser le manque d'interaction mère-enfant.

On parle de carence larvée lorsqu'il existe une insuffisance, une distorsion ou une discontinuité des rapports entre l'enfant et ses parents, en particulier la mère, sans qu'il y ait de séparation physique.
La carence larvée peut avoir des conséquences pathologiques aussi graves que celles d'une séparation frustrante caractérisée.

On parle de carence sévère lorsqu'il y a un placement prolongé et frustrant de l'enfant dans une institution, des ruptures répétées des liens avec les figures maternelles ou même des relations extrêmement frustrantes avec les parents.
La carence maternelle sévère, précoce (< 2 ans) et prolongée est ordinairement psychopathogène ou génératrice d'inaffectivité.
2. Réactions à la séparation

Trois phases ont été décrites par Robertson pour le jeune enfant d'âge préscolaire :

    *
      Protestation :
      Phase pendant laquelle l'enfant pleure, montre des signes de détresse aiguë (agitation, cris,...) et met en oeuvre tous les moyens limités dont il dispose pour essayer de retrouver sa mère.
      Cette phase peut durer de quelques heures à plusieurs jours.

    *
      Désespoir :
      Phase au cours de laquelle l'enfant est de plus en plus dérouté, se renferme sur lui même (repliement, inactivité, profonde tristesse), n'exprime aucune demande à l'environnement et relâche ses efforts de reconquête de la mère qu'il semble tenir pour disparue à jamais.

    *
      Détachement (ou "refus") :
      Phase au cours de laquelle l'enfant se comporte comme s'il s'installait dans la séparation, acceptant les soins, la nourriture et les jouets de n'importe quel substitut maternel (infirmières, auxiliaires, autres parents).
      L'enfant perd alors tout attachement à sa mère.

A la fin de cette période de séparation, l'enfant peut présenter des réactions au domicile de ses parents telles que troubles du sommeil, refus alimentaire, énurésie, tics, dépression, mutisme, attachement excessif à la mère ou au contraire apparent détachement,...Les parents doivent être prévenus de la possibilité de ces troubles afin de pouvoir les prendre en charge le mieux possible.
3. Retentissements de la carence maternelle

Les effets de la séparation varient selon la phase de la réaction à la séparation dans laquelle le sujet se trouve et qui dépend à son tour de facteurs tels que l'âge au moment de la séparation, la durée de la séparation, l'existence d'un substitut maternel pendant la séparation, le maintien de contacts avec les parents et la qualité de l'adaptation et des relations avant l'épisode de séparation.

3.1 Processus affectés par la carence

La carence des soins maternels retentit différemment sur différents processus. Les plus vulnérables semblent être :

    *
      certains processus intellectuels, et en particulier l'acquisition du langage et la facilité d'abstraction ;
    *
      divers aspects de la personnalité, tout spécialement l'aptitude à nouer et entretenir des relations interpersonnelles profondes et significatives (développement des réactions sociales), mais aussi l'aptitude à maîtriser ses impulsions au profit d'objectifs à long terme.

SPITZ a décrit en 1945 l'hospitalisme, terme caractérisant l'état d'enfants souffrant de carences affectives massives et prolongées.
Ce syndrome se traduit par :

    * un retard du développement psychomoteur plus ou moins réversible ;
    * des troubles du comportement allant de troubles simples de l'humeur à un repliement autistique ;
    * une fragilité physique, ces enfants étant plus souvent atteints d'infections banales.

La dépression anaclitique survient lorsque l'enfant est mis en état de frustration après avoir vécu une bonne relation avec sa mère. La symptomatologie est comparable à celle des dépressions de l'adulte, son évolution peut être favorable si l'enfant retrouve de bonnes relations dans un délai de 3 à 5 mois. Dans le cas contraire, le pronostic rejoint celui de l'hospitalisme, avec en particulier le risque d'une détérioration intellectuelle.

Le ralentissement progressif du développement général dont s'accompagne une carence prolongée peut être arrêté ou même inversé s'il est mis fin à la situation frustrante au cours des deux premières années de vie, et en particulier dans les 12 premiers mois.

Les enfants élevés en institution sont néanmoins toujours inférieurs aux enfants du même âge en ce qui concerne l'intelligence générale, la mémoire visuelle, la conceptualisation, la fonction verbale et l'adaptation scolaire.
3.2 Facteurs influants sur l'étendue du dommage causé par une séparation :

    * Age de la séparation : une séparation avant l'âge de 2 ans entraîne plus de séquelles.

    * Décès de la mère avant l'âge de 5 ans a des répercussions psychologiques graves.

    * Placement prolongé en institution : l'impossibilité de nouer des relations suffisantes avec une figure parentale et le sentiment de rejet par les parents compromettent sérieusement l'apparition de réponses favorables vis à vis de nouvelles figures parentales.

    * Existence ou non d'un lien mère-enfant déjà établi avant la séparation : le retard est moins facilement réversible si ce lien existait et était de bonne qualité.

4 Mesures préventives

Les séjours hospitaliers peuvent être améliorés par :

    * les visites des parents ;
    * la création de chambres mère-enfant permettent le séjour de la mère à l'hôpital ;
    * la présence de la mère aux moments les plus pénibles de l'hospitalisation.

Les effets de la séparation peuvent être atténués par la préparation psychologique de l'enfant, qui doit recevoir par le médecin (et non ses parents initialement) des informations claires, simples et corrélées à son développement général sur les raisons de son hospitalisation.

Chez le nourrisson, ces informations sont reçues par la mère, leurs effets (anxiété, dépression,...) sont alors perçus par l'enfant à travers elle.

Si la présence de la mère durant l'hospitalisation est souhaitable, elle peut modifier le comportement de l'équipe soignante, voire même devenir pesante (mère opposante, contrôlante, ...).
Les tentatives de suicide à l'adolescence
C. Néguin-Rambeau

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 3 mars 2000

1 Epidémiologie
2 Facteurs de risque
3 Facteurs déclenchants
4 Caractéristiques cliniques
   

5 Evolution
6 Prise en charge
7 Equivalents suicidaires
Objectifs

1. Donner l'incidence des tentatives de suicide.

2. Donner le sex-ratio.

3. Définir un facteur de risque de tentative de suicide.

4. Décrire les facteurs de risque des adolescents suicidants.

5. Définir et citer les facteurs déclenchants des tentatives de suicide à l'adolescence.

6. Donner le risque de récidive.

7. Décrire l'évolution à long terme.

8. Donner les modalités de la prise en charge d'un adolescent ayant fait une tentative de suicide, à court terme et à long terme.
1 Epidémiologie

Les tentatives de suicide sont 30 fois plus fréquentes que les suicides réussis à l'adolescence.

2ème cause de mortalité en France :

    * chez les 13 - 24 ans
    * après les accidents.

Incidence :

    * en augmentation franche depuis les années 1960
    * rare chez le jeune enfant
    * 7% des adolescents scolarisés, mais 25% ont des idées suicidaires
    * identique dans tous les pays occidentaux
    * taux le plus bas en Angleterre.

Sex-ratio :

    * 3 filles / 1 garçon
    * mais mortalité plus importante chez les garçons.

Modalités :

    * médicaments dans 80% des cas.
    * ++++ se méfier des prescriptions de psychotropes chez l'adolescent.

2 Facteurs de risque

Il s'agit de facteurs plus fréquemment retrouvés chez les jeunes ayant fait une TS.

Sociodémographiques :

Le milieu familial de ces ados est toujours perturbé :

    * séparation des parents
    * décès de l'un des parents
    * pathologie de l'un des parents (alcool, dépression, suicide ou TS,...).

Comportementaux :

    * consommation plus fréquente et plus excessive d'alcool, de tabac, de drogues
    * redoublements multiples, absentéisme scolaire, retards en cours répétés,
    * vols, rakets, hétéro-agressivité,
    * violences subies (viols,...), fugues +++

Somatiques :

    * fatigue intense
    * troubles du sommeil
    * plaintes somatiques variées et persistantes céphalées, douleurs abdominales,...).

Psychiques :

    * dépression 30% des cas
    * troubles anxieux
    * personnalités antisociales, délinquance.

Aucun signe d'alarme n'est spécifique.
Chacun de ces facteurs pris individuellement n'est pas forcément associé à une TS.

3 Facteurs déclenchants

Il s'agit de l'évènement récent qui fragilise l'adolescent, le rend incapable d'accepter un échec, de trouver une réponse à sa souffrance.
Dénoncé trop souvent comme la cause de la TS, il n'est que la partie émergée de l'iceberg affectif en cause, le motif dérisoire.

Retrouvés dans 70% des cas :

    * problèmes familiaux
    * soucis scolaires
    * rupture sentimentale.

Pronostic plus grave en l'absence de facteur déclenchant.
4 Caractéristiques cliniques

Chez l'adolescent (par rapport à l'adulte) :

    *
      la TS est impulsive, non mentalisée, non préparée.
    *
      le désir de mort est rarement présent, il s'agit plutôt d'un désir de vivre autrement et autre chose que cette souffrance insupportable et insurmontable.

5 Evolution

A court terme :

    *
      récidives ++++
    *
      dans 30% à 40% des cas
    *
      surtout dans l'année qui suit le premier geste.

A long terme :

    *
      persistance de difficultés psychosociales, affectives, relationnelles
    *
      instabilité professionnelle
    *
      condamnations judiciaires
    *
      mortalité accrue par suicide ou mort violente (3,6% à 5 ans, 6% à 10 ans).

6 Prise en charge

Hospitalisation systématique en pédiatrie au minimum 3 jours.

Buts :

    *
      réanimation médicale initiale.
    *
      évaluation psychologique
    *
      évaluation médicale globale
    *
      évaluation du contexte sociofamilial
    *
      élaboration du projet thérapeutique (suivi pluridisciplinaire après l'hospi-talisation, à la fois médical, psychologique et social).

Actuellement en France :

    *
      1 jeune sur 5 est hospitalisé
    *
      30% ne voient pas de psychologue pendant l'hospitalisation
    *
      30 à 40% n'ont aucun suivi après l'hospitalisation.

Il n'existe aucune recommandation dans la prise en charge qui varie d'un centre à l'autre.

7 Equivalents suicidaires

    * Alcoolisations aiguës répétées.
    * Utilisation de drogues.
    * Sexualité à haut risque (partenaires multiples, pas de protection).
    * Désinsertion sociale.
    * Troubles sévères du comportement alimentaire.
    * Non compliance à un traitement vital (diabète).

 

Toute relation de soin avec tout adolescent devrait explorer l'existence d'antécédents, d'idées voire de projet suicidaire.

Difficultés scolaires
M. Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 29 février 2000
1 Introduction
2 Généralités
3 Diagnostic différentiel
4 Diagnostic étiologique
4.1 Les causes médicales
   

4.2 Les causes pédagogiques
4.3 Les déficits sensoriels
4.4 Les troubles du langage
4.5 Les déficits intellectuels
4.6 Les causes affectives
Objectifs

1. Citer les différents éléments démontrant l'importance du problème.

2. Donner les âges hatituels de scolarisation de l'enseignement élémentaire.

3. Enumérer les causes des difficultés scolaires.

4. Décrire les troubles du langage oral.

5. Définir et décrire les troubles du langage écrit (dyslexie - dysostographie).

6. Décrire les causes affectives des difficultés scolaires.

1 Introduction

Le médecin de famille et le pédiatre sont souvent consultés pour un enfant qui redouble ses classes ou connaît d'autres problèmes à l'école. C'est un syndrome fréquent : en 1970, 22 % des enfants redoublaient la première année d'enseignement élémentaire. Ce taux s'est abaissé à 18 % en 1978 et devient difficile à établir actuellement en raison des nouvelles lois. Il s'agit que du redoublement en cours préparatoire et celui-ci peut survenir plus tard.
Nous allons présenter parmi les nombreux facteurs qui peuvent être responsables de cet état de choses ceux qui concernent de près ou de loin le médecin.
On le décrit habituellement sous le nom de symptôme "difficultés scolaires".
Nous envisagerons parallèlement les principales possibilités thérapeutiques.
2 Généralités

Les difficultés scolaires sont actuellement un problème important pour la famille et pour les enfants.

Pour les parents :

- ou bien ils appartiennent à un milieu social élevé et dans tous les cas ils ont du mal à accepter l'échec de leur enfant :

    *
      d'une part, par fierté naturelle,
    *
      d'autre part, par anxiété devant un avenir qu'ils souhaitaient brillant et qui paraît compromis.

- ou bien ils appartiennent à un milieu modeste et avaient reporté sur leurs enfants leurs espoirs de réussite.

Pour l'enfant :

Dans l'un et l'autre cas, il en résulte un retentissement sur l'enfant.

En effet, il va souffrir de cette situation :

    *
      il aura finalement le sentiment d'être en marge de la famille et du groupe ;
    *
      et pourra réagir par des conduites inadaptées (échec, opposition...).

C'est dire l'importance pour le médecin de connaître la diversité des causes et de discerner :

    *
      celles auxquelles il peut contribuer à remédier,
    *
      celles pour lesquelles il faudra le recours du spécialiste : pédopsychiatre, pédagogue, psychologue, rééducateur).

Dans ce cas, les examens seront quelquefois longs et minutieux, le diagnostic étant, le plus souvent, le fruit de confrontations diverses et convergentes.

Pour la collectivité ; une année de redoublement coûte cher.

3 Diagnostic différentiel

Il consiste à éliminer les faux retards scolaires :

    *
      c'est-à-dire l'enfant qui ne tient pas la tête de la classe ; mais l'interrogatoire met en évidence que cet enfant se maintient dans la bonne moyenne et qu'il satisfait chaque année aux conditions nécessaires pour accéder à la classe supérieure.
    *
      ailleurs, c'est un enfant "en avance" d'un ou deux ans qui peine pour conserver cette prématurité.

Rappelons :

- que l'entrée au cours préparatoire (C.P) se fait à 6 ans (dans l'année), l'enfant suivra ensuite le cycle normal :

    *
      à l'âge de 7-8 ans, il sera en CE 1
    *
      à l'âge de 8-9 ans, il sera en CE 2
    *
      à l'âge de 9-10 ans, il sera en CM 1
    *
      à l'âge de 10-11 ans, il sera en CM 2

- Le passage en 6ème se faisant à 11-12 ans.

Mais ce sont des moyennes : le fait qu'un enfant soit en retard d'un ou deux ans, n'est pas alarmant s'il suit normalement sa classe et progresse d'année en année.

Il faut tenir compte :

    *
      de l'âge où il a commencé sa scolarité,
    *
      des maladies qui ont pu lui faire perdre une année.

4 Diagnostic étiologique

Les principales causes de difficultés scolaires sont diverses et nous envisagerons successivement six rubriques :

    * les causes médicales,
    * les causes pédagogiques,
    * les déficits sensoriels,
    * les troubles du langage oral ou écrit,
    * les déficits intellectuels,
    * les causes affectives.

A propos de cette dernière catégorie, il faut souligner qu'il est rare qu'il n'y ait pas de troubles affectifs déterminant la difficulté scolaire ou provoqués par elle.

Dans tous les cas, il faudra préciser :

    * la date d'installation des difficultés,
    * leur type,
    * le comportement des parents à l'égard de l'enfant,
    * le comportement des frères et soeurs,
    * le comportement de l'enfant à l'égard des professeurs, des camarades, de ses activités scolaires et extra-scolaires,...

4.1 Les causes médicales

Ce sont celles dont la connaissance est du domaine de la pathologie. Il faut savoir limiter exactement leur importance et ne pas vouloir tout y ramener malgré les désirs que peut avoir la famille qui espère une solution de simplicité par le médicament.

4.1.1 Les maladies :

La recherche des défaillances organiques cause de retard scolaire est le but que se propose initialement tout examen médical.
Elles peuvent même devenir des obstacles plus ou moins importants à une scolarité dite normale :

    * cardiopathie congénitale ou rhumatismale,
    * encéphalopathie néonatale ou de la première enfance,
    * infirmités motrices,
    * diabète sévère,
    * tuberculose pulmonaire ou osseuse évolutive,
    * épilepsie aux crises trop fréquentes.

Autrefois, on a beaucoup élargi le cadre de l'hypothyroïdie ou de l'hypopituitarisme "frustres". Mais les "extraits glandulaires" ne sont pas une panacée, leur échec est une perte de temps qui aggrave le cas en faisant surseoir à la mise en oeuvre d'autres solutions efficaces.

4.1.2 La fatigue

C'est un facteur souvent évoqué chez un écolier. L'enfant, au retour de l'école, somnole sur ses devoirs et ses leçons qui lui demandent un grand effort malgré une bonne volonté indéniable. Il ne cherche pas à jouer. Il lui est difficile le matin de se lever, il est bougon et maussade.

Des difficultés de caractère peuvent s'en suivre avec une instabilité, une agressivité.

Les causes de cette fatigue sont diverses :

    * une convalescence écourtée, en particulier, à la suite d'une maladie virale très asthéniante,
    * des infections rhino-pharyngées à répétition,
    * une fatigabilité surtout chez certains garçons en période de croissance rapide. Cette fatigabilité s'associe souvent à des céphalées variables et rebelles, parfois à une hyperthermie discrète et passagère.
    * l'alimentation et surtout les fautes diététiques graves et durables,
    * le sommeil dont l'hygiène est primordiale pour le bon rendement à l'écolier,
    * les trajets avec des moyens de transport fatigants et contraignants, qui obligent l'enfant à une trop longue attente,
    * les loisirs, surtout les sports, dont la dose doit être à la mesure de chaque enfant,
    * enfin, le surmenage :
          o surmenage pédagogique : c'est un problème de programmes qui ne sera pas discuté ici ; c'est aussi le fait fréquent des devoirs et des leçons qui peuvent paraître effrayants à certains enfants et dépasser leurs possibilités, parce qu'ils ne sont pas à leur place dans une classe dont le niveau est trop élevé.
          o surmenage au niveau familial et fraternel qui peut amener des perturbations par l'ambiance autour de l'écolier.

4.2 Les causes pédagogiques

Elles ne sont pas du domaine médical mais le médecin doit les connaître pour pouvoir en débattre. Nous n'en citerons que deux :

    * L'irrégularité : c'est à dire des changements répétés d'écoles, de camarades, de maîtres, de programmes qui peuvent désorienter l'enfant. Il faut en tenir compte lorsqu'on prescrit un arrêt de scolarité ou un séjour hors du milieu habituel.
    * L'absentéisme : rançon des maladies répétées mais aussi favorisé par des parents négligents ou trop complaisants.

Le dépistage des lacunes est une affaire de pédagogie ; un test synthétique de niveau scolaire explorant diverses matières permet de les déceler parfois rapidement.

Les causes des lacunes relèvent de mécanismes différents qui co- existent souvent :

    * absentéisme scolaire,
    * mais aussi lorsque l'explication est venue à une époque où l'enfant n'était pas mûr pour la recevoir, alors que l'âge mental était satisfaisant par ailleurs.

4.3 Les déficits sensoriels

4.3.1 Le handicap visuel :

- Ce sont les amblyopes qui relèvent d'une scolarité spéciale : l'indication est une acuité visuelle chiffrée entre 0 et 3/10ème du meilleur oeil après correction.
- Mais, il peut s'agir également d'un astigmatisme, d'une myopie qu'il importe de corriger.

4.3.2 Le handicap auditif :

La surdi-mutité représente la forme la plus grave du déficit de l'audition (1 pour 2000 enfants).
- Les sourds sont ceux qui n'entendent pas la voix forte, dont le déficit atteint 65 à 70 dB pour des fréquences moyennes. Leur défaut de langage interdit la scolarité en milieu normal.
- Ce sont surtout les demi-sourds ou sourds partiels qui risquent de ne pas attirer l'attention sur la véritable cause de leur inadaptation (4% à 6 ans).
- L'hypoacousie est gênante dans la mesure où elle atteint surtout les fréquences conversationnelles c'est-à-dire celles qui correspondent aux voyelles et aux consonnes et gêne la scolarité.

4.3.2.1 Les principaux signes qui doivent attirer l'attention sont : (cf.sémiologie)

- un défaut de langage et nous l'envisagerons plus loin.
- des troubles du comportement : anxiété, attitude de dépendance souvent masquée par une opposition, instabilité psycho-motrice importante.
- une tonalité de voix particulière.

4.3.2.2 Le diagnostic repose sur les méthodes audiométriques.

4.3.2.3 Le traitement apporte souvent des modifications considérables au déficit scolaire ; selon l'intensité de l'hypoacousie la conduite sera différente :

    * jusqu'à 30 dB les palliatifs seront suffisants, c'est-à-dire mettre l'enfant au premier rang.
    * entre 30 et 70 dB, l'appareillage est souvent indiqué, associé dans les premiers temps à une rééducation spéciale ;
    * au delà c'est une affaire de méthode spécialisée.

4.4 Les troubles du langage

(Tout trouble du langage doit entraîner un examen ORL et un test de l'audition pour éliminer une hypoacousie).

4.4.1 Les troubles du langage oral se classent en :

    * troubles de l'articulation,
    * retard de la parole,
    * retard de langage.

Ils se rencontrent chez des enfants :

    * dont le développement de langage a été tardif,
    * dont la parole a été altérée,
    * qui construisent mal leurs phrases,
    * et, dont la compréhension du langage demeure globale et sommaire.

Mais ces enfants ne sont ni arriérés, ni sourds, ni psychotiques, cependant on retrouve souvent chez eux :

    * un léger retard dans le développement moteur,
    * des difficultés dans l'acquisition du schéma corporel,
    * des troubles de l'organisation temporo-spatiale,
    * quelques perturbations affectives.

C'est en maternelle qu'il convient de déceler le trouble et d'entreprendre une rééducation.

4.4.1.1 Les troubles de l'articulation : c'est-à-dire déformation, remplacement ou suppression des phonèmes, sont liés à différents sigmatismes : zozotement, nasonnement.
Leur rééducation nécessite une technique précise : l'âge le plus favorable se situe entre 5-6 ans, c'est-à-dire en dernière section de maternelle, avant l'apprentissage de la lecture.

4.4.1.2 Le retard de parole : ici, la forme du mot ne peut être produite correctement et l'altération n'intéresse plus simplement certains phonèmes (ex. ta pour table).
Le niveau de compréhension est bon, mais il y a un décalage avec le niveau de reproduction.
La plupart du temps, l'enfant sait reconnaître si le mot est bien ou mal prononcé, mais il ne peut se le représenter de manière assez précise pour le reproduire correctement.

4.4.1.3 Le retard de langage est souvent associé au précédent : c'est une atteinte de la structure de la phrase, qui se situe au niveau psycho-linguistique et non plus mécanique.
La conduite à tenir est variable en fonction de l'âge :

    * si ce retard de langage persiste après 3 ans et que l'enfant ne va pas à la maternelle, il faut conseiller la scolarisation ;
    * c'est encore entre 5 et 6 ans que se situe le meilleur moment pour une rééducation mixte du langage et de la parole.

4.4.2 Les troubles du langage écrit : la dyslexie-dysorthographie :
Définition : la dyslexie est une incapacité ou du moins une difficulté anormale dans l'apprentissage de la lecture.
On ne peut en parler si cet échec est dû à un déficit sensoriel ou intellectuel, à des troubles du comportement, à de mauvaises conditions d'apprentissage.
La dyslexie s'établit sur un ensemble d'insuffisances fonctionnelles diverses associées ou non :

    * retard de langage,
    * troubles du schéma corporel,
    * troubles de la latéralisation,
    * troubles de l'orientation temporo-spatiale.

Elle se greffe donc sur un retard de maturation mais se structure au moment où l'enfant engage une relation particulière avec les premiers rudiments de la connaissance et peut donc comporter des éléments "affectifs".

Elle se caractérise par :

    * Une incompréhension du système d'écriture alphabétique à l'origine des plus graves dyslexies confinant à l'alexie : l'enfant n'établit pas de lien entre le signe écrit et le son qu'il symbolise.
    * Une difficulté à différencier les sons : l'enfant ne peut analyser correctement les sons du langage oral. Les confusions les plus tenaces et les plus fréquentes sont entre : le "b" et "p", le "t" et "d", le "f" et "v".
    * Une difficulté de différenciation visuelle : c'est-à-dire difficulté à percevoir forme et structure entre : le "b" et "d", le "p" et "q", le "m" et "n".
    * Une difficulté à différencier l'ordre de succession des lettres ou syllabes, relevant peut-être, comme la précédente, d'un trouble d'orientation spatiale.
    * Enfin, une difficulté d'évocation rapide de la réalité symbolisée par les sons lus, ce qui entraîne une lecture anonnée, hachée, le regard reste fixé sur le mot à lire et le texte devient incompréhensible autant pour le lecteur que pour l'auditeur.

Lorsqu'on constate qu'un enfant est dyslexique, il faut engager le traitement le plus tôt possible (le plus souvent une rééducation) en règle après 6 mois de C.P et ceci pour éviter à l'enfant de prendre du retard sur le plan scolaire et pour éviter l'apparition d'une dysorthographie.
En fait, c'est sur le traitement préventif qu'il faut insister, c'est-à-dire la rééducation en dernière année de maternelle :

    * des difficultés motrices et de l'organisation spatiale,
    * des troubles du langage.

Mais parfois on constate une difficulté affective profonde et il faudra pratiquer une psychothérapie.
4.5 Les déficits intellectuels

C'est la crainte secrète des parents.
C'est le diagnostic qu'il ne faut pas porter à la légère : ce n'est pas un diagnostic d'élimination, mais un diagnostic positif qu'il faut établir sur des bases certaines.
C'est dire la nécessité absolue d'examens complémentaires précis tels que les tests psychométriques explorant :

    * l'intelligence pratique et l'intelligence abstraite, d'une part,
    * l'intelligence verbale et l'intelligence non verbale, d'autre part.

Parmi les plus utilisés, nous citerons :

    * le TERMAN-MERRILL, adaptation du test de BINET-SIMON,
    * les échelles de WECHSLER-BELLEVUE (WISC)* pour les enfants de 5 à 15 ans.
    * le test des cubes de KOHS entre 6 et 14 ans : il évalue la structuration et les méthodes employées pour saisir et résoudre certains problèmes logiques.

La confrontation des résultats obtenus conduit à deux éventualités :

    * le niveau intellectuel est supérieur au niveau scolaire ; il faut chercher plus loin, ne pas taxer l'enfant de "paresseux" comme y incite volontiers l'entourage ;
    * le niveau intellectuel et le niveau scolaire sont similaires ; c'est un problème d'orientation qui se pose ; si le niveau de la classe est supérieur à celui de l'enfant, il faut l'orienter vers un enseignement plus adapté : classe de transition, classe de perfectionnement, voir placement dans un établissement spécialisé.

4.6 Les causes affectives

Elles se traduisent schématiquement de 3 façons : anxiété, instabilité, opposition.

4.6.1 l'anxiété

Elle peut diminuer le rendement d'une manière chronique ou paroxystique (composition, interrogation orale).
Elle diminue la confiance en soi de l'enfant.
Elle peut correspondre à une hyper-émotivité, à une situation conflictuelle, à un traumatisme affectif ; enfin, elle peut relever d'un état durable, plus ou moins pathologique selon son intensité.
Il faut essayer de clarifier la situation :

    * en revoyant l'enfant et en l'encourageant,
    * en allégeant l'inquiétude parentale.

Nous rapprocherons de ce type les "phobies" scolaires.

    * Il s'agit le plus souvent, d'enfant unique et de filles, qui, pour des raisons irrationnelles refusent d'aller en classe et résistent avec des réactions d'angoisse, voire de panique, si on veut les contraindre.
    * Elles surviennent essentiellement lors des changements de scolarité, c'est-à-dire lors du passage de la maternelle au primaire et du primaire au secondaire.
    * La structure familiale peut être caractérisée par :
          o une association "mère écrasante - père effacé",
          o réagissant à cette surprotection et à cette mise en dépendance de la mère, l'enfant devient hostile et anxieux et ceci va constituer un cercle vicieux. On peut dire que l'enfant n'est pas primitivement effrayé d'aller à l'école, mais qu'il est effrayé de quitter sa mère.
          o de son côté, la mère s'agrippe à son enfant dont elle accepte difficilement l'absence.
    * Le traitement est variable mais il comporte souvent une double prise en charge : l'enfant et les parents.

4.6.2 L'instabilité

Il s'agit ici du rôle affectif de l'instabilité psycho-motrice, l'autre pôle étant le pôle moteur.
Il est représenté par une hyper-émotivité, une anxiété, une insécurité latente, une quête affective, qui peuvent passer par la recherche de la punition.
Le traitement comprendra :

    * une extension des activités physiques,
    * le travail en petits groupes, des horaires courts,
    * enfin, un essai d'abord des aspects affectifs du problème.

4.6.3 L'opposition

- tantôt "active" se manifestant par une indiscipline et des expédients divers pour échapper aux contraintes scolaires ;
- tantôt "passive" se traduisant par une réserve, une inertie, une non- participation.
Elle peut signifier une revanche contre une autorité parentale trop draconienne, ou, à l'opposé, témoigner d'une absence de cette autorité.
Il peut également s'agir pour l'enfant d'un besoin d'attirer l'attention sur lui.

Conclusion

Devant toutes difficultés scolaires, il importe de rechercher dans un premier temps :

    * une étiologie médicale,
    * un handicap sensoriel,
    * un déficit intellectuel.

En sachant que bien souvent, la difficulté scolaire est un symptôme : c'est pour l'enfant une manière de maîtriser son angoisse. L'attitude pratique a donc pour but de rechercher l'aide ou le changement approprié.
Accidents et intoxications chez l'enfant
M. Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 29 février 2000

1 Définitions
2 Epidémiologie
2.1 Mortalité
2.2 Morbidité
3 Ecologie
3.1 L'enfant
3.2 L'entourage humain
3.3 L'environnement matériel
3.4 Les agents responsables
4 Etiologie
4.1 Suffocation mécanique
   

4.2 Chute
4.3 Les accidents de la circulation
4.4 Brûlures
4.5 Noyades
4.6 Coup de chaleur
4.7 Morsure de chien
4.8 Intoxications accidentelles
5 Prévention
5.1 Mesures générales
5.2 Mesures spécifiques
Objectifs

1. Citer les trois principales causes de mortalité chez l'enfant de 1 à 14 ans en France (dans les pays industrialisés en général).

2. Citer les accidents fréquemment rencontrés chez l'enfant de :

    *
      moins d'un an,
    *
      de 1 à 4 ans,
    *
      de 5 à 14 ans.

3. Décrire les conseils à donner aux parents et aux enfants d'âge scolaire pour la prévention des accidents de la route.

4. En fonction des accidents survenant à la maison au cours de la première année, citer les conseils à donner aux parents.

5. Citer la tranche d'âge où surviennent le plus fréquemment les intoxications accidentelles chez l'enfant.

6. Citer les types d'intoxications les plus fréquents chez l'enfant entre 2 et 5 ans.

7. Donner les éléments à rechercher devant une intoxication récente.

8. Citer les contre-indications du lavage d'estomac au cours d'une intoxication et en donner les raisons.

9. Décrire les symptômes cliniques et biologiques de l'intoxication salicylée, les principes du traitement et donner la dose toxique chez l'enfant.

10. Décrire les principaux symptômes cliniques de l'intoxication par l'ingestion barbiturique, les principes de traitement et la dose toxique chez l'enfant.

11. Décrire les symptômes cliniques de l'intoxication accidentelle des caustiques et la conduite à tenir.

12. Décrire la conduite à tenir devant l'intoxication accidentelle de pétrole et de ses dérivés et les principes du traitement.

13. Citer les points d'action d'une politique de prévention des accidents.

14. Décrire la prévention des complications infectieuses des morsures de chien.

15. Donner les éléments permettant d'évaluer la gravité d'une brûlure.

16. Décrire les complications des brûlures.

17. Décrire les conduites à tenir en cas de brûlures chez un enfant.

1 Définitions

Pour l'OMS, l'accident est "un événement indépendant de la volonté humaine provoqué par une force extérieure agissant rapidement et qui se manifeste par un dommage corporel ou mental".
Cette définition est incomplète car elle élimine les accidents qui ne provoquent pas de lésions tel :
- "les presque-accidents" où l'accident est évité sans aucun dommage, alors que toutes les conditions pour sa survenue ont été réunies.
- les incidents, qui surviennent quotidiennement et représentent des situations dangereuses qui se terminent par un dommage si minime qu'il est très vite oublié (l'enfant se pince les doigts dans une porte ou se fait une petite coupure avec un objet tranchant par exemple).

Or, ces deux dernières catégories sont intéressantes à considérer dans la mesure où elles ont une valeur éducative peut-être aussi grande que les accidents réels. Leur connaissance est pourtant difficile puisqu'elle ne donnent habituellement lieu à aucun enregistrement épidémiologique.

2 Epidémiologie
2.1 Mortalité

Alors que la mortalité générale continue de décroître dans la plupart des pays développés, la mortalité par accidents prend une importance croissante, surtout chez les enfants et adolescents, dont elle représente la part la plus importante. Bien entendu, ce fait ne se retrouve pas dans les pays tropicaux où dominent les problèmes nutritionnels et infectieux, surtout pour les enfants de 0 à 4 ans ; en valeur absolue la mortalité accidentelle y est toutefois importante.

Au cours de la première année de vie, les accidents bien que très nombreux ne représentent qu'une faible proportion des décès (9 %) dominés par les malformations congénitales et la pathologie liée à la prématurité. A partir de 1 an et jusqu'à l'âge de 35 ans pour les femmes et 45 ans pour les hommes, les accidents sont la première cause de décès ; ils représentent 36 % des morts de 1 à 4 ans, 45 % de 5 à 14 ans, atteignant un maximum : 72 % lors de l'adolescence entre 15 et 24 ans. A tous les âges et dans tous les pays, les garçons courent un risque plus élevé que les filles puisque pour 100 décès accidentels sexes réunis, 65 surviennent chez les garçons entre la naissance et 14 ans et 79 entre 15 et 24 ans.

2.2 Morbidité

Elle est mal cernée malgré la multiplicité d'enquêtes qui ont l'inconvénient de ne pouvoir être rapportées ni à la population générale ni à une population géographiquement délimitée. Récemment des données intéressantes ont été fournies, provenant d'enquêtes menées dans la Communauté, dans certaines villes ou zones rurales de France. Elles sont convergentes dans leurs résultats et révèlent que la morbidité accidentelle est réellement très importante dans l'enfance, aux environs de 10 % ; c'est dire qu'un enfant français de moins de 15 ans sur 10, chaque année, est victime d'un accident donnant lieu à un recours ou à un acte médical. On y retrouve la très nette prédominance masculine, la répartition par âge : peu d'accidents au cours de la première année de vie, un pic de fréquence entre 2 et 3 ans, une certaine stabilité entre 3 et 10 ans, une augmentation nette et régulière à partir de 10 ans.
La prédominance de la traumatologie est très marquée et croît avec l'âge des enfants : 78 % avant 3 ans, 94 % à partir de 6 ans pour atteindre 98 % à partir de 12 ans. L'évolution est habituellement bénigne et on estime qu'il y a environ un accident mortel pour 1000 accidents.
3 Ecologie

Tout comme une maladie infectieuse, un accident met en jeu un agent d'agression défini, un sujet récepteur avec sa particularité psychophysiologique, et ceci dans un environnement matériel et humain favorable au déclenchement de la pathologie. Il y a donc une véritable tétrade : le sujet, l'entourage humain, l'environnement matériel et l'agent vulnérant. Ces différentes paramètres et leurs interactions sont donc à prendre en considération pour une action préventive.

3.1 L'enfant

Une démarche instructive, et riche de déduction préventive, consiste à relier les différents risques accidentels aux étapes du développement physique, psychomoteur et affectif de l'enfant.
En ce qui concerne le développement physique, l'enfant est particulièrement instable et malhabile dans une période de forte croissance : les premières années de vie et le pic de croissance pré-pubertaire. La morphologie et les proportions du tout petit, dont la tête représente à la naissance le quart de la hauteur corporelle et seulement le huitième à la fin de l'adolescence, font que l'équilibre est instable et le centre de gravité haut situé chez le petit enfant ; il tend à s'abaisser avec la croissance du fait de la diminution proportionnelle de la tête, mais tend à se relever par le jeu de l'augmentation progressive du segment inférieur. Cette variabilité du centre de gravité, qui ne se stabilise qu'après la puberté, explique la facilité des chutes chez l'enfant et aussi la plus grande vulnérabilité de la tête en cas de projection.

Les mêmes remarques s'appliquent au développement psychomoteur, processus continu et procédant par étape dont le rythme de déroulement varie suivant les individus. Chacune de ces étapes comporte des risques spécifiques : par exemple, le nourrisson de 6 mois qui commence à rouler de son dos sur son ventre, peut tomber de la table à langer ; l'enfant entre 8 et 2 ans qui porte tout à la bouche est exposé à l'intoxication accidentelle, à l'inhalation de corps étrangers ; l'enfant rampeur, marcheur, trotteur, grimpeur est en danger d'accident à l'occasion de chacune de ces activités. Ce n'est que progressivement que l'enfant développe son attention, sa capacité à comprendre les signaux émis par l'environnement, sa vision périphérique, son audition et la localisation des sons. Par ailleurs, même quand il acquiert un certain nombre de notions et de connaissances sur les risques accidentels et notamment sur les règles de la circulation, l'enfant ne les traduit pas pour autant en terme de comportement ; même quand il se conduit correctement en temps normal, il ne sait pas toujours s'adapter à une situation nouvelle surtout si elle comporte un élément d'urgence et de stress.

Une autre série de facteurs, liés au développement affectif et social joue également un rôle dans la genèse des accidents. Dans sa première année, l'enfant est le plus souvent sous la responsabilité de ses parents et ce qui compte alors, c'est leur équilibre psychoaffectif, leur "compétence". Dans sa deuxième année, l'enfant développe de plus en plus des comportements autonomes, exploratoires et ses performances sont source de joie et d'enrichissement. Mais il affirme aussi sa personnalité naissante en s'opposant et en outrepassant les interdictions des adultes et cela sans une claire conscience des conséquences possibles de ses actes. Dès 3 ans, les problèmes de structure psychologique individuelle jouent un grand rôle. Il est des enfants calmes, équilibrés, prudents ; à l'opposé, d'autres sont instables, hyperactifs, en fait à la recherche d'attention de la part des adultes ; d'autres sont anxieux, repliés sur eux-mêmes, inhibés. Il est évident que le risque accidentel varie beaucoup en fonction de ces données de caractère.

A l'âge pré-scolaire et surtout après 6 ans, l'enfant apprend et progresse ; mais c'est là aussi qu'il développe des comportements hétéro agressifs qui s'extériorisent volontiers par des comportements de violence, cause d'accident pour autrui, ceci surtout chez les garçons. Et c'est peu de temps après avoir maîtrisé les données complexes de leur environnement, après avoir acquis une certaine maturité neurologique, sensorielle et psychologique que l'enfant devient adolescent. A cette période, le besoin d'indépendance, l'opposition, coexistent avec une immaturité psychologique qui fait rechercher des expériences dangereuses mais valorisantes. Malheureusement, les possibilités fournies par la mécanique moderne transforment souvent ces conduites dangereuses en accidents graves.

Il existe donc des catégories d'enfants à risque dans le domaine de l'accident : les enfants ayant des problèmes affectifs, les enfants instables, ceux qui ont de légers troubles psychomoteurs ; les enfants handicapés représentent peut-être aussi un groupe vulnérable, mais on manque d'études pour l'affirmer.

3.2 L'entourage humain

Il est souvent mis en cause. Cependant les parents sont conscients des risques que courent leurs enfants mais ne savent que faire pour y remédier. Par ailleurs, il se font souvent des illusions sur les possibilités de leurs enfants. C'est là qu'intervient la "compétence" de la famille qui a un rôle de protection et d'éducateur. La protection qui est totale à la naissance doit progressivement faire la place à la maîtrise de l'environnement de l'enfant grâce à l'éducation des risques. Les différentes enquêtes épidémiologiques montrent que les jeunes accidentés, spécialement les récidivistes ont des mères travaillant souvent à l'extérieur, malades ou déprimées, surchargées de préoccupations diverses ; des pères plus souvent absents, qui s'occupent moins de leurs enfants pendant les jours ouvrables. La famille de ces enfants a souvent un revenu plus bas, sans sécurité financière ; les familles dissociées, ou vivant dans des conditions sociales difficiles sont également sur-représentées. Certaines périodes critiques de la vie familiale (maladie, chômage, nouvelle naissance) prédisposent aussi aux accidents. Enfin, l'alcool dont le rôle est particulièrement bien démontré dans les accidents de la route, est également à l'origine d'un certain nombre d'accidents domestiques.

3.3 L'environnement matériel

Celui-ci joue un rôle de premier plan dans la genèse de la nature de l'accident. Plus de la moitié surviennent à la maison et dans son voisinage immédiat. Cette proportion atteint presque 90 % à l'âge préscolaire. Les pièces à accident sont, par ordre de fréquence décroissante, la cuisine, la salle de bains, la chambre à coucher, la cave. Les heures de pointe de la morbidité accidentelle sont la fin de la matinée et de la soirée.
Les causes favorisantes sont nombreuses et très variables suivant l'habitat, la région, le climat, la saison. Chaque environnement comporte ses propres risques : à la ville, constructions anciennes, vétustes et exiguës, constructions modernes souvent exiguës également, immeubles communautaires sans terrain de jeu ; à la campagne, nocivité des points d'eau mal protégés, des machines agricoles, des dépendances où sont remisés les produits agro-chimiques. Partout le surpeuplement est un facteur favorisant, de même que la proximité d'une voie de circulation (route, chemin de fer, canal).

3.4 Les agents responsables

Les agents responsables directs des accidents sont si nombreux qu'ils découragent tout essai d'inventaire. Les conditions de la vie moderne multiplient autour de nous les risques d'accidents sans que la notion de sécurité soit suffisamment prise en compte par les industriels responsables de ces progrès techniques. Parmi ces agents, il faut souligner la fréquence et la gravité des accidents de la route et des transports.
4 Etiologie

La répartition des causes en fonction de l'âge s'explique facilement compte tenu des considérations précédentes.

    *
      De 0 à 1 an, il est habituel d'incriminer une cause principale, la suffocation mécanique ; et trois causes accessoires : chutes, intoxications et accidents de circulation où le bébé est impliqué comme passager.
    *
      De 1 à 4 ans, cinq causes principales se partagent la majorité des cas : accidents de circulation, brûlures, noyades, chutes accidentelles, intoxications.
    *
      De 5 à 14 ans, trois causes principales : accidents de trafic, traumatismes, noyades.
    *
      De 15 à 24 ans, les accidents de circulation tiennent, et de loin, la première place.

Il est intéressant de reprendre avec quelques détails les causes les plus importantes.

4.1 Suffocation mécanique

Surtout fréquente chez le jeune nourrisson, l'asphyxie peut avoir des causes multiples :

    *
      exogènes : étouffement dans une literie trop souple ou trop imperméable ; le nourrisson glisse sous ses draps et couvertures en s'agitant pendant son sommeil. Strangulation par une sangle de contention, un objet de literie ou un cordon de rideau.
    *
      endogènes : inhalation de corps étrangers, fausses routes alimentaires, inondation par vomissements.

Ces accidents doivent être distingués du tableau de la mort subite inopinée du nourrisson, dont l'étiologie demeure encore imprécise ; le contrôle anatomique doit toujours comporter, en pareil cas, une vérification soigneuse de l'arbre trachéo-bronchique.
Signalons que chez l'enfant plus grand, des cas de suffocation extrinsèque sont rapportées par enfouissement de la tête dans un sac en matière plastique, ou par le fait d'être enfermé dans un espace hermétiquement clos (armoire par exemple).

4.2 Chutes

On a vu que les chutes étaient un des accidents les plus fréquents chez l'enfant : chutes du nourrisson de sa table à langer ou de sa chaise haute, chutes de l'enfant lors de l'apprentissage de la marche, dans un escalier, défenestrations, planches à roulettes. La tolérance des parties molles de l'enfant, la plasticité de son squelette font que la majorité de ces chutes sont sans conséquence. Les atteintes squelettiques sont cependant assez fréquentes, mais d'un bon pronostic. Par contre, malgré leur habituelle bénignité, les traumatismes crâniens demandent une surveillance très soigneuse pendant les premières heures. Rarement les chutes peuvent tuer, soit par rupture viscérale (foie, rate), soit par lésions cérébrales, qui peuvent également laisser des séquelles neurologiques. Malgré ces risques, les chutes ne représentent qu'un danger relativement modeste, compte-tenu de leur extrême fréquence.

4.3 Les accidents de la circulation

Ils ne sont pas les plus fréquents, mais bien les plus meurtriers. En 1993, les accidents de la circulation ont provoqué 624 décès d'enfants de moins de 15 ans et 16873 blessés, 1164 décés entre 15 et 20 ans et 33506 bléssés La route et la rue constituent la première cause de mortalité des plus de 5 ans (40 % des décès accidentels). L'enfant, c'est 1 piéton tué sur 6, un passager sur 9, mais aussi 1 cyclomotoriste sur 5. Deux groupes d'âge sont particulièrement exposés selon que l'on considère les conducteurs et les piétons ; pour les premiers il s'agit du groupe d'âge 15-19 ans, pour les seconds, celui de 1-4 ans.
Les polytraumatismes qui résultent de ces accidents s'accompagnent fréquemment de lésions cérébrales, parfois irréversibles. Toutes les mesures susceptibles de réduire l'incidence des accidents de trafic ont évidemment d'heureuses conséquences pour l'enfance ; mais ces mesures sont insuffisantes, et l'enfant doit lui-même acquérir, aussi précocement que possible, le sens du trafic.
4.4 Brûlures

Les modalités en sont très variées : brûlures par eau bouillante, brûlures des mains au contact des poêles ou de radiateurs trop chauds, par barbecues, brûlures électriques (prises de courant non protégées) ; les allumettes sont, pour le jeune enfant, une dangereuse tentation.
Leur pronostic ne se pose pas dans les mêmes termes que pour l'adulte : toute brûlure atteignant 10 % de la surface corporelle, et même 5 % chez les nourrissons, doit être considérée comme grave potentiellement mortelle et traitée en conséquence.

4.5 Noyades

Chez les grands enfants, les noyades surviennent surtout en saison chaude, à la suite de bains imprudents ou de jeux près, sur ou dans l'eau. Chez les petits de 3 ans, il s'agit essentiellement de noyades domestiques dans la baignoire ou par chute accidentelle dans une pièce d'eau mal protégée. Elles surviennent en toute saison et peuvent être mortelles même avec des hauteurs d'eau très faibles.

4.6 Coup de chaleur

Une meilleure connaissance des besoins hydriques considérables du nourrisson et de leur majoration en cas de chaleur extérieure intense, de fièvre élevée, d'intervention chirurgicale, a considérablement réduit la mortalité par "coup de chaleur", c'est-à-dire par déshydratation aiguë de cause exogène, non compensée. Mais chaque été, des nourrissons risquent la mort dans des automobiles où leurs parents les laissent, toutes vitres closes, pendant un temps plus ou moins long.
4.7 Morsures de chien

Accident fréquent (aux U.S.A, 50 000 morsures par an), il concerne dans 72 % des cas l'enfant, surtout de 5 à 9 ans avec une prédominance chez le garçon (3 garçons pour une fille). 80 % des morsures ont lieu au visage (joues, lèvres, oreilles), à la hauteur de la gueule du chien. Les lésions associent coupures (incisives, molaires antérieures), piqûres (canines) avec inoculation profonde, broiement (molaires postérieures) avec nécrose, pincement cutané (arc ecchymotique), déchirure et lésions tangentielles (accrochage, fermeture, traction);

Il faut tenir compte, non seulement du délabrement, mais aussi de la septicité qui est souvent le fait de germes banals mais il peut s'agir de tétanos, pasteurellose, sodoku, leptospirose, rage. On fait prélèvement et antibiogramme sur la plaie et une prévention systématique du tétanos (sérothérapie et vaccination simultanée pour les non vaccinés, anatoxinothérapie pour les anciens vaccinés). Le traitement local consiste en un nettoyage de la plaie, débridement, excision puis suture non étanche.
Si l'animal n'es pas vacciné contre la rage, il faut 15 jours de surveillance vétérinaire et si on est en zone endémique, abattre le chien. Si l'animal est reconnu enragé, l'enfant mordu sera traité par sérovaccination antirabique (14 injections de 2 ml en sous-cutané périombilical, rappel de 0,25 ml en intradermique au 15è et 90è jour, demi-dose avant 5 ans).
Il peut exister de lourdes séquelles esthétiques ou fonctionnelles. La responsabilité civile du propriétaire du chien est engagée.

4.8 Les intoxications accidentelles

L'enfant partage avec l'adulte un certain nombre d'intoxications qui revêtent souvent une allure familiale ; intoxication oxycarbonée surtout fréquente en hiver, intoxication alimentaire (champignons en automne). Mais l'enfant a, en plus, une pathologie toxique particulière : les intoxications par ingestion accidentelle de médicaments ou de produits ménagers.

L'intoxiqué est plus souvent de sexe masculin. L'âge de prédilection est la petite enfance : 2/3 des cas de 1 à 3 ans, 3/4 de 1 à 4 ans. Comme pour les accidents, les enfants de famille nombreuse, moins surveillés, sont plus souvent victimes d'intoxications. Enfin, nulle classe sociale n'est épargnée, peut-être parce que le nombre de produits toxiques entreposés à la maison, et donc le danger, augmentent avec le niveau socio-économique.

Les intoxications médicamenteuses sont les plus fréquents, avec une très grande variété de drogues et notamment les anxiolytiques, les hypnotiques, les salicylés. Les intoxications ménagères sont à peine moins fréquentes : il s'agit surtout d'eau de Javel, de soude caustique, de produits de nettoyage et de produits phyto-sanitaires. Enfin, il existe des intoxications par ingestion d'alcool.
Dans 1 foyer sur 4 seulement, l'armoire à pharmacie est placée en hauteur et fermée à clef. Les produits d'entretien sont à la portée des enfants, c'est-à-dire sous l'évier, chez 1 foyer sur 2 ; ils sont transvasés dans 50 % des cas.

Autre danger presque inconnu : les plantes d'appartement (lierre, gui, diffenbachia) dont les feuilles et tiges peuvent être mâchées par l'enfant et entraîner allergies, oedèmes et troubles respiratoires.

Certains aspects entretiennent dans l'esprit des enfants une fâcheuse confusion ; conditionnements publicitaires aux couleurs chatoyantes des divers produits ménagers ; goût des médicaments qui font ressembler les pilules à des bonbons, les sirops à des produits de confiserie ; achat simultané, dans les mêmes magasins, de produits de consommation courante, que l'enfant connaît et apprécie, et des produits ménagers toxiques ; jouets en matière plastique contenus à titre publicitaire dans un grand nombre de produits d'entretien (pratique maintenant interdite dans de nombreux pays) ; toxique stocké non plus dans son emballage d'origine, mais dans des récipients inadéquats.

La symptomatologie est extrêmement polymorphe suivant le toxique en cause, la quantité ingérée, le délai écoulé avant le traitement. Elle peut être initialement digestive à cause de la voie d'introduction du produit, et spécialement dans les intoxications ménagères, puis secondairement neurologique, par fixation du corps toxique sur le système nerveux ; plus tardivement, des signes viscéraux ou hématologiques, conditionnés par une affinité élective du produit pour tel ou tel viscère ou tissu, peuvent se faire jour. La coexistence possible de plusieurs toxiques différents dans un même produit est à l'origine de symptomatologies complexes, parfois déroutantes.

Schématiquement, on peut distinguer parmi les produits en cause ceux dont la toxicité est purement locale, due à leur causticité pour les muqueuses digestives (eau de Javel, soude, permanganate de potassium, produits de lessive,...) et ceux dont l'absorption gastro-intestinale détermine secondairement des effets à distance :

    *
      symptômes nerveux pour l'alcool, la nicotine, les tranquillisants, la pipérazine, les insecticides organo-phosphorés ;
    *
      symptômes rénaux pour le tétrachlorure de carbone, les sels de métaux lourds, certains médicaments ;
    *
      symptômes sanguins : méthémoglobinémie (aniline), hémolyse (chlorate de potasse, naphtaline) ou hémorragie (anticoagulants, certains raticides),
    *
      symptômes pulmonaires avec le pétrole, l'essence, etc...

Cette énumération incomplète montre le polymorphisme des signes cliniques, qui rend bien compte de la difficulté du diagnostic étiologique exact, quand la substance ingérée est inconnue ou imprécise. C'est parfois l'analyse toxicologique du produit lui-même, du sang ou des excréta (urines, vomissements, diarrhée) qui renseigne sur la nature du toxique. Il se peut même que l'intoxication ne soit pas connue et c'est en présence d'un enfant qui, allant bien jusque là, présente brutalement une symptomatologie bruyante, qu'il appartient au médecin de soupçonner l'existence d'une intoxication et de trouver le ou les agents responsables.

L'éventualité la plus fréquente est l'intoxication récente par un produit connu. La conduite à tenir est la suivante : le médecin doit interroger l'entourage afin de préciser l'heure de l'intoxication, sa survenue avant ou après un repas, l'âge et le poids de l'enfant, la quantité de toxique absorbée, la nature des gestes déjà faits. On s'informera sur le toxique en téléphonant au centre anti-poison le plus proche ou en consultant des ouvrages pratiques de toxicologie.

Si la toxicité du produit est reconnue, si l'enfant n'est pas dans le coma, s'il ne convulse pas, s'il ne s'agit ni d'un caustique, ni d'un pétrole, ni d'un moussant, il faut évacuer le contenu gastrique au plus vite. Déjà par téléphone, le médecin peut conseiller aux parents de faire vomir l'enfant par des moyens mécaniques, en titillant le fond de la gorge avec les doigts ou avec un manche de cuillère. Sur place, le médecin dispose de deux moyens d'inégale valeur :

    *
      l'injection intra-musculaire de 1/10 mg d'apomorphine par kg de poids, agissant au bout de 5 à 7 minutes. Les incidents sont exceptionnels, mais s'ils survenaient, l'injection immédiate d'une dose égale de nalorphine les neutraliserait ;
    *
      le sirop d'Ipéca, à la dose de 15 ml chez le nourrisson, 30 ml chez le grand enfant, dilué dans 10 fois son volume d'eau. Il a l'inconvénient de n'agir qu'au bout de 20 minutes.

On peut compléter ces gestes par l'administration de charbon actif à la dose de 3 à 5 cuillères à soupe.

Le lavage d'estomac garde toute sa valeur, s'il est suffisamment précoce et si un coma ou des brûlures oesophagiennes ne le contre-indiquent pas. Il est généralement pratiqué en milieu hospitalier.

Malgré le caractère parfois impressionnant, les intoxications accidentelles sont rarement mortelles : dans 0,2 % des cas. Mais cette règle générale souffre des exceptions redoutables : les intoxications par l'alcool, les organo-phosphorés, la nicotine, certains médicaments peuvent tuer. Les séquelles neurologiques définitives de l'alcoolisme aigu du jeune enfant par encéphalopathie hypoglycémique et les sténoses oesophagiennes post-toxiques dues à l'ingestion de produits ménagers caustiques ne sont pas exceptionnelles, de même que les séquelles pulmonaires des empoisonnements au pétrole, aux solvants organiques.

Enfin, les intoxications donnent lieu à un taux d'hospitalisation plus élevé que les autres accidents d'enfant dans l'ignorance où on est souvent de la nature exacte du toxique et de la quantité réellement ingérée.

5 Prévention

La prévention comporte des mesures générales, valables pour toutes les variétés d'accidents et des mesures particulières, adaptées aux risques prédominants.
5.1 Mesures générales

Il convient d'abord de s'entendre sur les objectifs de la prévention : le risque fait partie de la vie de tous les jours et il a même un effet éducatif certain. Le problème est donc de faire sans cesse, parmi les dangers qui menacent l'enfant, le tri entre les risques inacceptables parce qu'incontrôlables et potentiellement très dangereux et ceux qui, au contraire, doivent être acceptés, sous réserve d'aider l'enfant à les surmonter par un comportement adapté : ce sera pour lui le cheminement vers la maturité et la responsabilité de l'âge adulte.

On a vu précédemment que l'enfant était placé au centre d'un système dont les autres éléments sont l'entourage humain, l'environnement matériel et l'agent vulnérant. Le modèle de GUSTAFSSON tient en une équation qui sans être parfaite a une bonne valeur didactique :

H.P. = S.E.
H représente les hasards de la vie et les risques liés à l'environnement.
P représente la personnalité du sujet
S la surveillance dont est l'objet l'enfant
E l'éducation que reçoit l'enfant.

L'accident se produit quand l'équilibre est rompu entre les deux termes, les risques et les facteurs de personnalité l'emportant sur la surveillance et l'éducation. Il existe aussi un équilibre à l'intérieur de chaque terme de l'équation : à environnement dangereux peut correspondre une personnalité prudente, ce qui minimise les risques ; quand l'enfant grandit, la surveillance doit faire progressivement place à l'éducation. Cette équation est surtout applicable au petit enfant.
Compte-tenu du caractère plurifactoriel des accidents, la prévention ne peut être que multiforme. Tout programme préventif ne visant qu'un élément de la chaîne de causalité a des chances de ne pas être très efficace. Enfin, on ne peut attaquer tous les problèmes à la fois : il y a lieu de se concentrer surtout sur les accidents qui du fait de leur fréquence et/ou de leur gravité, ont un caractère prioritaire.

Les actions portant sur l'environnement sont les plus payantes. Il faut donner la priorité à celles qui, pour un faible investissement, sont les plus rentables : les enfants en sont les premiers bénéficiaires. La prise en compte des remarques et des observations de la population du village, du quartier est ici essentielle. Personne n'est mieux placé pour identifier les "points noirs", dans un milieu donné, que ceux qui y vivent à longueur d'année. Procédant de la même démarche, les technologies de sécurité sont souvent efficaces, des mesures simples permettent de réduire le risque accidentel tel que la limitation de la température de l'eau chaude des robinets, les normes de sécurité des jouets, des habits, du mobilier pour bébé, les barrières autour des piscines privées, les conditionnements inviolables des médicaments, les surfaces molles des terrains de jeux. Mais, il y a beaucoup à faire pour généraliser de telles mesures.

La réglementation et la législation ont un rôle majeur dans la protection des citoyens, des consommateurs. Encore faut-il se donner les moyens d'appliquer la réglementation existante, les normes et standard nationaux ou internationaux. Toute anomalie doit être signalée à la Direction Départementale de la Concurrence de la consommation et de la répression des fraudes.
5.2 Mesures spécifiques

Elles doivent s'inspirer des circonstances mêmes des différentes variétés d'accidents.
5.2.1 Les chutes
L'enfant a le sens de l'équilibre et la peur du vide et s'il tombe, c'est souvent parce qu'une fausse sécurité lui a masqué le danger (volets mal fermés, grillages pas assez hauts) : d'où l'importance de la protection des fenêtres, des balcons, des escaliers de cave, etc...
5.2.2 Les accidents de la circulation

L'enfant piéton doit être soigneusement protégé (surveillance, tenue de la main voire par un harnais, aires de circulation et de jeux distinctes de la rue), et précocement éduqué : initiation progressive au code de la route.
L'enfant passager, spécialement vulnérable du fait de la légèreté, doit être maintenu et protégé à l'intérieur des véhicules : interdiction de placer les enfants de moins de 13 ans à l'avant, verrouillage spécial permettant de n'ouvrir les portières que de l'extérieur, sièges spéciaux adaptés aux dossiers arrières pour les enfants de moins de 5 ans, ceintures arrières de sécurité au-delà de 11 ans ; entre 5 et 11 ans, on peut imaginer un système de harnais capable de retenir l'enfant mais lui laissant une certaine liberté de mouvement.L'enfant ou l'adolescent conducteur (de bicyclette, de vélomoteur) doit être parfaitement éduqué, surveillé, pénalisé le cas échéant (port obligatoire du casque).
Mais c'est l'adulte au volant, si souvent indiscipliné ou inconscient, grand responsable des morts d'enfants par accidents de trafic, qu'il faut éduquer, surveiller, pénaliser.
5.2.3 Brûlures

Les parents doivent être avertis du danger des récipients remplis d'eau chaude placés à même le sol, des sources de chaleur non protégées, des casseroles posées sur la cuisinière et dont la queue dépasse, des allumettes laissées à portée des jeunes enfants, des barbecues que l'on rallume avec de l'alcool et instruits de la conduite à tenir en cas de vêtements enflammés.
5.2.4 Noyades

Le risque est surtout grand à la campagne et pour les très jeunes enfants : il faut protéger réglementairement points d'eau d'agrément et des piscines privées. Les noyades en rivière et en mer concernent des enfants plus grands : les remèdes en sont la police des baignades et des plages et surtout, l'apprentissage précoce de la natation.
5.2.5 Suffocation mécanique

L'étouffement par la literie, dont le risque est maximal entre 6 et 9 mois, peut être évité par un matériel de couchage rationnel et une surveillance plus rigoureuse des enfants en collectivité.
La fausse route alimentaire peut se voir chez des vomisseurs habituels, surtout quand les anti-émétisants, administrés à dose importante, émoussent le réflexe épiglottique. Il ne faut jamais coucher de tels enfants à plat dos, mais sur le côté. Il faut éviter de donner noix, noisettes, cacahuètes aux petits enfants, et se méfier des petits objets et jouets en plastique, surtout à la période du stade oral.
5.2.6 Intoxication

Réglementation de la vente au détail, étiquetage obligatoires indiquant l'antidote en cas d'absorption accidentelle, fermeture inviolable pour un jeune enfant, rangement hors de la portée diminueraient le risque toxique. En cas d'échec de la prévention, les centres anti-poisons rendent de réels services en matière de renseignements et de soins.

Quelques exemples d'intoxications fréquentes chez l'enfant
M. Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 29 février 2000

1 L'intoxication barbiturique
1.1 Diagnostic
1.2 Traitement
2 Intoxication salicylée
2.1 Signes cliniques
   

2.2 Traitement
3 Intoxication par les produits ménagers
3.1 Les caustiques
3.2 Le pétrole (mazout, essence, white-spirit)
1 L'intoxication barbiturique

Dose toxique chez l'enfant : plus de 2 cg/kg pour le plus utilisé des barbituriques : le gardénal. Les perturbations cellulaires provoquées par les barbituriques sont fonctionnelles et réversibles : après élimination de ceux-ci, la cellule nerveuse retrouve son intégrité. Mais dans l'immédiat, la dépression des centres bulbaires est responsable de troubles respiratoires et de troubles circulatoires qui font toute la gravité de cette intoxication ; ces troubles entraînent une acidose gazeuse et métabolique qui, fait propre aux barbituriques, freine l'élimination de ces derniers. Le traitement comporte donc deux volets : assurer les fonctions vitales ; éliminer le toxique en combattant l'acidose. L'élimination du toxique s'adresse à des techniques différentes en fonction de la nature des barbituriques. Il est capital de déterminer au préalable s'il s'agit de barbituriques à action rapide (type Penthotal) et d'élimination à 80 % hépatique, ou de barbituriques à action lente (type Gardénal) et barbituriques à action immédiate (type Allo et Amobarbital) dont le métabolisme se rapproche de celui des barbituriques rapides.

1.1 Diagnostic

Le diagnostic d'intoxication barbiturique est en règle facile. Il s'agit d'un coma calme, normo ou hypothermique, avec hypotonie globale et aréflexie tendineuse, sans signe neurologique en foyer. Quelques signes viennent volontiers emporter la conviction : rougeur de la face, la sudation exagérée, l'hypersialorrhée et les signes d'encombrement broncho-pulmonaire, enfin la survenue éventuelle de pauses respiratoires.
Le diagnostic est confirmé par la recherche du toxique dans les urines (réaction de Parri) et son dosage dans le sang permettant d'évaluer le degré d'intoxication.

1.2 Traitement

- l'enfant n'est pas dans le coma, l'ingestion est inférieure à 2-3 heures et le réflexe nauséeux reste intact : évacuation du contenu gastrique.
- l'enfant est dans le coma : transfert dans une unité de soins intensifs, avec 2 objectifs : maintien de l'homéostasie (ventilation artificielle si nécessaire, lutte contre le collapsus) et élimination du toxique par diurèse osmotique alcaline (perfusion de soluté bicarbonaté à 14  %°, soluté glucosé à 10 %, mannitol à 10 %). S'il s'agit d'une intoxication par des barbituriques lents à dose massive, l'épuration extranérale est indiquée.
2 Intoxication salicylée

Dose toxique chez l'enfant : 10 cg/kg (les comprimés pour l'adulte sont de 0,50 g, et l'aspirine est un médicament courant qui passe pour anodin).

Physiopathologie : on distingue artificiellement 3 points d'impact physiologiques :

    *
      phase neurologique : l'aspirine entraîne par stimulation directe des centres respiratoires une hyperpnée profonde et ample avec alcalose respiratoire majeure. Il existe également des troubles de la conscience et des convulsions.
    *
      phase hépatique, 6 heures après l'ingestion : baisse du complexe prothrombique associé à une action plaquettaire directe pour entraîner des hémorragies ; augmentation de la glycogénolyse aboutissant à une hyperglycémie et une glycosurie ; production massive d'acides organiques par blocage enzymatique au niveau du cycle de Krebs avec cétose et acidose métabolique.
    *
      phase rénale avec protéinurie, glycosurie.

2.1 Signes cliniques

- hyperpnée de grande amplitude, accompagnée d'autres signes diversement associés : hyperthermie responsable parfois du renforcement des doses, sueurs abondantes, signes de déshydratation, vomissements parfois sanglants, convulsions et troubles de la conscience.
- diagnostic à la bandelette : phénistix + dans l'urine et dans le sang confirmant la présence de salicylés.
- dosage de la salicylémie dans le sang
- acidose métabolique, alcalose gazeuse.

2.2 Traitement

Dans l'intoxication vue précocement : évacuation du contenu gastrique.
Dans l'intoxication vue plus tardivement : lutte contre l'acidose métabolique par injection de Bicarbonate, lutte contre l'alcalose gazeuse et l'hyperventilation par intubation et ventilation artificielle, réhydratation veineuse, lutte contre les convulsions par Diazepam IV ; prévention d'une tendance hémorragique par hypoprothrombinémie par vitamine K1, et si l'enfant saigne par du P.P.S.B. ; épuration extrarénale dans les formes graves, anuriques.
3 Intoxication par les produits ménagers
3.1 Les caustiques

La gravité des intoxications par caustique dépend directement de la nature du produit, dans la mesure où la quantité ingérée est presque toujours minime en cas d'ingestion accidentelle.
L'évacuation gastrique est formellement contre-indiquée afin de ne pas aggraver les lésions ; par contre, il faut réaliser une fibroscopie oesogastrique au tube souple afin de faire le bilan exact des lésions oesophagiennes et/ou gastriques. La présence ou l'absence de lésions buccales ne présentant pas de parallélisme avec les lésions endoscopiques, il ne semble pas légitime de réserver les indications d'endoscopie aux seuls cas avec brûlure oropharyngée. L'indication de la fibroscopie existe donc devant toute ingestion et même suspicion d'ingestion de produits réputés caustiques.
L'eau de Javel diluée et même concentrée, fréquemment en cause ne semble pas présenter de risque caustique sérieux. Seules les ingestions volontaires et massives justifient la pratique d'une endoscopie.

Les lessives pour lave-vaisselle sont en règle peu caustiques. Il en est tout autrement des ingestions d'acide, de base forte et divers produits basiques de nettoyage (Destop). En cas d'oesophagite ulcérée, une nutrition parentérale est mise en route le temps de la cicatrisation des lésions muqueuses.
Ce type d'intoxication peut être redoutable par ses séquelles à type de sténose oesophagienne et cicatricielle.
3.2 Le pétrole (mazout, essence, white-spirit)

Ces produits sont dangereux parce qu'ils passent très facilement dans les voies respiratoires, lorsqu'ils sont avalés par l'enfant. Ils vont provoquer des lésions pulmonaires (oedème aigu du poumon, foyers d'atélectasie).

Traitement
Pas d'évacuation gastrique : antibiotiques pour prévenir une surinfection pulmonaire ; surveillance radiologique des poumons.
Les brûlures chez l'enfant
M. Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 29 février 2000

1 Notions générales
2 Bilan clinique
3 Conséquences de la brûlure
   

4 Traitement
4.1 Sur les lieux de l'accident
4.2 Transférer à l'hôpital...

1 Notions générales

70 % des brûlures de l'enfant sont des accidents domestiques, par ébouillantement, touchant plutôt le garçon entre un et trois ans.

La mortalité est actuellement de 1 %, essentiellement due aux infections et complications métaboliques secondaires
2 Bilan clinique

On doit envisager de nombreux paramètres :

- La profondeur :

    * La brûlure superficielle (érythème, phlyctène) est très douloureuse, avec un sous-sol rouge.
    * La brûlure intermédiaire (phlyctène, sous-sol blanc piqueté de rouge) n'est que modérément sensible.
    * La brûlure profonde est totalement insensible, il n'y pas de phlyctène.

- La surface : la classique règle des neuf n'est pas valable chez l'enfant en raison essentiellement de la surface représentée par l'extrémité céphalique (la face représente à 1 an 7 % contre 3,5 % chez l'adulte). Elle reste cependant utile sur les lieux de l'accident.

- La localisation : toutes les brûlures péri-orificielles, péri-articulaires, au niveau des ébauches des glandes mammaires et les brûlures respiratoires sont graves et nécessitent à priori une hospitalisation.

- L'agent : les liquides bouillants représentent l'agent causal le plus fréquent. Les brûlures électriques sont de surface réduite mais sont des brûlures profondes. Leur indolence ne doit pas rassurer, il s'agit en général de brûlures à traiter chirurgicalement.

- Le terrain : bien entendu, toute tare ou maladie ne font qu'aggraver le pronostic.

3 Conséquences de la brûlure

- L'infection surperficielle est obligatoire. Elle doit être diminuée par des règles d'asepsie draconiennes.
Generalisée (bactérienne, septicémie), elle peut mettre en jeu le pronostic vital.

- Les troubles hydro-électrolytiques
La perte du plasma, l'oedème local vont entraîner un état de choc qui, s'il n'est pas levé, peut entraîner une insuffisance rénale. Les vomissements, l'atonie digestive, le froid vont augmenter ces troubles entraînant à plus long terme une perte pondérale, une dénutrition, des ulcères de stress.

- La cicatrisation : la peau est toujours anormale, moins élastique, pouvant se rétracter, gênant la fonction (chéloïde, bride).

- Les troubles esthétiques et psychologiques

4 Traitement
4.1 Sur les lieux de l'accident :

- Enlever les vêtements (les liquides chauds dans les vêtements ne font qu'aggraver la profondeur de la brûlure avec le temps).
- Evaluer la surface,
- Réchauffer (draps propres, couvertures)
- Calmer la douleur,
- Laver abondamment à l'eau courante en cas de brûlure chimique
4.2 Transférer à l'hôpital toute brûlure dépassant 5 % de surface corporelle.

Si l'enfant est en état de choc ou vomit, s'il apparaît prostré.
- Dès l'arrivée à l'hôpital, après prise des constantes (tension artérielle, pression veineuse centrale, ionogramme, glycosurie, albuminurie) trouver la bonne voix veineuse pour perfuser, poser une sonde vésicale avec diurèse horaire.
- Les perfusions doivent amener la ration hydrique quotidienne en y ajoutant les pertes secondaires à la brûlure (moitié plasma, moitié macro-molécules et bicarbonate à 14 %°. Selon la formule, 2 cm3 x le % de la surface X le poids de l'enfant. La moitié des pertes secondaires à la brûlure doit être perfusée dans les huit premières heures.
- Les troubles métaboliques doivent être évités d'emblée à l'aide d'une nutrition entérale ou parentérale, lutte contre la déperdition thermique.
- Le traitement contre l'infection réside essentiellement dans l'asepsie, le rappel des vaccinations. les antibiotiques par voie générale ne doivent être utilisés qu'en cas de bactériémie ou de septicémie.
- Le traitement local dépend de la topographie des brûlures. On préfère l'exposition à l'air dans les brûlures des grandes surfaces, sans appui, tandis que les pansements gras seront préférés au niveau des extrémités, des zones d'appui. Il faut savoir exciser chirurgicalement précocement les brûlures électriques, ou les brûlures du troisième degré.
En conclusion :

Il s'agit d'un véritable problème de santé publique, insister sur la prévention à domicile (ne pas laisser un enfant seul en bas âge jouer avec les robinets d'eau chaude, dans une cuisine, mettre les caustiques hors de portée, protéger les prises de courant, vérifier son installation électrique,...)
Syndrome de la mort subite du nourrisson (M.S.N)
M. Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 2 mars 2000

1 Définition
2 Incidences et facteurs épidémiologiques
2.1 Facteurs propres de l'enfant
2.2 Facteurs familiaux - risques de récurrence
2.3 Facteurs socio-économiques
2.4 Circonstances favorisantes
   

3 Conduite à tenir devant une M.S.N
4 Prévention
4.1 Pathogénie
4.2 Les conseils de puériculture
4.3 Le monitorage
Objectifs

1. Donner la définition du syndrome et la critiquer.

2. Donner les notions épidémiologiques de ce syndrome.

3. Décrire le malaise grave inopiné du nourrisson.

4. Donner les intérêts de l'autopsie.

5. Décire la conduite à tenir devans une MSN.

6. Donner les théories pathogéniques les plus admises et leurs conséquences pratiques.

7. Citer les indications actuellement retenues pour "monitorer" un enfant.

8. Citer les examens à pratiquer chez un enfant ayant présenté un "malaise".

1 Définition

Le syndrome de la M.S.N est défini comme le décès soudain d'un jeune enfant, inattendu de part son histoire, demeurant inexpliqué malgré les examens réalisés après la mort. L'autopsie complète est indispensable au diagnostic car elle permet de différencier les morts subites explicables (l'étude des circonstances entraînant le décès ou l'autopsie retrouve la cause de la mort) et les morts subites inexpliquées (ni l'étude des antécédents, ni l'autopsie ne permettent de retrouver une cause évidente). Ainsi, en l'absence d'investigations, une mort subite ne doit pas être considérée comme inexpliquée.

On rapproche du syndrome de la M.S.N, les malaises graves inopinés du nourrisson (M.G.I.N) ou ALTE Syndrome (Apparent Life Threatening Event). Il s'agit de la survenue inopinée d'un accès de pâleur, cyanose, apnée, hypo ou hypertonie, suffocation, malaise ayant nécessité ou non des gestes de réanimation, et ayant mis en jeu le pronostic vital de manière immédiate, aux yeux de l'entourage, à l'exclusion de l'évolution terminale d'une maladie déjà connue.

2 Incidence et facteurs épidémiologiques

Ainsi définie, la M.S.N est, dans les pays industrialisés, la circonstance la plus fréquente de la mort du nourrisson dans la période postnéonatale (fin du premier mois - fin de la première année). En France, en 1990, la mortalité infantile est de 7,3%°°, la mortalité postnéonatale est de 3,8 %°,, la mortalité liée à la MSN est de 2 %°. Cela représente entre 1500 et 2000 cas par an. L'incidence moyenne des MSN varie entre 1 et 3%° naissances vivantes. Elle a tendance à diminuer depuis 1994, peut-être à la suite des recommandations de couchage des nourrissons.
Il s'agit donc non seulement d'un drame familial, mais aussi d'un problème de santé publique.

Différentes enquêtes épidémiologiques ont tenté de définir des facteurs de risque :
2.1 Facteurs propres à l'enfant

Le premier élément est l'âge du décès puisque ce syndrome survient avec un maximum très net de fréquence entre 2 et 4 mois. Le garçon est plus touché que la fille. Le risque de M.S.N serait plus élevé lorsque le poids de naissance est plus faible (incidence de 6,5 à 13 %°° lorsque le poids de naissance est inférieur à 1800 g) et de ce fait est augmenté en cas de prématurité, de grossesses multiples, d'antécédents d'hospitalisation en unité de soins intensifs en période néonatale. Le risque est également plus élevé en cas de dysplasie broncho-pulmonaire.

2.2 Facteurs familiaux - risque de récurrence

Le risque de récurrence de M.S.N au sein d'une même fratrie apparaît variable d'une étude à l'autre (de 2 à 10 fois plus), mais a été surestimé. Le risque est par contre multiplié de façon beaucoup plus certaine par 2 à 4 chez les jumeaux d'enfants morts subitement, et serait particulièrement élevé chez ceux dont le poids de naissance était inférieur à 2000 g.

2.3 Facteurs socio-économiques

Les facteurs socio-économiques sont controversés et non spécifiques. La M.S.N serait plus fréquente parmi les classes sociales défavorisées, lorsque la mère est jeune, célibataire, avec une fécondité élevée et un écart intergénésique faible. Les enfants nés de mères héroïnomanes auraient un risque plus élevé.

2.4 Circonstances favorisantes

Les circonstances du décès liées à la M.S.N sont habituellement stéréotypées. Un nourrisson en parfaite santé, couché normalement quelques heures plut tôt, est retrouvé mort dans son berceau. Le plus souvent, il est en décubitus ventral, la face appuyée sur l'oreiller, lequel est taché d'un peu de mousse plus ou moins rosée, voire d'un peu de liquide gastrique. La mort est toujours silencieuse : elle n'est précédée d'aucun cri, d'aucun pleur. Ce syndrome serait plus fréquemment rencontré en hiver et au printemps. Il est parfois retrouvé dans les jours précédents, la notion de privation de sommeil, de modification des rythmes de vie habituels, d'infection des voies respiratoires supérieures ou de la prise d'une médication sédative (contre-indication des PHENOTHIAZINES chez le nourrisson).

3 Conduite à tenir devant une M.S.N

Le médecin appelé par la famille n'arrive que lorsque le drame est joué et ne peut que constater le décès ou accomplir des gestes souvent illusoires de réanimation. La prise en charge de la famille est alors capitale afin de la déculpabiliser. La M.S.N constitue pour les parents un traumatisme psychique majeur ; ignorance du problème de la M.S.N, chagrin, sentiment de culpabilité sont les dénominateurs communs de tous les parents touchés par ce drame.

L'examen du corps du bébé en présence des parents a pour but de rechercher un certain nombre de symptômes : ceux qui apprécient l'heure du décès (rigidité, taches de lividité), ceux qui orientent sur une cause possible (éruption, purpura, signes de déshydratation, température rectale, traces de sévices), enfin ceux qui ne peuvent être retrouvés qu'à ce moment là et qui risquent d'être oubliés secondairement (heure du dernier biberon, circonstances de découverte, pathologie des jours précédents, médication, position du corps au moment où il a été trouvé mort, gestes de réanimation déjà pratiqués).

Le médecin peut d'emblée envisager que la mort est suspecte ; il refuse dans ce cas de signer le certificat de décès et il est réalisé une autopsie médico- légale. Dans les autres cas, le médecin doit impérativement proposer une autopsie médicale et s'efforcer d'en obtenir la réalisation. Depuis 1987, il a été confié aux C.H.R toute la gestion concernant le problème de la M.S.N et notamment le transport des corps et les autopsies, sans participation financière des familles.

Trop rarement pratiquée, l'autopsie confirme que la mort subite est un syndrome hétérogène qui peut se diviser en trois sous-groupes :

    *
      découverte d'une cause évidente qui explique le décès (de 5 à 44 % selon les études),
    *
      il y a une explication possible (20 %),
    *
      il n'y a vraiment aucune explication (de 10 à 90 % selon les équipes).

L'autopsie a aussi ses limites :

    *
      les anomalies constatées sont volontiers discrètes et non spécifiques telles des lésions inflammatoires minimes au niveau des voies respiratoires supérieures et inférieures ;
    *
      il faut tenir compte des manoeuvres éventuelles de réanimation dans le diagnostic éventuel d'une inondation bronchique d'origine digestive.

4 Prévention
4.1 Pathogénie

Depuis toujours on a essayé de trouver une cause à la M.S.N. De multiples hypothèses pathogéniques ont été proposées (cf. Tableau) ; en fait les hypothèses émises à un moment donné sont le reflet de publications de la ou des disciplines qui sont les promoteurs dominants de ces recherches à ce moment là.

Ainsi pendant des années, on a pensé pouvoir isoler une entité liée aux apnées du sommeil à la suite des travaux des électro-encéphalographistes et des néonatologistes. Les apnées peuvent être obstructives ou bien liées à l'inhibition de la commande centrale, en particulier chez le prématuré. En fait, la respiration d'un nouveau-né est presque toujours irrégulière et les spécialistes en étudiant la fréquence, la durée des apnées, leur retentissement sur le rythme cardiaque et la pression en oxygène du sang (oxy-cardio-respirographie) ne sont pas parvenus à donner un pronostic aux différents rythmes décelés.

Plus récemment, on a évoqué un dysfonctionnement du système nerveux autonome et un reflux gastro-oesophagien. Ce dernier serait susceptible d'entraîner un décès soit par mécanisme respiratoire (fausse-route, spasme laryngé, apnée réflexe) ou cardiaque (réflexe vagal avec bradycardie à point de départ oesophagien).

La conception actuelle est orientée vers un aspect plurifactoriel de l'accident mortel. Il n'existe pas une seule cause pour expliquer la M.S.N mais plusieurs facteurs isolés ou associés, qui peuvent survenir à un moment donné chez un enfant donné, pour entraîner la mort par des mécanismes variés.

TABLEAU : Causes et mécanismes principaux impliqués dans les MSN et les MGIN

CAUSES
   

MECANISMES POSSIBLES

1 Infectieuses

- Virus (VRS) chlamydia
- Coqueluche
- Infections bactériennes
- Clostridium
   


Apnées centrales
Bradycardie
Collapsus
Phénomènes toxiniques

2. Digestives

- RGO
- Achalasie de l'oesophage
- IIA, volvulus intestinal intermittent
   


Fausses routes
Apnée réflexe
Bradycardie vagale

3. Respiratoires

- Rhinopharygites
- Bronchoalvéolites
- Malf. et obstructions ORL
- Compression trachéale
   


Apnées centrales
Fausses routes
Apnées obstructives
Apnées obstructives

4. Cardiaques

- Myocardites virales
- Cardiomyopathies métaboliques
- Malformations
- Troubles du rythme
- Hyperréflectivité vagale
   


Asystolie
Insuffisance cardiaque, collapsus
BAV
Fibrillation ventriculaire
Bradycardies, syncopes

5. Neurologiques

- Méningites - Encéphalites
- Hypoventilation alvéol. centrale
- Crises épileptiques
- Hématome sous-dural
- Troubles de la déglutition
   


Apnées centrales
Apnées centrales
Apnées obstructives
Convulsions
Fausses routes

6. Accidents - Traumatismes

- Asphysies accident
- Intoxications : médicaments, CO
- Infanticide
- Syndrome de Münchausen
   


Apnées
Anoxie
Traumatisme crânien
Asphysie

7. Métaboliques

- Hypoglycémie
- Hypocalcémie
- Anomalies enzymatiques
   


Convulsions
Apnées
Myocardite, troubles du rythme, Blocage énergétique intra-cellulaire

8. Diverses

- Hyperthermie majeure
- Déshydratation
- IPLV
   


Apnées, convulsions
Collapsus, troubles du rythme
Choc anaphylactique

Il s'agirait donc plus d'une pathologie de fonction que d'organe avec anomalies des mécanismes de régulation de l'homéostasie. A l'âge de prédilection de la M.S.N, il se produit une multitude de changements concernant notamment les rythmes de veille et de sommeil, l'alimentation, les relations psycho-affectives avec l'environnement, les mécanismes de défense contre l'infection, les influences respectives des systèmes sympathique et parasympathique...
4.2 Les conseils de puériculture

La position ventrale pendant le sommeil étant maintenant bien identifiée comme facteur de risque, il est recommandé de coucher les nouveau-nés au mieux sur le dos, sinon sur le côté. Ce simple conseil a permis de diminuer significativement le taux de MSN dans les pays où cette consigne a été généralisée.

4.3 Le monitorage

Nous ne disposons pas d'examens complémentaires suffisamment prédictifs pour les fratries de M.S.N ; une prévention possible peut être faite en surveillant la respiration et la fréquence cardiaque en permanence chez certains enfants à l'aide d'un moniteur cardio-respiratoire. Si l'utilisation du monitorage à domicile ne prête que peu à discussion dans le cas de malaise grave du nourrisson, du jumeau dont le frère est décédé de M.S.N, l'indication est plus nuancée dans les fratries de M.S.N.
Il apparaît en effet que le monitorage n'est pas un moyen de prévention mais un moyen de surveillance ; il n'est pas prouvé qu'il y ait un facteur familial ; très souvent l'indication est psychologique pour rassurer les parents inquiets. Dans cette voie, il faut se méfier des informations trop largement diffusées qui conduiraient à inquiéter inutilement la population et à prescrire abusivement le monitorage. L'indication doit en rester exceptionnelle et n'être posée qu'après étude des données apportées par l'anamnèse, l'analyse clinique et les données des examens paracliniques (cardio-respirographie en particulier).
Le monitorage est pris en charge par les centres de référence au C.H.R. Il va durer plusieurs mois, se poursuivant au domicile et nécessitant une information des parents et une surveillance, surtout les premiers jours, grâce à une puéricultrice passant dans les familles pour les tranquilliser et éviter ainsi les alarmes techniques. Dans l'ensemble, il rassure les familles et est bien accepté.
Parallèlement une association de parents ayant perdu un enfant de mort subite s'est créée (Association Naître et Vivre) pour apporter un soutien supplémentaire aux familles et aider les équipes médicales dans leurs recherches.
Prise en charge d'un enfant handicapé
B. Pialoux

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 1er mars 2000

1 Les soins médicaux
1.1 Cabinets libéraux
1.2 Structures dépendant du Ministère des Affaires Sociales
2 Scolarité et éducation
2.1 Age inférieur à 3 ans
   

2.2 Age supérieur à 3 ans
3 Aide sociale et financière
3.1 Aide sociale
3.2 Aides à incidence financière
Conclusion

Quand un enfant est porteur d'un handicap définitif ou transitoire le médecin doit, à son sujet, se poser trois ordres de questions :

    *
      Médicales : à qui l'adresser pour la meilleure prise en charge médicale, diagnostique et thérapeutique ?
    *
      Educatives : à quel milieu éducatif et scolaire le confier, en plus de sa famille, pour lui donner les conditions optimum de développement ?
    *
      Sociales : quelles sont les aides financières et sociales prévues pour l'enfant et sa famille ?

1 Les soins médicaux

En cas de handicap d'origine déficitaire unique (un viscère ou une fonction seulement en cause)(1) ne nécessitant l'intervention que d'un praticien et d'un auxiliaire médical, l'orientation vers le spécialiste médical se fait selon des circuits bien rodés pour tous : cabinet libéral, service hospitalier ou centre spécialisé pour handicap visuel, auditif, intellectuel, psychologique.

1 : Selon la classification de l'OMS, il faut différencier : la déficience : atteinte viscérale ou fonctionnelle. Par exemple amputation de membre, diabète, trouble de mémoire, pathologie oculaire, qui font l'objet de soins médicaux et chirurgicaux. L'incapacité conséquence de la déficience dans la vie quotidienne : difficultés à marcher, à apprendre, à voir, à parler, qui font l'objet de rééducation fonctionnelle, d'appareillage et d'aides techniques. Le handicap, conséquence de l'incapacité, dans la vie sociale : difficultés à communiquer, à travailler, à déambuler de façon autonome, à gérer ses biens... qui font l'objet de réponses sociales, telles que aides financières, scolarité adaptée, adaptation de l'environnement.

En cas d'association de handicaps, de déficiences ou d'incapacités, ou en cas de handicap grave il faut faire appel de préférence à des équipes polydisciplinaires afin d'améliorer la vie de l'enfant souvent perturbée par des grandes pertes de temps entre les divers intervenants, le manque de transfert d'informations entre les milieux de santé, les avis contradictoires... Cette équipe pouvant comporter des médecins pédiatres, rééducateurs, psychiatres, neurologues..., des chirurgiens, kinésithérapeutes, ergothérapeutes, orthophonistes, orthoptistes, rééducateurs en psychomotricité, infirmières, éducateurs, auxiliaires de puériculture, psychologues, assistantes sociales, orthésistes prothésistes, bottier, enseignants, professeurs de gymnastique.

On peut alors s'adresser à :
1.1 des cabinets libéraux :

Il existe très peu d'équipes comprenant médecins et paramédicaux dans cette situation. La plupart du temps il s'agit d'auxiliaires médicaux qui se sont installés à proximité les uns des autres.
1.2 Structures dépendant du Ministère des Affaires Sociales (Santé, intégration...).
1.2.1 Structures sanitaires avec possibilité d'hébergement (hôpital ou centre de rééducation)

1.2.1.1 Les services de rééducation fonctionnelle et de réadaptation ont habituellement une équipe complète permettant de répondre aux handicaps graves ou associés. Ils assurent la prise en charge de la déficience, de l'incapacité et du handicap. Ils se soucient donc de l'évolution psychologique de l'enfant, de sa scolarité (2), de la guidance parentale.
Ils fonctionnent en soins externes, soins de jours, ou hospitalisation de semaine ou complète. L'entrée se fait directement sans accord préalable de la Sécurité Sociale, c'est le médecin responsable du service qui décide sur des critères médicaux. Le remboursement des soins incombe à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie.

2 : Les enseignants, le plus souvent, dépendent de l'Education Nationale et travaillent dans des classes séparées et adjacentes au service de soins.

1.2.1.2 Les autres services notamment de Pédiatrie, de chirurgie, en hôpital ou en maisons d'enfants à caractère sanitaire, assurent plus rarement des prises en charge polydisciplinaires. Par contre la scolarité peut parfois y être assurée.

1.2.2 Structures sanitaires sans possibilité d'hébergement

1.2.2.1 Centre d'action médico-sociale précoce (CAMSP).

Il peut être polyvalent (toute origine déficitaire) ou spécialisé (sensoriel, moteur, psychologique).

Objectifs :

    *
      Diagnostic précoce du handicap et dépistage.
    *
      Prise en charge polydisciplinaire (plus ou moins large selon qu'il est polyvalent ou spécialisé).
    *
      Avant l'âge de 6 ans.
    *
      En soins externes.

Il n'y a pas d'hébergement de nuit, pas de scolarité. Les enfants peuvent cependant être pris tous les jours. Pas de nécessité d'accord préalable. Remboursement des consultations et séances de rééducation par CPAM.

1.2.2.2 Centres Médico psychopédagogiques (CMPP).

Prise en charge du handicap dans sa composante essentiellement psychologique : les équipes comportent psychiatres, psychologues, rééducateurs en psychomotricité, orthophoniste. Ils s'adressent aux enfants de plus de 6 ans. Il n'y a pas d'hébergement. Pas de scolarité. Soins par séances prises en charge par la CPAM.
Certains CMPP ont un agrément CAMSP, ce qui permet de rendre service à des enfants plus jeunes et à prendre en compte divers autres aspects du handicap.

1.2.2.3 Services de soins et d'éducation spécialisée à domicile (SESSAD).

Il s'agit d'une équipe polydisciplinaire mobile, très souvent émanation d'un service de rééducation fonctionnelle ou d'un centre, pour le traitement des enfants à domicile, à l'école ou dans une petite structure familiale. Les âges extrêmes des enfants soignés sont du plus jeune âge jusqu'à 18 ans. Prise en charge des séances par la CPAM. Accord préalable de la CDES (voir plus loin).

1.2.3 Structures médico-éducatives

A la charnière des établissements sanitaires précédemment décrits et des établissements dépendant totalement du Ministère de l'Education Nationale, ces structures proposent une prise en charge au long cours de la totalité des besoins de l'enfant handicapé : besoins éducatifs, scolaires, rééducatifs. Elles n'assurent par contre pas les soins aigus un peu complexes. Ces structures peuvent avoir des agréments extrêmement variés (annexes) qui prennent en compte l’âge des enfants, la pathologie des enfants, les types de soins ou de rééducation ou de prise en charge proposés, les types d’hébergement. Les plus fréquemment rencontrés sont les suivants : Instituts Médico-Educatifs, etc...

1.2.3.1 Instituts Médico Educatifs (IME)

La population : essentiellement des enfants à déficit intellectuel avec ou sans problème de comportement, déficit moteur, déficit sensoriel (rarement).
Il n'y a pas d'hébergement. Il existe une scolarité spécialisée. Prise en charge CPAM avec entente préalable (CDES).

1.2.3.2 Centres pour enfants handicapés moteur (annexe 24 bis).

Très comparables à des centres de rééducation fonctionnelle mais avec une prise en charge médicale moins lourde. Ils sont en fait bien souvent une annexe d'un centre de rééducation fonctionnelle. Possibilité d'hébergement. Entente préalable de la CDES. Prise en charge CPAM.

1.2.3.3 Centres pour polyhandicapés (annexe 24 ter).

Les polyhandicapés sont des enfants associant un handicap moteur et intellectuel graves. Hébergement possible.
2 Scolarité et éducation
2.1 Age inférieur à 3 Ans :

Les possibilités sont les garderies, les crèches spécialisées ou non (s'informer des possibilités à la Direction des Affaires Sociales de son département).

2.2 Age supérieur à 3 ans :

L'orientation peut se faire avec l'aide de la Commission Départementale de l'Education Spéciale (CDES), ou par entente directe avec les établissements qui reçoivent.

La scolarité peut se faire :

    *
      en structure sanitaire : cf. au-dessus.
    *
      en milieu normal.
    *
      en établissement scolaire spécialisé dépendant du Ministère de l'Education Nationale.
    *
      à domicile.

2.2.1 En milieu normal

- Dans une classe ordinaire d'enfants non-handicapés : c'est le Directeur de l'école et l'équipe pédagogique qui estiment si l'intégration peut se faire d'emblée ou s'ils ont besoin d'aide. Dans cette dernière situation, la CDES, en collaboration avec la CCPE (Commission de Circonscription pour le Pré-élémentaire et Elémentaire) ou la CCSD (Commission de Circonscription du Second Degré), montent un contrat d'intégration en organisant les différentes aides (rééducateurs libéraux ou institutionnels notamment le RASED (3), éducateurs) apportées à l'école et à l'enfant intégré. Ce contrat d'intégration est revu chaque année.
- Dans une Classe d'Intégration Scolaire (CLIS), classe de 12 enfants maximum, tous handicapés, mais intégrés dans un établissement ordinaire. Un projet adapté à chaque enfant prenant en compte toutes ces prises en charges est réalisé avec famille et divers intervenants (SESSAD par exemple).
- Dans l'enseignement secondaire les CLIS s'appellent Section d'Enseignement Général et Professionnel Adapté (SEGPA) ou encore Section d'Education Spéciale (SES).

3 : Réseau d'Aides Spécialisées : il s'agit de petites équipes de psychologues scolaires intervenant à la demande.

2.2.2 Les établissements scolaires spécialisés de l'Education Nationale

Ces établissements publics ou privés sont souvent spécialisés pour les enfants avec difficulté intellectuelle modérée ou trouble du comportement ou pathologie bien définie (épilepsie, handicap moteur). Dans ces derniers cas les soins sont dispensés avec prise en charge CPAM. L'entrée dans ces établissements se fait avec l'avis de la C.D.E.S.
Les adresses de tous ces établissements dispensant une scolarité adaptée sont répertoriés dans trois brochures éditées par l'ONISEP (4) dans la colection réadaptation.

4 : Office National d'Information sur les Enseignements et les Professions 75635 PARIS CEDEX 13

2.2.3 A domicile

Le Centre National pour l'Enseignement à Distance (CNED) peut seul ou avec l'aide de quelques enseignants répétiteurs à domicile (enseignants spécialisés d'un SSESD ou répétiteur bénévole (auxilia) permettre une scolarité à des enfants qui ne sortent pas de chez eux. Par exemple, les enfants très gravement handicapés et justifiant d'un complément 3ème catégorie (cf. plus loin le chapitre sur avantages financiers).
3 Aide sociale et financière
3.1 Aide sociale

La Commission Départementale de l'Education Spéciale (CDES) peut aider totalement ou partiellement les parents qui le demandent, dans l'orientation scolaire et éducative de leur enfant handicapé. Les parents doivent s'adresser directement à cette commission en remplissant un dossier qu'ils trouveront soit à la CDES elle-même, soit à leur mairie, soit à Direction des Affaires Sociales de leur département, soit à la Caisse d'Allocations Familiales. La demande peut être faite aussi par le directeur de l'école. Les décisions d'orientation de la CDES s'imposent aux structures sanitaires sans possibilité d'hébergement et aux structures médico-éducatives mais ne s'imposent pas aux parents.

3.2 Aides à incidence financière

Elles sont dispensées par le département en fonction d'une décision de la CDES. Cette dernière rend son avis sur dossier, en commission plénière (la commision plénière comprend des médecins, des psychologues, assistantes sociales, enseignants, administratifs). Elle peut demander auparavant l'avis aux diverses personnes qui connaissent l'enfant, ou à des spécialistes indépendants. Ces aides financières sont obtenues après demande faite sur dossier obtenu aux endroits indiqués précédemment. Ces aides sont attribuées pour des périodes de 1 à 5 ans renouvelables.

3.2.1 Carte d'invalidité

Obtention : il faut 80% d'invalidité (selon barême édition 1993) après examen clinique par expert médical.
Avantages :

    *
      une demi part d'impôts supplémentaire pour les parents
    *
      Allocation d'Education Spéciale (AES) : 657 F par mois
    *
      gratuité de la vignette automobile si la mention "station debout pénible" est associée à la carte d'invalidité,
    *
      gratuité des transports et des personnes accompagnantes si la mention "accompagnement est justifié" est associée à invalidité,
    *
      gratuité d'un transport aller-retour par jour pour aller à l'école en transport collectif ou individuel.

3.2.2 Aide financière propre : accordée uniquement pendant les périodes où l'enfant n'est pas hébergé la nuit dans établissement spécialisé.
- allocation d'Education spéciale (AES) : obtenue à condition que l'enfant ait au moins 80% d'invalidité isolément, ou 50% d'invalidité en association avec des soins réguliers de rééducation, ou des dépenses régulières prouvées pour son éducation. L'aide financière est de 657F mensuel.
- complément 1ère catégorie : est attribué à condition que l'enfant ait besoin de l'aide d'une tierce personne d'une façon discontinue pendant la journée. Aide qui doit être supérieure à celle dont un enfant du même âge aurait besoin. L'aide financière est de 493 F mensuel.
- complément 2ème catégorie : l'attribution est faite aux parents des enfants qui ont besoin de l'aide d'une tierce personne de façon continue pendant la journée. Il s'agit donc d'enfants très gravement handicapés. L'aide financière est de 1479 F mensuel.
- complément 3ème catégorie : c'est une aide exceptionnelle attribuée aux parents qui ont pris la décision, pour l'un d'entre eux, de rester totalement à la maison pour prendre en charge eux-mêmes la quasi-totalité de l'éducation et des soins de leur enfant. Celui-ci ne doit donc pas être scolarisé en dehors de son domicile, ni subir des soins nombreux et réguliers dans une structure extra-domiciliaire. Les parents doivent aussi avoir acquis une certaine compétence dans des soins de nursing ou même infirmiers (surveillance de ventilation, aspiration trachéale, nutrition parentéale). Le certificat médical accompagnant la demande doit être obligatoirement rempli par un médecin hospitalier connaissant l'enfant. L'aide financière est de 5331F mensuel.

Conclusion

La prise en charge adaptée d'un enfant handicapé nécessite une bonne connaissance des circuits institutionnels du département d'habitation de cet enfant. La CDES et la Direction des Affaires Sociales (service PMI) sont les plaques tournantes de l'information sur ce sujet. Les familles mais aussi les médecins ne doivent pas hésiter à s'informer auprès d'eux.
Les enfants victimes de sévices
M. Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 3 mars 2000

1 Description clinique
1.1 Les lésions tégumentaires et des muqueuses
1.2 Les fractures
1.3 Les lésions crâniennes et cérébrales
1.4 Les lésions viscérales
1.5 Symptômes témoins d'une pathologie carentielle
   

2 Eléments du diagnostic et du pronostic
2.1 Le diagnostic
2.2 Le pronostic
3 Conduite à tenir en présence d'un enfant victime de sévices
3.1 Les structures assurant la protection de l'enfance
3.2 Conduite à tenir
Objectifs

1. Décrire les différentes formes de sévices à enfants.

2. Donner les caractéristiques épidémiologiques des sévices à enfant.

3. Décrire les signes cliniques, sociaux et familiaux permettant d'arriver au diagnostic d'enfants victimes de sévices.

4. Décrire les structures de protection de l'enfance.

5. Définir le rôle de l'Aide Sociale à l'Enfance et du juge des enfants en cas de sévices à enfants.

6. Décrire la conduite à tenir du médecin généraliste en cas d'enfant victime de sévices.

7. Citer différentes mesures générales recommandées pour la prévention primaire et secondaire des sévices à enfants.

Le problème des enfants victimes de sévices est déjà ancien, mais leur nombre apparaît aujourd'hui croissant, ceci étant essentiellement le fait d'un dépistage plus attentif. La fréquence exacte des faits est difficile à préciser essentiellement pour deux raisons : d'une part, la notion de sévice est sujette à interprétation et donc à variation d'incidence, suivant l'expansion que l'on donne au concept de violence à enfants ; d'autre part, le diagnostic exact n'est pas toujours porté, par méconnaissance ou ignorance des faits de la part du médecin ou des services sociaux, ou par non-déclaration, à cause de la crainte des conséquences judiciaires.
En 1997, 82000 enfants étaient estimés en danger en France : les 3/4 en risque de maltraitance, le quart réellement maltraité ; parmi ces derniers, il s'agit de violences physiques dans un tiers des cas, d'abus sexuels dans un 2ème tiers, de négligences graves et de violences psychologiques dans le dernier tiers.

Définitions : En reprenant les définitions de l’Office Décentralisé de l’Action Sociale (ODAS), on distingue :

   1. D'une part l'enfant maltraité : c'est celui qui est victime de violences physiques, cruauté mentale, abus sexuels, négligences lourdes ayant des conséquences graves sur son développement physique et psychologique.
   2. D'autre part, l'enfant en risque de maltraitance : c'est celui qui connaît des conditions d'existence risquant de mettre en danger sa santé, sa sécurité, sa moralité, son éducation ou son entretien, mais qui n'est pas pour autant maltraité.

Toutes des définitions, si précises soient-elles, ne mettent pas à l’abri d’un certain nombre de difficultés :

   1. Il n’est pas toujours possible de faire la part entre un comportement volontaire et un accident. La présence d’éléments intentionnels dans le comportement des parents n’implique pas toujours l’absence d’éléments accidentels. Il y a souvent coexistence d’éléments intentionnels et d’éléments dus au hasard. Un évènement ou un comportement, qui paraissent accidentels, peuvent être partiellement déterminés par des éléments intentionnels inconscients.
   2. Le droit de correction parentale étant reconnu dans la plupart des pays, il est souvent difficile de situer la limite entre le mauvais traitement et la correction autorisée.
   3. Pour les sévices par omission, la difficulté réside en ce que des conditions socio-économiques défavorables peuvent aboutir aux mêmes conséquences physiques que des négligences intentionnelles.
   4. Une autre difficulté est dans le fait qu’il est impossible d’éliminer l’élément subjectif dans l’appréciation de chaque cas, élément qui dépend de la psychologie, des normes éducatives et de la formation professionnelle de chaque personne amenée à s’occuper d’enfants suspects de mauvais traitements.
   5. La notion de sévice est également variable selon les cultures, les coutumes ethniques. Ce qui est considéré comme un mauvais traitement par notre culture occidentale, est considéré comme un traitement tout court par d’autres civilisations : ainsi la circoncision féminine pratiquée à la naissance ou entre 7 et 12 ans sur des fillettes originaires de certaines régions. S’il est excessif de l’assimiler à des sévices, l’OMS parle de " pratiques coutumières affectant la santé des enfants et des mères ". La présence en Europe de populations africaines surtout, où les coutumes ont encore cours, pose de délicats problèmes de compréhension transculturelle.
   6. D’autres difficultés de frontière dans la définition de sévices concernent les sévices psychologiques ou moraux. On a dit la difficulté de les repérer ; mais où commencent-ils ? Que dire des enfants déchirés entre des parents qui se les disputent ? Enjeu d’un conflit qui les dépasse, ils sont durement traumatisés. Que dire des enfants élevés dans des sectes religieuses selon des méthodes qui choquent l’opinion habituelle ?

Les sévices à enfants comportent un triple aspect :médical, social et juridique.
1 Description clinique

Le diagnostic médical de maltraitance, procède du même raisonnement que n’importe quel syndrome médical. Un enfant présente une association de symptômes qui doivent faire évoquer une maltraitance alors que, pris isolement, ils ne sont pas spécifiques.

L'enfant maltraité est habituellement, mais pas toujours, sale, négligé, ayant l'air misérable. Dans la majorité des observations, l'aspect négligé et la dénutrition concernent les enfants vivant dans une ambiance socio-économique défavorisée Mais, il existe aussi des sévices dans les milieux aisés qui sont beaucoup plus difficiles à identifier.
1.1 Les lésions tégumentaires et des muqueuses

Elles sont manifestement les plus fréquentes. Elles sont signalées dans 90% des cas et varient d'un sujet à l'autre.

1.1.1 Ecchymoses et hématomes ne sont évocateurs que par leur multiplicité et certaines localisations spécifiques : tronc, lombes, visage (en particulier du pourtour des yeux, souvent bilatéraux), cuir chevelu. Dans certains cas, leur forme et leur siège évoquent le type de traumatisme.

1.1.2 Les plaies sont très polymorphes, mais parfois permettent de suspecter l'instrument en cause : sillons circulaires secondaires à une contention par liens, plaies curvilignes dessinant la boucle de la ceinture, griffures par coups d'ongles, plaies linéaires secondaires à des coups de fouet ou de martinet, plaies par instruments tranchants ; les traces de morsure ne sont pas rares.
L'évolution rapidement favorable de ces lésions en quelques jours d'hospitalisation, impose que l'on fasse systématiquement photographier l'enfant à son arrivée pour permettre ultérieurement une éventuelle expertise médico-légale.

1.1.3 Les lésions de la muqueuse nasale se manifestent volontiers par la plaie du sillon gingival consécutive à la lacération du frein labial. Très caractéristique est la fracture du cartilage nasal complétée par une ulcération de son extrémité avec fonte de la cloison et affaissement de la pyramide nasale.
Les lésions des organes génitaux externes (O.G.E) ne sont pas exceptionnelles. On a décrit la striction de la verge par un lien destiné à empêcher l'énurésie.

1.1.4 L'alopécie se présente sous forme d'une plaque pseudopéladique ou de zones de raréfaction de la chevelure secondaires à des arrachements brutaux et répétés des cheveux.

Toute lésion disparaissant en milieu hospitalier et réapparaissant en milieu familial doit être tenue pour suspecte.

1.2 Les fractures

Les fractures sont, après les lésions tégumentaires, les lésions les plus fréquemment rencontrées. Leurs caractères cliniques et radiologiques sont fonction de l'âge de l'enfant.

1.2.1 chez le nourrisson : la déformation grossière d'un membre est exceptionnelle, on note tout au plus un gonflement, une impotence ou une douleur à la mobilisation. La latence clinique est bien souvent totale ; c'est pourquoi il est très important de faire pratiquer une radiographie systématique du squelette, non seulement devant tout signe clinique pouvant évoquer une fracture mais devant tout nourrisson porteur de lésions cutanées suspectes, ou dont l'état général ou les conditions d'environnement laissent craindre la possibilité de mauvais traitements.

Les lésions osseuses particulières au nourrisson que l'on peut découvrir, ont été décrites sous le nom de syndrome de Silverman. Cet ensemble lésionnel comporte des fractures multiples, d'âges différents, le plus souvent négligées, qui se répartissent en fractures diaphysaires banales, arrachements métaphysiques, décollements périostés avec hématomes sous-périostés. Ces deux derniers aspects particuliers s'expliquent par la structure de l'os en croissance et par les mécanismes que l'on pense être responsables de ces fractures :

    *
      les arrachements métaphysaires : le périoste à cet âge est solidement fixé par ses fibres sur la métaphyse et le cartilage épiphysaire des os longs. Lors de traumatismes indirects par torsion, élongation, broiement, striction forcée au niveau des articulations, ces fibres très solides ne sont pas déchirées, mais arrachent des fragments de métaphyse plus ou moins importants : petits arrachements métaphysaires cunéiformes ou arrachements métaphysaires complets.
    *
      les décollements périostés avec hématome sous périosté. Le périoste étant très richement vascularisé, des fractures diaphysaires non immobilisées sont à l'origine d'hémorragies sous périostées qui peuvent prendre un volume considérable si les traumatismes se répètent. Ces hématomes finissent par se calcifier de dehors en dedans réalisant un véritable manchon sous périosté. Bien immobilisées, ces fractures consolident sans problème et laissent très peu de séquelles.

1.2.2 Chez le grand enfant : les fractures n'ont aucun caractère spécifique. C'est devant leur association à d'autres lésions significatives ou la découverte radiologique de cals de fractures anciennes qu'on sera amené à envisager la possibilité de mauvais traitements.

1.2.3 Enfin, quelque soit l'âge de l'enfant : on peut rencontrer deux types de fractures qui sont toujours secondaires à un traumatisme direct :

Les fractures du crâne : fracture unique ou fractures multiples réalisant un véritable puzzle, et c'est l'absence de traumatisme invoqué qui fait soulever dans leur cas l'hypothèse d'une brutalité volontaire ou d'une négligence inavouée ;

Les fractures de côtes : elles peuvent être associées à une détresse respiratoire mais le plus souvent, elles sont muettes cliniquement et ne sont découvertes que par la radiologie systématique du squelette

1.3 Les lésions crâniennes et cérérales

Il s'agit le plus souvent d'hématomes sous-duraux, se rencontrant surtout au cours de la première année de vie.
Leur symptomatologie est caractéristique :

    *
      augmentation du volume du crâne,
    *
      convulsions,
    *
      vomissements,
    *
      troubles de la conscience,
    *
      hémorragies rétiniennes.

Diagnostiquer un hématome sous-dural chez un nourrisson doit systématiquement faire rechercher l'origine traumatique. Celle-ci est évidente lorsqu'il y a une fracture du crâne, des fractures d’os longs ou de côtes ou des hématomes associés. Elle est en revanche plus difficile lorsque les séquelles neurologiques restent isolées. Il ne s'agit pas alors d'enfants frappés à proprement parler, mais d'enfants violemment secoués. Du fait de la faiblesse des muscles du cou et du poids relativement élevé du crâne chez le jeune nourrisson, la tête balotte dans tous les sens, entraînant la rupture des "veines ponts", formations fragiles qui se dirigent du cerveau à la dure mère.

Que ce soit un traumatisme crânien direct ou des secousses, une hémorragie méningée et des contusions cérébrales plus ou moins étendues peuvent également se voir. Une échographie transfontanellaire et surtout un examen tomodensitométrique crânien ou une imagerie par résonance magnétique cérébrale, permettent de visualiser toujours ces lésions, voire de les dater.

Leur pronostic est grave, mettant en jeu la vie à court terme et laissant des séquelles définitives, neurologiques, sensorielles ou psychologiques.
1.4 Les lésions viscérales

Elles sont exceptionnelles et très diverses selon la nature et le siège du traumatisme.

1.5 Symptômes témoins d'une pathologie carentielle

1.5.1 Il peut s'agir d'un retard staturo-pondéral

Les enfants maltraités sont très souvent dénutris. Cette dénutrition peut être isolée et rendre le diagnostic difficile. On y parviendra devant un bilan étiologique négatif et la reprise spectaculaire du poids pendant quelques jours d'hospitalisation.
Il existe également des enfants qui ne grandissent plus, c'est-à-dire chez lesquels on note un fléchissement ou une cassure nette de leur courbe de poids et de taille contemporaine d'un évènement ou d'une modification de la vie familiale.
En l'absence de prise de poids, ces enfants peuvent devenir de véritables nains, ce nanisme psycho-social correspond en effet à un blocage de sécrétion de l'hormone de croissance. A l'opposé, une séparation avec le milieu familial ou une prise en charge appropriée entraîne un rattrapage tout à fait spectaculaire de la croissance.

1.5.2 Il peut s'agir d'un retard du développement psychomoteur

Ce sont les nourrissons qui ont un retard de toutes leurs acquisitions psychomotrices que l'on aurait vite fait d'étiqueter encéphalopathes. Ils ont le regard triste, une tonsure occipitale témoin d'un maintien au lit permanent. Ils ont parfois des signes d'hospitalisme (balancement). Là encore, on peut assister à une récupération tout à fait spectaculaire après séparation du milieu familial.

1.5.3 Il peut s'agir de troubles du comportement parfaitement isolés, sans retard dans le développement, troubles qui peuvent ne pas être spectaculaires ou même trompeurs.
- la conduite d'évitement : ce sont des nourrissons qui se détournent du visage de leur mère alors qu'en revanche, ils pourront facilement accrocher un regard étranger. Ce comportement non gratifiant et même agressif pour la mère ne fait que renforcer la difficulté pour celle-ci de rentrer en relation avec son enfant.
- la vigilance gelée : il s'agit d'un comportement qui dénote une maîtrise, un contrôle des affects tout à fait prématuré et anormal eu égard à l'âge des enfants. Ce sont notamment des petits nourrissons qui sont capables d'arrêter de rire ou de pleurer, de suspendre leur activité, de rester de longs moments sans bouger, habituellement après une remontrance maternelle.
Conduite d'évitement et vigilance gelée aboutissent dans la deuxième et la troisième année de vie à des enfants totalement apathiques et inhibés s'isolant sur eux-mêmes. Ils auront tendance à garder ce même type de comportement en collectivité et sont incapables de nouer une relation de confiance aussi bien avec les enfants de leur groupe qu'avec les adultes.
- L'attachement sans discrimination : il s'agit d'un comportement qui peut être très trompeur. Ce sont en effet des nourrissons entre 1 et 2 ans qui, au lieu de pleurer et de fuir au contact d'un visage étranger, se précipite au contraire dans les bras de quiconque se trouvant là. Ce sont des enfants faciles, affectueux, gratifiant pour les soignants ; mais en fait, on s'aperçoit qu'ils sont incapables d'établir une relation suivie et vont de bras en bras sans discrimination.
- L'instabilité, l'agitation excessive, l'agressivité : ces symptômes peuvent être une autre forme d'expression d'une maltraitance psychologique et physique ajoutées.
2 Eléments du diagnostic et du pronostic
2.1 Le diagnostic

Le diagnostic de lésions traumatiques est en général établi sans difficultés. Le diagnostic de mauvais traitements est beaucoup plus difficile. Il se fonde sur trois éléments principaux :

2.1.1 le caractère et l'association des lésions : aucune lésion prise isolément n'est spécifique. Par contre, certaines localisations, certains aspects, certaines associations doivent retenir l'attention.

2.1.2 la régression des lésions : l'épanouissement de l'enfant après séparation de l'environnement habituel de l'enfant.

2.1.3 enfin, les données de l'interrogatoire : la négation de tout traumatisme ou l'aveu d'un traumatisme sans rapport avec la nature ou l'importance des lésions ; la contradiction d'un interrogatoire à un autre ; la discordance entre l'interrogatoire du père et de la mère et parfois de la nourrice ; la facilité avec laquelle on évoque la responsabilité d'un tiers (membre de la fratrie ou animal) ou un trouble du comportement de l'enfant, des troubles de l'équilibre, une fragilité capillaire, qui ne sont pas retrouvés à l'examen de l'enfant. Il faut savoir qu'un interrogatoire direct et précis des familles ou des nourrices est ressenti comme accusateur et n'aboutit en général à aucun résultat. Il rend habituellement impossible toute action thérapeutique ultérieure au sein de la famille.

2.2 Le pronostic

L'enfant victime de mauvais traitements est un enfant en danger :

    *
      il est menacé de mort : selon les statistiques, on estime à 3-4% le taux de mortalité secondaire à des mauvais traitements.
    *
      il est menacé de séquelles définitives : neurologiques, orthopédiques, dysmorphiques, staturo-pondérales et psychomotrices. Son épanouissement psychologique et affectif peut être compromis pour toujours.
    *
      enfin, il est menacé de récidives ; certaines études estiment de 50 à 60% le taux de récidives quand aucune mesure de protection de l'enfant n'a été prise. Le problème reste donc d'évaluer cette notion de danger. Or, il n'y a pas forcément de parallélisme entre l'importance des lésions somatiques et le danger encouru par l'enfant en restant dans son milieu habituel familial ou nourricier. Cette évaluation difficile nécessite un abord pluridisciplinaire de chaque cas associant médecins, travailleurs sociaux, pédo-psychiatres. On peut s'appuyer sur quatre éléments principaux :

2.2.1 Les caractéristiques propres à l'enfant :
Ce sont habituellement des enfants jeunes, de moins de 3 ans, plus souvent des garçons. Il s'agit de cas "d'enfants cibles" dont les membres de la fratrie sont normalement traités. Les motifs de cette agression élective sont parfois facilement retrouvés : enfant adultérin, enfant présentant un handicap moteur, sensoriel ou intellectuel, enfant né prématurément, séparé dès la naissance par un séjour en centre spécialisé, difficile à élever et pour lequel la mère vit un sentiment d'échec et de culpabilité ; enfant séparé longtemps ou à plusieurs reprises de son milieu familial à la suite de placements en nourrice ou en collectivité. Le retour de l'enfant dans sa famille s'accompagne toujours de troubles du comportement : anorexie, énurésie, trouble du sommeil, hostilité, manifestations auxquelles les parents répondent par une incompréhension qui peut prendre le masque d'un rejet ou de manifestations agressives.

2.2.2 La personnalité des parents : les parents maltraitants sont rarement des malades mentaux caractérisés (schizophrènes ou déséquilibrés agressifs). L'alcoolisme est fréquemment retrouvé : intoxication occasionnelle responsable d'acte impulsif incontrôlé mais qui peut se reproduire, ou intoxication chronique responsable de négligence ou d'abandon de l'enfant. La débilité mentale est fréquemment évoquée mais ce diagnostic repose trop souvent sur des éléments trop subjectifs et superficiels.
Par contre, on relève souvent dans le comportement des parents à l'égard de leurs enfants, certains traits caractéristiques : l'inaffectivité, l'intolérance à la frustration, l'incapacité de supporter les servitudes occasionnées par la présence de leur enfant ou à percevoir les besoins de celui-ci. Or, on retrouve fréquemment chez ces parents des conditions gravement perturbantes dans leur propre enfance (carence massive, dissociation familiale, placements institutionnels). Ils ont été eux-mêmes l'objet de frustration affective précoce, voire de séquelles physiques, et sont incapables d'avoir une relation satisfaisante avec leur propre enfant.

2.2.3 L'environnement socio-culturel : la majorité des enfants appartiennent à des milieux socio-économiquement défavorisés (chômage, surpeuplement, transplantation, isolement) où les situations familiales complexes sont fréquemment retrouvées (mères célibataires, concubinages successifs, avec enfants de plusieurs lits, placements multiples des enfants en institution ou chez des nourrices clandestines de mauvaise qualité).

Il apparaît cependant que les mêmes troubles de la personnalité des parents conduisent à un pourcentage de "passages à l'acte" agressifs variable selon les conditions de vie et le niveau socio-culturel. Ainsi, le surpeuplement abaisse le "seuil de tolérance" à l'encontre des manifestations d'activité ou d'agitation d'un enfant qui, dans un autre cadre de vie, seraient considérées comme tolérables. De même, lorsque la pauvreté culturelle interdit de décharger son agressivité sur un mode symbolique ou verbal, la violence devient le mode d'expression privilégié. Enfin, dans certains groupes ethniques ou sociaux, la sévérité des châtiments corporels fait partie des normes culturelles et n'implique pas nécessairement un rejet affectif.
Toutefois, il faut garder à l'esprit que la prépondérance apparente de ces familles défavorisées s'explique peut-être par le fait qu'elles sont plus exposées à la surveillance des services sociaux et de la police que les milieux plus favorisés où les sévices ne sont pas exceptionnels, et souvent plus subtils et en tout cas mieux dissimulés. C'est également dans ces milieux que l'on rencontre le plus souvent des névroses graves pouvant expliquer les troubles relationnels et les sévices.

2.2.4 Les périodes et les situations à risques
Plutôt que de rechercher à dépister des "familles à risque élevé" (approche biaisée et qui risque d'étiqueter les personnes ainsi identifiées) on insiste aujourd'hui sur les périodes ou les situations à risques dans le cycle de la vie familiale : modification du statut matrimonial, survenue d'une grossesse ou d'une naissance non désirée, changement de domicile, retour en famille d'un ou plusieurs enfants placés, déménagement, perte d'emploi, problème psychiatrique aigu.
Pris isolément, les différents indices portant sur l'enfance des parents, l'histoire de la famille, ses difficultés, l'état de santé de ses membres, les problèmes éventuels avec des énigmes n'ont peut-être pas grande signification. Mais leur regroupement dans le temps et l'espace leur donne beaucoup plus de sens et valide la notion de risque car la plupart de ces indices traduisent une demande d'aide, et il faut savoir les interpréter même a posteriori.
3 Conduite à tenir en présence d'un enfant victime de sévices

Le médecin praticien ne peut prendre une décision en face d'un enfant victime de sévices ou suspect de l'être que s'il connaît bien les organismes chargés de la protection de l'enfance, ainsi que la législation concernant ce problème.

3.1 Les structures assurant la protection de l'enfance

3.1.1 La D.A.S.

Les services concernés sont d'une part la P.M.I et d'autre part le service de l'Aide Sociale à l'Enfance (A.S.E), qui s'adresse à une population plus spécifique de familles en difficultés. Ces deux services dépendent des services départementaux de la Direction des Affaires Sociales, c'est-à-dire du Conseil Général. L'A.S.E a deux buts principaux :

    *
      procurer une aide financière matérielle et morale aux familles dépourvues de moyens suffisants,
    *
      recueillir les différentes catégories d'enfants dépourvus totalement ou partiellement de soutien familial tels que les enfants recueillis temporaires, les enfants confiés en garde provisoire ou définitive par ordonnance judiciaire, les enfants trouvés, les enfants abandonnés, les enfants dont les parents ont été déchus de la puissance parentale, les enfants orphelins.

Ce service dispose, pour exercer ses fonctions, d'établissements propres (pouponnières, internats) et d'un réseau de placements familiaux.

3.1.2 Le juge des enfants :

Il a le privilège exceptionnel et unique en droit français de se saisir, d'instruire et de juger. Il est chargé des affaires de mineurs délinquants ou en danger, c'est-à-dire des mineurs dont la santé, la sécurité, la moralité ou l'éducation sont compromises dans leur milieu familial. Il peut se saisir lui-même de tout cas qui lui a été signalé et qu'il estime être de son ressort.
Toute personne (membre de la famille, voisin, personnel de l'école, médecin, travailleur social, personnel de police), peut signaler un cas directement au juge des enfants ou mieux au Procureur de la République. Ce dernier appréciera s’il y a lieu ou non de poursuivre pénalement les parents en saisissant un juge d’instruction et informera le juge des enfants par les mesures de protection de l’enfant. Le plus souvent, les cas sont signalés par l'intermédiaire des différents services de la D.A.S.
Il existe enfin dans certains départements, des brigades de protection des mineurs. Ce sont des services spécialisés de la police judiciaire dont l'originalité est de comprendre parfois un personnel féminin dont les cadres ont une formation de travailleur social. La brigade de protection des mineurs est alertée au même titre que le juge des enfants par une personne. Elle effectue une enquête dans la famille et auprès de toute personne susceptible de connaître les conditions de vie de l'enfant, et transmet le résultat de cette enquête au Parquet.

Le juge des enfants dispose aussi de services sociaux spécialisés près des tribunaux pour enfants qui effectuent sur sa demande des enquêtes sociales approfondies, pouvant comprendre un bilan médicopsychologique. Il édicte des mesures de protection et d'assistance éducative. Il peut décider soit de remettre le mineur à ses parents, soit de le confier à un autre membre de la famille ou à toute autre personne digne de confiance, soit à un établissement d'enseignement, d'éducation, de rééducation ou de cure, soit au service de l'A.S.E.

Ces mesures peuvent s'associer à une surveillance par un service d'observation, de rééducation ou d'action éducative en milieu ouvert (A.E.M.O.). Elles ont l'avantage d'assurer la protection immédiate de l'enfant tout en cherchant à améliorer la situation familiale. Le juge des enfants peut également dans certains cas, nommer un tuteur aux prestations sociales, si celles-ci ne sont pas utilisés dans l'intérêt de l'enfant.

Dans les cas particulièrement sévères, la chambre civile du Tribunal de Grande Instance peut déchoir les parents de l'autorité parentale (art. 378 du code civil). Les mesures prises par le juge des enfants ont comme caractéristique essentielle d'être révisables à tout moment.

3.1.3 Législation répressive concernant les auteurs de sévices

Les adultes responsables de sévices à enfants peuvent être condamnés par le Tribunal Correctionnel ou la Cour d'Assises. Les peines qu'ils encourent sont variables selon la gravité des lésions de l'enfant et la nature des liens unissant celui-ci et les auteurs des mauvais traitements. Les parents responsables de sévices peuvent être condamnés à des peines d'amende ou de prison assorties ou non de sursis ; dans les cas graves, ils peuvent être, au surplus, déchus de la puissance parentale. Dans la pratique, la juridiction à l'encontre de ces parents se veut plus éducative que répressive.

3.2 Conduite à tenir

C'est rarement le médecin qui signale un enfant maltraité aux autorités responsables. Les raisons de ce mutisme sont variées :

    *
      du point de vue juridique, le médecin était autrefois pris entre deux obligations contradictoires : le respect du secret médical et l'obligation de dénoncer les crimes tentés ou consommés.
      Les articles 43 et 44 du Code de Déontologie médicale précisent que le médecin doit être le défenseur de l'enfant malade et qu'il doit mettre en oeuvre les moyens les plus adéquats pour protéger l'enfant s'il est victime de sévices ou de privations. Dans ce domaine, le secret professionnel par les personnes assujetties peut être levé (article 226.14 du nouveau Code Pénal). Le médecin n'est pas obligé de faire un signalement mais il doit prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger l'enfant, car il peut être poursuivi pour non assistance à personne en danger (articles 223.6 et 223.7 du nouveau Code Pénal).
      En pratique, un signalement est souvent adressé aux autorités administratives (DAS) ou judiciaires (Procureur de la République).
    *
      en réalité, c'est plus par méconnaissance des mauvais traitements, par répugnance d'envisager l'hypothèse de sévices qui bouleverse l'idée qu'il se fait de l'inconditionnalité des sentiments maternels, par crainte d'avoir un rôle accusateur et de se voir refuser à tout jamais l'entrée dans cette famille, par crainte d'être impliqué dans une affaire juridique, que le médecin risque d'écarter tout soupçon et de limiter son action aux soins physiques.

3.2.1 Conduite pratique :

La situation du médecin traitant est particulière, car de tous les gens qui vont s'occuper de "l'affaire", c'est le seul qui aura été choisi par la famille. Il se trouve donc dans une situation paradoxale où il doit sauvegarder l'enfant tout en essayant de garder l'écoute d'une famille en détresse. D'une manière générale, il est préférable que le médecin n'essaye pas de régler seul le problème et son action sera d'autant plus efficace qu'il se fera aider par les assistantes sociales polyvalentes, les puéricultrices et le médecin de PMI du secteur. Le service social pourra l'aider dans l'appréciation des données socio-économiques, des relations familiales et trouver certains types d'aide dont pourrait bénéficier la famille.

En fait, tout enfant maltraité est en danger de mort et dans la plupart des cas, une séparation du milieu familial, au moins temporaire, est souhaitable pour supprimer un état de crise. Le médecin traitant peut en général facilement convaincre de la nécessité d'une hospitalisation, de préférence dans un service de médecine pédiatrique, plutôt que dans un service chirurgical, car les médecins y sont plus à même d'aborder les aspects médico-sociaux et judiciaires.

L'hospitalisation répond à trois objectifs : assurer la sauvegarde immédiate de l'enfant ; permettre un diagnostic souvent difficile, à ne pas porter à la légère ; permettre au médecin traitant d'assurer son rôle auprès de la famille pour lui venir en aide sans la dénoncer puisque le passage à l'acte d'une mère ou d'un père reste malgré tout un signe d'appel. Le séjour à l'hôpital permet de se donner le temps de réfléchir, de rassembler les informations nécessaires à la prise de décision, de voir évoluer la situation sans engager l'enfant et sa famille dans une voie déterminée.

Sauf cas urgent, il faut éviter de dénoncer directement à la gendarmerie ou à la brigade des mineurs. Par contre, le médecin peut s'adresser directement au juge des enfants dont le rôle est avant tout de protéger l'enfant et non de réprimer ; une prise de contact peut débuter tôt dans une ambiance de concertation et non de dénonciation.

Ces derniers moyens de signaler un cas s'imposent lorsqu'une mesure d'autorité s'avère nécessaire pour assurer la protection immédiate de l'enfant. Elles peuvent aboutir à un retrait autoritaire de l'enfant ou à une "consigne" de l'enfant hospitalisé. La consigne est une mesure judiciaire obligeant les parents à maintenir l'enfant à l'hôpital ou en institution jusqu'à décision judiciaire.

3.2.2 Mesures thérapeutiques et préventives

La grande presse, certaines associations privées font pression pour l'exécution des mesures pénales prévues par la loi à l'égard des parents, en invoquant en particulier "l'exemplarité de la peine". En réalité, la sanction pénale à l'égard des auteurs de sévices qui peut être parfois une nécessité légale, n'est jamais une solution positive pour l'enfant ; elle permet à la société de se donner bonne conscience et d'oublier aussitôt le problème.

La D.A.S. peut mettre en place un programme d'A.E.M.O. (Action Educative en Milieu Ouvert), mais cette solution n'est possible que si la famille est consentante et s'il existe un espoir raisonnable d'amélioration. Par contre, la famille est obligée de se soumettre à une A.E.M.O. édictée par le juge des enfants.

Une séparation temporaire du milieu familial est souvent nécessaire mais n'a de sens que si, parallèlement, médecins et travailleurs sociaux en profitent pour chercher avec les parents des solutions aux problèmes qui ont abouti à une telle situation. Cette A.E.M.O devra se poursuivre bien après le retour de l'enfant au foyer, car sa situation reste longtemps précaire.

Dans les cas les plus graves, quand une séparation définitive semble inévitable, il est souhaitable que l'enfant fasse l'objet d'une procédure d'abandon afin de lui permettre de retrouver un milieu familial normal par voie d'adoption.

Prévention :

A côté de mesures sociales de portée générale (amélioration des conditions de logement, lutte contre l'alcoolisme, prévention des grossesses et des naissances non désirées, amélioration des structures sociales d'aide et de protection de la petite enfance), il existe une prévention plus spécifique dont une circulaire ministérielle de mars 1983 a rappelé les objectifs et les moyens :

    *
      observation attentive des relations parents-enfants, et spécialement de l'attachement mère-enfant dès les premiers jours de la vie, avec intervention précoce et suivie des cas d'anomalies,
    *
      aide sociale et renforcée au moment des périodes connues comme à haut risque dans le cycle de la vie familiale,
    *
      création de lieux de rencontre et d'écoute pour les parents désemparés (par exemple, service téléphonique de type S.O.S), service national d'accueil téléphonique pour l'enfance maltraitée (SNATEM) : téléphone vert n° 119
    *
      enfin, la prévention des récidives est capitale ; surtout lors du retour au foyer après placement.

Les enfants victimes d'abus sexuels
M. Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 3 mars 2000
Objectifs

1. Décrire les différentes formes possibles d'abus sexuels.

2. Donner les caractéristiques épidémiologiques des abus sexuels à enfants.

3. Citer et décrire les deux facteurs importants intervenant dans les conséquences d'une agression sexuelle.

4. Donner les conséquences habituelles de l'inceste pour l'enfant.

5. Décrire les caractères types d'une famille "à risque" d'inceste.

6. Décrire la conduite à tenir en cas d'abus sexuel extra et intra familial.

Les abus sexuels se définissent comme la participation d'un enfant ou d'un adolescent mineur à des activités sexuelles qu'il n'est pas en mesure de comprendre, qui sont inappropriées à son âge et son développement psychosexuel, qu'il subit sous la contrainte par violence ou séduction ou qui transgressent les tabous sociaux.

On distingue deux types d'abus sexuels :

   1.
      d'une part les abus extra-familiaux avec un abuseur proche de la victime ou inconnu,
   2.
      d'autre part, les abus intra-familiaux (inceste).

On peut également distinguer trois types d'abus selon la gravité de l'acte :

   1.
      abus de la sphère sensorielle, du domaine de l'excitation (manifestations d'exhibitionnisme)
   2. abus du stade de la stimulation (attouchements)
   3. abus du stade de la réalisation (tentative de viol ou viol).

Le phénomène des abus sexuels est maintenant bien connu ; il semble très fréquent puisque d'après les différentes enquêtes, il semble que l'on puisse retenir qu'une fille sur huit et un garçon sur dix sont victimes d'abus sexuels avant l'âge de 18 ans. Une fille sur 25 et un garçon sur 33 seraient victimes de viol ou d'inceste. Dans 85 % des cas, l'enfant connaît son agresseur (parent, ami de la famille, voisin) ; dans 40 % des cas, c'est le père ou celui qui joue ce rôle ; 8 fois sur 10, les abus sont répétés. La grande majorité des abuseurs sont des hommes (97 %).

Les enfants de tous âges sont concernés, garçon ou fille ; ils sont généralement âgés de 4 à 11 ans ; 22 % ont moins de 6 ans.

Chez l'adolescent et plus spécialement l'adolescente, il faut penser à des comportements incestueux devant certains actes de délinquance (fugue, absentéisme scolaire) ou lors de tentatives de suicide, ou lors de certains troubles psycho-somatiques.

Les conséquences d'une agression sexuelle chez l'enfant dépendent de plusieurs facteurs : du degré de préparation de l'enfant à un évènement de ce genre et de la réaction de son environnement s'il en parle.
- Si l'enfant a reçu une éducation sexuelle, n'a pas été effrayé par des histoires sexuelles et a un minimum de connaissances sur les agressions sexuelles, une rencontre brève avec un étranger n'aura pas d'effets sérieux et durables. D'ailleurs dans ce cas, l'enfant réagira lui-même à cette situation.
- A l'opposé, un enfant n'ayant reçu aucune éducation sexuelle, pour lequel le sexe est un sujet tabou et source de fautes et de péchés, aura plus facilement une réaction de panique suivie d'un sentiment d'anxiété et de culpabilité. Des réactions similaires peuvent apparaître si les parents ou l'environnement dramatisent l'évènement. Ainsi les réactions de la police ou de l'entourage causent souvent plus de troubles que l'évènement lui-même.

Les enfants victimes de violences sexuelles présentent souvent un choc psychologique se traduisant par de l'anxiété, un état dépressif, des cauchemars, de l'insomnie qui nécessite une psychothérapie. Mais la durée de ces troubles et leur intensité dépendent essentiellement du comportement de l'entourage.

Les incestes ont des effets plus sérieux et plus durables, surtout si l'inceste a commencé dès le jeune âge, se prolonge parfois plusieurs années, si l'agresseur est le père ou le beau-père, si l'évènement est tenu secret pendant une longue période. La victime d'un inceste est habituellement envahie par un sentiment de culpabilité et de honte qui conduit à un état dépressif et à un comportement d'autodestruction et, devenue adulte, elle présentera souvent de sérieux problèmes sexuels.

La conduite à tenir :

Il faut naturellement intervenir notamment dans tous les cas sévères mais le problème est complexe.
Dénoncer ces cas sérieux, c'est-à-dire un crime, à la Justice, entraîne systématiquement une action de routine : l'enfant va être questionné, examiné, par des policiers, des médecins, des travailleurs sociaux, des psychologues. En cas d'inceste, c'est la rupture avec la famille : l'enfant va être confié à une institution, le père emprisonné, la mère et les autres membres partagés entre le soutien à l'enfant et le soutien au père et très souvent eux-mêmes culpabilisés.
Il faut en premier tenir compte de l'intérêt de l'enfant et déjà il est recommandé que, lorsqu'un cas d'agression sexuelle est connu des autorités, une seule personne, un psychologue d’enfants, le prenne en charge.
Ce n'est qu'après une étude sérieuse du cas que la procédure criminelle de routine doit être mise en route.
L'arrestation et l'emprisonnement de l'agresseur ne doivent être considérés que dans les cas sérieux (viol) ou en vue de prévenir de nouvelles agressions. Toute intervention entraînant la rupture de la famille doit être pesée et dans cette voie les interventions constructives sous formes de surveillance des familles, de thérapie familiale peuvent être préconisées et sont souvent moins coûteuses qu'une mesure brutale de rupture.

En Angleterre : les interventions d'organismes privés ont été considérées comme une alternative valable à l'intervention d'institutions officielles. Ces organismes apportent une aide et une éducation parentale aux familles à risque. Ils ont l'avantage d'offrir une aide anonyme et discrète. Il est certes difficile d'évaluer la qualité de cette aide mais si le cas doit, par la suite, être déclaré aux autorités, les familles sont mieux informées et préparées aux conséquences.

La prévention est naturellement préférable à l'intervention succédant à l'évènement. Il faut éliminer ou réduire le nombre de personnes susceptibles de commettre de tels actes : c'est difficile.

L'amélioration des conditions de vie des familles ayant des jeunes enfants peut réduire le nombre des familles "dysfonctionnelles" qui favorisent l'inceste. La thérapie familiale et des conseils peuvent être offerts aux familles à risque.
L'éducation sexuelle est semble-t'il la meilleure méthode préventive, en abordant les problèmes sexuels en général, en éliminant les tabous qui entourent cette question et en informant l'enfant des circonstances dans lesquelles peuvent arriver les agressions sexuelles.

Hospitalisation et placement des enfants
M. Roussey

Institut Mère-Enfant, annexe pédiatrique, Hôpital sud,
BP 56129, 35056 Rennes Cedex 2
mis à jour le 1er mars 2000

1 Introduction
2 Placement des enfants
3 Mode de garde des enfants

1 Introduction

Les causes d'hospitalisation sont très variables en fonction des conditions socio-économiques, suivant l'établissement et sa spécialité, suivant les critères adoptés par le médecin traitant...

On peut cependant affirmer qu'actuellement, dans les pays industrialisés comme la France, l'hôpital répond à un double besoin :

    *
      il constitue un centre de diagnostic et de traitement (pour les cas difficiles, ce qui exclut la pathologie courante).
    *
      il permet l'hébergement temporaire pour une population déshéritée : les hospitalisations itératives, en l'absence de maladie chronique, pour "cas social" doivent attirer l'attention.

L'hospitalisation des enfants comporte deux risques :

    *
      le risque d'infection particulièrement important chez le nouveau-né et au cours des premiers mois. Ce risque doit être combattu par une discipline stricte du personnel, une architecture et une organisation maintenant bien connues. Ce risque certain ne doit pas faire proscrire systématiquement des mesures assurant le bien être : par exemple les visites des parents, la présence des mères à l'hôpital.
    *
      le risque psychologique : toute hospitalisation constitue un traumatisme pour l'enfant.

Sauf urgence, l'hospitalisation doit être accueillante. L'enfant placé dans des chambres à 2 ou 4 lits (exception faite des maladies graves ou contagieuses), les visites facilement autorisées, avec possibilité dans certains cas de loger les parents avec l'enfant ou dans l'hôpital. En cas d'hospitalisation longue, l'enfant doit avoir un minimum d'activité (école maternelle, voire même école).

L'hospitalisation doit être aussi courte que possible et théoriquement cesser dès que l'état de l'enfant ne nécessite plus de soins particuliers, même s'il n'est pas complètement guéri. Ceci nécessite de bonnes liaisons avec le médecin traitant et le service de P.M.I.

La durée d'hospitalisation est en réduction constante et, en moyenne de 3 à 8 jours, plus longue naturellement pour les "prématurés" mais beaucoup plus courte pour les enfants ayant besoin d'un "bilan".

L'hospitalisation des enfants pose des problèmes particuliers qui nécessitent leur hospitalisation dans des hôpitaux d'enfants (possibilité dans les grands centres régionaux) ou des secteurs de services spécialisés. Les différentes branches spécialisées de la pédiatrie posent évidemment la question de services spécialisés d'enfants ou de secteurs d'enfants dans des services spécialisés.

Différentes formules complètent utilement l'hôpital :

    *
      la consultation ouverte sur la collectivité et dont le haut niveau technique doit en faire l'antenne avancée de l'hospitalisation.
    *
      l'hôpital de jour peut compléter l'activité de la consultation et se développe pour certains traitements (ex : oncologie, néphrologie, hématologie, mucoviscidose).
    *
      l'hospitalisation à domicile est une autre formule qui permet de raccourcir voir d'éviter l'hospitalisation. Elle nécessite une grande coordination entre l'hôpital et le secteur.

2 Les placements d'enfants

Un enfant "placé" est un enfant déplacé, coupé de son milieu naturel, le milieu familial.
Le placement n'est donc à envisager que lorsque la famille ne peut subvenir à ses besoins, à son éducation ; l'enfant est confié pour un temps bref ou prolongé à une institution ou à une autre famille. Le placement peut avoir un caractère sanitaire ou un caractère social. En fait, les problèmes médicaux justifiant un placement sont rares et, le plus souvent, ils sont évoqués pour masquer des motifs sociaux.

L'enfant peut être confié à un établissement ou à une famille.

Les pouponnières ont pour objet de garder jour et nuit les enfants de moins de 3 ans accomplis qui ne peuvent ni rester dans leur famille ni bénéficier d'un placement familial surveillé.

Les maisons d'enfants peuvent être à caractère social (correspondent aux orphelinats d'autrefois) ou à caractère sanitaire. Elles accueillent les enfants plus âgés. Certaines sont à caractère sanitaire spécialisé : on peut y rattacher les colonies de vacances sanitaires et les établissements de cures thermales.

Le placement familial simple est une garde complète de l'enfant par une nourrice. Celle-ci doit être agréer par la D.D.A.S.S. et offrir des garanties médicale, morale et sociale. Elle ne peut avoir plus de 3 jeunes en garde, y compris le sien.

Le placement familial surveillé (type oeuvre Grancher pour les enfants de parents tuberculeux) est une institution administrative qui place les enfants dans des familles d'accueil sous le contrôle d'une assistante sociale ou d'une infirmière. Ces placements familiaux peuvent être spécialisés (enfants handicapés, toxicomanes...).

Les foyers de l'enfance existent dans chaque département pour accueillir immédiatement, observer et orienter les enfants ne pouvant être maintenus dans leur famille. Les résultats obtenus par ces placements sont médiocres. Les résultats scolaires et professionnels sont rarement bons. Quant ils atteignent l'âge de la majorité, ces adolescents font donc presque tous partie, d'entrée de jeu, des catégories sociales et professionnelles défavorisées et beaucoup ont un comportement affectif qui leur fera reproduire le modèle familial qu'ils ont connu dans leur enfance.

3 Mode de garde des enfants

Le travail des femmes (76 % des femmes ont une activité avant la naissance du premier enfant) entraîne la recherche d'un mode de garde de l'enfant pour permettre à la femme de reprendre son travail.

L'école maternelle étant désormais accessible à tous les enfants de 3 ans (et même de 2 ans), le problème se pose donc entre la fin du congé de maternité et cette entrée en maternelle. Il est bien admis que la mère est la personne la plus indiquée pour garder son enfant, le nourrir d'abord (cf. cours alimentation), favoriser son développement moteur affectif et mental (cf. cours développement mental).

Les lois sociales devraient donc favoriser le séjour des mères auprès de leur enfant pendant les deux premières années. Dans ce sens, les femmes fonctionnaires peuvent demander une mise en disponibilité de deux ans (elles gardent leur droit à retrouver leur poste mais perdent leur traitement). Plus récemment, le congé post-natal a été augmenté de deux semaines (il l'est déjà de 2 mois dans les banques) mais il s'agit de petites mesures insuffisantes car, simultanément et sans tenir compte des besoins de l'enfant, on cherche à développer d'autres systèmes.

Les crêches ont pour objet de garder pendant la journée, durant le travail de leur mère, les enfants bien portants ayant moins de 3 ans accomplis. Les enfants y reçoivent les soins nécessaires à leur développement physique et mental. Une place en crèche collective coûte cher :5200 F par mois (sur une base de 18 jours de garde) pris en charge en partie par la collectivité. De plus la crèche présente deux types de risques :

    *
      infectieux : limité actuellement pour les affections bactériennes mais encore réel pour les affections à virus : rougeole, rhume commun favorisant les otites, causes de déficits auditifs.
    *
      psychologique : car la personne qui a la charge de l'enfant, ou s'en occupe mal et l'enfant se développera mal, ou s'en occupe très bien doublant, pour l'enfant, l'image de la mère ce que dénoncent tous les psychologues.

La crêche familiale est un compromis entre la crèche collective et le gardiennage. Nous avons vu qu'il s'agissait de garde au domicile d'assistantes maternelles agréées.

La halte garderie reçoit pendant la journée pour une durée limitée de façon occasionnelle, des enfants de 3 mois à 6 ans. Ceci permet à la mère quelques occupations extérieures.

L'école maternelle accueille 45 à 55 % des enfants de moins de 3 ans. Cette solution "rend service" aux parents mais, outre que les heures d'ouverture de l'école ne correspondent pas aux heures de travail des parents (l'école est complétée par une garderie), le rythme scolaire est généralement inadapté à l'enfant. Il y a donc là une nouvelle structure à mettre en place plus importante que les crèches car, à partir de 2 ans, l'enfant peut sortir du milieu familial et trouver dans une vie collective stimulation et apprentissage.






 
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